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Décisions | Chambre pénale de recours

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PM/1175/2022

ACPR/904/2022 du 23.12.2022 sur JTPM/804/2022 ( TPM ) , REJETE

Descripteurs : LIBÉRATION CONDITIONNELLE;PRONOSTIC;RÉCIDIVE(INFRACTION);AUDITION OU INTERROGATOIRE;DÉBAT DU TRIBUNAL;MOTIVATION DE LA DEMANDE
Normes : CP.86

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

PM/1175/2022 ACPR/904/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du vendredi 23 décembre 2022

Entre

A______, actuellement détenu à l'Établissement fermé de B______, comparant par Me Sarah PÉZARD, avocate, Étude PÉZARD Avocat, rue De-Candolle 36, case postale, 1211 Genève 4,

recourant,

contre le jugement rendu le 21 novembre 2022 par le Tribunal d'application des peines et des mesures,

et

LE TRIBUNAL D'APPLICATION DES PEINES ET DES MESURES, rue des Chaudronniers 9, 1204 Genève - case postale 3715, 1211 Genève 3,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.

 


EN FAIT :

A. Par acte expédié le 1er décembre 2022, A______ recourt, par l'intermédiaire de son conseil (il a retiré ultérieurement le recours qu'il avait formé le même jour en personne), contre le jugement rendu le 21 novembre 2022, notifié sur-le-champ, par lequel le Tribunal d'application des peines et des mesures (ci-après, TAPEM) a refusé sa libération conditionnelle.

Le recourant conclut, préalablement, à l'octroi de l'assistance judiciaire, à son audition et à l'octroi d'un délai pour compléter ses écritures; principalement, à l'annulation du jugement précité et à ce que la libération conditionnelle lui soit octroyée, sous suite de frais et dépens.

B. Les faits pertinents suivants – non contestés par le recourant – ressortent du dossier et plus particulièrement du jugement attaqué, duquel ils seront donc repris :

a. A______, ressortissant guinéen, se trouve actuellement en exécution de peine pour les condamnations suivantes :

-       peine privative de liberté de substitution en conversion d'une peine pécuniaire de 30 jours à CHF 10.- le jour, soit un total de CHF 300.-, pour empêchement d'accomplir un acte officiel, par jugement du Tribunal de police du 27 octobre 2020,

-       peine privative de liberté de substitution en conversion d'une peine pécuniaire de 180 jours à CHF 10.- le jour, soit un total de CHF 1'800.-, sous déduction de 1 jour de détention avant jugement, pour rupture de ban, par ordonnance pénale du Ministère public du 7 juin 2021,

-       peine privative de liberté de 12 mois, sous déduction de 205 jours de détention avant jugement, pour délits contre la loi sur les stupéfiants et rupture de ban, par arrêt de la Chambre pénale d'appel et de révision du 31 mai 2022.

Il a été incarcéré le 9 novembre 2021, dans un premier temps à la prison de C______, puis dès le 14 septembre 2022 à l'établissement de B______, où il se trouve à ce jour.

b. Les deux tiers des peines que A______ exécute actuellement sont intervenues le 24 novembre 2022, tandis que la fin des peines est fixée au 4 juin 2023.

c. À teneur de l'extrait de son casier judiciaire, A______ a été condamné à sept autres reprises depuis 2016, pour contravention et délit contre la LStup, séjour illégal, entrée illégale, violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires, opposition aux actes de l'autorité et rupture de ban. Il a bénéficié d'une libération conditionnelle le 28 mai 2019, laquelle a été révoquée par jugement du Tribunal de police du 18 décembre 2019. Il s'est, par ailleurs, vu refuser cette mesure par jugements du TAPEM des 28 avril 2020 et 10 février 2021.

d. Dans le formulaire qu'il a rempli en vue de l'examen de sa libération conditionnelle, A______ se déclare père de deux enfants. À sa libération, il souhaitait se rendre en France, pays dans lequel sa demande d'asile était en cours, et y travailler dans le domaine de la mécanique. Il ne mentionne personne comme étant susceptible de l'aider à sa libération mais précise qu'il logera à D______ [France]. Il conclut en indiquant vouloir faire ses
documents et travailler normalement comme tout le monde. Il pensait à ses enfants qui comptaient sur lui au Libéria et qu'il ne voulait pas voir souffrir.

