Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public
ATA/332/2023 du 28.03.2023 ( EXPLOI ) , ACCORDE
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||
POUVOIR JUDICIAIRE A/116/2023-EXPLOI ATA/332/2023 COUR DE JUSTICE Chambre administrative Décision du 28 mars 2023 sur effet suspensif
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dans la cause
A______
représentée par Me Joël Chevallaz, avocat
contre
OFFICE CANTONAL DE L'EMPLOI
Vu le recours interjeté le 13 février 2023 devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) par A______ (ci-après : A______) contre la décision de l’office cantonal de l'emploi (ci-après : OCE) du 12 janvier 2023 l’assujettissant à la loi fédérale sur le service de l’emploi et la location de services du 6 octobre 1989 (LES - RS 823.11) dans le cadre de son activité de mise à disposition de chauffeurs sur la plateforme dite « Uber » et lui interdisant toute activité jusqu’à l’obtention de l’autorisation de pratiquer la location de services ;
que A______, inscrite au registre du commerce depuis le 1er septembre 2020, a conclu, principalement, à l’annulation de cette décision et au constat qu’elle n’était pas assujettie à la LSE ;
qu’elle expose avoir pour but en particulier l’exploitation d’une entreprise de transport de personnes et/ou d’objets avec chauffeur et disposer des autorisations requises au terme de la loi sur les taxis et les voitures de transport avec chauffeur du 13 octobre 2016 (LTVTC - H 1 31) ; qu’elle avait, avec Uber B.V., société à responsabilité de droit néerlandais, pour se conformer à l’arrêt du Tribunal fédéral 2C_34/2021 du 30 mai 2022, signé une convention de transfert et une convention cadre prévoyant la reprise par la première des activités de la seconde, de sorte que le 17 juin 2022, A______ était devenue l’employeuse unique des chauffeurs ; que depuis lors, les relations entre A______, Uber B.V. et Uber Switzerland GMBH étaient régies par un contrat commercial du 17 juin 2022 ; qu’il en ressortait qu’Uber, devenue simple diffuseur de courses, encaissait le prix des courses au nom et pour le compte de A______ qu’elle lui reversait sous déduction de la redevance pour l’utilisation de l’application ainsi que les services de diffusion et d’assistance ; que la redevance était calculée en fonction de la valeur des courses proposées aux chauffeurs par A______ au moyen de l’application que ces derniers utilisaient ; que chaque chauffeur employé par A______ se voyait attribuer un compte professionnel au sein de l’environnement A______ sur l’application Uber afin d’y accéder dans le cadre de son contrat de travail ;
que, sur effet suspensif, il convenait de relever, outre les chances de succès du recours, dans la mesure où elle considérait que son activité n’était pas soumise à la LSE, qu’il n’y avait pas d’urgence ni d’intérêt prépondérant légitime à rendre la décision immédiatement exécutoire ; que la situation actuelle ne prétéritait en rien les droits de ses employés, qui disposaient de la possibilité de travailler de manière « agile », selon un contrat de travail sur appel improprement dit, correspondant aux exigences des chauffeurs, tout en bénéficiant du salaire minimum genevois et des protections découlant du droit du travail (assurances sociales, perte de gain en cas de maladie, prévoyance professionnelle et création future d’une représentation des travailleurs) ;
que le 19 janvier 2023, la juge déléguée a admis, à titre superprovisionnel, la restitution de l’effet suspensif ;
que l’OCE s’est opposé le 30 janvier 2023 à la restitution de l’effet suspensif ;
qu’il a exposé que la société pratiquant la location de services devait fournir des garanties pour les prétentions salariales des employés, de sorte qu’il était normal que la décision de soumission à la LSE soit déclarée immédiatement exécutoire ; que le but de la loi était la protection des employés ; que les chances de succès du recours étaient extrêmement faibles, au vu des motifs de la décision querellée ; que le dommage subi par A______ serait purement financier ; qu’il lui était loisible d’éviter totalement un tel dommage en attendant que la situation juridique soit définitivement tranchée, étant relevé qu’elle avait mis l’autorité devant le fait accompli en commençant son activité sans solliciter une autorisation ni demander une décision de l’OCE constatant une éventuelle inapplication de la législation relative à son activité ; qu’au vu de son activité, à Genève, mais également dans le canton de Vaud, elle était clairement à l’abri de la faillite si son activité était suspendue à Genève jusqu’à droit jugé ; qu’il existait un intérêt prépondérant à ce que A______ n’obtienne pas le plein de ses conclusions sans attendre l’issue du recours sur le fond, sans quoi cela signifierait de facto que l’OCE n’aurait plus l’autorité de rendre des décisions d’assujettissement à la LSE, puisqu’il faudrait à chaque fois attendre une décision judiciaire la confirmant ; qu’il existait donc un intérêt prépondérant de l’autorité à faire respecter la loi ainsi que des chauffeurs à obtenir l’application concrète des protections voulues par le législateur et les partenaires sociaux (l’application de la convention collective de travail [ci-après : CCT] étendue) ;
que, le 13 mars 2023 s’est tenue devant la chambre administrative une audience de comparution personnelle des parties ;
que Monsieur B______, l’un des administrateurs et actionnaire de A______, a fourni des explications relatives au déroulement concret des activités des chauffeurs et à leurs conditions de travail ; que des relations étaient en cours avec C______ et D______ (D______), pour l’élaboration d’une CCT ; que plus de CHF 2'700'000.- de charges sociales avaient été acquittés pour le deuxième semestre de l’année 2022, le montant s’élevant à CHF 3'800'000.- au jour de l’audience ;
que par détermination subséquente du 20 mars 2023, l’OCE a réaffirmé qu’il existait un intérêt manifeste non seulement au respect de la loi, mais également à une exécution immédiate des décisions de l’État ; qu’au terme des contrats de travail, ses chauffeurs n’avaient aucun salaire minimal garanti, de sorte que si le retrait de l’effet suspensif était confirmé, A______ n’aurait aucun salaire à verser, économiserait les charges sociales y relatives et ne subirait aucun dommage ; qu’elle n’avait donc aucun motif de licencier ses chauffeurs ; qu’il lui serait loisible, en tant qu’exploitante d’une entreprise de transport, de continuer à œuvrer directement avec notamment des hôtels à Genève ; que les contrats de travail étant maintenus, les chauffeurs pourraient exercer pour A______ sans être loués ; que si un chauffeur souhaitait diversifier davantage son activité, cela lui serait plus aisé, puisque le marché du travail était très favorable, le taux de chômage étant au plus bas depuis 20 ans et de nombreux emplois dans ce domaine étant à pourvoir ; que A______ avait reconnu que l’OCE avait été diligent dans l’instruction de son dossier, de sorte qu’elle ne pouvait se prévaloir de bonne foi d’une quelconque tolérance de la pratique de son activité ; que le 7 décembre 2022, elle avait été avertie que sans demande déposée dans le délai imparti, l’OCE rendrait une décision qui pourrait être assortie du retrait de l’effet suspensif ; que le revirement de A______ qui, à mi-décembre 2022, avait indiqué ne pas vouloir déposer une demande d’autorisation à la LSE ne pouvait s’expliquer que par un changement complet de stratégie ; qu’en cas d’octroi de l’effet suspensif, une inégalité de traitement serait avérée à l’égard de sociétés œuvrant selon le même modèle et ayant notamment obtenu l’autorisation de pratiquer la location de service après avoir déposé un dossier complet ; restituer l’effet suspensif au motif que A______ comptait de nombreux employés créerait incontestablement un précédent dont d’autres sociétés se prévaleraient en engageant rapidement un nombre conséquent de collaborateurs pour justifier de commencer ou de poursuivre leur activité de location de services sans autorisation ;
que par observations du 20 mars 2023 également, A______ a relevé l’absence d’intérêt public à l’application immédiate de la LSE et d’urgence ; que refuser l’effet suspensif reviendrait à mettre 380 personnes au chômage, soit à la charge de l’État, ce qui irait à l’encontre du but de protection des travailleurs de cette loi, alors même qu’elle respectait toutes les normes légales, en particulier la LTVTC et celles relatives à la sécurité sociale ; que la progression du nombre de chauffeurs depuis le dépôt du recours démontrait leur satisfaction des conditions de travail proposées ; que dans le cadre de discussions avec certains syndicats et l’office cantonal de l’inspection et des relations du travail, un cadre prévoyant la rétribution des chauffeurs pour les éventuels temps de transition entre deux courses avait été mis en place, au quart d’heure ; que l’activité de A______ bénéficiait aussi à l’État, vu le montant de CHF 821'226.31 versé à ce jour à titre de TVA ; que les chances de succès de son recours existaient bel et bien ; qu’elle avait démontré gérer intégralement la relation contractuelle avec ses chauffeurs (engagement, licenciement, instructions données [dont sur le temps de travail maximum], contrôle du temps de travail par des logiciels informatiques, orientation des chauffeurs vers le meilleur itinéraire, indication des manifestations ou autres désagréments sur la route, leur donner ou couper l’accès à la plateforme dont elle louait les services à Uber ; qu’elle s’était montrée de bonne foi à l’égard de l’OCE qui ne l’avait pas informée qu’il demanderait un avis de droit au secrétariat d’État à l’économie (ci-après : SECO) à la fin du mois de novembre 2022 et lui avait pratiquement imposé au début du mois de décembre 2022, de déposer une demande d’assujettissement à la LSE, avec délai au 5 janvier 2023, nonobstant les congés de fin d’année, condition mise pour qu’elle puisse continuer son activité le temps que la décision soit rendue, soit une manière de faire qui n’était pas tolérable ; que l’OCE n’avait pas réagi jusqu’à la décision du 12 janvier 2023 et avait toléré son activité, de sorte qu’elle était légitimée à la poursuivre, du moins tant que le fond ne serait pas tranché ;
que, sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger sur effet suspensif ;
Considérant, en droit, l'art. 9 al. 1 du règlement interne de la chambre administrative de la Cour de justice du 26 mai 2020, à teneur duquel les décisions sur effet suspensif sont prises par la présidente de ladite chambre, respectivement par le vice-président, ou en cas d'empêchement de ceux-ci, par une juge ;
qu'aux termes de l'art. 66 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), sauf disposition légale contraire, le recours a effet suspensif à moins que l'autorité qui a pris la décision attaquée n'ait ordonné l'exécution nonobstant recours (al. 1) ; que toutefois, lorsque aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s'y oppose, la juridiction de recours peut, sur la demande de la partie dont les intérêts sont gravement menacés, retirer ou restituer l'effet suspensif (al. 3) ;
que, par ailleurs, l'art. 21 al. 1 LPA permet le prononcé de mesures provisionnelles, en exigeant au besoin des sûretés ;
que selon la jurisprudence constante de la chambre administrative, des mesures provisionnelles ne sont légitimes que si elles s'avèrent indispensables au maintien d'un état de fait ou à la sauvegarde d'intérêts compromis (ATF 119 V 503 consid. 3 ; ATA/1043/2020 du 19 octobre 2020 ; ATA/303/2020 du 19 mars 2020 ; ATA/503/2018 du 23 mai 2018) ;
qu'elles ne sauraient, en principe, anticiper le jugement définitif (Isabelle HÄNER, Vorsorgliche Massnahmen in Verwaltungsverfahren und Verwaltungsprozess in RDS 1997 II 253-420, 265) ni équivaloir à une condamnation provisoire sur le fond, pas plus qu’aboutir abusivement à rendre d’emblée illusoire la portée du procès au fond (arrêts précités) ;
qu’ainsi, dans la plupart des cas, les mesures provisionnelles consistent en un minus, soit une mesure moins importante ou incisive que celle demandée au fond, ou en un aliud, soit une mesure différente de celle demandée au fond (Isabelle HÄNER, ibidem) ;
que dans l’ATA/10/2023 du 10 janvier 2023, la chambre administrative a statué sur la requête de restitution d’effet suspensif et mesures provisionnelles d’une société, créée en avril 2022, employant 32 personnes à la livraison de repas, non rémunérées pendant les heures de permanence, utilisant pour ce faire la plateforme UberEats, société également assujettie par décision de l’OCE à la LSE et interdite de pratiquer toute activité tant qu’elle n’avait pas l’autorisation LSE ; que la chambre a retenu que celle-ci avait rendu vraisemblable qu’en cas de refus de restitution de l’effet suspensif, faute d’entrées d’argent, elle devrait licencier des livreurs ; que l’intérêt public manifeste au respect de la loi se trouvait en opposition avec celui de la préservation de l’emploi ; que la qualification de l’activité de la recourante et sa soumission à la LSE était une question complexe ; que les chances de succès du recours n’apparaissaient pas évidentes ; que les intérêts de l’État au respect sans délai de la LSE devaient ainsi l’emporter sur celui de la recourante à poursuivre son activité le temps de la procédure ; que les mesures provisionnelles, censées être l’exception ne pouvaient non plus être accordées ;
que dans une décision subséquente ATA/229/2023 du 8 mars 2023, la chambre administrative a admis la restitution de l’effet suspensif au recours formé par une société active dans la livraison de repas, utilisant la plateforme UberEats ; que la question juridique de fond, à savoir si l’activité telle que pratiquée par la recourante et ses livreurs ressortissait à la LSE ou non, était complexe et nécessitait une instruction plus approfondie ; que la réponse à cette question n’était pas évidente ; que l’intérêt public à l’exécution immédiate des décisions rendues par l’État était manifeste ; que, comme relevé dans la décision ATA/10/2023 précitée, cet intérêt devait être mis en balance avec les intérêts privés en jeu ; qu’à cet égard, l’intérêt privé de la recourante à pouvoir poursuivre son activité, pendant la durée de la procédure, était d’ordre purement financier ; que l’intérêt des employés à conserver leur emploi était également d’ordre financier pour ceux-ci ; qu’à la différence de l’arrêt cité ci-dessus, le nombre d’employés concernés en l’espèce était important ; qu’en outre – ce qui n’était pas non plus le cas dans la cause précitée –, le syndicat actif, notamment, dans le domaine du service de livraison de repas s’était fait l’écho de l’inquiétude exprimée par les employés face à la décision déclarée exécutoire nonobstant recours, leur sort étant susceptible de basculer pendant la durée de la procédure ; que les modalités du contrat de travail semblaient différer sur certains points d’avec celles prévalant dans le cas précité, notamment dans la gestion des plannings et l’organisation et la rémunération du temps d’attente ; qu’enfin, contrairement à la société précitée, créée récemment, la recourante était active depuis plus de deux ans et demi ; que le fait que la décision ait été déclarée immédiatement exécutoire impliquait la cessation immédiate de l’activité telle que pratiquée jusque-là par la recourante ; qu’au vu de la masse salariale versée chaque mois par la recourante, il était vraisemblable qu’elle devrait licencier ses livreurs si la présente requête était rejetée ; qu’en cas d’admission du recours, les employés seraient susceptibles à nouveau de se retrouver employés de la recourante ; qu’il existait ainsi un intérêt public et privé à éviter d’exposer un grand nombre de travailleurs à des revirements de situation importants, étant précisé que l’échange d’écritures était terminé et que l’instruction de la procédure en était à l’administration des preuves ; qu’à cela s’ajoutait que l’attitude de l’autorité intimée avait créé une attente légitime de la recourante que la décision ne serait pas déclarée exécutoire nonobstant recours ; qu’en effet, après une instruction de près de deux ans, l’OCE avait indiqué le 20 octobre 2022, après un échange ayant eu lieu en juillet 2022, qu’il maintenait sa position, qu’il fixait à la recourante un délai au 31 octobre 2022 pour toute observation complémentaire et que, passé ce délai, il rendrait une décision qui pourrait être assortie de l’effet suspensif ; qu’au vu de ces indications, la recourante pouvait, de bonne foi, partir de l’idée que la décision rendue quelques jours plus tard ne serait pas déclarée exécutoire nonobstant recours ;
que lors de l'octroi ou du retrait de l'effet suspensif, l'autorité de recours dispose d'un large pouvoir d'appréciation (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1161/2013 du 27 février 2014 consid. 5.5.1) ;
qu’en l’espèce, il convient en premier lieu de relever qu’en tant que la décision querellée assujettit la recourante à la LSE dans son activité de mise à disposition de chauffeurs pour le transport de personnes et/ou d’objets, en utilisant la plateforme Uber et lui interdit de pratiquer toute activité dans ce domaine tant qu’elle ne dispose pas d’une autorisation LSE, ladite décision comporte deux volets intimement liés ; qu’ainsi, la restitution de l’effet suspensif ou l’octroi de mesures provisionnelles ne saurait être admis ou rejeté sur un point seulement ;
qu’à cet égard, il est observé, comme la chambre de céans l’a dit dans l’ATA/10/2023 précité, que la question juridique de fond, à savoir si l’activité telle que pratiquée par la recourante et ses chauffeurs ressortit à la LSE ou non, est complexe et nécessite une instruction plus approfondie ; que la réponse à cette question n’est pas évidente ;
que l’intérêt public à l’exécution immédiate des décisions rendues par l’État est manifeste ;
que, comme relevé dans l’arrêt précité, cet intérêt doit être mis en balance avec les intérêts privés en jeu ;
qu’à cet égard, l’intérêt privé de la recourante à pouvoir poursuivre son activité, pendant la durée de la procédure, est d’ordre purement financier ;
que l’intérêt des employés à conserver leur emploi est également d’ordre financier ;
qu’à la différence du premier arrêt cité ci-dessus (ATA/10/2023), le nombre d’employés concernés en l’espèce est important ; que le sort de plusieurs centaines de chauffeurs est susceptible de basculer pendant la durée de la procédure ; que les modalités du contrat de travail semblent différer sur certains points d’avec celles prévalant dans le cas précité, notamment dans l’organisation et, désormais, la rémunération du temps d’attente ; qu’enfin, contrairement à la société précitée, créée récemment, la recourante est active depuis plus de deux ans et demi, à l’instar de celle de l’ATA/229/2023 ;
que le fait que la décision ait été déclarée immédiatement exécutoire implique la cessation immédiate de l’activité telle que pratiquée jusque-là par la recourante ; qu’au vu de la masse salariale versée chaque mois par la recourante, il est vraisemblable qu’elle devra licencier ses chauffeurs si la présente requête était rejetée. À cet égard, l’argumentation de l’OCE selon laquelle ces derniers n’auraient, à teneur de leur contrat de travail, pas de garantie d’un nombre d’heures leur permettant de leur assurer un salaire mensuel décent, de sorte que si le retrait de l’effet suspensif était confirmé, la recourante n’aurait aucun salaire à verser, économiserait les charges sociales y relatives et ne subirait aucun dommage, fait fi de l’intérêt des chauffeurs à conserver leur revenu ;
qu’en cas d’admission du recours, les employés seraient susceptibles à nouveau de se retrouver employés de la recourante ;
qu’il existe ainsi un intérêt public et privé à éviter d’exposer un grand nombre de travailleurs à des revirements de situation importants ;
que si la procédure a commencé le 17 juin 2022, c’est peu avant Noël et les relâches de fin d’année que l’autorité leur a fixé un délai au 5 janvier 2023 pour déposer leur demande d’autorisation, induisant une pression inutile ;
que la présente situation s’apparente davantage à celle ayant donné lieu à la décision ATA/229/2023 du 8 mars 2023 de restitution de l’effet suspensif qu’à la décision ATA/10/2023 précitée ;
qu’au vu de l’ensemble des éléments qui précèdent, il se justifie de faire droit à la requête et de restituer l’effet suspensif au recours ;
qu’il n’y a pas lieu de subordonner cette décision au versement de sûretés (art. 21 LPA), rien ne permettant de retenir que la recourante ne se conformera pas à l’arrêt à venir si elle devait succomber ;
qu’il est encore relevé que, contrairement à ce que fait valoir l’intimé, la présente décision ne consacre pas d’inégalité de traitement avec d’autres sociétés pratiquant le transport de personnes et/ou d’objets ou la livraison de repas s’étant vu notifier une décision d’assujettissement à la LSE et qui ne l’auraient pas contestée, dès lors qu’elles ne se trouvent pas dans la même situation qu’un administré ayant recouru contre la décision et que rien n’indique que les conditions de travail seraient identiques ; qu’il en va de même s’agissant de la société concernée par l’ATA/10/2023, dont il vient d’être exposé en quoi sa situation différait de celle de la recourante ;
qu’en conclusion, la requête de restitution d’effet suspensif sera admise ;
qu’il sera statué sur les frais de la présente décision dans l’arrêt au fond.
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE
restitue l’effet suspensif au recours ;
réserve le sort des frais de la procédure jusqu’à droit jugé au fond ;
dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;
communique la présente décision à Me Joël Chevallaz, avocat de la recourante ainsi qu'à l'office cantonal de l'emploi.
| La présidente :
F. Payot Zen-Ruffinen |
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Copie conforme de cette décision a été communiquée aux parties.
Genève, le
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| la greffière :
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