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Décisions | Chambre civile

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C/5077/2021

ACJC/567/2022 du 26.04.2022 sur OTPI/800/2021 ( SDF ) , CONFIRME

Normes : CPC.261.al1
En fait
En droit
Par ces motifs

république et

can ton de genève

POUVOIR JUDICIAIRE

C/5077/2021 ACJC/567/2022

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 26 AVRIL 2022

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______ (GE), appelant d'une ordonnance rendue par la 12ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 2 novembre 2021, comparant par Me Annette MICUCCI, avocate, rue Général-Dufour 15, case postale, 1211 Genève 4, en l'Etude de laquelle il fait élection de domicile,

et

Madame B______, domiciliée ______ (GE), intimée, comparant par Me Magda KULIK, avocate, rue du Rhône 116, 1204 Genève, en l'Etude de laquelle elle fait élection de domicile.

 


EN FAIT

A.           Par ordonnance OTPI/800/2021 du 2 novembre 2021, notifiée à A______ le 3 novembre 2021, statuant sur mesures provisionnelles dans le cadre d'une procédure de mesures protectrices de l'union conjugale initiée par B______, le Tribunal de première instance a condamné A______ à payer à B______ la somme de 12'924 fr. TTC à titre de provisio ad litem (ch. 1 du dispositif), arrêté les frais de ladite ordonnance à 2'000 fr., mis ces frais à la charge de A______, condamné celui-ci à verser 2'000 fr. à l'Etat de Genève (ch. 2), dit qu'il n'était pas alloué de dépens (ch. 3) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 4).

B.            a. Par acte déposé au greffe de la Cour de justice le 12 novembre 2021, A______ appelle de cette ordonnance, dont il sollicite l'annulation.

Principalement, il conclut au déboutement de B______ de ses conclusions en paiement d'une provisio ad litem, à ce que l'intégralité des frais de la procédure de mesures provisionnelles soient mis à la charge de l'Etat et à ce qu'il lui soit alloué des dépens, à la charge de l'Etat.

b. Dans sa réponse du 13 décembre 2021, B______ conclut au rejet de l'appel et à la confirmation de l'ordonnance entreprise, avec suite de frais judiciaires et dépens.

A l'appui de sa réponse, elle produit diverses pièces non soumises au Tribunal, établies entre le 30 septembre et le 4 décembre 2021.

c. A______ n'a pas répliqué.

d. Les parties ont été informées de ce que la cause était gardée à juger par pli du greffe du 11 janvier 2022.

C.           Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. Les époux A______, né le ______ 1967, de nationalité néerlandaise, et B______, née le ______ 1970, de nationalité française, se sont mariés le ______ 2005 à G______ [France].

b. Ils sont les parents d'C______, né le ______ 2005, et de D______, née le ______ 2007.

c. En proie à d'importantes difficultés conjugales, les époux vivent ensemble dans la villa familiale sise à E______ mais font chambre à part depuis une date indéterminée.

d. Par acte du 16 mars 2021, B______ a formé une requête de mesures protectrices de l'union conjugale, concluant principalement à l'attribution à elle-même de la jouissance du domicile conjugale et celle de la garde des enfants D______ et C______, à ce que A______ soit condamné à contribuer à leur entretien à hauteur de divers montants compris entre 2'540 fr. et 5'270 fr. par mois, à ce qu'il également soit condamné à lui payer la somme de 10'805 fr par mois à titre de contribution à son propre entretien, et à ce qu'il soit condamné à lui verser une somme 12'924 fr. à titre de provisio ad litem.

A titre préalable, B______ a notamment conclu à ce qu'il soit ordonné à A______ de produire toutes les pièces utiles relatives à la détermination de ses revenus et de sa fortune, ainsi que des charges des enfants.

e. Par ordonnance du 19 mars 2021, le Tribunal a fixé l'avance de frais due par B______ à 2'000 fr. et a suspendu le délai de paiement jusqu'à décision sur la requête de provisio ad litem.

f. Dans sa réponse, A______ a notamment conclu à ce que la garde des enfants D______ et C______ lui soit attribuée, à ce que B______ soit déboutée de ses conclusions tendant au versement d'une proviso ad litem et à ce qu'il lui soit donné acte de son engagement à lui verser une contribution d'entretien mensuelle de 3'200 fr., à compter du jour où elle se sera constitué un domicile séparé.

g. Par réplique du 19 août 2021, B______ a persisté dans ses conclusions. A______ n'a pas dupliqué.

h. A l'audience de comparution personnelle du 17 septembre 2021, le Tribunal a notamment a invité les parties à plaider sur la question de la provisio ad litem. Celles-ci ont alors persisté dans leurs conclusions.

A l'issue de l'audience, le Tribunal a gardé la cause à juger sur provisio ad litem.

i. La situation personnelle et financière des parties s'établit comme suit :

i.a A______ est employé auprès de F______ SA depuis le
1er février 2021. Selon son contrat de travail, il réalise un salaire annuel brut de 290'000 fr. hors frais de représentation en 14'400 fr. et hors bonus, lequel est discrétionnaire et limité à un montant maximal de 1'500'000 fr. par an.

A______ est propriétaire de la villa familiale sise à E______[GE], dans laquelle les époux résident tous deux et qui a été estimée à 2'580'000 fr. en 2016. Selon les éléments retenus par l'administration fiscale pour l'année 2019, il détient en outre une fortune mobilière de 233'683 fr.

i.b Jusqu'en septembre 2020, A______ a assuré l'entretien de la famille, qui menait un train de vie confortable.

Ses charges personnelles, qui ne sont pas établies à ce stade, s'élèvent à 7'670 fr. selon B______. A______ soutient que ses charges sont plus importantes, sans plus de précision. Selon ses extraits de comptes bancaires, il s'est acquitté d'acomptes mensuels de 5'754 fr. 60 auprès de l'administration fiscale pour les mois de mai à décembre 2021.

i.c B______ dispose d'une formation en communication et d'une expérience en qualité de secrétaire administrative. Elle n'exerce aucune activité lucrative depuis la naissance de D______ en 2007 et ne réalise aucun revenu.

Depuis septembre 2020, A______ met à sa disposition un montant mensuel d'environ 3'500 fr., dont un montant de 1'500 fr est viré sur son compte bancaire. Quant au solde de 2'000 fr., utilisé pour les courses alimentaires de la famille, il est mis à sa disposition au moyen d'une carte de débit liée à un compte bancaire détenu par A______.

Ce dernier s'acquitte en outre de "ses frais mensuels sur facture", mais déduit le montant de certaines factures des 1'500 fr. qu'il lui verse.

i.d B______ est nue-propriétaire de trois biens immobiliers situés en France, qu'elle a reçus en donation de son oncle, lequel s'en est réservé l'usufruit.

En janvier 2020, B______ disposait d'une fortune mobilière de 48'631.63 EUR sous la forme d'avoirs bancaires. Divers retraits ont été effectués depuis lors sur le compte concerné, dont notamment un retrait de 22'941.74 EUR en novembre 2020. Ce compte bancaire présentait un solde en sa faveur de 2'721.34 EUR en avril 2021, puis de 1'949.88 EUR au 31 octobre 2021.

Devant le Tribunal, B______ a déclaré avoir utilisé la somme de 22'941.74 EUR retirée en novembre 2020 pour l'entretien du ménage et des enfants. Elle avait dépensé ce montant les mois suivants son retrait. Le solde des fonds lui avait par ailleurs permis d'apporter un soutien financier à sa mère, dès lors qu'ils provenaient d'une donation de son oncle. Elle s'était également acquittée des frais d'une opération chirurgicale, qu'elle avait subie au mois de mars 2020.

Outre le compte bancaire susvisé, B______ possède un autre compte bancaire, qui présentait un solde en sa faveur de 4'484 fr. 84 au 3 décembre 2021.

i.e B______ a allégué devant le Tribunal que ses charges mensuelles s'élevaient à 8'900 fr., montant comprenant notamment son entretien de base (1'350 fr.), ses primes d'assurance maladie Lamal et LCA (532 fr.), ses frais médicaux non couverts (88 fr.), ses frais de transport en véhicule privé (445 fr.), ainsi que des frais de restaurant (400 fr.), de voyages (1'000 fr.), d'activités sportives (275 fr.), de loisirs (400 fr.) et d'achats divers (500 fr.).

Les charges de D______ et C______, telles qu'alléguées par leur mère, s'élèvent respectivement à 4'530 fr. et 2'320 fr par mois. Devant le Tribunal, B______ a exposé que le montant qu'elle recevait de son époux était insuffisant pour couvrir l'entretien du ménage et qu'à plusieurs reprises, elle n'avait pas été en mesure de s'acquitter des courses alimentaires.

j. Dans l'ordonnance querellée, le Tribunal a retenu en substance que l'épouse n'exerçait pas d'activité lucrative et ne bénéficiait d'aucun revenu. Elle avait utilisé la fortune reçue de son oncle à diverses fins et n'était pas en mesure d'assumer seule ses frais de défense. L'époux disposait pour sa part de revenus très confortables, ainsi que d''une fortune mobilière et immobilière. Il avait unilatéralement décidé de limiter les montants mis à disposition de son épouse, dont la majeure partie était utilisée pour les besoins du ménage. L'importante disparité des moyens financiers respectifs des parties justifiait dès lors l'octroi à l'épouse d'une provisio ad litem de 12'924 fr. TTC.

EN DROIT

1. 1.1 L'appel est recevable pour avoir été interjeté auprès de l'autorité compétente (art. 120 al. 1 let. a LOJ), selon la forme prescrite par la loi (art. 130, 131 et 311 CPC) et dans le délai utile de 10 jours applicable en procédure sommaire (art. 142 al. 1, 248 let. d et 314 al. 1 CPC), à l'encontre d'une ordonnance rendue sur mesures provisionnelles (art. 308 al. 1 let. b CPC) qui statue sur une provisio ad litem de plus de 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC).

1.2 Les mesures provisionnelles étant soumises à la procédure sommaire au sens propre (art. 248 let. d CPC), la cognition de la Cour est limitée à la simple vraisemblance des faits et à un examen sommaire du droit, l'exigence de célérité étant privilégiée par rapport à celle de sécurité (ATF 127 III 474 consid. 2b/bb, in JT 2002 I 352; arrêt du Tribunal fédéral 5A_12/2013 du 8 mars 2013 consid. 2.2).

1.3 La présente cause, portant exclusivement sur la provisio ad litem, est soumise aux maximes de disposition (art. 58 al. 1 CPC; ATF 128 III 411 consid. 3.2.2; arrêt du Tribunal fédéral 5A_693/2007 du 18 février 2008 consid. 6; ACJC/98/2021 du 26 janvier 2021 consid. 1.3) et inquisitoire limitée
(art. 272 CPC; ATF 129 III 417, consid. 2.1.2; arrêts du Tribunal fédéral 5A_386/2014 du 1er décembre 2014 consid. 6.2, 5A_757/2013 du 14 juillet 2014 consid. 2.1; ACJC/98/2021 du 26 janvier 2021 consid. 1.3).

2. A teneur de l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuve nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de diligence (let. b).

En l'espèce, toutes les pièces nouvelles produites par l’intimée en appel se rapportent à des faits survenus postérieurement à la date à laquelle le Tribunal a gardé la cause à juger sur la provisio ad litem, le 17 septembre 2021, de sorte qu’elles sont recevables, ce qui n'est pas contesté.

3. L'appelant reproche tout d'abord au Tribunal d'avoir accordé une provisio ad litem à l'intimée sur mesures provisionnelles, alors même que celle-ci avait pris cette conclusion à titre principal et que les conditions au prononcé de mesures provisionnelles n'étaient pas réunies. Il sollicite l'annulation de l'ordonnance entreprise pour ce motif.

3.1 Le fondement juridique de la provisio ad litem entre époux est controversé. Il est néanmoins admis qu'une provisio ad litem peut être accordée déjà au stade des mesures protectrices de l'union conjugale ou des mesures provisionnelles de divorce. Qu'elle découle de l'obligation d'entretien de l'art. 163 CC ou du devoir d'assistance de l'art. 159 al. 3 CC, la demande de provisio ad litem est en effet une requête fondée sur le droit matériel, qui doit être formée devant le juge compétent; celui-ci peut être aussi bien le juge du divorce que celui des mesures protectrices de l'union conjugale (arrêt du Tribunal fédéral 5A_590/2019 du 13 février 2020 consid. 3.4 et les références cités).

La provisio ad litem est une simple avance, fixée dans une décision de nature provisionnelle (arrêts du Tribunal fédéral 5A_85/2017 du 19 juin 2017 consid. 7.1.1; 5A_259/2014 du 14 octobre 2014 consid. 1). Il appartient au juge de statuer sur la question de l'éventuelle restitution de cette avance dans le cadre de la répartition des frais judiciaires et des dépens à l'issue du procès (ATF 66 II 70, consid. 3; arrêt du Tribunal fédéral 5A_777/2014 du 4 mars 2015 consid. 6.2; ACJC 1674/2021 du 7 décembre 2021 consid. 6).

3.1.1 La question de savoir si des mesures provisionnelles peuvent être ordonnées dans le cadre d'une procédure de mesures protectrices de l'union conjugale, qui constituent déjà elles-mêmes des mesures provisionnelles (cf. ATF 137 III 475 consid. 4.1), est controversée en doctrine et n'a pas été tranchée par le Tribunal fédéral (cf. arrêt du Tribunal fédéral 5A_590/2019 cité consid. 3.3).

La Cour de céans considère que des mesures provisionnelles peuvent être prononcées dans le cadre d'une procédure de mesures protectrices de l'union conjugale, notamment lorsque cette procédure est susceptible de se prolonger.

De telles mesures ne peuvent toutefois être ordonnées que pour autant que les conditions posées par l'art. 261 CPC soient réunies (entre autres: ACJC/256/2021 du 2 mars 2021 consid. 5.1; ACJC/1684/2019 du 12 novembre 2019 consid. 4.1; ACJC/763/2019 du 14 mai 2019 consid. 1.3; ACJC/1452/2018 du 19 octobre 2018 consid. 3.1). Le Tribunal fédéral a jugé que cette solution n'était pas arbitraire, compte tenu de la controverse existant à ce sujet (arrêt du Tribunal fédéral 5A_870/2013 du 28 octobre 2014 consid. 5).

3.1.2 Selon l'art. 261 al. 1 CPC, le tribunal ordonne les mesures provisionnelles nécessaires lorsque le requérant rend vraisemblable, d'une part, qu'une prétention dont il est titulaire est l'objet d'une atteinte ou risque de l'être (let. a) et, d'autre part, que cette atteinte risque de lui causer un préjudice difficilement réparable (let. b).

Dans le contexte particulier de mesures provisionnelles sollicitées dans le cadre d'une procédure de mesures protectrices de l'union conjugale, l'existence d'un préjudice difficilement réparable doit être appréciée au regard des conséquences concrètes qu'aurait pour la partie requérante l'absence de telles mesures. Un tel préjudice doit ainsi notamment être admis s'il est rendu vraisemblable que, à défaut de mesures provisionnelles, la partie requérante serait contrainte de modifier de manière importante son organisation en prenant des mesures sur lesquelles il ne lui sera que difficilement possible de revenir par la suite (ACJC/1684/2019 cité consid. 4.1; ACJC/1387/2019 du 24 septembre 2019 consid. 3.2; ACJC/824/2016 du 10 juin 2016 consid. 3.1.1).

3.1.3 La jurisprudence a tiré de l'art. 29 al. 1 Cst. le principe de l'interdiction du déni de justice formel qui comprend la prohibition de tout formalisme excessif. Un tel formalisme existe lorsque des règles de procédure sont appliquées avec une rigueur que ne justifie aucun intérêt digne de protection, au point que la procédure devient une fin en soi et empêche ou complique de manière insoutenable la réalisation du droit matériel ou entrave de manière inadmissible l'accès aux tribunaux (ATF 135 I 6 consid. 2.1; arrêts du Tribunal fédéral 5A_427/2013 du 14 août 2013 consid 5.3.1, 5A_832/2012 du 25 janvier 2013 consid. 6.1).

L'interdiction du formalisme excessif impose notamment au juge de ne pas se montrer trop strict dans la formulation des conclusions si, à la lecture du mémoire, on comprend clairement ce que veut le recourant (arrêts du Tribunal fédéral 5A_441/2011 du 16 décembre 2011 consid. 1.3.1; 4A_321/2009 du 15 janvier 2010 consid. 2; 1C_100/2008 du 18 juin 2008 consid. 1). Les conclusions doivent ainsi être interprétées à la lumière de la motivation (ATF 137 III 617 consid. 6.3); il y aurait formalisme excessif à pénaliser une partie pour une formulation malheureuse ou un libellé imprécis de ses conclusions lorsque leur sens peut être d'emblée déterminé au vu de la motivation de la demande, des circonstances du cas à trancher ou de la nature juridique de l'action introduite (arrêts du Tribunal fédéral 5A_775/2018 du 15 avril 2019 consid. 4.1; 5A_377/2016 du 9 janvier 2017 consid. 4.2.3).

3.2 En l'espèce, il est constant que l'intimée a conclu en première instance, dans le cadre de sa requête de mesures protectrices de l'union conjugale, à l'octroi d'une provisio ad litem, sans que cette conclusion ne soit expressément prise à titre provisionnel.

3.2.1 Contrairement à ce que soutient l'appelant, le premier juge était toutefois fondé à interpréter ces conclusions selon le principe de la bonne foi, en tenant compte de la motivation de la demande, des circonstances d'espèce et de la nature juridique de la prétention.

Sur ce dernier point, il pouvait notamment tenir compte du fait qu'une demande de provisio ad litem revêt par nature un caractère provisionnel, puisqu'il s'agit pour la partie requérante d'obtenir les ressources financières dont elle estime avoir besoin pour conduire la procédure en cours. Traiter une telle demande en même temps que le fond du litige n'aurait donc guère de sens puisque, à ce moment-là, la procédure est arrivée à son terme et que le préjudice redouté – soit l'incapacité de la partie requérante à assumer efficacement sa défense faute de moyens financiers adéquats – est déjà soit réalisé soit écarté. Il a du reste été jugé (dans le cadre d'une procédure de divorce) qu'il ne peut plus être statué sur une demande de provisio ad litem lorsque la procédure arrive à son terme (arrêt du Tribunal fédéral 5A_777/2014 précité consid. 6), quand bien même le juge n'est pas pour autant dispensé de vérifier si la partie ayant requis une telle avance disposait de moyens suffisants pour assumer ses frais de défense (arrêt du Tribunal fédéral 5A_590/2019 précité consid. 3.5).

Dans le cas d'espèce, l'intimée avait pour le surplus clairement allégué que le montant réclamé au titre de provisio ad litem lui était nécessaire pour couvrir ses frais de défense dans le cadre de la procédure de mesures protectrices de l'union conjugale en cours. Elle avait notamment exposé ne plus bénéficier d'aucune ressource propre et ne plus recevoir de l'appelant que des montants insuffisants pour couvrir aussi bien les besoins de la famille que les siens propres, avec pour conséquence qu'elle se trouvait dans l'incapacité d'assumer elle-même les frais liés à sa défense. Au vu de cette motivation et des allégations de l'intimée, il ne peut être reproché au premier juge d'avoir compris que la demande de provisio ad litem était en réalité formée à titre préalable, et donc provisionnel, dès lors que le but poursuivi par cette demande – la possibilité de financer une défense adéquate dans le cadre de la procédure en cours – aurait disparu au moment de la décision sur le fond.

Le grief adressé au premier juge d'avoir statué sur mesures provisionnelles en l'absence de conclusions en ce sens doit ainsi être écarté.

3.2.2 Quant au grief selon lequel les conditions strictes posées par la jurisprudence de la Cour au prononcé de mesures provisionnelles en procédure de mesures protectrices de l'union conjugale (consid. 3.1.2 ci-dessus) ne seraient en tout état pas réunies, il se confond avec celui relatif aux conditions d'octroi d'une provisio ad litem.

Il faut en effet admettre que, dans la mesure où ces conditions seraient réalisées, ce qui sera examiné sous chiffre 4 ci-dessous, il en irait de même de celles relatives au prononcé de mesures provisionnelles. Dans cette hypothèse en effet, la prétention matérielle de l'intimée en obtention d'une avance destinée à couvrir ses frais de défense serait atteinte ou risquerait de l'être en l'absence de mesures provisionnelles (art. 261 al. 1 let. a CPC), et cette atteinte ferait courir à l'intimée un risque de préjudice difficilement réparable sous la forme d'une incapacité à s'assurer une défense adéquate dans la procédure en cours faute de ressources financières.

4. L'appelant reproche au Tribunal d'avoir considéré que les conditions d'octroi d'une provisio ad litem étaient réalisées. Il soutient notamment que celle-ci disposerait d'une fortune qu'elle aurait cachée ou dilapidée.

4.1 La controverse sur le fondement juridique de la provisio ad litem entre époux n'a pas d'incidence sur les conditions qui président à son octroi (arrêt du Tribunal fédéral 5A_590/2019 cité consid. 3.3).

La fixation d'une provisio ad litem par le juge présuppose d'une part l'incapacité du conjoint demandeur de faire face par ses propres moyens aux frais du procès, d'autre part l'existence de facultés financières suffisantes du défendeur, qui ne doit pas être lui-même placé dans une situation difficile par l'exécution de cette prestation (ATF 103 Ia 99 consid. 4; arrêts du Tribunal fédéral 5A_590/2019 du 13 février 2020 consid. 3.3; 5A_808/2016 du 21 mars 2017 consid. 4.1).

Les contributions d'entretien ont en principe pour but de couvrir les besoins courants des bénéficiaires, et non de servir, comme la provisio ad litem, à assumer les frais du procès en divorce. L'octroi d'une telle provision peut donc être justifié indépendamment du montant de la contribution d'entretien (arrêts du Tribunal fédéral 5A_808/2016 du 21 mars 2017 consid. 4.1; 5A_372/2015 du 29 septembre 2015 consid. 4.1; 5A_448/2009 du 25 mai 2010 consid. 8.2).

Ainsi, se trouve dans le besoin celui qui ne pourrait pas assumer les frais d'un procès sans recourir à des moyens qui lui sont nécessaires pour couvrir son entretien courant et celui de sa famille (De Luze/Page/Stoudmann, Droit de la famille, Code annoté, 2013, n. 2.5 ad art. 163 CC). La situation de besoin peut être admise même lorsque les revenus excèdent de peu les besoins courants.

Un éventuel excédent entre le revenu à disposition et le minimum vital de la partie requérante doit être mis en relation avec les frais prévisibles de justice et d'avocat dans le cas concret: l'excédent mensuel devrait lui permettre de rembourser les frais de justice dans un délai d'un an s'ils sont peu élevés ou de deux ans s'ils sont plus importants. Il est également déterminant que la partie puisse, au moyen de l'excédent dont elle dispose, procéder aux avances de frais de justice et d'avocat dans un délai raisonnable (arrêt de la Cour cantonale de Bâle-Campagne du 27 juillet 2007, in FamPra 2008, n. 101, p. 965).

4.2 En l'espèce, il est constant que depuis l'automne 2020, l'appelant ne verse à l'intimée qu'un montant mensuel de 2'000 fr., affecté aux courses alimentaires et aux besoins de base de la famille, ainsi qu'un montant mensuel de 1'500 fr. pour ses dépenses personnelles. L'appelant s'acquitte certes de certaines factures de l'intimée, mais en déduit alors le montant du pécule qu'il lui verse.

Bien que le montant exact des charges admissibles de l'intimée reste à déterminer, celle-ci rend vraisemblable qu'elle fait dans ces conditions face à des difficultés financières notables et qu'elle peine à s'acquitter des dépenses courantes, comme relevé ci-dessus. Il a également été observé que les époux menaient vraisemblablement un train de vie confortable avant leur séparation, au vu notamment des revenus de l'appelant et de la situation de la villa familiale.

Aussi, compte tenu de la disproportion manifeste des moyens financiers des parties, il ne se justifie pas de retenir que l'intimée devrait être tenue d'affecter une partie du montant qu'elle reçoit de son époux pour son entretien à ses frais de procès, même partiellement.

Quant à sa fortune, laquelle s'élève à environ 6'000 fr., elle apparaît également insuffisante à cet égard. Les éléments recueillis à ce stade de la procédure ne permettent pas de retenir que l'intimée aurait volontairement dilapidé sa fortune ou l'aurait cachée afin de tronquer l'image de sa situation financière, étant précisé que cette question pourra encore être examinée dans la suite de la procédure. Quelles que soient les raisons qui ont pu conduire l'intimée à retirer la majeure partie des fonds reçus en donation de son oncle, il est vraisemblable que celle-ci ne dispose plus desdits fonds aujourd'hui. Ce motif ne saurait dès lors faire obstacle à ce que l'appelant lui avance les frais du présent procès sur mesures protectrices de l'union conjugale, au moins jusqu'à droit jugé sur celui-ci.

L'appelant, dont les revenus établis s'élèvent à 25'000 fr. brut par mois au moins ([290'000 fr + 14'000 fr.] / 12), et qui dispose d'une fortune mobilière de plus de 230'000 fr., est quant à lui très vraisemblablement en mesure de s'acquitter sans peine de la provisio ad litem réclamée, ce qu'il ne conteste d'ailleurs pas.

Enfin, le montant de ladite provision, arrêté par le Tribunal à 12'924 fr. TTC, n'apparaît pas excessif compte de l'ampleur de la procédure, dont l'avance de frais s'élève à 2'000 fr. à elle seule. L'intimée a notamment déposé plusieurs écritures devant le premier juge, comparu à plusieurs audiences et pris des conclusions préalables en reddition de comptes. Le montant susvisé, qui n'est pas critiqué en tant que tel, sera dès lors confirmé.

En conséquence, la provisio ad litem allouée à l'intimée est justifiée et l'appelant sera débouté des fins de son appel.

5. Les frais judiciaires de la procédure d'appel seront fixés à 800 fr. (art. 95, art. 105 al. 1 CPC; art. 31 et 37 RTFMC) et mis à charge de l'appelant, qui succombe (art. 106 al. 1 CPC). Ils seront compensés avec l'avance de frais de même montant versée par celui-ci, qui demeure acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

L'appelant sera également condamné à payer à l'intimée la somme de à 3'100 fr. à titre de dépens d'appel (art. 105 al. 2 CPC; art. 86 RTFMC), débours et TVA compris (art. 25 et 26 LaCC).

* * * * *


 

 

PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 12 novembre 2021 par A______ contre l'ordonnance OTPI/800/2021 rendue le 2 novembre 2021 par le Tribunal de première instance dans la cause C/5077/2021-12.

Au fond :

Confirme l'ordonnance entreprise.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires à 800 fr., les met à charge de A______ et les compense avec l'avance de frais versée par ce dernier, qui reste acquise à l'Etat.

Condamne A______ à verser à B______ la somme 3'100 fr. à titre de dépens d'appel.

Siégeant :

Monsieur Laurent RIEBEN, président; Monsieur Patrick CHENAUX,
Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, juges; Madame Gladys REICHENBACH, greffière.

 

Le président :

Laurent RIEBEN

 

La greffière :

Gladys REICHENBACH

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 113 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005
(LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours constitutionnel subsidiaire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF inférieure à 30'000 fr.