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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1449/2020

ATA/412/2025 du 15.04.2025 sur ATA/164/2024 ( FPUBL ) , ADMIS

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1449/2020-FPUBL ATA/412/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 15 avril 2025

 

dans la cause

 

A______ recourante
représentée par Me Nathalie BORNOZ, avocate

contre

UNIVERSITÉ DE GENÈVE intimée
représentée par Mes Lucile BONAZ et Pierre GABUS, avocats


EN FAIT

A. a. Dès le 1er août 2011, A______, auparavant maîtresse d'enseignement et de recherche à plein temps au département de linguistique de la faculté des lettres (ci‑après : la faculté) de l'Université de Genève (ci‑après : l'université), a été promue professeure associée à plein temps au sein du même département, en classe 25 annuité 12 de l'échelle des traitements.

b. Lors de sa séance du 24 février 2015, le collège des professeurs de la faculté a refusé la nomination par appel de A______ au rang de professeure ordinaire, le quorum des deux tiers de voix favorables des professeurs ordinaires présents n'ayant pas été atteint.

B. a. Le 3 décembre 2019, le département de linguistique, par son directeur, a demandé au doyen de la faculté l'ouverture d'une procédure de nomination par appel de A______ au rang de professeure ordinaire.

b. Lors de sa séance du 18 février 2020, le collège des professeurs a refusé l'ouverture d'une procédure de promotion par appel de A______ au rang de professeure ordinaire par 18 voix négatives de professeurs ordinaires contre 14 positives et 9 abstentions.

c. Le 17 mars 2020, A______ a formé opposition auprès du doyen de la faculté contre le refus du 18 février 2020. Préalablement, elle a sollicité l'accès au procès‑verbal détaillé de la séance du collège des professeurs, afin de pouvoir comprendre sur quelle base l'ouverture d'une procédure de nomination par appel au rang de professeure ordinaire lui avait été refusée, et a demandé à pouvoir compléter son opposition après en avoir pris connaissance.

Tant le département de linguistique que le décanat ou le rectorat étaient parfaitement convaincus qu'elle méritait cette promotion et remplissait toutes les conditions requises. Une telle procédure permettait aussi la promotion du sexe sous‑représenté et le respect de l'égalité de traitement entre femmes et hommes conformément à la législation sur l'égalité.

d. Par décision du 16 avril 2020 signée par le doyen de la faculté, l'université a déclaré l'opposition irrecevable et a remis à A______ l'extrait du procès‑verbal concernant la « demande d'ouverture de la procédure de [s]a promotion par appel – désignation d'une commission », caviardé pour respecter les données personnelles des différents intervenants.

Le vote du collège de professeurs avait pour objet une éventuelle entrée en matière quant à la mise en place d'une procédure de nomination par appel. Le collège avait donc refusé l'ouverture d'une telle procédure et non pas la candidature de A______. Il s'agissait d'un acte d'organisation interne préalable à la mise en place d'une telle procédure dans le cadre de laquelle une décision sur sa nomination aurait pu être prise. Il ne s'agissait pas d'une décision. Même à considérer qu'il s'agissait d'une décision, elle concernait la création de rapports de travail et n'était pas susceptible d'opposition.

C. a. Par acte du 19 mai 2020, A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre cette décision sur opposition, concluant à sa mise à néant, à la constatation de la violation de la législation sur l'égalité entre femmes et hommes, à la constatation de la nullité, subsidiairement l'annulation du vote du collège des professeurs du
18 février 2020, à l'injonction à l'université de la promouvoir au poste de professeure ordinaire, à la condamnation de cette dernière au paiement de la différence de salaire entre le poste de professeure associée et celui de professeure ordinaire pour la période du 1er août 2015 au 30 avril 2020 avec intérêts à 5% l'an dès le 1er août 2015, ainsi qu'au versement, à compter du 1er mai 2020 et pour le futur, du salaire de professeure ordinaire, à l'injonction de détruire tout fichier, document ou pièce récolté à son insu sous la menace des peines de l'art. 292 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0), à l'interdiction pour tout membre de l'université d'évoquer l'existence de problèmes entre elle-même et le corps intermédiaire, sous la même menace, à la condamnation de l'université à lui verser une indemnité nette pour tort moral de CHF 8'000.- et à la condamnation de cette dernière au paiement d'une indemnité de procédure.

Préalablement, elle demandait la transmission du dossier au Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) en vue d'une tentative de conciliation entre les parties, l'autorisation de compléter son recours en cas d'échec de la tentative de conciliation, l'autorisation d'amplifier la différence de salaire due chaque mois à compter du 1er mai 2020, la production du procès-verbal de la séance du collège des professeurs du 18 février 2020 dans son intégralité et sans caviardage, la comparution personnelle des parties et l'audition de témoins.

Le courrier du 16 avril 2020 consacrait un refus de la promouvoir au poste de professeure ordinaire et contrevenait à l'interdiction de discriminer au sens de la législation sur l'égalité, laquelle battait en brèche les dispositions de la procédure administrative genevoise. Le recours était recevable.

Sa non promotion, pour la seconde fois, consacrait une discrimination entre femmes et hommes.

b. Par décision du 16 juin 2020, la chambre administrative a transmis le dossier au TAPI pour tentative de conciliation.

c. Le 10 mai 2021, le TAPI a retourné le dossier à la chambre administrative, au vu de l'échec de la tentative de conciliation.

d. Par réponse du 30 août 2021, l'université s'est opposée à la communication du procès-verbal du collège des professeurs du 18 février 2020 non caviardé et a conclu au rejet du recours.

Tous les actes de l'université relatifs à une procédure de nomination, que ce soit un vote de la faculté ou encore la clôture d'une procédure de nomination par le rectorat, devaient être considérés comme des actes internes. Ils n'avaient pas pour objet de régler une situation juridique particulière d'un sujet de droit en tant que tel, puisqu'ils faisaient partie de l'exercice des tâches de l'université. Le vote négatif du collège des professeurs n'était pas susceptible d'opposition ou de recours. A______ n'avait pas de droit à la nomination en tant que professeure ordinaire.

A______ se plaignait en réalité d'une discrimination à l'embauche. Il n'y avait aucune discrimination, car ce n'était pas en raison de son sexe qu'elle n'avait pas été nommée.

e. Par réplique du 5 novembre 2021, A______ a persisté dans ses conclusions, en les complétant et amplifiant les montants dont le paiement était demandé à titre de salaire.

Préalablement, elle demandait encore la production de tous les cahiers des charges du Professeur B______ en qualité de professeur ordinaire depuis 2011 et du Professeur C______ en qualité de professeur ordinaire jusqu'à son départ à la retraite en 2016, la production de l'entier des données récoltées par l'université à son insu, l'indication des personnes ayant participé à ladite récolte et des personnes en ayant eu connaissance et y ayant eu accès, la production de la liste de tous les professeurs associés de la faculté auxquels un coaching avait été imposé pour être promus professeurs ordinaires, la production de la liste de toutes les femmes promues professeures ordinaires sur la base des dispositions transitoires concernant les maîtres d'enseignement et de recherche, la production de l'intégralité des mesures mises en œuvre pour la vérification de l'égalité salariale au sein de la faculté depuis 2015 et des rapports effectués sur la base de ces mesures, l'autorisation d'amplifier ses conclusions et la différence de salaire due chaque mois à compter du 1er mai 2020, la comparution personnelle des parties, dont notamment l'audition d'D______, recteur, et l'audition de témoins, dont les douze personnes citées.

L'acte attaqué avait pour objet et effet immédiat de régler sa situation juridique et le destinataire n'était pas l'administration elle-même dans l'exécution de ses tâches. Il s'agissait d'une décision. L'inapplicabilité de la procédure administrative genevoise à la création initiale des rapports de service et aux promotions était mise en échec par ses droits constitutionnels justiciables à l'égalité. Les faits relatifs à la discrimination étaient doublement pertinents, pour la recevabilité et au fond. Le recours était recevable.

