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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1297/2022

ATA/871/2022 du 30.08.2022 ( FPUBL ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1297/2022-FPUBL ATA/871/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 30 août 2022

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Romain Jordan, avocat

contre

VILLE DE GENÈVE



EN FAIT

1) Monsieur A______, né le ______ 1977, a été engagé le 25 mai 2005 par la Ville de Genève (ci-après : la ville) en qualité d'agent de sécurité municipale (ci-après : APM) au service des agents de ville et du domaine public.

Il a été affecté au poste de police des B______.

2) Le 25 septembre 2006, il a été promu au grade d'agent avec effet au 1er septembre précédent, fonction dans laquelle il a été confirmé le 27 août 2008, au terme de sa période d'essai de trois ans.

3) À compter du 1er mai 2009, la distinction d'appointé lui a été accordée.

4) À la suite de l'entrée en vigueur, le 31 décembre 2010, du nouveau Statut du personnel de la ville de Genève (ci-après : le statut) et de son règlement d'application (ci-après : REGAP), la fonction de M. A______ a été colloquée en classe F de la nouvelle échelle de traitement.

5) Dans le courant de l'année 2010, il a été affecté au poste de police des C______.

6) Entre décembre 2006 et mars 2011, M. A______ a postulé sans succès à plusieurs reprises à des postes de caporal ou de sergent.

7) À la suite d'une postulation en octobre 2013, il a été promu, par décision du 18 décembre 2013, au poste de caporal-chef de groupe, avec effet au 1er janvier 2014, une fonction classée dans la catégorie G de l'échelle de traitement.

8) Après la création dès le 1er janvier 2018 du service de la police municipale (ci-après : SPM), M. A______ y a été transféré, ce qui lui a été confirmé par courrier du 27 juin 2018.

9) À la suite de l'adoption du nouveau catalogue des fonctions avec effet au 1er septembre 2019, son poste a été rattaché à la fonction de caporal ou caporal de la police municipale, colloquée en classe H.

10) M. A______ a été absent pour cause de maladie non professionnelle du 12 décembre 2018 au 13 septembre 2020 et a alors réintégré son équipe au poste des C______.

11) Le 11 janvier 2021, il a postulé à la fonction de sergent-remplaçant chef de poste. Il a été informé, le 20 octobre 2021, qu'il n'avait pas été retenu pour ce poste.

12) M. A______ a intégré, dès sa création en juin 2021, l'unité « Bike police », une brigade spéciale se déplaçant uniquement à vélo.

13) Lors de son évaluation du 14 septembre 2021, étant relevé qu'il avait fait l'objet d'autres de ces entretiens durant sa carrière, il lui a été reproché par sa hiérarchie une tendance à remettre en question certains ordres et des difficultés à prioriser certaines tâches. Il lui avait été demandé d'augmenter considérablement ses interventions et la variété de ses rapports, d'augmenter ses compétences dans le domaine des procédures judiciaires, d'être attentif et de vérifier le travail d'îlotage de ses collaborateurs, ainsi que de fixer davantage d'objectifs à ces derniers.

M. A______ a signé cette évaluation du 14 septembre 2021, après y avoir ajouté des annotations manuscrites pour manifester son désaccord sur certains points. Il a ensuite adressé à sa hiérarchie des observations écrites le 29 septembre 2021, par lesquelles il contestait tant la manière dont l'entretien s'était déroulé que le contenu du rapport d'évaluation. Les deux personnes ayant procédé à cette évaluation, soit Messieurs D______, sergent-major chef de poste aux C______, et E______, sergent, devaient selon lui s'inscrire à la formation pour se préparer aux entretiens.

14) Le 12 octobre 2021, Madame F______, commandante et cheffe du SPM, a indiqué avoir pris note de cette évaluation et des observations de M. A______. Les points à améliorer étaient la base du désaccord avec ses responsables hiérarchiques directs. Ces points étaient étayés par des éléments factuels. Pour sa nouvelle affectation aux G______, il était nécessaire que M. A______ entreprenne une remise en question afin de repartir sur des bases saines et pouvoir avoir des échanges constructifs.

15) Cette nouvelle affectation dès le mois d'octobre 2021 tenait compte, selon sa hiérarchie, de sa préférence pour un horaire diurne.

16) Depuis son arrivée au poste des G______, il a stationné son vélo à l'intérieur du bâtiment, ce que Monsieur H______, sergent-major, avait constaté dès le 6 octobre 2021.

17) Le lendemain, Monsieur I______, caporal et remplaçant chef de poste ad intérim, lui avait demandé de mettre son vélo au garage à vélos. En effet, selon la ville, si la pratique de stationner des vélos à l'intérieur des postes de police avait pu être tolérée dans le passé lorsque lesdits postes ne disposaient pas d'un local sécurisé, cela n'avait jamais été le cas aux G______. Par ailleurs, Mme F______ avait rappelé oralement, lors de ses visites dans les postes de quartier à la fin de l'année 2020 et au début de l'année 2021, que cette pratique était désormais interdite dans tous les postes.

M. A______ était allé consulter M. H______ sur cette problématique en lui disant que son vélo valait très cher et qu'il ne pouvait pas le laisser dehors. M. H______ lui avait répondu que malgré cela, il n'était pas prévu que les agents stationnent leur vélo à l'intérieur du poste, de sorte qu'il devait descendre le sien au garage. Il avait toutefois proposé d'installer une accroche au mur, pour sécuriser encore davantage son vélo.

18) Le 8 octobre, le vélo de M. A______ se trouvait dans les vestiaires puis, le 11 octobre 2021, au rez-de-chaussée à proximité des guichets.

19) Cette situation a conduit M. H______ à lui écrire un courriel, le 11 octobre 2021, par lequel il lui a demandé de déplacer son vélo et d'utiliser le garage à vélos tout en l’avertissant qu'il lui appartenait de respecter la consigne pourtant déjà discutée oralement.

20) Le lendemain, le vélo de M. A______ se trouvait stationné dans le poste. M. I______ a donc demandé derechef à M. A______ d'utiliser le garage à vélos.

