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Décisions | Tribunal pénal

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P/11651/2017

JTDP/319/2022 du 22.03.2022 sur OPMP/9749/2020 ( OPOP ) , JUGE

Normes : CP.251
En fait
En droit
Par ces motifs

république et

canton de genève

pouvoir judiciaire

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL DE POLICE

 

Chambre 11


22 mars 2022

 

MINISTÈRE PUBLIC

contre

Monsieur X______, né le ______ 1968, domicilié ______, prévenu, assisté de Me A______


CONCLUSIONS FINALES DES PARTIES :

Le Ministère public conclut au maintien de son ordonnance pénale et à ce que X______ soit reconnu coupable de faux dans les titres (art. 251 ch. 1 CP), à ce qu'il soit condamné à une peine pécuniaire de 120 jours-amende à CHF 50.- avec un sursis de 3 ans, ainsi qu'à une amende immédiate de CHF 1'200.-.

X______, par la voix de son Conseil, conclut à son acquittement et à ce qu'il soit donné une suite favorable à sa requête en indemnisation selon l'art. 429 CPP.

*****

Vu l'opposition formée le 4 décembre 2020 par X______ à l'ordonnance pénale rendue par le Ministère public le 23 novembre 2020;

Vu la décision de maintien de l'ordonnance pénale du Ministère public du 15 décembre 2020;

Vu l'art. 356 al. 2 et 357 al. 2 CPP selon lequel le tribunal de première instance statue sur la validité de l'ordonnance pénale et de l'opposition;

Attendu que l'ordonnance pénale et l'opposition sont conformes aux prescriptions des art. 352, 353 et 354 CPP;

 

EN FAIT

A. Par ordonnance pénale du 23 novembre 2020, valant acte d'accusation, il est reproché à X______ une infraction de faux dans les titres (art. 251 ch. 1 CP) pour avoir, avec conscience et volonté, à Genève, les 30 avril 2014 et 1er février 2016, en sa qualité d'administrateur d'BA______, fondée de procuration pour BB______, dans le cadre des formalités d'ouverture de compte de cette dernière auprès ' BANQUE 1______, puis auprès d'BANQUE 2______, signé les documents suivants :

- un formulaire T du 30 avril 2014, désignant C______ en qualité de settlor et BC______ en tant que bénéficiaire des avoirs du trust DA______ ;

- un formulaire A du 30 avril 2014, désignant C______ en tant que settlor des avoirs du trust DA______ ;

- un formulaire T du 1er février 2016, désignant C______ et E______ en qualité de settlor et BC______ en tant que bénéficiaire des avoirs du trust DA______ ;

alors que ces formulaires ne reflétaient pas la réalité, dès lors que le véritable settlor et bénéficiaire des avoirs du trust était FA______, afin de cacher à la banque l'identité de ce dernier et de permettre au précité de ne pas apparaître auprès de la banque et de ne pas avoir à justifier de ces qualités auprès de celle-ci conformément aux obligations de la loi sur le blanchiment d'argent (LBA) en la matière.

A cet égard, le Ministère public a indiqué dans son ordonnance pénale que : Au vu de son expérience professionnelle, en particulier dans le domaine des trusts, par ailleurs sanctionnée par l'obtention d'une reconnaissance par la Society of Trust and Estate Practitioners (STEP), X______ connaissait l'importance des informations contenues dans les formulaires "A" et "T" ainsi que la valeur accrue de ces derniers, informations nécessaires au respect par la banque BANQUE 2______ et, avant elle, BANQUE 1______, de leurs obligations légales propres, en particulier sous l'angle de la loi sur le blanchiment d'argent (LBA).

Par les informations contradictoires et successives transmises aux banques BANQUE 1______ et BANQUE 2______, X______ a au contraire permis au réel settlor et bénéficiaire ultime des fonds, FA______, d'échapper à ses obligations vis-à-vis des banques, étant relevé que BANQUE 2______ a appris pour la première fois son existence et ses position et rôle effectifs en lien avec les actifs en trust, lors de la réunion du 20 mars 2017."

B. Les faits suivants ressortent du dossier :

Contexte et création du trust DA______

a.a. X______, spécialiste en matière de trust et membre de la Society of Trust and Estate Practitioners (STEP), a exercé une activité de prestataire de service au sein d'BA______, société initialement incorporée au Panama (pièces 310'234ss), puis transférée à Samoa (pièces 310'231, 310'258ss, 50'007), dont il était l'un des administrateurs avec signature collective à deux aux côtés de G______ et d'H______. Il s'occupait notamment de mettre en place des structures, notamment des sociétés de domicile, et de les gérer pour le compte des clients d'BA______.

a.b. Courant 2013, C______ et E______, représentants du trust DB______, initialement DC______, et FB______, protector dudit trust, ont mandaté BA______ afin de remplacer le trust existant par un nouveau trust et de nommer une société, préalablement acquise, en tant que bénéficiaire du nouveau trust (pièce 50'009, pv de l'audience de jugement p. 3).

DC______, dont la dénomination est devenue DB______ le 21 décembre 2012 (pièces 60'149ss), est un trust constitué le 17 février 2004 à Nassau, aux Bahamas et soumis au droit de ce pays (pièces 60'154ss). A teneur notamment du Deed of trust du 17 février 2004 (pièces 60'154ss) et des Deed of amendment ou des Deed of removal of trustees des 14 août 2004 (pièces 50'051ss), 16 août 2004 (pièce 60'153), 26 septembre 2006 (pièce 60'152), 21 décembre 2012 (pièces 60'149ss) et 14 août 2014 (pièces 60'146ss), ce trust est composé des membres suivants :

- E______ en qualité de settlor,

- I______, J______ et K______ en qualité de trustees,

- FA______ et les membres de sa famille, et BC______, qui est une société néozélandaise dont les directeurs sont LA______ et LB______ (pièce 310'188), en tant que bénéficiaires,

- FB______, soit le frère de FA______, en qualité de protector.

