Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public
ATAS/548/2025 du 14.07.2025 ( PC ) , REJETE
En droit
rÉpublique et | canton de genÈve | |
POUVOIR JUDICIAIRE
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A/2930/2024 ATAS/548/2025 COUR DE JUSTICE Chambre des assurances sociales | ||
Arrêt du 14 juillet 2025 Chambre 1 |
En la cause
A______ | recourant |
contre
SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES | intimé |
A. a. A______ (ci-après : l’intéressé ou le recourant), né le ______ 1948, a acquis un appartement de 3.5 pièces à Budapest pour la somme de 228'000.- forints hongrois (ci-après : HUF). Selon une estimation des autorités fiscales locales, du 6 septembre 2012, la valeur vénale de ce bien était alors de HUF 19’950'000.-.
b. Au bénéfice d’une rente extraordinaire simple d’invalidité, remplacée par une rente de l’assurance-vieillesse et survivants (AVS) le 1er mai 2013, l’intéressé a déposé, le 22 novembre 2013, une demande de prestations complémentaires
(ci-après : PC) auprès du service des prestations complémentaires (ci-après : le SPC ou l’intimé). À l’appui de cette démarche, il a produit, entre autres, une traduction certifiée conforme du hongrois d’un certificat administratif du 20 novembre 2013, aux termes duquel la valeur vénale attestée le 6 septembre 2012 n’avait pas connu de changement.
B. a. Par décision du 21 février 2014, le SPC a octroyé des PC fédérales (ci-après : PCF) et cantonales (ci-après : PCC) avec effet rétroactif au 1er novembre 2013. Selon les plans de calculs annexés, le total des dépenses reconnues excédait le total du revenu déterminant à raison de CHF 4'816.- pour les PCF, respectivement CHF 1'338.- pour les PCC, donnant ainsi droit à des prestations de CHF 402.- par mois (soit 1/12 de CHF 4'816.-) pour les PCF, respectivement CHF 112.- (soit 1/12 de CHF 1'338.-) pour les PCC. Le revenu déterminant se composait, entre autres, d’une fraction de la fortune, déterminée de la manière suivante : après avoir additionné l’épargne (CHF 2'010.90) et la fortune immobilière sise en Hongrie (CHF 85'557.75), il convenait de déduire du total (CHF 87'568.65) les deniers de nécessité (CHF 37'500.-), puis de prendre en considération le solde (CHF 50'068.65) à raison d’1/10 pour les PCF (soit CHF 5'006.-) et d’1/5 pour les PCC (soit CHF 10'013.75). Enfin, l’intéressé avait droit également à un subside d’assurance-maladie de CHF 470.- par mois (CHF 483.- dès le 1er janvier 2014).
b. Par décision du 15 décembre 2014, le SPC a établi le droit aux PC de l’intéressé à CHF 403.- par mois pour les PCF, respectivement CHF 114.- pour les PCC, avec effet au 1er janvier 2015. Les plans de calculs justifiant cette légère hausse des PC par rapport à l’année 2014 se référaient toujours à une épargne de CHF 2'010.90 et à une fortune immobilière de CHF 85'557.75.
c. Par courrier du 11 novembre 2015, l’intéressé, assisté par PRO SENECTUTE, a demandé au SPC de mettre à jour la fortune immobilière prise en compte, dont le montant s’élevait toujours à CHF 85'557.75 pour le calcul des PC. Or, selon le taux de change actuel, HUF 19’959'000.- valaient CHF 68'946.-.
d. Par décision du 21 décembre 2015, le SPC a recalculé le montant des PC octroyées du 1er novembre au 31 décembre 2015. Au lieu de CHF 85'557.75, les nouveaux plans de calcul prenaient en compte CHF 69'857.30 à titre de fortune immobilière. Avec cette modification, la part de fortune prise en considération dans le revenu s’élevait à CHF 3'436.80 (au lieu de CHF 5'006.85) pour les PCF, et à CHF 6'873.65 (au lieu de CHF 10'013.75 pour les PCC), faisant ainsi passer les PCF de CHF 403.- à CHF 593.- et les PCC de CHF 114.- à CHF 245.-, d’où un solde de CHF 642.- en faveur de l’intéressé sur les deux derniers mois de l’année 2015. Enfin, il était précisé que ces montants majorés continueraient à s’appliquer en 2016.
e. Au cours des années suivantes, l’intéressé s’est vu notifier d’autres décisions de PC dont les plans de calcul continuaient à tenir compte d’une fortune immobilière de CHF 69'857.30.
f. Par courrier du 5 décembre 2020, le SPC a apporté des informations relatives aux PC pour l’année 2021, présentée comme une « année charnière » en raison de l’entrée en vigueur au 1er janvier 2021 des modifications de la loi fédérale sur les prestations complémentaires, dont les répercussions s’étendaient également aux PCC. La réforme des PC pouvant, selon la situation de chacun, augmenter ou diminuer les PC, leur montant pouvait continuer à être déterminé selon l’ancien droit durant une période transitoire de trois ans, soit jusqu’au 31 décembre 2023 si l’application du nouveau droit entraînait une diminution du montant alloué. Enfin, un message relatif à l’obligation de renseigner rappelait à l’intéressé son obligation d’informer le SPC de toute modification de sa situation personnelle et/ou financière.
g. Par décision du 5 décembre 2020, le SPC a déterminé le droit aux PC de l’intéressé dès le 1er janvier 2021 selon le droit en vigueur jusqu’au 31 décembre 2020, celui-ci étant plus favorable selon les plans de calcul comparatifs annexés. Ceux-ci tenaient toujours compte d’une fortune immobilière de CHF 69'857.30.
h. Par la suite, l’intéressé a encore reçu des décisions datées des 1er janvier 2021 et 6 décembre 2022 continuant à appliquer l’ancien droit pour le calcul du droit aux PC pour 2022, respectivement 2023. Les plans de calculs y relatifs faisaient toujours mention d’une fortune immobilière de CHF 69'857.30.
i. Par pli du 29 août 2023, le SPC a informé l’intéressé de la révision périodique de son dossier, opération pour laquelle il nécessitait, entre autres, pour le bien immobilier, une estimation officielle de sa valeur vénale « pour l’année/ les années 2022 » (sic).
j. Par décision du 1er décembre 2023, le SPC a déterminé le droit aux PC de l’intéressé dès le 1er janvier 2024 selon le nouveau droit. Selon les plans de calculs annexés, le total des dépenses reconnues excédait le total du revenu déterminant à raison de CHF 13'326.- pour les PCF, respectivement CHF 2'452.- pour les PCC, donnant droit à des prestations de CHF 509.- par mois (hors réductions individuelles des primes d’assurance-maladie [ci-après : RIP]) pour les PCF, respectivement CHF 205.- par mois pour les PCC. À ces montants s’ajoutait une RIP mensuelle de CHF 551.80. Le revenu déterminant se composait, entre autres, d’une fraction de la fortune, déterminée de la manière suivante : après avoir additionné l’épargne (CHF 2'010.90) et la fortune immobilière sise en Hongrie (CHF 69'857.30), il convenait de déduire du total (CHF 71'868.20) la franchise sur la fortune (CHF 30'000.-), puis de prendre en considération le solde (CHF 41'868.20) à raison d’1/10 pour les PCF (soit CHF 4'186.-) et d’1/5 pour les PCC (soit CHF 8'373.65).
k. Par pli du 17 janvier 2024 au SPC, l’intéressé a confirmé une information qu’il avait donnée oralement le 12 janvier 2024 lors d’un passage au SPC, à savoir qu’il se rendrait en Hongrie entre début mars et début avril afin d’y récupérer les documents officiels nécessaires à sa déclaration de fortune immobilière.
l. Le 16 avril 2024, le SPC a reçu une expertise immobilière du 7 mars 2024, rédigée en hongrois, accompagnée d’une traduction d’un extrait de celle-ci en allemand, estimant à HUF 51’800'000.- (soit HUF 545'000.- par m2) la valeur vénale de l’appartement.
