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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3811/2023

ATAS/887/2025 du 19.11.2025 ( APG ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3811/2023 ATAS/887/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 19 novembre 2025

Chambre 8

 

En la cause

A______

 

 

recourante

 

contre

CAISSE DE COMPENSATION NODE AVS

représentée par Me Anaïs ABDEL SATTAR, avocate

 

intimée

 


EN FAIT

 

A. a. A______ – ______, entreprise individuelle (ci-après : l’entreprise), sise à Genève, a été inscrite au registre du commerce le 2 septembre 2003. Dans son inscription, il était mentionné à titre de but « atelier de publicité, décoration et création graphique ». B______ (ci-après : la titulaire) était enregistrée comme la titulaire avec la signature individuelle.

b. Par demande du 10 novembre 2020 auprès de la caisse de compensation NODE AVS (ci-après : la caisse ou l’intimée), la titulaire a sollicité des allocations pour perte de gain COVID-19 en cas de perte de gain à partir du 17 septembre 2020 pour C______ (ci-après : employé), dont il était précisé qu’il occupait une position assimilable à celle d’un employeur. En effet, compte tenu des restrictions sanitaires découlant de la pandémie, des manifestations avaient dû être annulées. La demande portait sur la période du 17 septembre au 31 octobre 2020. Il y était mentionné que le revenu annuel soumis à cotisations sociales s’élevait à CHF 54'000.- en 2019. Il était ajouté que l’employé subissait une perte de gain, n’ayant touché aucun salaire durant le mois de la demande.

c. De nouvelles demandes d’allocations pour perte de gain COVID-19 ont été déposées le 1er décembre 2020 pour le mois de novembre 2020, puis le 16 février 2021 pour le mois de janvier 2021, puis le 3 mars 2021 pour février 2021 et le 1er avril 2021 pour mars 2021. Il y était mentionné que l’employé était le conjoint de la titulaire.

d. Selon le décompte du 16 décembre 2020, l’entreprise avait perçu des allocations pour perte de gain COVID-19 du 1er juin au 30 novembre 2020, totalisant un montant, cotisations incluses, de CHF 23'359.95, soit CHF 9'573.75 du 17 septembre au 30 novembre 2020. Puis, selon les décomptes des 17 février, 10 mars et 14 avril 2021, les allocations s’étaient élevées, cotisations comprises, à CHF 11'491.15 du 1er janvier au 31 mars 2021.

e. Sur demande de la caisse, la fiduciaire D______ (ci-après : la fiduciaire) a procédé à un contrôle de l’entreprise en lien avec les prestations obtenues.

Selon son rapport du 29 septembre 2022, la fiduciaire avait constaté des écarts entre les salaires déclarés et les informations financières recueillies. Ainsi, dans les formulaires de demande, il était mentionné que l’employé n’avait perçu aucun salaire et qu’il avait subi une perte de gain. Or, selon les renseignements fournis, un salaire mensuel de CHF 4'500.- avait été comptabilisé chaque mois de l’année 2020 et durant les mois indemnisés en 2021. Il en résultait que les valeurs déclarées dans les formulaires de demande n’étaient ni exactes, ni plausibles.

f. Par décision du 23 décembre 2022, la caisse a informé la titulaire avoir procédé à un nouveau calcul de ses droits suite à des vérifications. Il en résultait qu’elle avait indûment perçu des prestations, ce qui conduisait à une demande de restitution de CHF 21'064.90. Ce montant représentait la totalité des prestations versées du 17 septembre au 30 novembre 2020, puis du 1er janvier au 31 mars 2021.

g. Par courrier du 18 janvier 2023, la titulaire a formé opposition en expliquant que les allocations avaient été directement reversées à l’employé, ce qui avait permis de lui verser un « salaire ». Les allocations n’avaient fait que transiter par l’entreprise. Il était annexé les fiches de salaires des mois d’octobre et novembre 2020 ainsi que celles de janvier à mars 2021.

Selon les fiches de salaires des mois d’octobre et novembre 2020, établies les 23 novembre 2020 et 15 décembre 2020, en plus des APG Coronavirus, l’entreprise avait versé le solde manquant pour atteindre le salaire mensuel de CHF 4'500.- sous le libellé « salaire brut mensuel ». Pour les mois de janvier, février et mars 2021, les fiches de salaire des 31 janvier, 28 février et 31 mars 2021, l’entreprise avait procédé de la même manière.

h. Par décision sur opposition du 20 octobre 2023, la caisse a maintenu sa demande de restitution. En effet, les fiches de salaire produites établissaient que l’employé avait reçu un salaire en complément des allocations afin de maintenir son salaire mensuel de CHF 4'500.-. Il était conclu que le fait de verser une part de salaire brut pour maintenir la rémunération au niveau antérieur indiquait qu’il n’y avait pas de perte de salaire.

B. a. Par courrier du 16 novembre 2023, la titulaire a interjeté recours auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la Cour de céans) contre la décision sur opposition du 20 octobre 2023 expliquant avoir changé de comptable car le précédent avait fait des erreurs par méconnaissance. Il était sollicité un délai.

b. Par communication du 20 novembre 2023, la Cour de céans a interpellé la recourante afin que cette dernière rende conforme son recours aux dispositions légales.

c. Par nouvel acte daté du 16 novembre 2023, mais reçu le 5 décembre 2023, la titulaire a développé que les allocations COVID lui avaient permis de verser ce qu’elle appelait un salaire à son employé, ce qui aurait été impossible autrement. Avec cette aide, son entreprise avait pu survivre. À l’époque de l’octroi, elle avait fait au mieux avec les éléments dont elle disposait. Chaque phase avait été accompagnée par la caisse pour vérifier les droits de son employé. E______ de la caisse vérifiait toujours. Elle avait changé de comptable afin de reprendre son dossier et fournir les documents et informations nécessaires de ce qu’elle avait mis en place pour sauver son entreprise. Sans les allocations, son entreprise aurait fermé. Un remboursement mettrait clairement son entreprise et son avenir en péril.

d. Par acte du 14 décembre 2023, la recourante a expliqué que les fiches de salaire distinguaient bien l’indemnité coronavirus du complément de salaire permettant à son employé de conserver un salaire équivalent à 100%, ce qui avait été appliqué dans la pratique et repris de la directive émise par la caisse interprofessionnelles AVS de la Fédération des Entreprises romandes (FER CIAM). La position de l’intimée, qui lui reprochait d’avoir versé un complément de salaire, lui semblait être en contradiction avec la directive précitée. L’allocation permettait de couvrir l’essentiel du salaire et le complément était versé à bien plaire. Elle avait toujours été de bonne foi, tentant de se renseigner pour éviter une situation délicate comme celle qu’elle vivait désormais. Le remboursement d’une telle somme la mettrait dans une situation difficile. La situation de son activité était toujours fragile. Elle se tenait à disposition pour une audition si cela pouvait permettre d’éclairer l’affaire.

i. Interpellée, l’intimée a conclu au rejet du recours par réponse du 16 janvier 2024. Elle relevait que, contrairement à ce qui avait été indiqué sur les formulaires de demande de prestations, un salaire de CHF 4'500.- avait été versé tous les mois indemnisés. Par ailleurs, elle relevait que les conditions de la remise n’étaient pas remplies.

j. La recourante n’a pas souhaité déposer de réplique.

k. Sur demande de la Cour de céans, la recourante a produit les éléments transmis à la fiduciaire au moment du contrôle, soit des extraits d’écritures comptables relatifs aux salaires, aux cotisations sociales et aux indemnités reçues, le bilan ainsi que le compte de pertes et profits au 31 décembre 2021, lesquels présentaient également la situation de 2020.

l. Copie de cet envoi a été transmis à la partie intimée pour information.

EN DROIT

 

1.              

1.1 Les dispositions de la loi fédérale du 6 octobre 2000 sur la partie générale du droit des assurances sociales (LPGA - RS 830.1) s'appliquent aux allocations en cas de perte de gain en lien avec le Coronavirus, sous réserve de dérogations expresses (art. 1 de l’ordonnance sur les mesures en cas de pertes de gain en lien avec le coronavirus [COVID-19] du 20 mars 2020 [ordonnance sur les pertes de gain COVID-19 - RS 830.31]).

Les décisions sur opposition et celles contre lesquelles la voie de l'opposition n'est pas ouverte sont sujettes à recours auprès du tribunal des assurances compétent (art. 56 al. 1 et 57 LPGA).

Selon la jurisprudence, les décisions prises par une caisse cantonale de compensation en matière d’allocations en cas de perte de gain COVID-19 peuvent faire l’objet d’un recours devant le tribunal des assurances du canton où la caisse de compensation a son siège (arrêt du Tribunal fédéral 9C_738/2020 du 7 juin 2021 consid. 3.3).

Dès lors que l'intimée, sise dans le canton de Genève, a rendu la décision litigieuse de restitution en matière d'allocations en cas de perte de gain
COVID-19, la chambre de céans est compétente à raison du lieu et de la matière pour juger du cas d’espèce.

1.2 Interjeté dans la forme (art. 61 let. b LPGA) et le délai de 30 jours
(art. 60 al. 1 LPGA ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]) prévus par la loi, le recours est recevable.

2.             Le litige porte sur une demande de restitution d'un montant de CHF 21'064.90 qui a été versé par l'intimée à la recourante à titre d'allocations pour perte de gain COVID-19 en faveur de son unique employé, son conjoint, pour les périodes du 17 septembre au 30 novembre 2020 et du 1er janvier au 31 mars 2021.

3.             Aux termes de l'art. 25 al. 1 1re phrase LPGA, applicable par le renvoi de l'art. 1 de l'ordonnance sur les pertes de gain COVID-19, les prestations indûment touchées doivent être restituées.

Selon la jurisprudence, cela implique que soient réunies les conditions d'une reconsidération (art. 53 al. 2 LPGA) ou d'une révision procédurale (art. 53 al. 1 LPGA) de la décision par laquelle les prestations ont été accordées (ATF 130 V 318 consid. 5.2).

Selon l'art. 25 al. 2 1re phrase LPGA, le droit de demander la restitution s’éteint trois ans après le moment où l’institution d’assurance a eu connaissance du fait, mais au plus tard cinq ans après le versement de la prestation.

4.                          

4.1 L’ordonnance sur les pertes de gain COVID-19 a été adoptée le 20 mars 2020 dans le cadre des mesures prises pour lutter contre la pandémie liée au coronavirus, laquelle est entrée en vigueur rétroactivement au 17 mars 2020 (art. 11 al. 1).

Selon son art. 2 al. 3 (dans sa teneur du 17 septembre 2020 au 16 février 2022 [RO 2020 4574 ; RO 2022 97]), ont droit à l'allocation, pour autant qu'elles remplissent la condition prévue à l'al. 1bis let. c – à savoir qu'elles soient assurées obligatoirement au sens de la loi fédérale sur l'assurance-vieillesse et survivants du 20 décembre 1946 (LAVS - RS 831.10) –, les personnes qui exercent une activité lucrative indépendante au sens de l’art. 12 LPGA et les personnes visées à l’art. 31 al. 3 let. b et c de la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité du 25 juin 1982 (loi sur l’assurance-chômage, LACI - RS 837.0) : si elles doivent interrompre leur activité lucrative en raison de mesures de lutte contre l’épidémie de COVID-19 ordonnées par une autorité (let. a), et si elles subissent une perte de gain ou une perte de salaire (let. b).

Aux termes de l'art. 2 al. 3bis de l'ordonnance sur les pertes de gain COVID-19 (dans sa teneur du 17 septembre 2020 au 16 février 2022 [RO 2020 4574 ; RO 2022 97], les personnes qui exercent une activité lucrative indépendante au sens de l'art. 12 LPGA et les personnes visées à l'art. 31 al. 3 let. b et c LACI, pour autant qu'elles ne soient pas concernées par l'al. 3 et qu'elles remplissent la condition prévue à l'al. 1bis let. c ont droit à l'allocation : si leur activité lucrative est significativement limitée en raison de mesures de lutte contre l'épidémie de COVID-19 ordonnées par une autorité (let. a), si elles subissent une perte de gain ou une perte de salaire (let. b), et si elles ont touché pour cette activité au moins CHF 10'000.- à titre de revenu soumis aux cotisations AVS en 2019 [...] (let. c).

L'art. 31 al. 3 LACI vise le conjoint de l’employeur, occupé dans l’entreprise de celui-ci (let. b) et les personnes qui fixent les décisions que prend l’employeur – ou peuvent les influencer considérablement – en qualité d’associé, de membre d’un organe dirigeant de l’entreprise ou encore de détenteur d’une participation financière à l’entreprise ; il en va de même des conjoints de ces personnes, qui sont occupés dans l’entreprise (let. c).

4.2 Le Tribunal fédéral a confirmé que la perte de salaire est une condition du droit à l’allocation en cas de perte de gain pour les assurés définis à l’art. 31 al. 3 let. c LACI (arrêt du Tribunal fédéral 9C_603/2021 du 16 décembre 2021 consid. 4.5). Dans le bulletin à l'intention des caisses de compensation AVS et des organes d'exécution des prestations complémentaires n° 448 du 21 janvier 2022, l’Office fédéral des assurances sociales (ci-après : OFAS) a également souligné que l’existence d’une perte de salaire est une condition de base pour l’allocation en cas de perte de gain COVID-19 (cf. ATAS/178/2022 du 17 février 2022 consid. 5).

Le commentaire des modifications de l’ordonnance sur les pertes de gain COVID-19 entrées en vigueur le 17 septembre 2020 (disponible sur le portail du Gouvernement Suisse à l'adresse suivante : https://www.admin.ch/gov/fr/accueil/ documentation/communiques.msg-id-80968.html) indique en particulier, en lien avec l'art. 2 al. 3bis précité que « [o]nt droit à l’allocation les personnes exerçant une activité lucrative indépendante au sens de l'art. 12 LPGA ou les personnes ayant une position assimilable à celle d’un employeur qui sont assurées obligatoirement au sens de la loi fédérale du 20 décembre 1946 sur l’assurance-vieillesse et survivants, à condition que leur activité lucrative soit significativement limitée en raison de mesures de lutte ordonnées au niveau cantonal ou fédéral, et que cela entraîne une diminution considérable de leur chiffre d’affaires. Les personnes exerçant une activité lucrative indépendante doivent en outre subir une perte de gain, et les personnes ayant une position assimilable à celle d’un employeur, une perte de salaire ».

4.3 Aux termes de l'art. 5 al. 1 de l'ordonnance sur les pertes de gain COVID-19, l’indemnité journalière est égale à 80% du revenu moyen de l’activité lucrative obtenu avant le début du droit à l’allocation.

En vertu de l'art. 5 al. 2quater de l'ordonnance sur les pertes de gain COVID-19, en vigueur depuis le 17 septembre 2020, pour les salariés au sens de l’art. 10 LPGA, la perte de salaire engendrée par les mesures de lutte contre l’épidémie de COVID-19 ordonnées par une autorité est déterminante pour le calcul de l’allocation. L’indemnité journalière correspond à 80% de cette perte de salaire.

Dans le commentaire des modifications de l’ordonnance sur les pertes de gain COVID-19 entrées en vigueur le 17 septembre 2020, le Conseil fédéral indique, en lien avec l'art. 5 al. 2quater précité, que « [c]et alinéa règle le montant et le calcul de l’allocation pour les personnes salariées. Sont concernées les personnes salariées au sens de l’art. 10 LPGA y compris les personnes ayant une position assimilable à celle d’un employeur au sens de l’art. 31 al. 3 let. b et c LACI. L’allocation est versée sur la base de la perte de salaire prouvée et signalée à la caisse de compensation pour la période correspondante. Pour évaluer la perte, le salaire doit être comparé au revenu mensuel moyen soumis à l’AVS en 2019. L’indemnité journalière correspond à 80% de cette perte de salaire ».

4.4 Selon l'art. 8a de l'ordonnance sur les pertes de gain COVID-19, en vigueur depuis le 17 septembre 2020, les conditions d’octroi sont réexaminées à intervalles réguliers. À cette fin, les caisses de compensation AVS peuvent procéder à des vérifications aléatoires qu’elles effectuent elles-mêmes ou qu’elles confient à des experts externes.

5.      Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 353 consid. 5b et les références ; 125 V 193 consid. 2 et les références ; 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 135 V 39 consid. 6.1 et la référence).

6.              

6.1 En l'espèce, dans sa décision de restitution du 23 décembre 2022, confirmée par décision sur opposition du 20 octobre 2023, l’intimée se fonde sur le rapport d'évaluation du 29 septembre 2022 qui constatait des écarts entre les salaires déclarés et les informations obtenues, le salaire de CHF 4'500.- ayant été comptabilisé chaque mois indemnisé. La recourante, pour sa part, fait valoir que les allocations ont permis de verser l'essentiel de la rémunération et qu’elle avait versé un complément afin de maintenir le salaire intégral de son employé, cette manière de procéder était appliquée dans la pratique et validée par une directive de la FER CIAM.

6.2 Le rapport d'évaluation du 29 septembre 2022 constitue un fait nouveau, découvert après coup, de nature à modifier le calcul des prestations, et justifiant avec effet ex tunc la révision des décisions précédemment rendue d'octroi des APG-COVID, puisqu'il conclut à l'absence de perte de gain.

L'intimée ne conteste pas que l'employé, assuré obligatoirement au sens de la LAVS, occupe une position assimilable à celle d'un employeur compte tenu de ses liens avec la titulaire. De même, l'intimée ne remet pas en cause que son activité lucrative était significativement limitée en raison des mesures de lutte contre l'épidémie de COVID-19 ordonnées par les autorités, et qu'il a touché pour cette activité au moins CHF 10'000.- à titre de revenu soumis aux cotisations AVS en 2019. Est seule litigieuse la question de savoir s'il a subi une perte de salaire pendant les périodes indemnisées du 17 septembre au 30 novembre 2020, puis du 1er janvier au 31 mars 2021.

Selon les informations figurant dans les demandes d'allocations, le revenu de l'activité lucrative soumis à l'AVS en 2019 était de CHF 54'000.- par an.

Ce point sera considéré comme confirmé par les éléments comptables fournis par la recourante à la fiduciaire. En effet, les demandes d’allocations font état d’un salaire versé douze fois l’an et le salaire de décembre 2019, selon les écritures comptables, s’est élevé à CHF 4'500.-, ce qui correspond bel et bien à un revenu annuel de CHF 54'000.-. Ce point n’a par ailleurs pas été remis en question par l’intimée.

D'après le rapport d'évaluation de la fiduciaire du 29 septembre 2022, les salaires bruts déclarés dans les demandes d'allocations (soit CHF 0.-) différaient de ceux comptabilisés de septembre à novembre 2020, puis de janvier à mars 2021 puisque l’employé avait touché tous les mois indemnisés un salaire mensuel de CHF 4'500.- selon les écritures comptables.

À ce stade, il sied de relever que, selon les éléments transmis par la recourante, la fiduciaire n’a pas eu accès aux fiches de salaires qui distinguaient le salaire brut mensuel des allocations COVID-19.

Il ressort du dossier que, pour septembre 2020, la recourante n’a pas produit de fiche de salaire. Toutefois, selon les extraits des écritures comptables, le montant de CHF 4'500.-, libellé sous RHT-salaire-septembre 2020 a été versé le 20 octobre 2020.

Le décompte de salaire d’octobre 2020, établi le 23 novembre 2020, mentionne un salaire brut mensuel de CHF 542.85 auquel s’ajoute des APG coronavirus de CHF 3'957.15.

Selon les extraits des écritures comptables, sous libellé salaire-octobre 2020-RHT, le salaire entier d’octobre 2020 a été réglé le 23 novembre 2020.

S’agissant de la période du 17 septembre au 31 octobre 2020, la recourante a déposé une demande d’allocations le 10 novembre 2020, celle-ci a conduit au versement d’allocations en CHF 5'400.- (45 jours à CHF 120.-) auxquelles s’ajoutaient les cotisations AVS/AI/APG/AC en CHF 344.25, soit CHF 5'744.25 au total. Selon les extraits d’écritures comptables, le versement a été reçu le 17 décembre 2020.

Il apparaît dès lors qu’au moment du versement des allocations en décembre 2020, les salaires de l’employé avaient déjà été intégralement réglés pour les mois de septembre et d’octobre 2020.

S’agissant du mois de novembre 2020, le décompte de salaire, établi le 15 décembre 2020, mentionne un salaire brut mensuel de CHF 670.50 auquel s’ajoute des APG coronavirus de CHF 3'829.50.

Selon les extraits d’écritures comptables, sous libellé salaire-novembre 2020-RHT, le salaire de novembre 2020 a été intégralement réglé le 15 décembre 2020.

À ce stade, il sied de préciser que l’employé a reçu en plus de ses salaires une gratification de CHF 2'667.70 et un ajustement de salaire pour 2020 de CHF 1'252.80 début février 2021.

Or, toujours selon le décompte du 16 décembre 2020 précité et les extraits d’écritures comptables, suite à la demande du 1er décembre 2020, l’intimée a versé le 17 décembre 2020 des allocations en CHF 3'600.- auxquelles s’ajoutaient les cotisations AVS/AI/APG/AC en CHF 229.50 pour novembre 2020.

Au vu de ce qui précède, il est établi que les salaires du 17 septembre au 30 novembre 2020 ont été intégralement versés par la recourante avant la perception des allocations qui n’ont dès lors pas pu être utilisées pour rémunérer l’employé comme elle l’a allégué.

S’agissant de l’année 2021, la fiche de salaire établie le 31 janvier 2021, mentionne un salaire brut mensuel de CHF 780.- et des APG coronavirus en CHF 3'720.-.

Selon les extraits des écritures comptables, l’entier du salaire de janvier 2021 a été réglé le 3 février 2021.

Suite à la demande de prestations du 16 février 2021, l’intimée a versé selon décompte du 17 février 2021 des allocations en CHF 3'720.- en y ajoutant les cotisations AVS/AI/APG/AC en CHF 238.05 pour le mois de janvier 2021. Selon les extraits des écritures comptables, le versement a été reçu le 18 février 2021.

 

Il ressort de la fiche de salaire de février 2021, établie le 26 février 2021, que l’employé a reçu un salaire brut mensuel de CHF 1'140.- auquel s’ajoute des APG coronavirus de CHF 3'360.-.

Selon les extraits des écritures comptables, le salaire de février 2021 a été réglé le 15 mars 2021.

Suite à la demande de prestations du 3 mars 2021, selon décompte du 10 mars 2021, l’intimée a versé des allocations en CHF 3'360.- ainsi que le montant de CHF 215.05 à titre de cotisations AVS/AI/APG/AC. Le versement a été comptabilisé selon les extraits des écritures comptables le 11 mars 2021.

Selon la fiche de salaire établie le 31 mars 2021, la recourante a versé un salaire brut mensuel de CHF 780.- et des APG coronavirus en CHF 3'720.-.

Selon les extraits des écritures comptables, le salaire de mars 2021 a été entièrement réglé le 15 avril 2021.

Suite à la demande de prestations du 1er avril 2021, l’intimée a versé selon décompte du 14 avril 2021 des allocations en CHF 3'720.- en y ajoutant les cotisations AVS/AI/APG/AC en CHF 238.05 pour le mois de mars 2021. Selon les extraits des écritures comptables, le versement a été perçu le 15 avril 2021.

Ainsi, il sera retenu qu'alors que la recourante mentionnait dans les demandes de prestations un salaire brut nul pour la période litigieuse, force est de constater que les documents comptables attestent du versement d'un salaire mensuel brut complet du 17 septembre 2020 au 30 novembre 2020 et pour le mois de janvier 2021, ce le plus souvent avant même le dépôt de la demande de prestations et systématiquement avant le règlement des allocations.

S’agissant des mois de février et mars 2021, la Cour de céans retient que les fiches de salaire ont été établies avant la demande de prestations, mais le salaire complet a été versé quelques jours après le règlement des allocations, respectivement le jour même de la réception du virement. Cependant, les extraits des écritures comptables de 2021 ne font aucune mention de « RHT », le libellé étant limité à « salaire » avec le nom de l’employé et le mois visé. Par ailleurs, la totalité du salaire est indiqué. Or, pour les mois d’avril et mai 2020, il était expressément mentionné le montant qui était reversé à titre de RHT et celui réalisé à titre d’ajustement ou complément qui avait été fait plusieurs mois plus tard.

Au vu de ce qui précède, la Cour de céans estime, au degré de la vraisemblance prépondérante, que l'employé n'a pas subi de perte de gain durant la période litigieuse, puisqu’il a continué à percevoir son salaire mensuellement et intégralement, ce qui implique que les allocations ont été indûment perçues.

Le recours doit ainsi être rejeté.

S’agissant des allégations de la recourante quant à sa bonne foi et au fait qu’elle n’est pas en mesure de rembourser la somme réclamée, elles seront examinées dans le cadre de la demande de remise qui, en tant que telle, doit être traitée par l'intimée après l’entrée en force du présent arrêt. La cause est transmise à l’intimée pour raison de compétence.

7.             Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté et transmis à l’intimée dans le sens des considérants.

Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA a contrario).

 

 

***

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Transmet la cause à l'intimée pour examen de la demande de remise de l’obligation de restituer.

4.        Dit que la procédure est gratuite.

5.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Pascale HUGI

 

La présidente suppléante

 

 

 

 

Marie-Josée COSTA

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le