Le 3 janvier 2013, DB______ a déposé ses avoirs sur le compte bancaire n°1______, ouvert auprès d'BANQUE 1______ (pièces 31'355). A cette occasion, les trustees ont signé le 7 janvier 2013 un formulaire T mentionnant E______ en tant que settlor, J______, K______ et L______ en tant que trustees, FB______ en tant que protector, et FA______, FC______, FD______ et FE______ en tant que bénéficiaires (pièces 31'363ss).

b. Suite au mandat confié à BA______ et par settlement du 31 mars 2014, le nouveau trust dénommé DA______ a été constitué en tant que trust discrétionnaire et irrévocable, soumis au droit panaméen et composé des membres suivants (pièces 60'315ss) :

- C______ et E______ en qualité de settlors,

- BC______ en qualité de trustee,

- BB______, soit une société de domicile incorporée le 2 septembre 2013 au Panama et détenue par DA______ qui en est l'actionnaire (pièces 10'292ss), en tant que bénéficiaire.

Le settlement du 31 mars 2014 a également spécifié qu'en cas de retrait du bénéficiaire avant la mise en place d'une nouvelle entité, une nouvelle entité sera formée par le trustee remplaçant le précédent bénéficiaire (pièce 60'323).

 

Ouverture de compte et transfert des avoirs auprès d'BANQUE 1______

c.a. Le 9 avril 2014, BC______ a adopté une résolution visant à utiliser la société sous-jacente du DA______, soit BB______ (pièce 50'008), afin de détenir les avoirs du trust et d'ouvrir à cette fin un compte bancaire au nom de BB______ auprès d'BANQUE 1______ (pièce 310'190). Cette résolution visait également à nommer, en qualité de signataire autorisé pour le compte de BB______, BA______. A cet égard, lors de l'assemblée générale du 14 octobre 2013, BB______ a octroyé à BA______ un pouvoir de représentation général (pièces 10'143ss).

c.b. Sur cette base, BB______, représentée par BA______, soit pour elle notamment X______, a ouvert le 30 avril 2014, un compte bancaire, n°2______, auprès d'BANQUE 1______. Parmi les signataires autorisés en lien avec ce compte faisait partie X______ qui disposait d'une signature collective à deux (pièces 31'168ss). A cette occasion, il a remis à la banque un tableau représentant la structure du DA______ qu'il a probablement établi lui-même (pièces 50'010 et 50'019). Ce tableau mentionnait BC______ en tant que trustee et "CA______", soit C______, en tant que settlor (pièces 50'010 et 50'019). En revanche, sous la rubrique bénéficiaire dudit tableau, il est indiqué qu'une nouvelle société allait être créée (pièce 50'019).

Selon le formulaire KYC ("know your customer") établi par BANQUE 1______ et signé notamment par X______, en sa qualité d'administrateur d'BA______ et signataire autorisé auprès de la banque, les avoirs déposés sur la relation n°2______ provenaient de la distribution d'un autre trust de la famille et avaient pour origine DB______ (pièces 10'292ss). Le chiffre 8 du formulaire renvoyait expressément au formulaire KYC de DB______ mentionnant FA______, FC______ et FD______ en tant qu'ayants droit économiques des avoirs du trust (pièces 10'294, 31'345).

Parallèlement à l'ouverture du compte, X______ a signé le 30 avril 2014 le formulaire T, destiné à BANQUE 1______ et faisant référence à la Convention relative à l'obligation de diligence des banques de 2008, indiquant (pièce 10'296) :

-     C______ en qualité de settlor du DA______,

-     BC______ en qualité de trustee et de bénéficiaire du DA______.

Il a également signé le formulaire A, destiné BANQUE 1______, du 30 avril 2014 qu'il n'a pas rempli, dans lequel BC______ figurait comme bénéficiaire des avoirs déposés au nom de BB______ (pièces 31'077, 50'039).

Ces formulaires mentionnaient expressément le fait que de remplir intentionnellement ce formulaire de manière erronée est punissable de faux dans les titres selon l'art. 251 CP.

c.c. Le 14 mai 2014, les trustees, respectivement le protector de DB______ ont signé un amendement nommant BC______, en tant que trustee du DA______, bénéficiaire complémentaire de DB______ (pièce 60'147).

Par acte d'exclusion de responsabilité du 28 juillet 2014, FB______ n'a émis aucune réserve à communiquer l'identité des trustees du DA______ au trustees de DB______ (pièce 31'389).

Par courrier du 18 août 2014, BC______, en sa qualité de bénéficiaire de DB______ et de trustees du DA______, a demandé aux trustees de DB______ d'ordonner le versement des avoirs du trust en faveur de BB______ sur le compte bancaire n°2______, avec la référence "BB______", ouvert auprès de BANQUE 1______ (pièce 60'141).

Le 30 septembre 2014, X______ a adressé un courriel à LB______ lui faisant notamment part du fait que, selon E______, les trustees de DB______ attendaient la documentation jointe afin qu'elle soit signée par les parties concernées (pièce 60'140).

Par courrier signé du 8 octobre 2014, les trustees de DB______, I______ et K______, ont donné l'instruction à BANQUE 1______ de transférer les avoirs déposés sur le compte n°1______ sur le compte n°2______, avec la référence " BB______" (pièces 31'386, 60'139). Le 14 octobre 2014, USD 10'080'000.- ont été versés sur le compte n°2______ (pièce 31'307).

Transfert des avoirs auprès de BANQUE 2______ et modification du DA______

d. En 2015, BANQUE 2______ a repris une partie des comptes déposés auprès d'BANQUE 1______, qui a remis sa licence bancaire et cessé ses activités bancaires (pièce 31'281). Le transfert des avoirs d'BANQUE 1______, notamment ceux de BB______, à BANQUE 2______ est intervenu en mai 2015 (pièce 31'315). A cet égard, la précitée a reçu les informations relatives à BB______, à savoir le formulaire KYC d'BANQUE 1______ (pièce 50'002).

Dans ce contexte, BANQUE 2______ a fait signer le 1er mai 2016 à BB______, représentée par BA______, soit pour elle notamment X______, ses propres documents d'ouverture de compte, n°3______ (pièces 10'018ss).

Parmi les documents, X______ a signé le 1er février 2016, un formulaire T, lequel faisait référence à la Convention relative à l'obligation de diligence des banques de 2008 et comportait une mention attirant l'attention du signataire sur l'infraction de faux dans les titres. Ce document mentionnait notamment (pièce 10'298) :

-     C______ et E______ en tant que settlors du DA______,

-     BC______, en qualité de bénéficiaire du DA______.

e. En décembre 2016, DA______ a subi des modifications dans son organisation, notamment un changement de settlor et de bénéficiaire du trust. En effet, le formulaire T, destiné à BANQUE 2______ et signé par LB______ le 14 décembre 2016, a mentionné M______, en tant que settlor du DA______ et BB______ en tant que bénéficiaire. Signé à la même date notamment par X______, le formulaire A a indiqué que DA______ était le bénéficiaire économique des avoirs de BB______ (pièces 10'301ss).