m. Invité à communiquer au SPC le montant des RIP – réglés par le Service de l’assurance maladie (ci-après : SAM) – dont le SPC réclamerait la restitution à l’intéressé pour la période du 1er juin 2017 au 31 décembre 2020 et du 1er janvier au 31 mai 2024, le SAM a indiqué que les subsides alloués par le SAM s’élevaient à CHF 2'993.70 du 1er juin au 31 décembre 2017, CHF 5'379.60 du 1er janvier au 31 décembre 2018, CHF 5'569.20 du 1er janvier au 31 décembre 2019, CHF 4'467.60 du 1er janvier au 31 décembre 2020 et CHF 2'759.- du 1er janvier au 31 mai 2024, soit CHF 21'109.10 au total.
n. Par courrier du 4 juin 2024, le SPC a informé l’intéressé de la reprise de son droit aux PC avec effet au 1er juin 2017. À cet envoi étaient jointes :
- une décision de PC du 29 mai 2024, recalculant le droit aux PC de l’intéressé du 1er juin 2017 au 31 mai 2024. La somme des PC versées sur cette période représentait un montant de CHF 71'378.-. Toutefois, selon les plans de calculs remaniés à la lumière d’une fortune immobilière de CHF 181'198.45 en 2017, CHF 197'139.40 en 2018, CHF 183'429.- en 2019, CHF 171'633.10 en 2020, CHF 155'426.40 en 2021, CHF 146'900.15 en 2022 et CHF 128'951.95 en 2023, l’intéressé n’avait droit à aucune prestation, hormis CHF 108.- (soit CHF 9.- par mois) au titre des PCF du 1er janvier au 31 décembre 2023. Pour la période du 1er janvier au 31 mai 2024, la décision en question ne comportait pas de plans de calcul, au motif que la fortune nette était supérieure aux seuils prévus par la législation. En conséquence, le solde rétroactif en faveur du SPC se montait à CHF 71'270, soit CHF 71'378.- sous déduction de CHF 108.- ;
- une décision de remboursement des RIP du 29 mai 2024, portant sur la somme de CHF 21’109.10 ;
- une décision de restitution de frais de maladie et d’invalidité du 4 juin 2024, portant sur la somme de CHF 513.75 (frais dentaires en 2018 et 2019).
o. Le 10 juillet 2024, l’intéressé, assisté par le Service de cohésion sociale (SCS) de la Ville de Vernier, a formé opposition à cette décision. En 2013, son bien immobilier avait été évalué à « HUF 19’000'000.- » (recte : HUF 19'950’000) par un organisme d’État. Pour se conformer à son obligation de collaborer dans le cadre de la révision périodique de son dossier, initiée en août 2023 par le SPC, il s’était rendu en Hongrie et avait sollicité une nouvelle évaluation, effectuée cette fois par un organisme privé, l’État ayant délégué cette démarche. Cette
fois-ci, la valeur du bien était passée à HUG 51'800'000.-, soit à CHF 128'000.- environ. De ce fait, il sortait désormais des barèmes PC. Même si tous les éléments précités figuraient au dossier, l’intéressé n’en contestait pas moins les montants variables de la fortune immobilière indiqués dans le calcul rétroactif et qui étaient tous plus élevés que cette dernière évaluation (CHF 181'198.- en 2017, CHF 197'139.- en 2018, etc.). Aussi pouvait-on partir du postulat que l’intéressé était « victime de la spéculation immobilière pratiquée par les agences immobilières privées » et qu’il était étrange que la valeur de son bien ait plus que doublé depuis 2013. En conséquence, l’intéressé a demandé que les calculs des années antérieures soient corrigés à l’aune de la valeur du bien immobilier « telle que correspondant au document officiel de 2023 » (sic), voire qu’il soit tenu compte de manière progressive de cette valeur de 2017 à 2024, afin de ne pas être rendu tributaire de la spéculation dont son appartement faisait l’objet, étant relevé pour le surplus que les photos figurant au rapport d’expertise immobilière attestaient de l’état d’insalubrité de ce bien.
p. Par décision du 15 août 2024, le SPC a partiellement admis l’opposition et procédé aux modifications suivantes : entre la valeur vénale du bien en 2013 (HUF 19’950'000.-) et celle en 2024 (HUF 51'800'000.-), le SPC a appliqué une augmentation linéaire par paliers de HUF 2'895'454.55 annuels entre ces deux dates d’estimation. Dans un deuxième temps, le SPC a appliqué les taux de conversion annuels (HUF/CHF) à la valeur du bien entre 2017 à 2024, de manière à déterminer sa valeur vénale en francs suisses, cette dernière servant également de base pour le calcul de la valeur locative (4.5% de la valeur vénale) et des frais d’entretien (20% de la valeur locative).
Année | Taux de Conversion (HUF/CHF) | Valeur vénale
(HUF) | Valeur vénale
(CHF) | Valeur locative (CHF) | Frais d’entretien (CHF) |
2013 |
| 19’950’000.00 |
| ||
2014 | 22’845’454.55 | ||||
2015 | 25’740’909.10 | ||||
2016 | 28’636’363.65 | ||||
2017 | 0.0035 | 31’531’818.20 | 110’363.36 | 4’966.26 | 993.25 |
2018 | 0.0038 | 34’427’272.75 | 130’823.64 | 5’887.06 | 1’177.41 |
2019 | 0.0035 | 37’322’727.30 | 130’629.55 | 5’878.33 | 1’175.67 |
2020 | 0.0033 | 40’218’181.85 | 132’720.00 | 5’972.40 | 1’194.48 |
2021 | 0.0030 | 43’113’636.40 | 129’340.91 | 5’820.34 | 1’164.07 |
2022 | 0.0028 | 46’009’090.95 | 128’825.45 | 5’797.15 | 1’159.43 |
2023 | 0.0025 | 48’904’545.50 | 122’261.36 | 5’501.76 | 1’100.35 |
2024 | 0.0024 | 51’800’000.00 | 124’320.00 | 5’594.40 | 1’118.88 |
En tenant compte de ces modifications, les plans de calculs joints à la décision sur opposition montraient que l’intéressé n’avait droit à aucune prestation hormis des PCF pour CHF 1'302.- (soit sept mensualités de CHF 186.-) du 1er juin au 31 décembre 2017 et pour CHF 1'020.- (soit douze mensualités de CHF 85.-) du 1er janvier au 31 décembre 2023. En conséquence, sur le total des PC déjà versées du 1er juin 2017 au 31 mai 2024 (CHF 71'378.-), CHF 2'322.- étaient dus à l’intéressé. En comparaison avec la décision de restitution des PC du 29 mai 2024, la dette de l’intéressé s’en trouvait ainsi réduite à CHF 69'056.-.
Concernant les RIP, la demande en remboursement du montant de CHF 21'109.10 était ramenée à CHF 2'759.- et ne concernait plus que l’année 2024 (période du 1er janvier au 31 mai).
S’agissant enfin des frais médicaux, la demande en remboursement du montant de CHF 513.75 était annulée.
C. a. Le 10 septembre 2024, l’assuré a saisi la chambre des assurances sociales de la Cour de justice d’un recours contre cette décision, concluant en substance à son annulation.
À l’appui de sa position, il a indiqué que, même si le SPC avait partiellement tenu compte des arguments soulevés dans l’opposition en lissant le calcul rétroactif, il n’en demeurait pas moins que son appartement sis à Budapest était « insalubre et donc mal habitable » comme en attestaient les photos figurant au rapport d’expertise du 7 mars 2024. Cela justifiait une forte réduction de sa valeur locative. Quant au montant dont la restitution lui était réclamée, il était très important, alors qu’il avait « toujours été transparent et […] répondu en temps et en heure à chaque demande du SPC ».
b. Par réponse du 9 octobre 2024, l’intimé a conclu au rejet du recours.
En tant que le recourant contestait la valeur locative du bien sans produire le moindre document probant à ce sujet (rapport d’expertise, etc.), il ne pouvait être suivi. En effet, les photos auxquelles il se référait – de petit format et de mauvaise qualité – ne justifiaient pas que l’on s’écartât de la valeur locative figurant dans les plans de calcul de la décision litigieuse, correspondant à 4.5% de la valeur vénale du bien. Enfin, l’intimé avait appliqué un délai absolu de péremption de sept ans, étant donné que le recourant ne l’avait pas spontanément informé de la forte augmentation de la valeur de son bien depuis 2013, violant ainsi son obligation de renseigner.
c. Le 14 octobre 2024, la chambre de céans a transmis une copie de cette écriture au recourant et lui a imparti un délai pour faire parvenir sa réplique.
d. Les 6 et 7 novembre 2024, le recourant a déposé une liasse de pièces relatives à une procédure l’ayant opposé à l’office AI du canton de Genève et s’étant conclue par un arrêt du Tribunal des assurances I 857/05 du 6 décembre 2006.
e. Par courrier du 21 novembre 2024, l’intimé a fait savoir qu’il n’avait pas d’observations complémentaires à formuler.
f. Sur quoi, la cause a été gardée à juger.
g. Les autres faits seront mentionnés, si nécessaire, dans la partie « en droit » du présent arrêt.