e. Selon le préavis de l'établissement de B______ du 11 octobre 2022, A______ n'a fait l'objet d'aucune sanction disciplinaire. Il ne posait pas de problème particulier. Du 16 septembre au 26 septembre 2022, il avait été affecté au sein de l'atelier "Evaluation 1". Selon les premières observations du responsable d'atelier, il avait adopté une attitude correcte et effectué le travail demandé. Depuis le 27 septembre 2022, il œuvrait à l'atelier "Propreté" où il effectuait avec motivation les tâches qui lui étaient confiées. Le secteur était propre et ordonné. Il était décrit comme étant une personne polie. Au vu de l'arrivée récente de A______, l'établissement de B______ n'était pas en mesure d'émettre un préavis à la libération conditionnelle.

Selon le secteur socio-éducatif du Service de probation et d'insertion, au vu de la situation administrative de l'intéressé, la question d'un mandat d'assistance de probation ne se posait pas. Il avait été vu à une seule reprise dans le cadre d'un entretien d'accueil.

S'agissant de l'état de ses comptes, l'intéressé disposait de CHF 636.40 sur son compte libre, de CHF 237.10 sur son compte réservé et de CHF 177.80 sur son compte bloqué. Durant son incarcération, il avait reçu une visite de son avocat. Par ailleurs, A______ n'avait déposé aucun document d'identité au greffe de la prison.

f. Selon le courriel de l'Office cantonal de la population et des migrations (ci-après, OCPM) du 19 août 2022, A______ fait l'objet de quatre expulsions judiciaires de Suisse prononcées par les instances pénales genevoises les 20 juin 2018, 14 février 2019, 18 décembre 2019 et 3 février 2022 pour respectivement 3, 6, 7 et 8 ans. Il s'est vu notifier une décision de non-report de son expulsion le 22 février 2021. Ayant déposé une demande d'asile en France, il y a déjà été refoulé par les services de police le 30 avril 2021. De retour en Suisse, les services de police ont initié à nouveau une procédure dite "Dublin III" avec la France pour permettre le refoulement de l'intéressé. Le 27 décembre 2021, la France a accepté de le reprendre sur son territoire, à condition que son transfert soit effectué avant le 27 décembre 2022. Au-delà de cette date, le renvoi de A______ ne sera juridiquement possible qu'à destination de son pays d'origine. Cela dit, comme il est démuni de documents d'identité et n'est pas formellement identifié par un État, son renvoi de Suisse ne pourrait, en toute vraisemblance, pas se concrétiser s'il devait purger l'entier de sa peine et être libéré le 4 juin 2023, étant rappelé que les procédures d'identification prennent beaucoup de temps. A______ remplit les conditions pour une mise en détention administrative. Aussi, l'OCPM sollicite de lui accorder la libération conditionnelle et de l'assortir à son renvoi de Suisse, de sorte à permettre son refoulement en France avant le 27 décembre 2022.

g. Dans son préavis du 7 novembre 2022, le Service de l'application des peines et mesures (ci-après, SAPEM) préavise défavorablement la libération conditionnelle de A______, bien que son comportement en détention ne s'y oppose pas, aux motifs qu'il a de nombreux antécédents pour des faits similaires et qu'il a déjà bénéficié d'une libération conditionnelle en 2019, sans succès. De plus, les peines privatives de liberté exécutées jusqu'ici ne l'ont nullement dissuadé de récidiver et il convenait dès lors de douter qu'il mette à profit une libération conditionnelle, l'intéressé n'ayant de surcroît présenté aucun projet étayé de réinsertion professionnelle. Au vu de ces éléments, seul un pronostic pénal défavorable pouvait être posé de sorte qu'il convenait que l'intéressé exécute sa peine dans son entier.

h. Par requête du 11 novembre 2022, le Ministère public conclut au refus de la libération conditionnelle, les nombreux antécédents de l'intéressé, sa situation personnelle précaire et l'échec de sa précédente libération conditionnelle entraînant un risque de récidive concret, de sorte qu'il convenait qu'il exécute l'entier de sa peine. À titre subsidiaire, il conclut à ce que la libération conditionnelle ne soit accordée qu'avec effet au jour où son renvoi de Suisse pourrait être exécuté.

i. Lors de l'audience du 21 novembre 2022 devant le TAPEM, A______ a indiqué qu'à sa libération, il souhaitait aller en France, à D______. Il avait une copine là-bas, c'était sa femme. Ses deux enfants étaient au Libéria. Après la précédente libération conditionnelle, il était parti en Espagne et avait fait une demande d'asile à E______. Il ne connaissait pas l'issue de sa demande d'asile. Il était resté là-bas pendant 1 an et 6 mois. Après sa dernière sortie de prison, il était parti en France. Il était revenu quelques fois en Suisse parce qu'il devait aller voir un tailleur pour raccourcir les manches de sa veste. Il avait été renvoyé en Espagne deux fois, en 2019 et en 2020. Après sa dernière sortie de prison, il avait demandé l'asile en France, à D______. Il attendait la réponse. Il dormait chez sa femme, qui est française. De temps en temps il faisait des "bricoles", il travaillait au noir. Il faisait notamment de la peinture. Le seul soutien qu'il avait en France était sa copine. Ils étaient en train de faire des démarches pour se marier. À la question de savoir pour quelle raison il n'était pas resté en France au cours de l'année écoulée plutôt que de revenir sans arrêt en Suisse, il a répondu : "Je vous demande pardon. Je suis désolé. Là cette fois c'est vraiment la dernière fois que je suis venu en Suisse". Le Tribunal lui faisant remarquer qu'il avait déjà déclaré cela lors de sa précédente demande de libération conditionnelle en 2021, il a répondu que maintenant, il ne reviendrait plus. Son vrai pays d'origine était le Libéria. En Guinée, il avait seulement demandé l'asile. Il n'était pas d'accord de retourner au Libéria. Il avait aussi un enfant en France, âgé de 3 ans.

C. Dans le jugement querellé, le TAPEM estime que le pronostic de l’intéressé se présente sous un jour fort défavorable, au vu de ses nombreux antécédents spécifiques, soit en particulier s'agissant de délits contre la LStup, ainsi que de l'échec de sa précédente libération conditionnelle accordée en 2019. A______ n'avait pas su en tirer profit, ni d'ailleurs des premières condamnations prononcées avec sursis, étant relevé que les courtes peines privatives de liberté subséquentes ne l'avaient pas non plus dissuadé de récidiver.

Sa situation personnelle demeurait inchangée et on ne percevait aucun effort de sa part pour modifier la situation, étant rappelé qu'il n'avait toujours pas été identifié par les autorités de son pays d'origine supposé, en dépit des démarches en ce sens menées par les autorités migratoires cantonales et fédérales. Aucun projet concret et étayé n'était présenté, de sorte qu'il se retrouverait à sa sortie dans la même situation personnelle que celle ayant mené à ses dernières condamnations, à savoir, en situation illégale en Suisse, respectivement en France, et sans possibilité de travailler légalement pour subvenir à ses besoins, étant rappelé qu'il faisait l'objet d'une expulsion du territoire suisse (la 4ème) pour une durée de 8 ans. Il n'avait aucune garantie de pouvoir séjourner légalement en France, où il disait avoir demandé l'asile et où il souhaiterait travailler en qualité de mécanicien. Sous réserve du pays de destination, son projet était similaire à celui formulé lors de sa précédente demande de libération conditionnelle (quitter la Suisse pour aller en Espagne), ce qui ne l'avait pas empêché de revenir en Suisse et à récidiver. Enfin, l'intéressé n'avait entrepris aucune démarche aux fins de se procurer des pièces de légitimation et était opposé à un renvoi dans son pays d'origine.

En définitive, le seul argument qui plaidait en faveur de l'octroi d'une libération conditionnelle était le fait qu'à teneur des indications fournies par l'OCPM, la France avait accepté de le reprendre sur son territoire, à condition que son transfert soit effectué avant le 27 décembre 2022.

Ce seul argument, qui ne présageait d'ailleurs pas du fait que l'asile lui serait ou non accordé, ne suffisait pas à accorder une seconde fois la libération conditionnelle au prénommé, qui risquait fort de revenir en Suisse selon ses besoins et d'y commettre de nouvelles infractions. En l’état, rien n’indiquait qu'il saurait mettre à profit une nouvelle libération conditionnelle et le risque qu'il commette d'autres infractions apparaissait très élevé, étant précisé qu'à teneur des dernières condamnations figurant à son casier judiciaire, ce risque ne se limitait pas à des infractions à la LEI.

D. a. Dans son recours, A______ invoque une constatation incomplète des faits, sous l'angle de l'art. 86 al. 2 CP, le jugement querellé ne faisant aucune mention du rapport établi par la Direction de la prison de C______, aucun rapport de cet établissement ne figurant du reste au dossier.

Au surplus, la décision attaquée était inopportune et abusive, la libération conditionnelle étant la règle. Il était en outre possible de la lier avec un renvoi de Suisse vers un autre État si le pronostic était plus favorable dans ce dit État. Or, la France était disposée à le reprendre jusqu'au 27 décembre 2022. Il avait des attaches sérieuses dans ce pays. Il était en effet en couple avec une ressortissante française, enceinte de lui, avec laquelle il avait entrepris des démarches en vue de se marier. Cette dernière travaillait et pourrait subvenir à ses besoins. À sa sortie, il souhaitait la rejoindre à D______. Sa situation administrative en France, et par-là la possibilité d'y obtenir une autorisation de séjour et de travail, s'en trouverait donc améliorée. De plus, sa mère (à lui) était sur le point d'arriver à D______ afin d'apporter son soutien à la famille. Son audition (à lui) pourrait en attester. Le pronostic en France était ainsi favorable. Il était ubuesque de lui reprocher de s'être livré à un petit trafic de stupéfiants en Suisse alors qu'il y était interdit de travailler. Un refus de la libération conditionnelle annihilerait définitivement un refoulement en France et ses chances de réinsertion dans ce pays. Enfin, il était indigent et dépourvu de connaissances juridiques. Il sollicitait dès lors l'assistance judiciaire et la désignation de Me Sarah PÉZARD pour sa défense dans le cadre du recours.

b. Le Ministère public conclut au rejet du recours, sans autres remarques.

c. Le TAPEM maintient les termes de son jugement.

EN DROIT :

1.             1.1. Le recours au sens de l'art. 393 CPP est la voie de droit ouverte contre les prononcés rendus en matière de libération conditionnelle par le TAPEM (art. 42 al. 1 let. b LaCP cum ATF 141 IV 187 consid. 1.1), dont le jugement constitue une "autre décision ultérieure" indépendante au sens de l'art. 363 al. 3 CPP (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1136/2015 du 18 juillet 2016 consid. 4.3 et 6B_158/2013 du 25 avril 2013 consid. 2.1; Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, 2ème éd., Bâle 2019, n. 30 ad art. 363).

1.2. La procédure devant la Chambre de céans est régie par le CPP, applicable au titre de droit cantonal supplétif (art. 42 al. 2 LaCP).

1.3. En l'occurrence, le recours est recevable, pour avoir été déposé selon la forme (art. 384 let. b, 385 al. 1, 390 al. 1 et 396 al. 1 CPP) et dans le délai (art. 396 al. 1 CPP) prescrits, par le condamné, qui a un intérêt juridiquement protégé à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             Le recourant a demandé à pouvoir compléter son recours après son audition.

2.1. Il ne sera pas fait droit à cette demande d'audition par la Chambre de céans, le recours faisant l'objet d'une procédure écrite (art. 397 al. 1 CPP) et les débats ayant une nature potestative (art. 390 al. 5 CPP). Par ailleurs, l'art. 29 al. 2 Cst. ne confère pas le droit d'être entendu oralement (ATF 134 I 140 consid. 5.3 p. 148 et les références citées).

Le recourant s'est, de surcroît, exprimé oralement devant le premier juge et a pu faire valoir ses arguments par écrit devant la Chambre de céans, de sorte que son droit d'être entendu a été respecté.

2.2. Il est par ailleurs communément admis en procédure que la motivation d'un recours doit être entièrement contenue dans l'acte de recours lui-même, qui ne saurait dès lors être complété ou corrigé ultérieurement (ATF 134 II 244 consid. 2.4.2 et 2.4.3; arrêt du Tribunal fédéral 4A_659/2011 du 7 décembre 2010 consid. 5 ; ACPR/291/2013 du 24 juin 2013 ; Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), op. cit., n. 3 ad art. 385).

En l'espèce, l'acte de recours rédigé par le conseil du recourant est dûment motivé de sorte que la demande sera rejetée.

3. Le recourant invoque une constatation incomplète des faits.

3.1. La Chambre de céans revoit avec un plein pouvoir de cognition, en fait notamment, les points de la décision attaqués devant elle (art. 393 al. 2 et 385 al. 1 let. a CPP).

Une constatation est incomplète lorsque des faits pertinents ne figurent pas au dossier. La constatation est erronée (ou inexacte) lorsqu'elle est contredite par une pièce probante du dossier ou lorsque le juge chargé du recours ne peut déterminer comment le droit a été appliqué (Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), op. cit., n. 17 ad art. 393 ; ACPR/609/2015 du 11 novembre 2015 consid. 3.1.1).

3.2. En l'espèce, le recourant reproche au TAPEM de ne pas avoir tenu compte de C______ avant de statuer, lequel ne figure pas dans le dossier transmis par le SAPEM. On peut dès lors inférer que ce préavis n'a pas été sollicité.

Or, même à supposer que ce préavis eût été favorable, on verra ci-dessous qu'il n'aurait de toute façon pas été décisif pour l'issue du recours. Partant, le jugement querellé ne saurait être annulé pour ce motif. Le grief est rejeté.

4. Le recourant estime que les conditions d'octroi de la libération conditionnelle sont remplies.

4.1. Aux termes de l'art. 86 al. 1 CP, l'autorité compétente libère conditionnellement le détenu qui a subi les deux tiers de sa peine, mais au moins trois mois de détention, si son comportement durant l'exécution de la peine ne s'y oppose pas et s'il n'y a pas lieu de craindre qu'il ne commette de nouveaux crimes ou de nouveaux délits. La libération conditionnelle constitue la dernière étape de l'exécution de la sanction pénale. Elle est la règle et son refus l'exception, dans la mesure où il n'est plus exigé qu'il soit à prévoir que le condamné se conduira bien en liberté (cf. art. 38 ch. 1 al. 1 aCP), mais seulement qu'il ne soit pas à craindre qu'il commette de nouveaux crimes ou délits. Autrement dit, il n'est plus nécessaire pour l'octroi de la libération conditionnelle qu'un pronostic favorable puisse être posé. Il suffit que le pronostic ne soit pas défavorable (ATF 133 IV 201 consid. 2.2 p. 203). Le pronostic à émettre doit être posé sur la base d'une appréciation globale, prenant en considération les antécédents de l'intéressé, sa personnalité, son comportement en général et dans le cadre des délits qui sont à l'origine de sa condamnation, le degré de son éventuel amendement, ainsi que les conditions dans lesquelles il est à prévoir qu'il vivra (ATF 133 IV 201 consid. 2.3 p. 203 s. et les références citées). Par sa nature même, le pronostic ne saurait être tout à fait sûr; force est de se contenter d'une certaine probabilité; un risque de récidive est inhérent à toute libération, conditionnelle ou définitive (ATF 119 IV 5 consid. 1b p. 7).

4.2. Pour déterminer si l'on peut courir le risque de récidive, il faut non seulement prendre en considération le degré de probabilité qu'une nouvelle infraction soit commise, mais également l'importance du bien qui serait alors menacé. Ainsi, le risque de récidive que l'on peut admettre est moindre si l'auteur s'en est pris à la vie ou à l'intégrité corporelle de ses victimes que s'il a commis, par exemple, des infractions contre le patrimoine (ATF 133 IV 201 consid. 2.3 p. 203 et les références citées). Il y a également lieu de rechercher si la libération conditionnelle, éventuellement assortie de règles de conduite et d'un patronage, ne favoriserait pas mieux la resocialisation de l'auteur que l'exécution complète de la peine (ATF 124 IV 193 consid. 4d/aa/bb p. 198 ss).

4.3. En l'espèce, le pronostic se présente sous un jour très défavorable, nonobstant l'absence de préavis de la prison de C______ et de l'impossibilité pour l'établissement de B______ de se déterminer sur la libération conditionnelle, eu égard à l'admission relativement récente de l'intéressé en ses murs à la date dudit préavis – étant relevé que le comportement du précité était à ce jour correct. Cela étant, les préavis des établissements pénitentiaires ne sont pas, à eux seuls, déterminants.

Le recourant a en effet été condamné à dix reprises depuis 2016 et a déjà bénéficié d'une libération conditionnelle le 28 mai 2019, laquelle ne l'a pas empêché de récidiver quelques jours plus tard (le 10 juin 2019) pour des faits similaires (rupture de ban et délit contre la LStup) – et d'avoir fait l'objet d'un avertissement de la part du Tribunal de police le 3 juillet 2019 – puis le 22 septembre 2019 pour des faits également similaires sinon plus graves (rupture de ban, délit contre la LStup et opposition aux actes de l'autorité), cette deuxième récidive ayant entraîné la révocation de sa libération conditionnelle.

Le recourant a ainsi démontré un ancrage certain dans la délinquance et une faible, pour ne pas dire inexistante, sensibilité à la sanction.

Rien n'indique aujourd'hui qu'il saurait mettre à profit une nouvelle libération conditionnelle, les circonstances n'ayant pas changé au point de garantir désormais qu'il ne récidivera pas à nouveau.

Ses projets d'avenir en France ne sont nullement étayés, voire peu crédibles lorsqu'il affirme aujourd'hui pour la première fois être le père de l'enfant à naître de sa compagne alors qu'il se trouve en détention depuis le 9 novembre 2021. Il n'a fourni aucune précision fiable et concrète sur ses intentions matrimoniales et la possibilité de travailler à sa sortie.

Sa situation administrative est inchangée, même si la France se déclare disposée à le reprendre sur son territoire jusqu'au 27 décembre 2022, étant rappelé qu'il fait l'objet de quatre décisions d'expulsion du territoire suisse entrées en force. Il ne semble par ailleurs pas davantage autorisé à résider sur le territoire français et à y exercer une activité lucrative, du moins en l'état.

Son projet de partir est similaire à celui qu'il avait déjà formulé lors de sa précédente demande de libération conditionnelle, lors de laquelle il indiquait vouloir se rendre en Espagne. Or, cela ne l'avait pas empêché de revenir en Suisse et d'y commettre des infractions. Rien ne permet de penser qu'il en ira différemment s'il quitte la Suisse pour la France, sa situation précaire étant selon lui à l'origine des infractions ici commises. Sa promesse de ne plus revenir en Suisse apparaît être de pure circonstance.

Le fait qu'il s'obstine à ne pas vouloir retourner dans son pays d'origine renforce également le risque de récidive.

Les conditions d'une libération conditionnelle ne sont ainsi, en l'état, pas réalisées. L'appréciation émise par le TAPEM ne souffre d'aucune critique. Les critères qu'il a retenus et appliqués sont pertinents.

5. Justifiée, la décision querellée sera donc confirmée.

6. Le recourant sollicite l'assistance judiciaire pour le recours.

L'assistance judiciaire ne peut être accordée qu'à la condition que la démarche à entreprendre ne soit pas vouée à l'échec, comme le prévoit l'art. 29 al. 3 Cst. D'après la jurisprudence, un procès est dépourvu de chances de succès lorsque les perspectives de le gagner sont notablement plus faibles que les risques de le perdre, et qu'elles ne peuvent donc être considérées comme sérieuses, de sorte qu'une personne raisonnable et de condition aisée renoncerait à s'y engager en raison des frais qu'elle s'exposerait à devoir supporter (ATF 138 III 217 consid. 2.2.4 p. 218; 129 I 129 consid. 2.2 p. 133 ss).

En l'espèce, au vu de l'issue du recours, celui-ci était manifestement voué à l'échec, de sorte qu'il n'y pas lieu d'entrer en matière sur la requête.

7. Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, fixés en totalité à CHF 600.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

* * * * *


 


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, qui seront arrêtés à CHF 600.-.

Notifie le présent arrêt ce jour, en copie, au recourant, soit pour lui son conseil, au TAPEM et au Ministère public.

Le communique pour information au SAPEM et à l'OCPM.

Siégeant :

Madame Corinne CHAPPUIS BUGNON, présidente; Mesdames Alix FRANCOTTE CONUS et Françoise SAILLEN AGAD, juges; Madame Olivia SOBRINO, greffière.

 

 

La greffière :

Olivia SOBRINO

 

La présidente :

Corinne CHAPPUIS BUGNON

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

PM/1175/2022

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

     

- délivrance de copies (let. b)

CHF

     

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

515.00

-

CHF

     

Total

CHF

600.00