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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/170/2025

ATA/1157/2025 du 21.10.2025 ( EXPLOI ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/170/2025-EXPLOI ATA/1157/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 21 octobre 2025

1ère section

 

dans la cause

 

A______

et

B______ SA recourantes
représentées par Me Barnabas DENES, avocat

contre

DIRECTION DE LA POLICE DU COMMERCE ET DE LUTTE CONTRE LE TRAVAIL AU NOIR intimée



EN FAIT

A. a. B______ SA (ci-après : la société) est une société anonyme ayant pour but la gestion de cafés et de restaurants, l’import-export de divers produits manufacturés, la promotion de la culture irakienne et des prestations de services divers comme le covoiturage.

A______ en est administratrice avec signature individuelle.

b. A______ est au bénéfice de deux autorisations, délivrées par la direction du service de police du commerce et de lutte contre le travail au noir (ci-après : PCTN), de vendre, pour le compte de la société, des boissons alcooliques à l’emporter ainsi que des produits de tabac et des produits assimilés au tabac au sein du commerce à l’enseigne « C______ », sis rue D______, 1201 Genève (ci‑après : le commerce).

B. a. Par courrier du 15 août 2024, la PCTN a interpellé A______ l’informant, notamment, de son intention de prononcer, à son encontre, une sanction et/ou une mesure administrative pour non‑respect des dispositions cantonales en matière d’heures d’ouverture des magasins.

b. Le 27 août 2024, l’intéressée a présenté ses excuses sincères. Son employé, E______, était devenu gérant à compter du 1er octobre 2022. Étant nouveau dans le milieu, il avait eu « un peu de mal à bien gérer le commerce ». Elle avait procédé aux injonctions demandées.

C. a. Le 10 octobre 2024, la PCTN a informé la société de son intention de prononcer à son encontre une sanction et/ou une mesure administrative pour infractions à la loi sur les heures d’ouverture des magasins du 15 novembre 1968 (LHOM – I 1 05), à la suite de contrôles effectués les 2 juin 2022, 9 décembre 2022, 26 mai 2023 et 26 août 2023.

À cette occasion, la PCTN a transmis à la société quatre rapports établis les 13 juin et 14 décembre 2022, 26 mai et 19 juillet 2023, dont ressortent notamment les constats suivants :

-          Le jeudi 2 juin 2022 à 21h40, le commerce était ouvert, alors que l’heure normale de fermeture était 21h00. F______ y travaillait ;

-          Le vendredi 9 décembre 2022 à 00h09, le commerce était ouvert, alors que l’heure normale de fermeture était 21h00. E______ y travaillait ;

-          Le vendredi 26 mai 2023 à 00h33, le commerce était ouvert, alors que l’heure normale de fermeture était 21h00. Les horaires de fermeture du commerce n’étaient pas affichés. G______ y travaillait ;

-          Le samedi 26 août 2023 à 01h50, le commerce était ouvert, alors que l’heure de normale fermeture ce soir-là était 18h00. E______ y travaillait.

En outre, la société était invitée à faire parvenir copie de son dernier avis de taxation fiscale, à défaut de quoi, sa situation financière ne serait pas prise en compte dans la fixation du montant de l’amende.

b. Faisant valoir son droit d’être entendue, la société, par l’intermédiaire de A______, a indiqué qu’elle n’avait ni l’intention ni la volonté de se soustraire aux règles en vigueur. Lors du contrôle du 26 mai 2023, l’employé, G______, avait dû rester dans le commerce pour une raison urgente. Par ailleurs, les employés, G______ et E______, étaient devenus employés directs de la société. Toutes les personnes présentes dans le commerce suivaient et respectaient à la lettre les directives de l’inspectorat.

c. Par décision du 22 novembre 2024, la PCTN a retenu à l’encontre de la société, pour les faits constatés les 9 décembre 2022, 26 mai et 26 août 2023, la commission de deux infractions à l’art. 9 al. 1 LHOM cum art. 14 LHOM et une infraction aux art. 28 et 9 al. 2 LHOM. Une amende de CHF 4'165.- lui était infligée.

Les explications fournies n’étaient pas propres à remettre en cause les constatations opérées par les services de police. L’urgence survenue le 26 mai 2023 n’était pas démontrée. En tout état, ce fait n’était pas pertinent dès lors que le commerce était ouvert en dehors des heures normales de fermeture des magasins. Par ailleurs, ni G______ ni E______ n’occupaient, au moment des faits, une fonction dirigeante élevée justifiant de travailler au-delà des heures normales de fermeture. Du moins, ils ne s’étaient pas annoncés en tant que tels à la PCTN et celle-ci n’avait rendu aucune décision en ce sens.

Par ailleurs, l’information selon laquelle E______ était devenu gérant du commerce avait été communiquée pour la première fois le 27 août 2024. Le contrat de gérance transmis faisait état d’une gérance à compter du 1er juillet 2024, de sorte que la société était bien propriétaire du commerce au moment des faits litigieux.

Dans le cadre de la fixation du montant de l’amende, la situation financière de la société n’avait pas été prise en considération en l’absence de production de la dernière décision de taxation fiscale. Il avait été tenu compte en revanche des excuses sincères formulées par A______ le 27 août 2024.

D. a. La PCTN a transmis à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), pour raison de compétence, la copie d’un courrier de la société et de A______ intitulé « Demande d’annulation des observations relatives aux horaires d’ouverture » adressée par courriel le 8 janvier 2025 et remettant en cause la décision précitée.

b. Le 5 mai 2025, dans le délai prolongé par la chambre de céans, la société a complété son écriture.

L’amende avait été prononcée par une juriste et non par la direction de l’autorité intimée en violation de l’art. 33 LHOM. Rien n’indiquait que la juriste agissait en représentation de la direction. Ce manquement devait conduire à la nullité, ou du moins à l’annulabilité de la décision querellée.

Le rapport de police du 26 mai 2023 ne contenait aucune photo démontrant que les horaires du commerce n’étaient pas affichés. Le rapport du 14 décembre 2022 ne faisait pas état d’un tel manquement et « on ne vo[yait] pas pourquoi les recourantes auraient enlevé l’affiche alors présente ». Quant aux dépassements d’horaires constatés le 26 mai 2023, il était rappelé que la présence de G______ au-delà des heures normales de fermeture était due à une urgence. En outre, l’audition des parties, d’E______ et de G______ était sollicitée sur ces points.

S’agissant des faits constatés les 9 décembre 2022 et 26 août 2023, il n’y avait aucune volonté de se soustraire aux prescriptions en vigueur, la confusion résultant du fait qu’E______ devait, compte tenu « des changements prévus et en cours », être autorisé à demeurer seul dans l’établissement.

Pour le surplus, l’amende devait, à titre subsidiaire, être ramenée à CHF 1'500.-, compte tenu de l’avis de taxation produit en complément du recours.

c. La PCTN a conclu à ce qu’il soit statué sur la recevabilité du recours et, au fond, à son rejet.

Les juristes étaient habilités à signer des amendes prononcées en application de l’art. 33 LHOM sans qu’une procuration soit nécessaire. Le terme de direction désignait le service dans son ensemble et non son seul directeur.

Les constatations figurant dans un rapport de police, établi par des agents assermentés, bénéficiaient d’une pleine valeur probante. L’audition d’E______ et G______ n’était pas nécessaire, l’infraction à l’art. 28 LHOM étant établie.

Au vu de l’avis de taxation produit le 5 mai 2025, la société présentait une bonne situation financière, de sorte que le montant de l’amende n’était pas excessif.

À toutes fins utiles, il était précisé que le courrier du 15 août 2024 adressé à A______, concernant les infractions retenues dans la décision querellée, relevait d’une erreur. Les infractions à la LHOM ne pouvaient pas donner lieu à une sanction à son encontre, « seule [la société] étant tenue responsable de ces infractions ».

