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Décisions | Chambre des baux et loyers

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C/3747/2024

ACJC/1128/2024 du 16.09.2024 sur JTBL/511/2024 ( SBL ) , IRRECEVABLE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/3747/2024 ACJC/1128/2024

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des baux et loyers

DU LUNDI 16 SEPTEMBRE 2024

 

Entre

Madame A______, Monsieur B______, domiciliés c/o Monsieur C______, ______ [GE], recourants contre un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 2 mai 2024,

et

FONDATION DE PLACEMENTS IMMOBILIERS D______, sise ______ (ZH), intimée, représentée par Me Vadim HARYCH, avocat, Banna & Quinodoz, rue Verdaine 15, case postale 3015, 1211 Genève 3.

 


EN FAIT

A.           Par jugement JTBL/511/2024 du 2 mai 2024, le Tribunal des baux et loyers, statuant par voie de procédure sommaire en protection des cas clairs, a condamné B______ et A______ à évacuer immédiatement de leur personne et de leurs biens ainsi que toute autre personne faisant ménage commun avec eux l'appartement n° 6 de 5 pièces au 2ème étage de l'immeuble sis avenue 1______ no. ______ au E______ [GE], ainsi que la cave en dépendant (ch. 1 du dispositif), a autorisé FONDATION DE PLACEMENTS IMMOBILIERS D______ à requérir l'évacuation par la force publique des précités dès le 10ème jour après l'entrée en force du jugement (ch. 2), a précisé que, l'évacuation portant sur un logement, l'exécution du jugement par la force publique devait être précédée de l'intervention d'un huissier judiciaire (ch. 3), a débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 4) et a rappelé que la procédure était gratuite (ch. 5).

En substance, les premiers juges ont retenu que les sous-locataires ne disposaient plus d'aucun titre juridique les autorisant à rester dans les locaux, le contrat de bail principal ayant été résilié et dite résiliation n'ayant pas été contestée, de sorte que leur évacuation devait être prononcée. Sans autre motivation, un sursis de dix jours a été accordé aux intéressés.

B.            a. Par acte expédié le 18 juin 2024 à la Cour de justice, complété le 29 juin 2024, B______ et A______, comparant en personne, ont formé recours contre ce jugement, sollicitant implicitement l'annulation du chiffre 2 de son dispositif. Ils ont conclu à ce que la Cour leur octroie un délai humanitaire de trois mois "à compter de ce jour".

Ils ont produit de nouvelles pièces et formé de nouveaux allégués.

b. Dans sa réponse du 9 juillet 2024, FONDATION DE PLACEMENTS IMMOBILIERS D______ a conclu à l'irrecevabilité du recours et, subsidiairement, à son rejet.

c. B______ et A______ n'ayant pas fait usage de leur droit de répliquer, les parties ont été avisées par plis du greffe de la Cour du 22 août 2024 de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits pertinents suivants résultent de la procédure :

a. FONDATION DE PLACEMENTS IMMOBILIERS D______ est propriétaire de l'immeuble sis avenue 1______ no. ______ (E______).

b. Le 24 mars 2003, elle a conclu avec F______ et G______, locataires, un contrat de bail portant sur la location d'un appartement n° 6 de 5 pièces au 2ème étage de l'immeuble sis avenue 1______ no. ______, dont dépendait une cave.

c. Le 19 mai 2017, à la suite du prononcé du divorce entre F______ et H______, un avenant a été établi, la précitée devenant seule titulaire du contrat de bail en cause.

d. Par jugement JTBL/763/2023 du 28 août 2023, le Tribunal a condamné H______ à évacuer l'appartement précité et lui a accordé un sursis humanitaire de six mois, la bailleresse ayant été autorisée à requérir son évacuation par la force publique dès le 1er mars 2024.

e. Dès le 21 octobre 2023 à tout le moins, H______ a sous-loué l'appartement litigieux à Pierre-Maël LEDUC.

f. Le 9 févier 2024, FONDATION DE PLACEMENTS IMMOBILIERS D______ a saisi le Tribunal d'une action en revendication, en protection des cas clair, et a conclu à ce que l'intéressé soit condamné à évacuer les locaux et à être autorisée à faire exécuter l'évacuation par la force publique.

g. Par complément du 29 février 2024, FONDATION DE PLACEMENTS IMMOBILIERS D______ a agi également à l'encontre de A______, B______ lui ayant indiqué qu'il occupait l'appartement avec elle.

h. A l'audience du Tribunal du 2 mai 2024, B______, représentant A______, a déclaré avoir payé le loyer à la locataire principale jusqu'à la fin du mois de février 2024 et attendre les bulletins de versement nécessaires depuis le 1er mars 2024. Il n'était pas disposé à restituer les locaux sans solution de relogement. Il ne résulte pas du procès-verbal d'audience que B______ aurait formulé de conclusions.

La bailleresse a persisté dans ses conclusions et souligné que le montant de l'arriéré de loyer était important.

Le Tribunal a gardé la cause à juger à l'issue de l'audience.

EN DROIT

1. 1.1 Contre les mesures d'exécution, seule la voie du recours est ouverte (art. 309 let. a CPC).

1.2 Le recours, écrit et motivé, doit être introduit auprès de la deuxième instance dans les trente jours à compter de la notification de la décision motivée (art. 311 al. 1 et 321 al. 1 CPC). Le délai est de dix jours pour les décisions prises en procédure sommaire (art. 314 al. 1 et 321 al. 2 CPC), ce qui est le cas des procédures en protection des cas clairs (art. 248 let. b et 257 CPC).

En l'espèce, le recours, formé dans le délai et selon la forme requise, est recevable sous ces aspects. Contrairement à ce que soutient l'intimée, les recourants, qui comparaissent en personne, ont conclu à l'octroi d'un sursis humanitaire de trois mois à compter du dépôt de l'acte de recours. Bien qu'ils n'aient pas expressément conclu à l'annulation du dispositif du jugement relatif aux mesures d'exécution, cette conclusion est implicite, au vu du sursis requis. L'acte est dès lors également recevable sous cet angle.

1.3 Les conclusions, les allégations de faits et les preuves nouvelles sont irrecevables (art. 326 CPC).

Les recourants concluent nouvellement devant la Cour à l'octroi d'un sursis humanitaire. Cette conclusion est nouvelle et donc irrecevable.

Dès lors que seul le chiffre 2 du dispositif du jugement est remis en cause, l'absence de conclusion recevable sur ce point entraîne l'irrecevabilité du recours.

2.  Même si le recours avait été recevable, le chiffre 2 du dispositif du jugement attaqué devrait être confirmé au vu de ce qui suit.

2.1 En procédant à l'exécution forcée d'une décision judiciaire, l'autorité doit tenir compte du principe de la proportionnalité. Lorsque l'évacuation d'une habitation est en jeu, il s'agit d'éviter que des personnes concernées ne soient soudainement privées de tout abri. L'expulsion ne saurait être conduite sans ménagement, notamment si des motifs humanitaires exigent un sursis, ou lorsque des indices sérieux et concrets font prévoir que l'occupant se soumettra spontanément au jugement d'évacuation dans un délai raisonnable. En tout état de cause, l'ajournement ne peut être que relativement bref (ATF 117 Ia 336 consid. 2b; arrêt du Tribunal fédéral 4A_207/2014 du 19 mai 2014 consid. 3.1).

L'art. 30 al. 4 de la loi genevoise d'application du code civil suisse et d'autres lois fédérales en matière civile (LaCC - E 1 05) concrétise le principe de la proportionnalité en cas d'évacuation d'un logement, en prévoyant que le Tribunal des baux et loyers peut, pour des motifs humanitaires, surseoir à l'exécution du jugement dans la mesure nécessaire pour permettre le relogement du locataire ou du fermier lorsqu'il est appelé à statuer sur l'exécution d'un jugement d'évacuation d'un logement, après audition des représentants du département chargé du logement et des représentants des services sociaux ainsi que des parties.

S'agissant des motifs de sursis, différents de cas en cas, ils doivent être dictés par des "raisons élémentaires d'humanité"; sont notamment des motifs de ce genre la maladie grave ou le décès de l'expulsé ou d'un membre de sa famille, le grand âge ou la situation modeste de l'expulsé; en revanche, la pénurie de logements ou le fait que l'expulsé entretient de bons rapports avec ses voisins ne sont pas des motifs d'octroi d'un sursis (ACJC/422/2014 du 7 avril 2014 consid. 4.2; ACJC/187/2014 du 10 février 2014 consid. 5.2.1; arrêt du Tribunal fédéral du 20 septembre 1990, in Droit du bail 3/1990 p. 30 et réf. cit.).

Le juge ne peut pas différer longuement l'exécution forcée et, ainsi, au détriment de la partie obtenant gain de cause, éluder le droit qui a déterminé l'issue du procès. Le délai d'exécution ne doit notamment pas remplacer la prolongation d'un contrat de bail à loyer lorsque cette prolongation ne peut pas être légalement accordée à la partie condamnée (arrêts du Tribunal fédéral 4A_232/2018 du 23 mai 2018 consid. 7; 4A_389/2017 du 26 septembre 2017 consid. 8; 4A_207/2014 du 19 mai 2014 consid. 3.1).

2.2 Dans le présent cas, les recourants n'occupent le logement en cause que depuis moins d'une année. Ils n'ont pas allégué avoir entrepris des démarches sérieuses en vue de se reloger, ni produit de titres à cet égard. Ils n'ont par ailleurs fait état d'aucun problème financier ou de santé, justifiant de leur octroyer un sursis humanitaire. Ils n'ont pas non plus versé d'indemnités pour occupation illicite, le dernier loyer ayant été acquitté à la locataire principale en février 2024, soit il y a plus de six mois. De plus, les recourants n'ont droit à aucune prolongation de bail, étant relevé qu'en raison de la présente procédure, ils ont obtenu dans les faits un sursis de plusieurs mois à compter du prononcé du jugement attaqué, ce qui constitue un délai équitable au sens des principes sus-rappelés.

3.  A teneur de l'art. 22 al. 1 LaCC, il n'est pas prélevé de frais ni alloué de dépens dans les causes soumises à la juridiction des baux et loyers (ATF 139 III 182 consid. 2.6).

* * * * *



PAR CES MOTIFS,
La Chambre des baux et loyers :


Déclare irrecevable le recours interjeté le 18 juin 2024 par B______ et A______ contre le jugement JTBL/511/2024 rendu le 2 mai 2024 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/3747/2024.

Dit que la procédure est gratuite.

Siégeant :

Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, présidente; Madame Sylvie DROIN, Monsieur Laurent RIEBEN, juges; Madame Zoé SEILER, Monsieur Nicolas DAUDIN, juges assesseurs; Madame Victoria PALAZZETTI, greffière.

 

 

 

 








 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels subsidiaires; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 113 à 119 et 90 ss LTF. Le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué. L'art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF inférieure à 15'000 fr.