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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/6731/2024

ACPR/394/2024 du 27.05.2024 ( MP ) , REJETE

Descripteurs : RETARD INJUSTIFIÉ
Normes : CPP.396.al2; CPP.5

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/6731/2024 ACPR/394/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du lundi 27 mai 2024

 

Entre

A______, actuellement détenu à la prison de B______, représenté par Me C______, avocat,

recourant,

pour retard injustifié,

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


Vu :

-      le rapport d'arrestation du 13 mars 2024;

-      le procès-verbal d'audience du Ministère public du lendemain;

-      le courriel de la Brigade de Police Technique et Scientifique (ci-après, BPTS) du 11 avril 2024, informant le Ministère public que les échantillons de stupéfiants avaient été envoyés, le jour même, pour analyse et que les résultats "devraient donc être disponibles aux environs du 14 juin 2024", sous réserve d'une demande de délai prioritaire (15 jours ouvrables), voire urgent (5 jours ouvrables), moyennant des tarifs d'analyse supplémentaires;

-      la lettre du Ministère public du 17 avril 2024, annonçant au conseil du prévenu la réception probable des résultats d'analyse "dans les alentours du 14 juin 2024";

-      le mandat d'actes d'enquête – portant la mention "urgent" – du même jour, invitant la police à extraire et analyser les données téléphoniques du téléphone du prévenu;

-      la lettre du 19 avril 2024 de A______ qui, par son conseil, fait état de "[sa] surprise et [de son] incompréhension […], à apprendre que la procédure d'analyse des stupéfiants, annoncée tant lors de la première audition par le Ministère public le 14 mars que dans le rapport de police de la veille (cf p. 7), n'a été entamée que le 11 avril 2024, soit près d'un mois après son arrestation". Il sollicitait que l'analyse de la drogue saisie soit effectuée en "délai urgent" afin d'obtenir les résultats en cinq jours ouvrables;

-      la décision rendue le 24 avril 2024, notifiée le 26 suivant, par laquelle le Ministère public refuse d'ordonner, en urgence, l'analyse requise;

-      le recours, déposé le 6 mai 2024.

Attendu que :

-      détenu depuis le 15 mars 2024, A______ est prévenu principalement d'infraction grave à la loi fédérale sur les stupéfiants (art. 19 al. 1 et 2 LStup) pour avoir, le 13 mars 2024, importé depuis la France, détenu et vendu 60.3 grammes d'héroïne contre le paiement de CHF 1'000.- et détenu 229.7 grammes d'héroïne conditionnée en plusieurs lots ainsi que d'avoir, en sus, entre 2023 et 2024, vendu 60 grammes d'héroïne au même toxicomane;

-      il a admis les faits;

-      à teneur du rapport de police du 13 mars 2024 (page 7), sous la rubrique "Actes d'enquête en cours", il est écrit que "la drogue saisie sera transmise à [la BPTS] aux fins d'analyse";

-      aucune mention n'est faite dans le procès-verbal d'audience du Ministère public à ce sujet;

-      dans sa décision attaquée, le Ministère public indique que l'enquête continue "afin de circonscrire l'implication exacte de A______ (quant à la durée de sa participation et à la quantité de stupéfiants vendue et/ou détenue). Un mandat d'actes d'enquête a été confiée à la police à cet égard". Ainsi, il ne se justifiait pas de procéder, en urgence, à l'analyse de la drogue saisie;

-      à l'appui de son recours, A______ estime que le refus du Ministère public de requérir l'analyse des échantillons de drogue – envoyés tardivement – par voie "urgente", voire "prioritaire", violerait le principe de célérité et son droit [à lui] à ce que les actes d'instruction soient conduits en priorité, compte tenu de sa détention. La demande effectuée dans le "délai standard" [impliquant un délai d'attente huit fois plus long que si la requête était traitée de manière urgente] était d'autant moins justifiée que le mandat d'examen du téléphone portable avait été transmis à la police, avec la mention "urgent";

-     à réception, la cause a été gardée à juger sans échange d'écritures ni débats.

Considérant en droit que :

-      le recours pour violation du principe de la célérité est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 90 al. 2, 385 al. 1 et 396 al. 2 CPP) et émaner du prévenu qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP);

-     la Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement irrecevables ou mal fondés (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP). Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent;

-      selon l'art. 29 al. 1 Cst, toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable. À teneur de l'art. 5 al. 1 CPP, les autorités pénales engagent les procédures pénales sans délai et les mènent à terme sans retard injustifié. Lorsque le prévenu est détenu, la procédure est conduite en priorité (art. 5 al. 2 CPP);

-     l'autorité viole cette garantie lorsqu'elle ne rend pas une décision qu'il lui incombe de prendre dans le délai prescrit par la loi ou celui que la nature de l'affaire et les circonstances font apparaître comme raisonnable. Le caractère approprié de ce délai s'apprécie selon les circonstances particulières de la cause, eu égard notamment à la complexité de l'affaire, à l'enjeu du litige pour l'intéressé, à son comportement ainsi qu'à celui des autorités compétentes (ATF 135 I 265 consid. 4.4; 130 I 312 consid. 5.1; 143 IV 373 consid. 1.3.1). Des périodes d'activité intense peuvent compenser le fait que le dossier a été laissé momentanément de côté en raison d'autres affaires (ATF 130 IV 54 consid. 3.3.3; 130 I 312 consid. 5.2; arrêt du Tribunal fédéral 6B_640/2012 du 10 mai 2013 consid. 4.1);

-     ainsi, seul un manquement particulièrement grave, faisant au surplus apparaître que l'autorité de poursuite n'est plus en mesure de conduire la procédure à chef dans un délai raisonnable, pourrait conduire à l'admission de la violation du principe de célérité. En cas de retard de moindre gravité, des injonctions particulières peuvent être données, comme par exemple la fixation d'un délai maximum pour clore l'instruction (cf. ATF 128 I 149 consid. 2.2);

-     l'on ne saurait reprocher à l'autorité quelques temps morts, qui sont inévitables dans une procédure; lorsqu'aucun d'eux n'est d'une durée vraiment choquante, c'est l'appréciation d'ensemble qui prévaut. Selon la jurisprudence, apparaît comme une carence choquante une inactivité de treize ou quatorze mois au stade de l'instruction (arrêt du Tribunal fédéral 6B_172/2020 du 28 avril 2020 consid. 5.1);

-      en l'occurence, le recourant – sans s'en prendre à la durée de la détention provisoire ordonnée – se plaint tant de l'envoi, un mois après son arrestation, des échantillons de drogue, que du refus du Ministère public de faire procéder, en urgence, à leur analyse;

-      quoi qu'en dise le recourant, on ne discerne pas en quoi l'instruction aurait pris du retard en raison de ces faits, étant souligné que les résultats de l'analyse ne sont, en l'état, pas déterminants pour retenir des soupçons d'infraction grave à la loi fédérale sur les stupéfiants (art. 19 al. 2 LStup), vu les quelque 350 grammes d'héroïne bruts en cause et les aveux du prévenu;

-      peu importe dès lors que l'analyse des stupéfiants n'ait pas été requise en urgence;

-      aucun élément au dossier ne permet de douter que l'analyse requise ne sera pas effectuée dans un délai raisonnable;

-      aucune violation du principe de la célérité ne peut ainsi être retenue;

-      partant, le recours est rejeté;

-        le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, fixés en totalité à CHF 600.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP; E 4 10.03). L'autorité de recours est en effet tenue de dresser un état de frais pour la procédure de deuxième instance, sans égard à l'obtention de l'assistance judiciaire (arrêts du Tribunal fédéral 1B_372/2014 du 8 avril 2015 consid. 4.6 et 1B_203/2011 du 18 mai 2011 consid. 4).

-        il sera statué sur l'indemnité du défenseur d'office à la fin de la procédure (art. 135 al. 2 CPP).

* * * * *


 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 600.-.

Notifie le présent arrêt ce jour, en copie, au recourant, soit pour lui son conseil, et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Mesdames Corinne CHAPPUIS BUGNON et Françoise SAILLEN AGAD, juges; Monsieur Selim AMMANN, greffier.

 

Le greffier :

Selim AMMANN

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

P/6731/2024

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

515.00

Total

CHF

600.00