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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1356/2022

ATA/1219/2022 du 06.12.2022 ( FPUBL ) , REJETE

Recours TF déposé le 27.01.2023, rendu le 14.06.2023, REJETE, 8C_47/2023
Descripteurs : DROIT DE LA FONCTION PUBLIQUE;RAPPORTS DE SERVICE DE DROIT PUBLIC;VIOLATIONS DES DEVOIRS DE SERVICE;RÉSILIATION;LICENCIEMENT ADMINISTRATIF;MOTIF;DEVOIR PROFESSIONNEL
Normes : Cst.29.al2; RPAC.46A; LPAC.21.al2; LPAC.22; RPAC.20ss
Résumé : confirmation d’un licenciement pour motif fondé d’une fonctionnaire ayant procédé à des inscriptions fausses dans le système de suivi des demandeurs d’emploi. Vu la gravité et l’ampleur des fautes établies qui constituent des abus de la confiance et de l’autorité dont disposait la recourante dans sa fonction, il ne peut être reproché à l’employeur d’avoir considéré que le lien de confiance était rompu.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1356/2022-FPUBL ATA/1219/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 6 décembre 2022

 

dans la cause

 

Madame A______
représentée par Mes Romain Jordan et Stéphane Grodecki, avocats

contre

DÉPARTEMENT DE L'ÉCONOMIE ET DE L'EMPLOI



EN FAIT

1) Madame A______, née en 1964, a été engagée dès le 1er août 2013 en qualité de conseillère en personnel sous le statut d’auxiliaire, pour une durée de douze mois à l’office régional de placement (ci-après : ORP) de l’office cantonal de l’emploi (ci-après : OCE) intégré actuellement au département de l’économie et de l’emploi (ci-après : le département), en classe 16 de l’échelle des traitements.

Selon son cahier des charges, son activité principale consistait à recevoir les demandeurs d’emploi à intervalles pertinents mais au moins tous les deux mois afin de les aider dans leur réinsertion sur le marché de l’emploi, de vérifier leurs recherches d’emploi et, cas échéant, de leur assigner un travail ou une mesure.

Toutes les informations telles que date, heure et lieu des entretiens de conseil et de contrôle, procès-verbaux des entretiens, courriers, téléphones, décisions, relatives au suivi de la personne demandeuse d’emploi devaient être saisies dans le système d’information fédéral en matière de placement et de statistique du marché du travail (PLASTA) selon une procédure fixée dans des directives.

2) Dès le 1er février 2016, Mme A______ a été engagée en qualité de conseillère en personnel à temps complet et nommée fonctionnaire.

Des entretiens d’évaluation et de développement du personnel (ci-après : EEDP) avec sa hiérarchie se sont déroulés les 2 décembre 2013, 28 mars 2014, 26 mars et 3 décembre 2015 ainsi que les 7 décembre 2017 et 2 mars 2020. Le bilan global de l’activité de Mme A______ était bon.

3) Dès le 16 mars 2020, du fait de la pandémie due à la Covid-19 et des mesures adoptées par l’administration cantonale genevoise, l’intéressée a effectué son travail à domicile, jusqu’au 12 mai 2020. Dès le 11 novembre 2020, le télétravail a été instauré à raison d’un jour par semaine au sein de l’OCE, soit le vendredi pour l’intéressée. Dès le 14 janvier 2021, le télétravail a été étendu à trois jours par semaine, soit les lundi, jeudi et vendredi. Pendant toute cette période, les entretiens de conseil et de contrôle n’avaient plus lieu dans les locaux de l’OCE mais par téléphone ou par vidéoconférence. Le premier entretien avait toutefois lieu en principe en personne dès le 1er septembre 2020 selon les mesures prises. L’intéressée disposait d’un bureau individuel dans les locaux de l’ORP.

4) Le 11 mars 2021, l’intéressée a été absente sans en informer préalablement sa supérieure hiérarchique et sans modifier son agenda en conséquence.

5) Le 23 mars 2021, lors d’un entretien avec Madame B______, sa supérieure hiérarchique, Mme A______ a fait part de difficultés engendrées par la pandémie. Elle ne savait plus quoi répondre aux demandeurs d’emploi provenant de secteurs sinistrés. Questionnée sur le suivi et la tenue de ses dossiers, elle a indiqué qu’ils étaient en ordre, seuls ses courriels des quatre derniers jours étant à traiter.

6) Le 29 mars 2021, Mme A______ a refusé de recevoir en mains propres une convocation à un entretien de service et une lettre de libération de l’obligation de travailler du directeur de l’ORP. Ces courriers lui ont été envoyés par la poste. Un délai pour faire des observations écrites lui a été fixé au 31 mars 2021.

Lors d’un contrôle de ses dossiers par sa supérieure, il avait été constaté que des convocations à des entretiens ne figuraient pas dans les dossiers concernés alors qu’ils avaient été planifiés dans PLASTA. Des entretiens avaient également été enregistrés dans cette base comme ayant eu lieu, bien que tel n’eut pas été le cas, et des procès-verbaux d’entretiens avaient été établis, alors que les entretiens n’avaient pas eu lieu. Mme A______ devait être entendue au sujet de ces falsifications de données PLASTA.

7) Le 12 avril 2021, le directeur de l’ORP a transmis le dossier administratif de l’intéressé à son avocate. Les faits reprochés seraient exposés en détail lors de l’entretien de service du 14 avril 2021.

8) Lors de l’entretien de service du 14 avril 2021, les manquements constatés dans le cadre du suivi des dossiers ont été exposés à l’intéressée.

Il avait été constaté, s’agissant du rythme des entretiens, que plus de cinquante demandeurs d’emploi avaient eu des entretiens planifiés dans PLASTA et dans l’agenda Outlook de Mme A______ sans qu’aucune convocation n’ait toutefois été établie, alors que cette convocation devait être planifiée et établie à l’issue de chaque entretien pour le prochain.

Des entretiens saisis sous le statut « exécuté » n’avaient pas eu lieu. Sur dix-huit demandeurs d’emploi contactés pour lesquels un entretien était planifié le 19 février ou le 18 mars 2021, seize avaient confirmé ne pas avoir eu d’entretien à ces dates. Dans cent dix-sept cas, aucun procès-verbal d’entretien n’avait été établi alors que l’entretien était saisi sous statut « exécuté », dans treize cas le procès-verbal avait été établi avant la date prévue de l’entretien, dans trente-huit cas, les entretiens avaient été enregistrés comme « exécutés » plusieurs jours après la date à laquelle ils devaient avoir lieu et dans quatre cas, les entretiens avaient été enregistrés comme « exécutés » avant la date prévue du rendez-vous.

Ces manquements avaient été constatés pour la période du 22 avril 2020 au 26 mars 2021. Ils concernaient nonante-trois des cent soixante et un dossiers dont l’intéressée avait la charge.

Une absence non annoncée ou excusée avait eu lieu le 11 mars 2021.

Durant les mois de février et mars 2021, l’intéressée n’avait pas effectué le nombre d’entretiens requis de sa part, les 8, 11, 12, 15, 18 et 19 février ainsi que les 12 et 18 mars 2021.

Ces manquements étaient de nature à compromettre le lien de confiance et l’autorité qu’impliquait l’exercice de la fonction ainsi que la bonne marche du service, et une résiliation des rapports de service pour motif fondé était envisagée.

Le compte rendu de l’entretien a été adressé à l’intéressée et les pièces sur lesquelles figuraient les éléments du contrôle tenues à sa disposition, le nom des demandeurs d’emploi étant caviardé.

9) Le 20 avril 2021, Mme A______ a contesté les faits, comme elle l’avait fait lors de l’entretien de service et réitérait sa demande de pouvoir bénéficier d’un second entretien pour pouvoir s’exprimer « en toute connaissance de cause ». Elle se tenait à disposition pour effectuer son travail.

10) Le 21 avril 2021, le Conseil d’État a ratifié la libération de l’obligation de travailler de Mme A______.

11) Le 29 avril 2021, Mme A______ a contesté à nouveau les reproches formulés par son employeur. Elle avait rempli ses obligations malgré la situation sanitaire exceptionnelle impliquant des difficultés particulières. Elle avait dû travailler depuis chez elle, sans place de travail spécifique, souvent assise par terre avec un unique petit écran et sans réseau internet ou téléphonique suffisant, comme l’attestaient ses contacts avec Swisscom. Depuis le mois d’avril 2020, elle vivait une situation médicale et familiale dramatique dont elle n’avait pas osé faire part à son employeur. Sa fille s’était vu diagnostiquer un cancer en avril 2020. L’absence du 11 mars 2021 était liée à un rendez-vous médical et un justificatif serait fourni. En outre, elle bénéficiait d’un horaire de confiance et n’avait pas à annoncer une absence pour un rendez-vous médical.

12) Le 1er mai 2021, l’intéressée a fait parvenir un certificat médical concernant son absence du 11 mars 2021.

13) Le 22 juin 2021, le département a informé Mme A______ maintenir sa position. La conseillère d’État en charge du département a rendu une décision incidente d’ouverture de la procédure de reclassement, laquelle s’est déroulée du 22 juin au 30 septembre 2021.

14) Un certificat de travail intermédiaire a été délivré à Mme A______ le 30 juin 2021. Cette dernière a, dans un premier temps, indiqué vouloir contester ce certificat le 13 juillet 2021 puis, le 30 août 2021, a renoncé à le faire, après que l’OCE eut indiqué le 21 juillet 2021 qu’il satisfaisait aux quatre principes de vérité, bienveillance, exhaustivité et clarté et qu’il attestait de la durée de la relation de travail, de la nature des prestations fournies, de la qualité du travail accompli et de la conduite du travailleur.

15) Dès le 29 septembre 2021, Mme A______ s’est trouvée en arrêt de travail pour des raisons de santé.

16) L’entretien de clôture de la procédure de reclassement n’ayant pas pu avoir lieu, un compte rendu a été rédigé par la responsable des ressources humaines de l’OCE le 20 septembre 2021, lequel reprend en détail le déroulement de la procédure.

17) Le 14 octobre 2021, l’intéressée a allégué que la procédure de reclassement n’avait pas été menée correctement demandant sa prolongation d’un mois, et a contesté qu’une résiliation des rapports de service soit fondée.

18) Par décision déclarée exécutoire nonobstant recours du 30 mars 2022, la conseillère d’État en charge du département a résilié les rapports de service de Mme A______ avec effet au 30 juin 2021, à l’issue de la période de protection applicable du fait de son incapacité de travail.

Les faits reprochés étaient particulièrement graves. En falsifiant une base de données fédérale et en faisant croire qu’elle recevait des demandeurs d’emploi, alors que tel n’était pas le cas, Mme A______ avait lésé ces personnes et trompé son employeur ainsi que le secrétariat d’État à l’économie (SECO).

19) Par acte mis à la poste le 29 avril 2022, Mme A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision de résiliation, concluant préalablement à la restitution de l’effet suspensif, à la comparution personnelle des parties et à l’audition de tous les demandeurs d’emploi identifiés par des numéros de codes dans le procès-verbal d’entretien de service du 14 avril 2021. Principalement, elle a conclu à l’annulation de la décision et à ce que sa réintégration soit ordonnée.

N’ayant pas pu interroger les demandeurs d’emploi concernés, elle ne pouvait que faire l’hypothèse que les entretiens qui avaient eu lieu avaient été inscrits à une date erronée dans le système. Il ne s’agissait pas de falsifications mais d’erreurs ou d’imprécisions. Elle n’avait pas pu participer aux investigations ni y avoir accès. Aucune enquête administrative n’avait été formellement menée, en violation de ses droits.

Le fait que des entretiens n’apparaissaient pas dans l’historique ne signifiait pas qu’ils n’avaient pas eu lieu. Les procès-verbaux avec une date antérieure à l’entretien prévu provenaient de cas où elle avait fait suivre des appels téléphoniques de demandeurs d’emploi, avec leur accord, de l’entretien initialement prévu à une autre date.

L’autorité intimée avait décidé de la suspendre en raison des investigations en cours, afin d’éviter « qu’elle tente de convaincre des assurés de témoigner contrairement à la réalité ». Pourtant aucune investigation n’avait plus été menée après l’entretien de service du 14 avril 2021. En s’abstenant d’ouvrir une enquête administrative, l’autorité n’avait jamais établi les faits et violé son droit d’être entendue.

Il ressortait de ses nombreux EEDP qu’elle avait des qualités personnelles et professionnelles appréciées et reconnues. Les reproches relatifs au traitement des dossiers concernaient le premier trimestre 2021, période particulièrement difficile pour elle, mais ses compétences générales n’avaient jamais été mises en cause avant l’entretien de service. L’autorité intimée avait évité d’établir les faits et d’appliquer le principe de proportionnalité à une éventuelle sanction au regard de l’entier de sa carrière dans une procédure disciplinaire. Cette fraude à la loi devait entraîner l’annulation de la décision et sa réintégration.

La sanction d’un comportement sur quelques mois, soit des imprécisions sur les dates, durant une année difficile, n’était pas un motif propre à démontrer que la poursuite des rapports n’était pas compatible avec les besoins du service, ceux-ci ayant duré depuis près de dix ans à la satisfaction de l’employeur.

La procédure de reclassement n’avait pas été respectée. Un mauvais certificat de travail intermédiaire lui avait été fourni. Elle n’avait bénéficié d’aucune mesure de développement ou de réinsertion professionnelle. Dans le cadre de la procédure de reclassement, elle avait demandé une formation SIRH qui lui avait été refusée. Cette procédure n’avait pas été menée correctement. Le choix de la période estivale démontrait le refus de mener cette procédure avec sérieux. Le simple et seul envoi d’un extrait des places vacantes ne satisfaisait pas aux exigences de la loi. Cette violation du principe de la proportionnalité devait conduire à l’annulation de la décision et à sa réintégration.

20) Le 19 mai 2022, l’office du personnel de l’État (OPE) a déposé des observations, s’opposant à la restitution de l’effet suspensif.

21) Le 13 juin 2022, Mme A______ a répliqué sur effet suspensif. Étant toujours en incapacité de travail, elle ne pouvait pas bénéficier de prestations de chômage et était privée de toute ressource alors qu’elle avait à sa charge deux enfants majeurs en études.

22) Par décision du 28 juin 2022, la chambre administrative a rejeté la demande de restitution d’effet suspensif (ATA/688/2022).

23) Le 21 juin 2022, l’OPE a déposé des observations.

Deux tableaux récapitulatifs des irrégularités constatées dans les dossiers traités par la recourante étaient produits.

Cette dernière avait été informée lors de son entretien de service des déclarations recueillies auprès des dix-huit personnes convoquées pour un entretien les 19 février et 18 mars 2021. Elle avait également été informée de l’identité des personnes qui figuraient dans les annexes au compte rendu.

La violation fautive des devoirs de service n’excluait pas le prononcé d’un licenciement pour motif fondé et l’argument consistant à se plaindre de l’absence de procédure disciplinaire devait être rejeté.

La recourante n’avait pas respecté ses obligations et des manquements avaient été constatés à plus de cent cinquante occasions. Elle avait trompé la confiance de son employeur et son comportement était incompatible avec le bon fonctionnement du service, ne permettant pas d’exiger la continuation des rapports de service. La résiliation reposait sur des motifs fondés.

La situation personnelle alléguée ne saurait justifier les manquements et la recourante n’avait jamais informé sa hiérarchie d’une quelconque incapacité même partielle à remplir ses tâches au vu de celles-ci. Elle ne pouvait non plus tirer parti des difficultés d’infrastructures liées à la pratique du télétravail. Disposant d’un bureau individuel, il n’y avait aucune contre-indication à ce qu’elle effectue ses prestations depuis sa place de travail, étant précisé que la pratique du télétravail ne pouvait être envisagée que lorsque les conditions de base étaient remplies au domicile.

La procédure de reclassement avait été respectée. Il n’y avait pas d’obligation d’appliquer l’intégralité des mesures possibles. La procédure avait été prolongée à bien plaire d’un mois.

24) Le 8 août 2022, la recourante a répliqué.

L’autorité intimée n’avait toujours pas fourni les éléments essentiels tels que les identités, le moyen de contact et le contenu de la discussion, notamment des dix-huit personnes qu’elle alléguait avoir contactées.

Elle avait été suspendue par le Conseil d’État. Or, une suspension n’était possible qu’en présence d’une enquête administrative ou d’une enquête pénale mais nullement en cas de procédure de licenciement pour motif fondé. Au vu du contenu de l’arrêté de suspension, l’autorité intimée ne pouvait plus renoncer à ouvrir une enquête administrative.

L’ensemble de son parcours n’avait pas été pris en compte dans l’examen des motifs de la résiliation.

25) Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) La recourante sollicite l’audition des demandeurs d’emploi identifiés par des numéros de codes dans le procès-verbal d’entretien de service du 14 avril 2021 ainsi que la comparution personnelle des parties. Ces demandeurs d’emploi auraient été contactés par le département, sans qu’aucun procès-verbal ait été établi et sans qu’elle ait pu participer aux investigations.

a. Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé d’offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l’administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 145 I 73 consid. 7.2.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_157/2021 du 7 juillet 2021 consid. 3.1).

Le droit de faire administrer des preuves n’empêche cependant pas le juge de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s’il acquiert la certitude que celles-ci ne l’amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 145 I 167 consid. 4.1. ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_576/2020 du 1er avril 2021 consid. 3.1).

b. Les témoignages des seize demandeurs d’emploi que sollicite la recourante portent sur des entretiens qui auraient été planifiés les 19 février et 18 mars 2021, l’autorité intimée alléguant que ceux-ci n’avaient pas eu lieu, ce que conteste la recourante. Cette dernière fait l’hypothèse que les différences constatées résulteraient d’erreurs et d’imprécisions réalisées lors des inscriptions auxquelles elle a procédé.

Or, les manquements retenus par l’autorité intimée concernant ces entretiens non effectués dans le cas de seize demandeurs d’emploi ne constituent qu’une petite partie des plus de cent cinquante reproches faits à la recourante.

En conséquence, il faut constater que le dossier contient suffisamment d’éléments permettant de trancher le litige et la chambre de céans estime qu’il n’est pas nécessaire de donner suite aux mesures d’instructions supplémentaires sollicitées par la recourante.

3) La recourante conteste l’établissement des faits retenus à son encontre, car elle n’aurait pas pu participer aux investigations menées par l’autorité intimée.

La critique de la recourante tombe à faux, dans la mesure où les inscriptions fausses relevées dans le système PLASTA correspondent pour cent dix-sept d’entre elles à l’absence de procès-verbal alors qu’un entretien figure sous statut « exécuté » ; pour treize cas à des procès-verbaux établis avant la date prévue de l’entretien, pour trente-huit cas à des entretiens « exécutés » plusieurs jours après leur date et pour quatre cas à des entretiens enregistrés comme « exécutés » avant la date prévue du rendez-vous.

Ces faits ressortent directement des inscriptions faites par la recourante dans le système PLASTA et dont la recourante ne conteste, à juste titre, ni leur existence ni le fait qu’elle en est l’auteur. Ainsi l’établissement de la grande majorité des faits relève directement de ses propres inscriptions et non pas de mesures d’investigation auxquelles aurait procédé l’autorité intimée.

4) La recourante conteste que les inscriptions erronées constituent des manquements graves à ses devoirs de service qui équivalent à un motif fondé de résiliation. Un comportement qui avait duré quelques mois seulement, pendant une année difficile, n’était pas suffisant pour justifier son licenciement au regard de ses qualités personnelles et professionnelles reconnues.

a. En sa qualité de fonctionnaire de l’État de Genève, la recourant est soumise à la loi générale relative au personnel de l’administration cantonale, du pouvoir judiciaire et des établissements publics médicaux du 4 décembre 1997 (LPAC - B 5 05) et au règlement d’application de la loi générale relative au personnel de l’administration cantonale, du pouvoir judiciaire et des établissements publics médicaux du 24 février 1999 (RPAC - B 5 05.01).

b. Les devoirs du personnel sont énumérés aux art. 20 ss RPAC. Selon l'art. 20 RPAC, les membres du personnel sont tenus au respect de l’intérêt de l’État et doivent s’abstenir de tout ce qui peut lui porter préjudice.

Ils se doivent, par leur attitude : a) d’entretenir des relations dignes et correctes avec leurs supérieurs, leurs collègues et leurs subordonnés ; de permettre et de faciliter la collaboration entre ces personnes ; b) d’établir des contacts empreints de compréhension et de tact avec le public ; c) de justifier et de renforcer la considération et la confiance dont la fonction publique doit être l’objet (art. 21 RPAC).

S’agissant de l’exécution du travail, l’art. 22 RPAC prévoit que les membres du personnel se doivent de remplir tous les devoirs de leur fonction consciencieusement et avec diligence (al. 1).

Un fonctionnaire, pendant et en dehors de son travail, a l'obligation d'adopter un comportement qui inspire le respect et qui est digne de confiance, et sa position exige qu'il s'abstienne de tout ce qui peut porter atteinte aux intérêts de l'État (arrêt du Tribunal fédéral 8C_146/2014 du 26 juin 2014 consid. 5.5).

Le fonctionnaire n’entretient pas seulement avec l’État qui l’a engagé et le rétribue les rapports d’un employé avec un employeur, mais, dans l’exercice du pouvoir public, il est tenu d’accomplir sa tâche de manière à contribuer au bon fonctionnement de l’administration et d’éviter ce qui pourrait nuire à la confiance que le public doit pouvoir lui accorder. Il lui incombe en particulier un devoir de fidélité qui s’exprime par une obligation de dignité. Cette obligation couvre tout ce qui est requis pour la correcte exécution de ses tâches (ATA/1088/2020 du 3 novembre 2020 consid. 4a).

c. La LPAC prévoit que les rapports de service peuvent être résiliés pour motif fondé (art. 21 al. 3 LPAC). Il y a motif fondé, lorsque la continuation des rapports de service n'est plus compatible avec le bon fonctionnement de l'administration, soit notamment en raison de l'insuffisance des prestations (art. 22 let. a LPAC), de l'inaptitude à remplir les exigences du poste (art. 22 let. b LPAC) ou de la disparition durable d'un motif d'engagement (art. 22 let. c LPAC).

L'élargissement des motifs de résiliation des rapports de service, lors de la modification de la LPAC, en vigueur depuis le 31 mai 2007, n'implique plus de démontrer que la poursuite des rapports de service est rendue difficile, mais qu'elle n'est plus compatible avec le bon fonctionnement de l'administration (ATA/838/2019 du 30 avril 2019 consid. 3b ; ATA/783/2016 du 20 septembre 2016 consid. 5b). L'intérêt public au bon fonctionnement de l'administration cantonale, déterminant en la matière, sert de base à la notion de motif fondé, lequel est un élément objectif indépendant de la faute du membre du personnel. La résiliation pour motif fondé, qui est une mesure administrative, ne vise pas à punir mais à adapter la composition de la fonction publique dans un service déterminé aux exigences relatives au bon fonctionnement dudit service (ATA/1190/2019 du 30 juillet 2019 consid. 5b ; ATA/240/2019 du 12 mars 2019 consid. 5b et les références citées ; Mémorial du Grand Conseil 2005-2006/XI A 10420).

d. Des manquements dans le comportement de l'employé ne peuvent constituer un motif de licenciement que lorsqu'ils sont reconnaissables également pour des tiers. Il faut que le comportement de l'employé perturbe le bon fonctionnement du service ou qu'il soit propre à ébranler le rapport de confiance avec le supérieur (arrêt du Tribunal administratif fédéral A-897/2012 du 13 août 2012 consid. 6.3.2 ; Valérie DÉFAGO GAUDIN, Conflits et fonction publique : instruments, in Jean-Philippe DUNAND/Pascal MAHON [éd.], Conflits au travail, 2015, p. 161-162). S'agissant des devoirs du personnel, les membres du personnel sont tenus au respect de l’intérêt de l’État et doivent s’abstenir de tout ce qui peut lui porter préjudice (art. 20 du règlement d’application de la LPAC du 24 février 1999 - RPAC - B 5 05.01).

e. Quant à l'exécution du travail, les fonctionnaires se doivent notamment de remplir tous les devoirs de leur fonction consciencieusement et avec diligence en respectant notamment la légalité et l'intérêt public (art. 22 al. 1 RPAC). Il est important que le travail s'accomplisse dans une atmosphère de courtoisie réciproque, aussi bien à l'égard des collègues que des tiers. Le fonctionnaire doit par ailleurs veiller à la conformité au droit de ses actes ; il lui appartient d'informer ses supérieurs des problèmes qui pourraient poser et des éventuelles améliorations à apporter au service (Pierre MOOR/François BELLANGER/ Thierry TANQUEREL, Droit administratif, Vol. III, 2ème éd., 2018, n° 7.3.3.1).

f. L'État et les communes sont tenus, d'une part, d'agir dans l'intérêt public et, d'autre part, de prendre en considération les intérêts privés de leurs fonctionnaires. Ils doivent, dans leur politique du personnel, comparer les deux intérêts en cause. Ainsi, lorsqu'il s'agit de déterminer s'il y a de justes motifs de licenciement, il convient de comparer l'intérêt public à se séparer d'un collaborateur avec l'intérêt de ce dernier à conserver son emploi. Il faut en outre tenir compte de la nécessité de l'existence d'un rapport de confiance entre l'autorité et ses collaborateurs. Tenus, envers l'ensemble de la population, d'assurer le respect du droit, l'État et les communes doivent pouvoir s'en remettre sans hésiter aux fonctionnaires qu'ils chargent d'assumer leurs tâches (ATA/148/2018 du 20 février 2018 consid. 8g ; ATA/308/2017 du 21 mars 2017 consid. 6f et les arrêts cités ; Philippe BOIS, La cessation des rapports de service à l'initiative de l'employeur dans la fonction publique, RJN 1983 p. 27).

g. L’employeur jouit d’un large pouvoir d’appréciation pour juger si les manquements d’un fonctionnaire sont susceptibles de rendre la continuation des rapports de service incompatible avec le bon fonctionnement de l’administration. Les rapports de service étant soumis au droit public, la résiliation est en outre assujettie au respect des principes constitutionnels, en particulier ceux de la légalité, de l’égalité de traitement, de l’interdiction de l’arbitraire et de la proportionnalité (ATA/993/2021 du 28 septembre 2021 consid. 4 ; ATA/600/2021 du 8 juin 2021 consid. 9d).

5) En l’espèce, s’agissant d’apprécier la gravité des manquements de la recourante, il faut tenir compte de la quantité d’inscriptions fausses dans le système PLASTA, ces dernières étant établies par pièces, ce qui n’est pas contesté par la recourante. Il s’agit de cent dix-sept inscriptions touchant nonante-trois dossiers de demandeurs d’emploi parmi les cent soixante et un dont la recourante avait la charge.

Il faut aussi tenir compte de l’absence d’explication crédible donnée pour justifier ces faits, la recourante persistant à les qualifier de simples erreurs dans la saisie d’informations. Elle offre une explication pour les entretiens et procès-verbaux « antidatés », en lien avec des appels reçus des demandeurs d’emploi au cours desquels elle aurait réalisé les entretiens. Toutefois, cette explication concerne tout au plus les quatre cas pour lesquels l’entretien a été saisi comme « exécuté » avant la date prévue. Concernant les autres manquements, elle n’offre aucune explication, notamment s’agissant des cent dix-sept inscriptions dans le système PLASTA indiquant qu’un entretien avait eu lieu, mais pour lesquels aucun procès-verbal n’a été établi.

Ces manquements constituent donc soit des fraudes si l’entretien n’a pas eu lieu, soit de graves manquements dans l’exécution du travail confié à la recourante si un entretien a eu lieu, puisque le suivi des demandeurs d’emploi prévu par la loi ne peut être effectué sur la base d’informations lacunaires quant à leur situation. Ces lacunes existent de fait, compte tenu des relevés effectués dans le système PLASTA, dans plus de la moitié des dossiers confiés à la recourante.

Vu la gravité et l’ampleur des fautes établies qui constituent des abus de la confiance et de l’autorité dont disposait la recourante dans sa fonction, il n’est pas nécessaire d’examiner plus avant les autres faits reprochés comme ceux en lien avec les seize autres demandeurs d’emploi qui n’auraient pas bénéficié d’un entretien ou si le nombre d’entretiens requis par les directives en vigueur a bien été observé par la recourante pendant les mois de février et mars 2021 ou encore, si le fait de ne pas annoncer son absence du 11 mars 2021 était conforme aux mêmes directives.

Au vu de ce qui précède et compte tenu du fait que la fonction de la recourante consistait à suivre les personnes assurées à intervalles réguliers, de contrôler leur aptitude au placement ainsi que leur disponibilité mais également de leur assigner un travail convenable ou une mesure relative au marché du travail, il ne saurait être reproché à l’employeur d’avoir considéré que les manquements constatés étaient particulièrement graves et qu’ils suffisaient à rompre le lien de confiance.

Cette conclusion peut être suivie même en tenant compte des bonnes évaluations de l’activité de la recourante jusque-là, vu notamment la gravité des faits et celle de l’atteinte portée aux intérêts publics. La situation objectivement très difficile dans laquelle dit s’être trouvée la recourante en raison des graves problèmes de santé de sa fille et le choix qu’elle a fait de ne pas en informer son employeur, s’ils constituent une explication de sa part, ne permettent toutefois pas de justifier les comportements qu’elle a adoptés dans un cadre professionnel.

Le grief doit donc être écarté.

6) La recourante fait valoir qu’en ne diligentant pas une enquête administrative, l’autorité intimée aurait violé son droit d’être entendue tout en commettant une fraude à la loi.

a. Outre la résiliation des rapports de service du fonctionnaire pour motif fondé, dite résiliation administrative, la LPAC prévoit également des sanctions disciplinaires.

Selon l'art. 16 LPAC, traitant des sanctions disciplinaires, les fonctionnaires et les employés qui enfreignent leurs devoirs de service, soit intentionnellement soit par négligence, peuvent faire l'objet, selon la gravité de la violation, des sanctions suivantes : a) prononcé par le supérieur hiérarchique, en accord avec sa hiérarchie : 1° le blâme ; b) prononcées, au sein de l'administration cantonale, par le chef du département ou le chancelier d'État, d'entente avec l'office du personnel de l'État ; au sein des services centraux et des greffes du pouvoir judiciaire, par le secrétaire général du pouvoir judiciaire ; au sein de l'établissement, par le directeur général : 2° la suspension d'augmentation du traitement pendant une durée déterminée, 3° la réduction de traitement à l'intérieur de la classe ; c) prononcées, à l'encontre d'un fonctionnaire, au sein de l'administration cantonale, par le Conseil d'État ; au sein des services centraux et des greffes du pouvoir judiciaire, par la commission de gestion du pouvoir judiciaire ; au sein de l'établissement par le conseil d'administration : 4° le retour au statut d'employé en période probatoire pour une durée maximale de trois ans, 5° la révocation.

b. Selon le Tribunal fédéral, la violation fautive des devoirs de service n'exclut pas le prononcé d'un licenciement pour motif fondé (dit licenciement ordinaire ou administratif). Si le principe même d'une collaboration ultérieure est remis en cause par une faute disciplinaire de manière à rendre inacceptable une continuation du rapport de service, un simple licenciement, dont les conséquences sont moins graves pour la personne concernée, peut être décidé à la place de la révocation disciplinaire, étant précisé que toute violation des devoirs de service ne saurait être sanctionnée par la voie de la révocation disciplinaire. Cette mesure revêt l'aspect d'une peine et a un caractère plus ou moins infamant. Elle s'impose surtout dans les cas où le comportement de l'agent démontre qu'il n'est plus digne de rester en fonction. Dans la pratique, la voie de la révocation disciplinaire est rarement empruntée (arrêt du Tribunal fédéral 8C_203/2010 du 1er mars 2011 consid. 3.5 ; ATA/1120/2022 du 8 novembre 2022 consid. 5b ; ATA/674/2017 du 20 juin 2017 consid. 14d ; ATA/892/2016 du 25 octobre 2016 consid. 4).

Au vu de ce qui précède, il ne saurait être reproché à l’autorité intimée de ne pas avoir choisi la voie disciplinaire pour sanctionner les comportements de la recourante, le principe même d'une collaboration ultérieure étant remis en cause par des fautes qui rendaient inacceptable une continuation du rapport de service.

En conséquence, le grief sera écarté.

7) La recourante conteste la mesure de suspension provisoire prise par l’autorité intimée dans la mesure où elle n’a été suivie d’aucune enquête administrative, la voie administrative ayant été privilégiée.

a. Aux termes de l’art. 28 LPAC, dans l'attente du résultat d'une enquête administrative ou d'une information pénale, le Conseil d'État peut, de son propre chef ou à la demande de l'intéressé, suspendre provisoirement un membre du personnel auquel il est reproché une faute de nature à compromettre la confiance ou l'autorité qu'implique l'exercice de sa fonction (al. 1). Cette décision est notifiée par lettre motivée (al. 2). La suspension provisoire peut entraîner la suppression de toute prestation à la charge de l’État ou de l’établissement (al. 3). À l’issue de l’enquête administrative, il est veillé à ce que l’intéressé ne subisse aucun préjudice réel autre que celui qui découle de la décision finale. Une décision de révocation avec effet immédiat peut cependant agir rétroactivement au jour de l'ouverture de l'enquête administrative (al. 4).

b. Selon la jurisprudence, une suspension provisoire d'un fonctionnaire peut être justifiée soit par les besoins de l'enquête administrative, soit en tant qu'exécution anticipée, à titre provisionnel, de la fin des rapports de service en raison d'une faute alléguée de nature à rompre la confiance qu'implique l'exercice de la fonction de l'intéressé (ATA/219/2022 du 1er mars 2022 consid. 6b les arrêts cités). Dans ce dernier cas, la mesure n'est justifiée que si trois conditions sont remplies : 1) la faute reprochée à l'intéressé doit être de nature, a priori, à justifier une cessation immédiate de l'exercice de sa fonction ; 2) la prévention de faute à l'encontre de l'intéressé doit être suffisante, même si, s'agissant d'une mesure provisionnelle prise précisément pendant la durée d'une enquête administrative ou pénale, une preuve absolue ne peut évidemment pas être exigée ; 3) la suspension devra apparaître comme globalement proportionnée, compte tenu de la situation de l'intéressé et des conséquences de sa suspension, de la gravité de la faute qui lui est reprochée, de la plus ou moins grande certitude quant à sa culpabilité ainsi que de l'intérêt de l'État à faire cesser immédiatement tant les rapports de service que, s'il y a lieu, ses propres prestations (ATA/510/2017 du 9 mai 2017 consid. 6).

c. En l’espèce, la recourante, qui a continué à percevoir son traitement pendant sa libération de l'obligation de travailler, n'invoque à juste titre pas d'atteinte à ses intérêts économiques ni ne soulève aucun autre grief en lien avec la suspension. En outre, les autres conditions susmentionnées sont remplies puisqu’il a été constaté avant la suspension que les inscriptions faites par la recourante dans PLASTA étaient fausses ou insuffisantes et cela dans une majorité des dossiers qu’elle avait été amenée à traiter. La gravité de ces manquements a déjà été examinée et confirmée ci-dessus et l’atteinte portée à l’intérêt public lié au placement des demandeurs d’emploi a été prise en considération dans sa juste mesure par l’autorité intimée.

Le grief sera donc écarté.

8) Finalement, la recourante conteste le déroulement de la procédure de reclassement. Celle-ci n’aurait pas été menée conformément au droit.

a. La procédure de reclassement est réglée à l’art. 46A RPAC, qui prévoit que lorsque les éléments constitutifs d’un motif fondé de résiliation sont dûment établis lors d’entretiens de service, un reclassement selon l’art. 21 al. 3 LPAC est proposé pour autant qu’un poste soit disponible au sein de l’administration et que l’intéressé au bénéfice d’une nomination dispose des capacités nécessaires pour l’occuper (al. 1). Des mesures de développement et de réinsertion professionnels propres à favoriser le reclassement sont proposées (al. 2). L’intéressé est tenu de collaborer. Il peut faire des suggestions (al. 3). En cas de refus, d’échec ou d’absence du reclassement, une décision motivée de résiliation des rapports de service pour motif fondé intervient (al. 6).

b. Le principe du reclassement, applicable aux seuls fonctionnaires, est une expression du principe de la proportionnalité (art. 5 al. 2 Cst.) et impose à l’État de s’assurer, avant qu’un licenciement ne soit prononcé, qu’aucune mesure moins préjudiciable pour l’administré ne puisse être prise (arrêt du Tribunal fédéral 1C_309/2008 du 28 janvier 2009 consid. 2.2 ; ATA/130/2022 du 8 février 2022 consid. 6b ; ATA/78/2020 du 28 janvier 2020 consid. 4a et les arrêts cités). La loi n’impose toutefois pas à l’État une obligation de résultat, mais celle de mettre en œuvre tout ce qui peut être raisonnablement exigé de lui (ATA/1782/2019 du 10 décembre 2019 consid. 13e). En outre, l'obligation de l'État de rechercher un autre emploi correspondant aux capacités du membre du personnel se double, corrélativement, d'une obligation de l'employé, non seulement de ne pas faire obstacle aux démarches entreprises par l'administration, mais de participer activement à son reclassement (ATA/1356/2021 du 14 décembre 2021 consid. 12b et les références citées).

c. Le Tribunal fédéral a rappelé qu’il n’existait pas d’obligation pour l’État d’appliquer dans chaque cas l’intégralité des mesures possibles et imaginables, l’autorité disposant d’un large pouvoir d’appréciation pour déterminer et choisir les mesures qui lui semblaient les plus appropriées afin d’atteindre l’objectif de reclassement. L’intéressé peut faire des suggestions mais n’a pas de droit quant au choix des mesures entreprises. Le principe du reclassement, qui concrétise le principe de la proportionnalité, signifie que l’employeur est tenu d’épuiser les possibilités appropriées et raisonnables pour réincorporer l’employé dans le processus de travail et non de lui retrouver coûte que coûte une place de travail (arrêt du Tribunal fédéral 8C_381/2021 du 17 décembre 2021 consid. 6.2 et l’arrêt cité).

d. La jurisprudence fédérale a admis que lorsqu'un reclassement revenait en fin de compte à reporter dans un autre service des problèmes de comportement reprochés au recourant, il paraissait illusoire (arrêt du Tribunal fédéral 8C_839/2014 du 5 mai 2015 consid. 7.1).

L’absence de procédure de reclassement a été admise dans le cas d’une gérante sociale qui avait de très importants problèmes de communication et de comportement, durant une période de sept ans, avec l’ensemble des catégories d’interlocuteurs, tant internes qu’externes, à son institution (ATA/1576/2019 du 29 octobre 2019 consid. 14). Elle l’a également été compte tenu de l’attitude générale inappropriée d’une autre employée sur son lieu de travail, insuffisamment respectueuse de la sphère personnelle d’autrui, et de comportements inappropriés à l’égard de certaines collaboratrices, ce qui avait conduit au prononcé d’un avertissement et à la fixation d’objectifs qui n’avaient pas été réalisés, si bien que la continuation des rapports de service a été jugée incompatible avec le bon fonctionnement du département intimé (ATA/674/2017 du 20 juin 2017 consid. 19).

En revanche, la chambre de céans a jugé que le seul fait de diffuser à une reprise par un courriel – contenant un portrait de la recourante pour le moins peu apte à susciter l’intérêt des destinataires pour sa candidature, laquelle n’avait rencontré aucun succès – une demande de postes disponibles, ne répondait pas aux exigences minimales en termes de reclassement. De même, les changements de service ne constituaient pas des mesures de reclassement (ATA/367/2021 du 30 mars 2021 consid. 6b). Dans une autre cause, elle a jugé conforme au droit l’envoi à l’ensemble des départements le profil du recourant pour savoir si un poste adapté à ses compétences était ouvert en libérant celui-ci de son activité pendant le délai de congé. Cette conclusion s’est imposée au vu des circonstances particulières du cas d’espèce, s’agissant d’un chauffeur qui ne pouvait plus se voir confier une activité en lien avec la conduite, seul domaine d’activité envisageable au regard de ses qualifications (ATA/506/2022 du 17 mai 2022 consid. 10).

9) En l’espèce, la procédure de reclassement s’est déroulée du 22 juin au 30 septembre 2021, après avoir été prolongée d’un mois à la demande de la recourante. Elle s’est en partie déroulée pendant la période estivale, ce que la recourante reproche à l’autorité intimée. À cet égard, la chambre de céans a déjà retenu qu’il ne s’agissait pas d’un manquement, comme ne l’était pas le fait que l’administration n’avait pas motivé son refus de prolonger une procédure de reclassement (ATA/663/2021 du 29 juin 2021 consid. 16c ; ATA/783/2016 du 20 septembre 2016 consid. 6c).

Lors de la procédure, la recourante a été reçue à plusieurs reprises par la responsable des ressources humaines, son curriculum vitae a été adressé à tous les départements et son attention a été attirée sur l’existence d’un poste précis, puis sa candidature a été soutenue à six reprises. Une formation lui aurait été refusée concernant l’utilisation de l’application au système d’information des ressources humaines interne à l’État de Genève (SIRH). Il appert que cette formation se fait à l’aide de tutoriels, en tout cas s’agissant des nouvelles fonctionnalités de l’application introduites début 2021. En outre, l’autorité intimée souligne que le nombre de personnes ayant accès à cette application au sein des services est limité, vu les données sensibles contenues, ce qui justifiait également sa décision de ne pas donner cet accès à la recourante.

En conséquence, la procédure de reclassement ne prête pas le flanc à la critique et le grief doit être écarté.

Au vu de ce qui précède, le recours, mal fondé, sera rejeté.

10) Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 1'500.- sera mis à la charge de la recourante (art. 87 al. 1 LPA) et il ne sera pas alloué d’indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 29 avril 2022 par Madame A______ contre la décision du département de l’économie et de l’emploi du 30 mars 2022 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 1'500.- à la charge de Madame A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s’il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n’est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Mes Romain Jordan et Stéphane Grodecki, avocats de la recourante, ainsi qu'au département de l'économie et de l'emploi.

Siégeant : M. Mascotto, président, Mme Krauskopf, M. Verniory, Mmes Payot
Zen-Ruffinen et Lauber, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

M. Rodriguez Ellwanger

 

 

le président siégeant :

 

 

C. Mascotto

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :