Skip to main content

Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

1 resultats
P/10634/2023

AARP/439/2023 du 30.11.2023 sur JTDP/883/2023 ( PENAL ) , PARTIELMNT ADMIS

Normes : CP.291
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/10634/2023 AARP/439/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 30 novembre 2023

 

Entre

A______, sans domicile fixe, comparant par Me B______, avocat,

appelant,

 

contre le jugement JTDP/883/2023 rendu le 4 juillet 2023 par le Tribunal de police,

 

et


LE MINISTÈRE PUBLIC
de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a. En temps utile, A______ appelle du jugement du 4 juillet 2023, par lequel le Tribunal de police (TP) l'a reconnu coupable de rupture de ban (art. 291 du code pénal [CP]) et condamné à une peine privative de liberté de sept mois, sous déduction de 50 jours de détention avant jugement (dont 21 jours en exécution anticipée de peine), ainsi qu'aux frais de la procédure en CHF 1'077.-, rejetant ses conclusions en indemnisation.

A______ entreprend intégralement ce jugement, concluant, principalement à son acquittement et, subsidiairement, en cas de verdict de culpabilité, à sa condamnation à une peine pécuniaire de 40 jours-amende, avec suite de frais et dépens. Il réclame, dans tous les cas, sa libération immédiate et une indemnisation pour la détention excessive à hauteur de CHF 200.- par jour.

b. Selon l'acte d'accusation du Ministère public (MP) du 6 juin 2023, il est reproché à A______ d'avoir, le 16 mai 2023, pénétré sur le territoire suisse, plus particulièrement à Genève, alors qu'il savait faire l'objet de deux décisions d'expulsion judiciaire prononcées à son encontre par le TP, le 6 mai 2021, pour une durée de cinq ans, et par la Chambre pénale d'appel et de révision (CPAR), le 25 janvier 2023, pour une durée de 20 ans, étant précisé qu'il avait préalablement à ces faits quitté la Suisse volontairement le 8 mai 2023.

B. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. Le 16 mai 2023, à 22h, A______ a été interpellé par la police municipale de Meyrin à l'arrêt Meyrin-Gravière, à la demande du service des contrôleurs des Transports publics genevois (TPG), le précité, dépourvu de titre de transport et de papiers d'identité, ayant fait l'objet d'un contrôle dans un tram.

b. A______ fait l'objet de deux expulsions judiciaires, l'une prononcée par le TP pour cinq ans, le 6 mai 2021, valable du 19 mai 2021 au 19 mai 2026, l'autre prononcée par la CPAR pour vingt ans, le 25 janvier 2023.

Selon la demande d'inscription RIPOL déposée le 19 juillet 2021 par l'Office cantonal de la population et des migrations (OCPM), un délai de départ au 19 mai 2021 a été signifié à A______. Au titre de remarques, il est stipulé que l'exécution de son expulsion n'avait pas été "matériellement réalisable", qu'il était parti avec une carte de sortie non retournée à l'OCPM et qu'il était présumé disparu, de sorte qu'en cas de découverte, l'intéressé devait être remis aux Services de police de Genève pour l'exécution de l'expulsion.

c. Devant la police, le MP et le premier juge, A______ a indiqué qu'à sa sortie de prison, le 8 mai 2023, il avait volontairement quitté la Suisse pour la France. Le 16 mai suivant, il était entré sur ce territoire "sans faire exprès" et sans s'en rendre compte. Il savait qu'il n'avait pas le droit de venir en Suisse et n'en avait pas eu l'intention. Il avait perdu tous ses papiers d'identité longtemps auparavant.

A C______ [département de la Haute Savoie, France], où il logeait, il était monté dans le véhicule de son ami "D______" [surnom], dont il ignorait le nom de famille, pour faire "un tour" en France. Lorsqu'il s'était aperçu qu'il se trouvait en Suisse, il s'était "embrouillé" avec son ami. Il a ensuite précisé au MP s'être endormi dans la voiture et n'avoir réalisé se trouver sur une autoroute helvétique qu'à son réveil. Il avait demandé à "D______" de le reconduire en France, ce que le dernier avait refusé. Il l'avait alors enjoint de le déposer rapidement pour qu'il puisse prendre un tram, de sorte que le conducteur l'avait laissé à la Gare Cornavin. Il avait cherché un moyen de se rendre en France et avait ainsi "sauté" dans le tram 14 avec l'intention de prendre ensuite le tram 18 en direction du CERN, à Meyrin ; il connaissait les lignes de tram 14, 17 et 18.

Il souhaitait être libéré et quitter le territoire suisse. Il voulait rattraper le temps perdu et trouver un emploi.

d. Le 14 juin 2013, A______ a été autorisé par le TP à exécuter sa peine de manière anticipée.

C. a. La juridiction d'appel a ordonné l'instruction de la cause par la voie écrite avec l'accord des parties.

b. Selon son mémoire d'appel, A______ persiste dans ses conclusions.

Selon ses déclarations constantes et crédibles, il n'avait jamais eu la volonté de se rendre en Suisse. Son entrée sur ce territoire ne relevait pas de son propre chef et s'était produite alors qu'il dormait. A son réveil, il avait immédiatement manifesté son envie de regagner le plus rapidement possible la France, de sorte que l'intention, nécessaire pour retenir la commission de l'infraction de rupture de ban, faisait défaut. Le dol éventuel était également exclu, dès lors qu'il ne pouvait pas se douter que son ami allait l'emmener en Suisse. Il s'était retrouvé à Meyrin, alors qu'il habitait C______, à cause de son empressement à se rendre au plus vite en direction de la frontière, mais aussi de son état de panique.

Il convenait, dans tous les cas, de revenir sur la quotité de la peine prononcée par l'autorité précédente. Dans un cas similaire, la CPAR avait prononcé une peine pécuniaire de 90 jours-amende pour une rupture de ban ayant duré six jours (AARP/242/2022 du 16 août 2022), alors que, dans le cas présent, la période pénale ne s'étendait que sur quelques heures. L'appelant avait, par ailleurs, tout fait pour quitter le territoire suisse, de sorte que l'on ne pouvait pas retenir qu'il n'avait montré aucune prise de conscience. La décision de renvoi dont il faisait l'objet n'avait jamais été mise à exécution par les autorités suisses, le prévenu ayant simplement été relâché de prison et prié de quitter la Suisse. Le fait qu'il ait exécuté cet ordre n'empêchait pas l'application de la Directive sur le retour, si bien que le renvoi primait sur une peine privative de liberté. Sa condamnation ne poursuivait qu'un but de punition et pas de mise en œuvre du renvoi de manière proportionnée, ce qui allait à l'encontre de la Directive.

c. Le MP conclut au rejet de l'appel et à la confirmation du jugement attaqué.

Les déclarations du prévenu n'étaient pas crédibles et n'emportaient pas conviction. Il avait en particulier déclaré être monté dans le tram 14 à destination de Meyrin pour pouvoir ensuite emprunter le tram 18. Or, l'arrêt auquel il avait été interpellé n'était pas desservi par ce tram. Si son but avait été de regagner rapidement la France, il aurait dû prendre le CEVA, puisqu'il vivait à l'opposé des frontières du département de l'Ain.

d. Le TP se réfère intégralement au jugement rendu.

e. Il ressort du dossier disciplinaire de A______, transmis par le Service de l'application des peines et mesures (SAPEM) le 19 septembre 2023, qu'entre les 14 août et 15 septembre 2023, ce dernier a fait l'objet de trois sanctions disciplinaires et d'une mesure de sûreté particulière, en raison de son comportement.

f. Le 14 novembre 2023, la juridiction d'appel a rendu une ordonnance mettant fin à l'exécution anticipée de la peine de A______ (OARP/62/2023). Il a été libéré le lendemain de l'Etablissement fermé de E______.

D. a. A______, connu sous plusieurs alias, dit être né le ______ 1990 à F______, en Algérie, pays dont il revendique la nationalité. Ses parents et ses frère et sœur vivent dans ce pays. Il est célibataire et sans enfants. Il a grandi entre la France et l'Espagne. Il a effectué sa scolarité obligatoire sans obtenir de diplôme mais détient une formation de peintre en bâtiment. Il est arrivé à Genève en 2021 pour trouver du travail, sans succès. Avant son interpellation, il était à la recherche d'un emploi en France.

b. Selon l'extrait de son casier judiciaire, A______ a été condamné :

- le 6 mai 2021, par le TP, à une peine privative de liberté de cinq mois, avec sursis et délai d'épreuve de trois ans (révoqué le 2 décembre 2021), ainsi qu'à une amende de CHF 200.-, pour tentative de vol, infractions d'importance mineure (dommages à la propriété), violation de domicile, faux dans les certificats, entrée illégale, séjour illégal et contravention à l'art. 19a de la loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes (LStup) ; une expulsion obligatoire pour une durée de cinq ans a été ordonnée (art. 66a al. 1 CP) ;

- le 2 décembre 2021, par le TP, à une peine privative de liberté de cinq mois (peine d'ensemble partiellement complémentaire à la condamnation du 6 mai 2021), pour vol, violation de domicile, violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires et rupture de ban ;

- le 18 janvier 2022, par le MP, à une peine privative de liberté de 60 jours (peine complémentaire à la condamnation du 2 décembre 2021), pour lésions corporelles simples et violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires ;

- le 25 janvier 2023, par la CPAR, à une peine privative de liberté de 12 mois, pour violation de domicile, tentative de violation de domicile, dommages à la propriété, vol, tentative de vol, recel, violence ou menace contre les autorités ou les fonctionnaires et rupture de ban ; une expulsion obligatoire pour une durée de vingt ans a été ordonnée (art. 66b al. 1 CP).

E. Me B______, défenseur d'office de A______, dépose un état de frais pour la procédure d'appel, facturant, sous des libellés divers, 8h d'activité de chef d'étude, dont 30 minutes pour la rédaction de la déclaration d'appel. Me B______ a été indemnisé à raison de 13h15 d'activité en première instance.

EN DROIT :

1. L'appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 du Code de procédure pénale [CPP]).

La Chambre limite son examen aux violations décrites dans l'acte d'appel (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP).

2. 2.1.1. Le principe in dubio pro reo, qui découle de la présomption d'innocence, garantie par l'art. 6 ch. 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH) et, sur le plan interne, par les art. 32 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse (Cst.) et 10 al. 3 CPP, concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves au sens large (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.1 ; 127 I 28 consid. 2a).

En tant que règle sur le fardeau de la preuve, la présomption d'innocence signifie, au stade du jugement, que ce fardeau incombe à l'accusation et que le doute doit profiter au prévenu. Comme règle d'appréciation des preuves, elle signifie que le juge ne doit pas se déclarer convaincu de l'existence d'un fait défavorable à l'accusé si, d'un point de vue objectif, il existe des doutes quant à l'existence de ce fait. Il importe peu qu'il subsiste des doutes seulement abstraits et théoriques, qui sont toujours possibles, une certitude absolue ne pouvant être exigée. Il doit s'agir de doutes sérieux et irréductibles, c'est-à-dire de doutes qui s'imposent à l'esprit en fonction de la situation objective (ATF 146 IV 88 consid. 1.3.1 ; 145 IV 154 consid. 1.1).

2.2. Selon l'art. 291 al. 1 CP, celui qui aura contrevenu à une décision d'expulsion du territoire de la Confédération ou d'un canton prononcée par une autorité compétente sera puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire.

2.2.1. La rupture de ban suppose la réunion de trois conditions : une décision d'expulsion, la transgression de celle-ci et l'intention. L'infraction est consommée si l'auteur reste en Suisse après l'entrée en force de la décision, alors qu'il a le devoir de partir, ou s'il y entre pendant la durée de validité de l'expulsion (ATF 147 IV 253 consid. 2.2.1 ; 147 IV 232 consid. 1.1).

2.2.2. Sur le plan subjectif, l'infraction est intentionnelle, le dol éventuel étant toutefois suffisant. Il faut non seulement que l'auteur entre ou reste en Suisse volontairement, mais encore qu'il sache qu'il est expulsé ou accepte cette éventualité (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1191/2019 du 4 décembre 2019 consid. 5.1).

2.3. En l'espèce, il est établi et non contesté que l'appelant s'est trouvé à l'arrêt de tram Meyrin-Gravière, soit sur le territoire suisse, le 16 mai 2023 à 22h. Il est également établi qu'au moment des faits, l'intéressé faisait l'objet de deux expulsions judicaires, l'une prononcée par le TP pour cinq ans, le 6 mai 2021, et valable depuis le 19 mai 2021, et l'autre par la CPAR pour vingt ans, le 25 janvier 2023.

L'appelant conteste avoir agi intentionnellement, soutenant ne pas avoir eu la volonté d'entrer en Suisse, où il était arrivé parce qu'il s'était endormi dans la voiture de son prétendu ami "D______". Les explications qu'il donne ne sont cependant pas crédibles, même dans l'hypothèse où il ne se serait réveillé qu'à son arrivée sur l'autoroute suisse.

La CPAR relève d'abord que le prévenu n'a étrangement évoqué son soi-disant état de somnolence que lors de sa seconde audition.

Par ailleurs, comme relevé par le premier juge, l'itinéraire choisi depuis la gare Cornavin pour se rendre à C______ en passant par Meyrin n'est pas crédible, d'autant moins qu'à suivre l'appelant, il connaissait les lignes de tram empruntées.

En outre, ses nombreux séjours en Suisse depuis le prononcé de sa première expulsion, ainsi que ses précédentes condamnations pour rupture de ban en décembre 2021 et janvier 2023 démontrent qu'il ne fait pas grand cas des décisions de l'autorité.

Dans tous les cas, même à supposer que le prévenu était encore endormi à son arrivée en Suisse, c'est bien avec conscience et volonté qu'il a choisi de sortir du véhicule de son ami, alors qu'il aurait pu simplement y rester et attendre que ce dernier le ramène à C______. Il savait qu'il n'avait pas le droit de venir en Suisse et il lui appartenait de se conformer à cette décision en prenant toutes dispositions utiles.

Partant, A______ s'est rendu coupable de rupture de ban (art. 291 al. 1 CP), de sorte que le verdict de culpabilité sera confirmé et son appel rejeté sur ce point.

3. 3.1.1. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).

La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution (objektive Tatkomponente). Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur (subjektive Tatkomponente). À ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même (Täterkomponente), à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 142 IV 137 consid. 9.1 ; 141 IV 61 consid. 6.1.1).

3.1.2. Selon la Directive du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier (Directive sur le retour 2008/115/CE), intégrée au droit suisse par l'arrêté fédéral du 18 juin 2010 (RO 2010 5925) et la jurisprudence de la Cour de justice de l'union européenne y relative (ci-après : la CJUE, arrêt du 28 avril 2011 C-61/11 PPU EL DRIDI), le prononcé d'une peine pécuniaire du chef de séjour illégal est toujours envisageable (arrêt de la CJUE du 6 décembre 2012 C-430/11 SAGOR). Tel n'est pas le cas du prononcé d'une peine privative de liberté. Telle peine ne peut entrer en ligne de compte uniquement lorsque toutes les mesures raisonnables pour l'exécution de la décision de retour ont été entreprises (ATF 143 IV 249 consid. 1.9), respectivement si ce retour à échoué en raison du comportement de l'intéressé (ATF 147 IV 232 consid. 1.2 et 1.6).

Selon la jurisprudence européenne, les termes "mesures" et "mesures coercitives" se réfèrent à toute intervention qui conduit de manière efficace et proportionnée au retour de l'intéressé (arrêt CJUE du 6 décembre 2011 Achughbabian C-329/11 par. 36 ; ATF 143 IV 249 consid. 3.1).

Les principes dégagés par la jurisprudence de la CJUE, examinés par le Tribunal fédéral sous l'angle du séjour illégal, sont transposables à la rupture de ban au sens de l'art. 291 CP (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1092/2021 du 23 mai 2022 consid. 3.1).

3.1.3. Selon l'art. 2 ch. 2 let. b de la Directive sur le retour, les États membres peuvent décider de ne pas l'appliquer aux ressortissants de pays tiers faisant l’objet d’une sanction pénale prévoyant ou ayant pour conséquence leur retour, conformément au droit national, ou faisant l’objet de procédures d’extradition. L'art. 124a LEI, entré en vigueur le 22 novembre 2022, stipule désormais que ladite directive ne s’applique pas à la décision et à l’exécution de l’expulsion au sens des art. 66a, 66abis CP, 49a ou 49abis du code pénal militaire (CPM ; FF 2020 3361 p. 3414 à 3416 ; FF 2020 9723 p. 9729 ; Modification de la directive LEI, Directives Domaine des étrangers, Confédération suisse, état au 1er octobre 2023, ch. 8.2 et 8.4.2.1.2, http : //www.sem.admin.ch/dam/sem/fr/data/rechtsgrundlagen/weisungen/ auslaender/chronologie/2022-10-01-weisungsaenderung-aig.pdf.download.pdf/2022-10-01-weisungsaenderung-aig-f.pdf).

3.1.4. Bien que la récidive ne constitue plus un motif d'aggravation obligatoire de la peine (art. 67 aCP), les antécédents continuent de jouer un rôle très important dans la fixation de celle-ci (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1202/2014 du 14 avril 2016 consid. 3.5 ; M. NIGGLI / H. WIPRÄCHTIGER [éds], Basler Kommentar Strafrecht I : Art. 1-110 StGB, Jugendstrafgesetz, 4ème éd., Bâle 2019, n. 130 ad art. 47 CP ; R. ROTH / L. MOREILLON (éds), Code pénal I : art. 1-100 CP, Bâle 2020, n. 54 ad art. 47 CP).

3.1.5. Compte tenu des nombreux paramètres qui interviennent dans la fixation de la peine, une comparaison avec des affaires concernant d'autres accusés et des faits différents est d'emblée délicate (ATF 123 IV 49 consid. 2e ; 120 IV 136 consid. 3a). Les disparités en cette matière s'expliquent normalement par le principe de l'individualisation des peines, voulu par le législateur (ATF 141 IV 61 consid. 6.3.2 ; 135 IV 191 consid. 3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_353/2016 du 30 mars 2017 consid. 3.2).

3.2.1. En l'espèce, nonobstant la brièveté de la période pénale, quelques heures seulement, la faute de l'appelant n'est pas négligeable. Son comportement dénote un mépris total des décisions prononcées à son encontre et de la législation en vigueur. Il est revenu en Suisse malgré le prononcé de deux décisions d'expulsion. Il a récidivé moins de dix jours après sa dernière sortie de prison, si l'on s'en tient à sa version.

Il a agi par pure convenance personnelle, pour des raisons qui demeurent inconnues.

Sa situation personnelle, bien que précaire, n'explique pas ses agissements.

La collaboration de l'appelant a été médiocre. Il a donné des explications contradictoires et fantaisistes, refusant d'assumer sa faute. Au vu de celles-ci, sa prise de conscience est inexistante, dès lors qu'il persiste à revenir en Suisse.

Les antécédents du prévenu sont mauvais, dans la mesure où il a été condamné à quatre reprises depuis 2021. En particulier, il a un antécédent pour entrée et séjour illégaux commis en janvier 2021 et deux antécédents récents pour rupture de ban commis entre le début et le 22 août 2021, ainsi que les 1er, 2 février et 3 mars 2022.

3.2.2. La Directive sur le retour ne trouve pas application dans la cas d'espèce, l'appelant faisant l'objet d'une décision d'expulsion au sens de l'art. 66a CP, ceci conformément à l'art. 124a LEI, entré en vigueur le 22 novembre 2022 (voir supra ch. 3.1.3).

Ainsi, rien ne s'oppose au prononcé d'une peine privative de liberté, laquelle, compte tenu du pronostic clairement défavorable, paraît être la seule peine justifiée pour dissuader l'intéressé de récidiver.

L'appelant ne saurait s'appuyer sur la jurisprudence genevoise qu'il a citée en comparaison pour réclamer une peine réduite. En effet, non seulement ses antécédents sont plus lourds (vols, recel, lésions corporelles simples, violences ou menaces contre les autorités et les fonctionnaires, violations de domicile, dommages à la propriété, etc.), étant précisé qu'il a déjà été condamné à deux reprises durant ses deux dernières années pour rupture de ban, mais aussi qu'il fait l'objet de deux décisions d'expulsion, la dernière ayant été prononcée le 25 janvier 2023 pour une durée de vingt ans, l'appelant ayant récidivé (art. 66b al. 1 CP).

Malgré ce qui précède, une peine privative de liberté de sept mois paraît effectivement excessive, une durée de six mois semblant plus adéquate.

Une peine privative de liberté de six mois, soit 180 jours, doit ainsi être prononcée, ceci sous déduction de la détention préventive.

Vu le pronostic défavorable, le refus de sursis, qui du reste n'est pas contesté, n'est pas critiquable.

L'appel est ainsi partiellement admis et le jugement entrepris réformé sur ce point.

4. 4.1. L’appelant peut prétendre à être indemnisé du tort moral causé par la détention subie en trop, conformément à l’art. 436 al. 1 CPP cum 431 al. 2 CPP.

4.1.1. L'ampleur de la réparation morale dépend avant tout de la gravité des souffrances physiques ou psychiques consécutives à l'atteinte subie par l'intéressé et de la possibilité d'adoucir sensiblement, par le versement d'une somme d'argent, la douleur morale qui en résulte (ATF 146 IV 231 consid. 2.3.1 ; 143 IV 339 consid. 3.1). Lorsque la victime a subi des atteintes pendant une période prolongée, les intérêts sur l'indemnité courent, en général, à partir d'une date moyenne (ATF 129 IV 149 consid. 4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_123/2020 du 26 novembre 2020 consid. 10.6). Le Tribunal fédéral considère, en principe, qu'un montant de CHF 200.- par jour en cas de détention injustifiée de courte durée constitue une indemnité appropriée, dans la mesure où il n'existe pas de circonstances particulières qui pourraient fonder le versement d'un montant inférieur ou supérieur. Lorsque la détention injustifiée s'étend sur une longue période, une augmentation linéaire du montant accordé n'est pas adaptée, car le fait de l'arrestation et de la détention pèse d'un poids en tout cas aussi important que l'élément de durée pour apprécier l'atteinte que subit la personne incarcérée (ATF 143 IV 339 consid. 3.1 ; 113 Ib 155 consid. 3b ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_984/2018 du 4 avril 2019 consid. 5.1). Le taux journalier n'est qu'un critère qui permet de déterminer un ordre de grandeur pour le tort moral. Il convient ensuite de corriger ce montant compte tenu des particularités du cas. Lorsque la durée de détention est de plusieurs mois, il convient en règle générale de réduire le montant journalier de l'indemnité (ATF 143 IV 339 consid. 3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_744/2020 du 26 octobre 2020 consid. 5 ; 6B_242/2019 du 18 mars 2019 consid. 2 ; 6B_909/2015 du 22 juin 2016 consid. 2.2.1 ; 6B_111/2012 du 15 mai 2012 consid. 4.2 : précisant que plusieurs mois équivalent à une longue période de détention).

Dans l'hypothèse où le bénéficiaire, domicilié à l'étranger, serait exagérément avantagé en raison des conditions économiques et sociales existantes à son lieu de domicile, il convient d'adapter l'indemnité vers le bas. L'ampleur de l'indemnité pour tort moral doit être justifiée compte tenu des circonstances particulières, après pondération de tous les intérêts, et ne doit donc pas paraître inéquitable. Cela signifie que, lorsqu'il faut prendre exceptionnellement en considération un coût de la vie plus faible pour calculer une indemnité pour tort moral, on ne peut pas procéder schématiquement selon le rapport du coût de la vie au domicile du demandeur avec celui de la Suisse ou à peu près selon ce rapport. Sinon, l'exception deviendrait la règle (ATF 125 II 554 consid. 4a ; 123 III 10 consid. 4 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_58/2016 du 18 août 2016 consid. 4.2 ; 6B_909/2015 du 22 juin 2016 consid. 2.3.1).

Dans l'arrêt 6B_242/2019 précité, le Tribunal fédéral a confirmé l’indemnisation par CHF 70.-/jour d’un prévenu algérien qui séjournait illégalement en Suisse, n’avait ni revenu ni charges et était frappé d’une mesure d’expulsion judiciaire. Il a été admis que, comme retenu par l’autorité cantonale, il était approprié d’estimer le montant de l’indemnité par référence au PIB de l’Algérie, vingt fois inférieur à celui de la Suisse, dès lors que le prévenu devait être expulsé dès l’entrée en force de l’arrêt.

4.1.2. Il est possible d'imputer la détention avant jugement subie sur des peines pécuniaires (art. 34 CP) en appliquant le taux de conversion prévu à l'art. 36 al. 1 CP selon lequel un jour-amende correspond à un jour de peine privative de liberté (L. MOREILLON / A. PAREIN-REYMOND [éds.], Petit commentaire, Code de procédure pénale, 2ème éd., 2016 Bâle, n. 15 ad art. 431).

4.2. En l'espèce, l'appelant a effectué 184 jours de détention jusqu'à sa remise en liberté le 15 novembre 2023, dont 155 jours en exécution anticipée de peine. Puisqu’il est tout de même condamné pour l'infraction en cause à une peine privative de liberté de 180 jours, l'indemnisation ne doit pas réparer une détention illicite ou injustifiée, mais compenser une détention excessive au sens de l'art. 431 al. 2 CPP, in casu une période de quatre jours.

L'appelant est ressortissant algérien et fait l'objet de deux mesures d'expulsion entrées en force. Ainsi, il est dans l'obligation de quitter le territoire suisse pour regagner l'Algérie. Dès lors, le montant de référence doit être arrêté à CHF 70.- par jour (arrêt du Tribunal fédéral 6B_242/2019 du 18 mars 2019 consid. 2.3 ; AARP/118/2021 consid. 3.3 ; AARP/242/2022 consid. 4.2).

L'appelant a été arrêté et incarcéré à bon droit, puisqu'il reste coupable de rupture de ban. Son indemnisation ne doit dès lors pas compenser l'arrestation et le choc de la détention. Il est de plus sans emploi, sans domicile fixe et sans projet concret, de sorte que cette incarcération n'a eu aucune répercussion durable sur sa vie sociale et professionnelle (arrêt du Tribunal fédéral 6B_909/2015 du 22 juin 2016 consid. 2.2.2), étant rappelé son comportement inadéquat, l'appelant ayant fait l'objet, en seulement un mois de détention, de trois sanctions disciplinaires et d'une mesure de sûreté particulière. Il se justifie en conséquence de réduire ce montant de référence, prévu pour l'indemnisation d'une journée de détention illicite, de moitié.

Aussi, une indemnisation de CHF 35.- par jour pour les quatre jours de détention subis à tort lui sera allouée, soit CHF 140.-. Ce montant portera intérêt au taux de 5% dès le 11 novembre 2023 (date à laquelle il aurait dû être libéré de l'exécution de peine).

5. 5.1. Il n'y a pas lieu de revoir les frais de la procédure de première instance, dès lors que l'appelant est reconnu coupable de rupture de ban (art. 426 al. 1 et 428 al. 3 CPP).

5.2. En appel, le prévenu obtient partiellement gain de cause, de sorte qu'il convient de mettre à sa charge les deux tiers des frais de la procédure d'appel, comprenant un émolument de CHF 1'500.- (art. 14 al. 1 let. e du règlement fixant le tarif des frais en matière pénale [RTFMP]).

6. 6.1.1. Selon l'art. 135 al. 1 CPP, le défenseur d'office est indemnisé conformément au tarif des avocats de la Confédération ou du canton du for du procès. S'agissant d'une affaire soumise à la juridiction cantonale genevoise, l'art. 16 du règlement sur l'assistance juridique (RAJ) s'applique.

Cette dernière disposition prescrit que l'indemnité, en matière pénale, est calculée selon le tarif horaire de CHF 200.- pour un chef d'étude (let. c), débours de l'étude inclus. En cas d'assujettissement, l'équivalent de la TVA est versé en sus.

Conformément à l'art. 16 al. 2 RAJ, seules les heures nécessaires sont retenues. Elles sont appréciées en fonction notamment de la nature, de l'importance et des difficultés de la cause, de la valeur litigieuse, de la qualité du travail fourni et du résultat obtenu.

On exige de l'avocat qu'il soit expéditif et efficace dans son travail et qu'il concentre son attention sur les points essentiels. Des démarches superflues ou excessives n'ont pas à être indemnisées (M. VALTICOS / C. M. REISER / B. CHAPPUIS / F. BOHNET (éds), Commentaire romand, Loi sur les avocats : commentaire de la loi fédérale sur la libre circulation des avocats (Loi sur les avocats, LLCA), 2ème éd., Bâle 2022, n. 257 ad art. 12). Dans le cadre des mandats d'office, l'État n'indemnise ainsi que les démarches nécessaires à la bonne conduite de la procédure pour la partie qui jouit d'une défense d'office ou de l'assistance judiciaire. Il ne saurait être question d'indemniser toutes les démarches souhaitables ou envisageables. Le mandataire d'office doit en effet gérer son mandat conformément au principe d'économie de procédure (décision de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2013.22 du 31 octobre 2013 consid. 5.2.3). Par voie de conséquence, le temps consacré à la rédaction d'écritures inutiles ou reprenant une argumentation déjà développée, fût-ce devant une autorité précédente, ne saurait donner lieu à indemnisation ou à indemnisation supplémentaire (AARP/295/2015 du 12 juillet 2015 consid. 8.2.2.3, 8.2.2.6, 8.3.1.1 et 8.3.2.1).

6.1.2. L'activité consacrée aux conférences, audiences et autres actes de la procédure est majorée de 20% jusqu'à 30 heures de travail, décomptées depuis l'ouverture de la procédure, et de 10% lorsque l'état de frais porte sur plus de 30 heures, pour couvrir les démarches diverses, telles la rédaction de courriers ou notes, les entretiens téléphoniques et la lecture de communications, pièces et décisions (arrêt du Tribunal fédéral 6B_838/2015 du 25 juillet 2016 consid. 3.5.2 ; voir aussi les décisions de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2016.34 du 21 octobre 2016 consid. 4.1 et 4.2 et BB.2015.85 du 12 avril 2016 consid. 3.5.2 et 3.5.3). Des exceptions demeurent possibles, charge à l'avocat de justifier l'ampleur d'opérations dont la couverture ne serait pas assurée par le forfait.

6.2. En l'occurrence, il convient de retrancher de l'état de frais de Me B______, défenseur d'office de A______, l'activité consacrée à la rédaction de la déclaration d'appel, activité comprise dans la majoration forfaitaire.

En conclusion, la rémunération sera arrêtée à CHF 1'938.60 correspondant à 7h30 d'activité au tarif de CHF 200.-/heure (CHF 1'500.-), plus la majoration forfaitaire de 20% (CHF 300.-) et l'équivalent de la TVA aux taux de 7.7% (CHF 138.60).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Reçoit l'appel formé par A______ contre le jugement JTDP/883/2023 rendu le 4 juillet par le Tribunal de police dans la procédure P/10634/2023.

L'admet partiellement.

Annule ce jugement.

Et statuant à nouveau :

Déclare A______ coupable de rupture de ban (art. 291 al. 1 CP).

Condamne A______ à une peine privative de liberté de six mois, sous déduction de 184 jours de détention avant jugement (dont 155 jours en exécution anticipée de peine ; art. 40 CP).

Alloue à A______ une indemnité de CHF 140.- avec intérêts à 5% l'an dès le 11 novembre 2023, à titre de réparation du tort moral subi en raison de quatre jours de détention excessive (art. 431 al. 2 CPP).

Condamne A______ aux frais de la procédure préliminaire et de première instance, qui s'élèvent à CHF 1'077.-, y compris un émolument de jugement de CHF 300.- (art. 426 al. 1 CPP).

Prend acte de ce que le Tribunal de police a fixé à CHF 3'117.90 l'indemnité de procédure due à Me B______, défenseur d'office de A______, pour la procédure préliminaire et de première instance (art. 135 CPP).

Arrête les frais de la procédure d'appel à CHF 1'695.-, comprenant un émolument de CHF 1'500.-.

Met les deux tiers de ces frais, soit CHF 1'130.-, à la charge de A______ et laisse le solde de ces frais à la charge de l'Etat.

Arrête à CHF 1'938.60, le montant des frais et honoraires de Me B______, défenseur d'office de A______, pour la procédure d'appel.


 

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal de police et à l'Office cantonal de la population et des migrations.

 

La greffière :

Melina CHODYNIECKI

 

La présidente :

Delphine GONSETH

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale, sous la réserve qui suit.

 

Dans la mesure où il a trait à l'indemnité de l'avocat désigné d'office ou du conseil juridique gratuit pour la procédure d'appel, et conformément aux art. 135 al. 3 let. b CPP et 37 al. 1 de la loi fédérale sur l'organisation des autorités pénales de la Confédération (LOAP), le présent arrêt peut être porté dans les dix jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 39 al. 1 LOAP, art. 396 al. 1 CPP) par-devant la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral (6501 Bellinzone).


 

 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Total des frais de procédure du Tribunal de police :

CHF

1'077.00

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

00.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

120.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

00.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

1'500.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

1'695.00

Total général (première instance + appel) :

CHF

2'772.00