Le 30 décembre 2016, une modification du trust est à nouveau intervenue, BANQUE 2______ ayant reçu un formulaire T, déclarant M______ en qualité de settlor et de bénéficiaire du DA______ (pièces 10'305ss).

Par l'addendum du DA______ du 21 novembre 2016, les settlor et trustee du DA______ ont décidé de transférer les fonds déposés sur le compte de BB______ auprès de BANQUE 2______ en faveur du partenaire commercial BC______, dont l'ayant-droit économique ultime est M______, et de dissoudre ensuite le DA______ et la société sous-jacente BB______ (60'188ss).

Réunion du 20 mars 2017 et dénonciation au MROS

f. Le 20 mars 2017, une réunion s'est tenue au sein de BANQUE 2______, à laquelle ont assisté notamment BA______, soit pour elle X______, M______ et FA______, afin de clarifier la structure sociale et économique du DA______, la banque n'ayant pas reçu des explications satisfaisantes quant à l'arrière-plan économique justifiant notamment le versement d'USD 2'500'000.- en faveur d'BC______ (pièces 60'025ss).

Selon le compte rendu de BANQUE 2______, FA______, que la banque ne connaissait pas avant la séance, a indiqué lors de cette réunion qu'il était le settlor du DA______ qui détenait BB______ et qu'il ne connaissait pas les premiers settlors déclarés par BA______, soit C______ et E______ (pièces 60'025ss).

Par courrier du 11 octobre 2017 adressé à BANQUE 2______, X______ a, entre autres, rappelé que FA______ a confirmé l'origine des fonds de BB______ (pièce 60'129).

g. Le 11 mai 2017, le Bureau de communication en matière de blanchiment d'argent de l'Office fédéral de la police (MROS) a adressé au Ministère public genevois une communication de soupçons de blanchiment d'argent envoyée par BANQUE 2______, en relation avec le compte bancaire détenu par BB______ (pièces 10'007ss).

Déclarations de X______

h. Au moment de la signature des formulaires T et A des 30 avril 2014 et 1er février 2016, X______, qui avait effectué une due diligence de DB______ pour le compte d'BA______ en se rendant dans les locaux d'BANQUE 1______ afin de prendre une copie du dossier de DB______ détenu par la banque, avait connaissance de la structure et des bénéficiaires de ce trust, de même que de l'origine des fonds versés sur le compte bancaire, n°2______, de BB______ auprès d'BANQUE 1______, puis sur le compte bancaire n°3______ de BB______ auprès d'BANQUE 2______ (pièces 50'009, 50'010 et 50'039).

Il reconnaissait que le formulait T du 30 avril 2014, qu'il avait signé et rempli uniquement au chiffre 3, comportait une erreur, laquelle n'était pas délibérée, en tant qu'il manquait la mention de E______ comme second settlor du DA______ (pièces 50'011, 50'039). Le tableau remis à la banque comportait la même erreur (pièce 50'011). Lors de la signature du formulaire T du 1er février 2016, qu'il avait rempli et signé, il avait rectifié cette omission en ajoutant E______ aux côtés de C______ en tant que settlor du DA______ (pièce 50'043). Il était exact que FA______ ignorait que les précités étaient les settlors du trust, précisant que ces aspects-là étaient gérés par FB______, protector de DB______, qui était aux côtés de E______ et de C______ lors de la mise en place du DA______, plus particulièrement au moment de la signature du deed of trust du 31 mars 2014 (pièce 50'045, pv audience de jugement p. 3).

Concernant le bénéficiaire du DA______, X______ a indiqué qu'au moment de remettre le tableau expliquant la structure du trust à la banque, il ignorait si, à ce moment, il était informé de l'identité du bénéficiaire dudit trust (pièce 50'011). Depuis la constitution du DA______, il n'y avait pas de bénéficiaire désigné hormis BB______, qui figurait sur l'acte de constitution du trust (pièce 50'012). Le bénéficiaire du trust avait été désigné dans un second temps, à savoir BC______, respectivement M______, sur impulsion vraisemblable de la famille F______ (pièces 50'012 et 50'044bis). Il n'y avait pas eu d'autres bénéficiaires désignés (pièce 50'012). Il n'était en revanche pas question pour les trustees de se désigner eux-mêmes comme les bénéficiaires du trust (pièce 50'012). Néanmoins, la mention, sur les formulaires T et A, qu'il n'avait pas remplis, du 30 avril 2014, de BC______ en tant que trustee et bénéficiaire du DA______, s'expliquait par le fait que, tant que le trustee ne nomme pas de bénéficiaire, ce qui était le cas, et qu'il s'agit d'un trust irrévocable, c'est le trustee qui est le détenteur des actifs et qui répond de ceux-ci (pièce 50'040). Cette mention avait été faite pour tenir compte de la réalité des faits. BC______ avait été indiquée comme bénéficiaire le temps que cette dernière, trustee, nomme un bénéficiaire. En effet, le fait de faire figurer BB______ sur l'acte constitutif du DA______ en tant que bénéficiaire du trust revenait à dire qu'il n'y avait pas de bénéficiaire, dès lors BB______ était détenue par le trust lui-même (pièce 50'041). Il aurait peut-être dû mettre la précitée comme étant la bénéficiaire du DA______ sur les formulaires T (pièce 50'041).

Contrairement à ce qu'avait indiqué la banque dans son rapport, FA______ n'avait pas expliqué lors de la réunion du 20 mars 2017 qu'il était le settlor du DA______ mais que les actifs qui s'y trouvaient provenaient à l'origine de lui et de sa famille, ce qui ne revenait pas à dire qu'il était le settlor du trust (pièce 50'044). Cette déclaration était d'ailleurs corroborée par les documents relatifs à DB______ et faisait suite à une question de la banque sur l'origine des fonds (pièce 50'044).

D. X______, ressortissant suisse, est né le ______1968. Il est divorcé et sans enfant. Il a étudié le droit à Neuchâtel et les sciences politiques à Genève, études pour lesquelles il a obtenu une licence. Après avoir effectué un parcours professionnel dans l'humanitaire entre 1998 et 2003, notamment au sein de ______ en Belgique et en Suisse, il a, en 2004, travaillé dans une société fiduciaire en qualité d'employé au département sociétés. Avant de rejoindre BA______ le 1er juillet 2011 en qualité d'administrateur et d'employé fiduciaire, il a travaillé pour une société au Luxembourg, BD______, pour laquelle il a créé une succursale à Genève dont il était l'administrateur jusqu'en 2010.

Actuellement, il est sans emploi et est arrivé en fin de droit du chômage le 1er avril 2022. Son loyer est de CHF 930.- par mois. Il s'acquitte également de sa prime d'assurance maladie de base. Jusqu'au mois de mars 2022, il s'acquittait d'une pension alimentaire pour ex-épouse.

Il n'a pas d'antécédents judiciaires en Suisse.

 

EN DROIT

1.             Le principe de l'accusation est consacré à l'art. 9 CPP, mais découle aussi des art. 29 al. 2 Cst., 32 al. 2 Cst. et 6 par. 1 et 3 let. a et b CEDH. Selon ce principe, l'acte d'accusation définit l'objet du procès (fonction de délimitation). Il doit décrire les infractions qui sont imputées au prévenu de façon suffisamment précise pour lui permettre d'apprécier, sur les plans subjectif et objectif, les reproches qui lui sont faits. Le principe d'accusation vise également à protéger le droit à une défense effective et le droit d'être entendu (fonction d'information). Le contenu de l'acte d'accusation doit ainsi permettre au prévenu de s'expliquer et préparer efficacement sa défense (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1180/2020 du 10 juin 2021, consid. 1.1).

L'art. 9 al. 2 CPP réserve la procédure de l'ordonnance pénale, qui en cas de maintien de l'ordonnance pénale à la suite d'une opposition, a pour conséquence de la transformer en acte d'accusation (art. 356 al. 1 CPP). L'ordonnance pénale doit dès lors contenir tous les éléments, notamment factuels, requis pour un acte d'accusation afin de satisfaire aux exigences de la maxime d'accusation (art. 325 CPP) (Y. JEANNERET / A. KUHN, Précis de procédure pénale, Berne 2018, 2ème édition, n°4024, p. 58).

L'acte d'accusation désignele plus brièvement possible, mais avec précision, les actes reprochés au prévenu, le lieu, la date et l'heure de leur commission ainsi que leurs conséquences et le mode de procéder de l'auteur (art. 325 al. 1 let. f CPP).

En d'autres termes, l'acte d'accusation doit contenir les faits qui, de l'avis du ministère public, correspondent à tous les éléments constitutifs de l'infraction reprochée à l'accusé. Le tribunal est lié par l'état de fait décrit dans l'acte d'accusation, mais peut s'écarter de l'appréciation juridique qu'en fait le ministère public (art. 350 al. 1 CPP), à condition d'en informer les parties présentes et de les inviter à se prononcer (art. 344 CPP) (arrêt du Tribunal fédéral 6B_655/2021 du 22 décembre 2021, consid. 3.1).

S'agissant de faux dans les titres, l'acte d'accusation doit indiquer clairement dans quelle mesure le prévenu a accompli les éléments constitutifs de l'art. 251 CP. Un acte d'accusation qui reproche au prévenu d'avoir réalisé une escroquerie à l'aide d'un faux titre ne donne pas le fondement réel pour une falsification de bilan (M. SCHUBARTH / N. GRAA, CR-CPP, éd. 2010, n°37 ad. art. 325).

2.             Le principe in dubio pro reo, qui découle de la présomption d'innocence garantie par l'art. 6 § 2 CEDH et, sur le plan interne, par l'art. 32 al. 1 Cst. et l'art. 10 CPP, concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves.

En tant que règle relative au fardeau de la preuve, la présomption d'innocence signifie que toute personne prévenue d'une infraction pénale doit être présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité soit légalement établie et, partant, qu'il appartient à l'accusation de prouver la culpabilité de l'intéressé. La présomption d'innocence est violée si le juge du fond condamne l'accusé au motif que son innocence n'est pas établie, s'il a tenu la culpabilité pour établie uniquement parce que le prévenu n'a pas apporté les preuves qui auraient permis de lever les doutes quant à son innocence ou à sa culpabilité ou encore s'il a condamné l'accusé au seul motif que sa culpabilité est plus vraisemblable que son innocence (ATF 127 I 38 consid. 2a p. 41; 124 IV 86 consid. 2a p. 88, 120 Ia 31 consid. 2c p. 37). Cela étant, le juge du fond ne peut retenir un fait défavorable à l'accusé que s'il est convaincu de la matérialité de ce fait, de sorte que le doute profite à l'accusé (ATF 120 Ia 31 consid. 2c p. 37).

Comme règle de l'appréciation des preuves, le principe in dubio pro reo signifie que le juge ne peut se déclarer convaincu d'un état de fait défavorable à l'accusé, lorsqu'une appréciation objective de l'ensemble des éléments de preuve laisse subsister un doute sérieux et insurmontable quant à l'existence de cet état de fait (ATF 127 I 38 consid. 2a; 124 IV 86 consid. 2a; 120 Ia 31 consid. 2c).

3. 3.1.1. A teneur de l'art. 251 ch. 1 CP, celui qui, dans le dessein de porter atteinte aux intérêts pécuniaires ou aux droits d'autrui, ou de se procurer ou de procurer à un tiers un avantage illicite, aura créé un titre faux, falsifié un titre, abusé de la signature ou de la marque à la main réelles d'autrui pour fabriquer un titre supposé, ou constaté ou fait constater faussement, dans un titre, un fait ayant une portée juridique, ou aura, pour tromper autrui, fait usage d'un tel titre, sera puni d'une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d'une peine pécuniaire.

3.1.2. Sont des titres tous les écrits destinés et propres à prouver un fait ayant une portée juridique (art. 110 al. 4 CP).

3.1.3. L'art. 251 ch. 1 CP vise non seulement la création d'un titre faux ou la falsification d'un titre (faux matériel), mais aussi l'établissement d'un titre mensonger (faux intellectuel). Il y a faux matériel lorsque l'auteur réel du document ne correspond pas à l'auteur apparent, alors que le faux intellectuel vise un titre qui émane de son auteur apparent, mais dont le contenu ne correspond pas à la réalité (ATF 126 IV 65 consid. 2a p. 67).

Un simple mensonge écrit ne constitue pas un faux intellectuel. La confiance que l'on peut avoir à ne pas être trompé sur la personne de l'auteur est plus grande que celle que l'on peut avoir à ce que l'auteur ne mente pas par écrit; pour cette raison, la jurisprudence exige, dans le cas du faux intellectuel, que le document ait une crédibilité accrue et que son destinataire puisse s'y fier raisonnablement. Une simple allégation, par nature sujette à vérification ou discussion, ne suffit pas; il doit résulter des circonstances concrètes ou de la loi que le document est digne de confiance, de telle sorte qu'une vérification par le destinataire n'est pas nécessaire et ne saurait être exigée (ATF 138 IV 130 consid. 2.1 p. 134; 132 IV 12 consid. 8.1 p. 14 s.; 129 IV 130 consid. 2.1 p. 133 s.; 126 IV 65 consid. 2a p. 67 s.).

De jurisprudence constante, un formulaire A, dont le contenu est inexact quant à la personne de l'ayant-droit économique, constitue un faux dans les titres au sens de l'art. 251 CP (arrêt fédéral 6B_891/2018 du 31 octobre 2018 consid. 3.3.1; 6B_659/2014 du 22 décembre 2017 consid. 18.1.2 et 6S.293/2005 du 24 février 2006 consid. 8, publié in SJ 2006 I p. 306, AARP/126/2021 du 08.04.2021 consid. 3.4).

Le faux dans les titres est une infraction de mise en danger abstraite. Il n'est donc pas nécessaire qu'une personne soit effectivement trompée. L'art. 251 CP protège la confiance particulière accordée dans les relations juridiques à un titre en tant que moyen de preuve (arrêt du Tribunal fédéral 6B_421/2008 du 21 août 2009 consid. 5.3.1). La tromperie n'a pas besoin d'être astucieuse (arrêt du Tribunal fédéral 6B_455/2008 du 26 décembre 2008 consid. 2.2.1).

3.1.4. La loi sur le blanchiment d'argent (LBA; RS 955.0) impose à l'intermédiaire financier, notamment aux banques, une identification de l'ayant droit économique dans certaines circonstances, notamment en cas d'opérations de caisse portant sur une somme importante (cf. art. 4 LBA); à cet effet, elle prévoit que l'intermédiaire financier doit requérir du cocontractant une déclaration écrite dans laquelle celui-ci désigne l'ayant droit économique ou confirme être lui-même cet ayant droit (art. 4 al. 1 let. a LBA). C'est donc la loi qui contraint le cocontractant à une déclaration écrite, laquelle doit permettre à l'intermédiaire financier de se faire une juste idée sur l'ayant droit économique. La Cour de cassation a jugé qu'une déclaration de ce type instaurée par la loi devait être qualifiée de titre, à l'instar d'une comptabilité commerciale régie par la loi et dont la fonction est aussi de procurer une information (6S.293/2005 du 24 février 2006 consid. 8.2.1., publié in SJ 2006 I p. 306 et les références citées).

La Convention relative à l'obligation de diligence des banques (ci-après : CDB) contient, principalement, les exigences formelles à respecter lors de l'ouverture de comptes en banque pour identifier le client et l'ayant droit économique des avoirs déposés sur ces comptes. Elle concrétise ainsi les obligations prévues dans la LBA à ce propos (art. 3 et 4 LBA) (C. LOMBARDINI, Banques et blanchiment d'argent, 2016, n°49, p. 17).

3.1.5. S'agissant plus particulièrement du trust, celui-ci est défini comme étant une relation juridique particulière qui a pour caractéristique d'être dépourvue de toute personnalité juridique. Cette relation est créée par le constituant (settlor) qui déclare sa volonté d'affecter certains biens aux intérêts d'un ou plusieurs bénéficiaires ou à un but déterminé. A moins qu'il n'en ait disposé autrement, le rôle du constituant s'arrête là. Il disparaît ainsi de la relation juridique qui se noue entre le trustee et le bénéficiaire (E. PODA, les effets en droit privé de l'obligation d'identifier l'ayant droit économique, éd. Schulthess 2019, p.63).

Les biens du trust sont détenus formellement par le trustee qui en est le propriétaire juridique. Ce dernier a l'obligation d'administrer, de gérer ou de disposer les biens en trust selon les termes du trust et les règles particulières imposées au trustee par la loi. Par ailleurs, les biens du trust constituent une masse distincte et ne font pas partie du patrimoine du trustee (E. PODA, op. cit., p.63).

Les bénéficiaires du trust sont les personnes dans l'intérêt desquels le trust a été constitué. Ces derniers peuvent se voir attribuer par l'acte du trust une extrême diversité des droits et/ou expectatives. Ils peuvent être existants au moment de la création du trust et identifiés, ou être déterminés ultérieurement par des critères tels que la parenté, l'appartenance à un groupe etc.. Leurs droits peuvent par ailleurs être de nature différente. Ils peuvent être certains et déterminés d'avance (fixed interest trust) ou ils peuvent être laissés à la libre appréciation du trustee (discretionary interest trust). Le pouvoir du trustee peut aller jusqu'à la désignation de nouveaux bénéficiaires ou leur suppression (E. PODA, op. cit., p.64).

D'autres personnes, comme les protecteurs ou les curateurs, peuvent participer à un trust. Leur fonction peut varier suivant l'acte constitutif du trust. Il peut ainsi s'agir de la surveillance du trustee, des fonctions du conseil, de la désignation des bénéficiaires ou de leurs quotes-parts respectifs (E. PODA, op. cit., p.64).

La CDB 2008 a introduit une réglementation pour le trust et, notamment, le Formulaire T qui contient les renseignements à fournir sur le trust, le trustee, les bénéficiaires et le protector (ch. 43). La Convention prévoit qu'en cas de trusts révocables, le constituant est le bénéficiaire économique (ch. 44) (C. LOMBARDINI, Droit bancaire suisse, 2008, n°69, p. 1025).

Selon l'art. 41 CDB 2016, les données requises concernant les trusts doivent être fournies par le cocontractant au moyen d'une déclaration écrite ou d'un formulaire T. Le contenu de la déclaration doit être équivalent à celui du formulaire modèle.

Le formulaire T oblige les banques à identifier seulement les acteurs d'un trust, à savoir le(s) constituant(s), le(s) trustees, le(s) bénéficiaires et le(s) protectors. Or la banque ne connaît toujours pas qui, parmi les personnes identifiées au moyen du formulaire T, est le vrai ayant droit économique des valeurs patrimoniales, de sorte que l'obligation d'identifier l'ayant droit économique au sens de l'art. 4 LBA n'est pas pleinement satisfaite. On ne peut pas considérer toutes les personnes identifiées au moyen du formulaire T comme des ayants droit économiques des valeurs patrimoniales. Le constituant d'un trust irrévocable, par exemple, perd tout contrôle sur le trust et ne bénéficie pas de ses distributions (E. PODA, op. cit., p.65-66).

Dans un discretionary interest trust, la décision déterminant qui bénéficiera de la fortune ou des revenus du trust est laissée au trustee. Il n'est pas possible de déterminer au moment de la constitution du trust quelles personnes entreront effectivement en possession d'une attribution du trust, pas plus que l'importance ni le moment de cette attribution. Le bénéficiaire n'a ainsi que de simples expectatives (E. PODA, op. cit., p.67).

3.1.6. Sur le plan subjectif, le faux dans les titres est une infraction intentionnelle. Le dol éventuel suffit. Ainsi, l'auteur doit être conscient que le document est un titre. Il doit savoir que le contenu ne correspond pas à la vérité. Enfin, il doit avoir voulu faire et/ou utiliser le titre en le faisant passer pour véridique, ce qui présuppose l'intention de tromper. De plus, l'infraction n'est considérée comme consommée que si l'auteur poursuit un dessein spécial soit, alternativement, le dessein de porter atteinte aux intérêts pécuniaires ou aux droits d'autrui (dessein de nuire) ou le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un avantage illicite (dessein d'obtenir un avantage illicite ; ATF 141 IV 369 consid. 7.4, 135 IV 12 consid. 2.2). L'avantage recherché, respectivement l'atteinte, doit précisément résulter de l'usage du titre faux, respectivement mensonger (ATF 141 IV 369 consid. 7.4 p. 377 ; 138 IV 130 consid. 3.2.4 p. 141 et les références citées ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_496/2017 du 24 janvier 2018 consid. 2.2). L'avantage est une notion très large. Il peut être matériel ou immatériel. Il suffit que l'auteur veuille améliorer sa situation ou celle d'un tiers (arrêt du Tribunal fédéral 6B_651/2011 du 20 février 2012 consid. 4.5). Son illicéité peut résulter de la loi, du but poursuivi ou du moyen utilisé. Elle peut donc être déduite du seul fait que l'auteur recourt à un faux (arrêts du Tribunal fédéral 6B_441/2016 du 29 mars 2017 consid. 6.2 et 6B_367/2007 du 10 octobre 2007 consid. 4.4 non publié in ATF 133 IV 303).

L'avantage doit en outre avoir une valeur économique, c'est-à-dire revêtir la forme d'une augmentation de l'actif, d'une diminution du passif, d'une non-augmentation du passif ou d'une non-diminution de l'actif (DUPUIS et al., Petit commentaire du CP, 2ème édition, n°54 ad art. 251).

3.1.7. Agit intentionnellement quiconque commet un crime ou un délit avec conscience et volonté. L'auteur agit déjà intentionnellement lorsqu'il tient pour possible la réalisation de l'infraction et l'accepte au cas où celle-ci se produirait (art. 12 al. 2 CP).

Agit par négligence quiconque, par une imprévoyance coupable, commet un crime ou un délit sans se rendre compte des conséquences de son acte ou sans en tenir compte. L'imprévoyance est coupable quand l'auteur n'a pas usé des précautions commandées par les circonstances et par sa situation personnelle (art. 12 al. 3 CP). La négligence suppose, d'une part, que l'auteur ait violé les règles de la prudence que les circonstances lui imposaient pour ne pas excéder les limites du risque admissible et, d'autre part, qu'il n'ait pas déployé l'attention et les efforts que l'on pouvait attendre de lui pour se conformer à son devoir (ATF 134 IV 255 consid. 4.2.3 p. 262; 122 IV 17 consid. 2b p. 19 s.). En d'autres termes, un comportement viole un devoir de prudence lorsque l'auteur, au moment des faits, aurait pu et dû, compte tenu des circonstances, de ses connaissances et de ses capacités, se rendre compte de la mise en danger des biens juridiquement protégés de la victime et qu'il a simultanément dépassé les limites du risque admissible (ATF 130 IV 7 consid. 3.2).

La délimitation entre le dol éventuel (art. 12 al. 2 2ème phrase CP) et la négligence consciente (art. 12 al. 3 CP) peut se révéler délicate. L'un et l'autre supposent en effet que l'auteur connaisse la possibilité ou le risque que l'état de fait punissable se réalise. Il y a dol éventuel lorsque l'auteur, qui ne veut pas le résultat dommageable pour lui-même, tient pour possible la réalisation de l'infraction et l'accepte au cas où celle-ci se produirait. Il n'y a en revanche que négligence lorsque l'auteur, par une imprévoyance coupable, agit en supputant que le résultat qu'il considère comme possible ne surviendra pas (ATF 134 IV 26 consid. 3.2.2 et 3.2.4, p. 28 s.). La conclusion que l'auteur s'est accommodé du résultat ne peut ainsi pas être déduite du seul fait qu'il a agi bien qu'il eût conscience du risque que survienne le résultat, car il s'agit là d'un élément commun à la négligence consciente. Faute d'aveux, des éléments extérieurs supplémentaires sont nécessaires (ATF 133 IV 9 consid. 4.1 p. 17 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_802/2013 du 27 janvier 2014 consid. 2.3.2 et 6B_355/2011 du 23 septembre 2011 consid. 4.2.1).

Dans le doute, il faut retenir qu'il y a seulement eu négligence consciente (arrêts du Tribunal fédéral 4A_653/2010 du 24 juin 2011 consid. 3.1.3 et 4A_594/2009 du 27 juillet 2010 consid. 3.5).

3.2.1. Le Tribunal relève que l'ordonnance pénale, valant acte d'accusation, n'est pas limpide s'agissant des faits qui, de l'avis du Ministère public, constituent les éléments constitutifs objectifs et subjectifs de l'infraction reprochée au prévenu.

A teneur de l'ordonnance pénale, il est fait référence à la jurisprudence constante du Tribunal fédéral relative au faux dans les titres concernant le formulaire A et à la Convention relative à l'obligation de diligence des banques de 2020, tendant à démontrer que les formulaires T décrits dans ladite ordonnance avaient une force probante accrue, en tant que ces formulaires, y compris le formulaire A, contenaient "des informations nécessaires au respect par la banque BANQUE 2______ et, avant elle, BANQUE 1______, de leurs obligations légales propres, en particulier sous l'angle de la loi sur le blanchiment d'argent". Cependant, le Ministère public ne décrit pas précisément en quoi les informations contenues dans les formulaires T signés par le prévenu auraient, comme pour le formulaire A, une force probante accrue, se contentant de faire référence, entre autres, à la Convention relative à l'obligation de diligence des banques de 2020, laquelle ne s'applique pas, celle-ci étant postérieure à la signature des formulaires en question.

S'il ne fait aucun doute quant au fait que le formulaire A du 30 avril 2014 est un titre doté d'une valeur probante, il n'en demeure pas moins que le Tribunal peine à saisir ce qui est reproché au prévenu sur ce point, dans la mesure où, contrairement à ce que retient le Ministère public à l'encontre du prévenu, le formulaire A du 30 avril 2014 ne fait aucune mention de C______ comme settlor du DA______. Il ne peut dès lors être reproché au prévenu une infraction de faux dans les titres pour avoir fait figurer le précité en tant que settlor alors qu'il n'est en réalité pas inscrit sur le document concerné. De plus, le Ministère public ne fait pas grief au prévenu, concernant ce document, d'avoir inscrit faussement BC______ comme bénéficiaire des avoirs de BB______

Le Tribunal relève également que, de l'avis du Ministère public, le prévenu a agi de la sorte afin "de cacher à la banque l'identité du véritable settlor et bénéficiaire ultime des avoirs en trust, à savoir FA______" et de permettre à ce dernier "d'échapper à ses obligations vis-à-vis des banques, étant relevé que BANQUE 2______ a appris pour la première fois son existence et ses position et rôle effectifs en lien avec les actifs en trust, lors de la réunion du 20 mars 2017" (sic). Or, l'ordonnance pénale ne décrit pas quelle atteinte aurait fait subir le prévenu aux intérêts pécuniaires ou aux droits d'BANQUE 2______ ni quel avantage illicite, d'ordre économique, le prévenu se serait procuré ou aurait procuré à FA______.

Ainsi, l'ordonnance pénale ne satisfait pas les exigences posées par la jurisprudence quant au respect de la maxime d'accusation.

3.2.2. Nonobstant la violation de la maxime d'accusation, les éléments constitutifs de l'infraction de faux dans les titres ne sont en l'espèce pas réalisés.

Il résulte des éléments retenus en fait que le prévenu a signé, parfois rempli, les formulaires A et T des 30 avril 2014 et le formulaire T du 1er février 2016 pour le compte d'BA______, représentant BB______, en connaissant la structure et les divers membres de DB______ et du DA______. Sur ces documents, il est faussement indiqué que les bénéficiaires du DA______ étaient BC______, omettant également, s'agissant du formulaire T du 30 avril 2014, de mentionner E______ en tant que settlor dudit trust.

S'agissant des formulaires T des 30 avril 2014 et 1er février 2016, le Tribunal considère que ces formulaires sont des titres, en tant qu'il émane d'un auteur identifiable et sont propres, de par la loi, à prouver un ou plusieurs faits ayant une portée juridique, à savoir l'identité des divers intervenants dans le cadre d'un trust ainsi que l'identification de l'origine des fonds et du destinataire de ceux-ci, conformément aux exigences imposées par l'art. 4 LBA. En revanche la question de savoir si ce formulaire est un titre doté d'une valeur probante accrue peut rester indécise, dans la mesure où les éléments constitutifs subjectifs de l'infraction de faux dans les titres ne sont pas remplis. En effet, même si le prévenu était conscient que le formulaire T était un titre, vu ses connaissances professionnelles en matière de trust et compte tenu du fait que le formulaire rappelle expressément qu'il s'agit d'un titre protégé par l'art. 251 CP, les éléments figurant au dossier ne permettent pas de retenir que le prévenu avait l'intention de tromper autrui en remplissant, respectivement en signant, les formulaires T contenant de fausses informations.

L'omission du second settlor lors de l'établissement et de la signature du formulaire T du 30 avril 2014 relève manifestement de la négligence, non réprimée par l'art. 251 CP, en tant que l'indication de C______ est conforme au deed of trust du 31 mars 2014 et que le prévenu a rectifié le tir en ajoutant E______ aux côtés de C______ en tant que settlor sur le formulaire T du 1er février 2016.

En ce qui concerne le bénéficiaire inscrit dans les formulaires T des 30 avril 2014 et 1er février 2016, il est certes troublant que BC______ figure en tant que bénéficiaire du DA______. Néanmoins, les explications constantes données par le prévenu, pour lesquelles le Tribunal ne dispose d'aucun élément à même de les mettre en doute, n'apparaissent pas dénuées de pertinence s'agissant de la raison pour laquelle il n'a pas indiqué BB______ comme étant le bénéficiaire, en tant qu'il ressort que cette dernière est la société sous-jacente du DA______ et que BC______, en tant que trustee du trust, avait le pouvoir de disposer des fonds, même si elle n'en était pas l'ayant droit économique. Contrairement à l'avis du Ministère public, aucun élément au dossier ne permet de retenir que le véritable bénéficiaire des avoirs du DA______, voire le settlor dudit trust, était FA______, que le prévenu le savait et que l'intention de ce dernier était de cacher cette information à la banque afin de la tromper et de lui nuire. Le fait qu'il est établi que l'origine des fonds provenait de DB______, dont était en partie bénéficiaire FA______, ne signifie pas pour autant qu'il en était encore le bénéficiaire suite à la création du DA______ et au transfert des fonds de DB______ en faveur du DA______.

Le Tribunal comprend en outre difficilement comment le prévenu aurait pu avoir l'intention de tromper BANQUE 1______ quant à l'origine des fonds et quant au bénéficiaire de ceux-ci, dès lors que la banque en était informée, ce que le prévenu savait. La banque savait également qui se trouvaient derrière BC______ au regard des documents bancaires en sa possession. De plus, le fait que le prévenu croyait qu'BANQUE 1______ avait transmis les informations relatives au DA______ à BANQUE 2______ n'est pas dénué de sens, dès lors que cette dernière avait repris une partie des comptes d'BANQUE 1______, dont celui de BB______ Le prévenu pouvait légitimement comprendre de la cessation des activités bancaires d'BANQUE 1______ et du transfert des avoirs auprès de BANQUE 2______ que cette dernière avait l'intégralité du dossier concernant BB______ et ainsi l'ensemble de l'arrière-plan économique du DA______, ce qui était en partie le cas puisque BANQUE 2______ était en possession du formulaire KYC d'BANQUE 1______ mentionnant l'origine des fonds.

Le Tribunal ne saisit aussi pas quel avantage économique le prévenu aurait pu se procurer ou procurer à FA______ en signant des formulaires T dont le contenu était faux, élément qui, du reste, n'a pas été détaillé dans l'ordonnance pénale. En effet, aucun élément figurant au dossier ne permet d'établir un lien direct entre la famille F______ et le prévenu qui avait pour mandat, par le biais d'BA______, de représenter BB_____, société qui n'est pas directement liée à la famille F______. Le prévenu n'était qu'un simple prestataire de service qui n'échangeait pas, à teneur du dossier, directement avec FA______ ou d'autre membre de la famille.

Au vu de ce qui précède, le prévenu sera acquitté de l'infraction de faux dans les titres (art. 251 ch. 1 CP).

3.             3.1. En application de l'art. 429 al. 1 let. a CPP, si le prévenu est acquitté totalement ou en partie ou s'il bénéficie d'une ordonnance de classement, il a droit à une indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure.

S'agissant de l'indemnité pour les frais de défense, celle-ci concerne les dépenses du prévenu pour un avocat de choix (ATF 138 IV 205, consid. 1), à condition que le recours à celui-ci procède d'un exercice raisonnable des droits de procédure. Pour fixer cette indemnité, l'autorité doit tenir compte de la nature et de l'importance de la cause, des difficultés particulières que celle-ci peut présenter en fait et en droit, du temps que l'avocat lui a consacré, de la qualité de son travail, du nombre des conférences, audiences et instances auxquelles il a pris part, du résultat obtenu ainsi que de la responsabilité assumée (arrêt du Tribunal fédéral 6B_810/2010 du 25 mai 2011, consid. 2 et les références citées).

3.2. Vu le verdict d'acquittement, une indemnité sera allouée au prévenu pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de la procédure, laquelle sera revue à la baisse pour tenir compte exclusivement de l'activité du chef d'Etude, de sorte que les heures effectuées par l'avocat stagiaire, soit 14.5 heures et le collaborateur, soit 0.42 heures, ne seront pas prises en compte.

Ainsi, une indemnité correspondant à 59.5 heures au tarif horaire de CHF 450.- sera octroyée au prévenu, indemnité justifiée compte tenu notamment de la durée de la procédure, du travail effectué et de la complexité de l'affaire.

Par conséquent, l'Etat de Genève sera condamné à verser CHF 28'836.70, TVA comprise, au prévenu à titre d'indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure.

4.             Les frais de la procédure seront laissés à la charge de l'Etat (art. 423 al. 1 CPP).

 

PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL DE POLICE

statuant sur opposition :

Déclare valables l'ordonnance pénale du 23 novembre 2020 et l'opposition formée contre celle-ci par X______ le 4 décembre 2020.

et statuant à nouveau contradictoirement :

Acquitte X______ de faux dans les titres (art. 251 ch. 1 CP).

Condamne l'Etat de Genève à verser à X______ CHF 28'836.70 (TVA comprise), à titre d'indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure (art. 429 al. 1 let. a CPP).

Laisse les frais de la procédure à la charge de l'Etat (art. 423 al. 1 CPP).

Informe les parties que, dans l'hypothèse où elles forment un recours à l'encontre du présent jugement ou en demandent la motivation écrite dans les dix jours qui suivent la notification du dispositif (art. 82 al. 2 CPP), l'émolument de jugement fixé sera en principe triplé, conformément à l'art. 9 al. 2 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale (RTFMP; E 4.10.03).

 

Le Greffier

Laurent FAVRE

Le Président

François HADDAD

 

 

Voies de recours

Les parties peuvent annoncer un appel contre le présent jugement, oralement pour mention au procès-verbal, ou par écrit au Tribunal pénal, rue des Chaudronniers 9, case postale 3715, CH-1211 Genève 3, dans le délai de 10 jours à compter de la communication du dispositif écrit du jugement (art. 398, 399 al. 1 et 384 let. a CPP).

Selon l'art. 399 al. 3 et 4 CPP, la partie qui annonce un appel adresse une déclaration écrite respectant les conditions légales à la Chambre pénale d'appel et de révision, Place du Bourg-de-Four 1, case postale 3108, CH-1211 Genève 3, dans les 20 jours à compter de la notification du jugement motivé.

Si le défenseur d'office ou le conseil juridique gratuit conteste également son indemnisation, il peut interjeter recours, écrit et motivé, dans le délai de 10 jours dès la notification du jugement motivé, à la Chambre pénale d'appel et de révision contre la décision fixant son indemnité (art. 396 al. 1 CPP).

L'appel ou le recours doit être remis au plus tard le dernier jour du délai à la juridiction compétente, à la Poste suisse, à une représentation consulaire ou diplomatique suisse ou, s'agissant de personnes détenues, à la direction de l'établissement carcéral (art. 91 al. 2 CPP).

 

Etat de frais

Frais du Ministère public

CHF

970.00

Convocations devant le Tribunal

CHF

45.00

Frais postaux (convocation)

CHF

14.00

Emolument de jugement

CHF

300.00

Etat de frais

CHF

50.00

Frais postaux (notification)

CHF

7.00

Total

CHF

1386.00 (à la charge de l'Etat)

==========

 


 

 

Restitution de valeurs patrimoniales et/ou d'objets

Lorsque le présent jugement sera devenu définitif et exécutoire, il appartiendra à l'ayant-droit de s'adresser aux Services financiers du pouvoir judiciaire (finances.palais@justice.ge.ch et +41 22 327 63 20) afin d'obtenir la restitution de valeurs patrimoniales ou le paiement de l'indemnité allouée, ainsi que, sur rendez-vous, au Greffe des pièces à conviction (gpc@justice.ge.ch et +41 22 327 60 75) pour la restitution d'objets.

 

 

Notification à X______, soit pour lui son Conseil, Me A______
Par voie postale

Notification au Ministère public
Par voie postale