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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1725/2021

ATA/324/2022 du 29.03.2022 sur JTAPI/1289/2021 ( PE ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1725/2021-PE ATA/324/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 29 mars 2022

1ère section

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Caritas Genève, mandataire

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 20 décembre 2021 (JTAPI/1289/2021)


EN FAIT

1) Monsieur A______, né le ______1963, est ressortissant de Tunisie.

2) Le 6 avril 2018, il a transmis à l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) une demande d'autorisation de séjour avec activité lucrative dans le cadre de l'opération « Papyrus », en produisant :

- un formulaire M, signé par Monsieur B______, administrateur de C______, indiquant son engagement pour une durée indéterminée et un salaire mensuel brut de CHF 2'500.-, qu’il était arrivé à Genève le 18 juillet 1998, qu’il était célibataire et que Monsieur D______, ressortissant tunisien, était son « partenaire » ;

- une attestation d'hébergement à la rue E______, du 21 avril 2027, signée par M. D______ ;

- un formulaire « Papyrus », à teneur duquel il était arrivé en Suisse en 2004 ;

- une attestation de non-poursuite, un extrait de son casier judiciaire, vierge, une attestation de l’Hospice général indiquant qu’il n’avait pas bénéficié d’aide sociale et une attestation de connaissance de la langue française (niveau A2) ;

- une attestation établie par M. D______ le 21 avril 2017 selon laquelle il hébergeait M. A______ ;

- une attestation des TPG indiquant « qu’une carte tpg numéro 1______TPG a[vait] été établie » le 2 février 2004 à son nom ;

- des abonnements auprès des TPG pour les années 2016 et 2017 ;

- une attestation des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG) du 2 mai 2017 certifiant qu’il y avait été « reçu en 2006 » ;

- cinq attestations émanant de Monsieur F______, datées du 8 août 2017, certifiant que celui-ci avait « travaillé » avec lui « en tant que fournisseur de produits de souvenirs au kiosque G______ » et avait été son « partenaire » durant les années 2011 à 2015 ;

- trois attestations émanant de Monsieur H______, datées du 11 juillet 2017, certifiant que celui-ci avait « travaillé » avec lui et avait été son « partenaire durant [les] saison[s] estivale[s] 2013 [à] 2015 au kiosque G______» ;

- onze attestations émanant de Monsieur I______, datées du 22 août 2017, certifiant que celui-ci avait « travaillé » avec lui et avait été son « partenaire [durant les] saison[s] 2004 [à] 2014 au kiosque G______» ;

- quatre attestations émanant de Monsieur J______, datées du 5 septembre 2017, certifiant que celui-ci avait « travaillé » avec lui « dans les rapports de travail [ ] très professionnels durant [les] saison[s] 2010 [à] 2013 au kiosque G______» ;

- deux attestations émanant de Monsieur K______ datées du 12 septembre 2017, certifiant que celui-ci avait « travaillé [avec lui] en partenaire de livraison » de 2016 à 2017.

3) Par courriel du 4 juin 2019, l'OCPM a demandé à M. A______ la remise d'attestations récentes de non-poursuite et de non-assistance sociale, de même que de justificatifs complémentaires en lien avec sa présence à Genève durant la période 2009-2014, relevant que les témoignages de ses amis et/ou collègues n’étaient pas considérés comme « engageants selon la liste Papyrus ».

4) Par courrier du 11 juin 2019, M. A______ a transmis les attestations précitées, précisant qu’il n’avait pas pu trouver d’autres justificatifs de sa présence à Genève pour les années 2009 à 2014, mais qu’il « était bien connu et apprécié dans le quartier où il travaillait et [que] son entourage et ses collègues seraient tout à fait disposés à en témoigner ».

5) Par courrier du 16 septembre 2019, l'OCPM lui a fait part de son intention de ne pas donner une suite favorable à sa demande de régularisation et de prononcer son renvoi de Suisse.

Il n’avait pas démontré une durée de séjour de dix ans à Genève, requise pour bénéficier de l’opération « Papyrus », puisqu’il n'avait établi un tel séjour que depuis l’année 2015. Sa situation ne répondait pas aux critères légaux relatifs au cas individuel d’extrême gravité.

6) Par courriel du 26 septembre 2019, son mandataire a exposé ce qui suit :

« J'ai réussi à contacter 3 témoins et voilà ce qui ressort de mes entretiens téléphoniques : S'agissant du témoin J______ (années 2010 à 2013), ce dernier est le patron de la société L______ basée à Savièse en Valais et qui distribue des articles de souvenirs. Il s'agit d'un fournisseur de la boutique où travaillait notre mandant. Monsieur J______ rencontrait notre mandant lorsqu'il venait livrer la marchandise au Kiosque.

En ce qui concerne le témoin I______ (années 2009 à 2014), il a remis son entreprise à ses fils qui s'occupent de la gestion. Il s'agit de N______ basée à O______ en Suisse centrale. C'est également une société qui commercialise des produits souvenirs dans toute la Suisse. A nouveau, Monsieur I______ m'a indiqué que c'était notre mandant qui effectuait les commandes et qui les réceptionnait au Kiosque à Genève.

Enfin, le témoin F______ (années 2011 à 2015) est le patron de F______ P______, société basée à Q______ dans le Canton de R______ qui distribue également des objets souvenirs en Suisse. Il a tenu les mêmes propos que les deux témoins précédents.

Comme vous pourrez agréablement le constater, les trois témoins susmentionnés sont trois patrons d'entreprises basées les trois hors de Genève et qui commercialisent des objets souvenirs. Je rappelle ici que la boutique où notre mandant indique avoir travaillé est justement une boutique de souvenirs.

Il ressort de ce qui précède qu'un faisceau d'indices tend désormais à démontrer les dires de notre mandant. Je précise que j'ai bien entendu vérifié sur internet l'existence des entreprises précitées ».

7) Par courrier du 6 décembre 2019, l'OCPM a fait savoir à M. A______ qu’après un examen attentif de son cas, il était disposé à lui octroyer une autorisation de séjour en application des art. 30 al. 1 let. b de la loi fédérale sur les étrangers et l’intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) et 31 de l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201). Sa décision en ce sens devait toutefois préalablement être soumise à l’approbation du secrétariat d'État aux migrations (ci-après : SEM), auquel il transmettait son dossier.

8) Le 10 décembre 2019, il a sollicité de l’OCPM la délivrance d’un visa de retour d’une durée d’un mois pour se rendre en Tunisie.

9) Par courrier du 25 mars 2020, le SEM a fait savoir à M. A______ qu'il avait retourné son dossier à l'OCPM pour un nouvel examen de sa situation.

Sous le titre « remarque », figurant en seconde page de ce courrier, le SEM a relevé que les attestations de non-poursuite et non-assistance sociale dataient de juin 2019, alors que le dossier lui avait été transmis en décembre 2019. Sa situation professionnelle n’avait pas non plus été actualisée. Surtout, les preuves de séjour qu’il avait fournies pour les années 2008 à 2015 émanaient de « personnes tierces ». Les attestations établies par MM. J______, I______ et F______ ne pouvaient pas être considérées comme « engageantes », dès lors qu’il n’avait pas été leur employé. Par ailleurs, les justificatifs de sa présence en Suisse ne pouvaient pas reposer uniquement sur des « preuves de catégorie B». Il n’avait prouvé un séjour continu à Genève que depuis l’année 2015.

Partant, le SEM invitait l'OCPM à rejeter sa demande s’il ne fournissait pas de preuves « objectives » pour la période 2008/2009-2015.

10) Par courriel du 6 juillet 2020, l'OCPM a invité M. A______ à lui remettre de nouveaux justificatifs de séjour pour la période 2010 à 2014.

11) Le 21 juillet 2020, M. A______ a sollicité de l’OCPM, qui a refusé, la délivrance d’un visa de retour d’une durée d’un mois, sans préciser le pays de destination. Il avait joint à sa demande un reçu pour des billets d'avion aller et retour Genève - Tunis, les 9 août et 9 septembre 2020.

12) Par courriel du 27 octobre 2020, il a requis de l'OCPM la délivrance d’une autorisation de travail provisoire.

13) Par courriel du 30 octobre 2020, l'OCPM a invité M. A______ à répondre à sa demande du 6 juillet 2020, afin de donner suite à sa demande d’autorisation de travail provisoire.

14) Par courriel du même jour, M. A______ a répondu que les documents attestant de sa présence en Suisse durant « toutes les années annoncées » étaient déjà en sa possession.

15) Le 7 janvier 2021, il a requis de l’OCPM la délivrance d’un visa de retour d’une durée d’un mois, sans préciser le pays de destination, qui lui a été accordé.

16) Par courriel au conseil de M. A______ du 19 janvier 2021, l'OCPM a fait état du contenu d'un entretien téléphonique au cours duquel M. A______ avait confirmé ne pas être en mesure de produire des justificatifs supplémentaires de son séjour pour les années 2010 à 2014.

17) Par courrier du 10 février 2021, l'OCPM lui a fait part de son intention de ne pas donner une suite favorable à sa demande de régularisation et de prononcer son renvoi de Suisse.

Il n’avait pas démontré une durée de séjour de dix ans à Genève, requise pour bénéficier de l’opération « Papyrus », puisqu’il ne l’avait établie que depuis l’année 2015. Sa situation ne répondait pas aux critères légaux relatifs au cas individuel d’extrême gravité. Il n’avait pas démontré une intégration socioculturelle particulièrement remarquable, ni une très longue durée de séjour en Suisse ou des éléments permettant de déroger à cette exigence, ni le fait qu’une réintégration dans son pays d’origine aurait de graves conséquences sur sa situation personnelle.

18) M. A______ n'a pas fait usage de son droit d'être entendu dans le délai imparti.

19) Par décision du 20 avril 2021, reprenant les motifs énoncés dans son courrier précédant, l’OCPM a refusé de soumettre à nouveau son dossier au SEM avec un préavis positif, a prononcé son renvoi de Suisse et lui a imparti un délai au 20 juin 2021 pour quitter le territoire.

20) Par acte du 18 mai 2021, M. A______ a recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre cette décision, concluant à son annulation et au renvoi de son dossier à l'OCPM, afin que celui-ci préavise favorablement sa demande auprès du SEM. Préalablement, il a requis son audition.

Il était venu rejoindre en Suisse son frère aîné, M. D______, le 18 juillet 1998, ce qui était attesté par une copie d’un visa figurant dans son passeport, valable depuis cette date et jusqu’au 6 septembre 1998. Il avait travaillé à l’auberge S______ à T______ durant deux ans. Entre 2001 et 2006, il avait travaillé à la U______, à V______. Il avait bien connu l’ancien patron de cet établissement, feu W______, ainsi que son fils X______. Entre 2007 et 2015, il avait travaillé pour « le kiosque G ______. Il avait ensuite retrouvé un emploi auprès de la société C______.

Depuis son arrivée en Suisse, il s’était rendu à trois reprises auprès de l’ambassade d’Algérie en Suisse [recte : ambassade de Tunisie à R______], afin de renouveler son passeport.

Certes, seuls les témoignages écrits de MM. J______, I______ et F______ avaient été produits pour attester de sa présence à Genève entre 2007 et 2015. Cela étant, en prenant la peine de se renseigner sur ces personnes, comme l’avait fait l’OCPM initialement, ce qui l'avait amené à préaviser favorablement son dossier auprès du SEM, on s’apercevait que ces témoignages étaient « parfaitement engageants ». Il était question de trois entrepreneurs basés dans différentes régions de la Suisse et dont on comprendrait mal l’intérêt à fournir de faux témoignages. Hormis dans le cadre professionnel, ces personnes n’auraient jamais eu l’occasion de le connaître. Du reste, si, en 2019, son mandataire était parvenu à s’entretenir avec ces personnes par téléphone, puis à s’assurer, en mai 2021, que leurs numéros de téléphone étaient toujours d’actualité, il serait loisible tant à l'OCPM qu’au SEM de le faire également. En refusant ces témoignages, ces autorités avaient procédé à une interprétation inexacte des faits et violé leur devoir d’instruction. Le refus du SEM d’entreprendre la moindre démarche afin de s’assurer de la valeur de ces témoignages était une manière de procéder arbitraire.

21) Dans ses observations du 13 juillet 2021, l'OCPM a conclu au rejet du recours.

Les critères de l'opération « Papyrus », respectivement les conditions légales restrictives posées par l'art. 30 al. 1 let. b LEI n’étaient pas réalisées. En particulier, un séjour de M. A______ jusqu'en 2014 n'avait pas été prouvé à satisfaction de droit. Il n'apparaissait pas que son départ de Suisse le placerait dans une situation personnelle d'extrême gravité.

22) Le TAPI a, par jugement du 20 décembre 2021, rejeté le recours.

L'audition de M. A______ n'était pas obligatoire et n'apparaissait pas indispensable.

Le SEM avait déjà examiné le dossier et refusé de donner son approbation à la délivrance, en faveur de M. A______, d'une autorisation de séjour en application de l'art. 30 al. 1 let. b LEI, ayant en particulier considéré que les moyens de preuve fournis pour établir une longue durée de séjour en Suisse n'étaient pas suffisants. M. A______ n'était pas fondé à contester l'appréciation du SEM dans le cadre de la présente procédure, la voie pour ce faire étant devant le Tribunal administratif fédéral (ci-après : TAF). Il n'y avait donc pas lieu d'examiner la question de la valeur probante des attestations de MM. J______, I______ et F______, ni, plus largement, celle de la durée de son séjour en Suisse avant 2015, puisque, précisément, il n’avait produit aucun moyen de preuve nouveau à cet égard.

Dans un tel contexte, l'OCPM, qui ne disposait plus d'aucune marge de manœuvre, ne pouvait pas soumettre une seconde fois son dossier au SEM et n'avait pas d'autre choix que de constater qu'il ne satisfaisait pas à la condition de la durée de séjour requise, y compris et en particulier sous l'angle de l'opération « Papyrus ». L'OCPM n'avait fait ni plus ni moins que ce que le SEM lui avait intimé de faire.

Pour le surplus, les autres motifs avancés par l'OCPM dans la décision entreprise ne laissaient pas entrevoir un abus ou un excès de son pouvoir d'appréciation.

En effet, même si le recourant n’avait jamais émargé à l’assistance sociale et n’avait pas contracté de dettes, son intégration professionnelle ne saurait être qualifiée d’exceptionnelle. Le fait de travailler pour ne pas dépendre de l'aide sociale, d'éviter de commettre des actes répréhensibles et de s'efforcer d'apprendre au moins la langue nationale parlée au lieu du domicile constituait au demeurant un comportement ordinaire pouvant être attendu de tout étranger souhaitant obtenir la régularisation de ses conditions de séjour. Il ne ressortait pas du dossier que les liens amicaux et/ou professionnels que M. A______ avait créés en Suisse dépasseraient en intensité ce qui pouvait être raisonnablement attendu d’étrangers ayant passé un nombre d'années équivalent dans le pays. Il était né en Tunisie, où il avait passé toute son enfance, son adolescence, ainsi que la majeure partie de sa vie d’adulte. Il y avait également conservé de fortes attaches, plusieurs membres de sa famille y vivant probablement, ce qu'il ne démentait pas. Il avait sollicité plusieurs visas afin d'y retourner.

Il ne pouvait ignorer, au vu de son statut précaire, qu'il pourrait à tout moment être amené à devoir mettre un terme à son séjour en Suisse. Ni son âge, ni la durée de son séjour sur le territoire (telle qu'elle avait été admise par le SEM), ni encore les inconvénients d'ordre professionnel auxquels il pourrait éventuellement se heurter dans son pays ne constituaient des circonstances si singulières qu'il faille considérer qu'il se trouverait dans une situation de détresse personnelle devant justifier l'octroi d'une exception aux mesures de limitation.

Sous l'angle étroit de la protection de la vie privée, l'art. 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) ouvrait le droit à une autorisation de séjour à des conditions restrictives. M. A______, qui ne pouvait se prévaloir d'un quelconque séjour légal et dont l'intégration en Suisse n'apparaissait pas exceptionnelle, ne pouvait pas tirer bénéfice de cette disposition.

Faute de l'obtention d’une autorisation de séjour, c’était également à bon droit que l’autorité intimée avait prononcé son renvoi de Suisse, dont l'exécution n'apparaissait ni impossible, ni illicite ou ne pouvant être raisonnablement exigée au sens de l'art. 83 LEI.

23) M. A______ a formé recours, par acte expédié le 1er février 2022 à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre ce jugement, concluant à son annulation et au retour du dossier à l'OCPM pour émission d'un préavis favorable de sa demande d'autorisation de séjour. Préalablement, il a sollicité son audition ainsi que celles de MM. I______, F______ et J______.

Le TAPI avait erré sur de nombreux points.

Il avait à tort affirmé que le SEM l'avait informé des motifs l'ayant conduit à retourner le dossier à l'OCPM le 25 mars 2020. Le SEM n'avait pas pris la peine de répondre aux explications requises par courriel du 30 mars 2020. Dans la mesure où le SEM n'avait pas rendu de décision sujette à recours ni donné des explications sur les raisons l'ayant poussé à retourner le dossier à l'OCPM, le TAPI était bien l'instance auprès de laquelle il devait s'adresser pour contester la décision de l'OCPM. Le TAPI ne pouvait donc pas s'épargner d'examiner le fond du dossier et la valeur probante des attestations remises. Il aurait dû mener les mesures d'instruction requises. En refusant de le faire, il avait violé son droit d'être entendu et avait fait preuve d'arbitraire. « En se contentant de constater [qu'il] n'avait pas d'autres preuves à fournir pour les années [entre 2008 à 2015] (ce que l'OCPM savait déjà puisque le cas avait été discuté à maintes reprises lors de réunions dans [ses] locaux ou lors d'entretiens téléphoniques) sans même prendre la peine de contacter les auteurs des attestations, on compren[ait] que l'OCPM n'ait pas retourné le dossier une nouvelle fois au SEM mais cela ne légitim[ait] en rien sa décision ». L'OCPM tout comme le TAPI avaient clairement violé leur devoir d'instruction et abusé de leur pouvoir d'appréciation en refusant son cas.

Il développait à nouveau les raisons pour lesquelles les témoignages de MM. I______, F______ et J______ étaient « parfaitement engageants » et les raisons pour lesquelles il était indispensable de les entendre pour donner une force probante à leurs témoignages écrits. Ils seraient à même de témoigner de sa présence continue à Genève entre 2008 et 2015.

Enfin, se référant à l'ATA/918/2021 du 7 septembre 2021, dans une situation similaire où un ressortissant du Kosovo avait déposé une demande d'autorisation de séjour pour laquelle l'OCPM considérait que le séjour de dix ans n'était pas prouvé, la chambre administrative avait procédé à une audience de comparution personnelle des parties et à l'audition de cinq témoins, ce qui avait permis de corroborer ses dires.

Il détaillait les éléments démontrant son intégration à Genève.

24) L'OCPM a conclu, le 2 mars 2022, au rejet du recours.

M. A______ avait eu connaissance du préavis négatif du SEM du 25 mars 2021 et avait ensuite été à plusieurs reprises invité à apporter de nouveaux justificatifs s'agissant d'un séjour sur le territoire genevois dès 2008, dans le cadre de son devoir de collaboration. C'était faute d'éléments probants que l'OCM avait rendu la décision querellée.

Au stade du recours, aucune nouvelle pièce n'était versée au dossier. Sans s'y opposer formellement, il relevait que les témoignages sollicités concernaient des moyens que le SEM et l'OCPM considéraient comme insuffisants pour permettre de faire droit à la régularisation du séjour sous l'angle de la longue durée.

Quant aux autres critères d'un cas de rigueur, ils n'étaient pas réalisés dans le cas d'espèce.

25) Dans une brève réplique du 9 mars 2022, M. A______ a indiqué peiner à comprendre ce que l'OCPM entendait par « moyens que le SEM et l'OCPM considéraient comme insuffisants ». Les témoignages sollicités seraient justement à même de lever tout doute sur sa présence continue à Genève durant les années contestées.

26) Les parties ont été informées, le 11 mars 2022, que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a et 63 al. 1 let. c de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Est litigieux le bien-fondé de la décision du 20 avril 2021 de refus de délivrance d'une autorisation de séjour en faveur du recourant et prononçant son renvoi de Suisse.

3) Le recourant sollicite son audition et celle de trois témoins. Il soutient que son droit d'être entendu aurait été violé par l'OCPM et le TAPI qui n'auraient pas procédé aux actes d'instructions requis.

a. Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes et d'obtenir qu'il y soit donné suite (ATF 132 II 485 consid. 3.2 ; 127 I 54 consid. 2b). Ce droit ne s'étend qu'aux éléments pertinents pour l'issue du litige et n'empêche pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, s'il acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 138 III 374 consid. 4.3.2 ; 131 I 153 consid. 3).

La procédure administrative est en principe écrite, toutefois si le règlement et la nature de l'affaire le requièrent, l'autorité peut procéder oralement (art. 18 LPA). Le droit d'être entendu ne comprend pas le droit à une audition orale (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_51/2018 du 17 janvier 2019 consid. 4.1 ; ATA/1173/2020 du 24 novembre 2020 consid. 3a).

b. En l'espèce, le recourant, qui n'a pas de droit à être entendu oralement, aurait pu faire usage de son droit d'être entendu par-devant l'autorité intimée en répondant par écrit au courrier du 10 février 2021 l'informant qu'elle entendait ne pas faire droit à sa requête, ce dont il s'est abstenu. Par la suite, il a pu s'exprimer par écrit tant devant l'instance précédente que devant la chambre de céans et a pu déposer toutes les pièces qu’il a jugées utiles, y compris après la réponse de l'OCPM. Il s'est abstenu de produire de nouvelles pièces.

Il s’ensuit d'une part que ni l'OCPM ni le TAPI n'ont violé son droit d'être entendu et que, d'autre part, le dossier est complet et contient déjà les éléments nécessaires à l'examen de sa situation, sans que son audition, pas plus que celle des trois témoins dont les attestations figurent au dossier, ne soit de nature à changer l'appréciation de la chambre de céans.

Il ne sera dès lors pas donné suite à ses demandes d'actes d'enquête.

4) Le recourant considère que tant la décision de l'OCPM que le jugement du TAPI sont entachés d'arbitraire, ou encore que ces autorité et instance ont violé leur pouvoir d'appréciation et son droit d'être entendu.

a. Le recours devant la chambre administrative peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, ainsi que pour constatation inexacte des faits (art. 61 al. 1 LPA). En revanche, celle-ci ne connaît pas de l’opportunité des décisions prises en matière de police des étrangers, dès lors qu’il ne s’agit pas d’une mesure de contrainte (art. 61 al. 2 LPA ; art. 10 al. 2 de la loi d’application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10, a contrario ; ATA/12/2020 du 7 janvier 2020 consid. 3).

Il ressort ainsi de cette disposition que le recours à la chambre administrative a un effet dévolutif complet, si bien que celle-ci dispose d'un libre pouvoir d'examen en fait et en droit. Celui-ci implique la possibilité de guérir une violation du droit d'être entendu, même si l'autorité de recours n'a pas la compétence d'apprécier l'opportunité de la décision attaquée (ATF 145 I 167 consid. 4.4 ; 137 I 195 consid. 2.3.2), sous réserve que ledit vice ne revête pas un caractère de gravité (arrêts du Tribunal fédéral 8C_541/2017 du 14 mai 2018 consid. 2.5 ; ATA/791/2020 du 25 août 2020 consid. 6c et les références citées).

b. Il y a abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité, tout en restant dans les limites du pouvoir d'appréciation qui est le sien, se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou viole des principes généraux de droit tel que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 137 V 71 consid. 5.1 ; ATA/900/2016 du 25 octobre 2016 ; ATA/768/2016 du 13 septembre 2016).

c. Une décision est arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. lorsqu'elle viole gravement une norme ou un principe juridique indiscuté ou lorsqu'elle heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité. L'arbitraire ne résulte pas du seul fait qu'une autre solution pourrait entrer en considération ou même qu'elle serait préférable. Pour qu'une décision soit annulée pour cause d'arbitraire, il ne suffit pas que la motivation formulée soit insoutenable, il faut encore que la décision apparaisse arbitraire dans son résultat (ATF 144 I 113 consid. 7.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_743/2020 du 30 juin 2021 consid. 2.2).

d. Le droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 Cst. ne contient pas d’obligation de discuter tous les griefs et moyens de preuve du recourant ; il suffit que le juge discute ceux qui sont pertinents pour l'issue du litige (ATF 141 III 28 consid. 3.2.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_24/2017 du 13 décembre 2017 consid. 2.2).

5) La LEI et ses ordonnances d'exécution, en particulier l’OASA, règlent l'entrée, le séjour et la sortie de Suisse des étrangers dont le statut juridique n'est pas réglé par d'autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI), ce qui est le cas pour la Tunisie.

6) a. Le 1er janvier 2019 est entrée en vigueur une modification de la LEI, et de l’OASA. Conformément à l'art. 126 al. 1 LEI, les demandes déposées avant le 1er janvier 2019, comme en l'espèce, sont régies par l'ancien droit (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1075/2019 du 21 avril 2020 consid. 1.1).

b. Aux termes de l'art. 30 al. 1 let. b LEI, il est possible de déroger aux conditions d'admission (art. 18 à 29 LEI) notamment dans le but de tenir compte des cas individuels d'une extrême gravité ou d'intérêts publics majeurs.

c. L'art. 30 al. 1 let. b LEI n'a pas pour but de soustraire la personne requérante aux conditions de vie de son pays d'origine, mais implique que la personne concernée se trouve personnellement dans une situation si grave qu'on ne peut exiger de sa part qu'elle tente de se réadapter à son existence passée. Des circonstances générales affectant l'ensemble de la population restée sur place, en lien avec la situation économique, sociale, sanitaire ou scolaire du pays en question et auxquelles la personne requérante serait également exposée à son retour, ne sauraient davantage être prises en considération, tout comme des données à caractère structurel et général, telles que les difficultés d'une femme seule dans une société donnée (ATF 123 II 125 consid. 5b/dd ; arrêts du Tribunal fédéral 2A.245/2004 du 13 juillet 2004 consid. 4.2.1 ; 2A.255/1994 du 9 décembre 1994 consid. 3). Au contraire, dans la procédure d'exemption des mesures de limitation, seules des raisons exclusivement humanitaires sont déterminantes, ce qui n'exclut toutefois pas de prendre en compte les difficultés rencontrées par la personne requérante à son retour dans son pays d'un point de vue personnel, familial et économique (ATF 123 II 125 consid. 3 ; ATA/163/2020 du 11 février 2020 consid. 7b).

La question n'est donc pas de savoir s'il est plus facile pour la personne concernée de vivre en Suisse, mais uniquement d'examiner si, en cas de retour dans le pays d'origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de sa situation personnelle, professionnelle et familiale, seraient gravement compromises (arrêts du Tribunal fédéral 2C_621/2015 du 11 décembre 2015 consid. 5.2.1 ; 2C_369/2010 du 4 novembre 2010 consid. 4.1).

7) a. À teneur de l’ancienne teneur de l'art. 31 al. 1 OASA, qui précise cette disposition, pour apprécier l’existence d’un cas individuel d’extrême gravité, il convient de tenir compte notamment de l'intégration du requérant (let. a), du respect de l'ordre juridique suisse par le requérant (let. b), de la situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de la situation financière ainsi que de la volonté de prendre part à la vie économique et d'acquérir une formation (let. d), de la durée de la présence en Suisse (let. e), de l'état de santé (let. f) et des possibilités de réintégration dans l'État de provenance (let. g). Les critères énumérés par cette disposition, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs, d’autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené un étranger à séjourner illégalement en Suisse (ATA/877/2021 du 31 août 2021 consid. 6a).

b. Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEI et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel, et les conditions pour la reconnaissance d'une telle situation doivent être appréciées de manière restrictive (ATF 128 II 200 consid. 4 ; ATA/189/2022 du 22 février 2022 consid. 3d). Elles ne confèrent pas de droit à l'obtention d'une autorisation de séjour (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; 137 II 345 consid. 3.2.1). L'autorité doit néanmoins procéder à l'examen de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce pour déterminer l'existence d'un cas de rigueur (ATF 128 II 200 consid. 4 ; 124 II 110 consid. 2 ; ATA/138/2022 du 8 février 2022 consid. 5b).

c. La reconnaissance de l'existence d'un cas d'extrême gravité implique que la personne étrangère concernée se trouve dans une situation de détresse personnelle. Ses conditions de vie et d'existence doivent ainsi être mises en cause de manière accrue en comparaison avec celles applicables à la moyenne des personnes étrangères. En d'autres termes, le refus de la soustraire à la réglementation ordinaire en matière d'admission doit comporter à son endroit de graves conséquences. Le fait que la personne étrangère ait séjourné en Suisse pendant une assez longue période, qu'elle y soit bien intégrée, tant socialement et professionnellement, et que son comportement n'ait pas fait l'objet de plaintes ne suffit pas, à lui seul, à constituer un cas d'extrême gravité. Encore faut-il que sa relation avec la Suisse soit si étroite qu'on ne puisse exiger qu'elle vive dans un autre pays, notamment celui dont elle est originaire. À cet égard, les relations de travail, d'amitié ou de voisinage que la personne concernée a pu nouer pendant son séjour ne constituent normalement pas des liens si étroits avec la Suisse qu'ils justifieraient une exception (ATF 130 II 39 consid. 3 ; 124 II 110 consid. 3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_754/2018 du 28 janvier 2019 consid. 7.2 ; 2A_718/2006 du 21 mars 2007 consid. 3).

d. Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d'un cas d'extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, la personne étrangère possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu'elle ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d'origine, une maladie grave ne pouvant être traitée qu'en Suisse, la situation des enfants, notamment une bonne intégration scolaire aboutissant après plusieurs années à une fin d'études couronnée de succès. Constituent en revanche des facteurs allant dans un sens opposé le fait que la personne concernée n'arrive pas à subsister de manière indépendante et doive recourir aux prestations de l'aide sociale ou des liens conservés avec le pays d'origine, par exemple sur le plan familial, susceptibles de faciliter sa réintégration (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral [ci-après : TAF] C-5414/2013 du 30 juin 2015 consid. 5.1.4 ; C-6379/2012 et C-6377/2012 du 17 novembre 2014 consid. 4.3).

8) a. Processus administratif simplifié de normalisation des étrangers en situation irrégulière à Genève, l'opération Papyrus ayant prévalu de février 2017 au 31 décembre 2018 n'emportait aucune dérogation aux dispositions légales applicables à la reconnaissance de raisons personnelles majeures justifiant la poursuite du séjour en Suisse (art. 50 al. 1 let. b et al. 2 LEI), pas plus qu'à celles relatives à la reconnaissance d'un cas individuel d'extrême gravité (art. 31 al. 1 OASA), dont les critères peuvent entrer en ligne de compte pour l'examen desdites raisons personnelles majeures (ATA/1288/2019 précité consid. 6a ; ATA/584/2017 du 23 mai 2017 consid. 4c).

b. L'« opération Papyrus » a visé à régulariser la situation des personnes non ressortissantes d'un pays de l'UE/AELE bien intégrées et répondant à différents critères, à savoir, selon le livret intitulé « Régulariser mon statut de séjour dans le cadre de Papyrus », avoir un emploi ; être indépendant financièrement ; ne pas avoir de dettes ; avoir séjourné à Genève de manière continue sans papiers pendant cinq ans minimum (pour les familles avec enfants scolarisés) ou dix ans minimum pour les autres catégories, à savoir les couples sans enfants et les célibataires ; faire preuve d'une intégration réussie ; absence de condamnation pénale (autre que séjour illégal).

9) a. Selon l'art. 40 al. 1 LEI, les autorisations prévues aux art. 32 à 35 et 37 à 39 LEI sont octroyées par les cantons. Les compétences de la Confédération sont réservées notamment en matière de dérogations aux conditions d’admission (art. 30 LEI) et de procédure d’approbation (art. 99 LEI).

Le Conseil fédéral détermine les cas dans lesquels les autorisations de courte durée, de séjour ou d’établissement ainsi que les décisions préalables des autorités cantonales du marché du travail sont soumises à l’approbation du SEM (art. 99 al. 1 LEI). Le SEM peut refuser d’approuver une décision d’une autorité administrative cantonale ou d’une autorité cantonale de recours ; il peut également en limiter la durée de validité ou l’assortir de conditions et de charges (al. 2).

Il ressort de l'art. 85 al. 1 OASA que le SEM a la compétence d’approuver l’octroi et le renouvellement des autorisations de courte durée et de séjour, l’octroi de l’établissement ainsi que les décisions préalables des autorités cantonales du marché du travail.

Le SEM peut refuser son approbation, la limiter dans le temps ou l’assortir de conditions et de charges (art. 86 al. 1 OASA). Il refuse d’approuver l'octroi de l’autorisation initiale et le renouvellement lorsque les conditions d’admission ne sont plus remplies ou lorsque des motifs de révocation au sens de l’art. 62 LEI existent contre une personne (art. 86 al. 2 let. a OASA). Le titre de séjour ne peut être établi que lorsque le SEM a donné son approbation (al. 5).

b. Sous réserve des exceptions prévues à l'art. 32 de la loi sur Tribunal administratif fédéral du 17 juin 2005 (LTAF - RS 173.32), le TAF, en vertu de l'art. 31 LTAF, connaît des recours contre les décisions au sens de l'art. 5 de la loi fédérale sur la procédure administrative du 20 décembre 1968 (PA - RS 172.021) prises par les autorités mentionnées à l'art. 33 LTAF. En particulier, les décisions en matière de refus d'approbation au renouvellement d'une autorisation de séjour et de renvoi prononcées par le SEM - lequel constitue une unité de l'administration fédérale telle que définie à l'art. 33 let. d LTAF - sont susceptibles de recours au TAF, qui statue comme autorité précédant le Tribunal fédéral (art. 1 al. 2 LTAF en relation avec l'art. 83 let. c ch. 2 a contrario LTF). A moins que la LTAF n'en dispose autrement, la procédure devant le TAF est régie par la PA ( art. 37 LTAF ; arrêt du TAF F-5641/2017 du 28 février 2019).

10) En l'espèce, le SEM a, le 25 mars 2020, informé le recourant, via son conseil, qu'il avait retourné le dossier à l'OCPM pour nouvel examen de sa situation. Contrairement à ce que soutient le recourant, le SEM a, en page 2 dudit courrier, figurant dans le dossier de l'OCPM, motivé la raison pour laquelle il invitait l'autorité cantonale à rejeter sa demande d'autorisation de séjour, à savoir que les attestations signées par MM. J______, I______ et F______ ne pouvaient pas être considérées comme des témoignages « engageants », puisque le recourant n'avait pas été employé par ces personnes. Par ailleurs, les justificatifs de présence ne pouvaient pas reposer seulement sur les preuves de catégorie B. Le SEM avait conclu que le recourant n'avait prouvé son séjour continu à Genève que depuis l'année 2015.

Le SEM n'a ce faisant a priori pas formellement rendu une décision de refus d'approbation au sens de l'art. 86 al. 1 OASA, de sorte qu'il n'est pas certain que la voie d'un recours au TAF ait été ouverte. Cette question souffrira de demeurer indécise.

Il n'en demeure en effet pas moins que le SEM a examiné la question de la valeur probante des attestations de MM. J______, I______ et F______, de sorte que l'OCPM était lié par cette appréciation au retour du dossier. L'instruction donnée à l'OCPM était claire, la demande d'autorisation devait être rejetée si le recourant ne fournissait pas de preuve objective d'un séjour continu à compter de 2008/2009 à 2015. Or, le recourant, en réponse à la demande de l'OCPM du 6 juillet 2020 de lui transmettre de nouveaux justificatifs de séjour pour la période de 2010 à 2014, a répondu le 30 octobre 2020 que cette autorité était en possession de tous les documents attestant de sa présence en Suisse durant « toutes les années annoncées ». Il n'a en particulier à aucun moment prétendu avoir été l'employé de l'une ou l'autre des trois personnes précitées, ni fourni par exemple de contrat de travail ou de fiche de salaire en lien avec de tels emplois. Il n'a pas soutenu que l'une et/ou l'autre de ces personnes serait à même de témoigner d'un tel emploi s'inscrivant dans la durée, et non simplement de « saison », comme « partenaire », ni qu'il se serait inscrit de manière discontinue pendant les six à sept ans ciblés par le SEM, voir les cinq ans retenus par l'OCPM. Il ressort au contraire des attestations fournies par ces trois personnes et du courriel adressé par le conseil du recourant à l'OCPM le 26 septembre 2019 qu'elles ont été les fournisseurs de marchandises « en saison » du kiosque G______. Ainsi, quand bien même elles auraient eu des contacts directs avec le recourant dans ce cadre, que ce soit par téléphone au moment des commandes ou lors des livraisons, elles ne seraient pas en mesure de témoigner d'une présence effective, continue et à l'année du recourant à Genève.

Dans ces conditions, l'audition de ces trois personnes, pas plus que celle du recourant, n'est de nature à modifier l'appréciation du SEM, puis de l'OCPM, quant à la force probante des attestations signées par MM. J______, I______ et F______. Elle ne s'avérait pas utile ni nécessaire tant devant le TAPI que la chambre de céans.

Ainsi, faute pour le recourant d'avoir amené un quelconque élément probant supplémentaire d'une durée de séjour ininterrompu de plus de dix ans au jour du dépôt de sa demande du 6 avril 2018, l'OCPM a considéré à juste titre et sans violer son pouvoir d'appréciation qu'il ne satisfaisait pas à la condition de la durée de séjour requise, y compris et en particulier sous l'angle de l'opération « Papyrus ».

Pour le surplus, comme retenu à juste titre par le TAPI, le recourant ne peut pas se prévaloir d'une intégration sociale exceptionnelle. Le fait de travailler pour ne pas dépendre de l'aide sociale, étant toutefois relevé que le recourant ne prétend ni ne démontre s'être acquitté des charges sociales ou qu'un employeur l'ait fait en sa faveur, d'éviter de commettre des actes répréhensibles et de s'efforcer d'apprendre au moins la langue nationale reste dans ce qui peut être attendu de tout étranger souhaitant obtenir la régularisation de ses conditions de séjour. Le recourant ne soutient pas avoir créé en Suisse des liens dépassant en intensité ce qui peut être raisonnablement attendu d’étrangers ayant passé un nombre d'années équivalent dans le pays.

Il est né en Tunisie où il a passé son enfance, son adolescence, ainsi que la majeure partie de sa vie d’adulte. Il ne conteste pas que des membres de sa famille y vivent, ce que tendent à démontrer les visas d'un mois sollicités et un billet d'avion pour y retourner en 2019 et 2020.

Il pourra, de retour en Tunisie, quand bien même son retour nécessitera une période de réadaptation, mettre en avant les connaissances et compétences acquises en Suisse. Il ne fait ainsi état ni ne démontre qu'il se trouverait dans une situation de détresse personnelle devant justifier l'octroi d'une exception aux mesures de limitation.

En conséquence, l'OCPM n'a pas abusé de son pouvoir d'appréciation en retenant que le recourant ne remplissait pas les critères du cas de rigueur au sens des art. 30 LEI et 31 OASA, ce que le TAPI a confirmé à raison après analyse de tous les éléments et griefs pertinents.

11) a. Selon l'art. 64 al. 1 LEI, les autorités compétentes renvoient de Suisse tout étranger qui n'a pas d'autorisation alors qu'il y est tenu (let. a), ainsi que tout étranger dont l'autorisation est refusée, révoquée ou n'a pas été prolongée (let. c) en assortissant ce renvoi d'un délai de départ raisonnable (al. 2). Le renvoi d'un étranger ne peut toutefois être ordonné que si l'exécution de celui-ci est possible, licite ou peut être raisonnablement exigée (art. 83 al. 1 LEI).

b. Le recourant ne soutient pas que l'exécution de son renvoi, que se devait d'ordonner l'OCPM compte tenu du refus de délivrance d'un titre de séjour, serait impossible, illicite ou ne pourrait être raisonnablement exigé.

En tout point infondé, son recours sera rejeté.

12) Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge du recourant (art. 87 al. 1 LPA) et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 1er février 2022 par Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 20 décembre 2021 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge de Monsieur A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Caritas Genève, mandataire de Monsieur A______, à l’office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mmes Lauber et McGregor, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

M. Michel

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 

 

 

 

 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.