Décisions | Tribunal pénal
JTDP/1527/2024 du 16.12.2024 sur OPMP/8897/2023 ( OPOP ) , JUGE
En droit
Par ces motifs
république et | canton de genève | |
pouvoir judiciaire | ||
JUGEMENT DU TRIBUNAL DE POLICE
Chambre 21
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MINISTÈRE PUBLIC
Monsieur A______, partie plaignante, assisté de Me ______
contre
Monsieur B______, prévenu, né le ______ 1940, domicilié ______[GE], assisté de Me ______
CONCLUSIONS FINALES DES PARTIES :
Le Ministère public conclut à un verdict de culpabilité du prévenu de lésions corporelles par négligence (art. 125 al. 1 CP) et requiert le prononcé d'une peine pécuniaire de 75 jours-amende à CHF 550.- et à ce qu'il soit renoncé à révoquer le sursis accordé le 4 décembre 2018 par le Ministère public du canton de Genève.
A______, par la voix de son conseil, conclut à la condamnation du prévenu du chef de lésions corporelles par négligence. Il conclut à ce qu'une juste indemnité lui soit allouée pour les frais occasionnés par la procédure au sens de l'art. 433 CPP et à ce que le Tribunal le renvoie à agir par la voie civile s'agissant de ses dommages.
B______, par la voix de son conseil, conclut à son acquittement, subsidiairement au prononcé d'une peine avec sursis complet et à un jour-amende réduit en conformité avec sa situation économique. En cas d'acquittement, il s'en réfère aux conclusions en indemnisation déposées ce jour augmentées du temps d'audience et de déplacement.
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Vu l'opposition formée par B______ à l'ordonnance pénale rendue par le Ministère public le 13 octobre 2023;
Vu la décision de maintien de l'ordonnance pénale du Ministère public;
Vu l'art. 356 al. 2 et 357 al. 2 CPP selon lequel le tribunal de première instance statue sur la validité de l'ordonnance pénale et de l'opposition;
Attendu que l'ordonnance pénale et l'opposition sont conformes aux prescriptions des art. 352, 353 et 354 CPP;
A. Par ordonnance pénale du 13 octobre 2023, valant acte d'accusation, il est reproché à B______ d'avoir, à Genève, le 3 avril 2021, vers 19h11, alors qu'il circulait au volant de son véhicule automobile de marque C______, immatriculé GE 1______, venant de la rue du Mont-de-Sion, sur la rue Charles-Galland, obliqué à droite pour s'engager sur le boulevard des Tranchées, ceci sans s'immobiliser et sans égard aux autres usagers de la route circulant sur les diverses voies du boulevard des Tranchées, puis de s'être déporté sur la voie de gauche du boulevard, et d'avoir de la sorte percuté avec le flanc gauche de son véhicule automobile l'avant droit du motocycle de marque D______, immatriculé GE 2______, conduit par A______, lequel, venant de la rue Ferdinand-Hodler, circulait sur le boulevard des Tranchées, en direction de la rue Emilie-Gourd, étant précisé que A______ a subi, en raison de cet accident, notamment une fracture et un arrachement du ligament du pied droit, une lésion du ménisque sur le genou droit, une fracture du poignet gauche et un arrachement de la plaque palmaire d'un doigt de la main gauche.
Ces faits ont été qualifiés par le Ministère public de lésions corporelles par négligence au sens de l'art. 125 al. 1 CP.
B. Il ressort du dossier les faits pertinents suivants:
a.a. Le 3 avril 2021, vers 19h10, un accident de la circulation s'est produit, au débouché de la rue Charles-Galland sur le boulevard des Tranchées, la vitesse sur ce tronçon étant limitée à 50 km/h, entre le véhicule automobile C______ immatriculé GE 1______ conduit par B______ et le motocycle D______ immatriculé GE 2______ au guidon duquel se trouvait A______. Selon le rapport de renseignements de la Brigade routière et accidents du 14 juillet 2021, B______ circulait rue Charles-Galland, en direction du boulevard des Tranchées. Parvenu à hauteur du trottoir rabaissé qui longe le côté impair du boulevard précité, il ne s'est pas immobilisé, a obliqué à droite sur le boulevard des Tranchées puis a immédiatement tenté de se déporter la voie de gauche, dans le but de tourner à gauche sur la route de Florissant, en direction de la rue de Contamine. Lors de cette manœuvre, il a entravé la route de A______, lequel venait de la rue Ferdinand-Hodler, sur la voie de droit, en direction de la rue Emilie-Gourd. A______ a tenté, sans succès, d'éviter le véhicule de B______ en déviant sa trajectoire sur la gauche. Le flanc de l'automobile a ainsi heurté l'avant droit du motocycle de A______, qui est lourdement tombé à terre, se blessant sérieusement. Suite au choc, son motocycle a été projeté contre deux autres motocycles alors stationnés sur des cases prévues à cet effet, le long du trottoir situé à la hauteur du numéro 3______ du boulevard des Tranchées.
a.b. Il ressort des photographies prises par la police le jour de l'accident la présence d'un panneau de signalisation "Stop" à la fin de la rue Charles-Galland, se situant avant le trottoir abaissé. Après le stop, un conducteur doit traverser le trottoir puis la voie de bus, qui est également une piste cyclable, avant de s'engager sur le boulevard des Tranchées, lequel présente trois voies de circulation, allant toutes en direction de la rue Emilie-Gourd. Selon les traces au sol et le marquage de la police, la collision a eu lieu sur la voie du milieu du boulevard précité. Le véhicule automobile C______ conduit par B______ a été heurté sur le flanc avant gauche, provoquant d'importants dégâts sur tout l'avant du véhicule, ainsi qu'au rétroviseur gauche. Le motocycle conduit par A______ a quant à lui présenter des points d'impact du côté droit et des dégâts importants.
b. Entendu par la police le 2 juin 2021 en qualité de personne appelée à donner des renseignements, A______ a déposé plainte pénale à l'encontre de B______. Il a expliqué que, le jour de l'accident, il circulait sur le boulevard des Tranchées, en direction de l'hôpital, sur la voie de droite. Arrivée à la hauteur de la rue Charles-Galland, un automobiliste était sorti de ladite rue et s'était engagé devant lui sur le boulevard des Tranchées, précisant que la visibilité et les conditions météorologiques étaient bonnes ce jour-là. Estimant que l'automobiliste l'avait vu, il n'avait pas ralenti. Toutefois, arrivé à sa hauteur, celui-ci avait soudainement démarré devant lui et lui avait coupé la route. Il avait tenté de l'éviter en se déportant sur la gauche, sur la voie du milieu, puis sur la voie de gauche, mais l'automobiliste en avait fait de même et un heurt s'était produit, alors qu'ils arrivaient sur la voie de gauche. Il avait subi une fracture du poignet gauche, une fracture de l'annulaire de la main droite, une déchirure du ménisque du genou droit et de multiples fractures au pied droit. Il était en incapacité totale de travailler depuis lors et les blessures dont il souffrait risquaient de lui laisser des séquelles au niveau de sa mobilité et de sa motricité, pouvant entraver sa vie professionnelle et privée. Après avoir discuté avec l'automobiliste concerné, il remettait en doute la capacité de conduire de ce dernier, qui ne semblait toujours pas prendre conscience de ce qui s'était passé et ne comprenait pas ses fautes.
c. E______, automobiliste ayant assisté à l'accident susmentionné, a fourni à la police des extraits d'images vidéos enregistrées par sa "dashcam" (caméra embarquée), placée dans l'habitacle de sa voiture. Sur ces images, on peut observer le motocycle conduit par A______ circuler sur la rue de Villereuse, étant précisé que la route est sèche, le trafic fluide et les conditions météorologiques bonnes. On le voit ensuite dépasser le véhicule de E______ par la droite, en empruntant la voie réservée aux cyclistes, accélérer, puis se remettre sur la voie de droite, alors qu'il arrive sur le boulevard des Tranchées, et continuer sa route sur la voir de droite. Par la suite, on peut voir le véhicule automobile blanc conduit par B______ s'engager sur le boulevard des Tranchées depuis la rue Charles-Galland, après avoir traversé le trottoir et la voie du bus, avant de se diriger sur la voie de droite du boulevard des Tranchées, alors que A______ circule sur cette même voie. Ensuite, A______ dévie sur son motocycle sur la gauche, suivi de B______. Lors de l'impact - qui n'est pas parfaitement visible sur les images vidéo, en raison de la présence d'un véhicule situé entre la voiture de E______ et l'accident qui entrave la prise de vue de la caméra -, A______ est projeté au sol et roule sur plusieurs mètres en direction du trottoir proche du numéro 4______ du boulevard des Tranchées. Son motocycle est également projeté en direction de deux motocycles stationnés sur les places prévues à cet effet, puis termine sa course sur le trottoir le long de la haie du numéro 4______ du boulevard précité.
d. Il ressort du rapport de renseignements du Groupe audio-visuel accident de la Brigade recherches et technique du 17 mai 2021 que l'analyse des images vidéos extraites de la "dashcam" de E______ a permis d'établir que A______ circulait au guidon de son motocycle à une vitesse moyenne de 82,5 km/h, entre l'intersection du boulevard des Tranchées et la rue Ferdinand Hodler et le numéro 5______ du boulevard des Tranchées. Aucun calcul de vitesse ne pouvait toutefois être effectué en ce qui concerne le chemin parcouru entre le numéro 5______ du boulevard et le lieu de l'impact, en raison de l'éloignement et de l'angle de la caméra. Il était visible que le véhicule conduit par B______ ne marquait aucun temps d'arrêt avant de s'engager sur la chaussée. S'agissant de la visibilité, les deux conducteurs concernés pouvaient se voir mutuellement environ 2,5 à 3 secondes avant l'impact.
e. A______ a été entendu par la police le 2 juin 2021, en qualité de prévenu. Confronté aux résultats des images vidéos provenant de la "dashcam" et aux calculs du Groupe audio-visuel accident, il a reconnu avoir circulé au volant de son motocycle à une vitesse de 82,5 km/h lors des faits, précisant qu'il ne regardait pas son compteur, qu'il était en train de dépasser un automobiliste et qu'il avait donc accéléré. Il a ajouté qu'il ne pensait pas atteindre une telle vitesse, soulignant toutefois que, selon lui, l'accident se serait également produit s'il avait circulé à 50 km/h.
f. B______ a été entendu par la police le 14 juillet 2021. Il a contesté les faits qui lui étaient reprochés, mentionnant qu'il avait eu une amende pour excès de vitesse deux ans auparavant.
g.a. Dans un courrier adressé au Ministère public le 23 août 2021, A______ a indiqué que, suite à l'accident dont il avait été victime, il avait dû être hospitalisé durant un mois et subir diverses opérations. Il avait ensuite séjourné chez ses parents pendant six semaines, afin qu'ils prennent soin de lui. Jusqu'au 13 août 2021, il avait eu besoin de béquilles axillaires, soit avec un appui sous les aisselles, et les médecins lui avaient interdit de prendre les transports en commun. Il était encore en incapacité totale de travailler, aucune de ses blessures n'étant complètement guérie, et devait suivre des séances hebdomadaires de physiothérapie.
g.b. A______ a produit une ordonnance médicale datée du 1er juillet 2021 de la Dre F______, médecin-cheffe de clinique aux HUG, laquelle atteste qu'il a subi les lésions suivantes, ayant nécessité trois interventions chirurgicales:
- au niveau du pied droit, une fracture de Lisfranc avec instabilité de la première et deuxième colonne, une fracture de la base du troisième et quatrième métatarse, une fracture sous-capitale déplacée du deuxième et troisième métatarse, un arrachement du ligament collatéral médial de la première articulation métatarso-phalangienne au niveau de la phalange proximale, un arrachement du ligament collatéral externe au niveau l'interphalange de l'O1 en regard de la deuxième phalange;
- une lésion en anse de sceau du ménisque interne du genou droit; et
- s'agissant de la main gauche, une fracture du scaphoïde gauche type A selon Herbert Arrachment de la plaque palmaire en regard de l'interphalangienne proximale du quatrième droit.
h. Une audience de confrontation s'est tenue, le 31 mars 2022, devant le Ministère public.
h.a. B______ a contesté avoir commis une faute lors de l'accident du 3 avril 2021, précisant que la visibilité était bonne, qu'il y avait très peu de circulation et qu'il avait pris toutes les précautions nécessaires avant de s'engager sur le boulevard des Tranchées. Il n'avait pas vu de motocycle sur le boulevard mais seulement des véhicules qui se situaient encore loin, à la hauteur de l'embranchement précédent. Il avait alors démarré, pour s'engager sur la route de Florissant. Il avait regardé dans ses rétroviseurs et avait constaté que la voie était libre. Il a ajouté avoir été surpris par la collision.
h.b. A______ a expliqué que, alors qu'il circulait sur le boulevard des Tranchées, il avait aperçu une voiture surgir sur sa droite et que, par réflexe, il s'était déporté sur la gauche. Le véhicule s'était inséré sur le boulevard, puis était allé tout droit, traversant ainsi plusieurs voies pour rejoindre la voie de gauche, ce qui l'avait surpris. Le choc avait eu lieu sur la voie du milieu, lorsqu'il avait tenté de freiner, sans succès, précisant qu'il suffisait que B______ tourne sa tête à gauche pour l'apercevoir. Il estimait que son comportement en tant qu'usager de la route était normal, tout comme sa vitesse. Il avait conscience que la vitesse sur ce tronçon était limitée à 50 km/h et estimait qu'il circulait à la limite de vitesse autorisée, assurant qu'il conduisait son motocycle, dont la puissant était de 300 cm3, depuis environ une année et qu'il était capable d'apprécier sa vitesse sans regarder son compteur.
Il a ajouté que son état de santé s'était amélioré et qu'il avait pu reprendre le travail à 50%, à partir du mois de décembre 2021, puis à 100%, dès le mois de février 2022 malgré des douleurs encore ressenties au niveau de son pied droit et la sensation que son genou droit se déboitait par moment.
i.a. Entendu devant le Ministère public en qualité de témoin le 5 septembre 2022, E______ a confirmé se souvenir de l'accident du 3 avril 2021 et avoir vu A______, circulant sur son scooter, puis une voiture blanche s'engager depuis la droite, sans voir le motocycle qui arrivait. Lors de l'accident, il se trouvait derrière le scooter et était relativement éloigné. Il a précisé qu'il aurait réagi de la même manière que A______, s'agissant des manœuvres effectuées pour tenter d'éviter la collision, concédant qu'il aurait peut-être freiné au lieu de tenter de contourner le véhicule. Il a relevé que le motocycliste ne pouvait pas savoir dans quelle direction se dirigeait le véhicule et que, si le conducteur s'était arrêté sur la première voie de circulation, l'accident aurait été évité.
i.b. Interrogé notamment sur son état de santé, lors de cette même audience, A______ a déclaré que son genou semblait encore se déboiter par moment, ce qui le gênait au quotidien et lui provoquait des douleurs. Des examens étaient en cours à ce sujet. Les médecins lui avaient proposé une intervention chirurgicale pour contrôler l'état de son ménisque. Il éprouvait aussi, chaque matin, des douleurs au niveau de son pied droit et les médecins ne comprenaient pas l'origine de ses maux.
j. Par courrier du 4 avril 2023, A______ a indiqué rester gravement atteint dans sa santé depuis les événements du 3 avril 2021. A l'appui de son courrier, il a produit plusieurs certificats médicaux, faisant état d'incapacité de travail à 100% pour la période du 1er février 2023 au 30 avril 2023.
k. Suite à la demande de A______ de retirer du dossier les images extraites de la "dashcam" de E______ et aux déterminations des parties à ce sujet, le Ministère public a notifié, le 9 mai 2023, une ordonnance du constat de l'exploitabilité d'une preuve illicite et du refus de la retirer du dossier, se référant notamment au fait que B______ considérait que cette preuve était à sa décharge.
l. A______ a été condamné, par ordonnance pénale du 13 octobre 2023, entrée en force, à 40 jours-amende fixée à CHF 140.- le jour, peine assortie du sursis et d'un délai d'épreuve de trois ans, pour avoir, le 3 avril 2021 aux alentours de 19h11, circulé au volant de son motocycle sur le boulevard des Tranchées à la vitesse de 82,5 km/h, alors que la vitesse maximale autorisée sur ce tronçon est de 50 km/h, soit d'un dépassement de 32.5 km/h, et avoir dépassé à la hauteur du numéro 6______ dudit boulevard un véhicule automobile en empruntant la bande cyclable, puis continué à circuler sur ladite bande cyclable à la hauteur du numéro 7______, malgré le fait que celle-ci soit délimitée par une ligne continue.
m.a. Par ordonnance pénale du même jour, B______ a été condamné à une peine pécuniaire de 75 jours-amende fixé à CHF 550.- le jour, pour lésions corporelles par négligence (art. 125 al. 1 CP).
m.b. En date du 19 octobre 2023, B______ a formé opposition à l'ordonnance pénale précitée.
C. L'audience de jugement a eu lieu le 16 décembre 2024.
a. B______ a contesté les faits qui lui sont reprochés. Il a assuré s'être arrêté au stop juste avant le trottoir, avant de s'engager sur le boulevard des Tranchées, précisant qu'il fallait traverser une ligne de bus avant de rejoindre le boulevard et qu'il fallait être certain qu'aucun véhicule n'était sur la voie avant de s'engager. Le jour des faits, alors qu'il rentrait du travail, il avait remonté le boulevard Helvétique et avait bifurqué à droite sur la rue Charles-Galland, en direction de la route de Florissant, dans le but d'éviter le trafic. Il empruntait cet itinéraire depuis des décennies. Il a confirmé avoir regardé à gauche avant de s'engager sur le boulevard et n'avoir pas vu le motocycliste. Confronté aux images vidéos extraites de la "dashcam", sur lesquels on ne le voit pas s'arrêter, il a expliqué que son véhicule était caché par l'immeuble, lorsqu'il s'était arrêté, son arrêt ayant duré le temps nécessaire pour s'assurer que personne n'arrivait sur la chaussée et qu'il pouvait s'avancer sans risque. Lorsqu'il avait démarré, il avait regardé à gauche jusqu'à ce qu'il soit certain qu'il n'y avait aucun danger et avait fait attention jusqu'au dernier moment, spécifiant qu'il avait roulé doucement. Il a répété qu'il n'avait pas vu le motocycle conduit par A______, lequel ne se trouvait pas dans son champ de vision, et ne s'était aperçu de sa présence qu'au moment de l'impact. Il a ajouté que s'il avait vu un motocycliste arriver, il l'aurait laissé passer. Il a précisé avoir eu son dernier contrôle médical pour déterminer son aptitude à conduire au mois de mars 2024 et n'avoir jamais eu de retrait de permis.
b. Entendu en qualité de partie plaignante, A______ a confirmé la teneur de sa plainte pénale et ses précédentes déclarations. Il souffrait encore des conséquences de l'accident du 3 avril 2021. Il avait dû subir une autre opération en 2023 et souffrait toujours de douleurs au genou. Il avait pu reprendre son travail mais devait veiller à trouver une position confortable pour pouvoir travailler et devait parfois demander de l'aide à ses collègues pour l'accomplissement de certaines tâches. Confronté à sa vitesse au début du boulevard des Tranchées, il a indiqué qu'il avait d'abord accéléré pour dépasser le véhicule le précédent, avant de freiner, sans regarder son compteur.
D.a. B______ est né le ______ 1940 à Genève. D'origine suisse, il est marié et père d'une fille majeure. Il travaille en qualité de gérant de sa propre fiduciaire et perçoit un montant annuel net de CHF 95'000.- comprenant notamment ses rentes de prévoyance professionnelle et d'AVS ainsi que la valeur locative et ses revenus immobiliers. Son épouse, retraitée, perçoit un montant de CHF 2'346.- à titre de rente AVS, ainsi que CHF 2'097.- provenant de son deuxième pilier. Ses primes mensuelles d'assurance maladies s'élèvent à CHF 13'000.- par an, son épouse devant s'acquitter du même montant. Il a des dettes à hauteur d'un montant total d'environ CHF 800'000.-.
b. Selon l'extrait de son casier judiciaire suisse, B______ a été condamné, le 4 décembre 2018, par le Ministère public de Genève, à une peine pécuniaire de 30 jours-amende fixée à CHF 80.- le jour, peine assortie du sursis et d'un délai d'épreuve de trois ans, ainsi qu'à une amende de CHF 500.-, pour violation grave des règles de la circulation routière au sens de l'art. 90 al. 2 LCR.
Culpabilité
1. Le principe in dubio pro reo, qui découle de la présomption d'innocence, garantie par l'art. 6 ch. 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (RS 0.101; CEDH) et, sur le plan interne, par les art. 32 al. 1 de la Constitution fédérale (RS 101; Cst.) et 10 al. 3 CPP, concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves.
En tant que règle sur le fardeau de la preuve, ce principe signifie qu'il incombe à l'accusation d'établir la culpabilité de l'accusé, et non à ce dernier de démontrer son innocence. Il est violé lorsque le juge rend un verdict de culpabilité au seul motif que l'accusé n'a pas prouvé son innocence, mais aussi lorsqu'il résulte du jugement que, pour être parti de la fausse prémisse qu'il incombait à l'accusé de prouver son innocence, le juge l'a condamné parce qu'il n'avait pas apporté cette preuve (ATF 127 I 38 consid. 2a, JdT 2004 IV 65 et les arrêts cités).
Comme règle de l'appréciation des preuves, le principe in dubio pro reo interdit au juge de se déclarer convaincu d'un état de fait défavorable à l'accusé, lorsqu'une appréciation objective des éléments de preuve recueillis laisse subsister un doute sérieux et insurmontable quant à l'existence de cet état de fait. Des doutes abstraits ou théoriques, qui sont toujours possibles, ne suffisent certes pas à exclure une condamnation. La présomption d'innocence n'est invoquée avec succès que si l'intéressé démontre qu'à l'issue d'une appréciation exempte d'arbitraire de l'ensemble des preuves, le juge aurait dû éprouver des doutes sérieux et irréductibles sur sa culpabilité (ATF 124 IV 86 consid. 2a, JdT 1999 IV 136; ATF 120 Ia 31 consid. 2, JdT 1996 IV 79).
2.1.1. L'art. 125 CP punit, sur plainte, celui qui, par négligence, aura fait subir à une personne une atteinte à l'intégrité corporelle ou à la santé. L'alinéa 2 de cette disposition prévoit que si la lésion est grave, l'auteur sera poursuivi d'office.
Cette infraction suppose la réalisation de trois conditions: une négligence imputable à l'auteur, des lésions corporelles subies par la victime, ainsi qu'un lien de causalité naturelle et adéquate entre la négligence et les lésions (arrêt du Tribunal fédéral 7B_744/2023 du 14 février 2024 consid. 4.2.1).
2.1.2. Conformément à l'art. 12 al. 3 CP, il y a négligence si, par une imprévoyance coupable, l'auteur a agi sans se rendre compte ou sans tenir compte des conséquences de son acte. Il faut que l'auteur ait, d'une part, violé les règles de prudence que les circonstances lui imposaient pour ne pas excéder les limites du risque admissible et que, d'autre part, il n'ait pas déployé l'attention et les efforts que l'on pouvait attendre de lui pour se conformer à son devoir. Pour déterminer plus précisément les devoirs imposés par la prudence, on peut se référer à des normes édictées par l'ordre juridique pour assurer la sécurité et éviter des accidents. S'agissant d'un accident de la route, il convient de se référer aux règles de la circulation routière (arrêt du Tribunal fédéral 6B_69/2017 du 28 novembre 2017 consid. 2.1).
2.1.3. La violation fautive des devoirs de prudence doit être la cause naturelle et adéquate de l'accident (ATF 133 IV 158 consid. 6). Un comportement est la cause naturelle d'un résultat s'il en constitue l'une des conditions sine qua non, c'est-à-dire lorsque, sans lui, le résultat ne se serait pas produit. Le rapport de causalité peut être qualifié d'adéquat si, d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience générale de la vie, le comportement était propre à entraîner un résultat du genre de celui qui s'est produit (ATF 138 IV 57 consid. 4.1.3; arrêt du Tribunal fédéral 6B_253/2012 du 7 septembre 2012, consid. 3.3.1 et 3.3.2). La causalité adéquate sera admise même lorsque le comportement de l'auteur n'est pas la cause directe ou unique du résultat. Peu importe que le résultat soit dû à d'autres causes, notamment à l'état de la victime, à son comportement ou à celui de tiers (ATF 131 IV 145 consid. 5.2). La causalité adéquate peut toutefois être exclue si une autre cause concomitante, par exemple le comportement de la victime, constitue une circonstance tout à fait exceptionnelle ou apparaît si extraordinaire que l'on ne pouvait s'y attendre. L'imprévisibilité d'un acte concurrent ne suffit pas, en soi, à interrompre le rapport de causalité adéquate. Il faut encore que cet acte revête une importance telle qu'il s'impose comme la cause la plus probable et la plus immédiate de l'évènement considéré, reléguant à l'arrière-plan tous les autres facteurs qui ont contribué à l'amener et notamment le comportement de l'auteur (ATF 134 IV 255 consid. 4.4.2 et les arrêts cités).
2.1.4. L'art. 26 LCR, règle fondamentale de la circulation routière, prescrit que chacun doit se comporter, dans la circulation, de manière à ne pas gêner ni mettre en danger ceux qui utilisent la route conformément aux règles établies (al. 1). La jurisprudence a déduit de cette règle le principe de la confiance, qui permet à l'usager qui se comporte réglementairement d'attendre des autres usagers, aussi longtemps que des circonstances particulières ne doivent pas l'en dissuader, qu'ils se comportent également de manière conforme aux règles de la circulation, c'est-à-dire ne le gênent ni ne le mettent en danger (ATF 143 IV 138 consid. 2.1).
Celui qui viole des règles de la circulation et crée ainsi une situation confuse ou dangereuse ne peut pas attendre des autres qu'ils parent à ce danger par une attention accrue. Cette limitation n'est cependant plus applicable lorsque la question de savoir si l'usager a violé une règle de la circulation dépend précisément de la possibilité qu'il a d'invoquer le principe de la confiance, en d'autres termes, si et dans quelle mesure il pouvait se fonder sur le comportement de l'autre usager (ATF 143 IV 500 consid. 1.2.4; 129 IV 282 consid. 2.2.1et les références citées). Le conducteur débiteur de la priorité peut se prévaloir du principe de la confiance. Si le trafic lui permet de s'engager sans gêner un véhicule prioritaire, on ne peut lui reprocher aucune violation du droit de priorité s'il entrave malgré tout la progression du prioritaire en raison du comportement imprévisible de ce dernier. Constitue un comportement imprévisible le fait d'accélérer brusquement pour forcer le passage, de surgir de façon inopinée à une vitesse largement excessive, ou de freiner vigoureusement tout à coup sans raison. Dans l'optique d'une règle de priorité claire, on ne peut toutefois admettre facilement que le débiteur de la priorité n'a pas à compter avec le passage, respectivement l'entrave d'un prioritaire (ATF 143 IV 500 consid. 1.2.4).
Le Tribunal fédéral a considéré que, dans l'optique d'une règle de priorité claire, on ne pouvait admettre facilement que le débiteur de la priorité n'avait pas à compter avec le passage, respectivement l'entrave d'un prioritaire (arrêt du Tribunal fédéral 6B_746/2007 du 29 février 2008 consid. 1.2).
D'après la jurisprudence de la Cour de justice, il n'est ni extraordinaire ni imprévisible que des usagers de la route, notamment des motos, dévalent à grande vitesse, à un moment où la circulation est faible, par exemple en soirée, un axe important, et cela même en plein centre-ville où la vitesse est limitée à 50km/h. Ainsi, par exemple, un dépassement de la vitesse maximale autorisée de l'ordre de 30km/h ne peut être considéré comme aboutissant à une rupture du lien de causalité, étant donné que cette situation est malheureusement fréquente, et qu’il ne peut être considéré comme un facteur auquel un conducteur ne pouvait s'attendre (ACJP/146/2008 du 31 juillet 2008, consid. 2.4.3.1.; ACJP/53/2006 du 27 février 2006, consid. 2.3.; Bussy/Rosconi, Code suisse de la circulation routière commenté, 4ème éd., 2015, n. 2.2.2 ad art. 36 LCR).
2.1.5. Selon l'art. 34 al. 3 LCR, le conducteur qui veut modifier sa direction de marche, par exemple pour obliquer, dépasser, se mettre en ordre de présélection ou passer d'une voie à l'autre, est tenu d'avoir égard aux usagers de la route qui viennent en sens inverse ainsi qu'aux véhicules qui le suivent.
2.1.6. À teneur de l'art. 39 al. 1 LCR, avant de changer de direction, le conducteur manifestera à temps son intention au moyen des indicateurs de direction ou en faisant de la main des signes intelligibles. Cette règle vaut notamment pour se disposer en ordre de présélection, passer d'une voie à une autre ou pour obliquer (let. a); pour dépasser ou faire demi-tour (let. b); pour s'engager dans la circulation ou s'arrêter au bord de la route (let. c). L'alinéa 2 de ce même article rappelle que le conducteur qui signale son intention aux autres usagers de la route n’est pas dispensé pour autant d’observer les précautions nécessaires.
2.1.7. L'art. 44 al. 1 LCR dispose que sur les routes marquées de plusieurs voies pour une même direction, le conducteur ne peut passer d’une voie à une autre que s'il n’en résulte pas de danger pour les autres usagers de la route.
2.1.8. Le résultat typique de l'art. 125 CP se définit en référence aux art. 122 et 123 CP.
L'art. 123 ch. 1 CP dispose que quiconque, intentionnellement, fait subir à une personne une autre atteinte à l’intégrité corporelle ou à la santé est puni sur plainte d’une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d’une peine pécuniaire.
L'art. 123 CP concerne les lésions du corps humain ou de la santé qui ne peuvent être qualifiées de graves au sens de l'art. 122 CP. Une lésion corporelle existe dès qu'une action directe sur le corps humain, sous l'effet d'un choc ou au moyen d'un objet, a pour conséquence d'en dégrader l'état, à savoir notamment une fracture, une coupure, un hématome (Corboz, Les infractions en droit suisse, Vol. I, 3ème éd., Stämpfli 2010 Bern, N 7 ad 123 CP). A titre d'exemples, la jurisprudence cite tout acte qui provoque un état maladif, l'aggrave ou en retarde la guérison, comme les blessures, les meurtrissures, les écorchures ou les griffures, sauf si ces lésions n'ont pas d'autres conséquences qu'un trouble passager et sans importance du sentiment de bien-être (ATF 134 IV 189 consid. 1.1 et les arrêts cités). Il en va de même d'un hématome visible pendant plusieurs jours, provoqué par un coup de poing dans la figure, dans la mesure où une telle marque est la conséquence de la rupture d'un vaisseau sanguin, dommage qui est une lésion du corps humain, même si elle est superficielle et de peu d'importance (ATF 119 IV 25 consid. 2a p. 27).
2.2. En l'espèce, le Tribunal considère que les faits tels que décrits dans l'ordonnance pénale du 13 octobre 2023, valant acte d'accusation, sont établis par les éléments figurants au dossier, notamment les déclarations des parties, du témoin, des constatations policières, des photographies et des images vidéo de la "dashcam".
Le Tribunal retient ainsi que le plaignant venait de la rue Ferdinand-Hodler et circulait au guidon de son motocycle sur le boulevard des Tranchées, en direction de la rue Emilie-Gourd, à une vitesse moyenne estimée à 82.5 km/h.
Quant au prévenu, même si rien ne permet d'établir s'il a effectivement respecté ou non le signal "stop", le Tribunal estime qu'il est établi, en particulier par les images de la "dashcam", que, venant de la rue Charles-Galland, il s'est par la suite engagé sur le boulevard des Tranchées sans marquer de temps d'arrêt pour se diriger vers la route de Florissant, se retrouvant alors en travers du boulevard précité au moment où le plaignant arrivait.
Ce dernier, surpris par l'incursion du véhicule du prévenu venant de sa droite, n'a ainsi pas réussi à éviter la collision et a heurté celui-ci, se voyant projeté violemment au sol.
En s'engageant de la sorte sur le boulevard des Tranchées pour rejoindre la voie permettant d'obliquer à gauche à la prochaine intersection, le prévenu devait traverser trois voies, soit celle réservée aux bus et aux vélos, mais aussi deux autres pour continuer sur le boulevard.
Sa manœuvre lui imposait d'être prudent et d'avoir tous les égards aux véhicules y circulant, lesquels étaient prioritaires, en particulier celui du plaignant.
En effet, après avoir franchi le trottoir, le prévenu aurait dû rouler au pas jusqu'à la voie de bus, tout en regardant sur sa gauche, ralentir, voire s'arrêter pour s'engager une fois la file de véhicules passée et la chaussée entièrement libérée. Il appartenait au prévenu et non au plaignant de redoubler de vigilance.
Ainsi, force est de constater que le prévenu n'a manifestement pas accordé la priorité au plaignant, motocycliste qui circulait sur une route principale, et lui a coupé la route en n'ayant pas pris toutes les précautions nécessaires avant de s'engager dans sa manœuvre à un endroit qui appelle à plus de circonspection, au vu de sa configuration. Il lui appartenait de vouer toute son attention à la route et aux véhicules qui venaient sur sa gauche, ce qui n'a manifestement pas été le cas. Le prévenu n'a ainsi pas été en mesure d'éviter le heurt avec le motocycliste dont il n'a constaté la présence sur la chaussée qu'au moment de la collision.
Par conséquent, le comportement du prévenu est bien fautif, notamment en ayant violé son devoir de prudence en tant qu'automobiliste au sens des dispositions topiques en matière de circulation routière, en particulier les art. 26 al. 1, 34 al. 3 et 44 al. 1 LCR.
Le comportement fautif du prévenu est à l'origine de l'accident qui s'est produit avec le plaignant et qui a causé les blessures dont ce dernier a souffert et qui ont été constatées médicalement, lesquelles ont notamment nécessité des interventions chirurgicales et entrainé des arrêts de travail.
Si le prévenu avait apporté toute l'attention accrue nécessaire aux circonstances et avait respecté la priorité à accorder, aucun accident n'aurait eu lieu. Son comportement fautif était ainsi propre, selon le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, à entraîner un accident tel que celui survenu. Le lien de causalité naturel et adéquat est donc établi, car c'est bien le comportement du prévenu qui a engendré les lésions dont a souffert le plaignant, lesquelles sont établies par pièces médicales et ne sont au demeurant pas remises en question, à juste titre, par le prévenu.
Ce dernier invoque toutefois une interruption du lien de causalité adéquat, par le comportement adopté par le plaignant, soit sa vitesse excessive au moment de l'accident et par le fait que celui-ci circulait sur la bande jaune séparant les voies de celle du bus.
Le Tribunal relève tout d'abord qu'il n'existe pas de compensation des fautes en droit pénal, sauf en cas de circonstances exceptionnelles de nature à interrompre le lien de causalité, ce qui n'est pas le cas en l'occurrence.
Or, il est établi et non contesté que c'est bien le prévenu qui devait s'insérer dans la circulation et non le plaignant, qui lui, ne faisait que poursuivre son chemin sur le boulevard des Tranchées.
Pour ce qui est de la vitesse du plaignant au moment des faits, comme vu précédemment il est établi que celui-ci roulait, sur une route principale limitée à 50 km/h, à une vitesse moyenne de 82.5 km/h, soit à environ 32 km/h au-dessus de la limitation.
Au vu de la jurisprudence précitée, le comportement du plaignant, bien que répréhensible, n'apparaît pas comme étant une cause exceptionnelle ou extraordinaire et ne peut être considéré comme étant un facteur insolite aboutissant à une rupture du lien de causalité. Cette situation, fréquente, ne constitue en effet pas un élément auquel le prévenu ne pouvait s'attendre ni comme la cause la plus probable et immédiate de l'accident et ne relègue pas à l'arrière-plan ses fautes de circulation.
Par conséquent, le Tribunal ne saurait retenir une rupture du lien de causalité adéquat.
Au vu de ce qui précède le prévenu sera reconnu coupable de lésions corporelles par négligence (art. 125 al. 1 CP).
Peine
3.1.1. Les lésions corporelles par négligence, au sens de l'art. 125 CP, sont réprimées d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire
3.1.2. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2). Comme sous l'ancien droit, le facteur essentiel est celui de la faute.
La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution (objektive Tatkomponente). Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle, ainsi que les motivations et les buts de l'auteur (subjektive Tatkomponente). À ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même (Täterkomponente), à savoir les antécédents, la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 134 IV 17 consid. 2.1; ATF 129 IV 6 consid. 6.1; arrêt du Tribunal fédéral 6B_198/2013 du 3 juin 2013 consid. 1.1.1).
3.1.3. Selon l'art. 34 al. 1 CP, la peine pécuniaire est de trois jours-amende au moins et ne peut excéder 180 jours-amende, le juge fixant leur nombre en fonction de la culpabilité de l'auteur. En règle générale, le jour-amende est de CHF 30.- au moins et de CHF 3'000.- au plus. Le juge en arrête le montant selon la situation personnelle et économique de l'auteur au moment du jugement, notamment en tenant compte de son revenu et de sa fortune, de son mode de vie, de ses obligations d'assistance, en particulier familiales, et du minimum vital (art. 34 al. 2 CP).
3.1.4. L'art. 42 al. 1 CP prévoit que le juge suspend en règle générale l'exécution d'une peine pécuniaire ou d'une peine privative de liberté de deux ans au plus lorsqu'une peine ferme ne paraît pas nécessaire pour détourner l'auteur d'autres crimes ou délits.
Sur le plan subjectif, le juge doit poser, pour l'octroi du sursis, un pronostic quant au comportement futur de l'auteur. En l'absence de pronostic défavorable, il doit prononcer le sursis.
3.1.5. Selon l'art. 44 CP, si le juge suspend totalement ou partiellement l'exécution d'une peine, il impartit au condamné un délai d'épreuve de deux à cinq ans (al. 1).
3.1.6. En vertu de l'art. 46 al. 1 CP, si, durant le délai d'épreuve, le condamné commet un crime ou un délit et qu'il y a dès lors lieu de prévoir qu'il commettra de nouvelles infractions, le juge révoque le sursis ou le sursis partiel. Si la peine révoquée et la nouvelle peine sont du même genre, il fixe une peine d'ensemble en appliquant par analogie l'art. 49 CP. S'il n'y a pas lieu de prévoir que le condamné commettra de nouvelles infractions, le juge renonce à ordonner la révocation (al. 2).
3.1.7. Aux termes de l'art. 46 al. 2 CP, s'il n'y a pas lieu de prévoir que le condamné commettra de nouvelles infractions, le juge renonce à ordonner la révocation. Il peut adresser au condamné un avertissement et prolonger le délai d'épreuve de la moitié au plus de la durée fixée dans le jugement. Il peut ordonner une assistance de probation et imposer des règles de conduite pour le délai d'épreuve ainsi prolongé. Si la prolongation intervient après l'expiration du délai d'épreuve, elle court dès le jour où elle est ordonnée.
3.1.8. Selon l'art. 46 al. 5 CP, la révocation ne peut plus être ordonnée lorsque trois ans se sont écoulés depuis l’expiration du délai d’épreuve.
3.2. En l'espèce, la faute du prévenu n'est pas négligeable. Il a, par inadvertance coupable, contrevenu à ses devoirs élémentaires de conducteur, en violant des règles de circulation, causant de la sorte un accident qui a engendré des lésions importantes sur le plaignant et qui aurait pu avoir des conséquences bien plus dramatiques.
Le prévenu aurait pu éviter l'accident et ses conséquences en se conformant simplement aux règles de la circulation routière, plutôt que de s'engager prématurément et dangereusement, gagnant quelques secondes d'attente, soit par simple convenance personnelle.
La période pénale est certes courte mais elle est inhérente à la nature de l'infraction. Il sera tenu compte du fait qu'il s'agit vraisemblablement d'un épisode isolé.
Rien dans la situation personnelle du prévenu ne justifie ni n'excuse son comportement.
Sa collaboration est médiocre puisqu'il persiste encore à nier toute part de responsabilité dans cet accident, malgré les éléments auxquels il a été confrontés. Il rejette la faute sur la partie plaignante, qu'il considère comme étant la seule responsable et n'a pas non plus formulé de regrets ou d'excuses envers elle, ce qui témoigne également d'une prise de conscience manifestement inaboutie.
Sa responsabilité est pleine et entière.
Il n'existe aucun fait justificatif ni circonstance atténuante.
Le prévenu a un antécédent spécifique, dès lors qu'il a été condamné le 4 décembre 2018, par le Ministère public du canton de Genève, pour violation grave à la LCR (art. 90 al. 2 LCR).
Au vu de ce qui précède, une peine pécuniaire apparaît suffisante afin d'assurer le maintien de l'ordre publique.
La quotité de la peine pécuniaire requise par le Ministère public parait adéquate et le Tribunal n'entend ainsi pas s'en écarter.
A l'aune de la situation financière du prévenu, le montant du jour-amende sera toutefois réduit et fixé à CHF 260.- l'unité.
Nonobstant son antécédent spécifique, le Tribunal estime que le pronostic quant au comportement futur du prévenu ne se présente pas d'emblée sous un jour défavorable, n'ayant pas fait l'objet d'une nouvelle condamnation pénale inscrite à son casier judiciaire depuis les faits.
Il sera donc mis au bénéfice du sursis et le délai d'épreuve sera fixé à 3 ans.
Au vu des éléments susmentionnés, il n'est pas nécessaire, à titre de prévention spéciale de condamner le prévenu à une amende immédiate. Il y sera ainsi renoncé.
S'agissant du sursis accordé le 4 décembre 2018 par le Ministère public, le Tribunal relève que sa révocation ne peut plus être ordonnée, dès lors que plus de trois ans se sont écoulés depuis l'expiration du délai d'épreuve (art. 46 al. 5 CP).
Conclusions civiles
4.1.1. Aux termes de l'art. 122 al. 1 CPP, la partie plaignante peut faire valoir des conclusions civiles déduites de l'infraction par adhésion à la procédure.
4.1.2. En vertu de l'art. 126 al. 1 let. a CPP, le tribunal statue sur les prétentions civiles présentées lorsqu'il rend un verdict de culpabilité à l'encontre du prévenu. En revanche, il renvoie la partie plaignante à agir par la voie civile lorsqu'elle n'a pas chiffré ses conclusions de manière suffisamment précise ou ne les a pas suffisamment motivées (art. 126 al. 2 let. b CPP).
4.2. En l'espèce, le plaignant a, par l'intermédiaire de son conseil, expressément demandé à être renvoyé au civil. Il sera donc renvoyé à agir par la voie civile s'agissant de ses dommages.
Frais et indemnités
5.1.1. Aux termes de l'art. 433 CPP, la partie plaignante peut demander au prévenu une juste indemnité pour les dépenses occasionnées par la procédure si elle obtient gain de cause (let. a). La partie plaignante adresse ses prétentions à l'autorité pénale et doit les chiffrer et les justifier (al. 2).
5.1.2. La partie plaignante a obtenu gain de cause au sens de cette norme lorsque le prévenu a été condamné et/ou si les prétentions civiles ont été admises, à tout le moins partiellement (Moreillon/Parein-Reymond, Petit commentaire CPP, 2ème éd., Helbing Lichtenhahn 2016 Bâle, N 5 ad art. 433 CPP). La juste indemnité, notion qui laisse un large pouvoir d'appréciation au juge, couvre les dépenses et les frais nécessaires pour faire valoir le point de vue de la partie plaignante, à l'exclusion de toutes démarches inutiles ou superflues (CR CPP-Mizel/Retornaz, N 8 ad art. 433 CPP).
5.1.3. La juste indemnité, notion qui laisse un large pouvoir d'appréciation au juge, couvre ainsi les dépenses et les frais nécessaires pour faire valoir le point de vue de la partie plaignante dans la procédure pénale. Il s'agit en premier lieu des frais d'avocat (ATF 139 IV 102 consid. 4.1). En particulier, les démarches doivent apparaître nécessaires et adéquates pour la défense raisonnable du point de vue de la partie plaignante (ATF 139 IV 102 consid. 4.3; arrêts du Tribunal fédéral 6B_524/2017 du 22 novembre 2017 consid. 2.1; 6B_864/2015 du 1er novembre 2016 consid. 3.2; 6B_159/2012 du 22 juin 2012 consid. 2.3).
5.1.4. Les honoraires d'avocat se calculent selon le tarif usuel du barreau applicable dans le canton où la procédure se déroule (arrêt du Tribunal fédéral 6B_392/2013 du 4 novembre 2013 consid. 2.3.). Bien que le canton de Genève ne connaisse pas de tarif officiel des avocats, il n'en a pas moins posé, à l'art. 34 LPAv, les principes généraux devant présider à la fixation des honoraires, qui doivent en particulier être arrêtés compte tenu du travail effectué, de la complexité et de l'importance de l'affaire, de la responsabilité assumée, du résultat obtenu et de la situation du client. Sur cette base, la Cour de justice retient en principe un tarif horaire entre CHF 400.- et CHF 450.- pour un chef d'étude, de CHF 350.- pour les collaborateurs et de CHF 150.- pour les stagiaires (arrêt de la Cour de justice AARP/38/2018 du 26 janvier 2018 consid. 7).
5.2. En l'espèce, la partie plaignante a sollicité une indemnité d'un montant total de CHF 13'141.10, pour l'activité déployée par son conseil.
Les tarifs horaires seront réduits à hauteur de ceux retenus par la Cour et le prévenu sera ainsi condamné à verser au plaignant, un montant total de CHF 8'534.75, à titre de juste indemnité pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure (art. 433 al. 1 CPP), étant précisé que 5 heures datées du 2 novembre 2023 ont été retranchées car le motif de facturation intitulé "Divers" n'est pas assez précis et ne permet pas de savoir quel travail a été effectué.
6. Vu l'issue de la procédure, le prévenu sera condamné aux frais de la procédure fixés à CHF 1'170.-, y compris un émolument de jugement de CHF 300.- (art. 10 al. 1 let. e RTFMP). Pour le surplus, ses conclusions en indemnisation seront rejetées (art. 429 CPP).
LE TRIBUNAL DE POLICE
statuant sur opposition :
Déclare valables l'ordonnance pénale du 13 octobre 2023 et l'opposition formée contre celle-ci par B______.
et statuant à nouveau contradictoirement :
Déclare B______ coupable de lésions corporelles par négligence (art. 125 al. 1 CP).
Condamne B______ à une peine pécuniaire de 75 jours-amende (art. 34 CP).
Fixe le montant du jour-amende à CHF 260.-.
Met B______ au bénéfice du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à 3 ans (art. 42 et 44 CP).
Avertit B______ que s'il devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).
Renvoie la partie plaignante A______ à agir par la voie civile (art. 126 al. 2 CPP).
Rejette les conclusions en indemnisation de B______ (art. 429 CPP).
Condamne B______ à verser à A______ CHF 8'534.75, à titre de juste indemnité pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure (art. 433 al. 1 CPP).
Condamne B______ aux frais de la procédure, qui s'élèvent à CHF 1'170.-, y compris un émolument de jugement de CHF 300.- (art. 426 al. 1 CPP).
Ordonne la communication du présent jugement aux autorités suivantes : Casier judiciaire suisse, Service cantonal des véhicules et Service des contraventions (art. 81 al. 4 let. f CPP).
Informe les parties que, dans l'hypothèse où elles forment un recours à l'encontre du présent jugement ou en demandent la motivation écrite dans les dix jours qui suivent la notification du dispositif (art. 82 al. 2 CPP), l'émolument de jugement fixé sera en principe triplé, conformément à l'art. 9 al. 2 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale (RTFMP; E 4.10.03).
La Greffière | Le Président |
Vu l'annonce d'appel formée par le prévenu, laquelle entraîne la motivation écrite du jugement (art. 82 al. 2 let. b CPP);
LE TRIBUNAL DE POLICE
Condamne B______ à payer un émolument complémentaire de CHF 600.- à l'Etat de Genève.
La greffière Amelia CAGNEUX |
| Le président Raphaël GOBBI |
Voies de recours
Les parties peuvent annoncer un appel contre le présent jugement, oralement pour mention au procès-verbal, ou par écrit au Tribunal pénal, rue des Chaudronniers 9, case postale 3715, CH-1211 Genève 3, dans le délai de 10 jours à compter de la communication du dispositif écrit du jugement (art. 398, 399 al. 1 et 384 let. a CPP).
Selon l'art. 399 al. 3 et 4 CPP, la partie qui annonce un appel adresse une déclaration écrite respectant les conditions légales à la Chambre pénale d'appel et de révision, Place du Bourg-de-Four 1, case postale 3108, CH-1211 Genève 3, dans les 20 jours à compter de la notification du jugement motivé.
Le défenseur d'office ou le conseil juridique gratuit peut également contester son indemnisation en usant du moyen de droit permettant d'attaquer la décision finale, la présente décision étant motivée à cet égard (art. 135 al. 3 et 138 al. 1 CPP).
L'appel ou le recours doit être remis au plus tard le dernier jour du délai à la juridiction compétente, à la Poste suisse, à une représentation consulaire ou diplomatique suisse ou, s'agissant de personnes détenues, à la direction de l'établissement carcéral (art. 91 al. 2 CPP).
Etat de frais
Frais du Ministère public | CHF | 710.00 |
Convocations devant le Tribunal | CHF | 75.00 |
Frais postaux (convocation) | CHF | 28.00 |
Emolument de jugement | CHF | 300.00 |
Etat de frais | CHF | 50.00 |
Frais postaux (notification) | CHF | 7.00 |
Total | CHF | 1170.00 |
========== | ||
Emolument complémentaire | CHF | 600.00 _______ |
Total | CHF | 1'770.00 |
Notification à B______, soit pour lui son Conseil
Par voie postale
Notification à A______, soit pour lui son Conseil
Par voie postale
Notification au Ministère public
Par voie postale