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Décisions | Chambre des baux et loyers

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C/21650/2024

ACJC/1392/2025 du 09.10.2025 sur JTBL/843/2025 ( SBL )

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/21650/2024 ACJC/1392/2025

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des baux et loyers

DU JEUDI 9 OCTOBRE 2025

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______, appelant et recourant contre un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 4 septembre 2025, représenté par l'ASLOCA, rue du Lac 12, case postale 6150, 1211 Genève 6,

et

FONDATION DE PREVOYANCE B______, sise c/o C______ [régie immobilière], ______, intimée, représenté par Me Sarah MEINEN, avocate, quai Gustave-Ador 26, case postale 6253, 1211 Genève 6.

 


Attendu, EN FAIT, que, par contrat du 3 novembre 2014, FONDATION DE PREVOYANCE B______, bailleresse, a remis à bail à A______, locataire, une arcade d'environ 80 m2 située au rez-de-chaussée ainsi qu’un dépôt d'environ 55 m2 situé au sous-sol de l'immeuble sis rue 1______ no. ______ à Genève;

Que le loyer, charges comprises, a été fixé en dernier lieu à 4’496 fr. par mois;

Qu’une garantie de loyer de 48'360 fr. a été fournie par le locataire;

Que, par requête en protection des cas clairs déposée au Tribunal des baux et loyers le 18 septembre 2024, la bailleresse a conclu à l’évacuation du locataire, avec exécution directe, au paiement de l’arriéré d'indemnités pour occupation illicite, au paiement des indemnités courantes jusqu'au jour de l'évacuation et à la libération de la garantie bancaire en sa faveur;

Que lors de l’audience du Tribunal du 7 novembre 2024, le locataire a allégué qu’il avait cessé de payer les loyers car son chiffre d'affaires avait baissé de moitié à cause des travaux exécutés sur l'immeuble, que son arcade avait été fermée du 7 juillet au 14 août 2024 en raison de ces travaux, lesquels n'étaient toujours pas terminés, et que les échafaudages étaient toujours en place;

Que des audiences ont ensuite eu lieu devant le Tribunal les 27 mars, 5 juin et 4 septembre 2025;

Que lors de la dernière audience, la bailleresse a amplifié ses conclusions pécuniaires et persisté pour le surplus; qu’elle a déclaré que la réduction de loyer pour la période des travaux était toujours "en cours de calcul"; qu’elle a ajouté que, depuis la précédente audience, le locataire avait accumulé trois mensualités de retard supplémentaires, alors qu’il s’était engagé à verser les indemnités courantes;

Que le locataire a déclaré qu’il avait fait la veille un versement de 4'496 fr., que son chiffre d’affaires continuait à évoluer et qu’il allait pouvoir payer en septembre 2025 les indemnités de juillet et août 2025;

Que le Tribunal a gardé la cause à juger à l’issue de l’audience;

Que, par jugement JTBL/843/2025 du 4 septembre 2025, le Tribunal a condamné A______ à évacuer immédiatement de sa personne et de ses biens, ainsi que toute autre personne dont il était responsable, l'arcade et le dépôt en question (ch. 1 du dispositif), autorisé FONDATION DE PREVOYANCE B______ à requérir l'évacuation par la force publique de A______, dès l'entrée en force du jugement (ch. 2), condamné A______ à verser à la bailleresse la somme de 46'883 fr. 80 (ch. 3) ordonné la libération partielle en faveur de FONDATION DE PREVOYANCE B______ de la garantie de loyer, à concurrence de 46'883 fr. 80, le montant ainsi perçu venant en déduction du montant dû selon le chiffre 3 du dispositif (ch. 4), débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 5) et dit que la procédure était gratuite (ch. 6);

Que par acte expédié le 25 septembre 2025 à la Cour de justice, le locataire, qui n’avait pas retiré le pli contenant le jugement dans le délai de garde venant à échéance le 17 septembre 2025, a formé “appel, subsidiairement recours”;

Que A______ a conclu, tant sur appel que sur recours, à l'annulation du jugement et, principalement, à l’irrecevabilité de la requête en évacuation et en paiement et, subsidiairement, à ce que la bailleresse soit autorisée à requérir son évacuation par la force publique douze mois après l’entrée en force de l’arrêt de la Cour;

Que, sur recours, le locataire a conclu préalablement à l’octroi de l’effet suspensif;

Que, dans ses déterminations du 1er octobre 2025, la bailleresse a conclu au rejet de cette requête et a requis l'exécution provisoire du jugement querellé;

Qu'elle a fait valoir que l'absence de caractère exécutoire du jugement querellé lui causait des conséquences financières particulièrement dommageables, compte tenu du montant de l’arriéré et de son évolution prévisible;

Qu'invité à se déterminer sur la demande d'exécution provisoire, A______ a conclu à son rejet;

Considérant, EN DROIT, que la voie de l'appel est ouverte contre le prononcé de l'évacuation, pour autant que la valeur litigieuse soit supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC);

Que selon la jurisprudence constante du Tribunal fédéral, les contestations portant sur l'usage d'une chose louée sont de nature pécuniaire (arrêts du Tribunal fédéral 4A_388/2016 du 15 mars 2017 consid. 1; 4A_479/2013 du 20 novembre 2013 consid. 1);

Que, si les conditions pour ordonner une expulsion selon la procédure sommaire en protection des cas clairs sont contestées, la valeur litigieuse équivaut au dommage présumé, si les conditions d'une expulsion selon l'art. 257 CPC ne sont pas remplies, correspondant à la valeur locative ou la valeur d'usage hypothétiquement perdue pendant la durée prévisible d'un procès en procédure ordinaire permettant d'obtenir une décision d'expulsion, laquelle a été estimée à six mois (ATF 144 III 346 consid. 1.2; arrêts du Tribunal fédéral 4A_565/2017 du 11 juillet 2018 consid. 1.2.1);

Que, lorsque la contestation porte sur la validité d'une résiliation de bail, ou que le locataire requiert la constatation de la nullité ou de l'inefficacité du congé, la valeur litigieuse est égale au loyer, provisions pour frais accessoires incluses, dû pour la période pendant laquelle le bail subsiste nécessairement si la résiliation n'est pas valable, c'est-à-dire jusqu'au jour où un nouveau congé pourra être donné. En pratique, il convient de prendre en considération le loyer et les frais accessoires pour la période de trois ans de l'art. 271a al. 1 let. e CO (ATF 137 III 389 consid. 1.1; 111 II 384 consid. 1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_87/2012 du 10 avril 2012 consid. 1.1);

Que l'appel suspend la force de chose jugée et le caractère exécutoire de la décision dans la mesure des conclusions prises en appel (art. 315 al. 1 CPC);

Que l’appelant met en cause tant le prononcé de l'évacuation que les mesures d'exécution ordonnées par le Tribunal;

Que la voie de l'appel est ouverte contre le prononcé de l'évacuation, la valeur litigieuse de 10'000 fr. étant atteinte, vu les conclusions pécuniaires de la bailleresse et le montant du loyer ;

Que l'appel suspend les effets de la décision entreprise;

Que seule la voie du recours est ouverte contre les mesures d'exécution (art. 309 let. a et 319 let. a CPC);

Que le recours ne suspend pas la force de chose jugée et le caractère exécutoire de la décision attaquée (art.325 al. 1 CPC), l'instance de recours pouvant en suspendre le caractère exécutoire (art. 325 al. 2 CPC);

Que l'appel et le recours seront traités dans la même décision (art. 125 CPC);

Que, dans la mesure où l'appel suspend les effets de la décision, cette suspension s'étend également aux mesures d'exécution;

Qu'ainsi, la requête de restitution de l'effet suspensif du locataire est sans objet;

Que, si la partie concernée risque de subir un préjudice difficilement réparable, l'instance d'appel peut autoriser l'exécution anticipée et ordonner au besoin des mesures conservatoires (art. 315 al. 4 let. a CPC);

Qu'en la matière, l'instance d'appel dispose d'un large pouvoir d'appréciation (ATF 137 III 475 consid. 4.1; arrêts du Tribunal fédéral 5A_403/2015 du 28 août 2015 consid. 5; 5A_419/2014 du 9 octobre 2014 consid. 7.1.2);

Que, selon les principes généraux, l'autorité procède à une pesée des intérêts en présence et doit se demander, en particulier, si la décision est de nature à provoquer une situation irréversible; qu'elle prend également en considération les chances de succès du recours (arrêts du Tribunal fédéral 4A_337/2014 du 14 juillet 2014 consid. 3.1; 4D_30/2010 du 25 mars 2010 consid. 2.3);  

Qu'en l’espèce, il ne se justifie pas d'autoriser l'exécution anticipée de la décision de première instance, d'une part, afin de ne pas vider l'appel de son objet, et, d'autre part, afin de ne pas porter indûment atteinte aux intérêts de l'appelant;

Qu'il convient également de tenir compte de la courte durée présumable de la présente procédure, jugée selon la procédure sommaire, ainsi que du montant de la garantie de loyer;

Qu'en conséquence, la requête de l'intimée sera rejetée.

* * * * *


 

 

PAR CES MOTIFS,
Le Président ad interim de la Chambre des baux et loyers :


Constate la suspension de la force de chose jugée et du caractère exécutoire du jugement rendu le 4 septembre 2025 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/21650/2024-6.

Dit que la requête d'effet suspensif est sans objet.

Rejette la requête de FONDATION DE PREVOYANCE B______ d'exécution anticipée dudit jugement.

Siégeant :

Monsieur Ivo BUETTI, président ad interim; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indications des voies de recours :

 

La présente décision, incidente et de nature provisionnelle (137 III 475 consid. 1) est susceptible d'un recours en matière civile, les griefs pouvant être invoqués étant toutefois limités (art. 98 LTF), respectivement d'un recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 à 119 et 90 ss LTF). Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.