Skip to main content

Décisions | Chambre civile

1 resultats
C/6565/2019

ACJC/820/2022 du 15.06.2022 sur JTPI/10581/2021 ( OS ) , CONFIRME

En fait
En droit
Par ces motifs

république et

canton de genève

POUVOIR JUDICIAIRE

C/6565/2019 ACJC/820/2022

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MERCREDI 15 JUIN 2022

 

Entre

A______ SÀRL, sise ______, appelante d'un jugement rendu par la 20ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 20 août 2021, comparant par Me Eve DOLON, avocate, rue Etienne Dumont 6-8, 1204 Genève, en l'Étude de laquelle elle fait élection de domicile,

et

Madame B______, domiciliée ______, intimée, comparant par Me Shahram DINI, avocat, De la Gandara & Ass., place du Port 1, 1204 Genève, en l'Étude duquel elle fait élection de domicile.

 


EN FAIT

A. a. A______ SÀRL est une société suisse dont le but est l'exploitation du garage C______ au D______ (Genève). E______ en est l'associé gérant, avec signature individuelle.

b. B______ et F______ se sont mariés le ______ 1987. Ils se sont séparés le 1er septembre 2004.

c. F______ n'était pas domicilié en Suisse entre les mois de juin 1992 et de juillet 2007. Il a ensuite été enregistré auprès de l'Office cantonal de la population à Genève jusqu'au 17 octobre 2016, date à laquelle il a quitté la Suisse pour G______ (Portugal).

B. a. B______ est l'administratrice avec signature individuelle de H______ SA, société suisse active dans la construction, la rénovation, la gérance, la location de résidences et d'appartements meublés ainsi que tous les travaux d'installations sanitaires et de chauffage.

b. I______ SÀRL est une société active dans l'exploitation d'un salon de coiffure, d'un institut de beauté et de remise en forme, ainsi que dans le commerce de produits de beauté. Son gérant est J______, avec signature individuelle. B______ allègue en être l'ayant droit économique.

K______ SA, anciennement L______ SA et aujourd'hui M______ SA, est une société suisse administrée par B______, avec signature individuelle. Cette société est l'associée unique de I______ SÀRL.

c. N______ SA est une société dont le but est l'acquisition, la gestion, la détention et la cession d'intérêts, la prise de participations à des sociétés de capitaux et services s'y rattachant, dans le sens d'une société holding. B______ en est l'administratrice unique, avec signature individuelle et l'ayant droit économique.

C. a. Durant plusieurs années, H______ SA et N______ SA ont confié à A______ SÀRL, par l'intermédiaire de B______ et F______, divers travaux d'entretien et de réparation sur leurs véhicules U______, V______, et W______. Les époux ont établi dans ce contexte une relation de confiance avec E______. Cette relation s'est toutefois dégradée dès l'été 2018.

Outre ces véhicules, un bateau à moteur de marque O______ (ci-après, le bateau) a également été confié à A______ SÀRL et entreposé dans les locaux du garage C______, de 2010 à 2018 selon le souvenir de F______.

b. D'après les cartes grises produites, B______ a été inscrite en qualité de détentrice du bateau du 2 juin 2006 au 28 avril 2009 puis du 27 juillet 2016 au 31 janvier 2017, date à laquelle la carte grise a été annulée. Le bateau a ensuite été détenu une journée, le 20 décembre 2017, par I______ SÀRL. La carte grise, produite et annulée à cette date, contient une note manuscrite mentionnant "Mr. F______".

c. A______ SÀRL affirme que B______ est la propriétaire du bateau. Cette dernière allègue que le bateau appartient à I______ SÀRL. Elle a précisé, lors de son audition devant le Tribunal, que le bateau avait été acheté par F______ avant leur mariage en 1987, que la propriété du bateau avait changé à plusieurs reprises, qu'elle en avait été propriétaire à certaines dates dont elle ne se souvenait plus, mais que celui-ci appartenait en réalité à son mari.

Lors des enquêtes devant le Tribunal, F______ a déclaré que le bateau appartenait à son épouse, qui lui avait délégué tous les problèmes mécaniques de ses voitures et de son bateau. Il avait agi en tant que son représentant. Il a cependant toujours fait référence à "son" bateau.

Il ressort également des auditions de P______ et Q______, amis de F______, que le bateau appartenait bien à ce dernier. Ces témoins ont expliqué avoir effectué gratuitement des travaux sur le bateau en présence de F______. R______, mécanicien de A______ SÀRL, et S______, carrossier, ont indiqué que F______ venait examiner "son bateau" de temps en temps.

D. a. Des travaux de réfection complète de la coque et de renforcement de la proue ont également été exécutés par S______ à la demande de E______. Ce dernier s'est d'ailleurs acquitté d'un premier montant de 10'740 fr. TTC pour les travaux de peinture effectués en juin 2012 et d'un second de 6'464 fr. 15 TTC pour les travaux en lien avec le renforcement de la proue réalisés au mois de juillet 2017.

Au sujet du paiement des travaux effectués, F______ a déclaré avoir proposé plusieurs fois à E______ de le payer mais que ce dernier lui répondait à chaque fois "on verra ça" et qu'ils étaient toujours en compte, car il vendait des voitures pour F______.

E______ a exposé avoir reçu des acomptes de la part de F______, entre 2010 et 2018, pour ses interventions sur le bateau.

b. En fin d'année 2016, une remorque de marque T______ a été achetée pour le transport du bateau. Sur la carte grise du 14 décembre 2016, B______ figure en qualité de détentrice de la remorque alors qu'elle a déclaré devant le Tribunal qu'elle en ignorait l'existence. À cette époque, F______ était domicilié au Portugal.

c. Le 31 décembre 2016, A______ SÀRL a émis une facture n° 2______ d'un montant de 6'193 fr. 80 au nom de B______ pour le transport de la remorque, son dédouanement et les différentes démarches effectuées en vue de son immatriculation. Le 3 janvier 2017, A______ SÀRL a émis une autre facture, également au nom de B______, pour un montant de 24'866 fr. 35 comprenant le prix de la remorque, le solde des émoluments de douane ainsi que différentes démarches effectuées en vue de l'homologation de la remorque en Suisse.

B______ soutient n'avoir jamais reçu lesdites factures.

La seconde a été soldée par deux versements de respectivement 20'000 fr. et 10'000 fr. les 25 septembre et 21 décembre 2017, les 5'133 fr. 65 de crédit étant affectés au paiement de la première à due concurrence, laissant un impayé de 1'060 fr. 15.

Il est admis que le versement de 10'000 fr. a été effectué par N______ SA. L'auteur de celui de 20'000 fr. ne ressort pas du dossier.

B______ a indiqué ne pas se souvenir avoir versé des acomptes pour le bateau et que, si cela avait été le cas, elle ne l'avait pas effectué personnellement. A l'inverse, F______ a reconnu avoir payé environ 30'000 fr. pour la remorque avec le transport.

d. Le 21 décembre 2017, A______ SÀRL a émis une facture n° 3______ d'un montant de 108 fr. au nom de F______ pour "émolument immatriculation du bateau et annulation".

e. Le 23 février 2018, A______ SÀRL a émis une facture n° 4______ d'un montant de 10'502 fr. 95 au nom de B______ pour des travaux de renforcement du museau et de la pointe avant du bateau, ainsi que du point d'ancrage à l'avant.

B______ affirme n'avoir jamais reçu cette facture.

f. Le 17 octobre 2018, A______ SÀRL a envoyé un rappel à B______ pour le solde des factures n° 2______, 3______ et 4______, correspondant à un montant total de 11'671 fr. 10.

Le 9 novembre 2018, A______ SÀRL a mis, par courrier recommandé, B______ en demeure de régler ce montant dans les 10 jours. Cette dernière n'a pas retiré le courrier.

g. Le 7 janvier 2019, A______ SÀRL a fait notifier un commandement de payer, poursuite n° 1______, portant sur les montants de 1'060 fr. 15 pour le solde de la facture n° 2______ du 31 décembre 2016 avec intérêts à 5% l'an dès le 1er février 2017, de 108 fr. pour la facture n° 3______ du 21 décembre 2017 avec intérêts à 5% l'an dès le 22 janvier 2017, et de 10'502 fr. 95 pour la facture n° 4______ du 23 février 2018 avec intérêts à 5% l'an dès le 24 mars 2018.

B______ a formé opposition à ce commandement de payer.

E. a. Par acte déposé au greffe du Tribunal le 20 mars 2019, puis redéposé le 20 juin 2019 après l'échec de la tentative de conciliation, A______ SÀRL a conclu à ce que le Tribunal dise que les travaux avaient été effectués dans les règles de l'art, condamne B______ au paiement des montant réclamés dans le commandement de payer susmentionné, auxquels s'ajoutaient les frais de poursuite (90 fr.) et de justice (100 fr.), et lève l'opposition au commandement de payer.

b. Dans sa réponse du 15 novembre 2019, B______ a conclu au déboutement de A______ SÀRL de toutes ses conclusions. Subsidiairement, elle a conclu à ce que le Tribunal compense les montants réclamés avec sa créance contre A______ SÀRL et au déboutement des conclusions de cette dernière en mainlevée de l'opposition au commandement de payer, poursuite n° 1______.

c. Les parties ont répliqué et dupliqué, persistant dans leurs conclusions.

d. Le Tribunal a tenu une audience de débats principaux, rendu une ordonnance de preuves, et entendu les parties et des témoins, dont les déclarations ont été reprises ci-dessus dans la mesure utile.

e. Dans leurs plaidoiries finales écrites du 10 juin 2021, les parties ont persisté dans leurs conclusions et le Tribunal a gardé la cause à juger.

F. Par jugement JTPI/10581/2021 rendu le 20 août 2021 et notifié aux parties le 30 août 2021, le Tribunal a débouté A______ SÀRL de toutes ses conclusions (chiffre 1 du dispositif), arrêté les frais judiciaires à 3'100 fr. et les a compensés avec les avances fournies par les parties, les a mis à la charge de A______ SÀRL, condamnée à payer à B______ 400 fr. au titre de remboursement de son avance et 2'935 fr. TTC à titre de dépens (ch. 3) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch.4 ).

En substance, le Tribunal a d'abord jugé que F______ était le propriétaire du bateau. Ensuite, retenant que c'était le cocontractant de A______ SÀRL qui était débiteur des prestations facturées, lequel n'était pas nécessairement le propriétaire du bateau, il a considéré que la légitimation passive de B______ n'était pas donnée, cette dernière n'étant pas la cocontractante de A______ SÀRL et n'étant par conséquent pas débitrice des factures litigieuses.

G. a. Par acte déposé le 28 septembre 2021 au greffe de la Cour de justice, A______ SÀRL a formé appel contre ce jugement, sollicitant son annulation. Cela fait, elle a conclu à ce que la Cour constate que la décision entreprise violait le droit fédéral, renvoie la cause au premier juge pour nouvelle décision dans le sens des considérants de la décision d'appel, condamne B______ en tous les frais et dépens de la procédure d'appel, lui octroie une indemnité valant participation à ses frais d'avocat et déboute B______ de toutes autres ou contraires conclusions.

Subsidiairement, elle a conclu à ce que la Cour condamne B______ à lui verser la somme de 1'060 fr. 15 avec intérêts à 5% dès le 1er février 2017, 108 fr avec intérêts à 5% dès le 22 janvier 2017 et 10'502 fr. 95 avec intérêts à 5% dès le 24 mars 2018, lève l'opposition formée au commandement de payer, poursuite n° 1______, et dise que la poursuite ira sa voie, condamne B______ à tous les frais de poursuite et à tous les frais et dépens de la procédure de première instance et d'appel, lesquels comprendront une équitable indemnité valant participation aux honoraires de son avocat et déboute B______ de toutes ses conclusions.

b. Dans son mémoire de réponse du 11 novembre 2021, B______ a conclu à ce que la Cour déclare irrecevables les allégués n° 5 et 6 du mémoire d'appel du 28 septembre 2021 ainsi que la pièce n° 2 du chargé s'y rapportant, déboute A______ SÀRL de toutes ses conclusions, confirme le jugement entrepris, sous suite de frais et dépens, comprenant une équitable indemnité valant participation aux honoraires d'avocat de B______, et déboute l'appelante de toutes autres ou contraires conclusions.

c. Par réplique et duplique des 30 novembre 2021 et 23 décembre 2021, les parties ont persisté dans leurs conclusions.

d. Elles ont été informées par plis du 23 décembre 2021 de ce que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. 1.1 Dans les affaires patrimoniales, l'appel est recevable si la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 2 CPC).

En l'espèce, la valeur litigieuse excède le montant de 10'000 fr., de sorte que la voie de l'appel est ouverte

1.2 L'appel a été déposé dans le délai de 30 jours (art. 311 al. 1 CPC) et selon la forme prescrite par la loi, par une partie qui y a intérêt (art. 59 al. 2 let. a CPC) et auprès de l'autorité compétente (art. 120 al. 1 let. a LOJ), de sorte qu'il est recevable.

1.3 La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen en fait et en droit (art. 310 CPC).

2. L'appelante a produit une pièce nouvelle et allégué des faits nouveaux.

2.1 Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuve nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de diligence (let. b).

2.2 La pièce n° 2 nouvellement produite par l'appelante devant la Cour à l'appui de son mémoire d'appel du 28 septembre 2021 ainsi que les allégués n° 5 et 6 dudit mémoire s'y rapportant sont irrecevables, dans la mesures où ils auraient pu et dû être invoqués devant la première instance déjà et que l'appelante ne démontre pas en quoi elle aurait été empêchée de le faire.

3. Les conclusions principales de l'appelante sont nouvelles.

La question de leur recevabilité peut toutefois demeurer indécise, compte tenu de l'issue du litige.

4. L'appelante fait grief au Tribunal d'avoir violé les dispositions relatives à la propriété mobilière en considérant que l'intimée n'était pas la propriétaire du bateau. Elle reproche également au premier juge d'avoir violé le droit en lui faisant supporter le fardeau de la preuve relative à la propriété du bateau et en n'interpellant pas les parties à cet égard.

4.1 Seul le dispositif de la décision jouit de l'autorité de la chose jugée, à l'exception des motifs (ATF 106 II 117 consid. 1; arrêt du Tribunal fédéral 5G_1/2021 du 10 juin 2021 consid. 3). Une critique exclusivement dirigée contre la motivation de la décision attaquée, sans influence sur son résultat, est irrecevable, faute de répondre à un intérêt digne de protection de la partie recourante (arrêt du Tribunal fédéral 4A_405/2012 précité consid. 5).

4.2 En l'espèce, dans son dispositif, le Tribunal n'a pas tranché la question de savoir qui était le propriétaire du bateau. Dans les motifs de la décision, tout en considérant que celui-ci n'était pas nécessairement le débiteur des prestations fournies par l'appelante, il a retenu que F______ revêtait cette qualité. Ce point, sans pertinence pour la solution du litige, n'est pas revêtu de l'autorité de la chose jugée, de sorte que les griefs y relatifs ne sont pas recevables, faute d'intérêt digne de protection de l'appelante.

Seul est déterminant le point de savoir quelles étaient les parties au contrat, dont l'appelante réclame paiement des prestations effectuées en exécution dudit.

5. L'appelante reproche au Tribunal d'avoir violé les dispositions relatives à la représentation, et plus particulièrement à la représentation conjugale, en retenant que F______ n'avait pas agi en qualité de représentant de l'intimée dans ses relations contractuelles avec l'appelante.

Il convient dès lors de déterminer si B______ est cocontractante de l'appelante pour les prestations facturées dont celle-ci lui réclame paiement, en vertu d'un rapport de représentation avec F______.

5.1.1 La vente est un contrat par lequel le vendeur s'oblige à livrer la chose vendue à l'acheteur et à lui en transférer la propriété, moyennant un prix que l'acheteur s'engage à lui payer (art. 184 al. 1 CO).

Le contrat d'entreprise est un contrat par lequel une des parties (l'entrepreneur) s'oblige à exécuter un ouvrage, moyennant un prix que l'autre partie (le maître d'ouvrage) s'engage à lui payer (art. 363 CO).

A teneur de l'art. 1 CO, le contrat est parfait lorsque les parties ont, réciproquement et d'une manière concordante, manifesté leur volonté (al. 1). Cette manifestation peut être expresse ou tacite (al. 2).

Pour déterminer quels sont les cocontractants d'une relation contractuelle, le juge doit interpréter les manifestations de volonté. Il doit rechercher, dans un premier temps, la réelle et commune intention des parties (interprétation subjective), le cas échéant empiriquement, sur la base d'indices (ATF 132 III 268 consid. 2.3.2; ATF 132 III 626 consid. 3.1; ATF 131 III 606 consid. 4.1). Constituent des indices en ce sens non seulement la teneur des déclarations de volonté - écrites ou orales -, mais encore le contexte général, soit toutes les circonstances permettant de découvrir la volonté des parties, qu'il s'agisse de déclarations antérieures à la conclusion du contrat ou de faits postérieurs à celle-ci, en particulier le comportement ultérieur des parties établissant quelles étaient à l'époque les conceptions des contractants eux-mêmes (ATF 118 II 365 consid. 1; ATF
112 II 337 consid. 4a). L'appréciation de ces indices concrets par le juge, selon son expérience générale de la vie, relève du fait (ATF 118 II 365 consid. 1; pour un résumé de la jurisprudence sur l'interprétation, cf. les arrêts du Tribunal fédéral 4A_508/2016 du 16 juin 2017 consid. 6.2, non publié aux ATF 143 III 348; 4A_98/2016 du 22 août 2016 consid. 5.1; 4A_608/2016 du 30 mai 2017 consid. 2.4). Si sa recherche aboutit à un résultat positif, le juge parvient à la conclusion que les parties se sont comprises (arrêt du Tribunal fédéral 4A_155/2017 du 12 octobre 2017 consid. 2.3).

Si le juge ne parvient pas à déterminer la volonté réelle et commune des parties - parce que les preuves font défaut ou ne sont pas concluantes - ou s'il constate qu'une partie n'a pas compris la volonté exprimée par l'autre à l'époque de la conclusion du contrat (ATF 131 III 280 consid. 3.1) - ce qui ne ressort pas déjà du simple fait qu'elle l'affirme en procédure, mais doit résulter de l'administration des preuves (arrêts du Tribunal fédéral 4A_210/2015 du 2 octobre 2015 consid. 6.2.1; 5C.252/2004 du 30 mai 2005 consid. 4.3) -, il doit recourir à l'interprétation normative (ou objective), à savoir rechercher leur volonté objective, en déterminant le sens que, d'après les règles de la bonne foi, chacune d'elles pouvait et devait raisonnablement prêter aux déclarations de volonté de l'autre (application du principe de la confiance; ATF 132 III 268 consid. 2.3.2 ; ATF 132 III 626 consid. 3.1; ATF 118 II 365 consid. 1). Ce principe permet d'imputer à une partie le sens objectif de sa déclaration ou de son comportement, même si celui-ci ne correspond pas à sa volonté intime (ATF 130 III 417 consid. 3.2 et les arrêts cités). La détermination de la volonté objective des parties, selon le principe de la confiance, est une question de droit; pour la trancher, il faut cependant se fonder sur le contenu de la manifestation de volonté et sur les circonstances, lesquelles relèvent du fait. Les circonstances déterminantes à cet égard sont uniquement celles qui ont précédé ou accompagné la manifestation de volonté, mais non pas les événements postérieurs (ATF 133 III 61 consid. 2.2.1 et les arrêts cités; arrêt du Tribunal fédéral 4A_155/2017 précité consid. 2.3).

5.1.2 Aux termes de l'art. 32 al. 1 CO, les droits et obligations dérivant d'un contrat fait au nom d'une autre personne par un représentant autorisé passent au représenté. Il s'ensuit que le représentant n'est pas lié par l'acte accompli. D'après l'art. 32 al. 2 CO, lorsqu'au moment de la conclusion du contrat le représentant ne s'est pas fait connaître comme tel, le représenté ne devient directement créancier ou débiteur que si celui avec lequel il contracte devait inférer des circonstances qu'il existait un rapport de représentation, ou s'il lui était indifférent de traiter avec l'un ou l'autre.

La preuve de l'existence d'un rapport de représentation incombe à celui qui s'en prévaut (art. 8 CC; arrêt du Tribunal fédéral 4A_186/2009 du 3 mars 2010 consid. 4.2).

5.1.3 A teneur de l'art. 166 al. 1 CC, chaque époux représente l'union conjugale pour les besoins courants de la famille pendant la vie commune.

Par besoins courants, il faut comprendre les actes destinés à assurer l'entretien usuel et quotidien de la famille. Font en général partie des besoins courants les dépenses liées à l'alimentation, aux soins corporels, à l'habillement, à l'entretien du logement de la famille, etc. (CR CC-Leuba, ad art. 166 N 18).

Un acte conclu dans l'intérêt d'un des époux seulement n'entre pas dans le champ de cette disposition (CR CC-Leuba, ad art. 166 N 14).

Ce pouvoir de représentation s'éteint dès la suspension de la vie commune, une séparation de fait étant suffisante (CR CC-Leuba, ad art. 166 N 12).

5.2.1 En l'espèce, s'agissant d'abord du montant réclamé de 1'060 fr. 15 en capital, soit le solde dû pour l'acquisition de la remorque, le Tribunal a retenu à bon droit que l'intimée n'en était pas la débitrice, et la Cour fait siens les motifs du premier juge.

Ainsi, tout d'abord, il n'est pas établi que l'intimée ait été l'acquéreuse de la remorque et qu'elle ait mandaté l'appelante dans ce cadre. En effet, elle a déclaré qu'elle ignorait tout de cet achat. Elle a d'ailleurs contesté avoir reçu les factures y relatives, et l'appelante n'a pas démontré que tel avait été le cas. Sa qualité de détentrice de la remorque sur la carte grise n'emporte pas celle de cocontractante de l'appelante pour les prestations effectuées en lien avec cet achat, alors même qu'il ne ressort pas du dossier qu'elle aurait eu le moindre contact avec l'appelante dans ce cadre, au contraire de F______. A cet égard, le Tribunal a justement relevé la nécessité d'un détenteur de la remorque domicilié en Suisse, alors que F______ était domicilié au Portugal. Ces contraintes administratives ne suffisent pas à faire de l'intimée la cocontractante de l'appelante. F______ a par ailleurs reconnu avoir payé le montant de 30'000 fr. ayant servi à couvrir partiellement les prestations de l'appelante en lien avec l'acquisition de la remorque, admettant ainsi implicitement en être le débiteur, car cocontractant de l'appelante. Aucune pièce ne vient démentir ce qui précède, les avis de débit des montants précités n'ayant pas été produits et le versement dont il est admis qu'il a été effectué par N______ SA ne portant aucune référence.

5.2.2 La facture n°3______, en 108 fr., a été adressée à F______, et non à l'intimée. Le fait que les rappels subséquents aient été envoyés à l'intimée ne suffit pas à considérer que celle-ci était la cocontractante de l'appelante. En effet, il n'est pas établi que l'intimée ait eu le moindre contact avec l'appelante en lien avec le bateau. Au contraire, les enquêtes ont démontré que le seul interlocuteur de l'appelante à cet égard était F______. Il ne peut être tiré argument du fait que le bateau ait été immatriculé au nom de I______ SARL, au demeurant pour une seule journée, personne morale à la personnalité propre, indépendante de celle de l'intimée, vraisemblablement utilisée pour des raisons administratives (comme pour la remorque), F______ étant alors domicilié au Portugal.

5.2.3 Les arguments qui précèdent valent mutadis mutandis pour la facture n° 4______ relative aux travaux de renforcement de la proue. A cela s'ajoute que ces travaux ont été commandés et payés par E______, lequel n'a eu de contact qu'avec F______, qui lui avait remis le bateau et régulièrement versé des acomptes en paiement de ses différentes factures.

Au vu des considérations qui précèdent, il faut admettre, avec le Tribunal, que l'intimée n'a pas, au moins directement, mandaté l'appelante pour les prestations dont le paiement lui est réclamé. Reste à examiner si F______ a agi en qualité de représentant de l'intimée, en mandatant l'appelante pour les prestations détaillées ci-dessus.

5.2.4 En ce qui concerne un éventuel pouvoir de représentation découlant de l'art. 32 CO, l'appelante n'a pas produit de procuration ni aucun autre document de ce type prouvant que F______ aurait disposé du pouvoir de représenter B______.

Un tel pouvoir de représentation ne peut pas non plus être déduit des circonstances du cas d'espèce. En effet, comme il a déjà été relevé, F______ s'est toujours occupé de gérer les questions relatives au bateau et il a été le seul interlocuteur de l'appelante. Le fait que l'intimée apparaissait sur la carte grise remise à l'appelante était insuffisant pour considérer que F______ agissait comme représentant de l'intimée, faute d'autres éléments en ce sens.

5.2.5 Il ne peut non plus être retenu que F______ agissait en qualité de représentant de l'union conjugale, s'agissant de prestations qui n'entrent de toute évidence pas dans les besoins courants de la famille.

6. Dans son dernier grief, l'appelante reproche au Tribunal d'avoir méconnu le principe de la transparence (Durchgriff). Elle prétend que le premier juge aurait dû admettre la légitimation passive de l'intimée au motif cette dernière est l'ayant droit économique de I______ SÀRL, société supposément propriétaire du bateau.

6.1 Lorsqu'une personne fonde une personne morale, il faut en principe considérer qu'il y a deux sujets de droit distinct avec des patrimoines séparés. Toutefois un tiers peut être, dans des circonstances particulières, tenu des engagements d'un débiteur avec lequel il forme une identité économique. En effet, selon le principe de la transparence (Durchgriff), on ne peut pas s'en tenir sans réserve à l'existence formelle de deux personnes juridiquement distinctes lorsque tout l'actif ou la quasi-totalité de l'actif d'une personne morale appartient soit directement, soit par personnes interposées, à une même personne, physique ou morale. On doit alors admettre que, conformément à la réalité économique, il y a identité de personnes et que les rapports de droit liant l'une lient également l'autre; ce sera le cas chaque fois que le fait d'invoquer la diversité des sujets constitue un abus de droit, notamment en détournant la loi, en violant un contrat ou en portant une atteinte illicite aux intérêts d'un tiers (ATF 144 III 541 consid. 8.3.1; ATF 132 III 489 consid. 3.2).

6.2 En l'espèce, il a déjà été relevé que la qualité de propriétaire du bateau, voire de la remorque, n'emportait pas celle de débiteur des prestations dont le paiement est réclamé. Pour cette raison déjà, peu importe qu'il y ait ou non identité économique entre l'intimée et I______ SARL. Il en va de même s'agissant du versement de 10'000 fr. opéré par N______ SA, dont aucun argument ne peut être tiré s'agissant du coconctractant de l'appelante, au vu des autres éléments du dossier.

7. En conclusion, au vu des considérations qui précèdent, c'est à bon droit que le Tribunal a considéré que l'intimée n'était pas la cocontractante de l'appelante et qu'elle n'avait dès lors pas la légitimation passive à l'action en paiement, laquelle devait être rejetée.

Le jugement entrepris sera confirmé.

8. Les frais judiciaires d'appel, arrêtés à 1'800 fr. (art. 35 et 36 RTFMC), sont mis à la charge de l'appelante qui succombe (art. 106 al.1 CPC). Ils sont entièrement compensés avec l'avance de frais du même montant déjà versée (art. 111 al. 1 CPC; art. 2 RTFMC), laquelle reste acquise à l'Etat de Genève.

L'appelante sera en outre condamnée à verser à l'intimée la somme de 1'500 fr. à titre de dépens d'appel, débours et TVA compris (art. 105 al. 2 CPC; art. 84, 85 et 90 RTFMC; art. 20 al. 1, 25 et 26 LaCC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté par A______ SÀRL contre le jugement JTPI/10581/2021 rendu le 20 août 2021 par la 20ème Chambre de Tribunal de première instance dans la cause C/6565/2019.

Au fond :

Confirme ce jugement.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Met à la charge de A______ SÀRL les frais judiciaires d'appel, arrêtés à 1'800 fr. et compensés avec l'avance fournie, acquise à l'Etat de Genève.

Condamne A______ SÀRL à verser à B______ 1'500 fr. à titre de dépens d'appel.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Madame Pauline ERARD, Madame Paola CAMPOMAGNANI, juges; Madame Sandra CARRIER, greffière.

 

Le président :

Cédric-Laurent MICHEL

 

La greffière :

Sandra CARRIER

 

 

 

 


 

 

Indication des voies de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière civile; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 72 à 77 et 90 ss de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110). Il connaît également des recours constitutionnels subsidiaires; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 113 à 119 et 90 ss LTF. Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué. L'art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF inférieure à 30'000 fr.