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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1718/2024

ATA/1111/2024 du 24.09.2024 ( PROF ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1718/2024-PROF ATA/1111/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 24 septembre 2024

 

dans la cause

 

A______ recourant

contre


COMMISSION DU BARREAU intimée



EN FAIT

A. a. A______ est inscrit au registre cantonal des avocats depuis douze ans et exerce la profession d’avocat en qualité d’indépendant au sein de son étude à Genève.

b. B______, né le ______ 2000, a commencé un baccalauréat à la faculté de droit de l’université de Genève (ci-après : l’université) au semestre d’automne 2020. Il a pour projet d’intégrer la police.

c. Par ordonnance pénale et de non-entrée en matière partielle du 23 mars 2022 du Ministère public genevois (ci-après : MP), B______ a été déclaré coupable de voies de fait et de violation simple des règles de la circulation routière, infractions commises à réitérées reprises. Le MP n’entrait pas en matière sur les faits d’injures. B______ a été condamné à une amende de CHF 810.-. Le séquestre, la confiscation et la destruction du spray « OC » (spray au poivre) a été ordonnée et C______a été renvoyé à agir par la voie civile sur ses éventuelles prétentions civiles. B______ a été condamné aux frais de la procédure, arrêtés à CHF 510.-.

Il lui était reproché d’avoir, à Genève, le 14 décembre 2021, aux alentours de 14h15, au volant du véhicule automobile immatriculé FL1______/France, lors d’une altercation avec C______, conducteur du véhicule automobile immatriculé GE 2______, fait usage d’un spray « OC », l’atteignant au visage et lui occasionnant des brûlures, emprunté la bande cyclable pour dépasser le véhicule qui se trouvait devant lui et omis de respecter le signal lumineux à la phase rouge. C______avait déposé plainte pénale en raison de ces faits le 15 décembre 2021. Il avait transmis un constat médical établi le 14 décembre 2021 faisant état de plusieurs érythèmes.

D______, témoin des faits, entendue par la police le 7 janvier 2022, avait expliqué qu’elle était sur un scooter avec son mari à l’intersection entre la route E______ et la rue F______. En face d’eux se trouvaient deux voitures, l’une derrière l’autre au feu rouge. Le conducteur de la deuxième voiture était sorti de son véhicule et s’était dirigé vers la voiture devant lui. Des insultes avaient été échangées et le conducteur de la première voiture avait utilisé un spray à travers la fenêtre.

Selon les recherches auprès de la brigade des armes, de la sécurité privée et des explosifs, le spray utilisé par le prévenu n’était pas interdit en Suisse.

Entendu par la police le 7 janvier 2022, B______ avait partiellement reconnu les faits qui lui étaient reprochés. Il avait fait usage de son spray contre le plaignant car il s’était senti en danger lorsque ce dernier s’était dirigé vers lui. Le plaignant était arrivé vers sa fenêtre et il avait eu peur. Le prévenu avait reconnu que des injures avaient pu être échangées de part et d’autre mais avait contesté avoir fait un doigt d’honneur. Il avait en outre reconnu avoir roulé sur la bande cyclable et avoir omis de respecter le feu rouge.

d. Le 29 mars 2022, B______ a fait opposition à l’ordonnance pénale.

e. A______ s’est constitué auprès du MP pour la défense des intérêts de B______ par courrier du 30 mars 2022.

f. Par ordonnance sur opposition du 7 juin 2022, le MP a maintenu l’ordonnance pénale et transmis la procédure au Tribunal de police. Lors de son audition du 1er juin 2022, B______ avait indiqué qu’il ne contestait pas les faits reprochés mais qu’il avait agi en état de légitime défense, se sentant en danger par le comportement adopté par le plaignant.

g. Par courriel du 20 décembre 2022, B______ a informé son avocat qu’il avait contacté le service des ressources humaines de la police cantonale genevoise. Selon ce dernier, même en cas d’acquittement, l’intéressé devrait faire une demande de radiation à la commandante de la police pour supprimer son « casier police » dans lequel une trace de la procédure était conservée.

h. Par courriel du 16 février 2023, l’avocat a soumis à son client une proposition d’accord discutée avec la partie adverse, sous les réserves d’usage (retrait de la plainte pénale contre paiement de CHF ______). Il précisait que « ceci me semble plutôt une bonne nouvelle ».

i. Par message du 21 février 2023, en réponse à son avocat qui lui demandait s’il avait reçu son courriel du 16 courant, B______ a indiqué que « de prime abord je serais tenté de refuser à plusieurs égards. D’une part par la somme demandée mais plus encore par principe, je souhaite me battre estimant ne pas devoir un seul centime à ce monsieur ».

j. En mars 2023, A______ a soumis quatorze versions de son projet de plaidoiries d’environ 17 pages. Les différences consistaient principalement dans des précisions. Les cinq versions, versées au dossier, se terminaient, avant les conclusions, par la remarque suivante : « fait gravissime pour M. B______, cette peine mineure en apparence a pour conséquence terrible de ruiner l’avenir de M. B______ dans la police. Un casier judiciaire a pour conséquence de vous écarter. C’est la règle ».

k. Fin mars 2023, l’avocat a soumis à son mandant quatre pages de conclusions chiffrées qu’il entendait déposer devant le Tribunal de police à l’audience du 30 mars 2023. Il concluait à ce qu’il soit ordonné à l’État de Genève de verser à B______ quelque CHF 14'000.- d’honoraires détaillés dans trois notes distinctes des 18 mai 2022, 4 janvier et 30 mars 2023.

Dans les dernières versions de sa plaidoirie, le passage relatif au casier judiciaire était légèrement modifié en ces termes : « fait gravissime pour M. B______, cette peine mineure en apparence a pour conséquence terrible de ruiner potentiellement l’avenir de M. B______ dans la police, car il est désormais connu des services de police. Un casier judiciaire a pour conséquence de vous écarter. C’est la règle. Si vous n’avez pas de casier, vous êtes connus des services de police, c’est très très problématique ! On risque fort de vous écarter ».

Par réponse du 26 mars 2023, B______ a indiqué n’avoir « rien à redire ». Suivait un émoticone souriant.

l. Par jugement du 30 mars 2023, le Tribunal de police a déclaré B______ coupable de voies de fait, de violation simple des règles de la circulation routière et l’a condamné à une amende de CHF 600.- ainsi qu’au paiement de CHF 134.70 à C______à titre de réparation du dommage matériel. Ce dernier a été débouté de ses conclusions civiles. Pour le surplus, B______ a été condamné à verser à C______le montant de CHF 3'736.90 à titre de juste indemnité pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure. Il a par ailleurs été condamné aux frais de la procédure, soit CHF 1'070.-.

m. Le 6 juin 2023, A______ a transmis sa note d’honoraires pour la période du 31 mars au 5 juin 2023 en CHF 2'042.-. CHF 7'500.- restant dus sur la précédente facture, il sollicitait le versement de CHF 9'542.-.

n. Les modalités de la fin du mandat ne sont pas documentées au dossier. B______ a retiré sa déclaration d’appel du jugement précité.

B. a. Le 30 juin 2023, B______ a saisi la commission en matière d’honoraires d’avocat.

Il avait mandaté A______ exclusivement en vue d’éviter une inscription au casier judiciaire. Ce n’était que le 23 mars 2023 au soir, quelques jours avant l’audience devant le Tribunal de police, qu’une connaissance, magistrat, lui avait indiqué que l’infraction pour laquelle il était condamné n’entraînait aucune inscription au casier judiciaire. Il avait en conséquence été maintenu, par son conseil, dans la crainte d’une telle inscription pendant une année. S’il avait été correctement informé, il n’aurait pas contesté l’ordonnance pénale initiale.

b. Par préavis du 9 novembre 2023, la commission de taxation des honoraires d’avocat a préavisé favorablement les factures des 18 mai 2022 pour un montant de CHF 4'117.-, du 4 janvier 2023 pour CHF 2'547.-, du 30 mars 2023 pour CHF 9'321.- réduit à CHF 7'500.- et du 6 juin 2023 pour CHF 2'042.-.

c. Le 26 juillet 2023, A______ a sollicité la levée de son secret professionnel auprès de la commission du barreau (ci-après : CBA) pour faire constater sa créance en honoraires.

B______ s’y est opposé.

Par décision du 30 octobre 2023, la CBA a délié A______ de son secret professionnel dans le sens des considérants de sa décision, aux fins de recouvrer ses honoraires.

C. a. Le 3 novembre 2023, B______ a dénoncé A______ à la CBA. Il avait demandé explicitement à son avocat si les contraventions pour lesquelles il avait été condamné le 23 mars 2022 seraient inscrites au casier judiciaire au vu de son aspiration à rejoindre la police cantonale genevoise. A______ lui avait indiqué que tel était le cas et qu’il devait « se battre » pour éviter une telle inscription. B______ produisait huit versions de la plaidoirie devant le Tribunal de police faisant allusion à une inscription au casier judiciaire qui ruinerait son avenir dans la police. Il avait finalement été condamné à CHF 600.- au titre d’amende, CHF 134.- comme réparation du dommage matériel, CHF 3'736.90 au titre de « juste indemnité », CHF 1'070.- de frais de procédure, et CHF 600.- d’émolument complémentaire, soit un total de CHF 6'141.- alors que le montant initial était de CHF 1'320.-. À ce montant s’ajoutaient CHF 16'206.- au titre d’honoraires d’A______.

Son ancien avocat continuait à prétendre qu’il s’agissait d’une affaire pénale importante alors qu’elle ne relevait que d’une simple contestation de contravention. Il avait été informé quelques jours avant l’audience devant le Tribunal de police par un ami magistrat que sa condamnation ne serait pas inscrite au casier judiciaire. A______ avait alors transformé la formulation de sa plaidoirie et s’était « carapaté derrière la déclaration de consentement de la police précisant que des antécédents judiciaires pouvaient être éliminatoires ».

Il percevait CHF 1'100.- de contribution mensuelle à son propre entretien, versée par son père. L’erreur de son avocat lui avait créé un préjudice financier. Sa dette avait été multipliée par 17. Chaque mois, il s’acquittait de CHF 400.- à l’avocat de la partie civile et CHF 100.- au service des contraventions. La situation était inique.

b. Par décision du 15 avril 2024, la CBA a constaté qu’A______ avait violé l’art. 12 let. a de la loi fédérale sur la libre circulation des avocats du 23 juin 2000 (LLCA - RS 935.61), a prononcé un avertissement à son encontre et dit que le délai de radiation était de cinq années après son prononcé. La décision dans son intégralité a été transmise à B______.

Il était prouvé que l’avocat avait fourni un mauvais conseil en étant, pendant une longue période, convaincu de la possibilité que la condamnation soit inscrite au casier judiciaire de son client. Ce dernier l’avait en tous les cas lu dans les projets de plaidoiries que son avocat lui avait adressés. Dans ces circonstances, l’avocat avait indiqué à son client qu’il convenait de mener la procédure.

Il avait par ailleurs déployé une intense activité qui n’était pas justifiée par le dossier qui ne présentait pas de difficultés majeures aux plans des faits ou du droit. Il n’était pas nécessaire de rédiger quatorze projets de plaidoiries ou, à tout le moins, si tel avait été une exigence du client, il convenait de l’avertir du coût entraîné par une telle exigence. L’avocat ne démontrait pas l’avoir fait et ne le soutenait pas.

Enfin, le fait que l’avocat indique, dans ses déterminations auprès de la commission en matière d’honoraires d’avocat, que son client était impliqué dans une « affaire pénale relativement grave dite de "road rage" ou "délit de chauffard" » était contraire à la réalité du dossier, s’agissant de voies de fait et d’une violation simple des règles de la circulation routière. La violation de l’art. 12 let. a LLCA était établie. Les manquements étaient d’une gravité suffisante pour justifier une sanction disciplinaire.

En fournissant un mauvais conseil, en ne prenant aucune distance avec le dossier et des exigences du client, en n’avertissant pas le client que sa posture de défense pourrait aboutir à un résultat défavorable, tel que la prise en charge des frais de la partie plaignante voire en ne le dissuadant pas d’agir, l’avocat avait violé son devoir de diligence. Cette faute était grave. À la décharge de l’avocat, il était retenu que le client voulait « se battre jusqu’au bout » ce qui impliquait de trouver des arguments. Par ailleurs, le client avait fourni à son mandataire des vidéos et de très longs textes dont ce dernier avait dû prendre connaissance, ce qui avait nécessité de nombreuses heures de travail. L’avocat étant inscrit depuis plus de douze ans et ne faisant pas l’objet d’aucune sanction inscrite au registre, la CBA estimait que la faute était suffisamment grave pour être sanctionnée par un blâme. Cependant, au vu de l’ensemble des circonstances, elle n’infligerait qu’une sanction légère, soit un avertissement à A______.

D. a. Par acte du 22 mai 2024, A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre cette décision, concluant principalement à son annulation et au rejet de la dénonciation de B______.

La CBA avait constaté les faits de façon inexacte. Son droit d’être entendu avait été violé à l’instar du principe de la res iudicata. Aucun mandat ne lui avait été confié lors de la consultation dans les locaux de l’ordre des avocats. L’autorité avait excédé et abusé de son pouvoir d’appréciation. Elle avait par ailleurs violé l’interdiction de la discrimination et la loi fédérale sur l’égalité entre femmes et hommes du 24 mars 1995 (loi sur l’égalité - LEg - RS 151.1). Elle avait enfin violé son obligation d’adopter une certaine réserve dans son appréciation du comportement de l’avocat et violé l’art. 48 de la loi sur la profession d’avocat du 26 avril 2002 (LPAv - E 6 10).

b. La CBA s’est référée à sa décision.

c. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

d. Indépendamment des notes d’honoraires précitées, les premiers CHF 5'258.08 d’honoraires ont été acquittés par l’assurance de protection juridique de la mère de B______.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10 ; art 49 al. 1 LPAv).

2.             Le recourant se plaint d’une violation de son droit d’être entendu au motif qu’une décision aurait préalablement dû être prise par le bureau de la CBA, composé de trois membres et non directement par l’assemblée plénière de neuf membres. Il avait été privé de la possibilité de demander la convocation de l’assemblée plénière et de communiquer aux membres des pièces additionnelles et arguments sensibles qu’il était difficile de mentionner par écrit dans un premier temps, à l’instar du fait que son mandant avait été conseillé par un ami magistrat, son client lui assurant que ce dernier était d’accord avec la stratégie de défense.

2.1 Tel qu’il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend le droit pour les parties de faire valoir leur point de vue avant qu’une décision ne soit prise, de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur la décision, d’avoir accès au dossier, de participer à l’administration des preuves, d’en prendre connaissance et de se déterminer à leur propos (ATF 148 II 73 consid. 7.3.1).

2.2 La réparation d’un vice de procédure en instance de recours et, notamment, du droit d’être entendu, n’est possible que lorsque l’autorité dispose du même pouvoir d’examen que l’autorité inférieure (ATF 145 I 167 consid. 4.4). La partie lésée doit avoir le loisir de faire valoir ses arguments en cours de procédure contentieuse aussi efficacement qu’elle aurait dû pouvoir le faire avant le prononcé de la décision litigieuse (ATA/949/2021 du 14 septembre 2021 consid. 5b et les références).

2.3   La CBA statue sur tout manquement aux devoirs professionnels. Si un tel manquement est constaté, elle peut, suivant la gravité du cas, prononcer les sanctions énoncées à l’art. 17 LLCA (art. 43 al. 1 LPAv). Le président de la commission peut classer les dénonciations qui lui apparaissent manifestement mal fondées, en informant la CBA à sa plus proche séance. Si le dénonciateur, dûment avisé, persiste, la CBA plénière statue (art. 43 al. 2 LPAv). La commission du barreau peut prononcer des injonctions propres à imposer à l’avocat le respect des règles professionnelles. En cas d’urgence, le bureau de la CBA est compétent pour prononcer des mesures provisionnelles ; l’avocat faisant l’objet d’une injonction prononcée par le bureau peut demander que la mesure soit soumise à la commission plénière. Dans ce dernier cas, les membres du bureau participent également à la délibération (art. 43 al. 3 LPAv).

2.4 En l’espèce, contrairement à ce que soutient le recourant, la procédure adoptée par la CBA est conforme à la LPAv. Le recourant n’a pas de droit à une décision préalable du bureau de la CBA. Il ne cite d’ailleurs aucune disposition légale ou réglementaire qu’il estimerait avoir été violée. Par ailleurs, il a eu l’occasion de faire valoir ses arguments devant la chambre de céans et de produire toutes les pièces qu’il considérait comme pertinentes. Une hypothétique violation de son droit d’être entendu aurait ainsi été réparée. Le grief sera écarté.

3.             Le recourant semble solliciter, sans y conclure formellement, la production de pièces (pièce 12 : « demande des renseignements écrits au sens de l’art. 27 al. 1 LPA » au magistrat précité, ami de la famille ; pièce n° 21 : « production par le Tribunal de police de l’agenda/programme de la journée d’audience affiché à l’entrée de la salle de jugement » ; pièce n° 29 : « production par le Ministère public de la fiche de renseignements de police de B______ » ; pièce n° 33 : « production par B______ du contrat d’assurance de protection juridique dont il a bénéficié via sa mère », etc.).

3.1 La procédure administrative est régie par la maxime inquisitoire, selon laquelle le juge établit les faits d’office (art. 19 LPA), sans être limité par les allégués et les offres de preuves des parties. Dans la mesure où l’on peut raisonnablement exiger de l’autorité qu’elle les recueille, elle réunit ainsi les renseignements et procède aux enquêtes nécessaires pour fonder sa décision. Elle apprécie les moyens de preuve des parties et recourt s’il y a lieu à d’autres moyens de preuve (art. 20 LPA). L’autorité peut recueillir des renseignements écrits auprès de particuliers non parties à la procédure, ainsi que demander la production des pièces qu’ils détiennent (art. 27 al. 1 LPA).

3.2 En l’espèce, le recourant a produit de nombreuses pièces. Le dossier apparaît complet et en état d’être jugé. Les documents sollicités ne sont pas déterminants pour l’issue du litige, conformément aux considérants qui suivent. Il ne sera en conséquence pas donné suite à cette offre de preuve.

4.             Le recourant se plaint d’une constatation inexacte des faits.

4.1 En procédure administrative, la constatation des faits est gouvernée par le principe de la libre appréciation des preuves (ATF 139 II 185 consid. 9.2 ; 130 II 482 consid. 3.2). Le juge forme ainsi librement sa conviction, en analysant la force probante des preuves administrées, dont ni le genre, ni le nombre n’est déterminant, mais uniquement la force de persuasion (art. 20 al. 1 LPA ; ATA/382/2023 du 18 avril 2023 consid. 5b ; ATA/109/2021 du 2 février 2021 consid. 12b).

4.2 L'autorité administrative ne peut s'écarter du jugement pénal, dont elle doit en principe attendre la reddition (ATF 119 Ib 158 consid. 2c/bb), que si elle est en mesure de fonder sa décision sur des constatations de fait inconnues du juge pénal ou qui n'ont pas été prises en considération par celui-ci, s'il existe des preuves nouvelles dont l'appréciation conduit à un autre résultat, si l'appréciation à laquelle s'est livré le juge pénal se heurte clairement aux faits constatés, ou si le juge pénal n'a pas élucidé toutes les questions de droit, en particulier celles qui touchent à la violation des règles de la circulation (ATF 139 II 95 consid. 3.2). Cela vaut non seulement lorsque le jugement pénal a été rendu au terme d'une procédure publique ordinaire au cours de laquelle les parties ont été entendues et des témoins interrogés, mais également, à certaines conditions, lorsque la décision a été rendue à l'issue d'une procédure sommaire, même si la décision pénale se fonde uniquement sur le rapport de police (ATA/1018/2024 du 27 août 2024 consid. 2.2 et les références citées).

4.3 En l’espèce, le recourant développe ce grief sur six pages, sans indiquer avec précision quels faits, pertinents pour l’issue du litige, auraient été omis ou mal établis par la CBA.

Il conteste le déroulement des événements le 14 décembre 2021 tel qu’établi par le Tribunal de police et retenu par la CBA. Il détaille les faits tels qu’ils se seraient passés. Les faits ayant été établis par le Tribunal de police le 30 mars 2023, dans un jugement définitif et exécutoire, le recourant ne peut être suivi. En effet, les conditions permettant de s’écarter des constatations du juge pénal ne sont pas remplies ; le recourant ne l’allègue d’ailleurs pas.

Ce dernier reproche à la CBA de ne pas avoir relevé la mauvaise foi de son mandant. Il détaille les éléments que son client aurait cachés à la CBA, à l’instar de l’éventuelle « mauvaise foi » de son mandant. Il s’agit d’une question d’appréciation des faits non d’établissement de ceux-ci.

Les questions de facturation et de paiement d’honoraires ne sont que peu pertinentes. Le préavis émis par la Commission en matière d'honoraires d'avocat (prévue par l’art. 36 LPAv) ne déploie ni force de chose jugée, ni effet exécutoire et ne lie en aucune façon le juge qui serait saisi d'un litige relatif aux honoraires d'un avocat (ACJC/181/2018 du 9 février 2018 consid. 8.4 et la référence citée). Or, cette question ne relève pas de la compétence de la chambre de céans.

L’argumentation par laquelle le recourant conteste avoir violé son obligation d’information, l’absence de distance avec le dossier ou l’appréciation par la CBA de la situation ne relèvent pas du grief de mauvais établissement des faits mais de leur appréciation.

Ce grief est donc infondé.

5.             Le recourant conteste avoir commis une faute.

5.1 L’avocat autorisé à pratiquer doit respecter les règles professionnelles énoncées à l’art. 12 LLCA. Ce dernier définit exhaustivement les règles professionnelles applicables aux avocats (ATF 136 III 296 consid. 2.1 ; 131 I 223 consid. 3.4 ; 130 II 270 consid. 3.1). Ces règles professionnelles sont des normes destinées à réglementer, dans l’intérêt public, la profession d’avocat, afin d’assurer son exercice correct et de préserver la confiance du public à l’égard des avocats (ATF 135 III 145 consid. 6.1).

Selon l’art. 12 let. a LLCA, l’avocat exerce sa profession avec soin et diligence. Cette disposition constitue une clause générale, visant le soin et la diligence de l’avocat dans l’exercice de son activité professionnelle. Ceci l’astreint à se comporter de façon correcte vis-à-vis de ses clients, mais aussi envers les autorités judiciaires ou administratives, ses confrères et le public (ATF 130 II 270 consid. 3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_555/2014 du 9 janvier 2015 publié in SJ 2015 I 229).

La formulation très large de l’art. 12 let. a LLCA demande à être interprétée, permettant de la sorte aux tribunaux de dessiner les devoirs professionnels de l’avocat d’une façon assez libre et étendue, l’énumération exhaustive des devoirs professionnels dans la loi étant impossible. De fait, la jurisprudence donne à cette clause générale un sens qui va bien au-delà de la lettre du texte légal. En effet, le soin et la diligence visés par l’art. 12 let. a LLCA constituent des devoirs qui n’ont pas les clients pour seuls bénéficiaires. Ces devoirs s’étendent à tous les actes professionnels de l’avocat qui, en tant qu’auxiliaire de la justice, doit assurer la dignité de la profession, qui est une condition nécessaire au bon fonctionnement de la justice (arrêt du Tribunal fédéral 2C_167/2020 du 13 mai 2020 consid. 3.4 et les références citées ; Benoît CHAPPUIS/Jérôme GURTNER, La profession d’avocat, 2021, p. 48).

5.2 L’autorité de surveillance doit faire preuve d’une certaine réserve dans son appréciation du comportement de l’avocat (arrêt du Tribunal fédéral 2C_103/2016 du 30 août 2016 consid. 3.2.3). L’art. 12 let. a LLCA est une disposition subsidiaire. Pour que le comportement d’un avocat justifie une sanction au sens de cette disposition, la violation du devoir de prudence doit atteindre une certaine gravité qui, au-delà des sanctions relevant du droit des mandats, nécessite, dans l’intérêt public, l’intervention proportionnée de l’État (arrêt du Tribunal fédéral 2C_933/2018 du 25 mars 2019 consid. 5.1). Toute violation du devoir de diligence contractuel n’implique donc pas l’existence d’un manquement de nature disciplinaire au sens de l’art. 12 let. a LLCA. Cette disposition suppose l’existence d’un manquement significatif aux devoirs de la profession. L’avocat ne risque une sanction disciplinaire que lorsqu’il viole de manière intentionnelle ou gravement négligente son devoir de diligence (ATF 144 II 473 consid. 4).

5.3 Le devoir d’information du client revêt une importance particulière, notamment sur les chances et les risques d’une procédure, toute circonstance de nature à influer sur la décision du client relative tant au principe qu’à l’étendue ou aux modalités d’exécution du mandat devant être portée à sa connaissance, et a fortiori le prononcé d’un jugement en temps suffisant pour permettre au client de décider de recourir ou de renoncer. L’avocat doit en outre discerner l’éventuel caractère exagéré des prétentions de son client pour le dissuader d’engager des démarches ou procédures inutiles ainsi que les frais correspondants, ne pouvant, par intérêt, l’inciter ou l’encourager à procéder (Michel VALTICOS in Commentaire romand, Loi sur les avocats, 2e éd. 2022, no 21 ad art. 12).

Comme le prévoit en particulier l’art. 12 let. i LLCA, le client doit de même être orienté sur les coûts de l’intervention de l’avocat, tant sur ses honoraires prévisibles que sur les frais de procédure afin de pouvoir se déterminer en toute connaissance de cause et pouvoir être mis face à ses responsabilités financières, en particulier lorsqu’il entend agir pour une pure question de principe, sans nécessairement mesurer l’implication des dépenses d’une telle décision (Michel VALTICOS, op. cit., no 22 ad art. 12).

Tout manquement de l’avocat dans l’exécution de son mandat ne tombe pas sous le coup de l’art. 12 let. a LLCA, qui ne vise que les violations significatives des règles qui servent à la protection du public et à la garantie de la bonne marche de l’administration de la justice, dénotant un exercice irresponsable de la profession qui porte atteinte à la confiance devant être placée dans l’avocat. La responsabilité de l’avocat n’implique pas un manquement intentionnel, la négligence, l’inconscience ou la méconnaissance d’une règle pouvant être sanctionnée sur le plan disciplinaire. Des conseils erronés, un comportement procédural faux ou inadéquat d’un point de vue stratégique ou psychologique ne suffisent pas en soi à constituer une faute punissable disciplinairement, à l’inverse de la situation où l’avocat conseille délibérément son client d’une façon contraire à ses intérêts à la suite d’une négligence grave ou erreur grossière ou omet de le consulter avant de procéder au retrait d’un recours (Michel VALTICOS, op. cit., no 24 ad art. 12).

La fidèle exécution du mandat implique assurément que l’avocat suive les instructions de son mandant, mais son indépendance lui impose d’éviter d’épouser les passions de ce dernier et de ne pas se laisser aveugler par des requêtes déraisonnables ou le conduisant à entreprendre des démarches manifestement infondées. En homme de l’art, consulté en raison de ses compétences juridiques, l’avocat a, dans un pareil cas, le devoir de résister à son client, de le dissuader d’agir, voire même de renoncer au mandat (Michel VALTICOS, op. cit., no 27 ad art. 12).

L’avocat doit aider son client à apprécier les chances de succès du mandat qui lui est confié, une information exhaustive sur les risques encourus étant due (Benoît CHAPPUIS/Jérôme GURTNER, op. cit., n° 183, p. 53).

5.4 Le Tribunal fédéral a confirmé un avertissement à un avocat pour avoir introduit une poursuite au nom d’une communauté de propriétaires par étage alors que cette dernière n’avait pas demandé à l’avocat d’effectuer cette démarche ni ne lui avait octroyé de pouvoir de représentation à cet effet (arrêt du Tribunal fédéral 2C_231/2017 du 22 novembre 2018 cité in François BOHNET, professions d’avocat.e, de notaire et de juge, 4e éd., 2021, p. 85).

En 2004, le Tribunal fédéral a confirmé une amende de CHF 800.- pour une violation de l’obligation de diligence, l’avocat n’ayant pas informé sa cliente des recours interjetés et des risques liés à ces procédures (arrêt du Tribunal fédéral 2A.561/2004 du 21 octobre 2004 cité in François BOHNET, op. cit., p. 86).

6.             6.1 À teneur de l’art. 366 al. 2 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0), abrogé avec effet au 23 janvier 2023, sont inscrits au casier judiciaire : a. les jugements pour crime ou délit, pour autant qu’une peine ou une mesure ait été prononcée ; b. les jugements prononcés pour les contraventions au présent code ou à une autre loi fédérale désignées dans une ordonnance du Conseil fédéral, les autres hypothèses n’étant pas pertinentes en l’espèce.

6.2 La Loi fédérale sur le casier judiciaire informatique VOSTRA du 17 juin 2016 (Loi sur le casier judiciaire, LCJ – RS 300) et son ordonnance du 19 octobre 2022 (Ordonnance sur le casier judiciaire, OCJ – RS 331) sont entrées en vigueur le 23 janvier 2023.

Les jugements suisses qui portent sur une infraction relevant du droit fédéral commise par un adulte doivent être saisis : a) s’ils sont entrés en force ; b) s’ils ont été rendus par une autorité civile ou militaire de droit pénal ou par une autorité pénale administrative, et c) si l’une des conditions suivantes est remplie : 1. l’auteur a été reconnu coupable d’un crime ou d’un délit, sous certaines exceptions non pertinentes en l’espèce ; 3. l’auteur a été reconnu coupable d’une contravention et : il a été puni d’une amende de plus de CHF 5’000.- ou d’un travail d’intérêt général de plus de 180 heures ; la loi habilite ou contraint expressément l’autorité qui a rendu le jugement à aggraver la peine en cas de nouvelle infraction.

6.3 En l’espèce, la CBA a retenu que l’avocat avait fourni un mauvais conseil, n’avait pris aucune distance avec le dossier et les exigences du client et n’avait pas averti ce dernier que sa posture de défense pourrait aboutir à un résultat défavorable, tel que la prise en charge des frais de la partie plaignante, voire ne l’avait pas dissuadé d’agir.

Le recourant conteste chacun de ces griefs.

6.3.1 L’intéressé se défend d’avoir mal conseillé son client. Il rappelle que l’opposition à l’ordonnance pénale avait été rédigée par le client lui-même, conseillé par un juriste de son assurance protection juridique et par un magistrat, ami de la famille de son mandant. Il ne pouvait donc lui être reproché d’avoir fourni un mauvais conseil alors qu’il n’était pas constitué au moment de l’opposition à l’ordonnance pénale.

Le fait de ne pas être constitué au moment de l’opposition à l’ordonnance pénale est sans incidence sur l’existence d’un éventuel mauvais conseil quant à la suite de la procédure. Il ressort des projets de plaidoiries que le recourant était persuadé, jusqu’à quelques jours avant l’audience devant le Tribunal de police, que son client risquait une inscription au casier judiciaire. Comme le précise à juste titre la CBA, le recourant avait certainement dit à son client, ou en tout cas ce dernier avait pu le lire dans les projets que son avocat lui avait adressés, qu’il risquait une telle inscription et que, dans ces circonstances, il convenait de mener la procédure. C’est dès lors à bon droit et conformément aux pièces du dossier que la CBA a considéré que l’existence d’un conseil erroné était prouvée.

6.3.2 La CBA a reproché au recourant d’avoir indiqué dans ses observations que son client était impliqué dans une affaire de « road rage » relativement grave, de façon contraire aux pièces du dossier.

Dans son recours, l’intéressé a maintenu que son mandant avait été impliqué dans un tel complexe de faits et en avait été la victime. Force est de constater que cette interprétation est contraire aux faits tels que retenus par le Tribunal de police dans son jugement, aujourd’hui définitif et exécutoire.

Le fait que ledit mandant n’ait pas déposé une plainte pénale contre la personne qu’il qualifiait d’être son agresseur est sans pertinence sur les faits tels qu’établis par la justice.

Le recourant, dans les observations litigieuses, reprend dans le détail le déroulement du prétendu « road rage ». Ce faisant, c’est à juste titre que la CBA a considéré que le recourant avait épousé, ce faisant, la version des faits de son client, manifestant un manque de distance au dossier.

6.3.3 Le recourant conteste avoir violé son obligation d’information.

Or, le mandant avait admis les infractions à la LCR. Un état de légitime défense ne pouvait pas être plaidé en lien avec ces infractions. S’agissant des voies de fait, à juste titre la CBA relève qu’un état de légitime défense apparaissait difficile à obtenir et que l’avocat n’a pas démontré avoir indiqué à son client et attiré l’attention de ce dernier sur les coûts que risquait d’entraîner une telle défense. Il ne prouve en particulier pas avoir expliqué à son mandant non seulement les honoraires que cela risquait d’induire mais surtout les frais dus à la partie adverse. Certes, il ressort des pièces du dossier qu’au moment où l’avocat de la partie adverse a fait une proposition à l’amiable, le recourant a accueilli favorablement une telle solution la qualifiant de « bonne nouvelle ». Toutefois, il ne démontre pas avoir discuté avec ce dernier des risques, notamment financiers, de la procédure.

Les conseils qu’aurait fournis le « magistrat, ami de la famille » ou un juriste de l’assurance de protection juridique sont sans pertinence sur l’issue du litige. S’ils ont pu contribuer à renforcer la détermination du client « à se battre jusqu’au bout », le mandataire ne peut, par ce biais, s’exonérer d’une éventuelle faute, l’ami concerné et le gestionnaire du dossier au sein de la compagnie de protection juridique n’ayant pas forcément accès à l’entier du dossier et surtout n’en étant pas en charge.

L’existence d’une faute est en conséquence établie.

7.             Le recourant conteste la quotité de la sanction qui lui a été infligée.

7.1 Selon l’art. 17 al. 1 LLCA, en cas de violation de cette loi, l’autorité de surveillance peut prononcer des mesures disciplinaires, soit l’avertissement (let. a), le blâme (let. b), une amende de CHF 20'000.- au plus (let. c), l’interdiction temporaire de pratiquer pour une durée maximale de deux ans (let. d) ou l’interdiction définitive de pratiquer (let. e). L’amende peut être cumulée avec une interdiction de pratiquer (art. 17 al. 2 LLCA). Si nécessaire, l’autorité de surveillance peut retirer provisoirement l’autorisation de pratiquer (art. 17 al. 3 LLCA). L’avertissement, le blâme et l’amende sont radiés du registre cinq ans après leur prononcé (art. 20 al. 1 LLCA).

7.2 Le blâme constitue la sanction disciplinaire la plus légère du catalogue prévu à l’art. 17 LLCA, immédiatement après le simple avertissement. À bon droit, la doctrine perçoit en cette mesure un « avertissement aggravé ou une sévère réprimande », lorsque la faute professionnelle retenue présente déjà « une certaine intensité », tout en précisant que la différence entre l’avertissement et le blâme demeure fine et a trait au degré plutôt qu’à la nature de la sanction, laquelle se justifie notamment en cas de manquements répétés ou de commission simultanée de plusieurs violations mineures (arrêt du Tribunal fédéral 2C_782/2015 du 19 janvier 2016 consid. 6 et les références citées).

   

   

L’avertissement est la sanction prévue la moins grave et est réservée aux cas bénins. Le blâme est destiné à sanctionner des manquements professionnels plus graves et doit apparaître comme suffisant pour ramener l’avocat à ses devoirs et l’inciter à se comporter de manière irréprochable, conformément aux exigences de la profession (ATA/213/2022 du 1er mars 2022 consid. 6a et les références citées).

7.3 En l’espèce, l’intimée a prononcé la sanction la plus légère, tout en relevant que la faute était grave.

Elle n’a en conséquence pas violé le droit ni abusé de son pouvoir d’appréciation en prononçant un avertissement à l’encontre du recourant.

La durée du délai de radiation est en outre conforme à l’art. 20 al. 1 LLCA.

8.             Le recourant se plaint d’une violation du principe de l’autorité de la chose jugée : en concluant de manière arbitraire et sans audience orale qu’il avait commis une faute, la CBA semblait l’empêcher de facto de recouvrer sa créance d’honoraires, en contradiction avec la décision du bureau de la CBA du 30 octobre 2023 le déliant de son secret professionnel aux fins de recouvrer sa créance, du préavis de la commission en matière d’honoraires des avocats qui considérait le montant de ses honoraires comme justifié et de la décision querellée du 15 avril 2024.

8.1 L’autorité de la chose jugée (ou force de chose jugée au sens matériel) interdit de remettre en cause, dans une nouvelle procédure, entre les mêmes parties, une prétention identique qui a été définitivement jugée (ATF 144 I 208 consid. 3.1 ; 142 III 210 consid. 2.1). Il y a identité de l’objet du litige quand, dans l’un et l’autre procès, les parties soumettent au juge la même prétention, en reprenant les mêmes conclusions et en se basant sur le même complexe de faits. L’identité de l’objet du litige s’entend au sens matériel ; il n’est pas nécessaire, ni même déterminant que les conclusions soient formulées de manière identique (arrêt du Tribunal fédéral 8C_816/2015 du 12 septembre 2016 consid. 3.1).

8.2 En l’espèce, l’objet du litige n’est pas identique entre les deux procédures, la décision du bureau de la CBA du 30 octobre 2023 portant sur la question du secret professionnel de l’avocat. Le préavis de la commission en matière d’honoraires des avocats, outre qu’il ne s’agit pas d’une décision, ne concerne que la quotité des honoraires du conseil. La présente procédure examine le respect, par le recourant, des règles professionnelles de l’avocat. Le principe de l’autorité de la chose jugée n’a en conséquence pas été violé.

9.             Le recourant conteste qu’un mandat lui ait été confié lors de la consultation dans les locaux de l’ordre des avocats, y avoir prodigué un conseil erroné et développe une analyse sur le statut de l’ordre des avocats.

Il n’est pas nécessaire de trancher ce grief dès lors qu’il n’est pas contesté que postérieurement à cette consultation, l’avocat a été mandaté par l’intéressé. Il ressort du dossier qu’indépendamment de la consultation dans les locaux de l’ordre des avocats, le recourant a soutenu que la contravention risquait d’être inscrite dans le casier judiciaire de son client. Comme précédemment relevé, ce fait ressort des projets de plaidoiries. Le grief n’est pas fondé.

10.         Le recourant se plaint d’un « excès et abus » du pouvoir d’appréciation de la CBA. Il conteste qu’« il apparaisse d’emblée à la lecture de l’ordonnance de condamnation qu’il s’agissait d’un dossier ne présentant pas de difficultés majeures au plan des faits ou au plan du droit » ainsi que du fait qu’ « un état de légitime défense apparaissait très difficile à obtenir ». La CBA se fonderait principalement sur l’appréciation juridique erronée de la présidente du Tribunal de police. En outre, le Ministère public avait instruit le dossier uniquement à charge et avait refusé de répéter les auditions des témoins et de la partie plaignante en présence de son client. La jurisprudence du Tribunal fédéral avait manifestement été violée. Par ailleurs, sa stratégie de défense serait partagée par le magistrat, ami de la famille. La CBA ne pouvait pas exclure qu’un appel contre le jugement du Tribunal de police devant la chambre pénale de la Cour de justice puis un recours éventuel devant le Tribunal fédéral aurait pu conduire à l’annulation du jugement et à l’acquittement de son client.

10.1 Il y a abus du pouvoir d’appréciation lorsque l’autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu’elle viole des principes généraux du droit tels que l’interdiction de l’arbitraire, l’inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3).

Il y a excès du pouvoir d’appréciation lorsque l’autorité dépasse le cadre de ses pouvoirs.

En outre, celle-ci doit exercer son libre pouvoir d’appréciation conformément au droit, ce qui signifie qu’elle doit respecter le but dans lequel un tel pouvoir lui a été conféré, procéder à un examen complet de toutes les circonstances pertinentes, user de critères transparents et objectifs, ne pas commettre d’inégalité de traitement et appliquer le principe de la proportionnalité. Si elle ne respecte pas ces principes, elle abuse de son pouvoir (ATA/278/2022 du 15 mars 2022 consid. 2b et les arrêts cités ; Pierre MOOR/Alexandre FLÜCKIGER/Vincent MARTENET, Droit administratif, vol. I, 3e éd., 2012, p. 743 ss et les références citées).

10.2 En l’espèce, l’argumentation du recourant consiste à remettre en cause le jugement définitif et exécutoire prononcé par le Tribunal de police. La CBA s’est fondée sur ledit jugement pour déterminer si le recourant avait commis une faute. Ce faisant, l’autorité s’est fondée sur des faits établis. Dès lors que la CBA n’a pas fondé son raisonnement sur des considérations qui manquaient de pertinence ou étaient étrangères au but de l’art. 12 LLCA, elle n’a pas commis d’abus de son pouvoir d’appréciation. Ayant respecté le cadre de ses pouvoirs, elle n’a pas non plus commis d’excès de son pouvoir d’appréciation.

11.         Le recourant se plaint d’une violation du principe de la discrimination et de la LEg. Un homme de 21 ans relativement grand n’aurait pas le droit d’être effrayé et stressé quand il serait agressé violemment par un automobiliste sur la route. Si le prévenu avait été une jeune femme, le procureur et/ou le Tribunal de police auraient retenu un état de légitime défense, voire acquitté le prévenu.

La LEg s’applique dans les rapports de travail (art. 2 LEg) et est ainsi sans pertinence en l’espèce. Pour le surplus, le recourant remet en question le jugement du Tribunal de police. Ce faisant, il s’écarte de l’objet du présent litige. Mal fondé, le grief sera rejeté.

12.         Le recourant se plaint d’une violation de l’obligation de la CBA d’adopter une certaine réserve dans son appréciation du comportement de l’avocat sous l’angle de l’art. 12 let. a LLCA. La CBA lui aurait infligé une sanction légère en se fondant sur un état de fait incomplet, en invoquant des arguments subjectifs et contestables, non partagés par un ami de la famille, magistrat. Ce dernier conseillait également son client, estimant un état de légitime défense justifié et un acquittement possible. La CBA se serait prononcée sans être en possession de tous les éléments, notamment de la détermination de ce proche.

12.1 Le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, ainsi que pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (art. 61 al. 1 LPA). La chambre administrative n’a toutefois pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.

12.2 La chambre administrative examine librement si le comportement incriminé de l’avocat contrevient à l’art. 12 let. a LLCA (art. 67 LPA ; arrêt du Tribunal fédéral 2P.318/2006 du 27 juillet 2007 consid. 12.1 ; ATA/258/2021 du 2 mars 2021 consid. 7).

12.3 Sous cet argument, le recourant se plaint en réalité d’un abus du pouvoir d’appréciation de la CBA. Comme vu dans les considérants qui précèdent, ce grief n’est pas fondé. Il est pour le surplus rappelé que les éventuels conseils prodigués par un tiers, quel que soit son statut, sont sans pertinence dans la bienfacture du mandat confié à un avocat. Si la détermination des précités peut influencer le mandant dans ses choix de conduite de sa procédure, les conseils prodigués par l’avocat ne peuvent se fonder sur l’avis d’un ami de la famille, même formé professionnellement ni sur celui d’un juriste d’une assurance de protection juridique, lesquels ne sont ni en charge du dossier ni n’y ont accès.

13.         Le recourant se plaint d’une violation de l’art. 48 LPAv. La CBA avait communiqué la décision dans son intégralité à son ancien client sans motiver cette décision ni expliquer pour quelle raison il était justifié de notifier les considérants à l’intéressé. Elle aurait dû se contenter d’aviser ce dernier qu’un avertissement avait été adressé au mandataire.

13.1 Si la procédure a été ouverte sur une dénonciation, l’auteur de cette dernière est avisé de la suite qui y a été donnée. Il n’a pas accès au dossier. La commission lui communique la sanction infligée et décide dans chaque cas de la mesure dans laquelle il se justifie de lui donner connaissance des considérants (art 48 LPAv).

Selon les travaux préparatoires relatifs au projet de loi du Conseil d'État sur la profession d'avocat, la commission doit pouvoir décider de la mesure dans laquelle les considérants, qui peuvent contenir des données personnelles ne concernant pas le dénonciateur, seront communiqués à ce dernier (MGC 2000 41/VII 6115).

13.2 Le droit d’être entendu garanti par l’art. 29 al. 2 Cst. implique notamment l’obligation pour l’autorité de motiver ses décisions, afin que le justiciable puisse les comprendre et exercer ses droits de recours à bon escient (ATF 143 IV 40 consid. 3.4.3 ; 141 V 557 consid. 3.2.1). Il suffit cependant que l’autorité mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l’ont guidée et sur lesquels elle a fondé sa décision, de manière à ce que l’intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l’attaquer en connaissance de cause (ATF 142 II 154 consid. 4.2).

La violation du droit d'être entendu doit en principe entraîner l'annulation de la décision attaquée, indépendamment des chances du recourant sur le fond (ATF 141 V 495 consid.2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_740/2017 du 25 juin 2018 consid. 3.2). Une réparation devant l'instance de recours est possible si celle-ci jouit du même pouvoir d'examen que l'autorité intimée (ATF 145 I 167 consid. 4.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_46/2020 du 5 mai 2020 consid. 6.2). La réparation dépend cependant de la gravité et de l'étendue de l'atteinte portée au droit d'être entendu et doit rester l'exception (ATF 142 II 218 consid. 2.8.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_617/2019 du 27 mai 2020 consid. 3.1).

13.3 En l’espèce, la décision de la CBA a été communiquée en intégralité au dénonciateur, ce que la loi autorise. Ce choix de la CBA ne fait toutefois l’objet d’aucune motivation. Devant la chambre de céans, la CBA s’est contentée de se référer à sa décision sans formuler d’observations complémentaires.

Sur ce point, le droit d’être entendu du recourant a été violé.

Toutefois, le défaut de motivation sur cette question, non réparé devant la chambre de céans, n’est pas de nature à influer sur l’issue du litige.

Le dénonciateur ayant déjà eu connaissance de la décision, un renvoi à l’autorité intimée pour motivation ne paraît pas utile. Cette violation, portant sur un point limité de la décision, n’entraîne pas l’annulation de celle-ci. Il sera toutefois tenu compte de cette violation dans la répartition des frais.

Le recours sera rejeté.

14.         Vu la violation du droit d’être entendu du recourant, il ne sera pas perçu d’émolument (art. 87 al. 1 LPA). Il ne lui sera pas alloué d’indemnité de procédure en l’absence de frais encourus (art. 87 al. 2 LPA).

Le client du recourant n'étant pas partie à la procédure devant la chambre de céans, ni l'arrêt ni le dispositif ne lui seront notifiés. La tâche de l’en informer reviendra ainsi à la CBA (ATA/812/2021 du 10 août 2021 ; ATA/258/2021 du 2 mars 2021 et les références citées).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 22 mai 2024 par A______ contre la décision de la commission du barreau du 15 avril 2024 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ni alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à A______ ainsi qu’à la commission du barreau.

 

Siégeant : Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, présidente, Florence KRAUSKOPF, Jean-Marc VERNIORY, Patrick CHENAUX, Claudio MASCOTTO, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

J. PASTEUR

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. PAYOT ZEN-RUFFINEN

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :