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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4148/2024

ATAS/914/2025 du 24.11.2025 ( LAMAL ) , IRRECEVABLE

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/4148/2024 ATAS/914/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 24 novembre 2025

Chambre 1

 

En la cause

A______

 

 

recourante

 

contre

CSS ASSURANCE-MALADIE SA

 

 

intimée

 

 


EN FAIT

A. a. A______ (ci-après : l’assurée ou la recourante), née en 1970, est assurée auprès de CSS ASSURANCE-MALADIE SA (ci-après : CSS SA, l’assurance ou l’intimée).

b. Le 25 avril 2024, CSS SA a introduit à l’encontre de l’assurée une poursuite pour CHF 195.65 (poursuite n° 1______), correspondant à un retard de paiement du même montant, somme à laquelle ont été ajoutés des frais de rappel et de poursuite de CHF 50.- au total.

c. Le 6 mai 2024, l’office cantonal des poursuites a établi un commandement de payer relatif à cette poursuite, lequel a été notifié à l’assurée le 11 juin 2024 et frappé d’opposition le même jour.

d. Par décision du 23 juillet 2024, CSS SA a constaté un arriéré de paiement CHF 195.65 (auquel ont été ajoutés CHF 30.- de frais de rappel et CHF 76.35 de frais de poursuite) et levé l’opposition à hauteur de ces montants.

e. Par courrier du 15 août 2024, l'assurée a formé opposition à cette décision.

f. Par décision sur opposition du 10 octobre 2024, CSS SA a rejeté ladite opposition.

B. a. Par acte daté du 17 novembre 2024, mais reçu le 13 décembre 2024, l'assurée a recouru contre cette décision auprès du Tribunal cantonal du canton de Lucerne, concluant à l’annulation de la poursuite n° 1______.

b. Le 13 décembre 2024, le Tribunal cantonal du canton de Lucerne a transmis le recours précité à la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : chambre des assurances sociales) pour objet de sa compétence.

c. Par pli du 16 décembre 2024, la chambre des assurances sociales a invité l’intimée à lui transmettre, d’ici au 23 décembre 2024, la preuve de la date à laquelle la décision sur opposition du 10 octobre 2024 a été reçue par la recourante.

d. Le 17 décembre 2024, l’intimée a expliqué que la décision sur opposition avait été adressée par pli recommandé du 10 octobre 2024 à la recourante. Celle-ci ne l’avait pas retirée dans le délai de garde de sept jours, de sorte que l’envoi recommandé lui avait été retourné le 9 novembre 2024 par la poste, avec la mention « non réclamé ». La décision sur opposition avait été expédiée une seconde fois pour information le 15 novembre 2024, avec la mention que ce second envoi ne valait pas nouvelle notification. En effet, conformément à la jurisprudence applicable, la décision sur opposition du 10 octobre 2024 était réputée avoir été communiquée le dernier jour du délai de garde de sept jours.

e. Par courrier du 21 janvier 2025, la chambre des assurances sociales a demandé à l’assurée de lui transmettre, d’ici au 3 février 2025, la preuve de l’envoi de son recours. Ce délai a été prolongé au 25 février 2025 sur demande de la recourante.

f. Par courrier du 24 janvier 2025, le Tribunal cantonal du canton de Lucerne a transmis à la chambre des assurances sociales l’enveloppe d’envoi du recours, dont le timbre postal est daté du 12 décembre 2024.

g. L’intimée a répondu au recours le 31 mars 2025, concluant à ce que celui-ci soit déclaré irrecevable, sous suite de frais et dépens. La décision sur opposition du 10 octobre 2024 n’avait pas été retirée par sa destinataire dans le délai de garde. Elle était donc réputée notifiée le dernier jour du délai de garde, soit le 18 octobre 2024, si bien que le recours déposé le 12 décembre 2024 était manifestement tardif.

h. Par courrier du 1er avril 2025, la chambre des assurances sociales a imparti à la recourante un délai au 29 avril 2025 pour se déterminer sur la question de la recevabilité de son recours.

i. Dans un délai prolongé au 2 juin 2025, la recourante a expliqué qu’elle avait adressé son recours à Lucerne, car il s’agissait de l’adresse mentionnée dans la décision entreprise. Elle se trouvait par ailleurs à l’étranger pour des raisons professionnelles au moment de l’envoi des courriers par l’assurance. Elle n’était donc pas en mesure de recevoir le courrier et personne d’autre n’était autorisé à le faire en son absence. Dès réception de la lettre, elle avait immédiatement fait « opposition ». Sur le fond, la recourante a conclu à l’annulation de la poursuite objet de la procédure.

j. L’intimée a répliqué le 12 juin 2025, persistant dans ses conclusions. Selon la jurisprudence, la personne qui s’absentait un certain temps pendant une procédure devait prendre les dispositions nécessaires pour que les envois postaux parvenant à l’adresse communiquée aux autorités lui soient transmis. En l’espèce, faute d’avoir pris les mesures nécessaires pour faire suivre ou relever son courrier alors qu’elle devait s’attendre à la notification d’une décision sur opposition, l’argument de la recourante tombait à faux.

k. Dans sa duplique du 26 juin 2025, la recourante a persisté à contester le fond de la décision entreprise et demandé qu’il soit ordonné à l’intimée de lui fournir une explication précise sur l’origine et les montants composant la prétendue poursuite objet de la procédure.

l. Cette écriture a été transmise à l’intimée.

 

 

EN DROIT

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 4 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-maladie, du 18 mars 1994 (LAMal - RS 832.10).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             À teneur de l'art. 1 al. 1 LAMal, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-maladie, à moins que la loi n'y déroge expressément.

3.             Il s'agit en l'occurrence d'examiner la recevabilité du recours.

3.1 L’art. 61 LPGA prévoit que la procédure devant la chambre des assurances sociales est réglée par le droit cantonal, sous réserve de ce que celui-ci respecte les exigences minimales requises par la LPGA.

3.2 Selon l'art. 60 LPGA, le recours doit être déposé dans les 30 jours suivant la notification de la décision sujette à recours (al. 1). Les art. 38 à 41 LPGA sont applicables par analogie (al. 2).

Si le délai, compté par jour ou par mois, doit être communiqué aux parties, il commence à courir le lendemain de la communication (art. 38 al. 1 LPGA). Lorsque le délai échoit un samedi, un dimanche ou un jour férié selon le droit fédéral ou cantonal, son terme est reporté au premier jour ouvrable qui suit (art. 38 al. 3 1ère phrase LPGA). Les écrits doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai à l'assureur ou, à son adresse, à la Poste suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 39 al. 1 LPGA).

L'art. 38 al. 2bis LPGA prévoit qu'une communication qui n'est remise que contre la signature du destinataire ou d'un tiers habilité est réputée reçue au plus tard sept jours après la première tentative infructueuse de distribution. Cette fiction, également valable en cas d'ordre de garder le courrier, continue toutefois à ne s'appliquer que si le destinataire devait s'attendre, avec une certaine vraisemblance, à recevoir une communication des autorités (ATF 134 V 49 consid. 4). Lorsque l'autorité procède à une deuxième notification, celle-ci est sans effets juridiques (ATF 117 V 131 consid. 4a et les références).

Le délai de garde de sept jours n'est pas prolongé lorsque la Poste permet de retirer le courrier dans un délai plus long, par exemple à la suite d'une demande de garde. En effet, des accords particuliers avec la Poste ne permettent pas de repousser l'échéance de la notification, réputée intervenue à l'échéance du délai de sept jours. Ainsi, lorsque le destinataire donne l'ordre au bureau de poste de conserver son courrier, l'envoi recommandé est réputé notifié non pas au moment de son retrait effectif, mais le dernier jour du délai de garde de sept jours suivant la réception du pli par l'office de poste du lieu de domicile du destinataire. L'ordre donné au bureau de poste de conserver les envois ne constitue pas une mesure appropriée afin que les communications de l'autorité puissent être notifiées (ATF 141 II 429 consid. 3.1 et les références).

Celui qui pendant une procédure, quitte le lieu dont il a communiqué l'adresse aux autorités, en omettant de prendre les dispositions nécessaires pour que les envois postaux parvenant à cette adresse lui soient transmis, ou de renseigner l'autorité sur l'endroit où il peut être atteint, ou encore de désigner un représentant habilité à agir en son nom, ne peut se prévaloir de son absence lors de la tentative de notification d'une communication officielle à l'adresse indiquée, s'il devait s'attendre avec quelque vraisemblance à recevoir une telle communication (ATF 119 V 94 consid. 4b/aa et les références; C 230/2006 du 5 février 2007).

3.3 L’application stricte des règles sur les délais de recours ne relève en principe pas d'un formalisme excessif, mais se justifie dans l'intérêt d'un bon fonctionnement de la justice et de la sécurité du droit (ATF 104 Ia 4 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_51/2015 du 28 octobre 2015 consid. 2.1).

3.4 À teneur de l'art. 41 LPGA, si le requérant ou son mandataire a été empêché, sans sa faute, d'agir dans le délai fixé, celui-ci est restitué pour autant que, dans les 30 jours à compter de celui où l'empêchement a cessé, le requérant ou son mandataire ait déposé une demande motivée de restitution et ait accompli l'acte omis.

D'après la jurisprudence, une restitution de délai ne peut être accordée qu'en l'absence claire de faute du requérant ou de son mandataire, ce qui n'est pas le cas même d'une légère négligence ou d'une erreur en raison d'une inattention (arrêt du Tribunal fédéral 9C_821/2016 du 2 février 2017 consid. 2.2). Par « empêchement non fautif », il faut entendre non seulement l'impossibilité objective, comme le cas de force majeure - par exemple un événement naturel imprévisible (Anne-Sylvie DUPONT, in Commentaire romand, LPGA, 2018, n. 7 ad art. 41 LPGA) -, mais également l'impossibilité due à des circonstances personnelles ou à une erreur excusables (arrêts du Tribunal fédéral 8C_743/2019 du 20 décembre 2019 consid. 4.3 ; I 854/06 du 5 décembre 2006 consid. 2.1), à savoir lorsque, pour des motifs indépendants de leur volonté, il leur est impossible d'effectuer l'acte requis dans le délai initial ou d'instruire un tiers en ce sens (Anne-Sylvie DUPONT, op. cit., n. 7 ad art. 41 LPGA). Ces circonstances doivent toutefois être appréciées objectivement : est non fautive toute circonstance qui aurait empêché un plaideur - respectivement un mandataire - consciencieux d'agir dans le délai fixé (arrêt du Tribunal fédéral I 854/06 du 5 décembre 2006 consid. 2.1).

4.             En l’occurrence, la recourante a formé opposition le 15 août 2024 à l’encontre de la décision de l’intimée du 23 juillet 2024. Par décision sur opposition du 10 octobre 2024, l’intimée a maintenu sa position. Il ressort du « suivi des envois » versé au dossier que cette décision est arrivée à l’office postal le 11 octobre 2024 et qu’elle n’a pas été retirée à l’issue du délai de garde de sept jours. Conformément à la jurisprudence applicable, la décision sur opposition est dès lors réputée avoir été notifiée le dernier jour du délai de garde de sept jours, soit le 18 octobre 2024. Dans la mesure où la recourante avait formé opposition à la décision du 23 juillet 2024, elle devait s’attendre, avec une certaine vraisemblance, à recevoir une communication des autorités. Elle doit ainsi se voir opposer la fiction de notification prévue à l'art. 38 al. 2bis LPGA.

Le délai pour recourir a donc expiré le 18 novembre 2024 (art. 60 al. 1 LPGA en liaison avec les art. 38 al. 1 et 39 al. 1 LPGA).

Ayant été remis à la Poste le 12 décembre 2024, le recours contre la décision sur opposition est manifestement tardif.

Devant la chambre de céans, la recourante ne formule aucune demande de restitution de délai au sens de l’art. 41 LPGA. Elle ne fait pas non plus valoir de circonstance susceptible de justifier une telle restitution, étant précisé que le fait de s’être trouvée à l’étranger durant la période litigieuse ne constitue pas un « empêchement non fautif » au sens de la jurisprudence précitée.

Partant, le recours doit être déclaré irrecevable pour cause de tardiveté.

5.             Pour le surplus, la procédure est gratuite.

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours irrecevable.

2.        Dit que la procédure est gratuite.

3.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Pascale HUGI

 

La présidente

 

 

 

 

Amélie PIGUET MAYSTRE

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral de la santé publique par le greffe le