1.
1.1 Conformément à l’art. 134 al. 1 let. a ch. 3 de la loi sur l’organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 6 octobre 2006 (LPC - RS 831.30). Elle statue aussi, en application de l’art. 134 al. 3 let. a LOJ, sur les contestations prévues à l’art. 43 de la loi cantonale sur les prestations complémentaires cantonales du 25 octobre 1968 (LPCC - J 4 25).
Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.
1.2 Les dispositions de la LPGA s’appliquent aux prestations complémentaires fédérales à moins que la LPC n’y déroge expressément (art. 1 al. 1 LPC). En matière de prestations complémentaires cantonales, la LPC et ses dispositions d’exécution fédérales et cantonales, ainsi que la LPGA et ses dispositions d’exécution, sont applicables par analogie en cas de silence de la législation cantonale (art. 1A LPCC).
Le délai de recours est de 30 jours (art. 60 al. 1 LPGA ; art. 62 al. 1 LPA ; art. 9 de la loi sur les prestations fédérales complémentaires à l’assurance-vieillesse et survivants et à l’assurance-invalidité du 14 octobre 1965 [LPFC ‑ J 4 20] ; art. 43 LPCC).
Déposé le 11 septembre 2024 au greffe de la chambre de céans, le recours a été interjeté en temps utile. Celui-ci respecte également les exigences de forme prévues par l’art. 61 let. b LPGA (cf. aussi l’art. 89B LPA), de sorte qu’il est recevable.
2.
2.1 Des modifications législatives et réglementaires sont entrées en vigueur au 1er janvier 2021 dans le cadre de la Réforme des PC (LPC, modification du 22 mars 2019, RO 2020 585, FF 2016 7249 – OPC-AVS/AI [ordonnance sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 15 janvier 1971 - RS 831.301], modification du 29 janvier 2020, RO 2020 599).
Conformément à l’al. 1 des dispositions transitoires de la modification du 22 mars 2019, l’ancien droit reste applicable trois ans à compter de l’entrée en vigueur de cette modification aux bénéficiaires de prestations complémentaires pour lesquels la réforme des PC entraîne, dans son ensemble, une diminution de la prestation complémentaire annuelle ou la perte du droit à la prestation complémentaire annuelle.
Par ailleurs, selon la circulaire concernant les dispositions transitoires de la réforme des PC (C-R PC), valable dès le 1er janvier 2021, il n’est nécessaire d’établir un calcul comparatif durant le délai transitoire que pour les cas dans lesquels le calcul de la prestation complémentaire se fonde sur l’ancien droit. Dès que le calcul est établi selon le nouveau droit, ce dernier reste applicable pour le reste de la période transitoire (ch. 3104).
2.2 En l’occurrence, les calculs comparatifs effectuées le 5 décembre 2020 en prévision de l’entrée en vigueur du nouveau droit montrent que le calcul du montant des PC selon l’ancien droit est plus favorable que celui effectué en application des dispositions entrées en vigueur le 1er janvier 2021, de sorte que les dispositions applicables seront citées dans leur ancienne teneur pour les faits qui se sont produits jusqu’au 31 décembre 2020. Pour les faits postérieurs à cette date, les dispositions seront citées dans leur nouvelle teneur.
3. Le litige concerne le droit de l’intimé de réclamer au recourant la restitution d’une partie des PC octroyées du 1er juin 2017 au 31 mai 2024 (CHF 69'056.-) ainsi que les subsides d’assurance-maladie pour la période du 1er janvier au 31 mai 2024 (CHF 2'759.-), soit CHF 71'815.- au total.
4. Sur le plan fédéral, les personnes qui ont leur domicile et leur résidence habituelle en Suisse et qui remplissent les conditions personnelles prévues aux art. 4, 6 et 8 LPC ont droit à des prestations complémentaires. Ont ainsi droit aux prestations complémentaires notamment les personnes qui ont droit à une rente de l’assurance-invalidité (art. 4 al. 1 let. c LPC) ou de l’assurance-vieillesse survivants (art. 4 al. 1 let. a LPC).
4.1 Les prestations complémentaires fédérales se composent de la prestation complémentaire annuelle et du remboursement des frais de maladie et d’invalidité (art. 3 al. 1 LPC). L’art. 9 al. 1 LPC dispose que le montant de la prestation complémentaire annuelle correspond à la part des dépenses reconnues qui excède les revenus déterminants.
4.2 Le législateur a adopté quelques règles spéciales pour déterminer la valeur de la fortune immobilière. Celles-ci sont destinées à permettre aux rentiers AVS/AI, qui bénéficient de faibles revenus, de continuer à vivre dans leur cadre habituel. Ces dispositions spéciales concernent l’évaluation de la fortune et le montant de la franchise (ou « deniers de nécessité »).
Selon l’art. 11 al. 1 LPC, les revenus déterminants comprennent notamment: le produit de la fortune mobilière et immobilière (let. b) et un quinzième de la fortune nette, un dixième pour les bénéficiaires de rentes de vieillesse, dans la mesure où elle dépasse CHF 30'000.- (CHF 37'500.- jusqu’au 31 décembre 2020) pour les personnes seules (let. c).
Par fortune au sens de l’art. 11 al. 1 LPC, il faut comprendre toutes les choses mobilières et immobilières ainsi que les droits personnels et réels qui sont la propriété de l’assuré et qui peuvent être transformés en argent liquide (par le biais d’une vente ou d’un nantissement par exemple) pour être utilisés ; font ainsi notamment partie de la fortune : les gains à la loterie, la valeur de rachat d’une assurance-vie, l’épargne, les actions, les obligations, les parts à des successions, les versements en capital d’assurances, l’argent liquide, ou encore les prêts accordés (ATAS/442/2022 du 18 mai 2022 consid. 6.2 ; ATAS/359/2022 du 21 avril 2022 consid. 8.2 ; ATAS/314/2022 du 7 avril 2022 consid. 5.2). Il suffit que l’assuré puisse effectivement disposer de l’élément de fortune en cause
(ATF 146 V 331 consid. 4.1 ; 127 V 248 consid. 4a ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_831/2016 du 11 juillet 2017 consid. 5.1 ; 9C_333/2016 du 3 novembre 2016 consid. 4.3.1).
Selon l’art. 17a al. 1 OPC-AVS/AI, la fortune prise en compte doit être évaluée selon les règles de la législation sur l’impôt cantonal direct du canton du domicile.
En revanche, lorsque des immeubles ne servent pas d’habitation au requérant ou à une personne comprise dans le calcul de la prestation complémentaire, ils seront pris en compte à la valeur vénale (art. 17a al. 4 OPC-AVS/AI).
L’art. 17a al. 4 OPC-AVS/AI constitue une dérogation au principe selon lequel la fortune prise en compte doit être évaluée selon les règles de la législation sur l’impôt cantonal direct du canton du domicile (Erwin CARIGIET, Uwe KOCH, Ergänzungsleistungen zur AHV/IV, 3e éd., 2021, p. 239-240).
Si la valeur actuelle (valeur du marché) d’un immeuble n’est pas connue, on peut se fonder sur la valeur moyenne entre la valeur selon la législation sur l’impôt cantonal direct et la valeur d’assurance immobilière, pour autant que la valeur ainsi obtenue ne soit pas manifestement erronée. Quant aux immeubles sis à l’étranger, on peut se fonder sur une estimation établie à l’étranger s’il n’est pas raisonnablement possible de procéder à une autre estimation (arrêt du Tribunal fédéral 9C_540/2009 du 17 septembre 2009 ; ch. 3445.04 des Directives concernant les prestations complémentaires à l’AVS et à l’AI [DPC]).
4.3 Selon l’art. 11 al. 1 let. b LPC, les revenus déterminants comprennent le produit de la fortune mobilière et immobilière, y compris la valeur annuelle d’un usufruit ou d’un droit d’habitation ou la valeur locative annuelle d’un immeuble dont le bénéficiaire de prestations complémentaires ou une autre personne comprise dans le calcul de ces prestations est propriétaire, et qui sert d’habitation à l’une de ces personnes au moins.
Le revenu déterminant tiré d’un immeuble est celui qui pourrait effectivement être réalisé en cas de location, c’est-à-dire le loyer conforme au marché (cf. SVR 1997, EL n° 38 consid. 6). Il y a lieu de retenir un loyer conforme à l’usage local ou un revenu moyen reflétant le rendement pendant la durée de vie des bâtiments situés sur le terrain lorsque le bénéficiaire de prestations complémentaires n’habite pas le bien immobilier et que celui-ci n’est pas loué. La chambre de céans a confirmé à plusieurs reprises que lorsqu’un immeuble n’est pas situé dans le canton de Genève, le recours à un taux forfaitaire de 4.5% de la valeur vénale retenu à titre de valeur locative (au sens large) ou de rendement de l’immeuble n’est pas excessif, et ce, dans la mesure où les conditions locales ne peuvent pas être déterminées aisément, contrairement aux immeubles situés dans le canton (ATAS/306/2020 du 27 avril 2020 consid. 6 et les nombreux arrêts cités). En outre, la chambre de céans a également considéré qu’un taux de 5% était admissible (ATAS/1127/2017 du 11 décembre 2017).
5. S’agissant des dépenses, elles comprennent notamment les frais d’entretien des bâtiments et les intérêts hypothécaires, jusqu’à concurrence du rendement brut de l’immeuble (art. 10 al. 3 let. b LPC).
5.1 Pour les frais d’entretien des immeubles, seule la déduction fiscale forfaitaire applicable pour l’impôt cantonal direct du canton de domicile est prise en compte (art. 16 al. 1 OPC-AVS/AI). Il n’est donc pas possible de choisir entre la déduction forfaitaire et les frais effectifs comme en droit fiscal (arrêt du Tribunal fédéral 9C_822/2009 du 7 mai 2010 consid. 3.4 ; Michel VALTERIO, Commentaire de la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’AVS et à l’AI, p. 108-109 n. 54).
5.2 Pour le canton de Genève, l’art. 20 al. 2 du règlement d’application de la loi sur l’imposition des personnes physiques du 13 janvier 2010 (RIPP - D 3 08.1) –dispose que cette déduction forfaitaire, calculée sur la valeur locative selon l’art. 24 al. 2 de la loi sur l’imposition des personnes physiques du 27 septembre 2009 (LIPP - D 3 08), s’élève à 10% si l’âge du bâtiment au début de la période fiscale est inférieur ou égal à dix ans, et à 20%, si l’âge du bâtiment au début de la période fiscale est supérieur à dix ans. Cette déduction s’applique même si la personne n’habite pas le bien immobilier dont elle est propriétaire (ATAS/1122/2013 du 19 novembre 2013 consid. 16a et les références citées). Il n’est dès lors pas possible de se fonder sur les frais effectifs d’entretien des immeubles. Par ailleurs, d’autres frais éventuels – et notamment les amortissements de la dette hypothécaire – ne peuvent être pris en compte comme dépenses reconnues (ch. 3260.02 et 3260.03 des DPC). La déduction forfaitaire des frais d’entretien s’applique même si l’immeuble n’est pas situé dans le canton (ATAS/1122/2013 du 19 novembre 2013 consid. 16b).
6. S’agissant du taux de conversion applicable pour le calcul de la fortune immobilière et de la valeur locative y relative, il y a lieu d’appliquer les DPC. Le taux de conversion, selon le chiffre 3453.01 DPC, correspond au cours du jour fixé par la Banque centrale européenne (ci-après : BCE). À cet égard, est déterminant le dernier cours du jour disponible du mois qui précède immédiatement le début du droit à la prestation. Bien que ces directives concernent les rentes servies, elles sont applicables par analogie aux autres éléments composant les revenus déterminants tels que la fortune immobilière (notamment ATAS/1146/2019 du 9 décembre 2019).
7. Selon l’art. 4 LPCC, ont droit aux prestations complémentaires cantonales les personnes dont le revenu annuel déterminant n’atteint pas le revenu minimum cantonal d’aide sociale applicable.
Le revenu déterminant est calculé conformément aux règles fixées dans la LPC, moyennant certaines adaptations, en particulier la part de fortune nette prise en compte est d’un cinquième pour les bénéficiaires de rente de vieillesse (art. 5
let. c LPCC).
Aux termes de l’art. 6 LPCC, les dépenses reconnues sont celles énumérées par la loi fédérale et ses dispositions d’exécution, à l’exclusion du montant destiné à la couverture des besoins vitaux, remplacé par le montant destiné à garantir le revenu minimum cantonal d’aide sociale défini à l’art. 3.
Selon l’art. 7 LPCC, la fortune comprend la fortune mobilière et immobilière définie par la loi fédérale et ses dispositions d’exécution (al. 1). La fortune est évaluée selon les règles de la loi sur l’imposition des personnes physiques, du 27 septembre 2009, à l’exception des règles concernant les diminutions de la valeur des immeubles et les déductions sociales sur la fortune, prévues aux art. 50 let. e et 58 de ladite loi, qui ne sont pas applicables. Les règles d’évaluation prévues par la loi fédérale et ses dispositions d’exécution sont réservées (al. 2).
8. Il convient tout d’abord d’examiner si l’intimé a respecté les délais de péremption légaux.
8.1 S’agissant des prestations complémentaires fédérales, selon l’art. 25 al. 1, 1ère phr. LPGA, en relation avec l’art. 2 al. 1 let. a de l’ordonnance sur la partie générale du droit des assurances sociales du 11 septembre 2002 (OPGA ‑ RS 830.11), les prestations indûment touchées doivent être restituées par le bénéficiaire ou par ses héritiers.
Selon l’art. 3 al. 1 OPGA, l’étendue de l’obligation de restituer est fixée par une décision.
L’obligation de restituer suppose que soient remplies les conditions d’une révision procédurale (art. 53 al. 1 LPGA) ou d’une reconsidération (art. 53 al. 2 LPGA) de la décision – formelle ou non – par laquelle les prestations en cause ont été allouées (ATF 142 V 259 consid. 3.2 et les références ; 138 V 426 consid. 5.2.1 et les références ; 130 V 318 consid. 5.2 et les références).
La révision procédurale et la reconsidération ont pour point commun de remédier à l’inexactitude initiale d’une décision (anfängliche tatsächliche Unrichtigkeit ; cf. Ueli KIESER, Gabriela RIEMER-KAFKA, Tafeln zum schweizerischen Sozialversicherungsrecht, 5e éd., 2013, p. 140). La révision est la modification d’une décision correcte au moment où elle a été prise, compte tenu des éléments connus à ce moment, mais qui apparaît ensuite dépassée en raison d’un élément nouveau. L’administration est ainsi tenue de procéder à la révision d’une décision entrée en force lorsque sont découverts des faits nouveaux ou de nouveaux moyens de preuve susceptibles de conduire à une appréciation juridique différente (ATF 129 V 200 consid. 1.1 ; 127 V 466 consid. 2c et les références). En revanche, la reconsidération a pour objet la correction d’une décision qui était déjà erronée dans la constatation des faits ou dans l’application du droit au moment où elle a été prise (ATAS/1244/2020 du 10 décembre 2020 consid. 7b ; ATAS/154/2019 du 25 février 2019 consid. 3b ; ATAS/1163/2014 du 12 novembre 2014 consid. 5c; Ueli KIESER, ATSG-Kommentar, 4e éd. 2020, n. 20 ad art. 17 LPGA). L’administration peut procéder à la reconsidération d’une décision formellement entrée en force de chose décidée, sur laquelle une autorité judiciaire ne s’est pas prononcée quant au fond, pour autant que la décision soit sans nul doute erronée et que sa rectification revête une importance notable (ATF 147 V 167 consid. 4.2 et la référence). L’obligation de restituer des prestations complémentaires indûment touchées et son étendue dans le temps n’est pas liée à une violation de l’obligation de renseigner (ATF 122 V 134 consid. 2e). Il s’agit simplement de rétablir l’ordre légal après la découverte du fait nouveau (arrêt du Tribunal fédéral 9C_398/2021 du 22 février 2022 consid. 5.1).
8.2 Selon l’art. 53 al. 1 LPGA, les décisions et les décisions sur opposition formellement passées en force sont soumises à révision si l’assuré ou l’assureur découvre subséquemment des faits nouveaux importants ou trouve des nouveaux moyens de preuve qui ne pouvaient pas être produits auparavant. Cela vaut aussi lorsque les prestations ont été accordées sans avoir fait l’objet d’une décision formelle mais que leur versement a acquis force de chose décidée (ATF 130 V 380 consid. 2.1 ; 129 V 110 consid. 1.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_793/2023 du 5 décembre 2024 consid. 4.4 et la référence).
La notion de faits ou moyens de preuve nouveaux s’apprécie de la même manière en cas de révision (procédurale) d’une décision administrative (art. 53 al. 1 LPGA) ou de révision d’un jugement cantonal (art. 61 let. i LPGA). La révision suppose ainsi la réalisation de cinq conditions : 1° le requérant invoque un ou des faits ; 2° ce ou ces faits sont « pertinents », dans le sens d’importants (« erhebliche »), c’est-à-dire qu’ils sont de nature à modifier l’état de fait qui est à la base du jugement et à conduire à un jugement différent en fonction d’une appréciation juridique correcte ; 3° ces faits existaient déjà lorsque le jugement a été rendu : il s’agit de pseudo-nova (« unechte Noven »), c’est-à-dire de faits antérieurs au jugement ou, plus précisément, de faits qui se sont produits jusqu’au moment où, dans la procédure principale, des allégations de faits étaient encore recevables ; 5° le requérant n’a pas pu, malgré toute sa diligence, invoquer ces faits dans la procédure précédente (arrêt du Tribunal fédéral 8C_793/2023 du 5 décembre 2024 consid. 4.5 et la référence).
S’agissant des délais applicables en matière de révision, l’art. 53 al. 1 LPGA n’en prévoit pas. En vertu du renvoi prévu par l’art. 55 al. 1 LPGA, sont déterminants les délais applicables à la révision de décisions rendues sur recours par une autorité soumise à la loi fédérale sur la procédure administrative du 20 décembre 1968 (PA - RS 172.021). Ainsi, conformément à l’art. 67 al. 1 PA, un délai (de péremption) relatif de 90 jours dès la découverte du motif de révision s’applique, en plus d’un délai absolu de 10 ans dès la notification de la décision administrative ou de la décision sur opposition (ATF 148 V 277 consid. 4.3 ; 143 V 105 consid. 2.1 ; 140 V 514 consid. 3.3).
En principe, le moment à partir duquel le motif de révision aurait pu être découvert se détermine selon le principe de la bonne foi. Le délai de 90 jours commence à courir dès le moment où la partie a une connaissance suffisamment sûre du fait nouveau ou du moyen de preuve déterminant pour pouvoir l’invoquer, même si elle n’est pas en mesure d’en apporter une preuve certaine ; une simple supposition voire des rumeurs ne suffisent pas et ne sont pas susceptibles de faire débuter le délai de révision (ATF 143 V 105 consid. 2.4 et les références). Si l’assureur social manque de prendre les mesures nécessaires, le délai commence à courir au moment où il aurait pu compléter l’état de fait en faisant preuve de l’engagement attendu et exigible de sa part (arrêt du Tribunal fédéral 8C_665/2020 du 8 juin 2021 consid. 5.2 et les références).
Lorsque la décision de restitution des prestations indûment touchées se fonde sur l’existence d’un motif de révision procédurale de la décision entrée en force, il y a lieu d’examiner, dans un premier temps, si les conditions de fond de l’art. 53
al. 1 LPGA sont remplies, et si le délai relatif de 90 jours dès la découverte du motif de révision et le délai absolu de 10 ans dès la notification de la décision administrative ont été respectés (ATF 143 V 105 consid. 2.1 et 2.5.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_742/2021 du 4 mars 2022 consid. 5.4.3 non publié in ATF 148 V 327 ; 8C_665/2020 du 8 juin 2021 consid. 5.2).
8.3 Au plan cantonal, l’art. 24 al. 1, 1ère phr. LPCC prévoit que les prestations indûment touchées doivent être restituées. Conformément à l’art. 43A LPCC, les décisions et les décisions sur opposition formellement passées en force sont soumises à révision si le bénéficiaire ou le service découvre subséquemment des faits nouveaux importants ou trouve des nouveaux moyens de preuve qui ne pouvaient être produits avant (al. 1). Le SPC peut revenir sur les décisions ou les décisions sur opposition formellement passées en force lorsqu’elles sont manifestement erronées et que leur rectification revêt une importance notable (al. 2).
L’art. 14 du règlement relatif aux prestations cantonales complémentaires à l’assurance-vieillesse et survivants et à l’assurance-invalidité du 25 juin 1999 (RPCC-AVS/AI - J 4 25.03) précise que le SPC doit demander la restitution des prestations indûment touchées au bénéficiaire, à ses héritiers ou aux autres personnes mentionnées à l’art. 2 OPGA appliqué par analogie (al. 1). Il fixe l’étendue de l’obligation de restituer par décision (al. 2).
8.4 Conformément à l’art. 33 de la loi d’application de la loi fédérale sur l’assurance-maladie du 29 mai 1997 (LaLAMal – J 3 05), les subsides indûment touchés doivent être restitués en appliquant par analogie l’art. 25 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (al. 1). Lorsque des subsides ont été indûment touchés par un bénéficiaire des prestations du service, ce service peut en demander la restitution au nom et pour le compte du service de l’assurance-maladie (al. 2).
9.
9.1 En vertu de l’art. 25 al. 2, 1ère phr. LPGA (dans sa teneur en vigueur à compter du 1er janvier 2021), le droit de demander la restitution s’éteint trois ans après le moment où l’institution d’assurance a eu connaissance du fait, mais au plus tard cinq ans après le versement de la prestation.
Jusqu’au 31 décembre 2020, l’art. 25 al. 2, 1ère phr. aLPGA prévoyait que le droit de demander la restitution s’éteignait un an après le moment où l’institution d’assurance avait eu connaissance du fait, mais au plus tard cinq ans après le versement de la prestation.
L’application du nouveau délai de péremption aux créances déjà nées et devenues exigibles sous l’empire de l’ancien droit est admise, dans la mesure où la péremption était déjà prévue sous l’ancien droit et que les créances ne sont pas encore périmées au moment de l’entrée en vigueur du nouveau droit. Si, au moment de l’entrée en vigueur de la nouvelle disposition, le délai de péremption relatif ou absolu en vertu de l’art. 25 al. 2 aLPGA a déjà expiré et que la créance est déjà périmée, celle-ci reste périmée (Office fédéral des assurances sociales, Lettre circulaire AI n° 406, du 22 décembre 2020, modifiée le 31 mars 2021 et les références).
Les délais de l’art. 25 al. 2 LPGA sont des délais (relatif et absolu) de péremption, qui doivent être examinés d’office (ATF 146 V 217 consid. 2.1 et les références ; 142 V 20 consid. 3.2.2 et les références). Contrairement à la prescription, la péremption prévue à l’art. 25 al. 2 LPGA ne peut être ni suspendue ni interrompue et lorsque s’accomplit l’acte conservatoire que prescrit la loi, comme la prise d’une décision (ATF 119 V 431 consid. 3c), le délai se trouve sauvegardé une fois pour toutes (ATF 138 V 74 consid. 5.2 et les références). En tant qu’il s’agit de délais de péremption, l’administration est déchue de son droit si elle n’a pas agi dans les délais requis (ATF 134 V 353 consid. 3.1 et les références).
9.2 S’agissant de l’interruption de la péremption de la créance en restitution de prestations indues, la jurisprudence considère qu’une première décision de restitution de prestations rendue avant l’échéance du délai de péremption sauvegarde valablement ce délai, quand bien même elle est par la suite annulée et remplacée sur le champ par une nouvelle décision de restitution portant sur un montant corrigé (arrêt du Tribunal fédéral 8C_366/2022 du 19 octobre 2022 consid. 5.3.2 et les références).
9.3 Le délai de péremption absolu de cinq ans commence à courir à la date du versement effectif de la prestation, et non à la date à laquelle elle aurait dû être fournie (ATF 112 V 180 consid. 4a et les références).
9.3.1 Le délai de péremption relatif commence à courir dès le moment où l’administration aurait dû connaître les faits fondant l’obligation de restituer, en faisant preuve de l’attention que l’on pouvait raisonnablement exiger d’elle (ATF 148 V 217 consid. 5.1.1 ; 140 V 521 consid. 2.1 ; 139 V 6 consid. 4.1 et les références). Cette jurisprudence vise un double but, à savoir obliger l’administration à faire preuve de diligence, d’une part, et protéger l’assuré au cas où celle-ci manquerait à ce devoir de diligence, d’autre part (ATF 124 V 380 consid. 1). L’administration doit disposer de tous les éléments qui sont décisifs dans le cas concret et dont la connaissance fonde – quant à son principe et à son étendue – la créance en restitution à l’encontre de la personne tenue à restitution (ATF 148 V 217 consid. 5.1.1 et 5.2.1 et les références ; 146 V 217 consid. 2.1 et les références ; 140 V 521 consid. 2.1 et les références). Si l’administration dispose d’indices laissant supposer l’existence d’une créance en restitution, mais que les éléments disponibles ne suffisent pas encore à en établir le bien-fondé, elle doit procéder, dans un délai raisonnable, aux investigations nécessaires (ATF 133 V 579 consid. 5.1 non publié). À titre d’exemple, le Tribunal fédéral a considéré dans le cas de la modification des bases de calcul d’une rente par une caisse de compensation à la suite d’un divorce qu’un délai d’un mois pour rassembler les comptes individuels de l’épouse était largement suffisant (SVR 2004 IV N°41, consid. 4.3). À défaut de mise en œuvre des investigations, le début du délai de péremption doit être fixé au moment où l’administration aurait été en mesure de rendre une décision de restitution si elle avait fait preuve de l’attention que l’on pouvait raisonnablement exiger d’elle (ATF 148 V 217 consid. 5.2.2 et les références). En revanche, lorsqu’il résulte d’ores et déjà des éléments au dossier que les prestations en question ont été versées indûment, le délai de péremption commence à courir sans qu’il y ait lieu d’accorder à l’administration de temps pour procéder à des investigations supplémentaires (ATF 148 V 217 consid. 5.2.2; arrêt du Tribunal fédéral 8C_754/2020 du 11 juin 2021 consid. 5.2).
9.3.2 Lorsque la restitution est imputable à une faute de l’administration, on ne saurait considérer comme point de départ du délai le moment où la faute a été commise, mais bien celui auquel l’administration aurait dû, dans un deuxième temps (par exemple à l’occasion d’un contrôle comptable ou sur la base d’un indice supplémentaire) reconnaître son erreur en faisant preuve de l’attention que l’on pouvait raisonnablement exiger d’elle (ATF 148 V 217 consid. 4.2 et les références ; 146 V 217 consid. 2.2 et les références) ; ce moment intervient en principe à l’occasion du contrôle des conditions économiques des bénéficiaires, prévu par l’art. 30 OPC-AVS/AI au moins tous les quatre ans (ATF 139 V 570 consid. 3.1 et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_96/2020 du 27 juillet 2020 consid. 4.2 et les références).
En revanche, lorsque l’illégalité de l’octroi de la prestation ressort directement du dossier et qu’il n’y a donc pas (ou plus) besoin de clarifier les éléments constitutifs de la demande de restitution, le délai commence à courir au moment déjà où l’administration aurait dû connaître ceux-ci, en faisant preuve de l’attention que l’on pouvait raisonnablement exiger d’elle (ATF 148 V 217 consid. 5 et les références).
Le Tribunal fédéral a déjà eu l’occasion de préciser, dans un cas où l’administration avait fait une erreur lors de l’octroi des prestations complémentaires à un assuré, que l’on ne pouvait pas déduire de la circonstance que ces prestations étaient fixées pour la durée d’une année et recalculées annuellement que les services chargés de les fixer et de les verser devaient avoir raisonnablement connaissance de leur caractère erroné dans le cadre de leur examen périodique ; en revanche, tel était le cas au moins tous les quatre ans lors du contrôle des conditions économiques des bénéficiaires au sens de l’art. 30 OPC-AVS/AI. En effet, il ne peut pas être exigé des services compétents qu’ils procèdent à un contrôle annuel de chaque élément du calcul des prestations complémentaires de l’ensemble des bénéficiaires, ce pour quoi d’ailleurs l’art. 30 OPC-AVS/AI prévoit un contrôle tous les quatre ans au moins (ATF 139 V 570 consid. 3.1 et les références ; arrêt du Tribunal 8C_405/2020 du 3 février 2021 consid. 3.2.2). Pour autant, l’omission par l’administration de procéder aux contrôles périodiques prescrits par l’art. 30 OPC-AVS/AI est dénuée de toute pertinence lorsqu’il s’agit d’examiner le bien-fondé de l’obligation de restituer des prestations complémentaires indûment perçues sous l’angle des délais de péremption prévus à l’art. 25 al. 2 LPGA (arrêt du Tribunal fédéral 9C_96/2020 du 27 juillet 2020, consid. 4.2 et les références).
Lorsque la collaboration de plusieurs autorités chargées de la gestion de l’assurance est nécessaire pour la fixation des prestations ou pour leur restitution, le délai court lorsque l’une des autorités compétentes a connaissance des faits fondant l’obligation de restituer (ATF 140 V 521 consid. 2.1 et les références ; 139 V 6 consid. 4.1 et les références).
10.
10.1 En vertu de l’art. 25 al. 2, 2ème phr. LPGA, si la créance naît d’un acte punissable pour lequel le droit pénal prévoit un délai de prescription plus long, celui-ci est déterminant.
Ainsi, tant que le bénéficiaire des prestations est susceptible d’être poursuivi pénalement, une péremption du droit à la restitution ne se justifie pas (ATF 138 V 74 consid. 5.2). Pour que le délai de prescription plus long prévu par le droit pénal s’applique, il n’est pas nécessaire que l’auteur de l’infraction ait été condamné (ATF 140 IV 206 consid. 6.2 et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_97/2020 du 10 juin 2020 consid. 2.2).
En l’absence d’un jugement pénal, l’administration, respectivement, le juge des assurances sociales, doit examiner, à titre préjudiciel, si les circonstances correspondant à une infraction pénale sont réunies et, partant, si un délai de prescription plus long que les délais relatifs et absolus prévus par l’art. 25 al. 2 LPGA est applicable (ATF 140 IV 206 consid. 6.2 et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_97/2020 du 10 juin 2020 consid. 2.2).
Lorsqu’il y a lieu de décider si la créance en restitution dérive d’un acte punissable soumis par les lois pénales à une prescription de plus longue durée, le degré de la preuve requis est celui qui prévaut en procédure pénale ; la présomption d’innocence s’applique, et le degré de la vraisemblance prépondérante reconnu habituellement en droit des assurances sociales n’est pas suffisant. En tout état de cause, il appartient à l’autorité qui entend se prévaloir d’un délai de prescription selon le droit pénal de produire les moyens permettant d’apporter la preuve d’un comportement punissable, singulièrement la réalisation des conditions objectives et subjectives de l’infraction (ATF 138 V 74 consid. 6.1 et 7 et les références).
10.2 En matière de prestations complémentaires, ce sont principalement les art. 31 LPC (manquement à l’obligation de communiquer), 146 (escroquerie) et 148a (obtention illicite de prestations d’une assurance sociale ou de l’aide sociale) du Code pénal du 21 décembre 1937 (CP – RS 311.0) qui entrent en considération lorsqu’il y a lieu de déterminer si le délai pénal doit trouver application.
L’art. 31 LPC – également applicable en matière de prestations complémentaires cantonales conformément à l’art. 1A LPCC – est subsidiaire aux crimes et délits de droit commun (arrêt du Tribunal fédéral 6S.288/2000 du 28 septembre 2000 consid. 2) et prévoit une peine pécuniaire n’excédant pas 180 jours-amendes en cas de violation du devoir d’informer. L’art. 146 al. 1 CP sanctionne l’infraction d’escroquerie d’une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d’une peine pécuniaire. Quant à l’art. 148a CP, qui vise l’obtention illicite de prestations d’une assurance sociale ou de l’aide sociale, il prévoit une peine privative de liberté d’un an au plus ou une peine pécuniaire (al. 1). Dans les cas de peu de gravité, la peine est l’amende (al. 2).
Selon l’art. 97 al. 1 CP, l’action pénale se prescrit par trente ans si l’infraction était passible d’une peine privative de liberté à vie, par quinze ans si elle était passible d’une peine privative de liberté de plus de trois ans, et de sept ans si elle était passible d’une autre peine. Le délai de prescription de l’action pénale pour une infraction telle que celle décrite aux art. 31 LPC et 148a CP est donc de sept ans, celui de l’infraction visée à l’art. 146 al. 1 CP de quinze ans.
11. Dans le cas d’espèce, l’intimé a appliqué le délai de sept ans, correspondant au délai de prescription pénale des infractions énoncées aux art. 31 LPC (manquement à l’obligation de communiquer) et 148a (obtention illicite de prestations d’une assurance sociale ou de l’aide sociale).
11.1 L’art. 148a CP, entré en vigueur le 1er octobre 2016, punit d’une peine privative de liberté d’un an au plus ou d’une peine pécuniaire celui qui, par des déclarations fausses ou incomplètes, en passant des faits sous silence ou de toute autre façon, induit une personne en erreur ou la conforte dans son erreur, et obtient de la sorte pour lui-même ou pour un tiers des prestations indues d’une assurance sociale ou de l’aide sociale.
La tromperie doit provoquer une erreur (par quoi il faut entendre une représentation erronée ou incomplète de la réalité) auprès de son destinataire ou, si l’erreur est préexistante, conforter ce dernier dans sa vision biaisée de la réalité (GARBARSKI/BORSODI in Commentaire romand du Code pénal II, 2017, n° 18 ad art. 148a).
Sous l’angle subjectif, l’art. 148a CP décrit une infraction intentionnelle et suppose, s’agissant de la variante consistant à « passer des faits sous silence », que l’auteur ait conscience de l’existence et de l’ampleur de son devoir d’annonce, ainsi que la volonté de tromper. Le dol éventuel suffit (arrêt du Tribunal fédéral 6B_886/2022 du 29 mars 2023 consid. 2.1.3 et les références).
11.2 L’art. 31 LPC – qui est également applicable en matière de prestations complémentaires cantonales conformément à l’art. 1A LPCC – est subsidiaire aux crimes et délits de droit commun (arrêt du Tribunal fédéral 6S.288/2000 du 28 septembre 2000 consid. 2) et prévoit une peine pécuniaire n’excédant pas
180 jours-amendes pour la violation du devoir d’informer.
L’art. 31 al. 1 LPC prévoit qu’est puni, à moins qu’il ne s’agisse d’un crime ou d’un délit frappé d’une peine plus élevée par le Code pénal, d’une peine pécuniaire n’excédant pas 180 jours-amende :
- celui qui, par des indications fausses ou incomplètes, ou de toute autre manière, obtient d’un canton ou d’une institution d’utilité publique, pour lui-même ou pour autrui, l’octroi indu d’une prestation au sens de la présente loi (let. a) ;
- celui qui, par des indications fausses ou incomplètes, ou de toute autre manière, obtient sans droit une subvention au sens de la présente loi (let. b) ;
- celui qui n’observe pas l’obligation de garder le secret ou abuse, dans l’application de la présente loi, de sa fonction ou tire avantage de sa situation professionnelle au détriment de tiers ou pour son propre profit (let. c) ;
- celui qui manque à son obligation de communiquer (art. 31 al. 1 LPGA) (let. d).
L’infraction visée à l’art. 31 al. 1 LPC consiste en l’obtention du paiement de prestations complémentaires par des indications trompeuses. Cette infraction est réalisée lors du premier paiement de la prestation complémentaire. C’est à ce moment que tous les éléments objectifs et subjectifs sont réalisés (ATF 138 V 74 consid. 5.1).
Sur le plan subjectif, l’art. 31 al. 1 LPC suppose un agissement intentionnel de l’auteur. Il convient donc d’examiner s’il a agi avec conscience et volonté. L’auteur agit déjà intentionnellement lorsqu’il tient pour possible la réalisation de l’infraction et l’accepte au cas où elle se produirait (art. 12 al. 1 et 2 CP applicable par renvoi de l’art. 333 al. 1 CP). L’intention doit porter sur tous les éléments constitutifs de l’infraction. L’auteur doit en outre avoir agi dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime, correspondant au dommage de la dupe (ATF 134 IV 210 consid. 5.3). Pour apprécier s’il y a dol éventuel au sens de l’art. 12 al. 2, 2ème phr. CP, il y a lieu, en l’absence d’aveu, de se fonder sur les circonstances du cas d’espèce. En font partie l’importance du risque de réaliser l’infraction dont l’auteur avait conscience, la gravité de la violation du devoir de diligence par celui-ci, ses mobiles ainsi que la manière dont il a agi. On conclura d’autant plus aisément au fait que l’auteur de l’infraction a tenu pour possible la réalisation de l’infraction et l’a acceptée pour le cas où elle se produirait à mesure que s’accroît la probabilité de réaliser les éléments constitutifs objectifs d’une infraction et que s’aggrave la violation du devoir de diligence (ATF 138 V 74 consid. 8.4.1).
L’infraction visée à l’art. 31 al. 1 LPC peut aussi être commise par un comportement passif, contraire à une obligation d’agir (art. 11 al. 1 CP). Tel est le cas, lorsque l’auteur n’empêche pas la lésion du bien juridique protégé, bien qu’il y soit tenu à raison de sa situation juridique, notamment en vertu de la loi ou d’un contrat (cf. art. 11 al. 2 let. a et b CP ; ATF 136 IV 188 consid. 6.2). Dans cette hypothèse, l’auteur n’est punissable que si, compte tenu des circonstances, il encourt le même reproche que s’il avait commis l’infraction par un comportement actif (art. 11 al. 3 CP). L’auteur doit ainsi occuper une position de garant qui l’obligeait à renseigner ou à détromper la dupe (ATF 140 IV 11 consid. 2.3.2 et 2.4.1 et les références citées ; 136 IV 188 consid. 6.2). Il n’est pas contesté qu’un contrat ou la loi puisse être la source d’une telle position de garant. N’importe quelle obligation juridique ou contractuelle ne suffit toutefois pas. En particulier, l’obligation de renseigner prévue par la loi ou un contrat ne crée pas à elle seule de position de garant (ATF 140 IV 11 consid. 2.4 ; 131 IV 83 consid. 2.1.3).
Il ne faut pas confondre la négligence qui, si elle est grave, doit amener à retenir que le bénéficiaire de prestations versées à tort ne remplit pas la condition de la bonne foi devant conduire, si elle est remplie et s’accompagne au surplus d’une exposition à une situation difficile, à renoncer à exiger la restitution, au sens de l’art. 25 al. 1 LPGA, avec la faute réalisant l’élément constitutif subjectif d’une infraction pénale à l’origine du versement indu (ATAS/477/2019 du 28 mai 2019 consid. 11d).
11.3 L’assuré qui, en vertu de l’art. 31 LPGA, a l’obligation de communiquer toute modification importante des circonstances déterminantes pour l’octroi d’une prestation, ne respecte pas cette obligation et continue à percevoir les prestations allouées initialement à juste titre n’adopte pas un comportement actif de tromperie. Le fait de continuer à percevoir les prestations allouées ne saurait être interprété comme la manifestation positive – par acte concluant – du caractère inchangé de la situation. Il convient en revanche d’analyser la situation de façon différente lorsque la perception de prestations est accompagnée d’autres actions permettant objectivement d’interpréter le comportement de l’assuré comme étant l’expression du caractère inchangé de la situation. Tel sera le cas lorsque l’assuré ne répond pas ou pas de manière conforme à la vérité aux questions explicites de l’assureur destinées à établir l’existence ou la modification de la situation personnelle, médicale ou économique ; il n’est en effet plus question alors d’une escroquerie par omission, mais d’une tromperie active (ATF 140 IV 11
consid. 2.4.1 et consid. 2.4.6 in fine ; voir également l’arrêt du Tribunal fédéral 6B_791/2013 du 3 mars 2014 consid. 3.1.1).
Les indications écrites fournies chaque année à un titulaire de prestations complémentaires relatives à l’obligation de communiquer tout changement de circonstances doivent être comprises comme une exhortation à annoncer la survenance de telles modifications. Celui qui, après avoir dissimulé à l’administration une partie de ses revenus, ignore ces communications annuelles, tait l’existence d’éléments pertinents pour l’octroi de prestations. Ce faisant, il exprime tacitement, de façon mensongère vis-à-vis des autorités, que sa situation, respectivement les conditions pour le versement des prestations ne se sont pas modifiées. Son silence revient sur ce point à une déclaration expresse (silence qualifié), lui faisant commettre ainsi à chaque fois une tromperie par commission (ATF 131 IV 83 consid. 2.2 et 2.5 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_232/2013 du 13 décembre 2013, consid. 4.1.3).
12.
12.1 Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 ; 126 V 353 consid. 5b ; 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).
12.2 Dans le domaine des assurances sociales notamment, la procédure est régie par le principe inquisitoire, selon lequel il appartient au juge d’établir d’office l’ensemble des faits déterminants pour la solution du litige et d’administrer, le cas échéant, les preuves nécessaires (art. 43 al. 1 et 61 let. c LPGA). En principe, les parties ne supportent ni le fardeau de l’allégation ni celui de l’administration des preuves. Cette maxime doit cependant être relativisée par son corollaire, soit le devoir de collaborer des parties, lequel comprend l’obligation d’apporter, dans la mesure où cela est raisonnablement exigible, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués (ATF 138 V 86 consid. 5.2.3 ; 125 V 193 consid. 2). Si le principe inquisitoire dispense les parties de l’obligation de prouver, il ne les libère pas du fardeau de la preuve, dans la mesure où, en cas d’absence de preuve, c’est à la partie qui voulait en déduire un droit d’en supporter les conséquences, sauf si l’impossibilité de prouver un fait peut être imputée à la partie adverse (ATF 124 V 372 consid. 3 ; RAMA 1999 n° U 344 p. 418 consid. 3). Cette règle ne s’applique toutefois que s’il se révèle impossible, dans le cadre de la maxime inquisitoire et en application du principe de la libre appréciation des preuves, d’établir un état de fait qui correspond, au degré de la vraisemblance prépondérante, à la réalité (ATF 139 V 176 consid. 5.2 et les références).
13.
13.1 En l’espèce, l’intimé réclame la restitution de CHF 69'056.- au titre des PC du 1er juin 2017 au 31 mai 2024 ainsi que des réductions de primes d’assurance-maladie du 1er janvier au 31 mai 2024 (CHF 2'759.-).
13.2 Concernant tout d’abord le délai applicable en matière de révision (ci-dessus : consid. 8.2), la chambre de céans constate que c’est en recevant, le 16 avril 2024, le rapport d’expertise immobilière du 7 mars 2024 que l’intimé a pris connaissance du fait nouveau que constituait l’accroissement de la valeur du bien de l’intéressé depuis la précédente estimation, faite le 20 novembre 2013 par les autorités hongroises (HUF 51'800'000.- au lieu de HUF 19'950'000.-). En invoquant la reprise du « calcul de votre droit aux prestations complémentaires avec effet au 1er juin 2017, en tenant compte de l’augmentation de la valeur de votre bien immobilier en Hongrie » dans son courrier du 4 juin 2024 – auquel étaient jointes les décisions du 29 mai 2024 –, l’intimé s’est prévalu d’un motif de révision en respectant le délai relatif de 90 jours dès sa découverte. Il s’ensuit a fortiori que le délai de péremption relatif de trois ans de l’art. 25 al. 2 LPGA a également été respecté.
13.3 Il convient encore d’examiner si l’intimé est en droit de réclamer au recourant les prestations indûment versées pour une période supérieure à celle de cinq ans prévue à l’art. 25 al. 2, 1ère phrase LPGA.
Sur le plan objectif, les éléments constitutifs des infractions réprimées aux art. 148a CP et 31 al. 1 let. d LPC, toutes deux soumises au délai de prescription de sept ans, sont réalisés. En effet, en ne transmettant qu’en avril 2024 un rapport d’expertise immobilière daté du 7 mars 2024, le recourant a omis d’annoncer les variations de valeur enregistrées par son bien immobilier depuis 2013. Il a ainsi passé sous silence, année après année, l’augmentation de la valeur de son appartement de Budapest, manquant ainsi à son obligation de communiquer et confortant de la sorte l’intimé dans son erreur. Ce faisant, il a adopté un comportement lui permettant d’obtenir des prestations indues.
L’élément subjectif de ces infractions apparaît également réalisé. Compte tenu des indications écrites qui lui étaient fournies année après année au mois de décembre, concernant son obligation de communiquer tout changement des circonstances, le recourant, qui n’ignorait ni les variations du taux de change entre le forint hongrois et le franc suisse (cf. son courrier du 11 novembre 2015 au SPC) ni l’obsolescence – croissante au fil du temps – du certificat administratif du 20 novembre 2013, a néanmoins exprimé tacitement, année après année, jusqu’à l’envoi du rapport d’expertise du 7 mars 2024, que sa situation, respectivement les conditions pour le versement des prestations, ne s’étaient pas modifiées. Par le silence qualifié gardé au fil des ans à ce sujet, le recourant a accepté à tout le moins l’éventualité que l’intimé lui octroie des PC auxquelles il n’avait pas droit, de sorte qu’il a contrevenu aux art. 148a CP et 31 al. 1 let. d LPC par dol éventuel. Le délai de péremption de plus longue durée prévu par le droit pénal, soit en l’occurrence sept ans, est par conséquent applicable.
C’est donc à bon droit que l’intimé a fait rétroagir ses décisions de restitution du 29 mai 2024 au 1er juin 2017, étant relevé que les prestations les plus anciennes visées (celles du mois de juin 2017) ont été perçues sept ans avant le courrier du 4 juin 2024 auquel étaient annexées les décisions de restitution précitées.
13.4 S’agissant de la somme sujette à restitution, la décision litigieuse met correctement en œuvre les principes régissant la prise en compte des revenus déterminants et des dépenses reconnues (ci-dessus : consid. 4 à 7). En particulier, les plans de calcul – réclamant la restitution de CHF 69'056.- au titre des PC pour la période du 1er juin 2017 au 31 mai 2024 – tiennent compte, d’une part, d’une valeur locative de 4.5%, ce qui est conforme à la jurisprudence précitée (consid 4.3) et, d’autre part, d’une fortune immobilière établie de manière équitable, soit en fonction d’une augmentation linéaire de son montant en devise locale entre les deux évaluations les plus récentes (du 20 novembre 2013 et du 7 mars 2024), ajustée au taux de conversion HUF-CHF fixé par la BCE. Enfin, ces plans de calcul tiennent compte, au titre des dépenses reconnues, des frais d’entretien des bâtiments à concurrence de 20% de la valeur locative.
Le recourant fait néanmoins valoir en substance qu’une valeur locative de 4.5% serait excessive au regard de la vétusté du bien qui serait illustrée par les photos figurant au rapport d’expertise immobilière du 7 mars 2024. Cet argument ne saurait être suivi, sachant qu’une valeur locative de 4.5% n’est pas excessive en tant que telle (ci-dessus : consid. 4.3) et qu’en l’espèce, son montant est corrélé à la valeur vénale – non contestée – de HUF 51'800'000.- que l’expert a retenue en se fondant, entre autres, sur l’inspection du bien qu’il a documentée en images.
On rappellera par ailleurs que le fait que d’éventuels investissements soient nécessaires pour la mise en location d’un bien immobilier ne permet pas de déroger à l’art. 11 al. 1 let. b LPC (arrêt du Tribunal fédéral 9C_599/2014 du 14 janvier 2015 consid. 4.2.2).
14.
14.1 Compte tenu de ce qui précède, le recours doit être rejeté.
14.2 Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA a contrario).
*****
PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :
Statuant
À la forme :
1. Déclare le recours recevable.
Au fond :
2. Le rejette.
3. Dit que la procédure est gratuite.
4. Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi.
La greffière
Pascale HUGI |
| La présidente
Fabienne MICHON RIEBEN |
Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le