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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1863/2022

ATA/799/2022 du 12.08.2022 ( AMENAG ) , REFUSE

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1863/2022-AMENAG ATA/799/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Décision du 12 août 2022

sur effet suspensif

 

dans la cause

 

A______ & CIE SA
représentée par Me Jean-Daniel Borgeaud, avocat

contre

CONSEIL D'ÉTAT



Vu, en fait, l’arrêté du 4 mai 2022 par lequel le Conseil d’État a déclaré le plan directeur N° 1______ en trois volets (plan « B______ », issu de la scission du plan de développement industriel et artisanal des Batailles ou « C______ »), accompagné de son règlement, plan et règlement directeur de zone de développement industriel et artisanal au sens des art. 2 et 3 de la loi générale sur les zones de développement du 29 juin 1957 (LGZD - L 1 35) ; l’arrêté était déclaré exécutoire nonobstant recours, en ce sens que les procédures administratives relatives aux demandes d’autorisation de construire pouvaient suivre leur cours, l’exécution des travaux tendant à la réalisation des ouvrages et bâtiments étant toutefois interdite jusqu’à droit connu ; le même jour, le Conseil d’État a rejeté l’opposition au plan et au règlement formée le 14 décembre 2021 par A______ SA ;

que par acte remis à la poste le 7 juin 2022, A______ SA a formé recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre cet arrêté, concluant à son annulation et au renvoi de la procédure au Conseil d’État pour modification du projet dans le sens des considérants, notamment pour qu’il soit compatible avec l’implantation du marché E______ dans le secteur C ; le plan était contraire à l’accord intervenu entre A______ SA, le Conseil d’État et la D______ (ci-après : D______) en vue de la réimplantation du marché de gros E______ dans la B______ ; A______ SA avait acquis plusieurs parcelles à ces fins ; étaient inadéquats l’implantation de la desserte industrielle depuis la route F______, la définition des arbres à conserver sur les parcelles nos 909 et 892, la couverture et la largeur des dessertes industrielles, l’augmentation de la végétalisation des toitures de 35 % à 80 % en regard de l’écoparc et le ratio des places de stationnement au regard des besoins d’un marché de gros ; la servitude de passage public à pied et à vélo devait être déplacée ; l’indice d’occupation du sol maximal devait être augmenté ;

que l’effet suspensif devait être restitué au recours, l’arrêté ne respectant pas le principe de la séparation des pouvoirs, et notamment la possibilité de faire revoir par les tribunaux les décisions de l’exécutif, et créant une menace grave sous la forme d’une atteinte à son droit à la garantie de sa propriété ; l’arrêté invoquait un intérêt public supérieur général à la mise à disposition de terrains industriels ; en cas d’impossibilité d’établir sur le site le marché E______, elle devrait décider de la meilleure manière d’utiliser les terrains qu’elle avait acquis afin d’éviter une moins-value foncière et trouver une solution de remplacement ;

que le 20 juin 2022, le Conseil d’État a conclu au rejet de la demande de restitution de l’effet suspensif ; aucun engagement n’avait été pris ; A______ SA ne démontrait pas qu’elle subirait un préjudice irréparable du fait de l’absence d’effet suspensif ; le Conseil d’État était habilité à déclarer l’arrêté exécutoire nonobstant recours, A______ SA pouvait porter cette décision devant un tribunal, ce qu’elle avait fait en l’espèce, de sorte que la séparation des pouvoirs n’avait subi aucune violation ; la violation de la garantie de la propriété constituait un argument de fond ; seule la réalisation de projets était de nature à lui causer un préjudice ; or, l’exécution des travaux éventuellement autorisés était interdite par l’arrêté jusqu’à droit connu, et il lui serait loisible de saisir les tribunaux de demandes provisionnelles urgentes en cas d’exécution de travaux malgré cette disposition ; la délivrance d’une autorisation de construire conforme à un plan ne pouvait causer un préjudice irréversible ; les autorisations éventuellement délivrées pourraient toujours être révoquées en cas d’admission des recours ; la proportion des zones industrielles disponibles était passée de 13 % en 2000 à 2 % en 2008 puis à 0.5 % en 2011 ; 84 ha de zones industrielles avaient été perdues, auxquels il fallait ajouter 10 ha de pertes supplémentaires au secteur de l’Étang ; les intérêt publics et privés à la densification des zones de développement industriel en application du plan de développement cantonal (ci-après : PDCn) 2030 et à l’avancement des procédures d’autorisations de construire devaient l’emporter sur l’intérêt de A______ SA à les contrecarrer en les retardant autant que possible ;

que le 27 juin 2022, A______ SA a indiqué qu’elle développerait son argumentation sur la restitution de l’effet suspensif dans le complément à son recours à produire, et qu’elle comptait pouvoir répliquer à la détermination que communiquerait le Conseil d’État ;

que dans son complément du 12 juillet 2022, A______ SA a persisté dans sa conclusion en restitution de l’effet suspensif, sans toutefois développer son argumentation à ce propos ;

que le 20 juillet 2022, le Conseil d’État a indiqué persister dans ses conclusions en rejet de la demande de restitution de l’effet suspensif ;

que A______ SA n’ayant pas répliqué sur restitution de l’effet suspensif dans le délai imparti le 21 juillet 2022 au 3 août 2022, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger sur restitution de l’effet suspensif ;

considérant, en droit, l'art. 9 al. 1 du règlement interne de la chambre administrative de la Cour de justice du 26 mai 2020, à teneur duquel les décisions sur effet suspensif sont prises par la présidente de ladite chambre, respectivement par le vice-président, ou en cas d'empêchement de ceux-ci, par un juge ;

qu’aux termes de l’art. 66 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), sauf disposition légale contraire, le recours a effet suspensif à moins que l’autorité qui a pris la décision attaquée n’ait ordonné l’exécution nonobstant recours (al. 1) ; que toutefois, lorsque aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s’y oppose, la juridiction de recours peut, sur la demande de la partie dont les intérêts sont gravement menacés, retirer ou restituer l’effet suspensif (al. 3) ;

que, par ailleurs, l'art. 21 al. 1 LPA permet le prononcé de mesures provisionnelles ;

que selon la jurisprudence constante de la chambre administrative, des mesures provisionnelles – au nombre desquelles compte la restitution de l’effet suspensif – ne sont légitimes que si elles s’avèrent indispensables au maintien d’un état de fait ou à la sauvegarde d’intérêts compromis (ATF 119 V 503 consid. 3 ; ATA/503/2018 du 23 mai 2018 ; ATA/955/2016 du 9 novembre 2016 consid. 4 ; ATA/1244/2015 du 17 novembre 2015 consid. 2) ; qu’elles ne sauraient, en principe, anticiper le jugement définitif (Isabelle HÄNER, Vorsorgliche Massnahmen in Verwaltungsverfahren und Verwaltungsprozess, RDS 1997 II 253-420, spéc. 265) ;

que, par ailleurs, l’octroi de mesures provisionnelles présuppose l’urgence, à savoir que le refus de les ordonner crée pour l’intéressé la menace d’un dommage difficile à réparer (ATF 130 II 149 consid. 2.2 ; 127 II 132 consid. 3 = RDAF 2002 I 405 ; ATA/941/2018 du 18 septembre 2018) ;

que la restitution de l’effet suspensif est subordonnée à l’existence de justes motifs, qui résident dans un intérêt public ou privé prépondérant à l’absence d’exécution immédiate de la décision (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1161/2013 du 27 février 2014 consid. 5.5.1) ;

que pour effectuer la pesée des intérêts en présence qu’un tel examen implique, l’autorité de recours n’est pas tenue de procéder à des investigations supplémentaires, mais peut statuer sur la base des pièces en sa possession (ATF 117 V 185 consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_435/2008 du 6 février 2009 consid. 2.3 et les arrêts cités ; ATA/812/2018 du 8 août 2018) ;

que la chambre de céans dispose dans l’octroi de mesures provisionnelles d’un large pouvoir d’appréciation (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1161/2013 précité consid. 5.5.1 ; ATA/941/2018 précité) ;

qu’en l’espèce, l’intimé fait valoir un intérêt public important à ce que puisse être conduite sans attendre l’instruction des éventuelles demandes d’autorisations, compte tenu de la nécessité pressante de mettre à disposition de nouveaux terrains industriels dans le canton, notamment pour reloger des entreprises et permettre l’avancement de l’exécution d’autres plans ;

que la recourante ne rend pas vraisemblable, à ce stade de la procédure, que la clause déclarant l’arrêté exécutoire nonobstant recours lui causerait un préjudice irréparable, dès lors que les travaux de construction éventuellement autorisés ne pourront être entrepris avant droit connu sur le fond de son recours ainsi que le dispose l’arrêté – l’intimé ayant même précisé que les autorisations de construire éventuellement délivrées pourraient être révoquées en cas d’admission des recours ;

qu’elle ne rend pas non plus vraisemblable que le refus de restituer l’effet suspensif porterait une atteinte irréparable à son droit à la garantie de sa propriété, dès lors qu’elle demeurerait propriétaire des parcelles qu’elle a acquises et qu’elle pourrait, comme elle l’envisage, les revendre au besoin selon le sort, incertain à ce jour, qui sera réservé à son recours sur le fond ;

qu’elle ne fait ainsi pas valoir d’intérêt privé prépondérant au maintien de la situation prévalant avant l’adoption du plan ;

qu’au vu de ces éléments, la requête de restitution de l’effet suspensif sera rejetée ;

qu’il sera statué sur les frais de la présente décision avec l’arrêt sur le fond.

 

LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

rejette la requête de restitution de l’effet suspensif ;

réserve le sort des frais de la procédure jusqu’à droit jugé au fond ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique la présente décision à Me Jean-Daniel Borgeaud, avocat de la recourante, ainsi qu'au Conseil d'État.

 

 

 

La présidente :

 

 

 

F. Payot Zen Ruffinen

 

 

 

Copie conforme de cette décision a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :