Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites
DCSO/230/2025 du 09.05.2025 ( PLAINT ) , REJETE
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||
POUVOIR JUDICIAIRE A/3233/2024-CS DCSO/230/25 DECISION DE LA COUR DE JUSTICE Chambre de surveillance DU JEUDI 8 MAI 2025 |
Plainte 17 LP (A/3233/2024-CS) formée en date du 1er octobre 2024 par A______ SA.
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Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par plis recommandés du greffier du ______ à :
- A______ SA
______
______ [GE].
- ETAT DE GENEVE, ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE
Rue du Stand 26
Case postale 3937
1211 Genève 3.
- Office cantonal des poursuites.
A. a. L'Administration fiscale cantonale genevoise (ci-après AFC) a requis deux poursuites à l'encontre de A______ SA, n° 1______ pour un montant de 364'392 fr. 75 et 2______ pour un montant de 390707 fr. 55, parvenues au stade de la saisie et participant à la série n° 81 3______.
b. Le 14 mai 2024, l'Office cantonal des poursuites (ci-après l'Office) a saisi au préjudice de la débitrice, à concurrence d'un montant de 680'000 fr., une créance en remboursement d'un prêt de 3'137'764 fr. 82 à l'encontre de la société B______ SA, en mains de cette dernière. Des avis ont été notifiés à celle-ci les 15 mai et 25 juin 2024 à titre de mesure de sûretés.
c. L'Office a établi le 5 juillet 2024 le procès-verbal de saisie dans la série n° 81 3______, mentionnant la saisie de la créance susmentionnée.
Il précisait que la société A______ SA n'avait plus aucune activité ni d'employés, que ses comptes bancaires étaient vides et que son seul actif était la créance en remboursement du prêt à l'encontre de B______ SA.
d. L'AFC a requis le 22 août 2024 la vente de la créance saisie dans ses deux poursuites participant à la série n° 81 3______.
e. L'Office a rendu le 23 septembre 2024 une décision de non-lieu à la réalisation au motif que la créance saisie n'avait aucune valeur de réalisation, la solvabilité de la société B______ SA, étant plus qu'incertaine au vu des poursuites dont elle faisait l'objet pour un montant total de 211'759 fr. 15. Les frais de réalisation n'étaient ainsi pas couverts par le produit prévisible de la vente. Il annonçait qu'il entendait émettre des actes de défaut de biens à la créancière.
A______ SA a reçu cette décision le 24 septembre 2024.
B. a. Par acte expédié le 1er octobre 2024 à la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et faillites (ci-après la Chambre de surveillance), A______ SA a formé une plainte contre la décision de l'Office, assortie d'une requête d'effet suspensif.
Elle a en substance soutenu que les trois poursuites à l'encontre de B______ SA concernaient une seule et même dette dont B______ SA était débitrice solidaire aux côtés d'une société C______ SA de loyers pour des locaux loués et utilisés jusqu'en 2023 par cette dernière et que celle-ci devait assumer. Les oppositions formées aux poursuites contre B______ SA étaient par conséquent justifiées.
b. La Chambre de surveillance a rejeté la requête d'effet suspensif assortissant la plainte par décision du 8 octobre 2024.
c. Dans ses observations du 21 octobre 2024, l'Office a conclu au rejet de la plainte et persisté dans la motivation de sa décision, les explications de la plaignante ne modifiant pas son appréciation.
d. Les parties ont été informées le 4 novembre 2024 de ce que la cause était gardée à juger.
1. Déposée en temps utile (art. 17 al. 2 LP) et dans les formes prévues par la loi
(art. 9 al. 1 et 2 LALP; art. 65 al. 1 et 2 LPA, applicables par renvoi de l'art. 9 al. 4 LALP), auprès de l'autorité compétente pour en connaître (art. 6 al. 1 et 3 LALP; art. 17 al. 1 LP), à l'encontre d'une mesure de l'Office pouvant être attaquée par cette voie (art. 17 al. 1 LP) et par une partie potentiellement lésée dans ses intérêts (ATF 138 III 219 consid. 2.3; 129 III 595 consid. 3; 120 III 42 consid. 3), la plainte est recevable.
2. 2.1 Le créancier peut requérir, pour la série dont il fait partie, la réalisation des biens saisis un mois au plus tôt et un an au plus tard après la saisie s'il s'agit de biens meubles, y compris les créances et autres droits (art. 116 al. 1 et 117 al. 1 LP). Les biens meubles, y compris les créances, sont réalisés par l'office dix jours au plus tôt et deux mois au plus tarde à compter de la réception de la réquisition (art. 122 al. 1 LP).
Saisi d'une réquisition de vente recevable, l'office des poursuites doit effectuer la réalisation des biens saisis au profit de tous les poursuivants faisant partie de la série jusqu'à ce que le produit atteigne le montant de l'ensemble des créances de ces poursuivants, qu'ils participent à la saisie à titre définitif ou provisoire (art. 119 al. 2; Bettschart, Commentaire Romand, Poursuite et faillites, 2005, n° 17 ad art. 116 LP).
Alors que l'art. 127 LP ne prévoit que la possibilité pour l'office de renoncer à la réalisation uniquement à la demande du poursuivant, la pratique a introduit la possibilité pour l'office de renoncer d'office à la réalisation dans l'hypothèse où les biens n'auraient pas dû être saisis conformément à l'art. 92 al. 2 LP parce qu'il apparaît sans aucun doute que le produit de la réalisation n'excédera pas le montant des frais. Il faut réserver le cas où le poursuivant exige la réalisation et prend à sa charge les frais non couverts (ATF 83 III 131, JdT 1957 II 119; 88 III 103, JdT 1963 II 6; Bettschart, op. cit., n° 6 ad art. 127 LP).
2.2 En l'espèce, l'Office a fait usage de la possibilité de ne pas procéder à la réalisation de la créance saisie, au motif qu'elle était sans valeur de réalisation en raison de la situation obérée de la société débitrice. La plaignante conteste cette motivation, estimant que la société débitrice de la créance à réaliser était solvable et que la créance avait une valeur de réalisation.
La société débitrice de la créance saisie est poursuivie pour des loyers impayés remontant à 2023, d'un montant de 211'759 fr. 15. La plaignante ne conteste pas que ces loyers soient dus et que B______ SA en soit débitrice, même si ce n'est que dans le cadre d'une solidarité avec la réelle utilisatrice des locaux, C______ SA. Il découle de ces explications que B______ SA est solidairement responsables de dettes de loyers impayées qui lui sont réclamées par le biais de poursuites, ce qui signifie que leur recouvrement est problématique auprès de C______ SA. Contrairement à ce que soutient la plaignante, B______ SA est débitrice au même titre que C______ SA de ces montants, cette dernière ne semblant pas en mesure de les régler. La première de ces deux sociétés est par conséquent obérée au même titre que la seconde et ne présente pas un risque moindre de devoir payer ces montants. L'Office était par conséquent fondé à considérer que les poursuites contre B______ SA réduisent sensiblement sa capacité à honorer sa dette envers la plaignante et, partant, rendent la créance de la plaignante envers celle-là sans valeur de réalisation forcée.
La plaignante ne donne par ailleurs aucune explication ni ne fournit aucune preuve du fait que l'une ou l'autre des sociétés précitées présenterait des garanties suffisantes permettant de considérer que la créance saisie pourrait être recouvrée avec de bonnes chances ce succès et aurait une valeur de réalisation.
Il découle de ce qui précède que la décision entreprise est justifiée et que la plainte sera rejetée.
3. La procédure devant l'autorité de surveillance est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP; art. 61 al. 2 let. a OELP) et ne donne pas lieu à l'allocation de dépens (art. 62 al. 2 OELP).
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La Chambre de surveillance :
A la forme :
Déclare recevable la plainte formée le 2 octobre 2024 par A______ SA contre la décision du 23 septembre 2024 de l'Office cantonal des poursuites de non-lieu de réalisation dans le cadre de la saisie, série n° 81 3______.
Au fond :
La rejette.
Siégeant :
Monsieur Jean REYMOND, président; Monsieur Alexandre BÖHLER et Monsieur Anthony HUGUENIN, juges assesseurs ; Madame Elise CAIRUS, greffière.
Le président : Jean REYMOND |
| La greffière : Elise CAIRUS |
Voie de recours :
Le recours en matière civile au sens de l’art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).
Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.