Elle persistait au surplus dans sa précédente argumentation.

d. La société a répliqué, persistant dans ses conclusions.

e.  Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

f. Le contenu des pièces sera repris en tant que de besoin dans la partie en droit du présent arrêt.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la PCTN et transmis à la juridiction compétente conformément à l’art. 64 al. 2 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), le recours est, à cet égard, recevable (art. 132 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a LPA ; art. 63 al. 1 let. c LPA).

2.             Le litige porte sur la décision amendant à hauteur de CHF 4'165.- la société (ci‑après : la recourante) pour non-respect des heures d’ouverture de son commerce, l’administratrice de celle-ci n’intervenant qu’au nom de la société.

3.             L’autorité intimée conclut à ce que la chambre de céans statue sur la recevabilité du recours.

3.1 Selon l’art. 65 al. 1 LPA, l’acte de recours contient, sous peine d’irrecevabilité, la désignation de la décision attaquée et les conclusions du recourant. En outre, il doit contenir l’exposé des motifs ainsi que l’indication des moyens de preuve. À défaut, un bref délai pour satisfaire à ces exigences est fixé au recourant, sous peine d’irrecevabilité (art. 65 al. 2 LPA).

Compte tenu du caractère peu formaliste de cette disposition, il convient de ne pas se montrer trop strict sur la manière dont sont formulées les conclusions du recourant. Le fait que ces dernières ne ressortent pas expressément de l’acte de recours n’est pas en soi un motif d’irrecevabilité, pourvu que le juge et la partie adverse puissent comprendre avec certitude les fins du recourant (ATA/595/2020 du 16 juin 2020 consid. 2b). Une requête en annulation d’une décision doit par exemple être déclarée recevable dans la mesure où le recourant a de manière suffisante manifesté son désaccord avec la décision ainsi que sa volonté qu’elle ne développe pas d’effets juridiques (ATA/593/2023 du 6 juin 2023 consid. 2.2).

3.2 In casu, la recourante a rédigé elle-même son acte de recours le 8 janvier 2025, avant d’être assistée d’un conseil dans le cadre de son écriture de réplique.

Dans son écriture initiale, la recourante a demandé « de bien vouloir annuler les observations émises dans [le] courrier [du 22 novembre 2024] ». Elle conteste ainsi la décision querellée, laquelle prononce une amende de CHF 4'165.- à son encontre. L’intéressée critique par ailleurs les motifs ayant conduit à cette décision, dès lors que les observations émises par la PCTN « semblent être basées sur des interprétations erronées des faits réels » et qu’« aucun manquement […] n’a été constaté sur place ». Le recours a, au demeurant, été dûment signé et complété dans les délais impartis par la chambre de céans les 30 janvier et 5 mai 2025.

En conséquence, le recours est recevable.

4.             La recourante ne conclut pas expressément à l’audition des parties ou à l’audition de témoins. Dans le texte de son écriture de recours, elle propose toutefois l’audition d’E______ et G______.

4.1  Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour la personne intéressée de produire des preuves pertinentes, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre.  

Le droit de faire administrer des preuves n’empêche toutefois pas l’autorité de mettre un terme à l’instruction lorsque les preuves déjà administrées lui ont permis de former sa conviction et que, procédant à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, elle a la certitude que ces dernières ne pourraient pas l’amener à modifier son opinion (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_359/2022 du 20 avril 2023 consid. 3.1 et les références citées). Le droit d’être entendu ne comprend pas le droit d’être entendu oralement (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; arrêt Tribunal fédéral 2D_51/2018 du 17 janvier 2019 consid. 4.1) ni celui d’obtenir l’audition de témoins (ATF 130 II 425 consid. 2.1).

4.2 En l’espèce, la recourante a pu faire valoir son droit d’être entendue à diverses reprises dans le cadre de ses échanges avec la PCTN. Au vu des questions juridiques soulevées par la présente cause et des infractions reprochées, la chambre de céans considère être en possession d’un dossier complet, les faits étant suffisamment documentés par les trois rapports de police établis le 14 décembre 2022, le 26 mai et 19 juillet 2023. En outre, la chambre de céans ne discerne pas en quoi les auditions de témoins sollicitées seraient utiles pour trancher le litige, étant rappelé que tous deux sont ou étaient des employés de la recourante et que la force probante de leurs témoignages devrait en conséquence être appréciée à l’aune de cet élément.

Il ne sera dès lors pas donné suite aux propositions d’actes d’instruction.

5.             La recourante soulève l’incompétence de l’autorité ayant prononcé la décision en violation des art. 33 LHOM, 5 al. 1 Cst. et 11 LPA. L’amende avait été prononcée par une juriste de l’autorité intimée et non par la direction de la PCTN.

5.1 À teneur de l’art. 33 LHOM, en cas d’infraction à la LHOM ou à ses dispositions d’exécution, la direction peut infliger une amende administrative de CHF 300.- à CHF 60'000.- en sus du prononcé des mesures prévues à l’art. 32, respectivement à la place de celles-ci.

5.2 Le département chargé de la régulation du commerce, soit pour lui la direction de la PCTN (ci-après : la direction), est chargé de l’application de la LHOM (art. 2 LHOM).

5.3 À teneur du règlement sur l’organisation de l’administration cantonale du 1er juin 2023 (ROAC - B 4 05.10), le département de l’économie et de l’emploi comprend l’office cantonal de l’inspection et des relations du travail qui comprend notamment la direction de la police du commerce et de lutte contre le travail au noir (art. 8 al. 1 let. d ch. 3 ROAC). Cette nouvelle dénomination est entrée en vigueur le 1er avril 2024 et remplace la précédente appellation de « service de police du commerce de lutte contre le travail au noir ». Le terme de direction désigne ainsi le service lui‑même dans son ensemble et non le directeur ou la directrice dudit service. Comme auparavant, les juristes de ladite direction sont habilités à signer, notamment des amendes prononcées en application de l’art. 33 LHOM, sans qu’une procuration soit nécessaire.

Le grief n’est pas fondé.

6.             La recourante conteste une violation des art. 9, 14, 28 et 33 LHOM.

6.1 La LHOM s’applique à tous les magasins sis sur le territoire du canton de Genève (art. 1 LHOM).

6.2 Selon l’art. 9 LHOM, sous réserve des régimes particuliers indiqués ci-après ou prévus par le règlement et des dispositions relatives aux fermetures retardées, non pertinents en l’espèce, l’heure de fermeture ordinaire des magasins est 19h00 (al. 1). L’heure de fermeture du vendredi est 19h30 (al. 2). L’heure de fermeture du samedi est 18h00 (al. 3).

6.3 À teneur de l’art. 14 LHOM, les magasins peuvent rester ouverts un soir par semaine jusqu’à 21h00.

6.4 Selon l’art. 4 let. b LHOM, ne sont pas assujettis les magasins, à condition qu’ils n’occupent pas de personnel les dimanches et jours fériés légaux ainsi qu’au-delà des heures de fermeture normales de magasins, étant précisé que ne sont pas considérés comme du personnel les travailleurs exerçant une fonction dirigeante élevée au sens de la LTr et qui sont tenus de s’annoncer au service.

Selon l’art. 30 al. 2 LHOM, les travailleurs exerçant une fonction dirigeante élevée au sens de l’art 3 let. d de loi fédérale sur le travail dans l’industrie, l’artisanat et le commerce du 13 mars 1964 (LTr - RS 822.11) sont tenus de s’annoncer à la PCTN.

Selon l’art. 1 du règlement d’exécution de la loi sur les heures d’ouverture des magasins du 21 février 1969 (RHOM - I 1 05.01), Les travailleurs exerçant une fonction dirigeante élevée sont tenus de s’annoncer au département compétent, et remplissent à cet effet une déclaration ad hoc sur le formulaire édicté par la PCTN. Tout changement de situation susceptible de modifier l’une ou l’autre des informations ainsi transmises à la PCTN doit lui être immédiatement communiqué.

6.5 Selon l’art. 28 LHOM, les magasins assujettis à l’obligation de fermer tout ou partie d’un jour ouvrable ou au bénéfice d’un régime spécial de fermeture, doivent indiquer en permanence leurs heures de fermeture de manière que cette indication soit clairement visible de l’extérieur du magasin.

6.6 À teneur de l’art. 33 LHOM, en cas d’infraction à la LHOM ou à ses dispositions d’exécution, la PCTN peut infliger une amende administrative de CHF 300.- à CHF 60'000.- en sus du prononcé des mesures prévues à l’art. 32, respectivement à la place de celles-ci.

6.7 De jurisprudence constante, la chambre de céans accorde généralement une pleine valeur probante aux constatations figurant dans un rapport de police établi par des agents assermentés, sauf si des éléments du dossier permettent de s’en écarter (ATA/67/2021 du 19 janvier 2021 consid. 2b ; ATA/502/2018 du 22 mai 2018 consid. 5 et les références citées).

6.8 En l’espèce, il ressort des rapports de police établis les 14 décembre 2022, 26 mai et 19 juillet 2023 que le commerce était ouvert au-delà des heures de fermeture normales des magasins. Or, ni G______ ni E______ n’étaient, au moment des faits, annoncés auprès de la PCTN comme ayant une fonction dirigeante élevée dans la société. Il ressort des pièces du dossier que tous deux y étaient employés, E______ n’étant devenu gérant qu’à partir du 1er juillet 2024. L’allégation selon laquelle le dépassement horaire du 26 mai 2023 serait dû à une urgence n’est pas pertinent, en l’absence de fonction dirigeante, à cette date, de G______. Par conséquent, le prononcé d’une sanction administrative se justifie déjà pour ce motif.

S’agissant des indications relatives aux horaires de fermeture, rien ne permet, en l’état du dossier, de remettre en cause les faits tels qu’ils ressortent du rapport du 26 mai 2023. Le seul fait qu’aucune photo n’accompagne le rapport de police du 26 mai 2023 ne suffit pas à retenir que les horaires étaient, à cette date-là, affichés. De même, l’argument selon lequel ces manquements n’auraient pas été constatés dans les rapports de police antérieurs tombe à faux. En effet, la chambre de céans ne discerne pas en quoi cet élément permettrait valablement de remettre en cause les constatations émises par des agents assermentés. La PCTN a relevé à juste titre que ce n’était que dans le cadre de son écriture complémentaire, le 5 mai 2025, que la recourante avait contesté, pour la première fois, nommément cette infraction.

Elle ne conteste d’ailleurs pas avoir dépassé les horaires d’ouverture les 9 décembre 2022 et 26 août 2023.

Le principe de l’amende est en conséquence fondé.

7.             La recourante se plaint d’une violation de la liberté économique et du principe de proportionnalité, s’agissant de la fixation du montant de l’amende.

7.1 Les amendes administratives prévues par les législations cantonales sont de nature pénale, car aucun critère ne permet de les distinguer clairement des contraventions pour lesquelles la compétence administrative de première instance peut au demeurant aussi exister. C’est dire que la quotité de la sanction administrative doit être fixée en tenant compte des principes généraux régissant le droit pénal (ATA/508/2020 du 26 mai 2020 consid. 4b ; Pierre MOOR/Étienne POLTIER, Droit administratif, vol. 2, 3ème éd., 2011, p. 160 n. 1.4.5.5 ; plus nuancé : Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2ème éd., 2018, p. 413 n. 1211).

En vertu de l’art. 1 let. a de la loi pénale genevoise du 17 novembre 2006 (LPG - E 4 05), les dispositions de la partie générale du code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0) s’appliquent à titre de droit cantonal supplétif. On doit cependant réserver celles qui concernent exclusivement le juge pénal (ATA/440/2019 du 16 avril 2019 consid. 5c et les références citées). Il est ainsi nécessaire que le contrevenant ait commis une faute, fût-ce sous la forme d’une simple négligence (ATA/1472/2024 du 17 septembre 2024 consid. 4.3 et les arrêts cités ; ATA/440/2019 précité consid. 5c et les références citées).

Selon la jurisprudence constante, l’administration doit faire preuve de sévérité afin d’assurer le respect de la loi et jouit d’un large pouvoir d’appréciation pour infliger une amende. La chambre administrative ne la censure qu’en cas d’excès ou d’abus (ATA/526/2020 du 26 mai 2020 consid. 10b). L’autorité prend en considération la nature, la gravité et la fréquence des infractions commises, dans le respect du principe de proportionnalité (art. 36 al. 3 Cst. ; ATA/326/2020 du 7 avril 2020 consid. 8b ; ATA/1365/2017 du 9 octobre 2017 consid. 9e).

7.2 Dans sa jurisprudence, la chambre administrative a déjà retenu qu’en infligeant une amende à hauteur de CHF 4'500.- à un magasin d'alimentation, de tabac, de boissons et d'alcool pour violation des dispositions sur les heures d’ouverture, l'autorité intimée avait tenu compte de la culpabilité du recourant, qui n'avait pas rétabli sa situation de manière conforme au droit alors qu'il avait été dûment invité à le faire. Tenant compte du fait que ce montant se situait dans la fourchette inférieure de l'art. 33 LHOM, il n'apparaissait pas que l'autorité avait abusé de son pouvoir d'appréciation.

Il était relevé que, s'agissant de sa situation personnelle et financière, le recourant s'était limité à remplir le formulaire de la PCTN. Il n'avait toutefois produit aucune pièce à l'appui des montants inscrits dans ledit formulaire, quand bien même l'autorité intimée l'avait invité à fournir des justificatifs (dont un avis de taxation fiscale) à deux reprises. De tels documents n'avaient pas non plus été transmis dans le cadre du recours devant la chambre administrative. Ainsi, en l'absence de collaboration du recourant sur ce point, la quotité de l'amende ne pouvait être réduite pour tenir compte d'une situation financière difficile (ATA/1402/2021 du 20 décembre 2021 consid. 6).

7.3 En l’espèce, la recourante conteste la quotité de l’amende. Elle soutient que le montant de CHF 4'165.- représente plus d’un mois et demi de bénéfice net selon la déclaration fiscale produite et l’avis de taxation. Elle la priverait de l’intégralité des bénéfices nets réalisés sur près d’un 1/6e de l’année, soit environ deux mois.

Le montant se situe dans le bas de la fourchette qui prévoit une amende maximale de CHF 60'000.-. La société n’a pas donné suite dans les délais à la demande de l’autorité intimée de produire la dernière taxation fiscale. En se limitant à produire la seule déclaration d’impôts de 2022, la société a empêché que sa situation financière puisse être prise en compte dans la fixation du montant de l’amende.

Pour le surplus, dans sa décision du 22 novembre 2024, l’autorité intimée a précisé avoir pris en compte les excuses présentées par la société. L’autorité intimée n’a ainsi pas violé le droit ou abusé de son pouvoir d’appréciation en fixant l’amende à CHF 4'165.-, montant inférieur de plus de CHF 300.- à celui confirmé dans la jurisprudence précitée.

Au vu de ce qui précède, l'amende de CHF 4'165.- doit être confirmée, tant dans son principe que dans sa quotité.

Dans ces circonstances, le recours, entièrement mal fondé, sera rejeté.

8.             Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge de la recourante (art. 87 al. 1 LPA). Il ne sera pas alloué d'indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA).


* * * * *

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 8 janvier 2025 par B______ SA et A______ contre la décision de la direction de la police du commerce et de lutte contre le travail au noir du 22 novembre 2024 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 500.- à la charge de B______ SA ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Barnabas DENES, avocat des recourantes, ainsi qu’à la direction de la police du commerce et de lutte contre le travail au noir.

Siégeant : Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, présidente, Jean-Marc VERNIORY, Michèle PERNET, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière :

 

 

C. MARINHEIRO

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. PAYOT ZEN-RUFFINEN

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :