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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3754/2021

ATA/370/2022 du 05.04.2022 ( ANIM ) , SANS OBJET

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3754/2021-ANIM ATA/370/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 5 avril 2022

1ère section

 

dans la cause

 

Madame A______
représentée par Me Romain Jordan, avocat

contre

SERVICE DE LA CONSOMMATION ET DES AFFAIRES VéTéRINAIRES



EN FAIT

1) Le 8 juin 2021, le service de la consommation et des affaires vétérinaires (ci-après : le SCAV) a été informé de la présence à Genève d'un chien de race Toy Terrier russe mâle, né le ______ 2021, appelé B______. Le chien avait été importé de Moldavie – pays où sévit la rage – avant d'être offert à Madame A______, résidente grecque en séjour temporaire à Genève. Le chien était doté d'une puce électronique, sans titrage antirabique, n'avait pas été vacciné contre la rage, ne bénéficiait pas d'un certificat sanitaire TRACES. Il avait été importé sans respect de la période de carence de trois mois et n'avait pas été déclaré aux douanes suisses.

Le même jour, le SCAV a ordonné le séquestre provisoire de l'animal, au vu du risque sanitaire que celui-ci représentait.

2) Par décision du 16 juin 2021, déclarée exécutoire nonobstant recours en raison du risque potentiel de zoonose, le SCAV a confirmé le séquestre préventif et accordé à Mme A______ un délai au 22 juin 2021 pour lui remettre un plan de retour du chien. Celui-ci devait être reconduit par un transporteur professionnel dans son pays de provenance ou tout autre pays d'accueil, avant le 26 juin 2021. La mise à mort de l'animal était ordonnée en cas d'apparition de symptômes non équivoques de la rage ainsi que le séquestre définitif et son euthanasie dans l'éventualité où le plan de retour ne serait pas présenté dans le délai fixé. Tous les frais inhérents au séquestre, au transport, à l'hébergement ainsi que tous les frais vétérinaires encourus depuis le 8 juin 2021, y compris l'euthanasie et les frais d'analyse pour la rage, le cas échéant, étaient imputés à Mme A______.

3) Le 21 juin 2021, Mme A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : chambre administrative) contre la décision du SCAV, concluant préalablement à l'octroi de l'effet suspensif et principalement à l'annulation de la décision et à ce que la vaccination contre la rage et l'isolement du chien durant un mois en vue de son départ pour la Grèce soient ordonnés. Le recours a été enregistré sous le numéro de cause A/2113/2021.

4) Le 21 juin 2021, la chambre administrative a fait interdiction au SCAV d'euthanasier le chien séquestré jusqu'au prononcé de la décision sur effet suspensif.

5) Le 27 juillet 2021, la chambre administrative a refusé de restituer l'effet suspensif au recours, tout en ordonnant au SCAV de ne pas procéder à l'euthanasie du chien B______ avant le vendredi 30 juillet 2021 à minuit (ATA/790/2021).

6) a. Le 28 juillet 2021, Mme A______ a déposé un recours en matière de droit public auprès du Tribunal fédéral contre la décision de la chambre administrative du 27 juillet 2021, concluant « préalablement et à titre superprovisoire déjà » à l'octroi de l'effet suspensif à son recours.

Au fond, elle requérait l'annulation de la décision et sa réforme en ce sens que l'effet suspensif au recours cantonal interjeté le 21 juin 2021 soit restitué.

b. Par ordonnance du 29 juillet 2021, le président de la IIème Cour de droit public du Tribunal fédéral a admis la demande d'effet suspensif à titre superprovisoire.

7) Le 12 août 2021, Mme A______ a requis du SCAV une décision formelle en constatation des conditions illégales de détention du chien.

8) Par arrêt du 30 septembre 2021 (2C_595/2021), le Tribunal fédéral a admis le recours et réformé la décision de la chambre administrative en ce sens que l'effet suspensif au recours interjeté le 21 juin 2021 était restitué s'agissant de l'euthanasie du chien B______ et a confirmé la décision pour le surplus.

Une indemnité de CHF 2'000.- à titre de dépens devait être versée par l'État de Genève à Mme A______.

9) a. Le 4 octobre 2021, Mme A______ a déposé une demande en reconsidération de la décision du 16 juin 2021 auprès du SCAV et sollicité la suspension de la procédure auprès de la chambre administrative.

b. Par détermination du 18 octobre 2021 le SCAV s'est opposé à la demande de suspension et indiqué qu'il n'entendait pas reconsidérer sa décision du 16 juin 2021.

10) Le 3 novembre 2021 Mme A______ a déposé à la chambre administrative un recours pour déni de justice. Elle concluait à ce qu'il soit ordonné au SCAV de rendre une décision formelle sur sa requête du 12 août 2021 en constatation des conditions illégales de détention du chien ainsi que sur sa demande en reconsidération du 27 septembre 2021 de la décision du 16 juin 2021. Le recours a été enregistré sous le numéro de cause A/3754/2021.

11) Le 20 décembre 2021, dans la cause A/3754/2021, le SCAV a répondu au recours, concluant à la jonction des causes et au rejet du recours. Il fallait constater que les conditions de détention du chien étaient légales, si besoin. Le chien avait été restitué à sa propriétaire le 8 décembre 2021. En cas de jonction des causes, il fallait confirmer la décision du 16 juin 2021.

La rage était une maladie mortelle, contagieuse, qui tuait une personne toutes les dix minutes dans le monde. Elle se transmettait au contact de la salive d'un animal malade, notamment lors de morsure, griffure ou léchage. Il n'existait aucun traitement une fois la maladie déclarée chez l'homme et elle était systématiquement mortelle. 99 % des cas de rage chez l'homme étaient provoqués par morsure de chiens. La Moldavie faisait partie des cinq pays du continent européen les plus touchés par la maladie et l'importation d'animaux en provenance de ce pays était autorisée à des conditions strictes. La Suisse avait légiféré en la matière et classifié la rage dans les zoonoses à éradiquer.

Le SCAV avait répondu à plusieurs reprises par courriels aux demandes de la recourante s'agissant des conditions de détention du chien et lui avait fait parvenir des photos du chien dans le parc. L'isolement du chien sur lequel pesait une suspicion de rage ne contrevenait nullement à la législation sur la protection des animaux et avait été rendu nécessaire par la négligence de la recourante uniquement.

La mesure ayant pris fin, la recourante n'avait plus d'intérêt actuel à recourir.

S'agissant de la reconsidération de la décision du 16 juin 2021, la recourante avait contesté la décision par recours, il n'y avait dès lors aucun motif de reconsidération et c'était à bon droit qu'elle n'avait pas donné suite à la demande.

12) Le 2 février 2022, la recourante a répliqué.

Les photos transmises ne donnaient aucune indication sur les conditions de détention du chien ni ne permettaient de démontrer la bonne prise en charge et l'état de santé de l'animal.

Le recours pour déni de justice était pleinement justifié au moment du dépôt.

Toutefois, l'intérêt actuel s'était éteint en cours de procédure, le recours étant devenu sans objet, il convenait de condamner le SCAV, vu l'issue du litige, en tous les frais et dépens, y compris une indemnité équitable valant participation aux honoraires d'avocat.

13) Le 7 mars 2022, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) a. Le recourant doit avoir un intérêt pratique à l'admission du recours, soit que cette admission soit propre à lui procurer un avantage, de nature économique, matérielle ou idéale (ATF 138 II 162 consid. 2.1.2 ; ATA/1272/2017 du 12 septembre 2017 consid. 2b). Un intérêt purement théorique à la solution d'un problème est de même insuffisant (ATF 144 I 43 consid. 2.1). Le juge est appelé à trancher des cas concrets, et son rôle n’est pas de faire de la doctrine ou de trancher des questions de principe (ATA/293/2016 du 5 avril 2016 consid. 5 ; ATA/1259/2015 du 24 novembre 2015 consid. 2d).

b. Un intérêt digne de protection suppose un intérêt actuel à obtenir l’annulation ou la modification de la décision attaquée (ATF 145 I 227 consid. 5.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_865/2019 du 14 avril 2020 consid. 3.2 ; ATA/706/2021 du 6 juillet 2021 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2ème éd., 2018, p. 459 n. 1367 ; Jacques DUBEY/ Jean-Baptiste ZUFFEREY, Droit administratif général, 2014, p. 734 n. 2084 ; Pierre MOOR/ Etienne POLTIER, Droit administratif, vol. 2, 3ème éd., 2011, p. 748 n. 5.7.2.3).

L’existence d’un intérêt actuel s’apprécie non seulement au moment du dépôt du recours, mais aussi lors du prononcé de la décision sur recours (ATF 145 I 227 consid. 5.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_9/2014 du 9 janvier 2014 consid. 4). Lorsqu'une demande en justice ne répond pas à un intérêt digne de protection de son auteur, elle est irrecevable (arrêt du Tribunal fédéral 4A_226/2016 du 20 octobre 2016 consid. 5). Si l’intérêt s’éteint pendant la procédure, le recours, devenu sans objet, doit être simplement radié du rôle (ATF 142 I 135 consid. 1.3.1 ; ATA/610/2021 du 8 juin 2021) ou déclaré irrecevable si l’intérêt actuel faisait déjà défaut au moment du dépôt du recours (ATF 139 I 206 consid. 1.1 ; ATA/791/2021 du 28 juillet 2021).

3) En l'espèce, la recourante admet à juste titre ne plus avoir d'intérêt actuel au recours en déni de justice déposé, le chien lui ayant été remis après la fin de la quarantaine.

Le recours, devenu sans objet, sera donc rayé du rôle.

4) La juridiction administrative qui rend la décision statue sur les frais de procédure et émoluments (art. 87 al. 1 LPA). La chambre administrative peut, sur requête, allouer à la partie ayant eu entièrement ou partiellement gain de cause, une indemnité pour les frais indispensables causés par le recours (art. 87 al. 2 LPA) ;

Elle statue sur les frais de procédure, indemnités et émoluments dans les limites établies par règlement du Conseil d'État et conformément au principe de la proportionnalité (art. 87 al. 1 et 3 LPA ; ATA/581/2009 du 10 novembre 2009 et les références citées). Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, les décisions des tribunaux en matière de frais et dépens n'ont pas à être motivées, l'autorité restant néanmoins liée par le principe général de l'interdiction de l'arbitraire (ATF 114 Ia 332 consid. 2b ; 111 Ia 1).

En l'espèce, la recourante avait également déposé un recours contre la décision dont elle demandait la reconsidération.

Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 500.- sera mis à sa charge et aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée.

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

dit que le recours de Madame A______ est devenu sans objet ;

raye la cause du rôle ;

met un émolument de CHF 500.- à la charge de Madame A______ ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Romain Jordan, avocat de la recourante ainsi qu'au service de la consommation et des affaires vétérinaires.

Siégeant : M. Mascotto, président, Mmes Lauber et Michon Rieben, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

le président siégeant :

 

 

C. Mascotto

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

la greffière :