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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/2140/2023

JTAPI/510/2024 du 27.05.2024 ( ICC ) , REJETE

En fait
En droit
Par ces motifs

république et

canton de genève

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2140/2023 ICC

JTAPI/510/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 27 mai 2024

 

dans la cause

 

A______ SÀRL, représentée par GESTOVAL SOCIÉTÉ FIDUCIAIRE SA, avec élection de domicile

contre

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

 


 

EN FAIT

1.             En annexe à sa déclaration fiscale 2021, A______ Sàrl (ci-après : la contribuable ou la recourante) a notamment produit un état locatif fiscal de l'immeuble au 1______ B______ à C______, dont elle est propriétaire. Mentionnant que les appartements situés du 1er au 3ème étage ainsi qu'une des arcades sont vacants, ce document établi par la régie faisait ressortir un loyer fiscal total de CHF 93'120.-.

2.             Dans son bordereau ICC du 17 novembre 2022, l’administration fiscale cantonale (ci-après : AFC-GE) a calculé pour ce bien immobilier un impôt immobilier complémentaire au taux de 2‰ sur une valeur fiscale de CHF 2'489'840.-, correspondant à la capitalisation, au taux de 3.74%, d'une valeur locative de CHF 93'120.-.

3.             Contre cette taxation, une réclamation a été déposée par la fiduciaire de la contribuable le 28 novembre 2022. Elle indiquait que l'immeuble est actuellement en travaux et produisait un nouvel état locatif fiscal établi par la régie qui ne mentionnait que le loyer d'une des arcades de CHF 26'400.-. Elle demandait qu'une nouvelle taxation soit émise en prenant en compte ce montant.

4.             Par une décision du 26 février 2023, l'AFC-GE a rejeté cette réclamation et maintenu sa taxation indiquant que le fait que le bien immobilier soit quasi entièrement en travaux ne change pas le calcul de sa valeur par capitalisation.

5.             Contre cette décision, un recours a été déposé devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) par un pli porté du 26 juin 2023. Indiquant n'avoir reçu le bordereau que le 1er juin 2023, la recourante conclut à ce que l'AFC-GE tienne compte du fait que l'immeuble était en travaux pour le calcul de l'impôt immobilier complémentaire, se référant pour le surplus au fait que seul un loyer de l'arcade de CHF 26'400.- avait été encaissé en 2021.

6.             Dans sa réponse du 5 octobre 2023, l'AFC-GE conclut au rejet du recours, estimant pour l'essentiel qu'un loyer théorique doit être pris en compte pour l'estimation des immeubles locatifs.

 

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions sur réclamation de l’administration fiscale cantonale (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 49 de la loi de procédure fiscale du 4 octobre 2001 - LPFisc - D 3 17).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens de l'art. 49 LPFisc.

3.             Conformément à l'art. 77 LCP (loi générale sur les contributions publiques du 14 décembre 1887 - D 3 05), les personnes morales doivent un impôt immobilier complémentaire sur les biens qu'elles détiennent. Cet impôt est calculé au 31 décembre de la période fiscale sur la valeur des immeubles à cette date (art. 76 al. 6 LCP).

4.             Cette dernière disposition renvoie à l'art. 50 let. a LIPP (loi sur l'imposition des personnes physiques du 27 septembre 2009 - D 3 08) qui, pour les immeubles locatifs, précise que la valeur fiscale est calculée en capitalisant l'état locatif annuel aux taux fixés chaque année par le Conseil d'État. "L'état locatif annuel se détermine d'après les loyers obtenus des locaux loués et des loyers qui pourraient être obtenus de ceux susceptibles d'être loués, y compris ceux occupés par le propriétaire et sa famille."

5.             De jurisprudence constante, l'état locatif fiscal doit être calculé sur une base théorique (JTAPI/14/2021 du 11.01.2021 consid. 8). Cela répond à l'objectif qui est de calculer la valeur fiscale de l'immeuble qui, en l'espèce, permet de déterminer l'assiette de l'impôt immobilier complémentaire, impôt réel qui ne dépend pas de la capacité contributive, ni du rendement de l'objet.

6.             Dans un arrêt plus ancien du 18 juillet 1984, le tribunal administratif avait statué que : "la valeur fiscale d'un immeuble ne saurait dépendre des fluctuations du rendement dues à des changements de locataires. Le fait que des appartements puissent rester vides pendant une certaine période, soit à cause d'une résiliation de bail, soit à cause de travaux de rénovation en cours ou à effectuer, ne modifie en rien la valeur fiscale de l'immeuble. Il en serait de même d'ailleurs dans l'hypothèse où un locataire ne paierait pas son loyer pour cause d'insolvabilité. C'est justement de ce genre de situation que le législateur a voulu tenir compte en introduisant dans le calcul de la valeur locative capitalisée les locaux qui ne sont pas loués, mais qui sont susceptibles de l'être. Ceci est confirmé par le sens de ce dernier terme qui veut dire ayant la capacité latente (Paul ROBERT, Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française, Paris 1972, p.1726). La question se poserait différemment si l'immeuble devenait objectivement inhabitable pour des raisons de sécurité et d'hygiène et dans une mesure telle que sa démolition devrait être ordonnée. (…) Ce n'est pas parce qu'un immeuble est vide qu'il perd sa valeur économique imposable, sous réserve de la situation d'un immeuble objectivement inhabitable car voué à la démolition, compte tenu de son état vétuste, insalubre et délabré. Dans ce dernier cas, il conviendra de faire recours à d'autres modes d'évaluation que la capitalisation de la valeur locative, s'agissant plutôt d'estimer la valeur imposable du terrain. Cette situation ne saurait être réalisée lorsque les appartements sont vides parce que le propriétaire veut rénover ou transformer l'immeuble. Dans cette hypothèse, les appartements sont toujours susceptibles d'être loués ; c'est pour une raison personnelle que le propriétaire ne le fait pas" (RDAF 1985 p. 72, consid. 6 et 8).

7.             En l'espèce, l'état locatif fiscal annexé à la déclaration de la recourante est manifestement conforme à ces principes, puisqu'il retient un loyer théorique pour la surface commerciale et les appartements vacants. C'est avec raison que l'AFC-GE s'est basée sur celui-ci pour déterminer la valeur fiscale de l'immeuble et calculer l'impôt immobilier complémentaire.

8.             A suivre le raisonnement de la recourante, un immeuble locatif intégralement en travaux aurait une valeur fiscale nulle, ce qui aboutirait à un résultat absurde. Le résultat serait tout aussi inacceptable en l'espèce si l'on devait retenir, comme la soutient la recourante, une capitalisation basée sur le seul loyer encaissé en 2021 de CHF 26'400.- qui aboutirait à une valeur fiscale déterminante de l'immeuble inférieure à CHF 706'000.-, qui est manifestement sans aucun rapport avec sa valeur vénale.

9.             Le recours sera rejeté.

10.         En application des art. 144 al. 1 LIFD, 52 al. 1 LPFisc, 87 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10) et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), la recourante, qui succombe est condamnée au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 700.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).


 

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 26 juin 2023 par A______ Sàrl contre la décision sur réclamation de l'administration fiscale cantonale du 26 février 2023 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge de la recourante un émolument de CHF 700.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Siégeant: Antoine BERTHOUD, président, Laurence DEMATRAZ et Pascal DE LUCIA, juges assesseurs.

Au nom du Tribunal :

Le président suppléant

Antoine BERTHOUD

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

Genève, le

 

La greffière