Elle ne se plaignait pas d'une discrimination à l'embauche, mais de discriminations à la promotion, la première fois en 2009-2010, puis en 2014-2015 et finalement depuis 2015, avec la suppression du poste du Prof. C______, la récolte illicite de données et la deuxième procédure de nomination par appel. Elle était également victime d'une discrimination dans les conditions de travail et d'une discrimination salariale.

Le vote du collège de professeurs du 18 février 2020 était nul. Certaines personnes ayant participé au vote avaient été influencées et leur volonté n'avait pas pu s'exprimer librement, puisque de graves problèmes dans le corps intermédiaire avaient été relevés, sans qu'il n'ait été mentionné le caractère illicite de la récolte de données, la fausseté des informations fournies par le Prof. B______ sur lesquelles reposaient les renseignements, l'absence de recours aux ressources humaines de la collaboratrice interpellée par ce dernier et l'appel à certains assistants à dire des choses négatives sur elle. D'autres personnes avaient participé à la récolte illicite et n'auraient pas dû être admises à voter.

f. Par duplique du 27 janvier 2022, l'université a maintenu ses conclusions et son argumentation.

A______ reconnaissait désormais que le vote du collège des professeurs ne constituait pas une décision, puisqu'elle avait sollicité une décision auprès du recteur.

A______ n'expliquait pas en quoi elle aurait subi des discriminations en raison de son sexe dans le cadre du vote du 18 février 2020 et ne disait d'ailleurs à aucun moment que ce vote négatif résulterait du fait qu'elle était une femme. Elle ne rendait pas vraisemblable les discriminations dont elle se disait victime, dont une grande partie concernait des faits anciens et étrangers à l'objet du litige. En l'absence de discrimination, la législation sur l'égalité ne pouvait pallier l'absence de décision au sens de la procédure administrative genevoise et n'était pas applicable. Les raisons du vote négatif étaient les avis négatifs émis par le corps intermédiaire concernant son comportement et, possiblement, la volonté d'éviter de contourner l'interdiction de la double promotion.

g. Le 8 février 2022, A______ a persisté dans sa demande de comparution personnelle des parties.

h. Le 15 juin 2023 a eu lieu une audience de comparution personnelle, lors de laquelle chacune des parties a maintenu sa position et ses conclusions, et à la suite de laquelle l'université a versé de nouvelles pièces à la procédure.

i. Le 29 septembre 2023, A______ a persisté dans ses conclusions préalables et au fond.

j. Le 17 novembre 2023, l'université a maintenu sa position.

A______ était consciente que le vote ne constituait pas une décision et essayait en vain que son recours soit recevable en se prévalant de la législation sur l'égalité. Elle se plaignait en réalité d'une inégalité de traitement entre les professeurs associés et les professeurs ordinaires et non de discrimination.

k. Le 9 janvier 2024, A______ a persisté dans ses conclusions.

En sus de la nullité de plein droit du vote du 18 février 2020, elle faisait valoir les actions prévues par la législation sur l'égalité.

l. Sur ce, la cause a été gardée à juger.

m. Le 18 janvier 2024, soit après que la cause eut été gardée à juger, l'université a demandé à exercer son droit à la réplique et à ce qu'un délai lui soit imparti à cet effet.

n. Par arrêt ATA/164/2024 du 6 février 2024, la chambre administrative a admis le recours, constaté la nullité du vote du collège des professeurs de la faculté de lettres de l'université du 18 février 2020 et renvoyé le dossier à l'université pour qu'elle suive la procédure de nomination par appel conformément aux règles du règlement sur le personnel de l’université approuvé par le Conseil d’État et entré en vigueur le 17 mars 2009 et modifié en dernier lieu le 1er septembre 2024 (RPers ; www.unige.ch/files/5217/2518/0669/Rpers-modifie-01-09-2024).

Le RPers ne prévoyait pas de vote du collège des professeurs pour l'entrée en matière sur l'ouverture d'une procédure de nomination par appel. Il prévoyait l'approbation du rectorat après consultation de la délégation à l'égalité des chances, puis la création par le décanat d'une commission de nomination – laquelle supposait la désignation par le collège des professeurs de quatre professeurs pour en faire partie – puis seulement une fois le dossier complet de celle-ci rendu, le vote du collège des professeurs, avec un quorum des deux tiers de ses membres et une majorité des deux tiers des votants.

Le collège des professeurs était donc incompétent pour voter l'ouverture ou non de la procédure de nomination par appel.

Cette incompétence ressortait directement du RPers. Il s'agissait donc d'un vice grave et manifeste qui conduisait à la nullité du refus d'ouverture d'une procédure de nomination par appel concernant la recourante, la constatation de ladite nullité ne mettant pas en danger la sécurité du droit.

D. a. Le 12 mars 2024, l’université a recouru contre cet arrêt au Tribunal fédéral. Elle a complété son argumentation dans une réplique du 4 juin 2024.

La composition de la chambre administrative qui avait jugé avait été modifiée – elle ne comprenait pas les juges qui avaient successivement instruit, notamment celle qui avait entendu les parties en audience – sans que les parties aient été prévenues ni informées.

La chambre administrative avait retenu la nullité du vote du collège des professeurs, au motif que celui-ci était incompétent, en se fondant sur une interprétation des normes du RPers, lesquelles laissaient à l’université un large pouvoir d’appréciation et n’étaient revues par le Tribunal fédéral que sous l’angle de l’arbitraire. Or, cet argument n’avait jamais été discuté entre les parties ni même soulevé par A______. Le fondement sur lequel la chambre administrative avait admis le recours de A______ ne pouvait pas être raisonnablement prévu par les parties, lesquelles auraient dû être interpellées sur le sujet, de sorte que le droit d’être entendue de l’université avait été violé.

C’était de manière arbitraire que la chambre administrative avait retenu que A______ avait rendu vraisemblable une discrimination homme-femme, que le vote du collège des professeurs était une décision puis estimé que la procédure de nomination par appel avait été violée. La mise sur pied et l’ouverture d’une procédure de nomination par appel nécessitaient en effet des actes internes de l’université – dont faisait partie le vote du collège des professeurs – qui n’étaient pas des décisions. L’art. 103 al. 5 RPers prévoyait l’approbation du rectorat mais ne précisait pas qui initiait la procédure de nomination par appel. La pratique suivie par l’université était de raisonner par analogie avec l’art. 96 RPers, autrement dit avec la mise au concours d’un poste professoral, laquelle était notamment possible si elle était proposée par le décanat sur proposition du collège des professeurs (let. a). Le vote du collège des professeurs correspondait à la proposition visée à l’art. 96 let. a RPers, par analogie. Il s’agissait d’un acte purement interne, qui n’avait pas pour objet de régler la situation juridique de A______. L’approbation du rectorat ne pouvait viser que la proposition faite par une faculté. L’arrêt attaqué était également arbitraire dans son résultat, puisqu’il obligeait l’université à entrer en matière sur une procédure de nomination par appel sur simple demande d’un individu, qui n’aurait pas été initiée par le décanat sur proposition du collège des professeurs. La loi fédérale sur l’égalité entre femmes et hommes du 24 mars 1995 (loi sur l’égalité, LEg - RS 151.1) ne permettait pas de créer de droit à une décision attaquable là où il n’y avait qu’un acte interne à l’administration.

b. Par arrêt 1C_161/2024 du 7 février 2025, le Tribunal fédéral a partiellement admis le recours formé par l’université, annulé l’arrêt du 6 février 2024 et renvoyé la cause à la chambre administrative pour nouvelle décision dans le sens des considérants.

L’arrêt consacrait une violation de l’art. 30 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101). La juge Fabienne MICHON RIEBEN, qui avait instruit la majorité de la procédure et qui avait siégé, seule, lors de l’audience de comparution personnelle du 15 juin 2023 ne faisait pas partie de la composition qui avait rendu l’arrêt, sans que les parties aient été informées du changement de composition et des motifs sur lesquels il reposait, et sans que le dossier permette de déterminer si ladite juge était encore active le 6 février 2024. Le Tribunal fédéral n’était ainsi pas en mesure de vérifier le bien-fondé du changement de composition de la cour cantonale. La question de savoir si la chambre administrative aurait dû informer les parties du départ de la juge Silvia TOMBESI près de deux ans avant le prononcé de l’arrêt et alors qu’elle n’avait que brièvement instruit la cause pouvait demeurer indécise.

Le Tribunal fédéral n’a pas examiné les autres griefs. Son arrêt a été reçu le 25 février 2025 par la chambre administrative.

E. a. Le 26 février 2025, le juge délégué a imparti aux parties un délai au 31 mars 2025 pour se déterminer sur l’arrêt du Tribunal fédéral.

b. Le 4 mars 2025, le juge délégué a indiqué aux parties que la juge Silvia TOMBESI avait quitté la Cour de justice à fin février 2022 et que son cabinet, dont la procédure A/1449/2020, avait été repris par la juge Fabienne MICHON RIEBEN. Celle-ci avait ensuite subi un arrêt de longue durée pour cause de maladie, de sorte que la procédure avait été réattribuée en janvier 2024. Lors de la délibération de l’arrêt, la juge Silvia TOMBESI avait quitté la Cour de justice et la juge Fabienne MICHON RIEBEN était encore en arrêt maladie, ce qui expliquait qu’aucune des deux n’avait siégé dans la composition délibérante.

c. Le 31 mars 2025, l’université a persisté « intégralement dans l’ensemble de ses griefs tels que développés devant le Tribunal fédéral », invitant la chambre administrative à se référer à ses écritures devant le Tribunal fédéral. Elle a demandé une nouvelle audience de comparution personnelle pour débattre de la suite à donner à la procédure ainsi que pour échanger sur les griefs de fond de l’université.

La juge Fabienne MICHON RIEBEN, pourtant seule présente à l’audience de comparution personnelle des parties, n’avait finalement pas été en mesure de participer aux délibérations précédant l’arrêt du 6 février 2024. Il s’avérait ainsi que les juges qui avaient statué avaient suivi un raisonnement juridique propre, qui n’avait jamais été discuté auparavant, ni en audience publique ni par les parties. Dans son recours au Tribunal fédéral, l’université avait souligné qu’au-delà d’une question de forme, l’arrêt du 6 février 2024 s’avérait erroné et injustifié en droit.

La situation de A______ avait évolué, puisqu’elle atteindrait l’âge de la retraite en mars 2026 et ne travaillait plus qu’à un taux de 25% à l’université.

d. Le 31 mars 2025, A______ a fait valoir que le raisonnement conduit dans l’arrêt du 6 février 2024 était correct, que la cause était entièrement instruite, que le changement de juge n’avait eu aucune influence sur l’arrêt et qu’il était par ailleurs justifié objectivement.

Les omissions de la chambre administrative allaient favoriser l’université, qui pourrait faire valoir ses autres griefs devant le Tribunal fédéral. L’arrêt du 6 février 2024 devait être confirmé rapidement.

e. Le 2 avril 2025, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

f. La juge Fabienne MICHON RIEBEN a repris l’exercice de ses fonctions à la chambre des assurances sociales de la Cour de justice et a délibéré le présent arrêt.

EN DROIT

1.             La recevabilité du recours formé par devant la chambre administrative a déjà été admise dans l’arrêt du 6 février 2024. Il n’y a pas lieu d’y revenir.

2.             Conformément au principe de l'autorité de l'arrêt de renvoi, l'autorité à laquelle le Tribunal fédéral renvoie une cause est tenue de fonder sa nouvelle décision sur les considérants de droit de l'arrêt du Tribunal fédéral. Cette autorité est donc liée par ce qui a déjà été définitivement tranché par le Tribunal fédéral et par les constatations de fait qui n'ont pas été attaquées devant lui ou qui l'ont été sans succès (ATF 148 I 127 consid. 3.1 ; 143 IV 214 consid. 5.2.1).

En l’occurrence, l’arrêt du Tribunal fédéral n’a examiné et admis que le grief de la composition de l’autorité fondé sur l’art. 30 al. 1 Cst., selon lequel toute personne dont la cause doit être jugée dans une procédure judiciaire a droit à ce que sa cause soit portée devant un tribunal établi par la loi, compétent, indépendant et impartial, les tribunaux d’exception étant interdits, et a renvoyé la cause à la chambre de céans pour nouvelle décision dans le sens des considérants.

La chambre de céans a indiqué aux parties que la juge Silvia TOMBESI avait quitté la Cour de justice et que la juge Fabienne MICHON RIEBEN était encore en arrêt maladie au moment de la délibération de l’arrêt du 6 février 2024.

Les parties ont eu l’occasion de se déterminer.

La juge Fabienne MICHON RIEBEN a repris l’exercice de ses fonctions à la chambre des assurances sociales de la Cour de justice et a délibéré le présent arrêt en qualité de juge suppléante (art. 33 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05).

3.             La demande de l'intimée du 18 janvier 2024, a été communiquée aux parties avec l’arrêt du 6 février 2024 et aucun délai n’a été imparti à cette dernière pour formuler de nouvelles déterminations. Les parties ont chacune eu l'occasion à plusieurs reprises de se prononcer sur le dossier et de répondre aux arguments de la partie adverse et produire des pièces, ceci tant avant qu'après l'audience de comparution personnelle, et les dernières observations et pièces produites par la recourante n'apportent aucun élément nouveau rentrant dans le cadre de l'objet du litige devant la chambre administrative tel qu'examiné ci‑après, étant par ailleurs relevé que la recourante concluait déjà à la nullité de l'acte attaqué dans son acte de recours du 19 mai 2020.

4.             L’intimée demande une audience de comparution personnelle pour débattre de la suite à donner à la procédure ainsi que pour échanger sur les griefs de fond de l’université.

4.1 Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 Cst., le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes et d'obtenir qu'il y soit donné suite (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; 142 III 48 consid. 4.1.1 ; 140 I 285 consid. 6.3.1). Ce droit ne s'étend qu'aux éléments pertinents pour l'issue du litige et n'empêche pas la juge de renoncer à l'administration de certaines preuves et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, si elle acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier. En outre, il n'implique pas le droit d'être entendu oralement, ni celui d'obtenir l'audition de témoins (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; 140 I 285 consid. 6.3.1 ; 138 III 374 consid. 4.3.2).

4.2 L’art. 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) donne à toute personne le droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial établi par la loi, qui décidera soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien‑fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. Il peut être renoncé à une audience publique dans les cas prévus par l’art. 6 § 1 2e phr. CEDH, lorsque la demande est abusive, chicanière, ou dilatoire, lorsqu’il apparaît clairement que le recours est infondé, irrecevable ou, au contraire, manifestement bien-fondé ou encore lorsque l’objet du litige porte sur des questions hautement techniques (ATF 141 I 97 consid. 5.1 ; 136 I 279 consid. 1 ; 134 I 331 consid. 2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 8D_5/2019 du 4 juin 2020 consid. 3.2.2).

La Cour européenne des droits de l’homme (ci-après : CourEDH) a également rappelé que l’art. 6 CEDH, en dehors des limitations expressément prévues par cette disposition, n’exige pas nécessairement la tenue d’une audience dans toutes les procédures. Cela est notamment le cas pour les affaires ne soulevant pas de question de crédibilité ou ne suscitant pas de controverse sur les faits qui auraient requis une audience, et pour lesquelles les tribunaux peuvent se prononcer de manière équitable et raisonnable sur la base des conclusions présentées par les parties et d’autres pièces. Partant, on ne saurait conclure, même dans l’hypothèse d’une juridiction investie de la plénitude de juridiction, que la disposition conventionnelle implique toujours le droit à une audience publique, indépendamment de la nature des questions à trancher. D’autres considérations, dont le droit à un jugement dans un délai raisonnable et la nécessité en découlant d’un traitement rapide des affaires inscrites au rôle, entrent en ligne de compte pour déterminer si des débats publics sont nécessaires. La CourEDH a ainsi déjà considéré que des procédures consacrées exclusivement à des points de droit ou hautement techniques pouvaient remplir les conditions de l’art. 6 CEDH même en l’absence de débats publics (ACEDH MUTU et PECHSTEIN c. Suisse du 2 octobre 2018, req. no 40575/10, § 177 ; arrêt du Tribunal fédéral 8D_5/2019 précité consid. 3.2.2).

4.3 En l’espèce, il n’y a pas lieu de débattre de la suite à donner à la procédure. Celle-ci est déterminée par l’arrêt de renvoi du Tribunal fédéral, comme il sera vu plus loin. La chambre de céans a instruit la question de sa composition lors du précédent arrêt et la juge Fabienne MICHON RIEBEN a siégé dans la composition ayant délibéré le présent arrêt. Les parties ont pu s’exprimer et leurs griefs sont examinés dans le présent arrêt, y compris ceux soulevés par l’intimée devant le Tribunal fédéral.

Il n’y a pas lieu non plus d’ordonner des plaidoiries publiques, les problèmes soumis à la chambre de céans étant de nature purement juridiques et ne soulevant aucune question de crédibilité ni de controverse sur les faits.

Il ne sera pas donnée suite à la demande.

5.             Il convient préalablement de préciser l'objet du litige.

5.1 L’acte de recours contient, sous peine d’irrecevabilité, la désignation de la décision attaquée et les conclusions du recourant (art. 65 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10). La juridiction administrative applique le droit d'office et ne peut aller au‑delà des conclusions des parties, sans pour autant être liée par les motifs invoqués (art. 69 al. 1 LPA).

5.2 L'objet du litige est principalement défini par l'objet du recours (ou objet de la contestation), les conclusions du recourant et, accessoirement, par les griefs ou motifs qu'il invoque. L'objet du litige correspond objectivement à l'objet de la décision attaquée, qui délimite son cadre matériel admissible (ATF 136 V 362 consid. 3.4 et 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_581/2010 du 28 mars 2011 consid. 1.5 ; ATA/499/2021 du 11 mai 2021 consid. 2a). La contestation ne peut excéder l'objet de la décision attaquée, c'est-à-dire les prétentions ou les rapports juridiques sur lesquels l'autorité inférieure s'est prononcée ou aurait dû se prononcer. L'objet d'une procédure administrative ne peut donc pas s'étendre ou qualitativement se modifier au fil des instances, mais peut tout au plus se réduire dans la mesure où certains éléments de la décision attaquée ne sont plus contestés. Ainsi, si un recourant est libre de contester tout ou partie de la décision attaquée, il ne peut pas prendre, dans son mémoire de recours, des conclusions qui sortent du cadre des questions traitées dans la procédure antérieure (ATA/499/2021 du 11 mai 2021 consid. 2a).

5.3 En l'espèce, la décision attaquée déclare irrecevable l'opposition de la recourante contre le vote du collège des professeurs du 18 février 2020. Le litige porte donc exclusivement sur la conformité au droit de ladite irrecevabilité.

Les conclusions de la recourante qui dépassent ce cadre, en particulier les conclusions portant sur le fond, soit la conformité au droit du vote du collège des professeurs du 18 février 2020 en tant que tel, celles en paiement des diverses sommes au titre de traitement ou de tort moral ou encore celles portant sur la destruction de fichiers, documents ou pièces, sont par conséquent exorbitantes au présent litige et seront déclarées irrecevables.

Il sera ici encore relevé que nombre des conclusions irrecevables de la recourante excèdent non seulement l'objet du litige devant la chambre administrative, mais également le fond de l'opposition de la recourante, qui a pour objet le vote du 18 février 2020, et n'ont à ce jour à la connaissance de la chambre administrative pas fait l'objet d'une décision de l'intimée, préalable nécessaire à toute contestation, ceci malgré la demande en ce sens de la recourante s'agissant au moins d'une partie desdites conclusions figurant au dossier. La recourante elle-même a d'ailleurs indiqué dans ses écritures agir par la voie de l'action, voie que la procédure administrative genevoise ne connaît que dans certaines hypothèses, lesquelles ne sont pas réalisée in casu.

6.             L'université a déclaré l'opposition irrecevable car le vote du 18 février 2020 constituerait un acte interne et non une décision.

6.1 La LPA s’applique à l’université (art. 43 al. 1 de la loi sur l'université du 13 juin 2008 - LU - C 1 30 ; art. 1 et 5 let. e LPA). Les règles de procédure contenues dans la LPA ne sont notamment pas applicables aux actes de portée purement interne à l’administration (let. a) ou, en matière de fonction publique, aux procédures relatives à la création initiale des rapports de service, aux promotions (let. d ; art. 2 LPA).

6.2 L’université met en place une procédure d’opposition interne à l’égard de toute décision au sens de l'art. 4 LPA avant le recours à la chambre administrative (art. 43 al. 2 LU). Tout membre du corps enseignant touché par une décision au sens de l'art. 4 LPA rendue par l’université et qui a un intérêt digne de protection à ce qu’elle soit modifiée ou annulée peut former opposition auprès de l’instance qui l’a rendue (art. 90 al. 1 statut et 84 al. 1 RPers). Les conditions ainsi que les modalités de l’opposition sont régies par un règlement interne (art. 90 al. 2 statut ; art. 84 al. 2 RPers ; art. 1 al. 1 RIO-UNIGE). Cette procédure d’opposition interne est régie par le RIO-UNIGE (art. 1 al. 2 RIO-UNIGE).

7.             7.1 Sont considérées comme décisions, au sens du RIO-UNIGE, toutes les décisions au sens de l’art. 4 LPA rendues par une autorité universitaire dans un cas d'espèce (art. 3 al. 1 RIO-UNIGE). Sont aussi considérées comme décisions, les décisions portant sur l'appréciation des examens, des épreuves ou de tout autre contrôle des connaissances dans la mesure où ils sont une condition de l'obtention d'un titre universitaire aux termes des règlements d'études applicables (art. 3 al. 2 RIO‑UNIGE).

7.2 Au sens de l’art. 4 al. 1 LPA sont considérées comme des décisions les mesures individuelles et concrètes prises par l’autorité dans les cas d’espèce fondées sur le droit public fédéral, cantonal ou communal et ayant pour objet de créer, de modifier ou d’annuler des droits ou des obligations (let. a), de constater l’existence, l’inexistence ou l’étendue de droits, d’obligations ou de faits (let. b), de rejeter ou de déclarer irrecevables des demandes tendant à créer, modifier, annuler ou constater des droits ou obligations (let. c).

Pour qu’un acte administratif puisse être qualifié de décision, il doit revêtir un caractère obligatoire pour les administrés en créant ou constatant un rapport juridique concret de manière contraignante. Ce n’est pas la forme de l’acte qui est déterminante, mais son contenu et ses effets (ATA/327/2023 du 28 mars 2023 consid. 2.1 et les arrêts cités).

En droit genevois, la notion de décision est calquée sur le droit fédéral (art. 5 de la loi fédérale sur la procédure administrative du 20 décembre 1968 - PA - RS 172.021), ce qui est également valable pour les cas limites, ou plus exactement pour les actes dont l’adoption n’ouvre pas de voie de recours. Ainsi, de manière générale, les communications, opinions, recommandations et renseignements ne déploient aucun effet juridique et ne sont pas assimilables à des décisions, de même que les avertissements ou certaines mises en demeure (arrêts du Tribunal fédéral 1C_150/2020 du 24 septembre 2020 consid. 5.2 et l’arrêt cité ; 1C_593/2016 du 11 septembre 2017 consid. 2.2 ; ATA/743/2021 du 13 juillet 2021 consid. b).

La décision comme acte juridique a pour objet de régler la situation d'administrés en tant que sujets de droit et donc, à ce titre, distincts de la personne étatique ou, en d'autres termes, extérieurs à l'administration. On oppose dans ce contexte la décision à l'acte interne ou d'organisation, qui vise des situations à l'intérieur de l'administration ; l'acte interne peut avoir des effets juridiques, mais ce n'en est pas l'objet, et c'est pourquoi il n'est en règle générale pas susceptible de recours. Deux critères permettent généralement de déterminer si l'on a affaire à une décision ou à un acte interne. D'une part, l'acte interne n'a pas pour objet de régler la situation juridique d'un sujet de droit en tant que tel et, d'autre part, le destinataire en est l'administration elle-même, dans l'exercice de ses tâches. Ainsi, un acte qui affecte les droits et obligations d'un fonctionnaire en tant que sujet de droit, par exemple la fixation de son salaire, d'indemnités diverses ou encore de sanctions disciplinaires, est une décision. En revanche, un acte qui a pour objet l'exécution même des tâches qui lui incombent en déterminant les devoirs attachés au service, telles que la définition du cahier des charges ou des instructions relatives à la manière de trancher une affaire, est un acte interne juridique (ATF 136 l 323 consid. 4.4 ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_463/2019 du 10 juin 2020 consid 4b ; 8D_1/2016 du 23 janvier 2017 consid. 5.1).

7.3 Dans une décision du 8 novembre 2005, la commission de recours de l'université (ci-après : CRUNI) avait retenu que clore l'ouverture d'inscription pour un poste de maître d'enseignement et de recherche sans procéder à une nomination était un acte d'organisation interne (ACOM/68/2005). En effet, cette annonce ne visait pas la situation juridique personnelle de l'intéressé en tant que tel mais concernait, au contraire, l'organisation interne de l'École de traduction et d'interprétation (ci-après : ETI) qui avait choisi de ne pas nommer de maître d'enseignement et de recherche. C'était donc l'ETI qui était la destinataire de cet acte dans l'exercice de ses tâches. La CRUNI ajoutait que, certes, cette annonce avait eu un effet indirect sur la situation juridique de la recourante, qui se voyait privée de la possibilité d'être engagée par l'université, cet effet ne suffisant cependant pas pour générer une obligation qui entraînerait l'existence d'une décision au sens juridique.

Plus récemment, la chambre administrative a eu à qualifier un courrier du rectorat informant deux candidats de la clôture de la procédure de nomination d'un professeur ordinaire, associé ou assistant, cette clôture ayant été motivée par le constat qu'une condition incluse dans son cahier des charges et son appel à candidatures ne pouvait être remplie. Elle a constaté que ledit courrier ne constituait pas une décision et n'était donc pas susceptible d'être attaqué par la voie de l'opposition (ATA/951/2019 du 28 mai 2019 consid. 5 s). Cet arrêt a été confirmé par le Tribunal fédéral, qui a constaté que la clôture de la procédure de nomination, en tant qu'acte interne à l'administration, avait des conséquences – indirectes – non seulement pour le recourant, dont la commission de nomination avait retenu la candidature primo loco et non unico loco, mais aussi pour l'autre candidate, et elle n'avait pas pour objet d'annuler des droits dans la mesure où le recourant n'avait pas un droit à être nommé (arrêt du Tribunal fédéral 8C_463/2019 précité consid. 4.2).

8.             8.1 S'agissant de l'art. 2 let. d LPA, selon certains auteurs de doctrine, l'exclusion de l'applicabilité de la LPA à la promotion prévue par cet article n'est pas conforme à l'art. 29a Cst. (Stéphane GRODECKI/Romain JORDAN, Code annoté de procédure administrative genevoise, 2017, p. 14 n. 51).

8.2 Dans sa jurisprudence d'alors, l'ancien Tribunal administratif, devenu depuis lors la chambre administrative, considérait que les personnes faisant acte de candidature à un emploi public n’avaient aucun droit à l’obtenir (ATA/412/2006 du 26 juillet 2006 consid. 3c ; ATA/39/2004 du 13 janvier 2004 consid. 4 ; ATA/840/2003 du 18 novembre 2003 consid. 4) et que le refus de promotion n'était qu’une simple communication non susceptible de recours (ATA/412/2006 précité consid. 3c).

Dans sa jurisprudence plus récente, la chambre administrative a retenu, en se basant sur l'ATA/533/2011 du 30 août 2011 consid. 7, que, sauf lorsque la loi prévoyait un système de promotion automatique, le fonctionnaire qui n'était pas promu au poste convoité ne disposait pas de voie de droit, faute d'applicabilité de la LPA (ATA/1051/2022 du 18 octobre 2022 consid. 5c ; ATA/1221/2021 du 16 novembre 2021 consid. 7b ; ATA/1283/2019 du 27 août 2019 consid. 3c ; ATA/533/2011 du 30 août 2011 consid. 7 et les références citées). Ainsi, la chambre de céans a déclaré irrecevable un recours formé contre le refus de promouvoir un policier à un poste de sergent‑major opérationnel, refus qui n'était qu'une simple communication (ATA/1283/2019 du 27 août 2019 consid. 4). L'ATA/533/2011 précité concernait néanmoins un policier, soumis à l'ancienne loi sur la police du 26 octobre 1957 (aLPol), dont l'art. 27 prévoyait expressément un recours auprès de la chambre administrative pour certains cas (al. 4) et une décision en dernier ressort du Conseil d'État pour d'autres (al. 5 et 8 LPol ; consid. 7).

Plus récemment encore, la chambre administrative s'est prononcée en faveur de la recevabilité d'un recours contre la non confirmation d'une promotion (ATA/1167/2023 du 31 octobre 2023), après avoir adopté une position variable par le passé (ATA/1221/2021 du 16 novembre 2021 ; ATA/429/2020 du 30 avril 2020 ; ATA/1737/2019 du 3 décembre 2019 et ATA/1411/2019 du 24 septembre 2019). La chambre administrative a ainsi constaté que le litige était susceptible d'entrer dans l'exception de l'art. 2 let. d LPA et que le recourant n'avait pas de droit à voir sa promotion confirmée, mais a déclaré le recours recevable. En effet, la confirmation ou non de sa promotion touchait directement aux droits et obligations du recourant face à son employeur et affectait sa situation juridique. Il s'agissait donc d'une contestation juridique qui devait bénéficier de la garantie d'accès au juge en vertu des art. 29a Cst. et 6 § 1 CEDH. La non confirmation de la promotion constituait dès lors une décision attaquable (consid. 2.11).

8.3 La loi concernant le traitement et les diverses prestations alloués aux membres du personnel de l'État, du pouvoir judiciaire et des établissements hospitaliers du 21 décembre 1973 (LTrait ‑ B 5 15) est applicable au corps professoral de l'université (art. 1 al. 1 let. c LTrait et 12 al. 1 LU). L'art. 13 LTrait définit la promotion comme une mutation à une nouvelle fonction de classe supérieure à celle exercée jusqu’alors.

9.             9.1 Le collège des professeurs est composé des membres du corps professoral de l’unité principale d’enseignement et de recherche (ci-après : UPER) – les UPER correspondant notamment aux facultés (art. 19 al. 1 let. a statut) –, à l’exception des professeurs honoraires (art. 33 al. 1 statut). Le règlement d’organisation de l'UPER peut prévoir la participation, sans droit de vote, des membres d’une ou plusieurs catégories de collaboratrices et collaborateurs de l’enseignement et de la recherche dont les mandats sont renouvelables sans limite dans le temps (art. 33 al. 2 statut). Le collège des professeurs donne son avis sur le projet de règlement d’organisation de l'UPER et de ses éventuelles subdivisions (let. a), donne son avis sur les projets de règlements, de programmes et de plans d’études (let. b), propose au conseil participatif un ou plusieurs candidats au poste de doyenne ou de doyen (let. c), prend connaissance du budget et des comptes annuels de l'UPER (let. d), peut discuter de toute question intéressant l'UPER (let. e), donne son avis sur toute question qui lui est soumise par le décanat (let. f ; art. 34 al. 1 statut). Le collège des professeurs peut soumettre à la doyenne ou au doyen ou au conseil participatif des propositions ou des recommandations sur toute question dont il se saisit ou est saisi. Le décanat ou le conseil participatif prend position sur les propositions du collège des professeurs (art. 34 al. 2 statut). Dans une composition limitée aux professeurs ordinaires, le collège des professeurs préavise à l’intention du rectorat les propositions de nomination, de promotion et de renouvellement dans le corps professoral (art. 34 al. 3 statut). Dans le respect des attributions du décanat et du conseil participatif, le collège des professeurs exerce d’autres compétences que le règlement du personnel, le règlement d’organisation et les règlements d’études de l'UPER peuvent lui conférer (art. 34 al. 4 statut). Pour la préparation de ses travaux, le collège des professeurs peut désigner des commissions (art. 34 al. 5 statut).

9.2 Le collège des professeurs de la faculté des lettres est l'un des organes de la faculté (art. 2 let. d du règlement d'organisation de la faculté de 2021 [ci-après : RLettres], disponible sur https://www.unige.ch/lettres/faculte/structures, consulté le 23 janvier 2024). Le collège des professeurs est composé des membres du corps professoral de la faculté, à l’exception des professeurs honoraires. Les maîtres d’enseignement et de recherche peuvent assister aux séances, avec voix consultative (art. 11 ab initio RLettres).

Le collège des professeurs donne son avis sur le projet de règlement d’organisation de la faculté et de ses subdivisions (let. a), donne son avis sur les projets de règlements d’études et de plans d’études (let. b), approuve le rapport de la commission de planification académique (let. c), peut proposer au Conseil participatif un ou plusieurs candidats au poste de doyen (let. d), prend connaissance du budget et des comptes annuels de la faculté (let. e), peut discuter de toute question intéressant la faculté (let. f), donne son avis sur toute question qui lui est soumise par le décanat (let. g ; art. 11 ch. 1 RLettres). Le collège des professeurs peut soumettre au doyen ou au conseil participatif des propositions ou des recommandations sur toute question dont il se saisit ou est saisi. Le décanat ou le conseil participatif prend position sur les propositions du collège des professeurs (art. 11 ch 2 RLettres). Dans une composition limitée aux professeurs ordinaires, le collège des professeurs préavise à l’intention du rectorat les propositions de nomination, de promotion et de renouvellement dans le corps professoral. Les professeurs associés peuvent être consultés (art. 11 ch. 3 RLettres). Le collège des professeurs est l’organe du corps professoral qui ratifie les propositions de nomination et de renouvellement des collaborateurs de l’enseignement et de la recherche conformément au RPers (art. 11 ch 4 RLettres). Le collège des professeurs propose au décanat ses représentants au sein de la commission de planification académique et désigne ses représentants au sein des commissions de nomination, de promotion, de titularisation et de premier renouvellement des membres du corps professoral (art. 11 ch. 5 RLettres). Le collège des professeurs approuve les sujets de thèse de doctorat, désigne les directeurs de thèse et constitue les jurys pour la soutenance de thèse. Il statue sur l’attribution des prix et des distinctions honorifiques (art. 11 ch. 6 RLettres). Dans le respect des attributions du décanat et du conseil participatif, le collège des professeurs exerce les autres compétences que le RPers et les règlements d’études de la faculté peuvent lui conférer (art. 11 ch. 7 RLettres). Le collège des professeurs peut désigner des commissions. Les commissions permanentes désignées par le collège des professeurs sont la commission d’admission des étudiants sans maturité (ch. 8.1), la commission des oppositions (ch. 8.2 ; art. 11 ch. 8 RLettres). Le collège des professeurs peut déléguer l’exercice de certaines de ses tâches au doyen ou au conseil décanal (art. 11 ch. 9 RLettres).

Le collège des professeurs vote à main levée, sauf si un membre demande un vote à bulletin secret. Les décisions sont prises à la majorité des voix. Les abstentions, bulletins blancs ou nuls ne sont pas comptés. Les dispositions particulières du RPers demeurent réservées (art. 12 ch 3 RLettres).

9.3 Les procédures de nomination, de promotion, de titularisation et de renouvellement des membres du corps professoral sont fixées dans le RPers (art. 36 al. 1 statut). Les commissions de nomination, de promotion, de titularisation et de premier renouvellement sont composées selon le modèle énoncé aux al. 3, 4 et 8 let. b) de l’art. 35. Le RPers peut prévoir la participation d’experts extérieurs (art. 36 al. 2 statut). Dans la mesure nécessaire à la coordination des procédures entre l’université et d’autres universités ou établissements d’enseignement supérieur, la rectrice ou le recteur peut autoriser des dérogations aux dispositions de la présente section 4 en vue de permettre des nominations conjointes de membres du corps professoral (art. 36 al. 3 statut).

Selon l'art. 96 RPers, intitulé « Mise au concours », un poste professoral peut être mis au concours : s'il est proposé par le décanat sur proposition du collège des professeurs ordinaires, à condition qu'il soit prévu par le rapport d'une commission de planification académique, et si la mise au concours a été approuvée par le rectorat (let. a), s'il est proposé par le décanat de l’UPER concernée en accord avec le rectorat, notamment dans les cas où une procédure de nomination rapide est souhaitée (let. b).

La procédure de nomination d’un professeur ordinaire s’ouvre par une inscription publique (art. 97 al. 1 RPers). Exceptionnellement, la procédure de nomination d’un professeur ordinaire peut s’ouvrir par voie d’appel selon les conditions définies à l’art. 103 (art. 97 al. 2 RPers). La fonction de professeur ordinaire peut également être pourvue par une décision de promotion ou de titularisation conformément aux art. 114B et 118 (art. 97 al. 3 RPers).

Avec l’approbation du rectorat, qui consulte la délégation à l’égalité des chances entre femmes et hommes, la procédure de nomination pour un professeur ordinaire ou un professeur associé peut exceptionnellement avoir lieu par voie d'appel. L’une des trois conditions suivantes doit être réalisée : l'université entend s’assurer la collaboration en tant que professeur ordinaire ou professeur associé d’une personnalité qui s’est particulièrement distinguée dans son domaine de compétence (let. a), la procédure permet de favoriser la promotion du sexe sous‑représenté conformément aux objectifs de l’art. 13 al. 3 LU (let. b) ou la procédure de nomination s’est soldée par un échec (let. c ; art. 103 al. 1 RPers). La proposition de nomination doit obtenir, en cas d’appel, l’approbation à la majorité des deux tiers des votants du collège des professeurs ordinaires de l’UPER concernée, siégeant avec un quorum des deux tiers de ses membres. Les absentions et les bulletins blancs ou nuls ne sont pas pris en compte dans la détermination du résultat (art. 103 al. 3 RPers). Si le quorum n’est pas atteint, le décanat peut exceptionnellement autoriser l’organisation d’un vote par correspondance ou par voie électronique à la condition que la proposition de nomination ait été préalablement débattue au collège des professeurs ordinaires. Dans ce cas, deux tiers au moins des membres du collège doivent avoir participé au vote et la majorité des deux tiers des votants reste applicable (art. 103 al. 4 RPers). Les art. 98 al. 1 à 5, 99 al. 2 à 6 et l’art. 100 sont applicables par analogie (art. 103 al. 5 RPers).

Lors de l’ouverture d’une procédure de nomination d’un professeur ordinaire, d’un professeur associé ou d’un professeur assistant, le décanat initie la création d’une commission de nomination (art. 98 al. 1 RPers). La commission de nomination est composée d’un membre du décanat qui la préside (let. a), de quatre professeurs désignés par le collège des professeurs. L’une de ces quatre personnes appartient en principe à une autre UPER que celle concernée par la nomination (let. b), d’une collaboratrice ou d’un collaborateur de l’enseignement et de la recherche désigné par les délégués du corps concerné au conseil participatif (let. c), d’une étudiante ou d’un étudiant désigné par les délégués du corps concerné au conseil participatif (let. d), de deux experts extérieurs à l’université dont en principe l’un au moins est membre d’une université étrangère, désignés par le rectorat sur proposition du décanat de l’UPER concernée (let. e ; art. 98 al. 2 RPers). Le règlement d’organisation de l’UPER peut prévoir la participation d’un représentant du personnel administratif et technique (art. 98 al. 3 RPers). La commission comprend des représentants des deux sexes (art. 98 al. 4 RPers). La composition de la commission doit être approuvée par le rectorat (art. 98 al. 5 RPers).

Le dossier complet de la procédure de nomination, contenant obligatoirement le rapport de la commission de nomination, les rapports indépendants des experts extérieurs, le préavis du collège des professeurs ordinaires, ainsi que le cahier des charges, est transmis au rectorat pour examen et décision du recteur ou de la rectrice (art. 100 al. 1 RPers). Le rectorat s'assure que la procédure s'est déroulée conformément aux exigences de la loi et du RPers (let. a), qu'une attention suffisante a été accordée à l'évaluation des aptitudes pédagogiques des candidats (let. b), que la commission et le collège des professeurs ordinaires de l’UPER ont pris en compte la mise en œuvre de la promotion du principe d'égalité des droits et des chances entre femmes et hommes (let. c ; art. 100 al. 2 RPers). Avant de se prononcer sur la proposition de nomination, le recteur ou la rectrice peut inviter l’UPER à procéder à toute démarche qui lui semble utile pour compléter les conclusions du rapport de nomination (art. 100 al. 3 RPers).

10.         10.1 Les dispositions de la section 2 de la LEg s’appliquent aux rapports de travail régis par la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse (CO, Code des obligations - RS 220) et par le droit public fédéral, cantonal ou communal (art. 2 LEg).

10.2 Il est interdit de discriminer les travailleurs à raison du sexe, soit directement, soit indirectement, notamment en se fondant sur leur état civil ou leur situation familiale ou, s’agissant de femmes, leur grossesse (art. 3 al. 1 LEg). L’interdiction de toute discrimination s’applique notamment à l’embauche, à l’attribution des tâches, à l’aménagement des conditions de travail, à la rémunération, à la formation et à la formation continue, à la promotion et à la résiliation des rapports de travail (art. 3 al. 2 LEg).

Quiconque subit ou risque de subir une discrimination au sens des art. 3 et 4 LEg peut requérir le tribunal ou l’autorité administrative d’interdire la discrimination ou, d’y renoncer, si elle est imminente (let. a), de faire cesser la discrimination, si elle persiste (let. b), de constater l’existence de la discrimination, si le trouble qu’elle a créé subsiste (let. c), d’ordonner le paiement du salaire dû (let. d ; art. 5 al. 1 LEg). Lorsque la discrimination porte sur un refus d’embauche ou la résiliation de rapports de travail régis par le CO, la personne lésée ne peut prétendre qu’au versement d’une indemnité par l’employeur. Celle-ci est fixée compte tenu de toutes les circonstances et calculée sur la base du salaire auquel la personne discriminée avait droit ou aurait vraisemblablement eu droit (art. 5 al. 2 LEg). En cas de discrimination portant sur un refus d’embauche, l’indemnité prévue à l’al. 2 n’excédera pas le montant correspondant à trois mois de salaire (art. 5 al. 4 1re phr. LEg). Sont réservés les droits en dommages-intérêts et en réparation du tort moral, de même que les prétentions découlant de dispositions contractuelles plus favorables aux travailleurs (art. 5 al. 5 LEg).

L’existence d’une discrimination est présumée pour autant que la personne qui s’en prévaut la rende vraisemblable ; l'art. 6 LEg s’applique à l’attribution des tâches, à l’aménagement des conditions de travail, à la rémunération, à la formation et à la formation continue, à la promotion et à la résiliation des rapports de travail (art. 6 LEg).

10.3 Dans les rapports de travail de droit public, les voies de droit sont régies par les dispositions générales sur la procédure fédérale (art. 13 al. 1 LEg). En cas de discrimination lors de la création de rapports de travail, l’art. 5 al. 2 LEg est applicable. En recourant directement contre la décision de refus d’embauche, les personnes dont la candidature n’a pas été retenue peuvent faire valoir leur droit à une indemnité (art. 13 al. 2 LEg).

Malgré la référence générale aux rapports de droit public faite à l'art. 13 al. 1 LEg, les dispositions générales de procédure fédérale ne sont applicables qu'aux rapports de travail du personnel fédéral. Dans les rapports de travail du personnel des cantons et des communes (ainsi que d'autres entités de droit public relevant du droit cantonal ou communal), les voies de droit et la procédure en matière d'égalité entre femmes et hommes sont régies par le droit cantonal de procédure (Christian BRUCHEZ in Gabriel AUBERT/Karine LEMPEN [éd.], Commentaire de la LEg, 2011, n. 13 s ad art. 13 LEg).

En cas de discrimination à la promotion, l'art. 5 al. 1 let. b LEg donne un droit à la personne concernée de requérir l'annulation d'une décision de non promotion. Il est en outre possible de réclamer, sur la base de l'art. 5 al. 1 let. d LEg, le salaire qui n'a pas été versé du fait de la non promotion discriminatoire avec effet rétroactif au jour où la promotion a été refusée. Du fait de ces droits, lorsqu'une discrimination à la promotion est alléguée, un tribunal ne peut donc pas dénier à la personne concernée la qualité pour recourir au motif qu'il n'existe pas de droit à être promu (Christian BRUCHEZ, op. cit., n. 37 ad art. 13 LEg). Lorsqu'une discrimination à l'embauche est alléguée, l'art. 13 al. 2 2e phr. LEg fait obstacle à l'application des règles et des jurisprudences qui excluent les recours dans les litiges portant sur la création initiale des rapports de travail (Christian BRUCHEZ, op. cit., n. 43 ad art. 13 LEg). Pour déterminer si l'on se trouve en présence d'une discrimination à l'embauche ou dans la promotion, il convient d'examiner s'il existait une relation préexsitante contractuelle entre les parties, laquelle indique que l'on se trouve face à une promotion (Karine LEMPEN, op. cit., n. 31 ad art. 3 LEg).

11.         La nullité absolue d'une décision peut être invoquée en tout temps devant toute autorité et doit être constatée d'office. Elle ne frappe que les décisions affectées des vices les plus graves, manifestes ou du moins facilement reconnaissables et pour autant que sa constatation ne mette pas sérieusement en danger la sécurité du droit. Sauf dans les cas expressément prévus par la loi, il ne faut admettre la nullité qu'à titre exceptionnel, lorsque les circonstances sont telles que le système d'annulabilité n'offre manifestement pas la protection nécessaire (ATF 130 II 249 consid. 2.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_354/2015 du 21 janvier 2016 consid. 4.1). Des vices de fond d'une décision n'entraînent qu'exceptionnellement sa nullité. Entrent avant tout en considération comme motifs de nullité l'incompétence fonctionnelle et matérielle de l'autorité appelée à statuer, ainsi qu'une erreur manifeste de procédure (ATF 129 I 361 consid. 2.1 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_354/2015 du 21 janvier 2016 consid. 4.1).

12.         12.1 En l'espèce, l'acte attaqué par la voie de l'opposition est le vote du collège des professeurs du 18 février 2020 refusant l'ouverture d'une procédure de nomination par appel concernant la recourante.

Ledit vote vise donc spécifiquement la recourante, comme le confirme l'extrait du procès-verbal de la séance du 18 février 2020, ceci conformément aux dispositions du RPers. En effet, au vu des conditions auxquelles le RPers soumet son ouverture (art. 103 al. 1 let. a à c RPers), la procédure de nomination par appel est par essence une procédure qui concerne une personne en particulier, contrairement à l'ouverture d'une procédure de nomination par concours, qui vise un nombre indéterminé de personnes.

Outre qu'il la concerne personnellement, le vote a par ailleurs des effets directs sur la recourante, puisque le refus d'ouverture d'une telle procédure signifie l'impossibilité pour elle de passer du statut de professeure associée à celui de professeure ordinaire par voie d'appel.

Or, si la voie de l'appel est désignée comme une procédure de nomination par le RPers et non comme une promotion, traitée spécifiquement aux art. 114 ss RPers, il s'agit, lorsque la personne est déjà nommée à un poste de classe inférieure, d'une procédure permettant à cette dernière d'être mutée à une nouvelle fonction de classe supérieure à celle exercée jusqu'alors. Il s'agit donc d'une promotion au sens de la LTrait.

L'acte attaqué par la voie de l'opposition constitue par conséquent un refus d'ouverture d'une procédure de promotion concernant la recourante.

Si la recourante ne bénéficie pas d'un droit à être promue et si l'art. 2 let. d LPA prévoit l'inapplicabilité de la LPA dans le cadre d'une promotion, la LEg fait échec à cette disposition en cas d'allégation de discrimination entre femmes et hommes dans le cadre de la procédure de promotion.

Or, la recourante allègue une discrimination entre femmes et hommes à la promotion. Elle affirme en particulier d'une part déjà exercer aujourd'hui les fonctions de professeure ordinaire mais occuper le poste et percevoir le salaire de professeure associée, dirigeant et gérant seule le département de linguistique et exerçant même plus de responsabilités qu'un collègue masculin professeur ordinaire, et d'autre part avoir un parcours similaire à un autre collègue masculin qui aurait déjà été promu professeur ordinaire en 2011 alors que la promotion lui était refusée en 2020.

Ces allégations, auxquelles la recourante a apporté une certaine substance, relèvent de la LEg, de sorte que le vote du collège des professeurs, équivalant à un refus de promotion, doit être considéré comme un acte attaquable. L'opposition de la recourante ne pouvait par conséquent être déclarée irrecevable pour défaut d'acte attaquable.

La question de savoir si les art. 29a Cst. et 6 § 1 CEDH dictent eux aussi la recevabilité d'une opposition ou un recours contre un refus de promotion malgré l'art. 2 let. d LPA, comme en cas d'une non confirmation de promotion, peut ainsi demeurer indécise, étant relevé que la situation de la promotion est différente de celle de la non confirmation d'une promotion, qui elle suppose un retour à une situation antérieure.

Pour ce motif déjà, la décision attaquée doit être annulée et la cause retournée à l’université.

12.2 S’ajoute à cela que le RPers ne prévoit pas de vote du collège des professeurs pour l'entrée en matière sur l'ouverture d'une procédure de nomination par appel. Il prévoit l'approbation du rectorat après consultation de la délégation à l'égalité des chances, puis la création par le décanat d'une commission de nomination – laquelle suppose la désignation par le collège des professeurs de quatre professeurs pour en faire partie – puis seulement une fois le dossier complet de celle-ci rendu, le vote du collège des professeurs, avec un quorum des deux tiers de ses membres et une majorité des deux tiers des votants.

Le collège des professeurs était donc incompétent pour voter l'ouverture ou non de la procédure de nomination par appel.

Cette incompétence ressort directement du RPers. Il s'agit donc d'un vice grave et manifeste qui conduit à la nullité du refus d'ouverture d'une procédure de nomination par appel concernant la recourante, la constatation de ladite nullité ne mettant pas en danger la sécurité du droit.

L’université a défendu devant le Tribunal fédéral l’application par analogie de l’art. 96 let. a RPers – le vote du collège des professeurs correspondant à la proposition visée par cette disposition – à défaut de quoi l’université serait obligée d’entrer en matière sur une procédure de nomination par appel sur simple demande d’un individu.

Cette interprétation ne trouve pas appui dans les art. 96 ss RPers, et notamment 97 al. 2 et 103 RPers et procède d’un excès positif du pouvoir d’appréciation de l’autorité.

La procédure de nomination sur appel prévoit en effet que le rectorat approuve cette procédure après consultation de la délégation à l’égalité, et que s’il entre en matière, il constitue une commission de nomination, le vote – avec un quorum et une majorité qualifiée – du collège des professeurs n’intervenant qu’à la fin et valant approbation.

Cette procédure se distingue de la procédure ordinaire de nomination par concours, qui attribue au rectorat la compétence d’approuver une proposition de la commission de nomination.

Dans cette procédure, un poste professoral, et non le principe d’une nomination sur appel, peut être proposé par le décanat sur proposition du collège des professeurs et à la condition qu’il soit prévu par le rapport d’une commission de planification académique et que la mise au concours ait été approuvée par le rectorat (art. 96 let. a RPers). In fine, le rectorat examine et approuve la proposition de la commission de nomination (art. 100 et 101 RPers). Le cas de figure, et en premier lieu la question de principe, diffère notablement de la nomination sur appel.

Le rôle du collège des professeurs diffère également dans les deux procédures. Dans la procédure par concours, le collège des professeurs se limite à proposer au décanat la mise au concours d’un poste et n’a plus son mot à dire par la suite. Dans la procédure sur appel, en revanche, il décide in fine sur la nomination de la professeure (art. 103 al. 3 et 4 RPers).

L’art. 96 RPers, que l’université indique appliquer par analogie, concerne expressément la mise au concours d’un poste professoral (note marginale et première phrase de la disposition), et non la procédure sur appel. Cette dernière procédure est instituée par l’art. 97 al. 2 RPers comme une procédure sui generis et est traitée séparément à l’art. 103 RPers. Enfin, en fait de dispositions applicables par analogie, l’art 103 al. 5 RPers ne mentionne que les art. 98 al. 1 à 5, 99 al. 2 à 6 et 100 RPers, mais non l’art. 96 RPers.

L’université indique craindre que tout individu puisse saisir le rectorat d’une demande d’ouverture d’une procédure de nomination par appel. Il n’apparaît toutefois pas choquant que quiconque puisse saisir le rectorat, compte tenu des cas de figure envisagés par l’art. 103 al. 1 RPers, qui ont en commun de concerner à chaque fois une personne, soit une personnalité s’étant distinguée dans son domaine de compétences (let. 1), une personne du genre sous‑représenté (let. b) ou un candidat après l’échec d’une procédure de nomination (let. c). Les occasions semblent cependant peu nombreuses et le rectorat peut en toute hypothèse ne pas entrer en matière, le cas échant après avoir consulté la délégation à l’égalité des chances.

Le vice affectant en l’espèce la décision, soit de défaut de compétence du collège des professeurs, est formel et grave. Il appelle une sanction même en l’absence de conclusions des parties. La prise en compte des art. 96 ss RPers sous l’angle de la procédure applicable et du rôle du collège des professeurs pouvait être anticipée par l’université. La situation juridique n’avait pas changé. Le collège des professeurs n’était pas compétent pour prendre la décision querellée, laquelle procède d’un excès du pouvoir d’appréciation, de sorte que l’université ne peut invoquer un large pouvoir d’appréciation. Elle ne saurait donc se plaindre d’une violation de son droit d’être entendue pour ne pas avoir été expressément interpelée sur le problème, étant relevé qu’elle a, quoi qu’il en soit, pu s’exprimer, renvoyant la chambre de céans à son argumentation sur ce point devant le Tribunal fédéral, que le présent considérant a examinée.

Le recours sera admis, dans la mesure de sa recevabilité. La nullité du vote du 18 février 2020 sera constatée et le dossier sera renvoyé à l'autorité intimée pour qu'elle suive la procédure prévue par le RPers dans le respect des règles procédurales et de compétence qui y sont prévues, soit l'approbation du rectorat après consultation de la délégation à l'égalité des chances, puis, en cas d'approbation, la création par le décanat d'une commission de nomination et, finalement, le vote du collège des professeurs en possession du dossier complet.

13.         Vu l'issue du litige, il ne sera pas perçu d'émolument (art. 87 al. 1 LPA) et une indemnité de procédure de CHF 1'000.- sera allouée à la recourante, à la charge de l'université (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

admet, dans la mesure de sa recevabilité, le recours interjeté le 19 mai 2020 par A______ contre la décision de l'Université de Genève du 16 avril 2020 ;

constate la nullité du vote du collège des professeurs de la faculté des lettres de l'Université de Genève du 18 février 2020 ;

renvoie le dossier à l'Université de Genève pour qu'elle suive la procédure de nomination par appel conformément aux règles du RPers ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument ;

alloue à A______ une indemnité de procédure de CHF 1'000.-, à la charge de l'Université de Genève ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s’il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n’est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral suisse, av. du Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt (la présente décision) et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Nathalie BORNOZ, avocate de la recourante, ainsi qu'à Mes Lucile BONAZ et Pierre GABUS, avocats de l'intimée.

Siégeant : Claudio MASCOTTO, président, Jean-Marc VERNIORY, Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, Eleanor McGREGOR, Fabienne MICHON RIEBEN, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

M. RODRIGUEZ ELLWANGER

 

 

le président siégeant :

 

 

C. MASCOTTO

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

la greffière :