21) Par courriel du 14 octobre 2021, M. A______ s'est plaint de son accueil au poste des G______ et de la tenue dudit poste. Il a répété les raisons pour lesquelles il n'entendait pas laisser son vélo, au vu de sa valeur, à l'extérieur ou dans le local, au vu de l'insalubrité de ce dernier et de son manque de sécurité.

22) Le 14 octobre 2021 encore, M. H______, constatant que ce vélo était à nouveau entreposé dans le poste, a reçu M. A______ dans son bureau et lui a demandé à nouveau de descendre ce véhicule au garage, à défaut de quoi il rédigerait une note de service.

M. A______ ayant refusé d'accéder à cette demande, M. H______ a adressé une note de service à Monsieur J______, premier-lieutenant, récapitulant les épisodes précités, en vue du prononcé de mesures disciplinaires.

23) MM. J______ et H______ ont reçu M. A______ en entretien le 20 octobre 2021 et lui ont soumis la note de service précitée du 14 octobre précédent. Ils l'ont sommé de respecter les ordres reçus au sujet de son vélo.

24) Le 21 octobre 2021, M. I______ a informé M. J______ de la présence du vélo litigieux dans le poste.

25) Par courriel du 22 octobre 2021, M. J______, tout en joignant la note de service précitée, a sommé M. A______ de respecter sans délai les ordres reçus de sa hiérarchie.

À cette même date, M. I______, constatant que le vélo de M. A______ était toujours entreposé dans le poste, a intimé ce dernier de le mettre ailleurs.

26) À l'occasion, le 26 octobre 2021, d'une séance avec les chefs de poste et remplaçants chef de poste, Mme F______ a rappelé à ces derniers que les véhicules privés à mobilité douce, soit les vélos, trottinettes, etc., ne devaient pas être stationnés dans les différents espaces de travail des postes de quartier, à savoir les bureaux, violons, etc., mais sur la voie publique ou dans les garages à vélos sécurisés gracieusement mis à disposition par la ville afin de favoriser la mobilité douce.

Le procès-verbal de cette séance a été transmis par courriel du 29 octobre 2021 à tout le personnel du poste des G______.

27) Les 28 et 29 octobre 2021, puis 3 et 4 novembre 2021, le vélo de M. A______ était entreposé dans le poste des G______, au rez-de-chaussée.

28) MM. H______ et I______ ont reçu M. A______ le 3 novembre 2021, dans le bureau du premier, afin de lui demander s'il avait pris connaissance du rapport de la séance du 26 octobre 2021. Celui-ci a répondu que tel était le cas, mais que c'était un refus d'ordre.

29) MM. H______ et I______ ont adressé le 5 novembre 2021 une note de service à Mme F______ afin de l'informer dudit entretien et du refus d'ordre, note qui a été remise à M. A______ le même jour mais qu'il a refusé de signer.

30) Par courriel du 5 novembre 2021, M. A______ a démissionné, avec effet immédiat, de la « Bike police », ce dont Mme F______ a pris acte le 26 novembre 2021.

31) M. A______ a été informé par courrier du 19 novembre 2021 que Mme F______ envisageait de prononcer un avertissement à son encontre en raison de son refus de respecter les ordres reçus. Il était convoqué à une audition le 26 novembre 2021 dans les bureaux de l'état-major, en présence de Mme F______, de M. J______ et de la gestionnaire des ressources humaines du service.

32) Lors de cet entretien du 26 novembre 2021, M. A______ a indiqué ne pas comprendre « l'acharnement » dont il faisait l'objet, puisqu'il répondait aux stratégies du Conseil administratif en adoptant une mobilité douce. Son vélo ayant une grande valeur, il refusait de le stationner dans le garage à vélos, craignant qu'il ne soit volé ou abîmé. Il appartenait à la ville de mettre à disposition un garage à vélo correctement sécurisé.

33) Le 6 décembre 2021, Mme F______ a prononcé un avertissement à l'encontre de M. A______ au motif que son attitude était incompatible avec les obligations lui incombant en qualité de caporal-chef de groupe au sein du SPM. Il avait contrevenu aux devoirs généraux de tout membre du personnel d'entretenir des relations dignes et respectueuses avec ses supérieurs hiérarchiques, de se conformer aux règlements et directives le concernant, de même qu'aux instructions de ses supérieurs hiérarchiques et d'exécuter les ordres avec conscience et discernement. Son comportement violait par ailleurs le devoir de l'exemplarité que l'on pouvait attendre d'un caporal-chef de groupe.

Cette décision, envoyée par pli recommandé, étant revenue à son expéditeur à l'issue du délai de garde, Mme F______ a demandé à M. A______, par courriel du 7 janvier 2022, d'indiquer s'il était toujours domicilié à la rue K______, Genève et, dans la négative, d'annoncer son changement d'adresse.

34) M. A______ a recouru le 5 janvier 2022 auprès du Conseil administratif contre cet avertissement, concluant à son annulation et à ce qu'un délai raisonnable lui soit octroyé pour trouver un local sécurisé à l'extérieur. Par ailleurs, des sanctions devaient être prononcées à l'encontre de M. H______, Mme F______ et M. J______ en raison de leurs manquements en leur qualité de supérieurs hiérarchiques.

35) Le 15 février 2022, M. A______ a annoncé son changement d'adresse privée sur le portail RH interne, à savoir rue L______, Genève.

36) Le Conseil administratif a rejeté le recours par décision du 9 mars 2022.

Il était retenu le stationnement du vélo personnel de M. A______ dans les locaux du poste, à savoir dans le couloir, les vestiaires ou dans les bureaux, du 6 octobre au 6 décembre 2021 et le refus de stationner ledit vélo dans le local ad hoc, comme cela lui avait été demandé à plusieurs reprises par sa hiérarchie depuis mi-octobre 2021, et nonobstant le rappel de Mme F______ du 26 octobre 2021, dont le procès-verbal lui avait été transmis.

S'il avait reconnu avoir ainsi entreposé son vélo personnel dans le poste, il ne pouvait se prévaloir d'une inégalité de traitement avec des collègues, au demeurant non démontrée, qui l'auraient fait par le passé ou le feraient encore, étant rappelé que cette pratique était formellement interdite depuis le rappel de l'interdiction par Mme F______ le 26 octobre 2021. Il n'y avait en tout état pas d'égalité dans l'illégalité.

Quand bien même le Conseil administratif était conscient de l'investissement dans la « Bike police » ainsi que des efforts et de la rigueur qu'exigeait le cyclisme de compétition au niveau tel que M. A______ le pratiquait, le soutien qu'il réclamait ne pouvait consister en une autorisation à transgresser les règles applicables, ce d'autant plus que son domicile se trouvait par le passé à quelques minutes à pied du poste des G______. Contrairement à ce qu'il prétendait, la serrure du local à vélo du poste n'était pas défaillante et il était suffisamment vaste pour accueillir le sien. Il n'avait pas donné suite à la proposition d'installer une accroche. S'il était libre de ne pas stationner son vélo dans ce local, il ne l'était pas de le faire ailleurs au sein du poste comme il continuait à le faire au jour de la décision.

Sa hiérarchie avait procédé à plusieurs rappels à l'ordre avant de mener une procédure de sanction disciplinaire dans le respect des dispositions et principes applicables. Certes, le stationnement non conforme de son vélo engendrait des conséquences, dont la portée était limitée. Il en était en revanche autrement des violations à ses devoirs de service, lesquels étaient d'une certaine gravité pour un collaborateur membre du corps de la police municipale et ayant une position hiérarchique élevée.

Ses accusations contre sa hiérarchie étaient infondées et considérées comme une manière très critiquable de justifier ses refus d'ordre. Le procédé démontrait surtout son absence totale de remise en question et son incapacité à se soumettre à l'autorité, a fortiori en cas de désaccord.

Ainsi, aucun élément ne justifiait son comportement, qu'il avait adopté de manière durable et nonobstant de nombreux rappels à l'ordre, inadéquat et défiant l'autorité de la hiérarchie en dépit de son devoir d'exemplarité accru de sa part au vu de sa position de caporal, chef de groupe.

37) M. A______ a formé recours contre cette décision par acte expédié à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) le 25 avril 2022. Il a conclu préalablement à ce qu'il soit ordonné au département de produire le dossier de la cause, à l’ouverture d’enquêtes, à la comparution personnelle des parties, et à l'audition en qualité de témoins de Messieurs M______,N______ et O______. Il a conclu à titre principal à l'annulation de la décision du 9 mars 2022, de même qu'à celle de l'avertissement prononcé le 6 décembre 2021.

Dans le cadre de ses différentes affectations, il avait toujours exercé son activité de manière consciencieuse et efficace, à la pleine et entière satisfaction de sa hiérarchie, qui lui reconnaissait à ce jour des qualités indéniables, notamment en matière de communication et de gestion de groupe, comme l'attestait encore l'entretien d’évaluation et de développement du personnel (EEDP) réalisé le 14 septembre 2021. Il était passionné depuis plus de vingt ans par le cyclisme de compétition qu'il pratiquait assidûment au niveau élite, soit semi-professionnel. Il s'était activement investi dans la brigade « Bike police » et avait dispensé des formations, en sa qualité d'instructeur, à ses collègues, outre l'organisation de démonstration à l'attention des citoyens, de conseillers municipaux et d'autres membres de la fonction publique. Depuis son entrée dans le corps de police en 2005 jusqu'à ce jour, il s'entraînait quotidiennement et continuait d'employer ce mode de transport qui s'inscrivait dans la lignée de la politique de mobilité douce prônée par la ville. Afin d'arriver à l'heure au poste après sa séance d'entraînement matinal ou de se rendre à son entraînement une fois sa journée terminée, il entreposait son vélo sur son lieu de travail en prenant soin de le ranger dans un endroit où sa présence ne dérangeait personne.

À son arrivée au poste des G______ le 6 octobre 2021, il n'avait trouvé aucun endroit susceptible d'accueillir son cycle de compétition, d'une valeur de plus de CHF 10'000.-, le local prévu à cet effet au sous-sol se trouvant dans un état insalubre et une vis manquant à la serrure de sa porte d'entrée. Sa sécurité n'était donc pas garantie. La ville l'avait par ailleurs informé qu'en cas de vol sans effraction, aucun objet ne serait remboursé, comme en cas d'endommagement de son vélo à l'intérieur de ce local. Il avait dès lors dû déposer son cycle, pour la durée de son emménagement, dans un couloir, dans l'attente de trouver une solution à plus long terme, étant précisé que son vélo n'entravait nullement le passage des employés du poste.

Malgré cette absence de gêne, il avait reçu un avertissement formel de M. H______ par courriel du 11 octobre 2021 pour refus de respecter les consignes, étant précisé que son vélo était alors disposé dans un bureau désaffecté depuis des mois en raison de travaux. Il avait préalablement, le 7 octobre 2021, pris l'initiative de s'entretenir avec M. H______ pour une recherche de solution mutuelle tenant compte de sa situation personnelle. Il avait alors abordé l'absence d'une vis à la serrure du local à vélos, le signalement de collègues selon lesquels ledit local n'était régulièrement pas fermé à clé et l'absence d'autres moyens de déplacement pour se rendre à son entraînement. Dans son courriel du 14 octobre 2021 à M. H______, « il n'avait pu s'empêcher » de relever un problème d'organisation dans le poste, qui se traduisait notamment par une insalubrité des locaux et un manque de sécurité du garage à vélos. Il avait proposé son aide pour remédier à cette situation. M. H______ avait réitéré sa position lors de l'entretien qu'il avait convoqué le 14 octobre 2021, soulignant qu'en cas de refus il rédigerait une note de service. Lors de la séance du 26 novembre 2021 précitée, il avait rappelé l'existence d'une pratique générale tolérée dans le poste des G______ notamment, depuis de nombreuses années, et on lui avait répondu que « l'on parlait de lui ».

MM. J______ et H______ avaient aussi déclaré qu'ils n'avaient jamais autorisé le stationnement des vélos à l'intérieur du poste. Or, M. J______, lorsqu'il était responsable au poste de la P______, entreposait son vélo dans son bureau, de même qu'un banc de musculation et une machine de fitness elliptique. Il autorisait ses collègues à ranger leur vélo dans le poste. M. H______ avait autorisé « un collègue » à déposer le sien dans le poste des G______.

Son droit d'être entendu avait été violé à maints égards. Ainsi, la décision litigieuse indiquait que le stationnement des vélos avait été formellement interdit depuis environ une année par Mme F______, sans toutefois faire référence à un quelconque règlement ou une directive. Le dossier de l'autorité intimée était incomplet, puisqu'il ne contenait pas « notamment » le procès-verbal de la séance du 26 octobre 2021 où il lui aurait été rappelé cette interdiction. Lors des séances des 20 octobre et 26 novembre 2021, au terme desquelles aucun procès-verbal n'avait été émis, de même que dans le cadre de ses tentatives de discussions avec M. H______, il n'avait bénéficié d'aucune écoute et s'était vu opposer un refus systématique de trouver une solution alternative. En l'absence de tels procès-verbaux, il était privé de la possibilité de se prononcer en connaissance de cause. La décision attaquée était muette sur la manière dont l'autorité aurait recueilli les renseignements selon lesquels la serrure n'était pas défaillante et le local à vélos suffisamment vaste pour accueillir le sien. Cette information ne lui avait pas été transmise préalablement à la décision querellée. Il devait donc être retenu que ces deux éléments n'étaient pas contestés.

La décision litigieuse violait le principe de la légalité. Il n'existait en effet aucune trace écrite d'une interdiction formelle de Mme F______ de stationner des vélos à l'intérieur des postes de police « depuis environ une année ». Un rappel de cette « règle » avait été effectué lors de la séance du 26 octobre 2021, « dont le procès-verbal [lui] avait été communiqué » (sic). Cette séance était toutefois postérieure à l'avertissement du 11 octobre 2021 et à la rédaction de la note de service du 14 octobre 2021. Ainsi, à aucun moment il ne s'était vu communiquer l'existence d'une quelconque loi, directive, règlement ou circulaire interdisant de manière générale le fait qui lui était reproché, et pour cause, dès lors qu'il n'existait rien de tel. L'existence d'une telle interdiction formelle serait d'autant plus surprenante vu la pratique des agents de police courante et tolérée depuis de nombreuses années consistant à entreposer leur vélo dans les locaux des postes comme exposé s'agissant de MM. H______ et J______ qui n'avaient jamais reçu le moindre avertissement. À cet égard, l'autorité intimée ne pouvait se prévaloir de l'absence « d'égalité dans l'illégalité », dès lors que rien ne fondait le caractère prétendument illicite de l'acte en cause. Sa décision instaurait une inégalité de traitement à son endroit.

L'autorité intimée avait abusé de son pouvoir d'appréciation en infirmant ses constatations selon lesquelles le local à vélos était insalubre, qu'une vis manquait à la serrure et en contredisant celle selon laquelle son vélo ne causait aucune gêne là où il le stationnait. Il s'agissait de « jugements de valeur » ne reposant sur aucune considération pertinente. Cet argument était d'autant plus erroné qu'il avait fourni des photos à l'appui de ses allégations. Soutenir qu'il pourrait se déplacer à pied depuis son domicile était dépourvu de pertinence dans le cadre du litige et confinait presque à l'atteinte à la personnalité.

Le principe de la bonne foi avait été violé dans la mesure où l'autorité intimée n'avait nullement pris en considération sa situation personnelle, notamment le fait que la présence de son vélo lui permettait de disposer du temps nécessaire pour se rendre à son entraînement, ni ne l'avait aidé à trouver une solution au problème auquel il se trouvait confronté, malgré ses demandes réitérées. Elle faisait preuve de mauvaise foi en lui reprochant d'entreposer son vélo dans un bureau désaffecté alors même que cela n'occasionnait pas la moindre gêne. Ce reproche était d'autant plus contraire à la bonne foi que cette pratique était tolérée depuis de nombreuses années au sein du poste des G______, quelques jours encore avant son arrivée. L'autorité intimée ne pouvait à la fois tirer avantage de son talent et de ses connaissances en matière de cyclisme et prôner activement l'emploi du vélo comme moyen de transport tout en le sanctionnant en raison de l'entreposage de son vélo faute d’un quelconque endroit de stationnement sécurisé.

La sanction violait le principe de proportionnalité pour avoir été prononcée pour le simple fait d'avoir entreposé son vélo dans un bureau désaffecté. Elle faisait montre d'une absence de flexibilité totale à l'égard de sa situation personnelle. Elle n'était pas propre à servir l'intérêt public, dès lors qu'elle n'avait pas la moindre incidence sur le fonctionnement du poste, ses prestations ni sur les conditions de travail de ses employés. Cette démarche était même en contradiction avec l'intérêt public, dans la mesure où son choix de se déplacer uniquement vélo était en adéquation avec les objectifs de mobilité douce. À l'inverse, cette décision portait atteinte à ses intérêts, dès lors qu'elle avait pour seul effet de le contraindre à ne plus se déplacer en vélo sur son lieu de travail et partant de le priver du laps de temps nécessaire pour se rendre à ses entraînements. Il avait insisté sur le fait qu'il ne disposait pas d'autres moyens de déplacement. Ainsi, la réponse de l'autorité intimée à des faits de si faible gravité avait pour effet de nuire à sa réputation et à son avenir professionnel, étant rappelé qu'il avait été écarté de la course pour accéder au poste de remplaçant chef de poste. D'autres mesures aux conséquences moins préjudiciables étaient à disposition telles la réparation de la serrure défectueuse et la remise en état du local à vélo.

38) Le département a conclu, le 10 juin 2022, au rejet du recours, produisant soixante et une pièces à l'appui de sa réponse. Le procès-verbal de la séance du 26 octobre 2021 avait été transmis au recourant par courriel le 29 octobre 2021 et faisait partie du chargé de pièces.

Si la chambre administrative estimait nécessaire d'ouvrir des enquêtes, il concluait à l'audition de MM. J______ et H______.

Il était relevé au niveau factuel que M. A______ utilisait un vélo mis à disposition par son employeur pour patrouiller. Il lui appartenait de s'organiser de manière à ce que ses activités extra professionnelles n'aient aucun impact sur son travail ou ses collègues. Jusqu'à son déménagement à une date indéterminée entre le mois de décembre 2021 et le 2 février 2022, il était domicilié à trois minutes à pied du poste, de sorte qu'il pouvait stationner son vélo chez lui. La ville n'était nullement obligée de fournir un local à vélos à chacun des employés, étant relevé que celui du poste des G______ était parfaitement sécurisé et fermé à clé et que seuls les employés y avaient accès. S'il était exact que dans certains postes ne disposant pas d'un tel local il était auparavant toléré que des agents de police y déposent leur cycle, il s'agissait d'une tolérance et non d'un droit. Tous les agents dont M. A______ demandaient l'audition avaient d'ailleurs travaillé au poste de la P______. Cette ancienne pratique n'était plus tolérée et ne l'avait au demeurant jamais été dans le poste des G______, peu importe à cet égard que le vélo de M. A______ ne dérange prétendument personne. Le fait que ledit vélo ait une certaine valeur n'était pas le problème du SPM. L'ordre de service « Strates de commandement » du 13 janvier 2021, produit, mentionnait que le caporal-chef de groupe devait notamment se comporter de manière exemplaire, fédératrice, encadrante, équitable et impartiale.

Le département a ensuite traité chacun des griefs de M. A______. Il y sera revenu ci-dessous, dans la partie en droit, dans la mesure nécessaire au traitement du recours.

39) Dans sa réplique du 13 juillet 2022, M. A______ a relevé que la pratique de déposer les cycles dans les postes était tolérée de longue date, y compris dans le poste des G______. Les auditions de Messieurs M______, N______ et O______ permettraient de confirmer que M. H______ avait autorisé un collègue à le faire. Dès son arrivée au poste, il ne s'était vu proposer aucun endroit susceptible d'accueillir son cycle et sa hiérarchie s'était immédiatement positionnée dans une attitude de dénégation sans faire preuve de la moindre flexibilité à son égard. Il revenait sur le fait que le département faisait totalement abstraction, sans motif valable, de ses constats, à savoir du manque d'une vis à la serrure du local et son insalubrité, outre qu'il était régulièrement laissé ouvert, ce que les trois personnes précitées pourraient confirmer. La proposition d'une accroche murale n'y apportait aucune solution.

Il n'avait jamais été informé de l'existence d'une quelconque loi, directive, règlement ou circulaire interdisant de manière générale le fait qui lui était reproché. Si une telle interdiction devait déjà être en vigueur avant le rappel du 26 octobre 2021, on peinait à comprendre les raisons pour lesquelles cette pratique était tolérée jusqu'à son arrivée au poste des G______. L'observation du département quant à la possibilité de se déplacer à pied au travail était malvenue en ce qu'outre son propre déménagement, elle dépassait le cadre du litige.

40) Les parties ont été informées, le 20 juillet 2022, que la cause était gardée à juger tant sur la demande d'actes d'enquête que sur le fond.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a et 63 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le litige porte sur la confirmation par le Conseil administratif, le 9 mars 2022, de l'avertissement prononcé le 6 décembre 2021 par la commandante et cheffe de service du SPM en lien avec le stationnement du vélo personnel du recourant sur son lieu de travail.

3) Le recourant se plaint d'une violation de son droit d'être entendu par l'autorité intimée en amont de la décision querellée sous plusieurs aspects.

a. Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé d’offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l’administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 142 III 48 consid. 4.1.1 ; 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 1B_539/2019 du 19 mars 2020 consid. 3.1 ; 2C_203/2019 du 4 juillet 2019 consid. 2.1 et les arrêts cités). Le droit de faire administrer des preuves n’empêche cependant pas le juge de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s’il acquiert la certitude que celles-ci ne l’amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 145 I 167 consid. 4.1. ; 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_41/2020 du 24 juin 2020 consid. 5.1.1 ; 2C_203/2019 du 4 juillet 2019 consid. 2.1 ; ATA/631/2020 du 30 juin 2020 consid. 2 a et les arrêts cités). Le droit d'être entendu ne contient pas non plus d’obligation de discuter tous les griefs et moyens de preuve du recourant ; il suffit que le juge discute ceux qui sont pertinents pour l'issue du litige (ATF 141 III 28 consid. 3.2.4 ; arrêts du Tribunal fédéral 9C_245/2020 du 12 juin 2020 consid. 3.2.1 ; ATA/631/2020 du 30 juin 2020 consid. 2a).

b. Selon la maxime inquisitoire, qui prévaut en particulier en droit public, l'autorité définit les faits pertinents et ne tient pour existants que ceux qui sont dûment prouvés ; cette maxime oblige notamment les autorités compétentes à prendre en considération d'office l'ensemble des pièces pertinentes qui ont été versées au dossier. Elle ne dispense pas pour autant les parties de collaborer à l'établissement des faits ; il incombe à celles-ci d'étayer leurs propres thèses, de renseigner le juge sur les faits de la cause et de lui indiquer les moyens de preuves disponibles, spécialement lorsqu'il s'agit d'élucider des faits qu'elles sont le mieux à même de connaître (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_649/2020 du 10 novembre 2020 consid. 6.4).

c. En l'espèce, le recourant ne contredit pas l'autorité intimée lorsqu'elle soutient qu'elle n'a, en tant qu'employeur, aucune obligation de mettre à disposition un local à vélos pour ses collaborateurs, servant à leur seul usage privé, ni que certains postes de SPM n'en sont pas pourvus, à l'instar de celui de la P______. Dans ces circonstances, l'autorité intimée n'avait pas à démontrer plus avant que le local qu'elle met à bien plaire à disposition de ses employés du poste des G______ serait conforme à leurs attentes, et en particulier à celles du recourant, en matière de sécurité et de propreté.

Dans ces conditions, l'autorité n'avait pas à motiver davantage son point de vue et sa décision sur ce point, de sorte que le droit d'être entendu du recourant n'a pas été violé. Au demeurant, celui-ci a pu, dans le cas de la présente procédure, présenter tous les arguments et les pièces nécessaires en lien avec les particularités du local à vélo concerné.

Le recourant fait aussi grief à la décision litigieuse d'indiquer que le stationnement des vélos à l'intérieur des postes avait été formellement interdit par la commandante « depuis environ une année », sans se référer un quelconque règlement ou une directive. Il sera néanmoins vu ci-dessous que nonobstant l'absence d'une base légale explicite sur ce point, l'autorité intimée était légitimée à demander au recourant, dès son entrée au poste des G______ le 6 octobre 2021, de ne pas stationner son vélo à l'intérieur des locaux.

Le recourant reproche encore à l'autorité intimée de ne pas avoir établi de procès-verbal à la suite de la séance avec la commandante du 26 novembre 2021. Il ressort néanmoins de sa convocation du 9 novembre 2021 audit entretien qu'il a été question d'y aborder la problématique du stationnement de son vélo personnel dans le couloir, les vestiaires ou encore dans les bureaux auprès du guichet du poste de police des G______, nonobstant plusieurs constats et mises en demeure de cesser cette pratique, depuis le 7 octobre 2021, de la part de son supérieur hiérarchique et ayant donné lieu au rapport du 14 octobre 2021 dont il avait pu prendre connaissance. Surtout, la tenue d’un procès-verbal n’est pas obligatoire en l’absence de contentieux (art. 20 al. 3 LPA a contrario ; ATA/27/2022 du 11 janvier 2022 ; Stéphane GRODECKI/Romain JORDAN, Code annoté de procédure administrative genevoise, 2017, p. 97 n. 357).

Enfin, le recourant ne remet pas en cause le fait que cette même problématique était au cœur de la séance du 20 octobre 2021 et que ses deux supérieurs hiérarchiques lui ont alors soumis la note de service du 14 octobre 2021. Celle-ci figure dans le chargé de pièces produits par le département.

Il ressort de tous ces éléments qu'au moment du prononcé de la décision litigieuse, le recourant savait pertinemment de quoi il en retournait. Son grief d'une violation d'être entendu sous cet aspect doit être écarté.

Tel doit être également le cas d'une supposée violation de ce droit sous l'angle d'un refus systématique qui lui aurait été opposé par sa hiérarchie de trouver une solution alternative. Une telle solution lui a en effet été proposée, en particulier par la fixation d'une accroche au mur ou au plafond du local à vélos mis gracieusement à disposition, laquelle aurait permis de sécuriser davantage son vélo. En tout état, dans la mesure où, comme déjà dit, la mise à disposition d'un tel local n'est pas une obligation de son employeur, il ne peut être fait grief à ce dernier de ne pas avoir davantage cherché de solution à son problème.

4) Le recourant a conclu à la production, par la partie intimée, de l'intégralité de son dossier personnel et à son audition de même qu'à celle de trois de ses collègues. En réponse et pour autant que nécessaire au traitement du litige, l'autorité intimée a requis l'audition de deux supérieurs hiérarchiques du recourant, actifs au poste des G______.

En l'espèce, l'autorité intimée a produit soixante et une pièces à l'appui de sa réponse, dont nombre de pièces du dossier personnel du recourant et a démontré, sans être contredite, avoir adressé le procès-verbal de la séance du 26 octobre 2021 au poste des G______, par courriel du 29 octobre 2021. Elle a de plus produit ce procès-verbal à la présente procédure. Dans sa réplique, le recourant n'indique pas quelle pièce manquerait encore au dossier pour que la chambre de céans puisse statuer en toute connaissance de cause.

Il ne remet pas en cause le fait qu'il n'existe aucune obligation de son employeur de mettre à disposition un local pour stationner des vélos privés, ni ne démontre qu'il aurait un droit, en l'absence ou en présence d'un tel local, d'entreposer un vélo privé dans les locaux d'un poste de police. Dans ces conditions, il n'est pas besoin d'instruire plus avant les conditions dans lesquelles, par le passé, puisqu'il n'est pas allégué que tel serait encore le cas, d'autres collègues, que ce soit dans le poste de la P______ ou des G______, auraient eu l'occasion d'y stationner leur vélo.

Enfin, le recourant, qui n'a pas de droit à une audition orale, a pu exprimer son point de vue longuement dans ses diverses écritures, devant l'autorité intimée et la chambre de céans, de sorte qu'il n'est pas utile qu'il vienne une nouvelle fois exprimer ses arguments oralement.

Il ne sera dans ces conditions pas donné de suite favorable aux demandes d'actes d'instruction des parties, actes qui ne sont pas nécessaires pour trancher le litige.

5) Le recourant conteste le principe d'une sanction, en l'espèce un avertissement. Il considère que l'autorité a abusé son pouvoir d'appréciation et violé les principes de la légalité, de l'égalité de traitement et de la bonne foi.

Selon l’art. 61 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès ou l’abus du pouvoir d’appréciation (al. 1 let. a), ainsi que pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (al. 1 let. b). Les juridictions administratives n’ont toutefois pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (al. 2), non réalisée en l’espèce.

Il n’en résulte toutefois pas que l’autorité est libre d’agir comme bon lui semble (ATA/1300/2021 du 30 novembre 2021 consid. 6). Il y a abus du pouvoir d’appréciation lorsque l’autorité, tout en restant dans les limites du pouvoir d’appréciation qui est le sien, se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou viole des principes généraux de droit tels que l’interdiction de l’arbitraire et de l’inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_37/2020 du 7 septembre 2020 consid. 5.1).

6) a. À teneur de l’art. 5 al. 1 Cst., le droit est la base et la limite de l’activité de l’État. Le principe de la légalité se compose de deux éléments : le principe de la suprématie de la loi et le principe de l’exigence de la base légale. Le premier signifie que l’autorité doit respecter l’ensemble des normes juridiques ainsi que la hiérarchie des normes. Le second implique que l’autorité ne peut agir que si la loi le lui permet, son action devant avoir un fondement dans une loi (ATA/43/2022 du 18 janvier 2022 consid. 5).

Le principe de la légalité exige donc que les autorités n’agissent que dans le cadre fixé par la loi (ATF 147 I 1 consid. 4.3.1). Il implique qu’un acte étatique se fonde sur une base légale matérielle qui est suffisamment précise et qui a été adoptée par l’organe compétent (ATF 141 II 169 consid. 3.1). L’exigence de la densité normative n’est pas absolue, car on ne saurait ordonner au législateur de renoncer totalement à recourir à des notions générales, comportant une part nécessaire d’interprétation. Cela tient à la nature générale et abstraite inhérente à toute règle de droit et à la nécessité qui en découle de laisser aux autorités d’application une certaine marge de manœuvre lors de la concrétisation de la norme. Pour déterminer quel degré de précision on est en droit d’exiger de la loi, il faut tenir compte du cercle de ses destinataires et de la gravité des atteintes qu’elle autorise aux droits fondamentaux (ATF 140 I 381 consid. 4.4 et les références citées ; ATA/358/2022 du 5 avril 2022 consid. 5b).

b. Une décision ou un arrêté viole le principe de l’égalité de traitement consacré à l’art. 8 al. 1 Cst. lorsqu’il établit des distinctions juridiques qui ne se justifient par aucun motif raisonnable au regard de la situation de fait à réglementer ou qu’il omet de faire des distinctions qui s’imposent au vu des circonstances, c’est-à-dire lorsque ce qui est semblable n’est pas traité de manière identique et ce qui est dissemblable ne l’est pas de manière différente. Il faut que le traitement différent ou semblable injustifié se rapporte à une situation de fait importante (ATF 142 I 195 consid. 6.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_178/2022 du 16 mars 2022 consid. 5.1).

c. Valant pour l'ensemble de l'activité étatique, le principe de la bonne foi, exprimé aux art. 9 et 5 al. 3 Cst., exige que l'administration et les administrés se comportent réciproquement de manière loyale. En particulier, l'administration doit s'abstenir de toute attitude propre à tromper l'administré et elle ne saurait tirer aucun avantage des conséquences d'une incorrection ou insuffisance de sa part (ATF 138 I 49 consid. 8.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_341/2019 du 24 août 2020 consid. 7.1).

Le droit à la protection de la bonne foi peut être invoqué en présence simplement d'un comportement de l'administration, notamment en cas de silence de l'autorité dans une situation de fait contraire au droit, susceptible d'éveiller chez l'administré une attente ou une espérance légitime (ATF 129 II 361 consid. 7.1). Entre autres conditions, l'autorité doit être intervenue à l'égard du citoyen dans une situation concrète et celui-ci doit avoir pris, en se fondant sur les promesses ou le comportement de l'administration, des dispositions qu'il ne saurait modifier sans subir de préjudice (arrêt du Tribunal fédéral 9C_628/2017 du 9 mai 2018 consid. 2.2). La précision que l'attente ou l'espérance doit être « légitime » est une autre façon de dire que l'administré doit avoir eu des raisons sérieuses d'interpréter comme il l'a fait le comportement de l'administration et d'en tirer les conséquences qu'il en a tirées. Tel n'est notamment pas le cas s'il apparaît, au vu des circonstances, qu'il devait raisonnablement avoir des doutes sur la signification du comportement en cause et se renseigner à ce sujet auprès de l'autorité (ATF 134 I 199 consid. 1.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_138/2015 du 6 août 2015 consid. 5.1).

7) La décision litigieuse se fonde sur les art. 82, 83 let. a, 84 let. f et g et 93 al.1 et 2 du statut et 107 al. 1 REGAP.

a. Le chapitre VI statut énonce les devoirs du personnel. Parmi les devoirs généraux, les membres du personnel sont tenus au respect des intérêts de la ville et doivent s'abstenir de tout ce qui peut lui porter préjudice (art. 82 statut), doivent par leur attitude entretenir des relations dignes et respectueuses avec leurs collègues, leurs supérieures et supérieurs et leurs subordonnées et subordonnés et faciliter la collaboration entre ces personnes (art. 83 let. a statut), se conformer aux règlements et directives les concernant ainsi qu'aux instructions de leurs supérieurs et en exécuter les ordres avec conscience et discernement (art. 84 let. f et g statut).

b. Selon l'art. 93 al. 1 statut, les membres du personnel qui violent leurs devoirs de service intentionnellement ou par négligence peuvent se voir infliger un avertissement ou un blâme ou la suppression de l’augmentation annuelle de traitement pour l’année à venir.

c. L'art. 107 al. 1 REGAP prévoit que le chef ou la cheffe de service, le directeur ou la directrice du département, de même que le secrétaire général ou la secrétaire générale de la Ville de Genève sont compétents pour prononcer un avertissement concernant le personnel placé sous leur autorité.

8) En l'espèce, la décision querellée sanctionne le recourant au motif qu'il a continué à entreposer son vélo privé dans les locaux du poste de police nonobstant les mises en demeure de sa hiérarchie à compter du 7 octobre 2021 de ne plus le faire, soit le lendemain de son affectation dans ledit poste.

Quoiqu'il en dise et conformément à l'art. 84 let. f et g statut, il devait se conformer aux instructions de sa hiérarchie, avant même le rappel sur ce point précis de l'interdiction d'entreposage des vélos dans les postes fait par la commandante à l'attention de tous les APM, à l'occasion d'une séance du 26 octobre 2021. Les art. 83 et 84 statut constituent une base légale suffisante à cet effet, de sorte que le principe de légalité n'a pas été violé. Ces instructions n'étaient pas dénuées de fondement et le discernement du recourant aurait dû l'amener à les exécuter, plutôt qu'à s'entêter à les contester, à les braver et à obliger sa hiérarchie à le mettre en garde oralement et par écrit par huit fois entre le 7 octobre et le 3 novembre 2021. Il a à ces occasions, ainsi que lors de l'entretien du 26 novembre 2021 avec la commandante, pu exprimer son souhait de pouvoir continuer à entreposer son vélo dans les locaux du poste, étant rappelé qu'il n'avait aucun droit de le faire, dans la mesure où il s'agit de son véhicule privé. Alors que sa hiérarchie lui a rappelé qu'un local à vélos était à sa disposition, ce qui n'est pas le cas de tous les autres postes du canton, et qu'il était possible de fixer à sa seule attention un crochet pour sécuriser son vélo de valeur, le recourant a persisté non seulement à entreposer, en violation des nombreux ordres reçus, son vélo dans le poste, mais a encore cherché à discuter, sans relâche, les arguments de sa hiérarchie, pour leur opposer les siens propres. Il a persisté dans cette position devant la chambre de céans. Cette posture est d'autant plus problématique que sa fonction est de faire respecter l'ordre et que son grade implique un devoir d'exemplarité.

Comme déjà relevé, quand bien même une tolérance aurait préexisté au rappel de la commandante du 26 octobre 2021, le recourant ne peut pas se prévaloir de situations de collègues qui en auraient bénéficié par le passé, d'autant plus qu'il a persisté à violer les instructions sur ce point de sa hiérarchie non seulement en amont de ce rappel, soit pendant les dix-neuf jours le précédant, mais en tout cas jusqu'au 6 décembre 2021. Dans ces conditions, c'est à tort qu'il essaye de se prévaloir d'une violation du principe de l'égalité de traitement.

Quant au principe de la bonne foi, dans les circonstances qui viennent d'être exposées, on ne voit pas en quoi le recourant pourrait se prévaloir d'assurances données par sa hiérarchie selon lesquelles il pourrait sans autre continuer à entreposer son vélo dans les locaux du poste de police des G______, ce d'autant plus que l'interdiction lui a été signifiée le lendemain même de son arrivée dans ce poste. Par ailleurs, sa hiérarchie n'a pas fait preuve de mauvaise foi à son endroit, puisqu'elle lui a d'emblée rappelé l'existence du local à vélos, encore une fois mis à disposition par la ville à bien plaire, et qui plus est lui a proposé d'installer un crochet pour son seul usage. Autrement dit, le recourant ne pouvait légitimement attendre de l'employeur qu'il cède à ses demandes, quand bien même de son point de vue elles seraient légitimes, ne serait-ce que parce que les endroits où il déposait son vélo n'auraient dérangé personne. À cet égard, il oublie que d'autres auraient précisément pu se prévaloir de la faveur qui lui aurait été faite et demander à pouvoir également stationner vélos et trottinettes électriques notamment dans le poste. Le fait pour sa hiérarchie de s'être opposée à ses arguments pour pouvoir continuer à stationner son vélo dans le poste ne constitue pas un comportement empreint de mauvaise foi.

Dans ces conditions, c'est à juste titre que le recourant s'est vu sanctionner par un avertissement.

9) Le recourant considère que le principe de la proportionnalité aurait été violé dans la mesure où cet avertissement péjorerait sa situation dans la poursuite de son activité.

a. Le principe de la proportionnalité exige que les mesures mises en œuvre soient propres à atteindre le but visé (règle de l'aptitude) et que celui-ci ne puisse être atteint par une mesure moins contraignante (règle de la nécessité) ; il doit en outre y avoir un rapport raisonnable entre ce but et les intérêts compromis (principe de la proportionnalité au sens étroit, impliquant une pesée des intérêts ; ATA/1218/2021 du 16 novembre 2021 consid. 6a ; ATA/997/2021 du 28 septembre 2021 consid. 7g).

b. Il a en l'espèce déjà été retenu que le principe d'une sanction est fondé, au vu du comportement du recourant, quoi qu'il en dise. L'avertissement prononcé, la plus faible des sanctions, est propre à faire comprendre au recourant qu'il ne peut persister dans cette posture d'opposition vis-à-vis d'ordres légitimes de sa hiérarchie. Aucune mesure moins contraignante ne pouvait être envisagée, puisque le recourant a fait fi des nombreuses mises en demeure précédent l'avertissement du 6 décembre 2021. Autrement dit, il n'a pas su saisir les chances qui lui ont été données de se comporter conformément à ce qui était légitimement attendu. Cet avertissement, s'il figurera effectivement dans son dossier personnel, ne l'empêche toutefois pas de poursuivre sa carrière comme APM.

Ainsi, c'est sans violer son pouvoir d'appréciation que la commandante a infligé un avertissement au recourant et que le Conseil administratif a confirmé cette décision. La sanction peut même apparaître clémente au vu du refus d’ordre, non contesté, et surtout des multiples démarches entreprises par la ville avant de sanctionner le recourant.

En tous points mal fondé, le recours est rejeté

10) Vu son issue, un émolument de CHF 1'500.- sera mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 25 avril 2022 par Monsieur A______ contre la décision du Conseil administratif de la Ville de Genève du 9 mars 2022 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 1'500.- à la charge de Monsieur A______ ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral :

- par la voie du recours en matière de droit public, s'il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n'est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Romain Jordan, avocat du recourant, ainsi qu'à la Ville de Genève.

Siégeant : M. Mascotto, président, M. Verniory, Mmes Payot-Zen Ruffinen, Lauber, et Michon Rieben, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

M. Marmy

 

 

le président siégeant :

 

 

C. Mascotto

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :