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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/13399/2024

ACPR/666/2024 du 13.09.2024 sur ONMMP/2620/2024 ( MP ) , REJETE

Descripteurs : ORDONNANCE DE NON-ENTRÉE EN MATIÈRE;QUALITÉ POUR AGIR ET RECOURIR;FAUX TÉMOIGNAGE;DIFFAMATION;CALOMNIE;EXCUSABILITÉ
Normes : CPP.382.al1; CP.307; CPP.310.al1.leta; CP.173; CP.174; CP.14

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/13399/2024 ACPR/666/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du vendredi 13 septembre 2024

 

Entre

A______, représenté par Me Cyrielle FRIEDRICH, avocate, rue de la Fontaine 7,
1204 Genève,

recourant,

 

contre l'ordonnance de non-entrée en matière rendue le 17 juin 2024 par le Ministère public,

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A.           a. Par acte déposé le 1er juillet 2024, A______ recourt contre l'ordonnance du 17 juin 2024, notifiée le 21 juin suivant, par laquelle le Ministère public a refusé d'entrer en matière sur sa plainte contre B______.

Le recourant conclut, sous suite de frais et dépens, à l'annulation de cette ordonnance et au renvoi de la cause au Ministère public pour l'ouverture d'une instruction.

b. Le recourant a versé les sûretés en CHF 1'000.- qui lui étaient réclamées par la Direction de la procédure.

B.            Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a.        Un conflit oppose C______ à ses voisins du dessous, A______ et l'épouse [D______] de celui-ci, depuis plusieurs années.

Une procédure pénale, ouverte dans ce contexte sous la référence P/1______/2024 par suite d'une première plainte déposée par C______ contre l'épouse de A______, est actuellement toujours pendante.

b.        Le 5 février 2024, C______ a déposé plainte contre A______ pour de nouveaux faits survenus le 29 janvier 2024.

Elle a notamment expliqué que l'épouse de A______ l'avait poussée en entrant de force dans l'ascenseur de leur immeuble, alors qu'elle venait d'y pénétrer pour monter chez elle, au cinquième étage. Elle avait alors préféré prendre les escaliers et laisser sa voisine monter seule. Arrivée au quatrième étage, elle avait entendu l'épouse de A______ crier, l'insulter et se plaindre d'elle à son époux, dans leur appartement, la porte de celui-ci étant restée ouverte. Arrivée au cinquième étage, elle avait vu A______ monter les escaliers, furieux, en l'insultant et en criant. Hors de lui, il l'avait agressée physiquement en la poussant et en lui mettant ses mains à la hauteur de son cou. Un autre voisin du quatrième étage, E______, s'était interposé et avait tenté de raisonner A______. Sa belle-mère, B______, qui se trouvait chez elle, était arrivée et avait également pris sa défense.

c.         Une instruction a été ouverte à l'encontre de A______ en raison de ces faits pour injure, tentatives de lésions corporelles et menaces sous le même numéro de procédure précitée, soit P/1______/2024.


 

d.        Une audience s'est tenue le 19 mars 2024 par-devant le Ministère public dans le cadre de ladite procédure.

Lors de cette audience, C______ a confirmé sa plainte en expliquant que A______ s'était approché d'elle en criant et en l'insultant et qu'il l'avait prise au niveau des épaules, dans le but de la pousser. Il ne l'avait pas étranglée, ni saisie par le cou. E______ s'était interposé entre elle et A______ et celui-ci l'avait lâchée pour se retourner contre celui-là. B______ était également intervenue.

E______, entendu en qualité de témoin, a expliqué qu'après avoir perçu des bruits inhabituels, il était sorti de chez lui et avait vu A______, en présence de son épouse, en train d'empoigner C______ dans l'escalier. Il était spontanément monté et lui avait dit d'arrêter. A______ s'était immédiatement retourné dans sa direction et avait lâché C______, laquelle avait été tenue "dangereusement" contre la balustrade. Les mains de A______ étaient posées sur le haut du corps de C______, au niveau des épaules. La situation était "assez confuse", A______ et son épouse étaient "hors de contrôle", et celle-ci "parlait fort". B______, sortie de l'appartement de C______, était aussi présente. Il n'avait pas souvenir du comportement qu'elle avait adopté.

B______, auditionnée en qualité de témoin, a expliqué qu'elle avait entendu beaucoup de bruit, alors qu'elle se trouvait dans l'appartement de sa belle-fille. Elle avait ouvert la porte d'entrée et vu A______ attraper C______ par le cou, de manière très violente. Elle avait hurlé et s'était avancée pour se positionner entre les deux. E______ était heureusement intervenu. Elle avait dit à A______ qu'on ne frappait pas une femme et que c'était inacceptable de la part d'un homme. Elle avait eu peur, mais E______ avait bien géré la situation.

e.         À la suite de cette audience, A______ a déposé plainte, le 30 mai 2024, contre B______ pour diffamation, calomnie et faux témoignage.

B______ l'avait accusé de faits graves en affirmant qu'elle l'avait vu "attraper C______ par le cou, de manière très violente" et la "taper", alors qu'il n'en était rien. C______ et E______ avaient du reste confirmé en audience qu'il l'avait attrapée "par les épaules", ils n'avaient jamais déclaré qu'il l'avait frappée.

B______ avait en outre menti en relatant des faits auxquels elle n'avait à l'évidence pas assisté. Il ressortait en effet des déclarations de C______ et de E______ que B______ était intervenue dans le cadre de la dispute après que E______ l'eut séparé de C______, autrement dit après qu'il eut ôté ses mains des épaules de celle-ci. Elle ne pouvait donc pas avoir vu comment il s'en était pris à sa belle-fille, ni comment il avait positionné ses mains sur le haut de son corps. Aussi, aucune des personnes interrogées n'avaient entendu ou remarqué B______ de manière à pouvoir affirmer qu'elle avait pris part aux événements litigieux. E______ n'avait ainsi pas affirmé que B______ était présente au moment de son intervention, alors qu'il avait pourtant été en mesure de citer les autres personnes qui l'étaient. B______ ne pouvait pas non plus s'être interposée entre lui-même et C______ comme elle le prétendait, puisque les autres personnes interrogées s'accordaient à dire que E______ l'avait déjà fait, affaiblissant d'autant sa crédibilité.

C. Dans sa décision querellée, le Ministère public a retenu que les allégations dénoncées n'étaient pas constitutives de calomnie ou de diffamation, puisqu'elles s'inscrivaient dans le cadre d'une procédure pénale et n'étaient parvenues qu'à la connaissance des membres des autorités judiciaires, lesquels étaient soumis au secret de fonction au sens de l'art. 320 CP.

Les déclarations de B______ ne remplissaient pas davantage les éléments constitutifs d'une autre infraction. C______ avait confirmé l'intervention de B______, contrairement à ce que A______ alléguait. Le moment précis de cette intervention n'avait pas été précisé par B______ et il ne pouvait dès lors lui être reproché une fausse déclaration sur ce point. Si B______ avait bel et bien déclaré que A______ avait saisi C______ par le cou, contrairement aux autres personnes interrogées, il était également constaté qu'elle n'avait pas fait état d'étranglement ni de coups. Au vu de la proximité évidente entre les épaules et le cou et des circonstances dans lesquelles les faits s'étaient déroulés, il considérait que les propos tenus par B______ relevaient de son souvenir. Le fait que les autres protagonistes n'avaient pas relevé les prétendus cris ou propos, que B______ soutenait avoir tenus, ne permettait pas encore de conclure qu'il s'agissait d'une fausse déposition. Au vu de la situation conflictuelle et chaotique décrite par E______, il apparaissait crédible que certaines paroles n'avaient pas été captées par l'ensemble des personnes présentes au moment des faits.

D. a. Dans son recours, A______ reproche au Ministère public d'avoir laissé ouverte la question de savoir si les propos litigieux étaient attentatoires à son honneur. Tel était pourtant bien le cas puisque B______ l'avait accusé d'avoir "attrapé C______ par le cou de manière très violente", autrement dit d'avoir tenté de la tuer, subsidiairement de lui causer des lésions corporelles graves ou simples, soit un comportement constitutif d'une infraction pénale. Le Ministère public avait à cet égard prêté, de manière injustifiée, une interprétation plus laxiste aux propos de B______, en retenant qu'elle n'avait jamais parlé d'étranglement dans son témoignage, alors que ses propos se rapprochaient davantage de la définition d'un étranglement que ceux tenus par C______ dans sa plainte. Or, si le Ministère public avait vu un étranglement dans le fait de pousser une personne "en lui mettant les mains à la hauteur de son cou", il ne pouvait qu'en aller au moins autant du fait "d'attraper une personne par le cou de manière très violente".

Le Ministère public ne pouvait pas non plus retenir que B______ ne l'avait pas accusé d'avoir porté des coups à C______, alors qu'elle avait expressément affirmé lui avoir dit "qu'on ne tapait pas une femme" car "c'était inacceptable de la part d'un homme", autrement dit d'avoir adopté un comportement largement réprouvé par les conceptions morales généralement admises.

Ces allégations attentatoires à l'honneur ne pouvaient pas bénéficier de la protection de l'art. 14 CP, dans la mesure où B______ avait fait montre de mauvaise foi en affirmant des faits qu'elle savait faux, dans l'unique but de lui causer du tort et qu'il soit jugé plus sévèrement.

Les déclarations des autres personnes interrogées démontraient par ailleurs que les faits relatés par B______ ne pouvaient pas "relever de son souvenir", vu qu'elle n'avait pas assisté à l'altercation en question ; elle s'était donc bien livrée à un faux témoignage. À ce propos, il estimait avoir un intérêt digne de protection à recourir, dès lors qu'en raison des propos mensongers de B______, il était actuellement prévenu de "tentative de lésions corporelles", subissant un préjudice plus important de ce fait.

b. À réception des sûretés, la cause a été gardée à juger sans échange d'écritures, ni débats.

EN DROIT :

1.             La Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement irrecevables ou mal fondés (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP). Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent.

2.             2.1. Le recours a été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerne une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émane du plaignant (art. 104 al. 1 let. b CPP), partie à la procédure. Il est donc recevable sous ces aspects.

Reste à examiner si le recourant dispose d'un intérêt juridique protégé à recourir selon l'art. 382 al. 1 CPP.

2.2. À teneur de l'art. 382 al. 1 CPP, toute partie qui a un intérêt juridiquement protégé à l'annulation ou à la modification d'une décision a qualité pour recourir contre celle-ci.

On entend par partie plaignante (art. 104 al. 1 let. b CPP) le lésé qui déclare expressément vouloir participer à la procédure pénale comme demandeur au pénal ou au civil (art. 118 al. 1 CPP). Le lésé est celui dont les droits ont été touchés directement par une infraction (art. 115 al. 1 CPP). En règle générale, seul peut se prévaloir d'une atteinte directe le titulaire du bien juridique protégé par la disposition pénale qui a été enfreinte (ATF 141 IV 454 consid. 2.3.1 ; 141 IV 1 consid. 3.1). Lorsque la norme protège un bien juridique individuel, la qualité de lésé appartient au titulaire de ce bien (ATF 141 IV 1 consid. 3.1 ; 138 IV 258 consid. 2.3 ;
129 IV 95 consid. 3.1). Pour être directement touché, le lésé doit subir une atteinte en rapport de causalité directe avec l'infraction poursuivie, ce qui exclut les dommages par ricochet (arrêts du Tribunal fédéral 7B_11/2023 du 27 septembre 2023 consid. 3.2.1 ; 6B_1276/2021 du 9 mars 2023 consid. 1.5.1 ; 6B_103/2021 du 26 avril 2021 consid. 1.1).

L'intérêt juridiquement protégé doit en plus être actuel et pratique. De cette manière, les tribunaux sont assurés de trancher uniquement des questions concrètes et non de prendre des décisions à caractère théorique. Ainsi, l'existence d'un intérêt de pur fait ou la simple perspective d'un intérêt juridique futur ne suffit pas. Ainsi, une partie qui n'est pas concrètement lésée par la décision ne possède pas la qualité pour recourir et son recours est irrecevable (ATF 144 IV 81 consid. 2.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 1B_304/2020 du 3 décembre 2020 ; 1B_157/2019 du 9 juillet 2019 consid. 2).

2.3. L'art. 307 al. 1 CP punit celui qui, étant témoin, expert, traducteur ou interprète en justice, aura fait une déposition sur les faits de la cause, fourni un constat ou un rapport faux, ou fait une traduction fausse.

Cette disposition protège en première ligne l'intérêt collectif, en réprimant des infractions contre l'administration de la justice, dont le but est la recherche de la vérité matérielle. Les intérêts privés ne sont défendus que de manière secondaire. Les particuliers ne seront donc considérés comme des lésés que si leurs intérêts privés ont été effectivement touchés par le faux témoignage, ce qu'ils doivent exposer (ATF 123 IV 184 consid. 1c ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_92/2018 du 17 mai 2018 consid. 2.2).

2.4. En l'espèce, le recourant s'estime lésé par les déclarations proférées à son encontre par la mise en cause en qualité de témoin, devant le Ministère public, dans le cadre de la procédure P/1______/2024.

Le Tribunal fédéral a toutefois rappelé à plusieurs occasions que, lorsque le litige à l'origine de la dénonciation pénale n'est pas encore terminé, on ignore si les prétendues fausses déclarations en justice ont ou non une quelconque influence sur le jugement à rendre. Or, s'agissant, à ce stade, de pures conjectures, il n'y a pas de lien de causalité direct entre les déclarations incriminées et le préjudice allégué, l'intéressé ne subissant aucune conséquence dommageable du fait des déclarations proférées (cf. ATF 123 IV 184 consid. 1c ; arrêt du Tribunal fédéral 1B_649/2012 du 11 septembre 2013 ; ACPR/346/2024 du 8 mai 2024 consid. 1.2.3 ; ACPR/850/2023 du 1er novembre 2023 consid. 3.4.2 ; ACPR/891/2019 du 18 novembre 2019 consid. 2.5.1).

La procédure P/1______/2024 étant, en l'occurrence, toujours pendante devant le Ministère public, l'infraction de faux témoignage dénoncée n'apparaît pas susceptible de léser directement le recourant dans un intérêt personnel et juridiquement protégé, de sorte que la qualité pour recourir doit lui être déniée.

Le recours sera donc déclaré irrecevable sur ce point.

2.5. Le recourant se verra cependant reconnaitre la qualité pour recourir en lien avec les infractions contre l'honneur alléguées, en tant qu'elles le lèsent directement.

3.             Le recourant reproche au Ministère public de ne pas être entré en matière sur sa plainte contre la mise en cause, qui aurait tenu selon lui des propos attentatoires à son honneur lors de son audition du 19 mars 2024 devant le Ministère public.

3.1.       Conformément à l'art. 310 al. 1 let. a CPP, le ministère public rend immédiatement une ordonnance de non-entrée en matière s'il ressort de la dénonciation ou du rapport de police que les éléments constitutifs de l'infraction ou les conditions à l'ouverture de l'action pénale ne sont manifestement pas réunis.

Conformément à cette disposition, la non-entrée en matière est justifiée lorsque la situation est claire sur le plan factuel et juridique. Tel est le cas lorsque les faits visés ne sont manifestement pas punissables, faute, de manière certaine, de réaliser les éléments constitutifs d'une infraction, ou encore lorsque les conditions à l'ouverture de l'action pénale font clairement défaut. Au stade de la non-entrée en matière, on ne peut admettre que les éléments constitutifs d'une infraction ne sont manifestement pas réalisés que lorsqu'il n'existe pas de soupçon suffisant conduisant à considérer un comportement punissable ou lorsqu'un éventuel soupçon initial s'est entièrement dissipé. En revanche, si le rapport de police, la dénonciation ou les propres constatations du ministère public amènent à retenir l'existence d'un soupçon suffisant, il incombe alors à ce dernier d'ouvrir une instruction (art. 309 al. 1 let. a CPP). Les indices relatifs à la commission d'une infraction impliquant l'ouverture d'une instruction doivent toutefois être importants et de nature concrète. De simples rumeurs ou de simples suppositions ne suffisent pas. Le soupçon initial doit au contraire reposer sur une base factuelle plausible, laissant apparaître la possibilité concrète qu'une infraction ait été commise (ATF 141 IV 87 consid. 1.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_212/2020 du 21 avril 2021 consid. 2.2 ; 6B_196/2020 du 14 octobre 2020 consid. 3.1 et les arrêts cités). Dans le doute, lorsque les conditions d'une non-entrée en matière ne sont pas réalisées avec une certitude absolue, l'instruction doit être ouverte (ATF 143 IV 241 consid. 2.2.1 ; 138 IV 86 consid. 4.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_488/2021, 6B_496/2021 du 22 décembre 2021 consid. 5.3 et les arrêts cités).

3.2.1. L'art. 173 ch. 1 CP réprime le comportement de quiconque, en s'adressant à un tiers, accuse une personne ou jette sur elle le soupçon de tenir une conduite contraire à l'honneur, ou de tout autre fait propre à porter atteinte à sa considération, de même que quiconque propage une telle accusation ou un tel soupçon.

Le prévenu n'encourra aucune peine s'il prouve que les allégations qu'il a articulées ou propagées sont conformes à la vérité ou qu'il avait des raisons sérieuses de les tenir de bonne foi pour vraies (art. 173 ch. 2 CP) ; il ne sera cependant pas admis à faire ces preuves s’il s’est exprimé sans égard à l’intérêt public ou sans motif suffisant et a agi principalement pour dire du mal d’autrui (art. 173 ch. 3 CP).

La calomnie est une forme qualifiée de diffamation (art. 173 CP), dont elle se distingue en cela que les allégations attentatoires à l'honneur sont fausses, que l'auteur doit avoir eu connaissance de la fausseté de ses allégations et qu'il n'y a dès lors pas de place pour les preuves libératoires prévues dans le cas de la diffamation (cf. art. 173 ch. 2 CP ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_1040/2022 du 23 août 2023 consid. 3.1.1 ; 6B_1215/2020 du 22 avril 2021 consid. 3.1).

3.2.2. Quiconque, en s'adressant à un tiers, accuse une personne ou jette sur elle le soupçon d'avoir commis un crime ou un délit intentionnel se rend en principe coupable d'une atteinte à l'honneur (ATF 132 IV 112 consid. 2.2 ; 118 IV 248 consid. 2b ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_676/2017, 6B_677/2017 du 15 décembre 2017 consid. 3.1 ; 6B_371/2011 du 15 août 2011 consid. 5.1 ; 6B_138/2008 du 22 janvier 2009 consid. 3.1).

L'art. 14 CP dispose toutefois que quiconque agit comme la loi l’ordonne ou l’autorise se comporte de manière licite, même si l’acte est punissable en vertu du présent. Selon la jurisprudence, des déclarations objectivement attentatoires à l'honneur peuvent ainsi être justifiées par le devoir d'alléguer des faits dans le cadre d'une procédure judiciaire. Tant la partie à un procès que son avocat peuvent se prévaloir de l'art. 14 CP à condition de s'être exprimé de bonne foi, de s'être limité à ce qui est nécessaire et pertinent et d'avoir présenté comme telles de simples suppositions (ATF 131 IV 154 consid. 1.3.1 ; 123 IV 97 consid. 2c/aa ; 118 IV 248 consid. 2c et d ; 116 IV 211 consid. 4a ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_632/2022 du 6 mars 2023 consid. 2.5.1 ; 6B_1254/2019 du 16 mars 2020 consid. 7.1 ; 6B_541/2019 du 15 juillet 2019 consid. 2.2). Le témoin, tenu de déposer, n'est pas punissable s'il se borne à répondre, sans formules inutilement blessantes, aux questions posées en disant ce qu'il considère comme vrai (ATF 135 IV 177 consid. 4 ; 116 IV 211 précité consid. 4a/bb ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_410/2011 du 5 décembre 2011 ; 6B_850/2008 du 26 décembre 2008).

3.2.3. En l'espèce, il est établi que la mise en cause a été entendue en qualité de témoin dans le cadre d'une procédure pénale initiée par sa belle-fille contre le recourant et interrogée précisément sur les faits survenus entre eux dans les escaliers de leur immeuble. Elle était ainsi autorisée à répondre aux questions du Ministère public et à détailler les comportements du recourant qu'elle avait vus.

Dans la mesure où la mise en cause a certes indiqué ou laissé entendre que le recourant aurait agi de manière non conforme à la loi, ses propos pourraient être attentatoires à l'honneur au sens des art. 173 ss CP. Il convient toutefois d'examiner si, replacés dans leur contexte, les termes employés par la mise en cause apparaissent justifiés sous l'angle de l'art. 14 CP, au vu de son devoir de témoigner dans le cadre d'une procédure judiciaire, ouverte du chef de tentative de lésions corporelles.

Rien ne permet en l'occurrence d'établir que les propos de la mise en cause auraient été au-delà de ce qui était nécessaire et pertinent à son témoignage.

Il apparaît en effet qu'elle s'est bornée à répondre aux questions posées par l'autorité pénale au sujet des événements du 29 janvier 2024. À cet égard, et contrairement à la lecture qu'en fait le recourant, les procès-verbaux d'audition de E______ et de C______ ne laissent pas transparaître que la mise en cause n'aurait pas assisté à l'altercation litigieuse, ni qu'elle ne se serait pas exprimée de bonne foi. C______ s'est contenté d'affirmer que sa belle-mère était "également intervenue", sans que cela ne donne une quelconque information de temporalité quant au moment précis de son intervention. Respectivement, E______ a bien confirmé que la mise en cause était présente, sans qu'il ne parvienne toutefois à se souvenir du moment auquel elle était apparue, ni le comportement qu'elle avait adopté, ce qui peut aisément s'expliquer par la situation "assez confuse" qu'il décrit, l'épouse du recourant qui "parlait fort" et le couple A______/D______ qui était "hors de contrôle". Aussi, eu égard à la confusion générale qui régnait, il est vraisemblable que la mise en cause, en sortant de l'appartement et en voyant sa belle-fille empoignée par le recourant, ait pu ou cru voir qu'il la tenait par le cou. Le cas échéant, la confusion de la mise en cause serait excusable au vu du contexte, considérant au surplus qu'elle n'a relaté que ce qu'elle pensait ou croyait avoir observé, sans en rajouter.

Le recourant voit par ailleurs, dans la locution "attraper par le cou de manière très violente", une accusation de "tentative de meurtre", subsidiairement de "lésions corporelles graves ou simples". Il ne s'agit toutefois là que de son interprétation littérale personnelle. Les déclarations de la mise en cause ne laissent, en tant que telles, pas entrevoir que le recourant se serait livré à une quelconque tentative d'étranglement, peu importe à cet égard la lecture qu'a pu faire le Ministère public des faits dénoncés par C______ dans sa plainte. À noter que l'instruction de la P/1______/2024 ne fait pas non plus mention d'une quelconque mise en prévention pour "tentative de meurtre", et que le Ministère public a, en l'état, retenu une tentative de lésions corporelles.

Quant à l'invective selon laquelle "on ne tape pas une femme car cela est inacceptable de la part d'un homme", il sera relevé, outre que ces termes sont formulés de manière générale, que la mise en cause s'est bornée, lors de son audition, à rapporter les propos qu'elle aurait tenus au recourant le jour de l'altercation. Il ne peut ainsi pas être considéré qu'elle aurait, par le biais de son témoignage, accusé le recourant d'avoir porté des coups à C______ en l'apostrophant de la sorte, ces déclarations s'inscrivant spécifiquement dans le cadre de ce qui lui était demandé en sa qualité de témoin.

Dans ces circonstances particulières, il apparaît que l'ensemble des propos de la mise en cause n'excèdent pas ce qui lui était permis d'alléguer sous l'angle de l'art. 14 CP.

4.             Justifiée, l'ordonnance querellée sera donc confirmée et le recours rejeté.

5.             Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, qui seront fixés en totalité à CHF 1'000.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

* * * * *


 

 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

 

Rejette le recours dans la mesure où il est recevable.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 1'000.-.

Dit que ce montant sera prélevé sur les sûretés versées.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant, soit pour lui son conseil, ainsi qu'au Ministère public.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Monsieur Christian COQUOZ et Madame Corinne CHAPPUIS BUGNON, juges; Madame Arbenita VESELI, greffière.

 

La greffière :

Arbenita VESELI

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

P/13399/2024

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

915.00

 

 

Total

CHF

1'000.00