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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/506/2022

ATAS/607/2023 du 15.08.2023 ( AI ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/506/2022 ATAS/607/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 15 août 2023

Chambre 2

 

En la cause

A______

représenté par Me Pierre-Bernard PETITAT, avocat

 

recourant

 

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Le 27 août 2012, un formulaire d'annonce de détection précoce en matière d'assurance-invalidité (ci-après: AI) concernant Monsieur A______ (ci-après: l'assuré, l'intéressé ou le recourant), célibataire, né en 1975 et ayant exercé la profession d'électricien (aide monteur) en mission temporaire pour une société de travail intérimaire, B______ (ci-après : l’employeur), depuis le 12 avril 2010 au taux de 100%, a été déposé par son assureur perte de gain Zurich Compagnie d'Assurances SA auprès de l’office de l'assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après: l’OAI, l'office ou l’intimé).

Etaient annexés plusieurs certificats de divers médecins attestant, pour différentes périodes, une capacité de travail nulle pour maladie depuis le 11 juin 2012. Le 22 juin 2012, la doctoresse C______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique, faisait état d'une gonalgie progressive au genou droit apparue début juin 2012, soit "une arthrite probablement micro cristaline inaugurale". Le 25 juillet 2012, la doctoresse D______, cardiologue FMH, diagnostiquait quant à elle une monoarthrite du genou droit.

Dans un rapport – antérieur – du 11 juillet 2012, la doctoresse E______, spécialiste FMH en médecine interne et rhumatologie, posait également le diagnostic de monoarthrite du genou droit. Une infiltration intra-articulaire de corticostéroïdes avait amené une nette diminution des douleurs. L’examen clinique montrait au niveau du genou droit la persistance d’un discret épanchement intra-articulaire, entraînant une petite limitation de la flexion; le bilan sanguin révélait la persistance d’un discret syndrome inflammatoire et une perturbation des tests hépatiques dans le contexte d’une hépatite C chronique et d’une hyperuricémie. L’assuré présentait depuis 2006 une infection VIH (virus d’immunodéficience humaine) et suivait une trithérapie; le diagnostic différentiel restait donc ouvert entre une arthrite VIH et une arthrite goutteuse, chez un patient ayant une importante consommation quotidienne de bière. L’anamnèse et l’examen clinique n’apportaient pas d’argument en faveur d’une spondylarthropathie débutante.

Une IRM du genou droit, réalisée le 3 août 2012 par la doctoresse F______, radiologue FMH, révélait une méniscopathie dégénérative de la corne postérieure du ménisque interne, une chondropathie rotulienne sur son versant paracentral externe ainsi qu’au niveau de sa facette interne, un très petit kyste poplité signe de rupture du kyste, un petit kyste de l’échancrure inter-condylienne, et une petite bursite en regard du tendon du biceps fémoral.

Le 28 septembre 2012, les médecins du service de dermatologie des Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après: HUG) diagnostiquaient un angiosarcome de Kaposi disséminé lié au VIH. Les comorbidités étaient une infection VIH connue depuis mars 2006, une hépatite C chronique et un alcoolisme chronique. L’assuré avait arrêté sa trithérapie depuis plus d’un an. Il avait consulté les dermatologues en raison de l’apparition brusque deux semaines auparavant d’une lésion du 3ème orteil du pied gauche, douloureuse, liée à l’angiosarcome de Kaposi. La reprise de la trithérapie était impérative.

b. Lors d'un entretien de l'office avec l'assuré le 29 octobre 2012, le questionnaire "Guide de l'entretien – Détection précoce" a été rempli, mentionnant notamment que l'intéressé avait deux enfants, dont un né en 2011. L'assuré venait de reprendre un traitement médical, et il se plaignait d'une fatigue importante. Il souhaitait poursuivre son activité dans le domaine de l’électricité, domaine qu'il appréciait beaucoup.

B.            a. Le 8 novembre 2012, l'assuré a en personne déposé auprès de l'OAI une demande de prestations AI (mesures professionnelles et/ou rente), en raison d'un problème au genou droit depuis juin 2012 consécutif au syndrome de Kaposi, de même qu’en raison d'un VIH et d’une hépatite C, son immunité étant réduite depuis 2010.

b. Dans le cadre de l'instruction de cette demande, l'office a reçu divers renseignements médicaux.

En particulier, dans un rapport du 14 décembre 2012, le docteur G______, spécialiste FMH en médecine générale et médecin généraliste traitant, a posé les diagnostics avec effet sur la capacité de travail d’infection VIH depuis 2006 et d’apparition d’un angiosarcome de Kaposi, ainsi que, sans incidence sur la capacité de travail, d’une monoarthrite du genou droit. Une tuméfaction du 3ème orteil gauche rendait le port de chaussures de sécurité impossible, et la marche était douloureuse. Le patient présentait également une asthénie. Le pronostic était mauvais. L’incapacité de travail était totale depuis le 25 juin 2012.

Le 19 décembre 2012, le docteur H______, médecin auprès du service des maladies infectieuses des HUG, a posé les diagnostics de syndrome de Kaposi, avec effet sur la capacité de travail, et d’infection VIH, sans incidence sur la capacité de travail. L’évolution était favorable sous antirétroviraux. L’assuré présentait des lésions douloureuses au niveau des membres inférieurs. Le pronostic était favorable en cas de reconstitution immunitaire. Il existait des limitations fonctionnelles des membres inférieurs. La reprise du travail dépendait de la réponse au traitement. Le syndrome de Kaposi entraînait une incapacité de travail, mais une activité adaptée était actuellement exigible à 50%. Les activités uniquement debout, exercées principalement en marchant, en se penchant, à genoux ou accroupi étaient exclues, de même que le port de charges et le travail sur des échelles ou des échafaudages. Il n'y avait en revanche pas de limitations concernant les capacités de concentration, de compréhension et d'adaptation ainsi que la résistance.

c. En date du 21 mai 2013, l'OAI a eu un entretien téléphonique avec l'assuré.

Dans son rapport ("de clôture IP en vue de DDP") établi le 1er juillet suivant, il a noté que, selon un entretien téléphonique du même jour, l'intéressé avait dû interrompre une chimiothérapie contre le syndrome de Kaposi après un mois, car jugée incompatible avec le traitement contre le VIH. L'assuré subissait régulièrement un traitement à l'azote de lésions sur le corps, extrêmement douloureux et invalidant durant quelques jours. Compte tenu de son état de fatigue, il ne pensait pas être en mesure d'exercer une activité lucrative, et des cours ne lui seraient pas forcément utiles puisqu'il espérait pouvoir mettre à profit l'expérience acquise dans le domaine de l'électricité. Il ne voulait pas entamer un processus de validation des acquis. Une fois le syndrome de Kaposi traité, il devrait soigner son hépatite C. Son foie était très atteint. Malgré ce problème, il ne parvenait pas à arrêter de boire, consommant six à sept litres de bière par jour. Au vu de sa dépendance à l'alcool, l’intéressé reconnaissait qu'un poste de surveillant des écoles, qu'il avait envisagé durant un temps, ne convenait pas. L'OAI a noté que les documents médicaux en sa possession ne permettaient pas d'admettre qu'un droit à des mesures d'ordre professionnel ou à une orientation professionnelle était ouvert.

Le 5 juillet 2013, l'OAI a communiqué à l'assuré que des mesures d'ordre professionnel (en particulier des mesures d'intervention précoce et d'éventuelles mesures de réadaptation professionnelle) n'étaient actuellement pas indiquées.

d. Dans un rapport du 5 juillet 2013 également, le Dr G______ a indiqué qu'il s'était entretenu avec le Dr H______ au sujet de l'assuré. Lors de cet entretien téléphonique, les deux médecins avaient convenu que la capacité de travail était nulle et qu’une activité plus adaptée n'était pour l'heure pas envisageable. Le patient présentait, à cause du syndrome de Kaposi, des lésions aux pieds et aux membres inférieurs qui l'empêchaient de se chausser d'une manière adéquate pour son travail, et suivait un traitement entraînant une fatigue extrême.

Dans un rapport établi le 9 septembre 2013, le Dr G______ - qui continuait à établir des certificats d'incapacité totale de travail - a qualifié l'état de l'assuré de stationnaire.

Dans un rapport du 12 septembre 2013, des médecins du service de dermatologie des HUG ont posé les diagnostics d'eczéma folliculaire du tronc et de "Kaposi SIDA cutané avec poussée lymphœdémateuse du membre inférieur droit", en rappelant en outre les comorbidités déjà signalées en septembre 2012. En juillet 2013, l'assuré avait bénéficié d'une excision fusiforme pour son angiosarcome de Kaposi au niveau du genou droit, de même que d'une injection au 3ème orteil du pied gauche également pour l'angiosarcome de Kaposi. Il présentait actuellement un œdème au niveau de la jambe homolatérale qui pouvait être réactionnel à ce geste chirurgical. Les médecins constataient des lésions érythémateuses périfolliculaires sur le dos et sur les bras avec xérose cutanée, et une jambe gauche plus œdématiée par rapport à la jambe droite, sans chaleur ni érythème.

Le 4 octobre 2013, le Dr G______ a confirmé les diagnostics d'infection VIH, de syndrome de Kaposi avec nombreuses lésions, et d'hépatite C chronique. L'assuré se plaignait d'asthénie, de douleurs du genou droit et d'œdème du membre inférieur droit après l'excision des lésions. Il marchait avec une canne. Ces troubles étaient objectivés. En mai 2013, les lésions de Kaposi " sortaient de partout ". L'état était stationnaire depuis septembre 2013. La capacité de travail était nulle. Aucune autre activité n'était exigible.

Le 6 janvier 2014, la doctoresse I______, spécialiste FMH en médecine interne générale et nouvelle médecin généraliste traitant de l'intéressé, a indiqué que le diagnostic avec effet sur la capacité de travail était celui d'angiosarcome de Kaposi disséminé lié à l'infection VIH, avec persistance d'une lésion handicapante au genou droit, justifiant le recours à deux cannes pour marcher. Le pronostic dépendait de la réponse et de la tolérance au traitement instauré.

Le 7 janvier 2014, la doctoresse J______, médecin au service de rhumatologie des HUG, a établi un rapport au sujet du genou droit auquel l'intéressé présentait actuellement des douleurs mécaniques. Son impression était celle d'une atteinte du ménisque interne.

Le 5 février 2014, un médecin des HUG a signalé une dégradation de l'état de santé de l'assuré, liée à l'aggravation d'une chondropathie du genou droit. Les douleurs apparaissaient après une demi-heure de marche. Sur le plan du VIH, l'assuré était stabilisé et le virus était indétectable depuis mai 2013. La capacité de travail était nulle en tant qu'électricien et complète dans une activité adaptée du secteur tertiaire, mais devait être examinée avec la rhumatologue, la Dresse J______. Un traitement de l'hépatite devait être mis en place en fonction des résultats des investigations en cours.

Cette rhumatologue a, le 16 juin 2014, rempli un questionnaire de l'AI, indiquant ne pas pouvoir répondre à la plupart des questions posées par l’OAI.

Dans un rapport du 15 mai 2014, la Dresse I______ a qualifié l'état de l'assuré de stationnaire depuis janvier 2014. Elle a fait état, en sus du syndrome de Kaposi, de l'infection VIH et de l'hépatite C, de limitations de la marche en raison des troubles du genou droit ainsi que d'une consommation d'alcool à risque. La capacité de travail restait nulle et la reprise du travail devrait être réévaluée. Le pronostic était médiocre malgré une compliance optimale.

e. Le 4 août 2014, l'Hospice général (ci-après: l'hospice) a informé l'office qu'il aidait financièrement l'intéressé par des avances, depuis le 1er juillet 2014.

f. Le 22 octobre 2014, la Dresse I______ a en substance confirmé la teneur de ses précédents rapports. Les gonalgies gauches (recte: droites) étaient imputables tant à la lésion méniscale qu'au statut post syndrome de Kaposi, ce à quoi s'ajoutaient une asthénie sur VIH en traitement et dans le contexte de l'hépatite C chronique non traitée, ainsi que des problèmes cutanés en traitement par photothérapie et une consommation à risque d'alcool.

Le 15 mars 2015, un médecin du service de chirurgie orthopédique et traumatologie des HUG a posé le diagnostic de méniscose interne du genou droit, avec effet sur la capacité de travail, sans toutefois préciser en quoi consistait cette effet.

Dans un rapport du 7 avril 2015, la Dresse I______ a indiqué que les douleurs du genou droit persistaient. Elles avaient une incidence sur la capacité de travail, à l'instar de l'asthénie. L'assuré souffrait également d'un prurigo chronique invalidant, dont la récente exacerbation avait aggravé son état de santé et qui faisait l'objet d'un traitement intensif au service de dermatologie des HUG. La capacité de travail restait nulle en raison des douleurs chroniques du genou droit et du contexte médico-social global chargé. Le pronostic de la reprise du travail était réservé. Le patient souhaitait une activité de type gardien ou surveillant à temps partiel, qui devait être réévaluée.

Le 9 juin 2015, l'assuré a consulté la doctoresse K______, médecin au service de rhumatologie des HUG. Cette dernière a conclu à un status évocateur d'une atteinte méniscale droite, pour laquelle elle prescrivait des séances de physiothérapie.

Le 23 septembre 2015, la Dresse I______ a adressé un rapport à l'OAI confirmant les diagnostics de douleurs du genou droit, d'asthénie en lien avec l'infection VIH et l'hépatite C chronique, ainsi que de consommation à risque d'alcool.

Selon des rapports établis par la Dresse I______ en date des 4 et 19 avril 2016, l'état de l'assuré était stationnaire. Des investigations étaient en cours pour le problème hépatique. Les limitations fonctionnelles observées étaient une fatigabilité, des troubles de la concentration, une limitation de la flexion du genou droit et des douleurs lors de la station debout prolongée. La capacité de travail était nulle en tant qu'électricien, et à évaluer dans une activité adaptée. Cette praticienne considérait qu'une reprise du travail était envisageable ultérieurement, d'abord à temps partiel, puis en fonction de l'évolution de l'état de santé.

Par "lettre de fin de traitement" du 22 août 2016 (faisant suite à une consultation du même jour), des médecins du service de rhumatologie des HUG ont rapporté que les diagnostics étaient ceux de chondropathie patellaire et de chondrocalcinose radiologique du ménisque interne du genou droit. Les symptômes restaient identiques : gonalgies droites mécaniques à prédominance vespérale, accentuées lors du port de charges et cédant au repos et à la glace. À l'examen clinique, on ne détectait pas de synovite des genoux, mais il existait une tuméfaction de la face interne du genou droit. Il y avait une calcification du ménisque interne droit. La présence de calcifications au sein du ménisque interne n'était pas diagnostique d'une pseudogoutte, qui n'expliquerait de toute façon pas les douleurs mécaniques, mais elle pouvait être un épiphénomène dans le cadre de problèmes dégénératifs. Le traitement de physiothérapie était reconduit.

Le 14 septembre 2016, la Dresse I______ a indiqué que l'état de l'assuré était stationnaire. La physiothérapie se poursuivait. La reprise du travail pourrait, ultérieurement, éventuellement se faire à 50% dans un autre métier – que celui d'électricien –, puis en fonction de la capacité d'adaptation de l'assuré. Un examen médical complémentaire était souhaitable afin d'évaluer un projet de réadaptation professionnelle.

g. Dans un avis du 1er février 2017, le service médical régional de l'AI (ci-après: SMR), a retenu les diagnostics suivants: du ressort de l'AI, l'angiosarcome de Kaposi (atteinte principale à la santé) et la "gonalgie droite avec méniscopathie dégénérative de la corne postérieure du ménisque interne"; non du ressort de l'AI, l'hépatite C chronique et la consommation d'alcool à risque. Les limitations fonctionnelles étaient les suivantes : pas de port de charges; pas de marche prolongée ou en terrain irrégulier; pas de position à genoux, ni accroupi; pas de position statique prolongée; impossibilité de porter des chaussures de sécurité; pas de montées répétées sur des escaliers, échelles et échafaudages; privilégier une activité sédentaire ou semi-sédentaire avec possibilité de changer de position à sa guise. Le début de l'aptitude à la réadaptation datait de décembre 2012. Selon le SMR, notamment, l'asthénie signalée par la médecin généraliste traitante de l'assuré n'était pas relevée par les infectiologues, qui avaient admis une capacité de travail de 50% dès décembre 2012. Le SMR pouvait suivre les conclusions de ces spécialistes, la Dresse I______ n'apportant pas d'éléments supplémentaires ou contradictoires. Selon toute vraisemblance, l'assuré avait une incapacité totale de travail dans toute activité dès le 11 juin 2012, une capacité de travail nulle dans l'activité habituelle au vu des limitations fonctionnelles susmentionnées, mais, dans une activité adaptée, une capacité de travail de 50% dès décembre 2012, puis complète dès mai 2013.

h. Le 13 février 2017, l’office a procédé au calcul du degré d’invalidité de l’assuré à partir de mai 2013. Pour le revenu avec invalidité, il s’est référé au revenu statistique tiré d’activités simples et répétitives pour un homme selon l’Enquête suisse sur la structure des salaires (ci-après: ESS; ESS 2012, TA1_tirage_skill_level, Ligne Total, niveau 1), soit CHF 5'210.- par mois. Adapté à la durée normale de travail de 41,7 heures et indexé à 2013, le revenu annuel était de CHF 65'654.- à 100% et de CHF 59'088.- en tenant compte d’un abattement de 10% en raison des limitations fonctionnelles. Le revenu sans invalidité était de CHF 57'907.- en 2011 et de 58'787.- après indexation. Au sujet du revenu sans invalidité, l’office a précisé qu’il correspondait au salaire brut de CHF 57'907.- en 2012 (CHF 30.16 par heure, montant multiplié par 40 heures hebdomadaires et 48 semaines), indexé à 2013 pour atteindre CHF 58'787.-. En résultait l'absence de degré d'invalidité.

i. Le même 13 février 2017, l’OAI a adressé un projet de décision à l’assuré refusant l’octroi d’une rente ou de mesures professionnelles, ces dernières n’étant pas de nature à améliorer sa capacité de gain. L’office a retenu une capacité de travail de 0% à compter du 11 juin 2012, mais, dans une activité adaptée, de 50% dès décembre 2012 et complète sans baisse de rendement depuis mai 2016. À partir de mai 2013, le degré d’invalidité était nul, conformément au calcul d’invalidité du même 13 février 2017, que le projet de décision reprenait.

j. Le 9 mars 2017, l'assuré, représenté par une association de défense des assurés, a contesté ce projet de décision, et, le 27 mars 2017, il a exposé que les limitations fonctionnelles qu'il subissait ne lui permettaient pas de reprendre une activité en décembre 2012. Au vu de la nature et de l'ampleur de ses atteintes, propres à causer des limitations importantes, le lien de causalité entre l'atteinte à la santé et l'incapacité de gain était établi. Compte tenu de son incapacité de travail totale, l'assuré sollicitait l'octroi d'une rente entière d'invalidité.

k. Par décision du 29 mars 2017, l'OAI a corrigé les termes de son projet, en précisant qu'une erreur de plume s'y était glissée et que la capacité de travail était entière dans une activité adaptée dès le mois de mai de l'année 2013, et non mai 2016, et qu'"une réduction supplémentaire de 10% en raison des limitations fonctionnelles" avait été prise en compte dans le calcul du revenu avec invalidité. Ainsi, l'intéressé avait une capacité de travail de 0% à compter du 11 juin 2012, mais, dans une activité adaptée, de 50% dès décembre 2012 et complète sans baisse de rendement depuis mai 2013. Pour le reste, l'office a repris les termes et conclusions de son projet de décision.

C.           a. Le 6 mai 2017, l’assuré, représenté par son conseil nouvellement constitué, a, auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après: la chambre des assurances sociales ou la chambre de céans), interjeté un recours – enregistré sous A/1634/2017 – contre cette décision de l’OAI, concluant à son annulation et à ce qu’il soit dit qu’il avait droit aux prestations de l’AI et à une rente entière de l’AI.

À l’appui du recours était notamment produit un courrier – rapport – établi le 29 mars 2017 par la Dresse I______. Cette médecin rappelait que les lésions du sarcome de Kaposi, localisées principalement au niveau du genou droit et du pied gauche, avaient été au départ la cause de l'arrêt maladie, que des injections localisées pour soigner ledit syndrome de Kaposi jusqu'à juillet 2013 et avec la reprise du traitement contre le VIH avaient été favorables par rapport à l'évolution des lésions du sarcome de Kaposi, mais que des douleurs du genou droit (avec arthrite) persistaient et avaient conduit à de nombreuses consultations spécialisées et aux diagnostics de lésion du ménisque interne et de chondrocalcinose. Malgré des traitements locaux et de la physiothérapie et compte tenu de l'empêchement de prendre "des traitements chroniques pour les douleurs, comme les anti-inflammatoires, en raison d'interactions avec le traitement antiviral, ni des antalgiques en raison d’une hépatopathie chronique", l'évolution n'avait pas été favorable, avec une persistance de douleurs chroniques en lien avec le genou droit (bien qu'actuellement mieux contrôlées grâce aux traitements locaux et à la physiothérapie), lors de la marche ou de la station debout prolongée, ce qui avait empêché la reprise de son activité d'aide monteur électricien du patient, qui était très gêné au quotidien par son problème de genou droit; il n'était pas exclu qu'une opération soit envisagée ultérieurement sur ce genou. Par ailleurs, l'assuré souffrait d’une asthénie (fatigue) chronique en lien avec son infection VIH et son traitement lourd, une quadrithérapie étant en cours avec des effets indésirables comme des diarrhées. L’hépatite C chronique contribuait à aggraver son état général. De plus, le recourant avait présenté un problème cutané (prurigo) avec d’importantes démangeaisons de type eczéma dès l’été 2012, qui avait motivé de nombreux traitements topiques et une prise en charge en dermatologie spécialisée avec un traitement par photothérapie. L'intéressé présentait aussi une consommation excessive d’alcool, en fin de semaine, qu'il tentait de diminuer avec une amélioration des tests hépatiques. L'état de santé général du patient était stationnaire depuis que son infection VIH était bien contrôlée et que le sarcome de Kaposi avait été traité, mais, en raison des douleurs chroniques au genou droit et des problèmes dermatologiques concomitants, il n'avait pas été en capacité de reprendre son activité professionnelle depuis l'été 2012. Sa capacité de travail était nulle depuis lors. En décembre 2012, le recourant était toujours en traitement pour son sarcome de Kaposi et avait subi une intervention au genou droit et une injection au pied gauche encore en juillet 2013, et, en raison du développement par la suite d'un lymphœdème du membre inférieur droit avec une péjoration de sa mobilité pendant quelques semaines avec une exacerbation de ses douleurs, il avait dû marcher avec des cannes jusqu’à début janvier 2014, mois jusqu'auquel sa capacité de travail avait toujours été nulle quelle que soit l’activité envisagée. L’activité de monteur électricien n’était plus envisageable, mais il pourrait bénéficier d’une reconversion professionnelle dans une activité adaptée à 50% maximum (surveillant ou gardien par exemple). En effet, en raison des différents problèmes de santé de l'assuré et des répercussions des traitements sur son état général, ainsi que de la problématique psycho-sociale, le rendement du recourant était limité dans toute activité; une activité adaptée n’aurait de toute façon pas été possible avant janvier 2016. En conclusion, l'état de santé du patient était bien altéré et sa capacité de travail nulle jusqu'à fin 2015, et il persistait actuellement, outre les douleurs au genoux, une fatigue chronique et des effets indésirables en lien avec le traitement antiviral (à prendre de façon permanente), associés à des problèmes psychosociaux, ce qui limitait le rendement de l'assuré à un maximum de 50% "quelle que soit l'activité envisagée adaptée à son état de santé et à ses limitations fonctionnelles".

b. Dans sa réponse du 1er juin 2017, l’OAI a conclu au rejet du recours. Selon l’office, même si on reprenait les documents médicaux des médecins traitants eux-mêmes, la capacité de travail de l'intéressé avait été nulle pendant moins d'une année en 2012-2013 (de décembre 2012 à juillet 2013), et elle était actuellement de 50% dans une activité adaptée.

c. Par réplique du 1er juillet 2017, le recourant a persisté dans ses conclusions, précisant notamment que, contrairement au contenu de la réponse de l'intimé, l’intervention subie 30 juillet 2013 n'avait pas été qu’une simple excision mais un véritable traitement chirurgical.

d. Dans sa duplique du 18 juillet 2017, l’intimé a exposé qu’il ne pouvait « que confirmer avoir estimé [la capacité de travail dans une activité adaptée] à 50% dès le mois de mai 2013 ».

e. Par arrêt du 5 décembre 2017 (ATAS/1096/2017), la chambre des assurances sociales a admis partiellement le recours, a annulé la décision rendue le 29 mars 2017 par l'intimé et lui a renvoyé la cause pour instruction complémentaire et nouvelle décision au sens des considérants.

Selon la chambre de céans, la position de l’office était pour le moins équivoque, puisqu’il avait affirmé dans les écritures versées dans le cadre de la procédure de recours que la capacité de travail dans une activité adaptée était de 50%, alors que le calcul d’invalidité consacré dans sa décision reposait sur une capacité de travail entière dans une activité adaptée.

Quoi qu'il en soit, il n’existait au dossier aucun rapport médical propre à étayer la position de l’intimé qui satisfasse pleinement aux exigences dégagées par la jurisprudence pour se voir reconnaître une pleine valeur probante. En effet, aucun de ces documents ne contenait tous les éléments formels nécessaires. En particulier, les estimations de la capacité de travail qu’ils contenaient n'étaient guère motivées.

Malgré les exigences formelles réduites en lien avec les rapports du SMR, l’avis de ce dernier du 1er février 2017 ne suffisait pas non plus à sceller le sort du litige. D’une part, le médecin du SMR faisait état d’une capacité entière dans une activité adaptée « selon toute vraisemblance ». Or, dans le domaine des assurances sociales, le juge fondait sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d'être établis de manière irréfutable, apparaissaient comme les plus vraisemblables, c'est-à-dire qui présentaient un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffisait donc pas qu'un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge devait, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissaient les plus probables. D’autre part, les conclusions du SMR admettant une pleine capacité de travail dans une activité adaptée dès mai 2013 se fondaient sur les indications du Dr H______ et sur le fait que la virémie n’était plus détectable à cette date. Le SMR écartait l’asthénie rapportée par le médecin traitant du recourant au motif qu’elle n’aurait pas été diagnostiquée par les infectiologues. Cependant, le Dr H______ s’était essentiellement prononcé sur l’atteinte VIH et n’avait donc pas tenu compte de l’état de santé du recourant dans sa globalité dans son rapport du 19 décembre 2012. Le fait qu’il n’y mentionnait pas l’asthénie ne suffisait donc pas à exclure ce diagnostic. Il semblerait d’ailleurs que le Dr H______ soit revenu sur son analyse de la capacité de travail lors de sa conversation téléphonique avec le Dr G______ en juillet 2013. Il apparaissait également que le recourant avait souffert de problèmes dermatologiques conséquents en 2013, dont l’incidence n’avait guère été analysée. On ignorait en outre quelles étaient les répercussions de l’hépatite C et de son traitement sur sa capacité de gain. Enfin, au vu des explications données par la Dresse I______ au sujet des interactions médicamenteuses rendant impossible l’administration d’un traitement antalgique, il n’était pas exclu que l’incidence des gonalgies soit plus importante que chez un assuré ne suivant pas d’autre traitement.

Au vu des doutes sérieux que laissaient subsister – par rapport en particulier audit avis du SMR – les rapports de la Dresse I______ au sujet de la capacité de travail et de gain du recourant, une expertise devait être mise en œuvre. Les conditions d’un renvoi étant en l’espèce réalisées dès lors que l'OAI n’avait pas instruit à satisfaction de droit la situation médicale du recourant, il appartiendrait à l’intimé de mettre en œuvre une expertise afin de déterminer les répercussions des diverses atteintes à la santé sur la capacité de travail et de gain du recourant depuis décembre 2012. Cet examen devrait être confié à un médecin généraliste, à charge pour lui de s’entourer d’avis de spécialistes s’il l’estimait nécessaire à l’exécution de sa mission.

D.           a. À la suite de cet arrêt de renvoi et d'une demande du SMR du 10 juin 2021, l'OAI a, le 15 juin 2021, confié l'établissement de l'expertise requise au docteur L______, médecin praticien FMH et expert médical de la SIM auprès de M______ à N______ (ci-après: le centre d'expertise), ce dont il a informé également l'assuré par communication du même jour.

Après la synthèse du dossier par Monsieur O______ du centre d'expertise en 7h30 et un examen clinique effectué par le Dr L______ le 2 août 2021 pendant un peu plus d'une heure, cet expert a rendu son rapport d'expertise le 30 août 2021, auquel étaient annexés des résultats d'analyses de prises de sang.

L'expert a posé les diagnostics incapacitants suivants : - varices des membres inférieurs sans ulcère ou inflammation (I83.9), dans la mesure où apparaissait à l'examen un œdème prenant le godet au membre inférieur droit jusqu'au genou avec status variqueux important mis en évidence en position déclive, mais pas de lésion cutanée en rapport; - autre chondrocalcinose, articulation du genou droit (M11.26); - lésion interne du genou droit, sans précision (M23.9), ces deux diagnostics reposant sur les éléments versés au dossier et l'examen mettant en exergue un genou droit tuméfié et chaud, sans signe du flot, avec des douleurs à la palpation du plateau tibial interne et du plateau fémoral externe et des problèmes de flexion douloureuse, l'expertisé montrant de surcroît une limitation fonctionnelle à la charge et un périmètre de marche diminué. Les diagnostics non incapacitants étaient : - hépatite C virale chronique (B18.2), désormais guérie à la suite d'un traitement éradicateur; - immunodéficience humaine virale (VIH; B21), à l'origine de tumeurs malignes; le patient était séropositif VIH avec une virémie actuellement indétectable, mais la maladie avait entraîné dans le passé des lésions cutanées malignes qui étaient toujours présentes malgré des traitements réguliers; - onychomycose (B35.1X-002), constatée sur l'ensemble des ongles des deux pieds; - sarcome de Kaposi de la peau (C46.0), l'examen montrant des lésions hyperkératosiques avec croûtes de sang sur le coude droit, le mollet droit, le creux poplité et le mollet et face antérieure du membre inférieur gauche, ainsi que de multiples cicatrices d'ablation de lésion de Kaposi dont une en regard du bord interne supérieur de la rotule droite; - carence en vitamine D, sans précision (E55.9); - obésité (E66), de stade 2; - hyperlipidémie, sans précision (E78.5), dont le taux était probablement induit par le traitement antirétroviral; - hyperuricémie (E79.0), sans signes d'arthrite ou de maladie tophacée, la consommation forte d'alcool le week-end précédant l'expertise pouvant en être la cause; - syndrome de dépendance alcoolique, utilisation épisodique (dipsomanie; F10.26), l'ancienne dépendance à l'alcool étant selon l'expertisé actuellement convertie en une consommation épisodique de fortes quantités (par exemple 30 bières, 2 bouteilles de vin blanc et plusieurs verres de whisky-coca le week-end précédant l'expertise); - apnée du sommeil (G47.3), un examen polygraphique du 16 octobre 2018 posant le diagnostic d'un syndrome des apnées du sommeil sévère, un appareillage par CPAP ayant été introduit et étant utilisé itérativement par l'intéressé; - séquelles d'écrasement de d'amputation traumatique du membre supérieur (T92.6), soit "status post amputation P3D5 [gauche]".

L'expertisé vivait "socialement seul dans son logement" et accueillait son fils âgé de 11 ans une semaine sur deux. "Aucune constatation psychique [n'était] relevée durant l'expertise; notamment l'expertisé [demeurait] euthymique, sans idées délirantes, sans trouble du cours de la pensée et sans hallucination".

Dans le cadre de l'évaluation de l'évolution à ce jour, et toujours d'après l'expert L______, « les deux diagnostics incapacitants relevés durant l'expertise [concernaient] le membre inférieur droit dont les séquelles des lésions [rendaient] actuellement encore son usage difficile au quotidien » (notamment pour les tâches ménagères et les achats); un avis angiologique et un nouvel avis orthopédique (le suivi orthopédique avait été abandonné) pourraient améliorer la situation de la jambe droite de l'expertisé. Une perte de poids permettrait une limitation de la charge du genou lésé ainsi qu'une probable amélioration du retour veineux abdominal et une diminution de l'œdème de la jambe droite; un avis et un suivi pourraient améliorer le profil lié à l'obésité. Une prise en charge de la dentition par un dentiste aiderait à la prise alimentaire et limiterait le risque infectieux séquellaire à une mauvaise hygiène dentaire. Un examen ophtalmologique était requis pour une adaptation de la correction visuelle, une baisse d'acuité visuelle étant rapportée par l'assuré durant l'expertise.

Il y avait une certaine incohérence dans le dossier, en ce sens qu'il n'y avait pas de réduction uniforme des activités dans tous les domaines de l'existence chez l'assuré qui pratiquait le vélo, assurait toutes les tâches des activités quotidiennes (notamment ménagères) sans l'aide d'une tierce personne, appréciait le sport et s'occupait seul une semaine sur deux de son fils âgé de 11 ans.

Des réponses étaient apportées à des questions concernant le "ménage / activité lucrative à temps partiel", dont il ressort que l’entretien du logement, les achats ainsi que la lessive et entretien des vêtements étaient rendus plus difficiles, en prenant plus de temps, par les troubles ostéo-articulaires de l’intéressé qui pouvait néanmoins assumer pleinement ces tâches.

La capacité de travail du recourant était nulle dans l'activité habituelle d'aide monteur électricien, dès le 11 juin 2012. Une activité adaptée consistait en une "activité adaptée principalement assis, pas d'activité accroupie ni agenouillée, pas de montée ni de descente répétée d'escalier, pas de travail en terrain accidenté, activité sollicitant principalement les membres supérieurs, pause d'environ 2-3 heures après la prise du traitement antirétroviral", avec un temps de présence maximal au travail de 6 heures par jour. La capacité de travail dans une telle activité adaptée avait été nulle à partir du 11 juin 2012, de 50% dès le 14 décembre 2012 puis de 75% depuis le 11 janvier 2013, ce taux de 75% incluant le temps de pause nécessaire après le traitement de sorte qu'il n'y avait pas de perte de rendement.

L'état de fatigue, rapporté anamnestiquement par l'expertisé mais non constaté – par l'expert –, tout en étant considéré comme plausible comme "trouble fonctionnel" ("sur le plan de la fatigue"), pouvait être amélioré, en vue d'une amélioration de la capacité de travail, sous différents angles : amélioration du contenu de l'alimentation, notamment par le sevrage alcoolique; utilisation plus régulière de la CPAP pour l'obtention d'un sommeil réparateur; perte de poids pour diminuer la fatigue mécanique ; "discussion avec l'infectiologue du déplacement du traitement antirétroviral le soir en raison de l'asthénie induite si possible", cette dernière mesure étant de nature à permettre le recouvrement d'une pleine capacité de travail avec rendement total.

b. Dans un rapport établi le 27 septembre 2021, le SMR a indiqué suivre les conclusions de l'expertise du Dr L______ sur le plan de la médecine interne qui était convaincante, mais non concernant "l'exigibilité de traitement proposé par l'expert dans la mesure où cela [n'était] pas garanti avec les autres comorbidités de l'assuré", le SMR répondant négativement à la question de savoir si, en cas d'octroi de prestations, un traitement spécialisé était raisonnablement exigible. L’atteinte principale, incapacitante, consistait en des varices des membres inférieurs, une chondrocalcinose et une atteinte méniscale du genou droit, de même qu’en une « fatigabilité liée au traitement antirétroviral, à une mauvaise utilisation du CPAP ». La capacité de travail du recourant était nulle dans l'activité habituelle d'aide monteur électricien, dès le 11 juin 2012. Les limitations fonctionnelles retenues par l'expert étaient reprises par le SMR : "activité principalement assise, pas d'activité accroupie ni agenouillée, pas de montée ni de descente répétée d'escaliers, pas de travail en terrain accidenté, activité sollicitant principalement les membres supérieurs, pause d'environ 2h-3h après la prise du traitement antirétroviral". Dans une activité adaptée auxdites limitations fonctionnelles, la capacité de travail avait été nulle à partir du 11 juin 2012, de 50% dès le 1er décembre 2012 puis de 100% depuis le 1er mai 2013.

c. Les 28 septembre et 11 novembre 2021, l'OAI a établi des documents "mandat de réadaptation", répondant négativement à la question de savoir si le cas devait être attribué à la réadaptation.

d. Par projet de décision du 16 novembre 2021, l'office, se fondant sur les conclusions du SMR, a envisagé de refuser l'octroi d'une rente d'invalidité et de mesures professionnelles.

Selon lui, le statut du recourant était celui d'une personne exerçant une activité indépendante à 100%. L'OAI a repris exactement le calcul du degré d’invalidité de l’assuré à partir de mai 2013 tel qu'effectué le 13 février 2017 et dans la décision du 29 mars 2017 (ci-après: le 1er calcul), notant en outre que le salaire qu'il retenait était supérieur à celui figurant dans l'extrait du compte individuel (ci-après: CI), et que l'assuré n'avait jamais réalisé un tel salaire. En définitive, selon le SMR, rien n'était changé depuis la précédente décision de l'intimé. Ce dernier a ensuite procédé à une – autre – comparaison des revenus, arrivant à la conclusion que l'invalidité de l'intéressé dans la sphère professionnelle se calculait ainsi : revenu sans invalidité de CHF 71'901.- et avec invalidité de CHF 60'320.-, d'où une perte de gain s'élevant à 16,11%, arrondi à 16% (ci-après: le 2ème calcul), inférieur au taux minimal de 40% requis par la loi pour l'octroi d'une rente. Des mesures professionnelles n'étaient pas indiquées, car elles ne seraient ni simples, ni adéquates, et ne respecteraient pas le principe d'équivalence, en plus du fait qu'elles n'entraîneraient que très difficilement une diminution du dommage et donc de la perte de gain, ce à quoi s'ajoutait le fait que, pour un reclassement professionnel, la condition d'une perte de gain de 20% n'était pas remplie.

e. Le 3 janvier 2022, l'assuré, représenté par l'association mentionnée plus haut, s'est opposé à ce projet de décision. Selon ses précisions, il n'avait jamais eu un statut d'indépendant, il avait une incapacité de travail totale, et le traitement médicamenteux actuel était le plus adapté à sa personne.

f. Par décision du 10 janvier 2022, l'OAI a intégralement persisté dans les termes et conclusions de son projet de décision du 16 novembre 2021.

E.            a. Par acte daté du 10 février 2022 et envoyé le lendemain 11 février au greffe de la chambre de céans, l'assuré, représenté par son avocat, a interjeté recours contre la décision de l'office du 10 janvier 2022, concluant, avec suite de frais et dépens, à son annulation et à ce qu’il soit dit qu’il avait droit aux prestations de l’AI et à une rente entière de l’AI.

b. Autorisé à compléter son recours, le recourant a, le 11 avril 2022, considéré qu'il était erroné qu'il soit considéré par l'intimé comme indépendant, et a formulé divers griefs contre les conclusions du SMR, de même que contre les appréciations et conclusions de l'expert L______, qui comportaient selon lui diverses imprécisions quant à l'aspect médical et ne tenaient pas compte de l'aspect psychiatrique rapporté par la Dresse I______ ni des limitations induites par les problèmes dermatologiques sous la forme des plaies de sarcome de Kaposi et pour lesquelles il était suivi aux HUG, ni non plus des limitations induites par les séquelles d'écrasement et d'amputation traumatique du membre supérieur gauche (bien que cette atteinte soit rapportée dans l'expertise). Il ne considérait pas comme réaliste la possibilité d'être engagé par un employeur, même "dans un marché économique normal et dans le cadre d'une activité simple et répétitive de type sédentaire", au vu de ses limitations fonctionnelles et l'absence de formation particulière. L'intéressé demandait en outre que soit portés à la connaissance de l'expert "la prescription de ritaline (recte: sertraline) et l'avis de l'infectiologue après réception afin d'en connaître leur effet sur la capacité de travail". Enfin, il alléguait dormir durant 3 à 4 heures après la consommation du traitement antirétroviral.

Par ailleurs, "concernant le taux d'invalidité, force [était] de conclure qu'en se fondant sur l'expertise du Dr L______, sans tenir compte de la prise de ritaline (recte: sertraline), de l'aspect psychiatrique et d'un abattement de 15% en raison de l'amputation traumatique du membre supérieur gauche, l'assuré [parvenait] à un taux d'invalidité de 37% ([71'910 – 45'240 / 71'910] x 100) dans une activité adaptée à 75%".

Dans un rapport du 6 avril 2022 – annexé –, la Dresse I______ notait voir l'assuré une fois tous les deux mois, principalement pour suivre l'évolution de son état général et faire la synthèse de ses différents problèmes pour lesquels il était suivi par plusieurs spécialistes aux HUG. Concernant les différentes affections dont l'intéressé souffrait, elle renvoyait à son courrier de mars 2017. Il n'y avait pas eu de modification significative de son état de santé. Cependant, le patient avait suivi un traitement antiviral pour l'hépatite C chronique à l'automne 2017, ce qui l'avait temporairement affaibli, mais il en avait finalement bénéficié puisqu'il avait guéri de cette affection, avec un contrôle normalisé en mars 2018. Courant 2020, il avait présenté un état anxio-dépressif pour lequel il avait été suivi par un médecin psychiatre des HUG qui lui avait prescrit de la sertraline dès août 2020, traitement que la médecin généraliste traitante lui avait encore prescrit jusqu'en mars 2021. Son état de santé était resté stationnaire depuis lors et la Dresse I______ n'avait pas prescrit au recourant d'autres traitements que ceux proposés par les spécialistes. Concernant la capacité de travail actuelle, la médecin généraliste traitante maintenait son évaluation de mars 2017, à savoir que l'assuré ne pouvait pas reprendre son ancienne activité professionnelle en raison des limitations fonctionnelles physiques en lien avec des douleurs chroniques du genou droit d'origine multifactorielle et précédemment exposées, et qui s'aggravaient dès que l'intéressé faisait des efforts. Selon elle, celui-ci pourrait bénéficier d'une reconversion professionnelle dans une activité adaptée à 50% (surveillant ou gardien par exemple). Concernant le VIH, outre la composante psychique et la surcharge mentale présentées par cette maladie (potentiellement mortelle sans traitement), le traitement comportait des effets indésirables, dont une fatigue chronique qui participait également à l'incapacité de travail; cela étant, le traitement antiviral était adéquat, car efficace et actuellement bien toléré cliniquement, la Dresse I______ n'étant néanmoins pas une spécialiste du traitement du VIH et laissant donc l'assuré demander l'avis du médecin en charge de son suivi actuel au sein des HUG.

Un certificat du 5 avril 2022 du docteur P______, médecin auprès du service des maladies infectieuses des HUG, attestait que l'assuré était suivi de manière régulière à la consultation de ce service depuis le 12 mai 2006, actuellement une fois tous les six mois, et était également suivi régulièrement par des médecins d'autres spécialités (dermatologie, nutrition).

Persistant dans son recours, le recourant demandait à la chambre des assurances sociales de retenir un abattement de 15% sur le taux d'invalidité après prise en compte de l'ensemble de l'état de santé, d'auditionner la Dresse I______ et/ou d'ordonner un complément d'instruction auprès du Dr L______ au vu de ce qui précédait.

c. Dans sa réponse du 11 mai 2022, l'intimé a conclu au rejet du recours.

À teneur d'un avis du 9 mai 2022 du SMR annexé, les nouveaux rapports médicaux produits le 11 avril 2022 n'amenaient pas de nouvel élément médical objectif. L'assuré présentait une fatigabilité connue en raison du traitement antiviral, pouvant expliquer une baisse de rendement d'au maximum 25%, selon l'expert de médecine interne, qui, pour se prononcer, s'était basé entre autres sur les activités quotidiennes que l'assuré avait décrites.

d. Dans sa réplique du 10 juin 2022, le recourant a persisté dans les conclusions de son recours. D'après lui, il y avait une confusion de la part de l'intimé au sujet de son activité actuelle et de sa baisse de rendement. C'était à tort que celui-ci ne retenait pas une diminution de rendement, alors que l'intéressé ne pouvait pas changer de traitement et que sa journée était interrompue longuement par une pause compensatoire, actuellement d'une durée de 2 à 3 heures de sieste en début d'après-midi. C'était également de manière erronée que l'office refusait des mesures professionnelles.

Était produit un courriel du 2 juin 2022 du Dr P______, indiquant être absent et ne pouvoir prendre connaissance des courriels et leur répondre qu'à son retour dès le 20 juin 2022.

e. Par lettres du 30 janvier 2023, la chambre de céans a posé des questions – différentes – à chacune des parties

f. Le 15 février 2023, concernant les varices aux membres inférieurs, elle a reçu, directement de la part des HUG, les rapports de son service d'angiologie et d'hémostase suivants.

Un rapport faisant suite à un "examen veineux des membres inférieurs – varices" du 20 octobre 2021 émettait divers constations, conclusions et propositions, avec notamment, sous "ATCD/comorbidités", la mention du "sarcome de Kaposi diagnostiqué en 2012, actuellement stable, paucisymptomatique". La conclusion consistait en ceci : "IVC de stade C2 sur incontinence ostio-tronculaire de la GVS droite, sur tout le membre inférieur droit avec tribulaire incontinente au niveau du genou donnant un réseau de varices apparentes et symptomatiques au niveau du genou ».

Après des rapports de consultation des 30 juin et 4 juillet 2022, un rapport du 14 juillet 2022 faisait suite à une consultation du 5 juillet 2022 et parvenait à la conclusion suivante: "- Au contrôle à J6 (NDR: 6ème jour) d'un traitement endoveineux du [membre inférieur droit] pour une insuffisance veineuse chronique de stade 2 traitée par laser endoveineux de la GVS droite et phlébectomie étagée en cuisse distale et en face antérieure du genou, bon résultat clinique et échographique, sans complication. – Douleur du pli de l'aine secondaire à une dilatation de la GVS proximale avec échoendoluminale, de 5 mm de DAP".

g. Le 14 mars 2023, l'intimé a répondu aux questions que lui avait posées le 30 janvier 2023 la chambre des assurances sociales. Il a confirmé le nombre de 48 semaines pris en compte pour le revenu sans invalidité dans le calcul du 13 février 2017 – et donc le 1er calcul –, et il a indiqué que le 2ème calcul, inscrit par erreur dans la décision querellée, devait être écarté car sans fondement.

h. Le 3 avril 2023, le recourant a indiqué ne pas pouvoir répondre aux questions que lui avait posées le 30 janvier 2023 la chambre de céans. En effet, la Dresse I______ n'estimait pas utile de répondre à ces questions et renvoyait à son rapport du 6 avril 2022 qui n'évoquait pas l'amputation du membre supérieur gauche, de sorte que, sans renseignements médicaux, il n'était pas possible de répondre aux questions posées. L'assuré demandait de "renvoyer à une expertise médicale afin de déterminer quelle [était] la capacité de travail liée à cette amputation".

i. Par écriture du 17 mai 2023, l’assuré a néanmoins répondu à des questions de la chambre des assurances sociales du 27 avril 2023 et a produit plusieurs rapports médicaux. S’agissant des démarches proposées par l’expert L______, il faisait attention à son poids et consultait une médecin diététicienne, et il avait arrêté sa consommation d’alcool. Il ne faisait pas l’objet d’un traitement des varices aux membres inférieurs, mais il avait subi une intervention pour enlever la veine centrale de la jambe droite. L’absence de description par l’expert L______ des limitations fonctionnelles concernant les séquelles d’écrasement et d’amputation du membre supérieur gauche, l’absence de prise en compte de l’aspect psychiatrique et l’absence de prise en considération des limitations induites par les problèmes dermatologiques sous la forme de plaies de sarcome de Kaposi nécessitaient un complément d’expertise par le Dr L______.

Selon un rapport du département de psychiatrie (service de psychiatrie de liaison et d’intervention de crise) des HUG faisant suite à une consultation du 20 novembre 2009, l’intéressé avait une thymie légèrement triste ainsi qu’une diminution d’intérêt et de plaisir. Le diagnostic était une dépendance à l’alcool (F10.25 de la CIM-10).

À teneur du même département de psychiatrie (même service) des HUG qui se référait à des consultations des 22 août, 4 septembre et 3 octobre 2017 et ne posait formellement pas de diagnostics, le recourant avait trois enfants, à savoir deux garçons de 27 et 16 ans et un petit garçon de 18 mois, ce dernier habitant en Finlande avec sa mère retournée dans son pays. Le premier entretien susmentionné ne révélait aucun trouble du cours ni du contenu de la pensée, ni aucun élément délirant. En revanche, sur le plan de la personnalité, il existait probablement un trouble de personnalité limite, le patient ayant de grandes difficultés à maintenir des relations affectives stables, vivant assez mal les ruptures sentimentales et ayant recours à des substances psychoactives telles que l’alcool afin de réguler son anxiété. L’intéressé présentait un tableau psychosocial assez complexe, avec des difficultés d’existence quotidiennes liées au fait qu’il habitait dans un hôtel, au fait qu’il avait plusieurs enfants de plusieurs unions, enfants qu’il ne voyait quasiment plus, au fait qu’il était dans une situation financière et professionnelle précaire, étant assisté par l’hospice, au fait qu’il était « porteur du VIH et du VHC » ainsi qu’au fait qu’il présentait des éléments de fragilité de personnalité ; ce tableau psychosocial aboutissait assez logiquement à une réaction thymique fluctuante, sans idées suicidaires actives, mais susceptible de perturber le patient. Le traitement de Fluoxétine 20 mg, 1 comprimé par jour, mis en place le 22 août 2017 en raison de la présence de cette thymie triste associée à des troubles du sommeil, n’avait été pris que très peu de temps du fait de la fatigue liée à plusieurs traitements (le traitement contre le VHC ayant commencé). Au 3 octobre 2017, l’évolution était jugée favorable.

Un rapport dudit département de psychiatrie (même service) des HUG consistait en le suivi selon plusieurs consultations, les 5, 12, 17 et 24 août ainsi que 1er septembre 2020, sans poser des diagnostics précis. Étaient relevé le retour de son troisième enfant et une autorité parentale conjointe le concernant, ainsi que le fait qu’il habitait dans un appartement contigu avec un de ses fils. En début août 2020 étaient rapportées par l’assuré des attaques de paniques, mais au 17 août 2020, il n’y en avait pas de nouvelles, mais une persistance de l’insomnie, avec 2 heures de sommeil par nuit et une sieste de 2 à 3 heures l’après-midi, ainsi que de nombreuses préoccupations ; en outre, à cette même date était prescrit l’antidépresseur sertraline 25 mg. Au 1er septembre 2020, il était considéré que le patient, asthénique et prenant de l’Anxiolit 5 mg deux fois lors de crises d’angoisse, présentait les critères pour un épisode dépressif léger avec détresse anxieuse. Une comorbidité de dépendance à l’alcool restait présente, malgré une diminution des consommations ces dernières années ; il n’y avait pas suffisamment de critères pour une dipsomanie.

Un rapport d’évaluation psychologique établi par une psychologue le 5 octobre 2021 à la suite d’une consultation du même jour résumait la situation familiale et économique du recourant, mentionnant qu’il vivait depuis une année dans un appart-hôtel, avec son fils qui y logeait une semaine sur deux, et qui avait des actes de défaut de biens. Le patient expliquait être déstabilisé au plan psychique et très angoissé en raison de l’obligation de trouver rapidement un nouveau logement, et se plaignait d’« une importante thymie triste », avec la présence d’idées suicidaires scénarisées.

Était en outre produit par le recourant un compte-rendu opératoire du 2 avril 1996 de la « subamputation traumatique de P3 D5 gauche ».

Un rapport de consultation pluridisciplinaire de lipodystrophie et métabolisme du 19 mai 2022 résumait les différents suivis de l’intéressé au sein des HUG.

Dans un rapport du 12 mai 2023, le Dr P______ répondait à des questions, entre autres celles de la chambre de céans du 30 janvier 2023. Les plaies liées au syndrome de Kaposi étaient « responsables d’une sensation de brûlure et de prurigo avec un effet uniquement temporaire des séances de photothérapie et des emballements par dermocorticoïdes proposés par les dermatologues ». Depuis le début du traitement contre le VIH par le service d’infectiologie des HUG en 2006, il y avait eu plusieurs lignes de traitements antirétroviraux dont certains avaient été responsables d’effets de type état dépressif sévère avec idées suicidaires sous traitement de Triumeq ; ce traitement avait été rapidement arrêté et remplacé par un traitement de Genvoya à partir de 2017 ; sous ce dernier traitement, le patient décrivait une fatigue importante avec des vertiges après prise de comprimés, symptômes pouvant avoir un impact sur la capacité de travail.

Par certificat du 9 mai 2023, la Dresse I______ attestait un arrêt de travail à 100% pour maladie du 1er mai au 30 juin 2023.

j. Le 23 mai 2023 s’est tenue une audience de comparution personnelle des parties devant la chambre des assurances sociales.

Concernant les atteintes à la santé qu’il considérait comme problématiques, le recourant a déclaré avoir combattu durant les 10 dernières années contre le VIH ; entre-temps, il avait « attrapé » un Kaposi assez sévère ; il avait dû faire enlever des parties du Kaposi (cloques) sur la main, sur le pied, sur le genou ; ce problème de Kaposi n'était pas encore réglé à ce jour, car il y avait encore des zones infectées ; il suivait pour ceci un traitement laser, où des zones étaient brûlées. Ce problème de Kaposi était très gênant, car il attaquait la peau sur toutes les parties des jambes et cela le gênerait pour un emploi : il lui était pénible de mettre des chaussures car il n’avait plus d'ongles mais des mycoses qui étaient brûlées au laser ; ce serait très gênant pour un travail car cela occasionnait des douleurs et des brûlures. En plus de cette atteinte, il devait encore traiter une chondrocalcinose du genou droit qui faisait gonfler ce dernier lorsqu’il était trop longtemps debout ; il n’avait pas été opéré pour cette atteinte, parce qu’il était en surpoids (106 kg, contre 114 kg au début du traitement avec une diététicienne aux HUG un an auparavant) et qu’il devait perdre du poids pour cela (moins de 100 kg), ce qu’il était en train de faire. L’assuré ne voyait pas d'autres atteintes particulières invalidantes à mentionner.

S'agissant de la question de l'amputation, à la suite d’un accident de vélo en 1996, la première phalange du petit doigt (auriculaire) avait été amputée, comme montré par le recourant. Cette amputation avait un effet très douloureux en cas de changement de temps (lorsqu'il faisait froid ou chaud) ou lorsqu’il se cognait (car il n'y avait rien au bout de cet auriculaire), et elle gênait l’intéressé, droitier, pour porter des charges avec sa main gauche (parce qu’il ne pouvait rien porter sur la partie de la main qui est à la hauteur de l'auriculaire).

Au niveau psychique, l’assuré était suivi, par des infirmières, « aux HUG aux unités infectieuses », car ce service englobait toutes les problématiques y compris la psychiatrie et la dermatologie. Il prenait parfois des anxiolytiques, par exemple Temesta, prescrit par les HUG, dès qu’il avait des montées de stress.

Contre le VIH, le recourant prenait le médicament Genvoya qui le fatiguait énormément. Il prenait ce médicament au moment des repas, ce qui était nécessaire pour qu'il ait un effet, en l’occurrence au repas de midi, pas le soir, car il ne mangeait pas le soir étant donné que, comme il vivait seul, il n’avait pas besoin de manger le soir, ce qui était bien aussi pour son régime, et qu’il n’avait pas faim le soir. À la question de la chambre de céans de savoir si quelque chose l'empêcherait de prendre le Genvoya le soir plutôt que le midi, l’intéressé a répondu que, pour cela, il devrait manger le soir et que, comme il ne mangeait pas le soir, cela n'était pas possible. L'effet de fatigue dû au Genvoya commençait 1h30 après sa prise et durait pendant 3 heures durant lesquelles il dormait ; après ce sommeil, l'effet de fatigue était passé. S’il devait travailler, il n'aurait pas besoin de nombreuses pauses, mais d'une seule pause de 3 heures pour dormir.

Le recourant, après avoir notamment déclaré ne pas se reconnaître dans l’expertise du Dr L______, a indiqué ne pas avoir de limitations fonctionnelles à ajouter à celles retenues par cet expert. Au sujet de sa vie quotidienne, il n’avait pas de grief particulier à formuler contre le rapport d'expertise. Il voyait toujours son fils à raison d'une semaine sur deux depuis 2019, date du retour de sa mère depuis la Finlande ; il lui faisait le repas le soir, mais lui-même ne mangeait pas à ce moment-là car il n’avait pas faim, « [c'était son] rythme ainsi ».

Des médecins avaient diagnostiqué une apnée du sommeil sévère et lui avaient ainsi donné une CPAP en 2019 pour dormir, car il était réveillé toutes les 2 heures. Depuis 2019, il mettait cet appareil tous les soirs toute la nuit ; mais même avec lui, il faisait trop d'apnée, de sorte que les médecins étaient en train de régler cet appareil maintenant. Depuis 2019, il n’avait plus eu de contrôle auprès d'eux car ils ne prenaient plus de rendez-vous à cause du Covid-19 ; il avait repris des rendez-vous depuis trois ou quatre mois, et c'était maintenant que les spécialistes stabilisaient l'appareil, en augmentant sa puissance. C'était compliqué de dormir avec un masque. S'agissant du reproche de l'expert du manque d'utilisation du CPAP, l’intéressé a répondu que pendant plusieurs années, c’est-à-dire depuis 2015 jusqu'à actuellement, date à laquelle il venait d'avoir un appartement, il avait été SDF en ce sens qu’il n’avait pas de logement et qu’il dormait à l'hôtel ; il n’avait ainsi pas d'endroit pour mettre la CPAP ; dans sa chambre d'hôtel, il n'y avait qu'une seule prise électrique qui était loin de sa tête lorsqu’il dormait ; certes, il aurait pu mettre une rallonge, mais il ne savait pas pourquoi il ne l’avait pas fait.

La fatigue de l’intéressé était selon lui due à l'ensemble de ses problèmes, pas seulement au médicament Genvoya : il y avait l'hépatite C, le syndrome de Kaposi, et il avait « eu le zona aussi ». L'hépatite C (traitée trois mois en 2018, sauf erreur) était guérie, mais il devait contrôler sa consommation d'alcool car elle attaquait le foie ; « l'arrêt de la consommation d'alcool [était] la partie la plus compliquée car [il était] "addict" ».

Selon le recourant, le problème des varices des membres inférieurs n'était toujours pas résolu. Il devait suivre un ordre médical : traitement de la chondrocalcinose, puis perte de poids, puis traitement des varices (qui étaient liées au surpoids). Les HUG lui avaient enlevé la veine centrale de la jambe droite en 2023. Ces varices le gênaient en ce sens qu'elles faisaient gonfler ses jambes lorsqu’il marchait et quand il était debout ; le reste du temps, cela allait.

D’après l’assuré, il n'y avait ni aggravation, ni amélioration de son état de santé et de sa capacité de travail depuis l'établissement de l'expertise du Dr L______, et aussi depuis 2012.

Sur question de la chambre de céans, l’assuré a répondu ne pas avoir essayé de travailler à temps partiel depuis 2012, parce que le syndrome de Kaposi l'obligeait à être tous les deux jours à l'hôpital car il avait des plaques d'eczéma partout sur le corps. Les médecins avaient essayé plusieurs traitements : brûlure à froid, enveloppes, cabine UV, et désormais, depuis janvier 2022, brûlures laser ; le traitement UV était de douze séances aux HUG, et il en avait fait deux fois douze séances en 2020 ; le traitement par enveloppes avait aussi consisté en douze séances durant la même période ; les brûlures au froid avaient également été reçues durant la même période en 2019 et 2020, après quoi les médecins l’avaient traité avec les cabines ; ainsi, depuis 2019 et jusqu'à fin 2021, le recourant avait été tous les deux jours, parfois le matin, parfois l'après-midi, aux HUG pour un traitement ; les brûlures à froid duraient 15-20 minutes, pour une fois douze séances, les séances avec enveloppes duraient 40 minutes (pas plus à cause de la cortisone qui était posée dans les enveloppes) ; les cabines UV duraient 2 minutes par séances. Ces séances aux HUG l'auraient gêné pour un emploi. Depuis janvier 2022, avec les brûlures laser, l’intéressé suivait une séance par mois. De manière générale, c’étaient ses problèmes médicaux qui l'empêchaient de reprendre une activité même à temps partiel.

Durant cette audience de comparution personnelle, l’avocat du recourant et la représentante de l’OAI ont également précisé certains points, le premier confirmant notamment que des mesures professionnelles n’avaient pas été demandées, faute d’utilité.

À l’issue de cette audience, la cause a, avec l'accord des parties, été gardée à juger sur mesures d'instruction ou au fond, étant précisé que, par son conseil, l’assuré a indiqué ne pas solliciter de mesures d'instruction complémentaires.

k. Par courrier du 26 mai 2023, le Dr P______ a répondu à des questions écrites posées le 25 mai précédent par la chambre des assurances sociales. Selon ce médecin, le traitement de Genvoya avait une seule posologie disponible. Dans les troubles généraux fréquemment associés à ce traitement figuraient la fatigue, de même que des nausées. Parmi les effets indésirables nombreux mentionnés par la firme productrice de ce médicament dans le Compendium, le patient se plaignait surtout d’une fatigue importante ainsi que de vertiges après la prise des comprimés. Quelle que soit l’heure où ledit traitement était pris, et que ce soit sous le seul angle du Genvoya ou au regard de l’ensemble des affections médicales du patient, il était difficile au Dr P______, qui n’avait pas été en charge du suivi de l’assuré avant le prononcé de la décision querellée le 10 janvier 2022, de se prononcer sur les conséquences de ces effets secondaires sur la capacité de travail, le rendement et les limitations fonctionnelles de l’intéressé, même si la fatigue et les vertiges pouvaient être responsables d’une diminution de la capacité de travail. Ledit médecin ne pouvait pas non plus se prononcer sur le caractère normal ou non de la nécessité indiquée par le recourant de faire une sieste de 3 heures (plutôt que par exemple 2 heures) environ 1h30 après la prise du Genvoya, les effets secondaires et les réactions à ce traitement variant d’un individu à l’autre. Concernant la question de savoir si ce traitement pourrait être pris le soir, la prise de ce médicament était « recommandée avec un repas sans distinction sur le moment de la journée » ; il était noté à ce sujet que, selon le fabriquant dans le Compendium, ce traitement pouvait être associé à des troubles du sommeil, notamment des rêves anormaux qui pourraient donc être plus marqués en cas de prise en soirée ; ainsi, si la fatigue pendant la journée pourrait potentiellement être diminuée, les rêves anormaux pourraient, également potentiellement, avoir un effet sur la récupération et le sommeil durant la nuit. À la question de savoir si le recourant pouvait prendre le Genvoya le soir même s'il ne mangeait alors rien ou s’il devait alors, pour que ce traitement soit efficace, manger un minimum de nourriture et, si oui, quel minimum (un yoghourt, une fruit ou légume, une tartine de pain, etc. par exemple) était suffisant, il était répondu ce qui suit : indépendamment de l’heure de prise, il existait « des différences significatives en termes d’absorption notamment de l’elvitegravir, un des composants central du Genvoya en termes de concentration maximale et donc d’absorption » lorsque ce médicament était pris avec un repas léger ou lorsqu’il était pris avec un repas riche en lipides ; ces valeurs étaient toutefois variables d’un individu à l’autre, et il était difficile de prédire précisément le degré d’absorption pour l’intéressé et les conséquences d’un point de vue virologique ; « cependant, toute diminution de l’absorption de ce traitement avec une barrière génétique limitée pourrait potentiellement être responsable d’un sous-dosage avec un risque d’échec virologique suite au développement de résistances ».

l. Les parties ne se sont pas manifestées à la suite de la lettre du 1er juin 2023 de la chambre de céans selon laquelle, sans leur éventuelles nouvelles d’ici au 16 juin 2023, la cause serait gardée à juger sur mesures d’instruction ou au fond.

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             À teneur de l'art. 1 al. 1 LAI, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'AI, à moins que la loi n'y déroge expressément.

La modification du 21 juin 2019 de la LPGA est entrée en vigueur le 1er janvier 2021. Elle est ainsi applicable, dès lors que le recours a été interjeté postérieurement à cette date (art. 82a LPGA a contrario).

3.             Interjeté dans la forme et le délai - de trente jours - prévus par la loi, le recours est recevable (art. 56 ss LPGA ainsi que 62 ss de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA-GE - E 5 10]).

4.             L'objet du litige porte sur la question du droit ou non du recourant à des prestations de l'AI, plus précisément une rente d’invalidité uniquement, dans la mesure où il a indiqué, en particulier en audience par la voix de son conseil, ne pas solliciter des mesures professionnelles.

De jurisprudence constante, le juge apprécie en règle générale la légalité des décisions entreprises d'après l'état de fait existant au moment où la décision litigieuse a été rendue (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 ; 132 V 215 consid. 3.1.1). Les faits survenus postérieurement, et qui ont modifié cette situation, doivent en principe faire l'objet d'une nouvelle décision administrative (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 ; 130 V 130 consid. 2.1). Même s'il a été rendu postérieurement à la date déterminante, un rapport médical doit cependant être pris en considération, dans la mesure où il a trait à la situation antérieure à cette date (cf. ATF 99 V 98 consid. 4 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_259/2018 du 25 juillet 2018 consid. 4.2).

5.             Le 1er janvier 2022, sont entrées en vigueur les modifications de la LAI du 19 juin 2020 (développement continu de l'AI ; RO 2021 705) ainsi que celles du 3 novembre 2021 du règlement sur l'assurance-invalidité du 17 janvier 1961 (RAI - RS 831.201; RO 2021 706).

En cas de changement de règles de droit, la législation applicable est celle qui était en vigueur lors de la réalisation de l'état de fait qui doit être apprécié juridiquement ou qui a des conséquences juridiques, sous réserve de dispositions particulières de droit transitoire (ATF 136 V 24 consid. 4.3 et la référence).

En l'occurrence, la décision querellée concerne un premier octroi de rente dont le droit serait né avant le 1er janvier 2022, de sorte que les dispositions légales applicables seront citées dans leur ancienne teneur.

6.              

6.1 Est réputée invalidité, l'incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident (art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI). Selon l'art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à sa santé physique, mentale ou psychique et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al. 1, tel qu'en vigueur dès le 1er janvier 2021, la version antérieure indiquant "dans son domaine d'activité" plutôt que "qui entre en considération"). Seules les conséquences de l'atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d'une incapacité de gain. De plus, il n'y a incapacité de gain que si celle-ci n'est pas objectivement surmontable (al. 2, en vigueur dès le 1er janvier 2008).

Aux termes de l'art. 6 LPGA, est réputée incapacité de travail toute perte, totale ou partielle, de l'aptitude de l'assuré à accomplir dans sa profession ou son domaine d'activité le travail qui peut raisonnablement être exigé de lui, si cette perte résulte d'une atteinte à sa santé physique, mentale ou psychique. En cas d'incapacité de travail de longue durée, l'activité qui peut être exigée de lui peut aussi relever d'une autre profession ou d'un autre domaine d'activité.

Conformément à l'art. 4 LAI, l'invalidité (art. 8 LPGA) peut résulter d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident (al. 1). L'invalidité est réputée survenue dès qu'elle est, par sa nature et sa gravité, propre à ouvrir droit aux prestations entrant en considération (al. 2).

6.2 Il y a lieu de préciser que selon la jurisprudence, la notion d'invalidité, au sens du droit des assurances sociales, est une notion économique et non médicale; ce sont les conséquences économiques objectives de l'incapacité fonctionnelle qu'il importe d'évaluer (ATF 110 V 273 consid. 4a). L'atteinte à la santé n'est donc pas à elle seule déterminante et ne sera prise en considération que dans la mesure où elle entraîne une incapacité de travail ayant des effets sur la capacité de gain de l'assuré (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 654/00 du 9 avril 2001 consid. 1).

6.3 En vertu de l'art. 28 al. 1 LAI, l'assuré a droit à une rente aux conditions suivantes: sa capacité de gain ou sa capacité d'accomplir ses travaux habituels ne peut pas être rétablie, maintenue ou améliorée par des mesures de réadaptation raisonnablement exigibles (let. a); il a présenté une incapacité de travail (art. 6 LPGA) d'au moins 40% en moyenne durant une année sans interruption notable (let. b); au terme de cette année, il est invalide (art. 8 LPGA) à 40% au moins (let. c).

Selon l'art. 28 al. 2 LAI, l'assuré a droit à une rente entière s'il est invalide à 70% au moins, à un trois quarts de rente s'il est invalide à 60% au moins, à une demi-rente s'il est invalide à 50% au moins, ou à un quart de rente s'il est invalide à 40% au moins.

Aux termes de l'art. 29 al. 1 LAI, le droit à la rente prend naissance au plus tôt à l'échéance d'une période de six mois à compter de la date à laquelle l'assuré a fait valoir son droit aux prestations conformément à l'art. 29 al. 1 LPGA, mais pas avant le mois qui suit le 18ème anniversaire de l'assuré.

Il s’ensuit que, dans le cas présent, le droit à une rente d’invalidité de l’intéressé ne pourrait pas être ouvert avant le 1er juin 2013, soit une année après le début de son incapacité de travail alléguée et six mois après le dépôt de sa demande de prestations AI.

6.4 Pour pouvoir calculer le degré d'invalidité, l'administration (ou le juge, s'il y a eu un recours) a besoin de documents que le médecin, éventuellement aussi d'autres spécialistes, doivent lui fournir (ATF 122 V 157 consid. 1b). Pour apprécier le droit aux prestations d'assurances sociales, il y a lieu de se baser sur des éléments médicaux fiables (ATF 134 V 231 consid 5.1). La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l'état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l'assuré est incapable de travailler (cf. arrêt du Tribunal fédéral 8C_286/2020 du 6 août 2020 consid. 4 et la référence).

6.4.1 Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. A cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1; ATF 133 V 450 consid. 11.1.3; ATF 125 V 351 consid. 3). Il faut en outre que le médecin dispose de la formation spécialisée nécessaire et de compétences professionnelles dans le domaine d'investigation (arrêt du Tribunal fédéral 9C_555/2017 du 22 novembre 2017 consid. 3.1 et les références).

6.4.2 Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux.

Ainsi, en principe, lorsqu’au stade de la procédure administrative, une expertise confiée à un médecin indépendant est établie par un spécialiste reconnu, sur la base d'observations approfondies et d'investigations complètes, ainsi qu'en pleine connaissance du dossier, et que l'expert aboutit à des résultats convaincants, le juge ne saurait les écarter aussi longtemps qu'aucun indice concret ne permet de douter de leur bien-fondé (ATF 135 V 465 consid. 4.4. et les références ; ATF 125 V 351 consid. 3b/bb).

En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). S'il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l'objectivité ou l'impartialité de celui-ci (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a 52; ATF 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l'éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l'existence d'éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C_973/2011 du 4 mai 2012 consid. 3.2.1).

On ajoutera qu'en cas de divergence d’opinion entre experts et médecins traitants, il n'est pas, de manière générale, nécessaire de mettre en œuvre une nouvelle expertise. La valeur probante des rapports médicaux des uns et des autres doit bien plutôt s'apprécier au regard des critères jurisprudentiels (ATF 125 V 351 consid. 3a) qui permettent de leur reconnaître pleine valeur probante. À cet égard, il convient de rappeler qu'au vu de la divergence consacrée par la jurisprudence entre un mandat thérapeutique et un mandat d'expertise (ATF 124 I 170 consid. 4; arrêt du Tribunal fédéral I 514/06 du 25 mai 2007 consid. 2.2.1, in SVR 2008 IV Nr. 15 p. 43), on ne saurait remettre en cause une expertise ordonnée par l'administration ou le juge et procéder à de nouvelles investigations du seul fait qu'un ou plusieurs médecins traitants ont une opinion contradictoire. Il n'en va différemment que si ces médecins traitants font état d'éléments objectivement vérifiables ayant été ignorés dans le cadre de l'expertise et qui sont suffisamment pertinents pour remettre en cause les conclusions de l'expert (arrêt du Tribunal fédéral 8C_755/2020 du 19 avril 2021 consid. 3.2 et les références).

6.5 Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d'être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c'est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu'un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 ; ATF 126 V 353 consid. 5b ; ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n'existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l'administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l'assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

7.              

7.1 En l’espèce, le rapport d’expertise du Dr L______, établi le 30 août 2021 à la suite d’un examen clinique effectué le 2 août précédent, répond, sur le plan formel, aux exigences posées par la jurisprudence pour qu'on puisse lui accorder une pleine valeur probante : cette expertise a été conduite par un médecin praticien en vue d’établir une synthèse des différentes pathologies de l’expertisé, sur la base d'observations approfondies et d'investigations complètes, ainsi qu'en pleine connaissance du dossier. Cet expert a personnellement examiné le recourant préalablement à l'établissement de son rapport. Il a consigné les renseignements anamnestiques pertinents, recueilli les plaintes de l'assuré et résumé ses propres constatations. Il a en outre énoncé les diagnostics retenus et répondu à toutes les questions posées. Enfin, ses conclusions sont claires et suffisamment motivées.

7.2 Il convient néanmoins de relever d’emblée que l’expert apparaît s’être concentré principalement sur les atteintes à la santé et leurs conséquences existant à l’époque de l’établissement de son rapport (en août 2021) et moins sur l’évolution de la situation médicale problématique de l’expertisé durant la relativement longue période litigieuse qui commence le 11 juin 2012.

À cet égard, étaient considérés comme incapacitants par le SMR, le 1er février 2017, l'angiosarcome de Kaposi (atteinte principale à la santé) et la "gonalgie droite avec méniscopathie dégénérative de la corne postérieure du ménisque interne", avec pour limitations fonctionnelles : pas de port de charges; pas de marche prolongée ou en terrain irrégulier; pas de position à genoux, ni accroupi; pas de position statique prolongée; impossibilité de porter des chaussures de sécurité; pas de montées répétées sur des escaliers, échelles et échafaudages; privilégier une activité sédentaire ou semi-sédentaire avec possibilité de changer de position à sa guise. En revanche, toujours selon le SMR, le 27 septembre 2021, l’atteinte principale, incapacitante, consiste en des varices des membres inférieurs, une chondrocalcinose et une atteinte méniscale du genou droit, de même qu’en une « fatigabilité liée au traitement antirétroviral, à une mauvaise utilisation du CPAP », ce de manière globalement conforme au rapport d’expertise (lequel retient une fatigabilité pour le même motif principal sous forme de besoin de sieste les après-midi) ; les limitations fonctionnelles retenues par l'expert sont reprises : "activité principalement assise, pas d'activité accroupie ni agenouillée, pas de montée ni de descente répétée d'escaliers, pas de travail en terrain accidenté, activité sollicitant principalement les membres supérieurs, pause d'environ 2h-3h après la prise du traitement antirétroviral".

7.3 C’est sans référence à un quelconque fondement que l’intéressé a déclaré en audience ne pas se reconnaître dans le contenu de ce rapport d’expertise qui ne correspondrait selon lui pas à ce qu’il est. Ce d’autant moins que le recourant ne conteste pas pratiquer le vélo et apprécier le sport, assurer toutes les tâches des activités quotidiennes (notamment ménagères) sans l'aide d'une tierce personne et s'occuper seul une semaine sur deux de son fils âgé de 11 ans.

Ni lui-même ni son avocat n’émettent des griefs précis contre ce rapport autres que les griefs qui suivent.

7.3.1 L’expert, s’il a diagnostiqué des séquelles d'écrasement de d'amputation traumatique du membre supérieur (T92.6), soit "status post amputation P3D5 [gauche]", n’a pas tiré des conséquences de cette atteinte au plan de la capacité de travail.

En audience, le recourant a montré la première phalange du petit doigt (auriculaire) qui avait été amputée en 1996 à la suite d’un accident de vélo. D’après ses explications, cette amputation a un effet très douloureux en cas de changement de temps (lorsqu'il fait froid ou chaud) ou lorsqu’il se cogne (car il n'y a rien au bout de cet auriculaire), et elle le gêne, en tant que droitier, pour porter des charges avec sa main gauche (parce qu’il ne peut rien porter sur la partie de la main qui est à la hauteur de l'auriculaire).

L’absence de mention de limitations fonctionnelles comme conséquences de cette atteinte dans le rapport d’expertise prête certes à la critique, dans la mesure où on voit mal comment elle ne pourrait pas gêner, même d’une manière limitée, l’assuré en cas de port de charges d’un certain poids avec nécessité d’utiliser l’entier de la main gauche ou en cas de travaux de précision nécessitant l’utilisation de tous les doigts des deux mains.

Néanmoins, dans les circonstances particulières du présent cas, cette omission de mention de limitations fonctionnelles sur ce point n’est en tant que telle pas suffisamment importante pour remettre en cause l’ensemble de la valeur probante de l’expertise et des conclusions de l’expert, ce d’autant moins que le dossier ne contient aucun rapport médical faisant état d’éventuelles conséquences incapacitantes de cette amputation.

Il pourra en tout état de cause être tenu compte des conséquences de cette amputation sous forme de limitations fonctionnelles.

7.3.2 L’absence de mention de l’aspect psychiatrique dans le chapitre « synthèse du dossier » au début du rapport d’expertise et d’analyse approfondie de cet aspect dans le reste du rapport d’expertise peut s’expliquer, à tout le moins, en partie, par le fait que des rapports médicaux portant sur les problèmes psychiques de l’intéressé ne paraissent avoir été présentés par celui que le 17 mai 2023, au stade de la procédure de recours et sur demande expresse de la chambre de céans. Au demeurant, l’expert a traité la problématique psychiatrique dans son expertise, puisqu’il expose : « Aucune constatation psychique n’est relevée durant l'expertise; notamment l'expertisé demeure euthymique, sans idées délirantes, sans trouble du cours de la pensée et sans hallucination ».

Quoi qu’il en soit, les rapports du département de psychiatrie (service de psychiatrie de liaison et d’intervention de crise) des HUG de 2009, 2017 et 2020 ainsi que le rapport d’évaluation psychologique établi par une psychologue le 5 octobre 2021 ne posent pas de diagnostics au plan psychiatrique concernant la période en cause (qui commence en juin 2012). Il ne se prononcent pas non plus clairement sur des questions de capacité de travail, limitations fonctionnelles et/ou rendement, ni ne contiennent des constatations ou appréciations susceptibles d’avoir des effets incapacitants et invalidants particuliers. En effet, les diagnostics les plus graves qui y sont énoncés sont, en 2017, la présence d’une thymie triste associée à des troubles du sommeil et, en 2020, un épisode dépressif léger avec détresse anxieuse.

Or, selon la jurisprudence, dans les cas où, au vu du dossier, il est vraisemblable qu'il n'y a qu'un léger trouble dépressif, qui ne peut déjà être considéré comme chronifié et qui n'est pas non plus associé à des comorbidités, aucune procédure de preuve structurée n'est généralement requise (arrêt du Tribunal fédéral 9C_14/2018 du 12 mars 2018 consid 2.1). En outre, le Tribunal fédéral a récemment rappelé qu’en principe, seul un trouble psychique grave peut avoir un caractère invalidant. Un trouble dépressif de degré léger à moyen, sans interférence notable avec des comorbidités psychiatriques, ne peut généralement pas être défini comme une maladie mentale grave. S'il existe en outre un potentiel thérapeutique significatif, le caractère durable de l'atteinte à la santé est notamment remis en question. Dans ce cas, il doit exister des motifs importants pour que l'on puisse néanmoins conclure à une maladie invalidante. Si, dans une telle constellation, les spécialistes en psychiatrie attestent sans explication concluante (éventuellement ensuite d'une demande) une diminution considérable de la capacité de travail malgré l'absence de trouble psychique grave, l'assurance ou le tribunal sont fondés à nier la portée juridique de l'évaluation médico-psychiatrique de l'impact (ATF 148 V 49 consid. 6.2.2 et les références).

En l’occurrence, on ne se trouve dans aucune des situations mentionnées par cette jurisprudence comme pouvant rendre nécessaire une procédure de preuve structurée. En particulier, il ressort des rapports du département de psychiatrie (service de psychiatrie de liaison et d’intervention de crise) des HUG ainsi que du rapport d’évaluation psychologique précités que les troubles psychiques de l’assuré n’ont à aucun moment été durables. Au surplus, le rapport d’évaluation psychologique susmentionné ne confirme pas les plaintes du patient relatives à « une importante thymie triste » avec la présence d’idées suicidaires scénarisées qui y sont mentionnées.

Au demeurant, les souffrances psychiques dont font état ces rapports apparaissent être en très grande partie liées à des difficultés psychosociales qui apparaissent jouer un rôle de premier plan, comme cela ressort desdits rapports tels que résumés dans l’état de fait du présent arrêt de même que de certains rapports de la Dresse I______, médecin généraliste traitante.

Or, en ce qui concerne les facteurs psychosociaux ou socioculturels et leur rôle en matière d'invalidité, ils ne figurent pas au nombre des atteintes à la santé susceptibles d'entraîner une incapacité de gain au sens de l'art. 4 al. 1 LAI. Pour qu'une invalidité soit reconnue, il est nécessaire, dans chaque cas, qu'un substrat médical pertinent, entravant la capacité de travail (et de gain) de manière importante, soit mis en évidence par le médecin spécialisé. Plus les facteurs psychosociaux et socioculturels apparaissent au premier plan et imprègnent l'anamnèse, plus il est essentiel que le diagnostic médical précise s'il y a atteinte à la santé psychique qui équivaut à une maladie. Ainsi, il ne suffit pas que le tableau clinique soit constitué d'atteintes qui relèvent de facteurs socioculturels; il faut au contraire que le tableau clinique comporte d'autres éléments pertinents au plan psychiatrique tels, par exemple, une dépression durable au sens médical ou un état psychique assimilable, et non une simple humeur dépressive. Une telle atteinte psychique, qui doit être distinguée des facteurs socioculturels, et qui doit de manière autonome influencer la capacité de travail, est nécessaire en définitive pour que l'on puisse parler d'invalidité. En revanche, là où l'expert ne relève pour l'essentiel que des éléments qui trouvent leur explication et leur source dans le champ socioculturel ou psychosocial, il n'y a pas d'atteinte à la santé à caractère invalidant (ATF 127 V 294 consid. 5a in fine).

Les griefs du recourant afférents à l’absence de prise en compte de l’aspect psychiatrique dans le rapport d’expertise tombent dès lors à faux.

Il est précisé que la composante psychique et la surcharge mentale présentées par le VIH (potentiellement mortel sans traitement) mentionnées le 6 avril 2022 par la médecin généraliste traitante ne sauraient en tant que telles être une cause d’incapacité de travail mais apparaissent incluses dans l’ensemble du tableau médical.

Pour le reste, la question des idées suicidaires causées par le précédent traitement antirétroviral sera prise en compte plus bas sous l’angle de l’évolution de l’état de santé et des effets de ce dernier.

7.3.3 Concernant le grief d’absence de prise en considération par le rapport d’expertise des limitations induites par les problèmes dermatologiques sous la forme de plaies de sarcome de Kaposi, il convient tout d’abord de relever que l’expert retient cette atteinte au titre de diagnostic, mais sans caractère incapacitant, et ce de la manière suivante : sarcome de Kaposi de la peau (C46.0), l'examen montrant des lésions hyperkératosiques avec croûtes de sang sur le coude droit, le mollet droit, le creux poplité et le mollet et face antérieure du membre inférieur gauche, ainsi que de multiples cicatrices d'ablation de lésion de Kaposi dont une en regard du bord interne supérieur de la rotule droite . Au surplus, sous le point « affection actuelle et évolution » sous « entretien approfondi sur les thèmes suivants », l’expert relate : « [L’expertisé] présente un syndrome de Kaposi sur l’hémicorps droit, récidivant (notamment au niveau du coude et du mollet droit) malgré des traitements successifs ».

Le fait que l’expert ne retienne pas d’effet incapacitants du sarcome de Kaposi s’explique selon toute vraisemblance en grande partie par le fait qu’au moment de l’établissement de l’expertise en août 2021, cette affection, qui avait fait l’objet de plusieurs traitements, se trouvait à l’arrière-plan par rapport aux pathologies reconnues comme incapacitantes par l’expert, alors qu’elle était au premier plan entre 2012 et 2014 à tout le moins comme cela ressort notamment des rapports établis durant cette période ainsi que d’une réponse du 12 mai 2023 du Dr P______ d’après lequel, « selon l’examen des rapports dermatologique de l’époque (2012, 2013), le patient dans cadre du sarcome de Kaposi a présenté un syndrome de Kaposi avec une poussée lymphœdémateuse du membre inférieur droit qui peut entraîner des limitations fonctionnelles tout comme la composante de lymphœdème chronique séquellaire selon son degré ».

Toutefois, il ne ressort pas du dossier que les gênes causées par ledit syndrome de Kaposi auraient entièrement cessé. En outre, l’expert n’explique pas précisément pour quels motifs les lésions hyperkératosiques avec croûtes de sang constatées ne causeraient pas des limitations fonctionnelles.

Or, à teneur des déclarations du recourant en audience, le sarcome de Kaposi est très gênant car il attaque la peau sur toutes les parties des jambes, et cela le gênerait pour un emploi : en effet, ce trouble occasionne des douleurs et des brûlures, et il est pénible de mettre des chaussures car il n'a plus d'ongles mais des mycoses qui sont brûlées au laser. De telles gênes sont confirmées par le rapport du 12 mai 2023 du Dr P______ selon lequel les plaies liées au syndrome de Kaposi sont « responsables d’une sensation de brûlure et de prurigo avec un effet uniquement temporaire des séances de photothérapie et des emballements par dermocorticoïdes proposés par les dermatologues ».

Il faut en conclure ce qui suit : entre 2012 et 2014 à tout le moins, le sarcome de Kaposi a été la cause d’importantes douleurs et de difficultés lors de la marche ou de la station debout prolongée, comme cela ressort notamment du rapport de la Dresse I______ du 29 mars 2017, étant précisé que l’expert a admis lui aussi cette limitation fonctionnelle en préconisant une « activité adaptée principalement assis », ni accroupie, ni agenouillée, et sollicitant principalement les membres supérieurs, en raison non du sarcome de Kaposi mais des varices des membres inférieurs ainsi que de la chondrocalcinose et de la lésion interne du genou droit ; en parallèle, pendant ladite période (de 2012 à 2014 à tout le moins) et encore actuellement, l’intéressé présente, en raison du sarcome de Kaposi, une limitation fonctionnelle consistant en l’impossibilité de porter des chaussures de sécurité (mentionnée le 1er février 2017 par le SMR), ce à quoi s’ajoutent des sensations de brûlures et de prurigo.

L’impossibilité de porter des chaussures de sécurité et la gêne en raison de sensations de brûlures et de prurigo, doivent donc être ajoutées aux limitations fonctionnelles reconnues par l’expert et (le 27 septembre 2021) par le SMR, sans que cela ne remette en cause la valeur probante de l’entier du rapport d’expertise.

7.3.4 Enfin, se pose la question de savoir si, comme soutenu par le conseil de l’assuré lors de l’audience, le rapport d’expertise n’aurait pas tenu suffisamment compte de la « grande » fatigue de celui-ci due à ses problèmes cumulés et le cas échéant susceptible de réduire son rendement.

Selon l’intéressé en audience, sa fatigue est due à l'ensemble de ses problèmes, pas seulement au médicament Genvoya : il y a l'hépatite C, le syndrome de Kaposi, et il a « eu le zona aussi ». L'hépatite C (traitée en 2018) est guérie, mais il doit contrôler sa consommation d'alcool car elle attaque le foie ; « l'arrêt de la consommation d'alcool [est] la partie la plus compliquée car [il est] "addict" ».

Or l’expert a considéré comme plausible comme "trouble fonctionnel" l'état de fatigue, rapporté anamnestiquement par l'expertisé mais non constaté lors de l’examen clinique, mais il a estimé que cet état pouvait être amélioré, en vue d'une amélioration de la capacité de travail, sous différents angles : amélioration du contenu de l'alimentation, notamment par le sevrage alcoolique; utilisation plus régulière de la CPAP pour l'obtention d'un sommeil réparateur; perte de poids pour diminuer la fatigue mécanique ; "discussion avec l'infectiologue du déplacement du traitement antirétroviral le soir en raison de l'asthénie induite si possible", cette dernière mesure étant selon l’expert de nature à permettre le recouvrement d'une pleine capacité de travail avec rendement total. Le SMR, dans son rapport du 27 septembre 2021, suit globalement cette appréciation à l’exception de la possibilité éventuelle d’un déplacement du traitement antirétroviral le soir.

Il sied ici de rappeler qu’en vertu de l’art. 7 al. 2 in fine LPGA, il n'y a incapacité de gain que si celle-ci n'est pas objectivement surmontable.

Concernant la recommandation de l’expert relative à la perte de poids, l’assuré cherche, d’après ses explications en audience, à réduire son poids avec une amélioration lente et progressive, notamment avec l’aide d’une diététicienne des HUG. Son utilisation insuffisante par le passé de la CPAP s’explique en partie par ses difficultés psychosociales liées entre autres à l’absence de logement fixe. Il découle en outre des réponses du 26 mai 2023 du Dr P______ qu’un déplacement de l’heure de prise de l’antirétroviral du repas de midi à celui du soir serait source de nombreuses complications sans qu’il soit certain que cela se révèle concrètement possible. En effet, le Genvoya doit impérativement être pris avec un repas consistant (riche en lipides), et il n’est pas établi qu’un tel repas riche soit concrètement possible ou souhaitable le soir, notamment sous l’angle diététique et de l’équilibre de vie de l’intéressé. Un déplacement de prise du Genvoya du repas de midi vers celui du soir n’apparaît donc pas exigible, de sorte que l’expert ne peut pas être suivi lorsqu’il soutient qu’une telle mesure serait de nature à permettre le recouvrement d'une pleine capacité de travail avec rendement total. Ainsi, s’agissant de la fatigabilité, un manquement doit être reproché au recourant uniquement concernant la continuation de sa consommation excessive d’alcool, l’intéressé n’ayant pas montré accomplir suffisamment d’efforts pour s’en extraire, se contentant de dire que c’était l’effort le plus difficile pour lui car il serait « addict ».

Dans ces circonstances, une certaine fatigue (ou asthénie) non réductible par des traitements ou mesures exigibles doit être considérée comme établie.

La part de fatigue due non à la prise du Genvoya mais, indépendamment du besoin de sieste les après-midi, au cumul des pathologies et traitements, dans un contexte de VIH et d’hépatite C ayant été traités avec succès, ne saurait, contrairement à ce que considère l’expert, être entièrement exclue grâce à une amélioration en matière d'alimentation, à un sevrage alcoolique et à l’utilisation plus régulière de la CPAP pour l'obtention d'un sommeil réparateur.

C’est surtout à cause de la « grande » fatigue qui serait due à ses problèmes cumulés que l’intéressé fait valoir, en plus de l’incapacité de travail de 25% admise par l’expert, une baisse de rendement. Compte tenu de l’ensemble des circonstances particulières, une diminution de rendement pour cause uniquement de fatigue doit être admise à hauteur de 5%. Une baisse de rendement supérieure à ce 5% est exclue ; en effet, la réduction du temps de travail occasionnée par le besoin de sieste chaque après-midi à la suite de la prise du Genvoya réduit déjà les conséquences de la fatigue ; en outre, ladite fatigue aurait pu et pourrait être diminuée de manière exigible par l’arrêt de la consommation excessive d’alcool et en partie par des solutions pour utiliser la CPAP ; enfin, cette fatigue apparaît limitée dans ses effets et n’empêche pas l’intéressé de pratiquer le vélo et apprécier le sport, assurer seul toutes les tâches des activités quotidiennes (notamment ménagères) et s'occuper seul une semaine sur deux de son fils.

Quant à la fatigue causée par la prise de Genvoya, elle se concrétise essentiellement dans le besoin impérieux pour le recourant de faire une sieste d’une durée de 2 à 3 heures chaque après-midi, point qui sera examiné ci-après.

7.4 Au regard des considérations qui précèdent et en suivant les conclusions de l’expert dont la valeur probante du rapport doit être admise avec les compléments indiqués ci-dessus, sans qu’un éventuel complément d’expertise ou une éventuelle expertise judiciaire se justifient, la capacité de travail du recourant est nulle dans l'activité habituelle d'aide monteur électricien, dès le 11 juin 2012.

Une activité adaptée consiste, vu l’avis de l’expert, en une « activité adaptée principalement assis, pas d'activité accroupie ni agenouillée, pas de montée ni de descente répétée d'escaliers, pas de travail en terrain accidenté, activité sollicitant principalement les membres supérieurs, pause d'environ 2 à 3 heures après la prise du traitement antirétroviral ». À ces limitations fonctionnelles doivent être ajoutées : évitement du port de charges d’un certain poids nécessitant d’utiliser l’entier de la main gauche ainsi que des travaux de précision nécessitant l’utilisation de tous les doigts des deux mains ; impossibilité de porter des chaussures de sécurité ; gêne en raison de sensations de brûlures et de prurigo. L’ensemble de ces limitations fonctionnelles sera pris en compte plus bas dans le cadre de l’examen d’un éventuel abattement sur le revenu d’invalide.

Ces limitations fonctionnelles ainsi que le degré d’incapacité de travail et de rendement doivent être considérés comme n’ayant pas évolué de manière significative entre le 11 janvier 2013 (date à partir de laquelle une capacité de travail de 75% dans une activité adaptée est retenue par l’expert) et le 10 janvier 2022 (date du prononcé de la décision querellée). En effet, d’une part, les pathologies les plus incapacitantes ont changé au cours du temps mais avec des effets sur la capacité de travail comparables, et les effets secondaires du précédent antirétroviral Triumeq de type état dépressif avec idées suicidaires ont été remplacés, avec une portée incapacitante très vraisemblablement similaire, par une fatigue importante avec des vertiges (nécessitant une sieste de 2 à 3 heures l’après-midi) sous le traitement par le nouvel antirétroviral Genvoya à partir de 2017 ; d’autre part, selon les déclarations de l’intéressé en audience, il n'y a eu ni aggravation, ni amélioration de son état de santé et de sa capacité de travail depuis 2012.

Comme retenu par l’expert, la capacité de travail dans une telle activité adaptée a été nulle à partir du 11 juin 2012, de 50% dès le 14 décembre 2012, à la suite notamment de la reprise du traitement antirétroviral. Selon l’expert, la capacité de travail a, ensuite, été de 75%, depuis le 11 janvier 2013. Sur ce point, le SMR et l’OAI ne justifient pas de manière motivée pour quels motifs elle serait de 100% - et non de 75% - dès le 1er mai 2013. Ce taux de 75% – 6 heures de travail par jour sur 8 heures pour un temps complet, selon l’expert – inclut le temps de pause nécessaire les après-midi après la prise du Genvoya.

Le recourant ne conteste pas clairement ces degrés de capacité de travail.

Néanmoins, il allègue avoir besoin d’une sieste de 3 heures (et non 2 heures seulement), 1h30 après la prise du Genvoya. Or, à teneur du rapport d’expertise, il lui faut une « pause d'environ 2-3 heures après la prise du traitement antirétroviral », avec un temps de présence maximal au travail de 6 heures par jour. Ce n’est que lors de l’audience que l’assuré, après avoir allégué dans ses écritures en procédure de recours soit 2 à 3 heures soit 3 à 4 heures, a fait clairement état d’un besoin de sieste de 3 heures, et pas seulement 2 heures, de sorte qu’une durée de 3 heures n’est pas démontrée comme étant nécessaire chaque jour. Dans ces circonstances, il se justifie de retenir un besoin de sieste les après-midi d’une durée moyenne, c’est-à-dire 2h30, ce d’autant plus qu’il pourrait être le cas échéant compliqué pour un employeur potentiel d’aménager des après-midi de travail avec 2 à 3 heures de sieste 1h30 après un repas de midi par exemple de 12h00 à 12h30, lesdites après-midi étant en effet entrecoupées de 14h00 à 16h00 ou 17h00. Cette durée de sieste de 2h30 fait monter le taux d’incapacité de travail dans une activité adaptée de 25% à 30% ([2,5 x 100] / 8,3 équivalant à 41,7 heures divisées par 5, puisqu’il convient de se référer à la moyenne – statistique – des heures travaillées en Suisse de 41,7 heures).

Partant, une incapacité de travail – incluant la baisse de rendement de 5% due à la fatigue comme retenu plus haut - doit être reconnue à hauteur de 35% au total.

7.5 Le recourant, considéré de manière non contestée comme ayant le statut d’actif à 100% – personne employée –, n’émet pas de griefs précis contre la comparaison des revenus effectuée par l’intimé dans sa décision querellée, selon le premier calcul uniquement tel que déjà fait le 13 février 2017 puis confirmé le 14 mars 2023 par celui-ci.

Chez les assurés actifs, le degré d'invalidité doit être évalué sur la base d'une comparaison des revenus. Pour cela, le revenu que l'assuré aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 8 al. 1 et art. 16 LPGA). Pour procéder à la comparaison des revenus, il convient de se placer au moment de la naissance du droit à la rente; les revenus avec et sans invalidité doivent être déterminés par rapport à un même moment et les modifications de ces revenus susceptibles d'influencer le droit à la rente survenues jusqu'au moment où la décision est rendue doivent être prises en compte (ATF 129 V 222 consid. 4.1 et les références). Il s’agit en l’occurrence de l’année 2013.

Le revenu sans invalidité a été fixé par l’OAI avec une référence au salaire indiqué pour 2011 par l’extrait du compte individuel AVS (ci-après : CI) de l’assuré, à savoir CHF 50'412.- ainsi qu’au salaire d’aide monteur électricien tel qu’annoncé par l’employeur dans un questionnaire rempli le 22 novembre 2012, soit le salaire horaire total de CHF 30.16 (incluant les indemnités de vacances et de jours fériés ainsi que le 13ème salaire) multiplié par 40 heures par semaine (8 heures par jour pendant cinq jours) et par 48 semaines, ce qui donne CHF 57'907.-, indexé en 2013 pour atteindre CHF 58'787.- (supérieur à celui résultant du seul CI). Interpelé par la chambre de céans, l’intimé a répondu – de manière convaincante – le 14 mars 2023 que le nombre annuel de semaines retenu n’était pas 52 (4 1/3 semaines par mois à 40 heures de travail selon l’ESS 2012), mais 48 afin que les vacances ne soient comptabilisées à deux reprises (52 semaines – 4 semaines de vacances = 48 semaines). Le revenu – brut – sans invalidité de CHF 58’787.- apparaît ainsi avoir été correctement calculé.

Apparaît également conforme au droit (cf. notamment ATF 143 V 295 consid. 2.2 et la référence ; ATF 135 V 297 consid. 5.2 et les références ; ATF 126 V 75 consid. 3b/bb ; ATF 124 V 321 consid. 3b/aa) le revenu – brut – avec invalidité calculé par l’office, pour lequel ce dernier s’est référé au revenu statistique tiré d’activités simples et répétitives (niveau de compétences 1) pour un homme selon l’ESS 2012, TA1_tirage_skill_level, soit CHF 5'210.- par mois, adapté à la durée normale de travail de 41,7 heures et indexé à 2013, le revenu annuel s’élevant ainsi à CHF 65'654.- pour un taux de 100%.

À cet égard, contrairement à ce que semble faire valoir le recourant, il existe des emplois en nombre suffisant compatibles avec les limitations fonctionnelles liées à son état de santé, l'assuré pouvant être en mesure de travailler par exemple comme manutentionnaire en atelier avec ses bras et mains, sur des objets qui ne sont pas lourds et en tenant compte des limitations causées par l’amputation à l’auriculaire de la main gauche, et sans être debout pour une durée prolongée ni accroupi ou agenouillé.

On ne se trouve ainsi pas en l’occurrence dans un cas où il conviendrait de s'écarter de la notion de marché équilibré du travail, dans le cadre duquel, notamment, l'activité exigible au sens de l'art. 16 LPGA, ne pourrait être exercée que sous une forme tellement restreinte qu'elle n'existerait quasiment pas sur le marché général du travail ou que son exercice impliquerait d’un employeur des concessions irréalistes et que, de ce fait, il semblerait exclu de trouver un emploi correspondant (cf. RCC 1991 p. 329; RCC 1989 p. 328; arrêts du Tribunal fédéral 9C_286/2015 du 12 janvier 2016 consid. 4.2 et 9C_659/2014 du 13 mars 2015 consid. 5.3.2), le caractère irréaliste des possibilités de travail devant ici découler de l'atteinte à la santé – puisqu'une telle atteinte est indispensable à la reconnaissance d'une invalidité (cf. art. 7 et 8 LPGA) – et non de facteurs psychosociaux ou socioculturels qui sont étrangers à la définition juridique de l’invalidité (cf. arrêt du Tribunal fédéral 8C_175/2017 du 30 octobre 2017 consid. 4.2).

7.6 Reste à examiner la question de l’abattement par rapport au revenu avec invalidité, que le recourant fixe à 15% au lieu du taux de 10% retenu par l’intimé.

7.6.1 La mesure dans laquelle les salaires ressortant des statistiques doivent être réduits, dépend de l'ensemble des circonstances personnelles et professionnelles du cas particulier (limitations liées au handicap, âge, années de service, nationalité/catégorie d'autorisation de séjour et taux d'occupation) et résulte d'une évaluation dans les limites du pouvoir d'appréciation. Une déduction globale maximum de 25% sur le salaire statistique permet de tenir compte des différents éléments qui peuvent influencer le revenu d'une activité lucrative (ATF 135 V 297 consid. 5.2 ; ATF 134 V 322 consid. 5.2 et les références; ATF 126 V 75 consid. 5b/aa-cc). Il n'y a pas lieu de procéder à des déductions distinctes pour chacun des facteurs entrant en considération ; il faut bien plutôt procéder à une évaluation globale, dans les limites du pouvoir d'appréciation, des effets de ces facteurs sur le revenu d'invalide, compte tenu de l'ensemble des circonstances du cas concret (ATF 148 V 174 consid. 6.3 et les références). D'éventuelles limitations liées à la santé, déjà comprises dans l'évaluation médicale de la capacité de travail, ne doivent pas être prises en compte une seconde fois dans l’appréciation de l’abattement, conduisant sinon à une double prise en compte du même facteur (cf. ATF 146 V 16 consid. 4.1 et ss. et les références). L'étendue de l'abattement justifié dans un cas concret relève du pouvoir d'appréciation (ATF 132 V 393 consid. 3.3).

S’agissant de la casuistique, par exemple, un taux d'abattement de 5% a été retenu par le Tribunal fédéral pour un assuré de 46 ans présentant un nombre non négligeable de limitations fonctionnelles (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_160/2014 du 30 juin 2014), pour un assuré né en 1952 ayant une prothèse unicompartementale du genou droit et ne pouvant mettre à profit sa capacité résiduelle de travail dans des activités légères, essentiellement sédentaires (évitement du port de charges supérieures à 10 kg, des montées d'escaliers, des déplacements rapides et des positions agenouillées; cf. arrêt du Tribunal fédéral 8C_196/2022 précité consid. 7.3), de même que pour une assurée née en 1962, de langue maternelle étrangère et invoquant des difficultés en français, avec comme limitations fonctionnelles l'évitement du port répété de charges supérieures à 5-10 kg, des activités nécessitant le maintien du membre supérieur droit au-dessus du niveau des épaules et la priorité pour les activités coude au corps (cf. arrêt du Tribunal fédéral 8C_608/2021 précité consid. 4.3). De surcroît, des abattements de 10% et 15% ont été confirmés par la Haute Cour dans des cas de non-usage de la main et du bras gauches, respectivement de restrictions d’usage de la main et du bras droits que la personne assurée pouvait néanmoins utiliser de multiples façon en évitant les poids supérieurs à 5 kg ainsi que les coups, les vibrations et les rotations fréquentes de la main droite, compte tenu de l’existence dans le marché du travail équilibré d’emplois compatibles avec ces limitations (cf. arrêts du Tribunal fédéral 8C_366/2013 du 18 juin 2013 consid. 4.2 ; 8C_350/2013 du 5 juillet 2013 consid. 3.3).

Par ailleurs, le Tribunal fédéral a déjà eu l'occasion de constater que le travail à plein temps n'est pas nécessairement mieux rémunéré que le travail à temps partiel; dans certains domaines d'activités, les emplois à temps partiel sont en effet répandus et répondent à un besoin de la part des employeurs, qui sont prêts à les rémunérer en conséquence (ATF 126 V 75 consid. 5a/cc; cf. aussi arrêt du Tribunal fédéral 8C_49/2018 du 8 novembre 2018 consid. 6.2.2.2). Cela étant, si selon les statistiques, les femmes exerçant une activité à temps partiel ne perçoivent souvent pas un revenu moins élevé proportionnellement à celles qui sont occupées à plein temps (cf., p. ex., arrêt du Tribunal fédéral 9C_751/2011 du 30 avril 2012 consid. 4.2.2), la situation se présente différemment pour les hommes; le travail à temps partiel peut en effet être synonyme d'une perte de salaire pour les travailleurs à temps partiel de sexe masculin (arrêt du Tribunal fédéral 8C_805/2016 du 22 mars 2017 consid. 3.2).

L'abattement doit être appliqué au revenu d'invalide et ne saurait en aucun cas s'additionner au taux de la diminution de rendement – ou d’incapacité de travail - , mais, concrètement, il convient d'appliquer l'abattement (par exemple de 10%) à la part du salaire statistique que la personne assurée est toujours susceptible de réaliser malgré sa baisse de rendement de par exemple 30% (10% de 70%, soit 7%), puis de déduire le résultat obtenu de ladite part salariale (70% - 7% = 63% ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_692/2017 du 12 mars 2018 consid. 5).

Selon la jurisprudence, le résultat exact du calcul du degré d’invalidité doit être arrondi au chiffre en pour cent supérieur ou inférieur selon les règles applicables en mathématiques. En cas de résultat jusqu'à x,49%, il faut arrondir à x % et pour des valeurs à partir de x,50%, il faut arrondir à x+1% (ATF 130 V 121 consid. 3.2).

7.6.2 En l’espèce, à ce stade du raisonnement, le taux d'abattement de 15% soutenu par le recourant – contre 10% selon l’intimé – ne peut pas d'emblée être considéré comme établi, ni être exclu, compte tenu de l'ensemble des circonstances particulières, notamment l'absence de désavantage lié à l'âge (38 ans en 2013, 48 ans en 2022) ainsi que les difficultés liées aux limitations fonctionnelles retenues par l'expert et le SMR puis encore complétées plus haut de même que la possible perte de salaire due au temps partiel. Un taux d’abattement supérieur à 15% doit en revanche en tout état de cause être exclu, au regard notamment de la casuistique développée par le Tribunal fédéral.

Quoi qu’il en soit, la question de savoir si le taux d’abattement de 15% peut ou non être appliqué (au lieu de celui de 10%) peut demeurer indécise pour les motifs qui suivent.

En effet, même si l’on applique un taux d’abattement de 15%, on parvient à ce qui suit : sur la part de salaire statistique que l’assuré peut encore obtenir sur la base de 35% d’incapacité de travail dans une activité adaptée, soit CHF 42'675.- (CHF 65'654.- - 35%, ou 65% de CHF 65'654.-), un abattement de 15% donnerait CHF 36'274.- (arrondi) de revenu avec invalidité (85% de CHF 42'675.-), ce, qui, comparé avec le revenu sans invalidité de CHF 58'787.-, correspond à 61,70%, arrondi à 62%, donc à un degré d’invalidité de 38% (100 – 62).

7.7 Ce degré d’invalidité de 38% est inférieur au taux de 40% requis pour l’octroi d’une rente AI, et la période en 2012-2013 durant laquelle ce taux de 40% a pu le cas échéant être atteint ou dépassé a été inférieure à une année (cf. art. 28 al. 1 let. b LAI a contrario), de sorte qu’est exclu le droit de l’assuré à une telle prestation.

8.             Vu ce qui précède, le recours sera rejeté.

9.             Bien que la procédure ne soit pas gratuite en matière d'assurance-invalidité (art. 69 al. 1bis LAI), il convient de renoncer à la perception d'un émolument, le recourant étant au bénéfice de l'assistance juridique (art. 69 al. 1bis LAI et 13 al. 1 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]).

 

***


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit qu’il n’est pas perçu d’émolument.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Diana ZIERI

 

Le président

 

 

 

 

Blaise PAGAN

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le