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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/20122/2021

AARP/223/2023 du 29.06.2023 sur JTCO/143/2022 ( PENAL ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : ESCROQUERIE
Normes : CP.146.al2; cp.146.al1
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/20122/2021 AARP/223/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 26 juin 2023

Entre

A______, actuellement détenu au sein de l'établissement de détention de B______, comparant par Me C______, avocat,

appelant,


LE MINISTÈRE PUBLIC
de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

appelant joint,

 

contre le jugement JTCO/143/2022 rendu le 1er novembre 2022 par le Tribunal correctionnel,

et

D______, partie plaignante, comparant en personne,

E______, partie plaignante, comparant en personne,

F______, partie plaignante, comparant en personne,

G______, partie plaignante, comparant en personne,

intimés.


EN FAIT :

A. a. En temps utile, A______ et le Ministère public (MP) forment appel et appel joint contre le jugement du 1er novembre 2022, par lequel le Tribunal correctionnel (TCO) a acquitté le précité des faits visés sous chiffre 1.1.1.3. de l'acte d'accusation et de mise en circulation de fausse monnaie (art. 242 al. 1 du code pénal [CP]). A______ a été condamné à une peine privative de liberté de 38 mois, sous déduction de la détention avant jugement subie, pour escroquerie par métier (art. 146 al. 1 et 2 CP), faux dans les certificats (art. 252 CP), faux dans les certificats étrangers (art. 252 cum 255 CP) et comportement frauduleux à l'égard des autorités (art. 118 al. 1 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration [LEI]).

Le TCO a ordonné l'expulsion de Suisse de A______, renonçant à signaler cette mesure dans le système d'information Schengen (SIS), l'a condamné aux frais de procédure ainsi qu'à verser des dommages-intérêts de CHF 50'000.- à G______, de CHF 9'000.- à E______ et de CHF 26'000.- à F______.

Les premiers juges ont au surplus statué sur le sort des objets séquestrés.

b. A______ entreprend partiellement ce jugement, concluant à un verdict de culpabilité de complicité d'escroquerie pour les faits visés aux chiffres 1.1.1.1. et 1.1.1.2. de l'acte d'accusation, et d'escroquerie pour les faits visés aux chiffres 1.1.1.4. à 1.1.1.6. de l'acte d'accusation, au prononcé d'une peine privative de liberté avec sursis compatible avec sa libération immédiate, et à sa condamnation à verser des dommages-intérêts de CHF 5'000.- à G______ ainsi que de CHF 8'500.- à E______ et F______, au prorata de leur dommage matériel respectif.

Le MP forme appel joint et conclut, avec suite de frais, à un verdict de culpabilité du chef de mise en circulation de fausse monnaie et au prononcé d'une peine privative de liberté de 42 mois, le jugement entrepris devant être confirmé pour le surplus.

c.a.a. Selon l'acte d'accusation du 20 septembre 2022, il est reproché à A______ d'avoir commis des escroqueries de type wash-wash, de concert avec d'autres individus et en utilisant de fausses identités, durant plusieurs années, en particulier entre fin 2020 et novembre 2021. Il prenait contact avec les lésés en se présentant comme une personne aisée, notamment au lien avec le président du Gabon, souhaitant investir dans l'immobilier. Il leur proposait du travail puis un investissement dans un prétendu projet, en expliquant détenir de l'argent sécurisé nécessitant une opération de nettoyage au moyen de billets de banque. Il en faisait une démonstration, seul ou avec un complice, consistant à entourer des billets noircis de véritables billets, à injecter un produit et à les tremper dans un liquide, opération à l'issue de laquelle tous les billets redevenaient utilisables (ci-après : wash-wash). Les lésés étaient ainsi convaincus de lui livrer de l'argent liquide, qu'il parvenait à discrètement échanger avec de fausses coupures (ch. 1.1.1. de l'acte d'accusation).

c.a.b. A______ a en particulier agi à cinq reprises, soit au préjudice de D______ (ch. 1.1.1.1.), de H______ (ch. 1.1.1.2.), de G______ (ch. 1.1.1.4.) de I______ (ch. 1.1.1.5.) ainsi que de F______ et E______ (ch. 1.1.1.6.).

Les faits relatifs à ces cinq cas, admis en grande partie, seront exposés en détail infra aux lettres B.a et suivants.

c.a.c. Il était également reproché à A______ d'avoir agi à une reprise au préjudice d'un inconnu, qu'il aurait amené à lui livrer CHF 15'000.- en mai et juin 2021 (ch. 1.1.3.).

Le TCO a acquitté A______ pour ces faits.

c.b. Il est par ailleurs reproché à ce dernier les faits suivants, dont ni l'établissement ni la qualification juridique ne sont contestés en appel.

c.b.a. Il a fait usage d'un passeport mauricien falsifié au nom de J______ dans le cadre des escroqueries commises au préjudice de G______ et de F______ ainsi que de E______, notamment en réservant une chambre d'hôtel. Il a aussi utilisé ce faux passeport pour envoyer et recevoir de l'argent via des agences de transfert, notamment les 22 octobre et 5 novembre 2021 (ch. 1.2).

A______ a été reconnu coupable de faux dans les certificats étrangers (art. 252 cum 255 CP) pour ces faits.

c.b.b. Il a fait usage d'un Swisspass au nom de K______ comme moyen de légitimation, notamment pour utiliser les transports publics suisses entre avril 2019 et le 5 novembre 2021, ainsi que pour envoyer et recevoir de l'argent via des agences de transfert, notamment les 31 août et 30 octobre 2021.

A______ a été reconnu coupable de faux dans les certificats (art. 252 CP) pour ces faits.

c.b.c. Il a induit en erreur les autorités suisses en leur présentant, dans le cadre de sa demande d'autorisation de séjour déposée auprès du Service de la population et des migrants de l'État de Fribourg le 5 juillet 2019, un faux passeport français au nom de L______. Il a ainsi obtenu frauduleusement une autorisation de séjour L valable d'avril 2019 à avril 2021, qui ne lui aurait pas été délivrée s'il n'avait pas pu se prévaloir du statut de ressortissant d'un État de l'espace Schengen.

Il a également utilisé ce passeport pour bénéficier d'un raccordement téléphonique auprès de M______, pour ouvrir des comptes et obtenir une carte de crédit auprès de [la banque] N______, pour conclure des contrats de travail et pour envoyer ou recevoir de l'argent à plusieurs reprises via des agences de transfert.

A______ a été reconnu coupable de faux dans les certificats étrangers (art. 252 cum 255 CP) pour ces faits, ainsi que de comportement frauduleux à l'égard des autorités au sens de l'art. 118 al. 1 LEI.

B. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

Cas de D______ (ch. 1.1.1.1. de l'acte d'accusation)

a.a. D______ travaille à O______ [VD] en qualité d'indépendant dans le domaine de la construction de portes, barrières et fenêtres.

Dès la fin du mois de décembre 2020, A______ a pris contact par téléphone avec lui sous le nom de P______. Il lui a expliqué être à la recherche de quelqu'un pouvant réaliser des travaux de menuiserie sur des immeubles qu'il détenait à Neuchâtel et à Berne.

A______ a ensuite transmis les coordonnées de D______ à Q______ pour que celui-ci poursuive le travail de mise en confiance.

a.b. Fin décembre 2020, Q______ a rencontré D______ dans une chambre de l'hôtel R______. Il a prétendu s'appeler S______ et être le fils de P______.

Lors d'une seconde rencontre, à O______, Q______ a proposé à D______ d'investir dans l'immobilier à hauteur de CHF 30'000.- à CHF 50'000.-, ce que ce dernier a accepté. Cet argent constituerait une sorte de dépôt et en échange, il obtiendrait du travail pour une centaine de milliers de francs.

a.c. Le 3 février 2021, vers midi, Q______ a rencontré D______ une troisième fois, à l'hôtel T______ à U______ [VD]. Il lui a expliqué qu'un membre de sa famille, haut placé dans l'armée de son pays, disposait d'argent codé. Il lui a demandé de lui montrer l'argent liquide qu'il avait apporté et D______ lui a remis une somme de CHF 35'000.- en liquide, que son fils lui avait prêté.

Q______ s'est rendu dans la salle de bains prétendument pour vérifier l'authenticité des billets avec une lampe. Il a alors remplacé ceux-ci, à l'insu de D______, par de fausses coupures de CHF 1'000.-, soit des photocopies d'assez bonne qualité portant le numéro de série n° 1______, pour un montant de CHF 51'000.-. Il les a remises au précité et a quitté la chambre avec l'argent de ce dernier au prétexte de devoir se rendre à la réception.

Bien que D______ ne l'ait pas confirmé, une démonstration de wash-wash a très vraisemblablement eu lieu préalablement à la remise de l'argent. Q______ l'a en effet admis et une bouteille en verre brun contenant un liquide incolore ainsi qu'une liasse de faux billets de CHF 1'000.- noircis, au numéro de série 1______, ont été retrouvées dans la chambre.

a.d. Le 8 février 2021, D______ a réalisé que les billets reçus étaient faux lorsque son épouse a tenté de les déposer sur son compte [auprès de la banque] N______.

Le même jour, Q______ a envoyé CHF 4'800.- à A______ au Cameroun.

b. Parallèlement aux rencontres susdécrites, A______ et Q______ ont échangé les messages suivants par téléphone :

-               A______ (16 décembre 2020): "Il y a des affaires que je gère en ce moment avec V______ on a décidé de t'envoyer chez d'autres plus jeunes ; je finis d'abord de les cuisiner".

-               A______ (22 décembre 2020) : "Bonjour mon petit ; T'inquiète pas je travaille bien les dossiers".

-               Q______ (3 janvier 2021) : "On se retrouve où".

-               A______ (3 janvier 2021) : "Je suis à l'hôtel ; Viens chercher les clés"

"D______ Menuiserie, porte en pvc; J'ai 2 immeubles 1 à Berne et l'autre à Neuchâtel Nous devons refaire toute la Menuiserie intérieure cuisine et des ouvertures je souhaiterais n'ai pas déclarer et faire un dépôt pour le tout les travaux, je souhaiterais faire d'autres affaires avec lui; +41_2______; [code postal] O______ de la part dr mr P______".

-               Q______ (4 janvier 2021) : "Je l'ai senti ; C'est un bon dossier".

-               A______ (4 janvier 2021) : "On aura l'argent la semaine prochaine avec lui".

-               Q______ (4 janvier 2021) : "C'est lui qui à la [voiture de la marque] W______?".

-               A______ (4 janvier 2021) : "Non D______".

-               A______ (5 février 2021) : "Je t'envoie mes coordonnées stp envoie moi dès que possible".

-               A______ (6 février 2021): "X______ [services de transfert d’argent] nom A______ [son premier nom] prénom A______", "Autres nom A______ [son double nom] prénom A______",

-               Q______ (6 février 2021) : envoi des photos de justificatifs de transferts d'argent.

-               Q______ (7 février 2021) : "[…] Ton truc sera fait demain comme prévu".

c. Entendu par la police fédérale puis par le MP, Q______ a admis son implication. Il avait utilisé plus de faux billets que de vrais afin que l'épaisseur des paquets ne soit pas modifiée. Il avait bien effectué une démonstration de wash-wash.

Il avait agi dans plusieurs autres cas selon un mode opératoire similaire. Une fois qu'il avait le numéro d'une victime, il n'avait pas besoin d'instruction et agissait seul. Il cherchait sur Internet des entrepreneurs proposant des services de rénovation et privilégiait les personnes portant des noms à consonance étrangère, notamment kosovares ou portugaises, plus faciles à convaincre.

Confronté aux messages susexposés, il a admis que A______ lui avait transmis les coordonnées de D______ après lui avoir résumé la conversation qu'il avait eue avec le lésé. Il avait seulement rendu service à A______. Ils avaient déjà collaboré ainsi deux ou trois fois. Après les faits, il avait décidé de lui remettre une petite partie du butin.

Il n'avait jamais eu l'intention de mettre en circulation de faux billets, dans la mesure où l'on s'apercevait tout de suite qu'il s'agissait de contrefaçons.

d. Durant l'instruction et en première instance, A______ a contesté une quelconque participation aux faits, déclarant n'avoir jamais vu ni contacté D______.

Au sujet des messages échangés avec Q______, il a successivement donné les explications suivantes : il avait uniquement transféré au précité des messages reçus de la part d'un certain Y______, car lui-même se trouvait en Afrique ; son cousin Z______ avait utilisé son téléphone pour transférer ces messages à Q______ ; une connaissance, Z______, lui avait demandé de transmettre les coordonnées de D______ à Q______.

Concernant le montant de CHF 4'800.- perçu, il a fait les déclarations successives suivantes : il devait donner cet argent à des entrepreneurs locaux en Afrique pour commencer des travaux sur un terrain appartenant à Q______ et avait conservé CHF 500.- ou CHF 2'500.- à titre de commission ; Q______ lui avait remis CHF 4'800.- comme rémunération pour lui avoir transmis le numéro de téléphone d'une personne qu'il avait escroquée ; ce montant était en réalité destiné à son cousin Z______, lequel lui avait dit de garder CHF 500.-.

Cas de H______ (chiffre 1.1.1.2. de l'acte d'accusation)

e.a. H______ dirige une entreprise spécialisée dans le chauffage, la climatisation et la ventilation à AA______ [VD].

Fin 2020, A______ a pris contact avec lui sous le nom de J______ pour lui faire part de son projet d'investir dans l'immobilier en Suisse et de ses recherches d'un chauffagiste dans ce cadre.

Il lui a donné rendez-vous à l'hôtel R______ pour lui en parler, prétendant qu'il était le fils d'un ancien président africain et que son argent était "marqué".

e.b. Le 3 janvier 2021, A______ a envoyé par messages téléphoniques à Q______ une photographie de la carte de visite de l'entreprise de H______, accompagnée de cette explication : "Un portugais je viens de lui parler de toi; Moi c'est J______".

Lors d'une rencontre organisée par A______, Q______ a rencontré H______ sous le nom de S______ à l'hôtel susmentionné. Il a alors prétendu vouloir investir en Suisse et lui a proposé de s'associer à lui et de toucher un pourcentage du bénéfice. Il a expliqué que l'argent devait incessamment lui parvenir par valise diplomatique, mais qu'il était sécurisé et devait être débloqué, ce que A______ lui a confirmé par téléphone. Q______ lui a montré des photographies d'un coffre en métal supposé contenir les fonds.

Lors d'une seconde rencontre, Q______ a emmené H______ dans une chambre d'hôtel et prétendu qu'il avait besoin de billets propres pour nettoyer les billets noircis. Il a procédé à une démonstration de wash-wash avec des billets de CHF 100.-. Il a pressé H______, peu séduit par ce procédé, d'accepter un billet pour en vérifier l'authenticité.

e.c. A______ a par la suite contacté à plusieurs reprises H______ pour le convaincre d'investir, lui indiquant que s'il apportait CHF 5'000.- ou CHF 10'000.-, il en retirerait le double ou le triple.

H______, redoutant une arnaque, n'a donné aucune suite à ces propositions.

f. Durant l'instruction, Q______ a confirmé que A______ lui avait envoyé le numéro de téléphone de H______. Il l'avait rencontré en se présentant sous le nom de S______ dans le but de procéder à une démonstration de wash-wash, ce que A______ savait. Il avait agi ainsi pour rendre service au précité qui se trouvait en Afrique.

g. Durant l'instruction et en première instance, A______ a toujours contesté avoir eu l'intention d'escroquer H______ et donné les explications successives suivantes : il l'avait contacté au sujet d'affaires en Afrique mais à l'issue de deux rencontres, leurs discussions n'avaient pas abouti ; il avait proposé à H______ un marché dans le bâtiment au Gabon et il était prévu qu'il le contacte une fois arrivé en Afrique ; il avait envoyé Q______ lui parler à ce sujet car lui-même n'était pas en Suisse, ignorant que ce dernier ferait au client une démonstration de wash-wash ; il avait transmis la carte de visite de H______ à Q______ par erreur, en même temps qu'il transférait les messages concernant D______ ; il n'avait pas parlé avec H______ d'investissements en Afrique ; il avait mentionné des investissements en Suisse car il voulait un contrat de travail ; il avait abordé de la construction d'une école au Gabon, mais il s'agissait d'un mensonge, lui-même voulant uniquement obtenir de la part de H______ un contrat de travail.

Q______ était un bon ami, comme un petit frère. Habitant à AB______ [France], il était actif dans le show-biz. Il ne savait pas comment il gagnait sa vie.

Cas de G______ (ch. 1.1.1.4.)

h.a. G______ est propriétaire d'un restaurant à AC______ [VS].

Début juillet 2021, A______ l'y a rencontré sous le nom de J______, un soi-disant notable gabonais.

Le 14 juillet 2021, il y est retourné avec un dénommé AD______, pour informer G______ qu'ils souhaitaient racheter son restaurant.

Ils lui ont donné rendez-vous le lendemain dans une chambre de l'hôtel AE______ à U______ [VD]. Ils y ont procédé à une démonstration de wash-wash et lui ont donné un authentique billet de CHF 200.- issu du procédé. AD______ lui a expliqué avoir besoin de suffisamment d'argent pour procéder au nettoyage de tous les billets.

h.b. Le 16 juillet 2021, ils lui ont fixé un second rendez-vous à Genève, lui demandant de venir avec le plus de liquidités possibles afin d'achever le procédé de wash-wash et de nettoyer l'argent nécessaire à l'achat de son restaurant. En sus d'être remboursé, il devait recevoir une récompense dont le montant n'avait pas été défini. G______ s'est montré méfiant, mais A______ et AD______ ont fermement fait pression sur lui. Ils lui ont dit qu'il était déjà impliqué dans une affaire d'argent sale au vu de la démonstration à laquelle il avait pris part et que A______ était le fils de l'ancien président du Gabon.

G______ a finalement accepté de se rendre dans une chambre de l'hôtel AF______ avec une somme de CHF 50'000.- en coupures de CHF 1'000.-, dont il avait préalablement noté les numéros pour les récupérer à la fin de l'opération. A______, qui était seul, a pris l'argent et l'a emballé pour procéder au wash-wash. À l'insu de G______, il a remplacé les vrais billets par de fausses coupures de CHF 1'000.-, en distrayant le précité avec un produit dégageant une odeur incommodante. Il a ensuite inventé un prétexte pour quitter les lieux avec l'argent de G______.

Les 54 faux billets de CHF 1'000.- retrouvés dans la chambre d'hôtel, de format 70 × 156 mm (le format de billets authentiques étant de 70 × 158 mm) avaient été imprimés en couleur et étaient dépourvus d'élément de sécurité. Certains étaient découpés de travers et comportaient des bordures blanches.

i. Durant l'instruction et en première instance, A______ a admis avoir abordé G______ pour racheter son restaurant, puis l'avoir revu à plusieurs reprises avec AD______, lequel avait réalisé la démonstration de wash-wash. Lui-même le dénommait AG______. Il l'avait connu en 2020. AG______ l'envoyait rencontrer les futurs lésés et l'avait ainsi enjoint de contacter G______.

A______ a successivement fait les déclarations suivantes au sujet de la rencontre à l'hôtel AF______ : AG______ était également présent et avait subtilisé les billets de G______ en les remplaçant par des faux ; il s'était rendu seul dans la chambre d'hôtel pendant que AG______ lui donnait des instructions par téléphone ; AG______ n'était venu dans la chambre que durant deux minutes et avait appelé G______ quelques heures plus tard pour qu'il permette à A______ d'aller manger ; il avait vu AG______, qui lui avait donné CHF 5'000.- et dit qu'il allait finir le travail ; son rôle avait été de distraire G______ pour que AG______, qui se trouvait à proximité, puisse entrer dans la chambre sans être vu et subtiliser l'argent ; AG______ était resté à l'extérieur de l'hôtel et lui-même en était sorti à quatre reprises, dont une fois pour remettre à AG______ le paquet contenant l'argent ; AG______ n'avait pas voulu se montrer lors de ce dernier rendez-vous car il craignait d'effrayer G______, celui-ci n'ayant plus assez confiance en lui.

A______ a pour le surplus expliqué qu'il était supposé recevoir 20% du butin, mais AG______ ne lui avait finalement donné que CHF 5'000.- en guise de commission. Il s'était ainsi laissé manipuler.

Il n'avait jamais envisagé être impliqué dans une affaire de fausse monnaie en Suisse. Les coupures en cause ressemblaient bien à des billets d'argent mais, pour lui, la fausse monnaie devait pouvoir être utilisée pour faire des achats ou du change.

Cas de I______ (ch. 1.1.1.5.)

j. I______ travaille dans un bureau d'architecte comme dessinateur en bâtiment.

Courant septembre 2021, A______ l'a contacté par téléphone sous l'identité de J______ et lui a expliqué être à la recherche d'investissements sur le territoire suisse. Il lui a donné rendez-vous [à l'hôtel] AH______ de AI______ [VD] fin septembre ou début octobre 2021 et lui a indiqué rechercher de telles opportunités d'investissements pour l'une de ses relations fortunées.

Il lui a fixé un second rendez-vous au même hôtel pour en discuter plus avant.

Lors d'une troisième rencontre, courant octobre 2021, dans une chambre d'un hôtel à Genève, A______ est venu accompagné d'un tiers, qu'il a présenté à I______ et l'un de ses collègues, également présent, comme étant sa relation désirant investir en Suisse. Ils leur ont demandé s'ils avaient des liquidités. L'acolyte de A______ a procédé à une démonstration de wash-wash, ce qui a surpris et agacé I______ et son collègue. Pour les "dédommager", A______ leur a donné à chacun un billet de CHF 100.-, dont ils ont pu vérifier l'authenticité.

A______ et son comparse ont fixé un dernier rendez-vous à I______ et son collègue [à l'hôtel] AH______ de AI______. Ces derniers leur ont indiqué qu'ils ne poursuivraient pas leur relation sans contrat en bonne et due forme et qu'ils ne souhaitaient pas faire un quelconque investissement dans une opération de wash-wash.

k. Durant l'instruction et en première instance, A______ a admis les faits.

Son comparse, Y______, l'avait envoyé chercher le client, avait effectué la démonstration de wash-wash et remis les deux billets de CHF 100.- à I______, dans le but de le rassurer et de le convaincre d'apporter la fois suivante une grosse somme d'argent, qu'ils auraient subtilisée.

Cas de F______ et de E______ (ch. 1.1.1.6.)

l.a. E______ et F______ sont paysagistes indépendants, respectivement dans les cantons de Vaud et Fribourg, et ils travaillent régulièrement ensemble.

Courant octobre 2021, A______, sous le nom de J______, a contacté F______ en lui expliquant souhaiter investir dans l'immobilier en Suisse et avoir besoin d'un paysagiste.

Le 25 octobre 2021, un comparse de A______, se présentant sous le nom de Y______, a rencontré le précité et E______ à l'hôtel AJ______ à Genève. Y______ a aussi fait part de son souhait d'investir dans l'immobilier, Il avait besoin d'aide à cet effet ainsi que de personnel pour ses futurs biens, soit notamment des paysagistes comme eux. Il leur a donc proposé de travailler pour lui.

l.b. Lors d'un rendez-vous suivant, le 27 octobre 2021, à proximité de la gare de Genève, A______ a assuré F______ et E______ que Y______ était riche et digne de confiance. Ils projetaient de faire entrer de l'argent en Suisse, devant être dissimulé des douanes puis "échangé" pour être investi.

A______ les a emmenés dans une chambre de l'hôtel AH______ où ils ont retrouvé Y______. Avec son comparse, ils leur ont montré des photographies de biens immobiliers et d'argent, puis leur ont proposé d'investir CHF 100'000.- dans leur projet afin de débuter leur collaboration. Ils ont procédé à une démonstration de wash-wash en leur expliquant avoir besoin de leur soutien financier afin de nettoyer davantage d'argent et l'investir. Pour prouver l'authenticité du procédé, A______ et Y______ leur ont fait noter les numéros de série des billets utilisés.

l.c. Quelques jours plus tard, A______ leur a fixé un nouveau rendez- au café AK______ de Fribourg, où il leur a expliqué à nouveau que Y______ était très riche et digne de confiance. Il leur a montré sa carte d'identité et son passeport mauricien au nom de J______. F______ et E______ ont accepté d'investir CHF 40'000.- dans leur projet. A______ leur a confirmé qu'il pourrait ainsi procéder à un wash-wash. En sus d'être remboursé, ils obtiendraient un pourcentage en liquide de 25% ou 30% ainsi que des contrats pour les aménagements extérieurs à réaliser.

l.d. Le 5 novembre 2021, A______ et son comparse ont fixé un rendez-vous à F______ et E______ à l'hôtel AH______ à Genève. F______ et E______ ont amené CHF 40'000.- en coupures de CHF 1'000.-, qu'ils avaient pris en photo sur invitation de A______ et Y______ de sorte à les récupérer après le wash-wash.

Les précités ont emballé les billets puis les ont échangés contre de fausses coupures à l'insu de F______ et E______. Pour les distraire plus facilement, ils ont fait usage d'un produit dégageant une odeur incommodante, qui leur a piqué les yeux.

Ils ont inventé un prétexte pour quitter les lieux chacun à leur tour en emportant l'argent.

Les faux billets de banque en papier se sont décomposés en raison de leur humidité à la suite du wash-wash.

m. F______ et E______ ont immédiatement dénoncé les faits au poste de police de AL______.

Ils ont peu après aperçu A______, lequel s'était changé dans l'intervalle et entrait dans une agence de transfert d'argent. En les voyant, il a discrètement déposé sur le comptoir quatre billets de CHF 1'000.-, ses passeports mauricien et camerounais ainsi qu'un téléphone portable. Après discussion, il les a suivis au poste de police, leur expliquant avoir donné le reste de leur argent à Y______.

A______ avait au surplus sur lui CHF 1'150.- et remis CHF 1'000.- à l'employé de l'agence en vue de trois virements qui n'ont pas pu être exécutés. Il avait préalablement effectué des transferts d'argent dans d'autres agences pour des montants de CHF 1'690.-, CHF 1'756.- et CHF 1'832.69 au Cameroun.

n. A______ a en substance admis les faits.

Il a indiqué ce qui suit durant l'instruction au sujet des événements du 5 novembre 2021 dans la chambre d'hôtel. Y______ lui avait demandé d'allumer une bouilloire contenant de l'ammoniaque, ce qui dégageait une mauvaise odeur en chauffant, puis d'aller dans la salle de bains avec F______ et E______ pour mettre les billets noircis dans de l'eau chaude. Y______ avait à ce moment substitué à l'argent des précités des photocopies de billets de banque, quitté la chambre en prétextant vouloir régler la note à la réception, puis il l'avait appelé pour qu'il le rejoigne.

Ils avaient quitté l'hôtel et Y______ lui avait donné CHF 8'500.- pour sa participation. Il avait réalisé par la suite que cette rémunération était faible et que Y______ l'avait utilisé.

Avec cet argent, outre les transferts susmentionnés, il avait remis CHF 1'000.- à une personne à qui il devait de l'argent près de la gare, et en avait conservé une petite partie sur lui. Confronté en première instance au fait qu'il ressortait de la procédure qu'il avait effectué des transferts pour un total supérieur à CHF 8'500.-, il a expliqué avoir utilisé ses économies en sus du montant précité. Il avait tenté de se débarrasser d'une partie de son argent et de ses effets personnels sous l'effet de la panique.

Concernant Y______, A______ a déclaré qu'il s'agissait d'un Africain dont il ne connaissait pas la véritable identité et qui l'avait approché à AM______ [France] plus d'une année plus tôt. Il lui avait proposé de l'envoyer chercher des contacts en Suisse et de le rémunérer lorsque cela se passait bien. Il avait ainsi joué le rôle d'homme de confiance envoyé auprès de clients potentiels. Se faisant passer pour un homme politique africain venu se réfugier en Suisse, Y______ leur proposait d'investir dans des biens immobiliers et de se charger des travaux à réaliser. Dans un deuxième temps, il leur faisait comprendre que son argent était bloqué et devait être désécurisé.

A______ avait ainsi contacté d'autres "clients", peut-être trois, qui n'avaient pas accepté d'aller jusqu'au bout. Une autre personne semblait intéressée mais il avait été arrêté avant d'avoir pu reprendre contact avec elle.

Autres cas d'escroquerie de type wash-wash

o.a. Sur un bout de papier en possession de A______ au moment où il a été appréhendé par E______ et F______, qu'il avait commencé à détruire en le déchirant, figuraient, en sus de ceux de I______, les noms et coordonnées de AN______, AO______, AP______ et AQ______.

A______ s'est présenté à eux sous différentes identités, dont celle de Monsieur J______. Ils l'ont tous identifié sur planche photographique, à l'exception de AO______. L'individu l'ayant contacté avait toutefois eu recours à un raccordement utilisé par A______ (+41_3______) et AO______ en a fait une description concordante.

Entendues par la police, les quatre personnes précitées ont déclaré ce qui suit.

o.b. AQ______, propriétaire d'une bijouterie, avait été contacté par A______ entre juillet et novembre 2021. Ce dernier lui avait proposé de lui vendre de l'or et l'avait rencontré à plusieurs reprises à Genève, notamment à l'hôtel AR______. Il lui avait au surplus demandé de l'argent pour des raisons diverses. Il était venu plusieurs fois accompagné d'un autre homme qui semblait être le chef. Ils étaient tous deux très bien habillés. Ils lui avaient proposé l'achat d'un kilo d'or pour CHF 25'000.-, soit un prix bien en-dessous du prix du marché, et n'avaient aucun document officiel concernant la marchandise. AQ______ avait décliné l'offre, craignant d'être impliqué dans une affaire illégale.

o.c. AP______, retraité mais dont le nom était encore rattaché à une entreprise de nettoyage, avait été approché en 2020 par A______. Celui-ci lui avait proposé une activité pour le compte d'un ministre africain qu'il représentait. Il l'avait rencontré une dizaine de fois en l'espace de huit mois, dans des cafés. A______ lui avait dit faire partie de la famille de AS______, ancien président du Gabon, et lui avait présenté un passeport au nom de J______. À une reprise, il était venu accompagné d'un autre homme, soit V______, qui lui avait parlé de dédoubler de l'argent. Il avait coupé court, ce que A______ avait accepté sans insister. Il n'avait ainsi jamais été confronté à une démonstration de wash-wash.

o.d. AN______, entrepreneur dans le domaine de la rénovation, avait été abordé en octobre 2021 par A______, lequel souhaitait réaliser des travaux en Suisse. Ce dernier lui avait expliqué être proche d'un président africain et agir comme intermédiaire. Ils s'étaient rencontrés dans un café puis dans un hôtel. Lors de ce second rendez-vous, A______ était accompagné d'un autre homme, bien habillé, qui semblait être le chef. Les deux hommes n'avaient pas articulé de montant et n'avaient pas non plus évoqué de wash-wash. AN______ avait vainement tenté de recontacter A______ à son retour de vacances fin novembre 2021.

o.e. AO______, entrepreneur dans le domaine de la maçonnerie, avait reçu en été 2021 un appel de A______, qui disait avoir du travail à lui proposer. Ils s'étaient rencontrés dans un hôtel proche de la gare de Genève. A______ lui avait expliqué qu'il cherchait des immeubles à acheter pour les rénover et qu'il serait intéressé à lui rendre visite à AT______ [Portugal] pour évaluer des bâtiments. Ils s'y étaient effectivement vus alors que AO______ était en vacances. Ils avaient visité des villas que A______ avait pour projet d'acheter, de rénover et de revendre. Le précité lui avait demandé quelques semaines plus tard s'il était possible d'acheter des maisons "au noir". À partir de ce moment-là, AO______ avait pris de la distance. A______ avait insisté et voulu le rencontrer avec une seconde personne, mais il avait refusé.

p. A______ a en grande partie reconnu les faits tels que présentés par AQ______ et AP______, mais contesté connaître AN______ et AO______. Il a toutefois admis en première instance avoir rencontré AN______ dans l'optique d'une escroquerie de type wash-wash.

Il a de manière plus générale expliqué à la police avoir débuté ce genre d'escroquerie en 1997 et en avoir retiré environ EUR 20'000.-. Il s'est rétracté sur ce point durant l'instruction, indiquant avoir en réalité été victime de ce type d'acte en 1997, en France. Il ne maîtrisait pas la technique du wash-wash et avait agi pour la première fois dans le cas de G______. Il a enfin déclaré en première instance avoir rencontré beaucoup de clients sans obtenir de résultat.

q. En première instance, G______, E______ et F______ ont pris des conclusions en réparation de leur dommage à hauteur de CHF 50'000.-, CHF 9'000.- et
CHF 31'000.-. A______ n'y a pas acquiescé mais s'est dit prêt à rembourser les montants qu'il avait reçus.

C. a.a. Durant les débats d'appel, A______ a déclaré qu'il regrettait ses actes, dont le souvenir l'empêchait de dormir. Il avait pris du recul et voyait désormais la vie différemment. Aussi avait-il commencé à indemniser les victimes.

Il a produit la preuve d'un versement de CHF 400.- à G______ ainsi que les courriers par lesquels il avait proposé aux autres parties lésées de commencer à les indemniser.

Il s'est pour le surplus exprimé comme suit au sujet des différentes escroqueries reprochées.

Son rôle s'était limité à transmettre le numéro de téléphone de D______. Alors qu'il était en Afrique, il n'avait pas contacté lui-même le lésé. Les CHF 4'800.- qu'il avait reçus étaient destinés à la personne qui lui avait procuré le contact de D______, soit Z______, et lui-même n'avait conservé que CHF 500.-. Les messages échangés avec Q______ avaient été envoyés depuis son téléphone par Z______.

Il n'avait pas voulu escroquer H______ mais obtenir de lui un contrat de travail honnête. Il avait néanmoins transmis par erreur la photographie de sa carte de visite à Q______, lequel avait ensuite agi de sa propre initiative.

Il était seul avec G______ au moment où l'argent avait été subtilisé.

Dans le cas de E______ et de F______, son comparse, soit Y______, avait gardé la plus grande partie du butin, car il maîtrisait la technique du wash-wash et avait donc réalisé la démonstration y relative. Il ignorait où le précité se trouvait.

Au moment de son arrestation, il était déjà en dépression et avait effectué deux séjours en unité psychiatrique de trois jours et une semaine. Il était néanmoins possiblement disposé à commettre d'autres escroqueries, n'ayant pas encore pris conscience du mal causé. Les noms des personnes figurant sur le papier retrouvé sur lui, que Y______ lui avait communiqués pour qu'il les contacte, étaient en particulier de futures potentielles victimes.

Il n'avait jamais envisagé que les faux billets utilisés pussent être amenés à circuler dans le commerce.

a.b. Par la voix de son conseil, A______ persiste dans ses conclusions.

Dans les cas de D______ et de H______, son rôle s'était limité à cibler les victimes et les mettre en confiance, ce qui ne suffisait pas à faire de lui un coauteur. Il n'avait en particulier contacté D______ qu'une seule fois. Q______ avait mené toute la suite de l'opération de sa propre initiative sans son aide. La répartition du butin reflétait son rôle secondaire. Dans le cas de H______, il ignorait, à tort, les intentions de Q______. Comme il ressortait du dossier qu'il n'avait fait que suivre des ordres, son prétendu rôle de meneur était fondé sur des suppositions.

En trois mois, il n'avait perçu que les sommes de CHF 4'800.-, CHF 5'000.- et CHF 8'000.-, constituant des gains limités et irréguliers, sur lesquels il n'avait pas pu compter pour vivre. Ceux-ci n'avaient rien de comparable avec ceux perçus par Q______, qui aurait touché CHF 450'000.- selon le rapport du Ministère public de la Confédération. Le morceau de papier retrouvé sur lui lors de son interpellation ne prouvait pas son intention d'escroquer toutes les personnes dont les noms y figuraient. Il avait pour le surplus confirmé qu'il ne voulait pas faire de ce type d'escroquerie son travail. Il n'y avait pas consacré du temps, s'étant contenté de trouver les coordonnées de ses victimes dans l'annuaire, sans les rencontrer, étant rappelé qu'il s'était trouvé pendant plusieurs mois à l'étranger. Il ne maîtrisait pour le surplus pas la technique du wash-wash.

Les billets de banque ayant servi aux escroqueries n'étaient pas propres à être mis en circulation au vu de leur piètre qualité, étant rappelé que dans des affaires de type wash-wash, la volonté d'une telle mise en circulation faisait en principe défaut.

Pour fixer la peine, il devait être tenu compte de l'acquittement prononcé, de la faible part du butin reçue, de l'échec des escroqueries dans deux cas et de son rôle limité à la complicité dans deux autres, de la prise de conscience exprimée en appel et de sa volonté d'indemniser les victimes. Mentir comme il l'avait fait était en définitive un trait humain. Une faute concomitante pouvait être imputée aux lésés, qui auraient pu éviter la tromperie, somme toute très grossière, en faisant preuve d'un minimum de vigilance, et lesquels avaient été poussés par la perspective d'un gain facile. Le wash-wash défiait le bon sens, les investissements proposés étaient invraisemblables et certaines victimes avaient même été informées du potentiel caractère frauduleux des billets en cause. Il n'avait pas d'antécédent, sa condamnation en Belgique n'étant pas définitive. Il avait des enfants, était décrit comme un bon travailleur, disposait d'un emploi assuré à sa sortie de prison, où son attitude actuelle reflétait une évolution favorable et une prise de conscience de sa faute. Les 18 mois de détention subis représentaient déjà une sanction suffisamment dissuasive.

La peine prononcée par les premiers juges était disproportionnée, ce qui ressortait en particulier d'une comparaison avec la condamnation de AU______, financier bruxellois, à une peine privative de liberté de 36 mois avec sursis pour un détournement de EUR 158 millions.

Le montant des dommages-intérêts fixés en première instance devait être réduit pour tenir compte de la faute concomitante des lésés.

b. Le MP persiste dans ses conclusions.

A______, qui ne contestait plus son implication sur le principe ni la nature pénale de ses actes, était une personne avenante qui inspirait confiance. Cela n'enlevait rien à l'inconstance de ses déclarations, lesquelles ne cessaient de varier au gré de ses auditions.

Il réfutait vainement la réalisation de la circonstance aggravante du métier. Il avait mené une activité délictuelle continue en 2020 et 2021, lui procurant un revenu lui permettant notamment de voyager régulièrement, reflétant son professionnalisme, celui-ci ressortant également de ses multiples fausses identités, de ses différents numéros de téléphone, des modalités de réservation de chambres d'hôtel et de ses recherches Internet au sujet de présidents africains. Le dossier comportait la preuve d'autres cas d'escroquerie n'ayant pas atteint le stade de la tentative à cause de son arrestation, mais dans lesquels il avait déjà rencontré les futures victimes, qu'il dénommait clients. Il avait admis au début de la procédure vivre de telles escroqueries depuis 1997.

Conformément au constat de la police fédérale, il avait toujours agi comme maître des opérations, et en particulier comme le supérieur de Q______. Il était intervenu personnellement auprès de H______ et avait effectué la réservation de la chambre d'hôtel en vue de la première rencontre. Les échanges de messages avec Q______ démontraient qu'il donnait à ce dernier des instructions et non l'inverse.

Dans le cas de D______, son implication ne faisait pas de doute. Il avait contacté et mis en confiance la victime, envoyé des informations sur cette dernière à son complice, donné des explications fluctuantes sur son rôle et organisé le transfert d'argent en Afrique.

Il en allait de même dans le cas de H______, qu'il avait au surplus recontacté lorsque ce dernier s'était montré réticent. La victime n'avait par ailleurs jamais confirmé de quelconques discussions au sujet d'un contrat de travail. La thèse de l'envoi par erreur de la carte de visite de la victime à Q______ n'était pas crédible. Il lui avait en outre confirmé par message escompter obtenir de la victime de l'argent la semaine suivante.

La faute de A______ était lourde. Il avait agi sur une longue période et seule son arrestation avait mis fin à son activité délictueuse. Sa prise de conscience était superficielle ainsi qu'inaboutie, et sa collaboration mauvaise, le prévenu ayant souvent menti et n'ayant jamais concrétisé la promesse donnée à la police de contribuer à l'arrestation de ses complices.

La peine devait être relevée pour tenir compte du concours avec l'infraction de mise en circulation de fausse monnaie. Il avait à tout le moins dans deux cas utilisé et donc mis en circulation de fausses coupures. La qualité de la contrefaçon n'était pas déterminante aux yeux de la jurisprudence, exigeant seulement qu'un examen superficiel ne permette pas d'exclure l'authenticité de la fausse monnaie. A______ avait admis leur ressemblance avec de vrais billets et la famille D______ y avait cru. Le fait que certains billets aient dans un des cas moisi au contact de l'eau ne supprimait par leur qualité originelle.

Les montants alloués aux lésés correspondaient à leur dommage. Ils n'avaient pas à être limités à ce que A______ avait perçu comme rémunération, ce d'autant moins qu'il avait contribué à la dissimulation de l'argent soustrait.

D. a. Selon ses déclarations en première instance et en appel, la situation personnelle de A______ se présente comme suit, étant précisé que ce dernier a donné des explications très variables à ce sujet durant l'instruction.

Il est né le ______ 1975 à AV______, en France. Il a les nationalités française, gabonaise (par son père) et camerounaise (par une femme dont il a eu des enfants).

Après sa naissance, il est parti au Gabon, où il a effectué sa scolarité jusqu'à ses dix ans, puis au Cameroun, où il a obtenu son baccalauréat en 1992, avant de retourner en France, où il a étudié à l'université AW______ en sciences économiques, option comptabilité. Il a obtenu un diplôme d'études universitaires en 1994, puis travaillé à plein temps dans l'hôtellerie, successivement en tant que réceptionniste et chauffeur-livreur.

b. Il s'est marié avec AX______ en 1997, dont il a reconnu les deux enfants, aujourd'hui majeurs.

Il a ensuite été marié de 2010 à 2017 à AY______, avec laquelle il était en couple depuis 2004 et a eu deux enfants, soit AZ______, née en 2009, et BA______, né en 2018. Son épouse a un autre fils, BB______, né en 2004, que lui-même a reconnu.

Depuis 2017, il vit en région parisienne avec BC______, avec laquelle il a eu une fille, BD______, âgée de quatre ans, et dont il a reconnu un précédent fils, BE______, âgé de 13 ans.

c. Il est venu en Suisse pour la première fois en 1997 afin d'y passer des vacances, puis y est revenu en 2019. Il a perçu un salaire mensuel variant entre CHF 2'800.- et CHF 4'000.- chez BF______ (production alimentaire) jusqu'en juillet 2020, puis d'environ CHF 3'000.- chez BG______, société pour laquelle il a travaillé comme nettoyeur jusqu'au 15 janvier 2021. Il avait également travaillé à BH______ [France] dans le conditionnement pour un salaire mensuel d'environ EUR 1'500.- ou EUR 1'600.-.

En 2020 et 2021, il a régulièrement voyagé au Gabon, au Portugal et en France. Il s'est rendu en particulier rendu en Afrique de janvier à avril 2021, vivant alors sur ses économies, puis s'est mis à chercher du travail en Suisse pour renouveler son permis de séjour. Il s'est par ailleurs rendu à plusieurs reprises en Turquie entre fin novembre 2020 et début janvier 2021, notamment pour subir une opération de l'estomac (sleeve) et une liposuccion. Il aurait souffert de dépression et consommé beaucoup d'alcool en août et septembre 2021.

Détenu au pénitencier de B______ depuis le 1er février 2023, il travaille dans l'atelier d'horlogerie, il suit des cours de mathématique et d'informatique. Il s'apprête à débuter des formations en lien avec l'activité d'aide-soignant, dans laquelle il a pour projet de se reconvertir à sa sortie de prison. Il souhaite désormais se contenter d'un travail honnête. Il a le projet travailler pour la société BI______ en France, active dans "le conseil pour les affaires", dont il a produit une promesse d'embauche au titre de chef d'équipe pour un salaire brut de EUR 2'337.-, afin de financer sa future formation.

d. À teneur de l'extrait de son casier judiciaire suisse, A______ n'a pas d'antécédent.

Par jugement du 1er octobre 2018, un tribunal belge l'a condamné par défaut à une peine privative de liberté de 18 mois pour une escroquerie de type wash-wash commise en 2016. Cette décision se fondait sur ses déclarations circonstanciées, décrivant le type d'escroquerie commise et les manœuvres utilisées, ainsi que sur les déclarations de la victime. Elle est entrée en force de chose jugée mais peut faire l'objet d'une opposition par A______ "dans les 15 jours de sa remise à la Belgique".

Ce dernier a confirmé avoir connaissance de cette condamnation. Il avait bien été entendu par les autorités belges mais n'avait pas admis les faits, ayant seulement indiqué avoir été en "mauvaise compagnie". Il avait l'intention de former opposition dès sa sortie de prison car il était innocent.

E. Me C______, défenseur d'office de A______, dépose un état de frais pour la procédure d'appel comptabilisant, hors la durée des débats de 3h45, 4h45 d'entretiens avec le client par le collaborateur, 0h30 de rédaction de requête d'exécution anticipée de la peine ainsi que 2h42 de déclaration d'appel et d'examen de l'appel joint par la stagiaire, 1h00 de courriers et d'examen de l'appel joint par le collaborateur, 22h42 et 6h45 d'étude du dossier et de préparation aux débats par la stagiaire et le collaborateur.

L'activité du défenseur d'office a été indemnisée à hauteur de 100 heures en première instance.


 

EN DROIT :

1. L'appel et l'appel joint sont recevables pour avoir été interjetés et motivés selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398, 399, 400 et 401 CPP).

La Chambre limite son examen aux violations décrites dans l'acte d'appel (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP).

2. 2.1. Le principe in dubio pro reo, qui découle de la présomption d'innocence, garantie par l'art. 6 ch. 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH) et, sur le plan interne, par les art. 32 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse (Cst.) et 10 al. 3 CPP, concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves au sens large (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.1 et 127 I 28 consid. 2a).

Comme règle d'appréciation des preuves, la présomption d'innocence signifie que le juge ne doit pas se déclarer convaincu de l'existence d'un fait défavorable à l'accusé si, d'un point de vue objectif, il existe des doutes quant à l'existence de ce fait. Il importe peu qu'il subsiste des doutes seulement abstraits et théoriques, qui sont toujours possibles, une certitude absolue ne pouvant être exigée. Il doit s'agir de doutes sérieux et irréductibles, c'est-à-dire de doutes qui s'imposent à l'esprit en fonction de la situation objective (ATF 145 IV 154 consid. 1).

2.2.1. L'art. 146 al. 1 CP punit celui qui, dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime, a astucieusement induit en erreur une personne par des affirmations fallacieuses ou par la dissimulation de faits vrais, ou l'a astucieusement confortée dans son erreur, et aura de la sorte déterminé la victime à des actes préjudiciables à ses intérêts pécuniaires ou à ceux d'un tiers.

2.2.2. Pour qu'il y ait escroquerie, une simple tromperie ne suffit pas ; il faut qu'elle soit astucieuse. Il y a tromperie astucieuse lorsque l'auteur recourt à un édifice de mensonges, à des manœuvres frauduleuses ou à une mise en scène, mais aussi lorsqu'il donne simplement de fausses informations, si leur vérification n'est pas possible, ne l'est que difficilement ou ne peut raisonnablement être exigée, de même que si l'auteur dissuade la dupe de vérifier ou prévoit, en fonction des circonstances, qu'elle renoncera à le faire en raison d'un rapport de confiance particulier. L’escroquerie peut consister en une mise en scène caractérisée par des dispositions prises de manière intensive, planifiée et systématique, sans qu’il ne soit nécessaire que celles-ci revêtent une complexité réelle ou intellectuelle particulière (ATF 142 IV 153 consid. 2.2.2 et 143 IV 302 consid. 1.3.1).

L'astuce n'est pas réalisée si la dupe pouvait se protéger avec un minimum d'attention ou éviter l'erreur avec le minimum de prudence que l'on pouvait attendre d'elle. Il n'est cependant pas nécessaire qu'elle ait fait preuve de la plus grande diligence ou qu'elle ait recouru à toutes les mesures possibles pour éviter d'être trompée. Une co-responsabilité de la dupe n'exclut l'astuce que dans des cas exceptionnels, à savoir si cette dernière n'a pas procédé aux vérifications élémentaires, exigibles de sa part au vu des circonstances. Même un degré de naïveté important de la part de la dupe ne conduit pas en tous les cas à l'acquittement du prévenu. Pour apprécier si l'auteur a usé d'astuce et si la dupe a omis de prendre des mesures de prudence élémentaires, il ne suffit pas de se demander comment une personne raisonnable et expérimentée aurait réagi à la tromperie. Il faut au contraire prendre en considération les circonstances et la situation particulière de la dupe (ATF 143 IV 302 consid. 1.4, 142 IV 153 consid. 2.2.2 et 135 IV 76 consid. 5.2).

Un procédé de type wash-wash est objectivement astucieux. Il implique une prise de contact avec la dupe ciblée sous un prétexte fallacieux, une première rencontre visant à la mettre en confiance, puis une mise en scène précise devant faire accroire à celle-ci qu'un gain facile et important pourrait être obtenu par un procédé mécanique. La dupe est ainsi convaincue de la réalité d'un procédé défiant le bon sens malgré le recours de l'auteur à un scénario invraisemblable (arrêt du Tribunal fédéral 6B_317/2020 du 1er juillet 2020 consid. 2.3.)

2.2.3. Le métier constitue une circonstance aggravante (art. 146 al. 2 CP).

L'auteur agit par métier lorsqu'il résulte du temps et des moyens qu'il consacre à ses agissements délictueux, de la fréquence des actes pendant une période déterminée, ainsi que des revenus envisagés ou obtenus, qu'il exerce son activité coupable à la manière d'une profession, même accessoire. Il faut que l'auteur aspire à obtenir des revenus relativement réguliers représentant un apport notable au financement de son genre de vie et qu'il se soit ainsi, d'une certaine façon, installé dans la délinquance (ATF 129 IV 253 c. 2.1). L'auteur doit avoir agi à plusieurs reprises, avoir eu l'intention d'obtenir un revenu et être prêt à réitérer ses agissements (ATF 119 IV 129 consid. 3). Il n'est pas nécessaire que ceux-ci constituent sa principale activité professionnelle ou qu'il les ait commis dans le cadre de sa profession ou de son entreprise légale. Une activité accessoire illicite peut aussi être exercée par métier (ATF 116 IV 319 consid. 4b). La circonstance aggravante du métier n'exige ni chiffre d'affaires ni gain important (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1043/2017 du 14 août 2018 consid. 1.1.)

La tentative est absorbée par le délit consommé par métier lorsque l'auteur a commis plusieurs tentatives et des délits consommés (ATF 123 IV 113 consid. 2d et 105 IV 157 consid. 2).

2.3. Est un coauteur celui qui collabore, intentionnellement et de manière déterminante, avec d'autres personnes, à la décision de commettre une infraction, à son organisation ou à son exécution, au point d'apparaître comme l'un des participants principaux. Il faut que, d'après les circonstances du cas concret, la contribution du coauteur apparaisse essentielle à l'exécution de l'infraction. La seule volonté quant à l'acte ne suffit pas. Il n'est toutefois pas nécessaire que le coauteur ait effectivement participé à l'exécution de l'acte ou qu'il ait pu l'influencer. La coactivité suppose une décision commune, qui ne doit cependant pas obligatoirement être expresse, mais peut aussi résulter d'actes concluants, le dol éventuel quant au résultat étant suffisant. Il n'est pas nécessaire que l'acte soit prémédité et le coauteur peut y adhérer en cours d'exécution. Il est déterminant qu'il se soit associé à la décision dont est issue l'infraction ou à la réalisation de cette dernière, dans des conditions ou dans une mesure qui le font apparaître comme un participant non pas secondaire, mais principal. Il doit avoir une certaine maîtrise des opérations et jouer un rôle plus ou moins indispensable (ATF 135 IV 152 consid. 2.3.1, 130 IV 58 consid. 9.2.1 et 125 IV 134 consid. 3a).

2.4. Aux termes de l'art. 22 al. 1 CP, le juge peut atténuer la peine si l’exécution d’un crime ou d’un délit n’est pas poursuivie jusqu’à son terme ou que le résultat nécessaire à la consommation de l’infraction ne se produit pas ou ne pouvait pas se produire.

Il y a tentative d'escroquerie au sens large lorsque l'auteur, agissant intentionnellement et dans un dessein d'enrichissement, a commencé l'exécution de cette infraction, manifestant ainsi sa décision de la commettre, même si les éléments objectifs font, en tout ou en partie, défaut. Conformément aux règles générales, l'intention doit porter sur l'ensemble des éléments constitutifs objectifs. Il est déterminant que l'auteur agisse en se représentant (donc en acceptant) une situation dans laquelle ces éléments sont réalisés (ATF 128 IV 18 consid. 3b et 122 IV 246 consid. 3a).

2.5.1. En l'espèce, l'appelant ne conteste pas, sur le principe, avoir pris part aux faits qui lui sont reprochés au titre d'escroquerie ni, à raison pour les motifs qui suivent, sa condamnation de ce chef.

Dans chacun des cas, l'action des protagonistes, ciblant exclusivement de petits entrepreneurs, visaient en effet à obtenir de l'argent des lésés, qu'ils rencontraient à plusieurs reprises dans le but de les convaincre d'investir dans un projet de nature immobilière en réalité inexistant, dont ils étaient supposés retirer un bénéfice certain, notamment sous la forme de travail bien rémunéré. Ils étaient amenés à procurer aux auteurs de l'argent afin de procéder à une opération de wash-wash, dont ils devaient également profiter en obtenant un supplément à leur investissement. Cet investissement devait toutefois leur être subtilisé, par le remplacement des vraies coupures par de fausses. Ce subterfuge était facilité par l'emploi d'un produit, dans le cadre de wash-wash, dégageant une forte odeur et provoquant une gêne chez les lésés.

Les protagonistes ont ainsi induit ou tenté d'induire en erreur les lésés par des affirmations fallacieuses, et les ont déterminés ou ont tenté de les déterminer à des actes préjudiciables à leurs intérêts pécuniaires. Au vu de la présélection des victimes potentielles dans le cercle des petits entrepreneurs, en particulier d'origine étrangère, des rencontres successives organisées notamment dans des hôtels, du caractère régulier et souvent insistant des contacts noués et de la démonstration de wash-wash, accompagnée d'une remise de vrais billets ou d'une invitation des lésés à noter les numéros de série de leurs propres coupures aux fins de les rassurer, voire de la présentation de leur pièce d'identité, ils ont agi de manière astucieuse au regard de la jurisprudence susrappelée.

Dans un argumentaire contradictoire, l'appelant se prévaut en appel, sans formellement contester le caractère astucieux de la méthode utilisée, de la faute concomitante des lésés. Or, cette méthode, en particulier la démonstration de wash-wash, a précisément pour but et effet avéré d'amener les lésés à concéder d'importants investissements dans le cadre d'un scénario ne paraissant, objectivement et de l'extérieur, pas digne de foi.

2.5.2. L'appelant ne conteste pas non plus que, dans les deux cas où l'escroquerie n'a pas abouti (H______ et I______), celle-ci est néanmoins réalisée sous la forme de la tentative.

L'appelant et ses comparses ont en effet à chaque fois été jusqu'au bout du processus devant convaincre les lésés à leur amener de l'argent, en les rencontrant à plusieurs reprises pour leur présenter un faux projet d'investissement et en leur faisant une démonstration de wash-wash. Seule leur méfiance a en fin de compte empêché la survenance du préjudice financier.

2.6.1. L'appelant remet en revanche en cause sa participation principale aux deux premiers cas (D______ et H______), considérant n'être intervenu que comme complice.

2.6.2. Dans le cas de D______, alors qu'il était au Cameroun, il a lié le premier contact avec ce dernier, lui a communiqué ses projets d'investissement et ainsi initié la mise en confiance du lésé, dont il a ensuite transmis les coordonnées à Q______. Une fois l'escroquerie accomplie, ce dernier lui a envoyé CHF 4'800.-, sur un montant détourné de CHF 51'000.-.

Il résulte des messages échangés entre Q______ et l'appelant que le premier a agi à l'initiative du second. S'il n'a pas dû superviser l'ensemble de l'opération, l'appelant a expressément et donc délibérément dirigé son comparse vers D______, en lui décrivant le scénario présenté à ce dernier. Q______ l'a confirmé, en précisant avoir déjà collaboré avec l'appelant de cette manière. L'escroquerie réalisée, l'appelant l'a expressément enjoint de le commissionner rapidement. La thèse de l'ignorance des projets de son acolyte, au motif qu'il aurait joué le rôle d'un simple messager, se heurte ainsi aux éléments au dossier, ses déclarations à ce sujet ayant par ailleurs beaucoup varié. Pour les mêmes motifs, ses explications selon lesquelles il n'aurait conservé pour lui qu'une partie du montant reçu de Q______ ne résistent pas à l'examen.

Il apparaît au vu de ce qui précède que, quand bien même Q______ a agi de manière indépendante une fois en contact avec le lésé, l'appelant a joué un rôle essentiel dans la tromperie de D______ et qu'il avait un intérêt direct dans la réalisation de l'escroquerie. Sans son intervention, l'infraction n'aurait pas pu être commise et sans cela, il n'aurait pas été rémunéré. Le montant reçu est important eu égard à ce que l'essentiel du travail a été réalisé par Q______ et que l'appelant était absent. Il est rappelé que la coactivité, si elle suppose une décision commune, n'implique pas que la coauteur participe à l'exécution de l'acte ou influence celle-ci.

2.6.3. Dans le cas de H______, l'appelant a joué un rôle tout aussi déterminant, en initiant la relation avec la cible et en dirigeant Q______ vers cette dernière. Il a en outre lui-même rencontré H______ la première fois ainsi qu'organisé le premier rendez-vous avec Q______. L'appelant a ensuite tenté de regagner la confiance du client, perdue après la démonstration de wash-wash.

Les explications de l'appelant, ayant constamment varié, selon lesquelles il aurait contacté H______ pour des raisons étrangères à une escroquerie, soit notamment pour réaliser des investissements en Afrique ou obtenir un contrat de travail, et envoyé la carte de visite du précité à Q______ par erreur, se heurtent frontalement aux déclarations des précités et ne trouvent appui sur aucun autre élément du dossier.

2.6.4. L'appelant est ainsi intervenu dans la réalisation des deux premières escroqueries en tant que coauteur.

2.7. L'appelant conteste vainement la réalisation de la circonstance aggravante du métier, en se fondant en particulier sur le montant, qu'il tient pour insuffisant, des montant perçus à la suite des infractions commises.

2.7.1. Les cinq cas dont il est encore accusé, survenus sur une période circonscrite à environ une année, démontrent qu'il a consacré à leur préparation et à leur exécution un temps et des moyens importants. Chaque escroquerie a impliqué la recherche d'un client potentiel, l'élaboration d'un scénario à lui présenter, plusieurs contacts et rencontres, la réservation de chambres d'hôtel, des déplacements en Suisse romande, une démonstration de wash-wash ainsi que tout le plan nécessaire au détournement de l'argent des lésés. Bien que les montants reçus par l'appelant, totalisant CHF 18'300.- (CHF 4'800.- + CHF 8'500.- + CHF 5'000.-), ne représentent qu'une partie de l'argent détourné, ils n'étaient de loin pas anodins pour lui. Il n'a en effet jamais retiré d'importants revenus des activités lucratives exercées, il ne travaillait plus, à teneur du dossier, durant la période pénale et devait néanmoins financer des déplacements très réguliers ainsi que l'entretien de deux familles. Il est rappelé qu'il suffit que l'auteur exerce son activité coupable à la manière d'une profession, même accessoire, et que la réalisation de la circonstance aggravante n'exige pas de gain qualifié. Le montant précité ne comprend en outre pas le revenu escompté par l'appelant pour les deux escroqueries n'ayant pas abouti, ni par ailleurs celui qu'il aurait considéré comme plus juste dans les autres cas. Aux termes de ses propres déclarations, il estime en effet avoir été insuffisamment rémunéré en proportion du butin obtenu.

2.7.2. Il résulte pour le surplus du dossier que l'appelant a agi avant les faits et que, durant la période pénale et encore au moment de son arrestation, il travaillait à d'autres possibilités d'escroqueries.

D'une part, il a lui-même déclaré à la police, avant de se rétracter sur ce point, commettre ce genre d'escroquerie depuis 1997 et confirmé, durant l'instruction en lien avec Y______ et de manière plus générale en première instance, avoir rencontré beaucoup de clients sans résultat. Q______ a expliqué avoir collaboré avec lui préalablement à plusieurs reprises et l'appelant a été condamné en Belgique pour le même genre d'escroquerie commise en 2016. Contrairement à ce qu'il argue en appel, il peut être tenu compte de cette condamnation dès lors que ce jugement est entré en force de chose jugée, ce d'autant plus qu'il se fonde sur ses propres explications et que l'appelant a admis avoir été entendu par les autorités belges. Ce dernier n'a pas encore contesté ce jugement par la voie extraordinaire de l'opposition et il n'est pas acquis qu'il le fasse. Encore recherché par les autorités précitées et s'étant opposé avec succès à leur demande d'extradition (cf. pièces déposées par l'appelant le 31 octobre 2022), il n'a pas de réel intérêt à retourner en Belgique.

D'autre part, lors de son interpellation, l'appelant était actif auprès d'au minimum quatre autres victimes potentielles, dont les coordonnées ont été retrouvées sur lui. Il a confirmé en appel qu'il était prêt à poursuivre les escroqueries, en particulier au préjudice des victimes précitées, et que seule son arrestation avait mis un terme à ses agissements.

2.8. En conclusion, la culpabilité de l'appelant pour escroquerie par métier doit être confirmée.

3. 3.1. L'art. 242 al. 1 CP punit celui qui aura mis en circulation comme authentiques ou intacts des monnaies, du papier-monnaie ou des billets de banque faux ou falsifiés.

Le comportement punissable consiste à mettre en circulation, de n'importe quelle manière, la monnaie qui a préalablement été contrefaite ou falsifiée au sens des art. 240 et 241 CP. La monnaie doit être mise en circulation comme authentique ou intacte (ATF 123 IV 9 consid. 2a).

La qualité de la fausse monnaie n'est pas déterminante. Il suffit que le faux soit susceptible de créer un risque de confusion en cas d'examen rapide et superficiel (ATF 123 IV 55 consid. 2c).

3.2. En l'espèce, il est établi que dans les trois cas où l'appelant, seul ou avec Q______, a substitué à l'insu des lésés l'argent de ces derniers par de fausses coupures, celles-ci pouvaient être confondues avec de vrais billets en cas d'examen rapide et superficiel. Elles étaient certes dépourvues d'élément de sécurité et certaines comportaient des bords blancs ou étaient mal découpées. Mais elles consistaient en photocopies couleurs de bonne qualité, se rapprochant de la taille des vrais billets et pouvant ainsi être aisément confondues avec ceux-ci, comme l'appelant l'a admis durant l'instruction. Surtout, dans l'hypothèse où le lésé ne se rendait pas du tout compte de l'échange, il était amené à croire que les billets en cause étaient ceux qu'il avait lui-même apportés, dont il ne pouvait douter de l'authenticité et qu'il n'avait donc aucune raison de vérifier. Preuve en est que l'épouse de D______ a cherché à déposer la fausse monnaie reçue sur son compte [auprès de la banque] N______.

Quoi qu'il en dise, l'appelant n'a pas pu ignorer dans ces conditions le risque que l'argent soit mis en circulation. Pour l'exclure, il aurait pu et dû marquer les billets ou les imprimer dans une autre couleur. Mais le but était bien de tromper à ce sujet les lésés le plus longtemps possible et surtout d'éviter qu'ils ne se rendent compte de la duperie avant que lui-même et ses comparses aient pu s'en éloigner.

L'appelant sera donc reconnu coupable de mises en circulation de fausse monnaie et le jugement querellé réformé sur ce point.

4. 4.1. En l'espèce, l'infraction d'escroquerie par métier susexaminée est passible d'une peine privative de liberté de dix au plus ou d'une peine pécuniaire de 90 jours-amende au moins (art. 146 al. 2 CP). Celle de mise en circulation de fausse monnaie est punie d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire (art. 242 al. 1 CP). Il en va de même des autres infractions dont l'appelant s'est rendu coupable, soit les faux dans les certificats (art. 252 CP) et le comportement frauduleux à l'égard des autorités au sens de l'art. 118 al. 1 LEI.

4.2. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).

La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution (objektive Tatkomponente). Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur (subjektive Tatkomponente). À ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même (Täterkomponente), à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 141 IV 61 consid. 6.1.1, 136 IV 55 consid. 5 et 134 IV 17 consid. 2.1).

4.3. Selon l'art. 34 al. 1 CP, 1ère phrase, sauf disposition contraire, la peine pécuniaire est de trois jours-amende au moins et ne peut excéder 180 jours-amende.

L'art. 41 al. 1 CP prévoit que le juge peut prononcer une peine privative de liberté à la place d’une peine pécuniaire (a) si une peine privative de liberté paraît justifiée pour détourner l’auteur d’autres crimes ou délits, ou (b) s'il y a lieu de craindre qu'une peine pécuniaire ne puisse pas être exécutée.

4.4. Selon l'art. 49 al. 1 CP, si, en raison d'un ou de plusieurs actes, l'auteur remplit les conditions de plusieurs peines de même genre, le juge le condamne à la peine de l'infraction la plus grave et l'augmente dans une juste proportion. Il doit, dans un premier temps, fixer la peine pour l'infraction abstraitement – d'après le cadre légal fixé pour chaque infraction à sanctionner – la plus grave, en tenant compte de tous les éléments pertinents, parmi lesquels les circonstances aggravantes ou atténuantes. Dans un second temps, il augmentera cette peine pour sanctionner chacune des autres infractions, en tenant là aussi compte de toutes les circonstances y relatives (ATF 144 IV 313 consid. 1.1.2).

4.5. Dans le contexte de la fixation de la peine, le recourant peut faire valoir une inégalité de traitement. Compte tenu toutefois des nombreux paramètres qui interviennent dans la fixation de la peine, une comparaison avec des affaires concernant d'autres accusés et des faits différents est d'emblée délicate. Il ne suffit pas que le recourant puisse citer un ou deux cas où une peine particulièrement clémente a été fixée pour prétendre à un droit à l'égalité de traitement (ATF 120 IV 136 consid. 3a). Les disparités en cette matière s'expliquent normalement par le principe de l'individualisation des peines, voulu par le législateur ; elles ne suffisent pas en elles-mêmes pour conclure à un abus du pouvoir d'appréciation (ATF 141 IV 61 consid. 6.3.2). La comparaison est généralement stérile, dès lors qu'il existe presque toujours des différences entre les circonstances, objectives et subjectives, que le juge doit prendre en considération dans chacun des cas (arrêts du Tribunal fédéral 6B_566/2022 du 18 janvier 2023 consid. 3.1).

4.6. La faute de l'appelant pour l'escroquerie par métier est plutôt lourde. Il a trompé ou tenté de tromper plusieurs entrepreneurs modestes préalablement choisis et ciblés, en entretenant, seul ou avec un comparse, un lien de confiance étroit avec eux par de nombreux contacts, en leur présentant de faux projets d'investissement, en les accueillant dans des hôtels et en leur faisant une démonstration de wash-wash.

L'appelant ne peut pas se prévaloir de l'invraisemblance des scénarios présentés aux victimes. Non seulement le lien de confiance noué avec ces dernières, associé à la technique du wash-wash, avait pour but de vaincre leur méfiance, mais surtout, si le client ciblé se montrait réticent, il n'hésitait pas à redoubler ses contacts pour maximiser les chances de le tromper.

Les personnes effectivement lésées ont subi un dommage de CHF 125'000.- (CHF 35'000.- + CHF 50'000.- + CHF 40'000.-), auquel aurait dû s'ajouter celui des deux parties plaignantes ayant réussi à déjouer la tromperie. L'appelant a été mû par l'appât d'un gain rapide et important, lui permettant de financer un train de vie dispendieux, impliquant de nombreux déplacements en Europe et en Afrique ainsi que l'entretien de deux familles, que ses gains légaux bien plus modestes ne lui permettaient pas de couvrir. Il a en particulier réalisé une opération de chirurgie esthétique en Turquie fin 2020.

Comme vu plus haut, outre qu'il a été condamné pour des faits de même genre commis en Belgique en 2016, il vit de ce type d'escroquerie depuis un certain temps et était résolu à poursuivre cette activité lors de son interpellation. Quoi qu'il en dise, il ne semble pas sincèrement déterminé à y mettre un terme. Ses projets de formation et de réinsertion dans le domaine des soins apparaissent inconsistants eu égard à l'absence de toute expérience en la matière. Il ne représente de toute manière pas un changement réel dans la mesure où l'appelant a toujours exercé des activités lucratives dans divers domaines parallèlement à ses activités délictuelles. Il ne résulte dès lors pas de ses projets une résolution manifeste de s'amender, en particulier d'adopter un train de vie compatible avec une rémunération certes modeste mais légale, et de cesser de recourir à des identités diverses pour tromper des tiers ou des autorités à son avantage. L'appelant continue en fin de compte d'entretenir l'opacité de sa situation et de ses ambitions réelles, sans perspective de changement concret, ce qui laisse craindre qu'il poursuive ses activités illégales. Le versement d'une partie de son pécule à l'une des parties plaignantes est certes louable, mais représente une indemnisation très faible en proportion du dommage causé et, intervenant en appel, apparaît plus dicté par le changement de sa ligne de défense que par une volonté de réparer le dommage causé.

Sa collaboration à l'établissement des faits s'est révélée médiocre bien qu'il admette désormais sur le principe la commission de plusieurs escroqueries. Ses déclarations ont varié tout au long de la procédure sur des points essentiels, de même que sur sa situation personnelle. Il tente encore de minimiser son implication dans plusieurs cas en se présentant comme un simple exécutant ou pourvoyeur de contacts. Il n'a en définitive donné aucun renseignement ayant permis d'identifier ses complices, à l'exception de Q______ déjà arrêté, et de retrouver une partie du très important montant des détournements commis.

Ainsi, si l'appelant a exprimé des regrets à plusieurs reprises et très modestement débuté l'indemnisation de l'une des parties plaignantes, la prise de conscience de sa faute apparaît inaboutie et sa volonté de s'amender toute relative.

Au vu des éléments qui précèdent, l'escroquerie par métier, infraction la plus grave, devrait être sanctionnée par une peine privative de liberté théorique de 30 mois.

4.7. La faute de l'appelant en lien avec les autres infractions commises est assez lourde, voire lourde. Il a mis ou accepté que soient mis en circulation à trois reprises d'importants montants de fausse monnaie totalisant plus de CHF 100'000.-, il a utilisé à plusieurs reprises de faux passeports mauricien et français ainsi qu'un Swisspass au nom d'autrui pour tromper les victimes de ses escroqueries, envoyer de l'argent et réserver des chambre d'hôtel en masquant son identité réelle, obtenir des avantages indus, le plus important étant une autorisation de séjour, et tromper les autorités administratives fribourgeoises pour la délivrance de ce document.

Les éléments liés à la personnalité de l'auteur susmentionnés peuvent être repris pour ces infractions, la collaboration, la prise de conscience de la faute et les perspectives d'amendement n'étant pas meilleurs à leur égard. Elles sont liées, si ce n'est directement à la commission des escroqueries, au mode de vie de l'appelant y relatif, impliquant de nombreux déplacements, des transferts réguliers d'argent et l'utilisation de plusieurs identités.

Seule une peine privative de liberté est envisageable. Non seulement les infractions de mises en circulation de fausse monnaie devraient être sanctionnées, eu égard à la gravité de la faute, par une peine supérieure à 180 jours. Mais surtout, au vu de l'opacité entretenue par l'appelant sur sa situation et sa très grande mobilité, y compris dans des pays africains, l'exécution d'une peine pécuniaire paraît d'emblée vouée à l'échec et le prononcé de celle-ci partant dépourvu de tout effet dissuasif.

La peine privative de liberté de trente mois fixée ci-avant peut être relevée, pour prendre en considération la circonstance aggravante du concours, à 37 mois pour tenir compte des mises en circulation de fausse monnaie (peine théorique entre huit et dix mois pour chacune des infractions), à 38 mois pour tenir compte du comportement frauduleux à l'égard des autorités (peine théorique de trois mois) et enfin à 42 mois pour tenir compte de l'utilisation répétée d'un faux certificat suisse ou étranger (peine théorique entre un mois et trois mois par cas).

Un telle quotité exclut l'octroi du sursis demandé par l'appelant, de sorte que les conditions y relatives n'ont pas à être examinées (art. 42 et 45 CP a contrario).

L'appelant invoque vainement la condamnation de AU______ à une peine privative de 36 mois avec sursis. Non seulement la comparaison avec un seul précédent est généralement stérile conformément à la jurisprudence susmentionnée, au vu des nombreux paramètres à prendre en compte dans la fixation de la peine et de l'absence de droit à l'égalité de traitement fondé sur une peine particulièrement clémente prononcée dans une autre cause. Mais l'affaire dont se prévaut l'appelant a en outre fait l'objet devant le TCO d'une procédure simplifiée (P/4______/2009), ce qui enlève toute pertinence à une comparaison, une telle procédure impliquant en particulier une reconnaissance des faits et des prétentions civiles du prévenu durant l'instruction (art. 358 ss CPP).

4.8. En conclusion, l'appelant sera condamné à une peine privative de liberté de 42 mois et le jugement querellé sera réformé dans ce sens.

5. 5.1.1. En qualité de partie plaignante, le lésé peut faire valoir des conclusions civiles déduites de l'infraction par adhésion à la procédure pénale (art. 122 al. 1 CPP). Le tribunal saisi de la cause pénale juge les conclusions civiles indépendamment de leur valeur litigieuse (art. 124 al. 1 CPP). Il statue sur celles-ci notamment lorsqu'il rend un verdict de culpabilité à l'encontre du prévenu (art. 126 al. 1 let. a CPP).

La partie plaignante peut réclamer la réparation de son dommage (art. 41 à 46 de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse [CO]) et l'indemnisation de son tort moral (art. 47 et 49 CO), dans la mesure où ceux-ci découlent directement de la commission de l'infraction reprochée au prévenu (ATF 148 IV 432 consid. 3.1.2).

5.1.2. Aux termes de l'art. 41 al. 1 CO, celui qui cause, d’une manière illicite, un dommage à autrui, soit intentionnellement, soit par négligence ou imprudence, est tenu de le réparer. Une lésion du patrimoine, constitutive d'un dommage, peut prendre en particulier la forme d'une diminution de l'actif (ATF 123 IV 17 consid. 3d et 122 IV 279 consid. 2a).

L'art. 44 al. 1 CP prévoit que le juge peut réduire les dommages-intérêts, ou même n'en point allouer, lorsque la partie lésée a consenti à la lésion ou lorsque des faits dont elle est responsable ont contribué à créer le dommage, à l’augmenter, ou qu’ils ont aggravé la situation du débiteur. La faute du lésé est un facteur de réduction de l'indemnité si elle a contribué, dans une mesure importante, à créer ou à aggraver le dommage, alors que l'on aurait pu attendre raisonnablement de tout tiers se trouvant dans la même situation qu'il prenne des mesures de précaution susceptibles d'écarter ou de réduire le dommage (ATF 146 III 387 consid. 6.3.2).

5.2. En l'espèce, les parties plaignantes G______, E______ et F______ ont fait valoir des conclusions civiles correspondant aux montants qu'elles ont respectivement perdus en conséquence des escroqueries pour lesquelles la culpabilité de l'appelant a été admise.

Ces prétentions découlent ainsi directement de la commission de l'escroquerie par métier reprochée au prévenu et elles correspondent à la diminution du patrimoine des parties précitées qui en a résulté.

La condamnation de l'appelant à rembourser les montants au cause aux parties plaignantes sera dès lors confirmée.

Il méconnaît la notion de dommage en objectant que sa condamnation doit être limitée au montant qu'il a lui-même conservé. Le calcul des prétentions d'un lésé se fonde en effet sur l'atteinte au patrimoine de ce dernier, qui peut en particulier se présenter sous l'aspect d'une diminution de l'actif, et non sur l'enrichissement de l'auteur.

L'appelant se prévaut par ailleurs vainement d'une faute concomitante des lésés. Le caractère astucieux de la tromperie est en effet acquis en l'espèce (cf. supra consid. 2.5.1.). Il est donc juridiquement admis qu'on ne pouvait pas exiger des dupes, eu égard à leur situation, qu'elles prennent des mesures pour écarter ou réduire le dommage subi, l'acte illicite imputable à l'appelant consistant précisément dans un procédé propre à susciter l'intérêt, à endormir la méfiance et finalement l'attention de petits entrepreneurs tels que ceux ciblés (cf. arrêt du Tribunal fédéral 6B_659/2014 du 22 décembre 2017 consid. 14.3.2 in fine). L'admission de l'astuce et donc du caractère illicite de la tromperie n'implique pas de se demander comment aurait agi une personne plus raisonnable et expérimentée (cf. supra consid. 2.2.2., 2ème §, in fine).

6. 6.1. L'appelant étant en définitive reconnu coupable de tous le chefs d'accusation qui lui sont reprochés, à l'exception de celui concernant la tromperie au préjudice d'un inconnu pour un montant de CHF 15'000.- en mai et juin 2021 (ch. 1.1.3. de l'acte d'accusation). Ce chef d'accusation a cela étant fait l'objet d'une instruction très marginale, la procédure ayant essentiellement concerné les autres cas d'escroquerie. La mise de l'intégralité des frais de la procédure de première instance à la charge de l'appelant sera en conséquence confirmée (art. 426 al. 1 et 3 CPP).

6.2. Succombant intégralement en appel, il sera aussi condamné aux frais de la procédure de seconde instance, lesquels comprendront un émolument de décision de CHF 5'000.- (art. 428 CPP ; art. 14 al. 1 let. e du règlement fixant le tarif des frais en matière pénale [RTFMP].

7. 7.1. Selon l'art. 135 al. 1 CPP, le défenseur d'office ou le conseil juridique gratuit (cf. art. 138 al. 1 CPP) est indemnisé conformément au tarif des avocats de la Confédération ou du canton du for du procès. S'agissant d'une affaire soumise à la juridiction cantonale genevoise, l'art. 16 du règlement sur l'assistance juridique (RAJ) s'applique.

Cette dernière disposition prescrit que l'indemnité, en matière pénale, est calculée selon le tarif horaire suivant, débours de l'étude inclus : avocat stagiaire CHF 110.- (let. a) ; collaborateur CHF 150.- (let. b).

Conformément à l'art. 16 al. 2 RAJ, seules les heures nécessaires sont retenues. Elles sont appréciées en fonction notamment de la nature, de l'importance et des difficultés de la cause, de la valeur litigieuse, de la qualité du travail fourni et du résultat obtenu.

On exige de l'avocat qu'il soit expéditif et efficace dans son travail et qu'il concentre son attention sur les points essentiels. Des démarches superflues ou excessives n'ont pas à être indemnisées (M. VALTICOS / C. M. REISER / B. CHAPPUIS / F. BOHNET (éds), Commentaire romand, Loi sur les avocats : commentaire de la loi fédérale sur la libre circulation des avocats (Loi sur les avocats, LLCA), 2ème éd. Bâle 2022, n. 257 ad art. 12). Dans le cadre des mandats d'office, l'État n'indemnise ainsi que les démarches nécessaires à la bonne conduite de la procédure pour la partie qui jouit d'une défense d'office ou de l'assistance judiciaire. Il ne saurait être question d'indemniser toutes les démarches souhaitables ou envisageables. Le mandataire d'office doit en effet gérer son mandat conformément au principe d'économie de procédure (décision de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2013.22 du 31 octobre 2013 consid. 5.2.3.

7.2. L'activité consacrée aux conférences, audiences et autres actes de la procédure est majorée de 20% jusqu'à 30 heures de travail, décomptées depuis l'ouverture de la procédure, et de 10% lorsque l'état de frais porte sur plus de 30 heures, pour couvrir les démarches diverses, telles la rédaction de courriers ou notes, les entretiens téléphoniques et la lecture de communications, pièces et décisions (arrêt du Tribunal fédéral 6B_838/2015 du 25 juillet 2016 consid. 3.5.2 ; voir aussi les décisions de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2016.34 du 21 octobre 2016 consid. 4.1 et 4.2 et BB.2015.85 du 12 avril 2016 consid. 3.5.2 et 3.5.3). Des exceptions demeurent possibles, charge à l'avocat de justifier l'ampleur d'opérations dont la couverture ne serait pas assurée par le forfait. Ainsi sont en principe inclus dans le forfait des documents ne nécessitant pas ou peu de motivation ou autre investissement particulier en termes de travail juridique, telle l'annonce d'appel (AARP/184/2016 du 28 avril 2016 consid. 5.2.3.2 et 5.3.1 ; AARP/149/2016 du 20 avril 2016 consid. 5.3 et 5.4 ; AARP/146/2013 du 4 avril 2013) et la déclaration d'appel (ordonnance de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2014.51 du 21 novembre 2014 consid. 2.1 ; décisions de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2013.165 du 24 janvier 2014 consid. 4.1.3 et BB.2013.127 du 4 décembre 2013 consid. 4.2).

7.3. Le temps de déplacement de l'avocat est considéré comme nécessaire pour la défense d'office au sens de l'art. 135 CPP (décision de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2015.33 du 28 juillet 2015 consid. 4.3 et les références). La rémunération forfaitaire de la vacation aller/retour au et du Palais de justice ou au et du bâtiment du Ministère public est arrêtée à CHF 55.- / CHF 75.- / CHF 100.- pour les stagiaires / collaborateurs / chefs d'étude, dite rémunération étant allouée d'office par la juridiction d'appel pour les débats devant elle.

7.4. En l'espèce, il sera tenu compte des 4h45 d'entretiens par le défenseur d'office avec son client détenu ainsi que des 0h30 consacrées par la stagiaire à la demande d'exécution anticipée de peine, mais non des postes relatifs à la rédaction de la déclaration d'appel, à l'examen de l'appel-joint et aux courriers (2h42 et 1h00), compris dans le forfait pour activités diverses.

Si les 6h45 consacrées par le collaborateur à la préparation des débats apparaissent proportionnés, tel n'est pas les cas des 22h42 d'activité de la stagiaire. Excessives, elles seront réduites à 10h00, constituant une durée de travail suffisante, étant rappelé qu'il complète celui du collaborateur, que ce dernier assistait déjà l'appelant en première instance et que les questions encore litigieuses en appel se limitaient essentiellement au degré de participation du prévenu à deux des cinq escroqueries en cause et à la réalisation de la circonstance aggravante du métier. Sera enfin pris en considération le temps de présence aux débats du défenseur d'office de 3h45.

En conclusion, la rémunération du défenseur d'office sera arrêtée à 4'159.10, correspondant à 15h15 et 10h30 d'activité aux tarifs horaires de CHF 150.- et de CHF 110.- (CHF 3'442.60), plus la majoration forfaitaire de 10% au vu de l'activité déjà indemnisée en première instance (CHF 344.25), le forfait de déplacement de CHF 75.- et l'équivalent de la TVA au taux de 7.7% en CHF 297.35.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Reçoit l'appel formé par A______ et l'appel joint formé par le Ministère public contre le jugement JTCO/143/2022 rendu le 1er novembre 2022 par le Tribunal correctionnel dans la procédure P/20122/2021.

Rejette l'appel et admet l'appel joint.

Annule le jugement querellé.

Et statuant à nouveau :

Acquitte A______ du chef d'escroquerie pour les faits visés au chiffre 1.1.1.3 de l'acte d'accusation.

Déclare A______ coupable d'escroquerie par métier (art. 146 al. 1 et 2 CP), de mises en circulation de fausse monnaie (art. 242 al. 1 CP), de faux dans les certificats (art. 252 CP), de faux dans les certificats étrangers (art. 252 cum 255 CP) et de comportement frauduleux à l'égard des autorités (art. 118 al. 1 LEI).

Condamne A______ à une peine privative de liberté de 42 mois, sous déduction de 599 jours de détention avant jugement.

Ordonne l'expulsion de Suisse de A______ pour une durée de cinq ans.

Renonce à ordonner le signalement de l'expulsion dans le système d'information Schengen (SIS).

Condamne A______ à verser CHF 50'000.- à G______ à titre de réparation du dommage.

Condamne A______ à verser CHF 9'000.- à E______ à titre de réparation du dommage.

Condamne A______ à payer CHF 26'000.- à F______ à titre de réparation du dommage.

Ordonne la restitution à F______ des valeurs patrimoniales figurant sous chiffre 3 (CHF 4'000.-) de l'inventaire n° 5______ et sous chiffre 1 (CHF 1'000.-) de l'inventaire n° 6______.

Ordonne la confiscation et la destruction des objets figurant sous chiffres 1 à 11 de l'inventaire n° 7______.

Ordonne la confiscation du faux passeport mauricien figurant sous chiffre 1 de l'inventaire n° 8______.

Ordonne la confiscation et l'apport à la procédure des cartes SIM, de la quittance, du Swisspass figurant sous chiffres 1, 2, 4 et 8 de l'inventaire n° 9______, des cartes, des bouts de papier et du téléphone figurant sous chiffres 1, 2, 6 et 7 de l'inventaire n° 5______, des objets figurant sous chiffres 1 à 14 de l'inventaire n° 10______, des cartes [bancaires] N______ figurant sous chiffres 5 à 7 de l'inventaire n° 9______ et du morceau de papier figurant sous chiffre 1 de l'inventaire n° 11______.

Ordonne la confiscation et la dévolution à l'État des valeurs patrimoniales figurant sous chiffre 5 (CHF 1'150.-) de l'inventaire n° 5______, sous chiffre 3 (CHF 11.-) de l'inventaire n° 9______ et sous chiffre 4 (EUR 60.-) de l'inventaire n° 5______.

Ordonne la restitution à A______ du passeport camerounais figurant sous chiffre 8 de l'inventaire n° 5______.

Fixe les frais de la procédure de première instance à CHF 8'919.- et les frais de la procédure d'appel à CHF 5'345.-, ceux-ci comprenant un émolument de décision de CHF 5'000.-.

Met les frais de la procédure de première instance et d'appel à la charge de A______.

Constate que le montant des frais et honoraires de Me C______, défenseur d'office de A______, a été fixé CHF 16'409.15 pour la procédure de première instance.

Fixe le montant des frais et honoraires de Me C______ à CHF 4'159.10 pour la procédure d'appel.

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal correctionnel, à l'Établissement de détention de B______, à l'Office cantonal de la population et des migrations, à l'Office fédéral de la police, au Service d'application des peines et mesures, au Secrétariat d'état aux migrations.

 

La greffière :

Dagmara MORARJEE

 

 

Le président :

Gregory ORCI

 


 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale, sous la réserve qui suit.

 

Dans la mesure où il a trait à l'indemnité de l'avocat désigné d'office ou du conseil juridique gratuit pour la procédure d'appel, et conformément aux art. 135 al. 3 let. b CPP et 37 al. 1 de la loi fédérale sur l'organisation des autorités pénales de la Confédération (LOAP), le présent arrêt peut être porté dans les dix jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 39 al. 1 LOAP, art. 396 al. 1 CPP) par-devant la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral
(6501 Bellinzone).

 

 

 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

Total des frais de procédure du Tribunal correctionnel :

CHF

8'919.00

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

0.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

180.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

90.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

5'000.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

5'345.00

Total général (première instance + appel) :

CHF

14'264.00