Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public
ATAS/605/2025 du 18.08.2025 ( AVS ) , ADMIS/RENVOI
En droit
rÉpublique et | canton de genÈve | |
POUVOIR JUDICIAIRE
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A/2222/2024 ATAS/605/2025 COUR DE JUSTICE Chambre des assurances sociales | ||
Arrêt du 18 août 2025 Chambre 16 |
En la cause
A______ représenté par Me Francesco LA SPADA, avocat
| recourant |
contre
CAISSE CANTONALE GENEVOISE DE COMPENSATION
| intimée |
A. a. La société B______ Sàrl a été inscrite au registre du commerce du canton de Genève le 27 mai 2015, puis a été transformée en une société anonyme le 17 janvier 2020, devenant B______SA (ci-après : la société). Elle a une succursale dans le canton de Vaud, inscrite au registre du commerce vaudois le 5 janvier 2018. A______ (ci-après : l'intéressé) a été administrateur avec signature individuelle de la société depuis sa création en 2015 jusqu'au 30 septembre 2021, date à laquelle cette dernière a été déclarée en faillite par jugement du Tribunal de première instance.
b. Le personnel de la société et de sa succursale était affilié auprès de la caisse cantonale genevoise de compensation (ci-après : la caisse).
c. Les 27 mars 2018, 2 avril 2019 et 17 avril 2020, la caisse a transmis à la société les factures finales pour les cotisations salariales des années 2017, 2018 et 2019. Le 3 mai 2021, elle lui a adressé un rappel et l'a invitée à payer les cotisations dues pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2020. Le 28 avril 2021, elle lui a adressé une facture différentielle pour les cotisations salariales du 1er janvier au 30 avril 2021.
d. Le 25 janvier 2022, la caisse a transmis à la société, soit pour elle son administrateur, un extrait de compte relatif aux cotisations paritaires. Le solde en faveur de la caisse s'élevait à CHF 363'675.96.
e. Par décision du 22 avril 2024, la caisse a prié l'intéressé de lui verser, dans les 30 jours, le montant de CHF 361'381.65 pour le siège et CHF 81'052.50 pour la succursale du canton de Vaud, pour un total de CHF 442'434.15, représentant les cotisations paritaires dues pour 2017 à 2021, selon le décompte annexé, y compris les frais et intérêts moratoires. Si un éventuel dividende lui était versé par l'office des faillites, en cas de surindemnisation, ce dividende serait cédé à l'intéressé proportionnellement à son versement. Il s'agissait des sommes dues et exigibles lorsqu'il avait pris ses fonctions et échues au cours de son mandat.
La collocation de production de créance était réservée en raison de procédures pendantes dirigées contre la société en faillite, soit une procédure devant le Tribunal des prud'hommes et une procédure devant le Tribunal d'arrondissement de La Côte. Par conséquent, la consultation de l'état de collocation ne révélait aucune information sur un éventuel dividende prévisible. La caisse subissait de ce fait un dommage dont la réparation était demandée à l'intéressé.
B. a. Le 26 mai 2024, l'intéressé a élevé opposition auprès de la caisse à l'encontre de cette décision, contestant la validité des factures du 22 avril 2024 relatives aux charges sociales de la société et demandant leur annulation immédiate.
Un arrangement de paiement avait déjà été conclu concernant la part pénale encore due, avait été accepté par la caisse et était respecté selon les modalités convenues. L'allégation selon laquelle il aurait causé un quelconque préjudice de manière intentionnelle ou par négligence grave était contestée. Son entreprise avait été confrontée à des difficultés indépendantes de sa volonté, ce qui avait conduit au jugement de faillite.
b. Par décision du 30 mai 2024, la caisse a rejeté l'opposition et maintenu sa décision du 22 avril 2024.
En sa qualité d'administrateur et ainsi d'organe de la société, il incombait à l'intéressé de veiller personnellement au paiement des cotisations et contributions paritaires courantes et arriérées, en mettant en œuvre toute mesure ou vérification utile afin que la société soit à même de remplir ses obligations d'employeuse. En acceptant de figurer au registre du commerce en tant qu'administrateur et en ne mettant en œuvre aucune mesure auprès de la caisse pour tenter de s'acquitter des cotisations sociales impayées, l'intéressé avait commis une négligence devant être qualifiée de grave. Son comportement relevait d'une violation des obligations de diligence et de surveillance imposée par le rôle d'administrateur et tombait sous le coup de l'art. 52 de la loi fédérale sur l’assurance-vieillesse et survivants du 20 décembre 1946 (LAVS - RS 831.10). Le fait que, pour la part pénale, un plan de paiement avait été accordé et était respecté n'avait aucune influence sur la responsabilité de l'intéressé pour le dommage global subi par la caisse pour le non-paiement des cotisations sociales. On ne voyait pas de motif objectif susceptible de justifier le défaut de paiement des cotisations et exonérant l'intéressé du règlement du dommage subi par la caisse. La responsabilité de ce dernier était engagée.
C. a. Par acte du 28 juin 2024, confirmé le 22 juillet 2024, l'intéressé a recouru auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice contre cette décision sur opposition, concluant à une réévaluation de sa responsabilité personnelle et, le cas échéant, une annulation de la demande en paiement des charges sociales.
En sa qualité d'administrateur, il avait toujours agi avec diligence et en respectant les obligations légales lui incombant. Il avait pris toutes les mesures raisonnables pour assurer la solvabilité de l'entreprise et veiller au paiement des charges sociales. Des circonstances extérieures et imprévisibles avaient conduit à la faillite de son entreprise, soit la fermeture des chantiers en raison du Covid-19, puis la reprise des chantiers laborieuse en raison des mesures sanitaires strictes, un décalage de trésorerie critique et le départ de deux collaborateurs ayant ensuite créé leur propre entreprise concurrente et détourné clients et collaborateurs. Lors de la procédure de faillite, il avait été constaté que les actifs de l'entreprise étaient insuffisants pour couvrir l'ensemble des dettes, y compris les charges sociales. Il était inéquitable de transférer la responsabilité de ces paiements sur les administrateurs ou les liquidateurs. En sa qualité d'administrateur, il avait pris des mesures qu'il jugeait utile, notamment en demandant un échelonnement du paiement des montants dus, ce qui visait à maintenir la solvabilité de l'entreprise et à respecter les obligations sociales malgré les difficultés financières rencontrées. Il avait toujours agi dans l'intérêt de l'entreprise et avec diligence pour tenter de surmonter les défis rencontrés.
b. Par réponse du 2 septembre 2024, la caisse a conclu au rejet du recours.
Personne au sein de la société n'avait pris contact avec la caisse, aucun plan de paiement n'avait spécifiquement été demandé pour surmonter les retards de paiement et l'intéressé n'avait réagi que lorsque le volet pénal lié au non-paiement des cotisations paritaires était entré en jeu. L'argument des répercussions graves de la crise due au Covid-19 sur l'activité de la société était non pertinent, puisque le dommage avait déjà été provoqué via le non-paiement des cotisations paritaires d'employeur bien avant le début des effets de la pandémie. Pour la période 2019, le montant dû par la société s'élevait à CHF 143'662.85. Le comportement de l'intéressé à l'égard de la caisse relevait d'une violation des obligations de diligence et de surveillance imposées par le rôle d'administrateur et tombait sous le coup de l'art. 52 LAVS.
c. Par réplique du 21 octobre 2024, l'intéressé a persisté dans ses conclusions.
Chaque exercice comptable avait été clôturé avec la transmission systématique d'une attestation des salaires à l'office cantonal des assurances sociales (ci-après : OCAS), démontrant sa transparence, son engagement à se maintenir en conformité constante avec les exigences légales, même dans des circonstances difficiles et son intégrité en tant qu'employeur. Des arrangements de paiement avaient été mis en place en 2019, 2020, 2021 et même 2022. Il n'avait pas attendu le volet pénal pour réagir. Il avait également demandé des arrangements après la faillite de la société et continuait alors de les respecter. S'ajoutait aux circonstances énumérées dans son recours le sabotage d'un projet à Renens le 27 février 2020 par un ancien employé, qui avait engendré une perte de CHF 345'493.25.
d. Par duplique du 14 novembre 2024, la caisse a maintenu sa position et indiqué souhaiter savoir si la société avait reçu des indemnités en cas de réduction de l'horaire de travail (ci-après : RHT) via les caisses de chômage pendant la crise du Covid-19, pour pouvoir se déterminer à nouveau.
Seul un plan de paiement pour les arriérés de cotisations relatifs à la période 2019 avait été accordé, lequel n'avait pas été respecté, la dette n'ayant été ni épongée ni diminuée. Par la suite, la caisse avait enregistré principalement des paiements relatifs à la part pénale concernant la période de cotisations 2020.
e. Le 17 janvier 2025, l'intéressé a notamment versé à la procédure une décision de l'office cantonal de l'emploi du 25 mars 2020 accordant à la société l'indemnité en cas de RHT du 23 mars 2020 au 22 juin 2020, des décomptes de paiement de l'indemnité RHT de la caisse pour mars et avril 2020, ainsi que des décomptes de paiement d'indemnités RHT pour mars, avril et mai 2020 de la caisse cantonale de chômage vaudoise.
f. Le 17 février 2025, la caisse a persisté dans ses conclusions.
g. Sur ce, la cause a été gardée à juger.
1. 1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 1 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-vieillesse et survivants du 20 décembre 1946 (LAVS - RS 831.10).
Sa compétence à raison de la matière pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.
1.2 Selon l’art. 52 al. 5 LAVS, en dérogation à l’art. 58 al. 1 LPGA, le tribunal des assurances du canton dans lequel l’employeur est domicilié est compétent pour traiter le recours. Cette disposition est également applicable lorsque la caisse recherche un organe de l’employeur en réparation du dommage et ce, quel que soit le domicile dudit organe (arrêt du Tribunal fédéral des assurances H 184/06 du 25 avril 2007 consid. 2.3).
Lorsque l’employeur possède une succursale dans un canton différent de celui de l’établissement principal, c’est l’autorité de recours du canton dans lequel la caisse de compensation cantonale – à laquelle l’employeur est affilié – a son siège qui est compétente (ATF 110 V 351 consid. 5c). Dans le cas où l’employeur est affilié à une caisse professionnelle et possède une ou plusieurs succursales situées dans des cantons différents de celui de l’établissement principal, le Tribunal fédéral a jugé plus judicieux que l’autorité de recours du canton dans lequel la succursale a son siège soit compétente, lorsque celle-ci est affiliée à une autre caisse que celle de l’établissement principal en vertu de l’art. 117 al. 3 du règlement sur l'assurance-vieillesse et survivants du 31 octobre 1947 (RAVS - RS 831.101 ; ATF 124 V 104 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_872/2017 du 3 septembre 2018 consid. 6.4.1 et les références citées).
En l'occurrence, la société a son siège à Genève et une succursale dans le canton de Vaud et les deux entités sont affiliées à la caisse, de sorte que la chambre de céans est compétente à raison du lieu tant par rapport à la société qu'en relation avec sa succursale.
1.3 Interjeté en temps utile, le recours est recevable (art. 60 al. 1 LPGA).
2. Le litige porte sur la conformité au droit de la décision de l'intimée ordonnant la réparation, au sens de l’art. 52 LAVS, du préjudice subi en raison du défaut de paiement, par la société et sa succursale vaudoise, de cotisations sociales (AVS, AC, AF, AMAT) dues entre 2017 et 2021, ainsi que des frais d'administration, de sommations et de poursuites et des intérêts moratoires y relatifs.
3. L'art. 14 al. 1 LAVS en corrélation avec les art. 34 ss RAVS, prescrit l'obligation pour l'employeur de déduire sur chaque salaire la cotisation du salarié et de verser celle-ci à la caisse de compensation avec sa propre cotisation. Les employeurs doivent envoyer aux caisses, périodiquement, les pièces comptables concernant les salaires versés à leurs salariés, de manière à ce que les cotisations paritaires puissent être calculées et faire l'objet de décisions. L'obligation de payer les cotisations et de fournir les décomptes est, pour l'employeur, une tâche de droit public prescrite par la loi. À cet égard, le Tribunal fédéral a déclaré, à réitérées reprises, que la responsabilité de l'employeur au sens de l'art. 52 LAVS est liée au statut de droit public. L'employeur qui ne s'acquitte pas de cette tâche commet une violation des prescriptions au sens de l'art. 52 LAVS, ce qui entraîne pour lui l'obligation de réparer entièrement le dommage ainsi occasionné (ATF 137 V 51 consid. 3.2 et les références).
Selon l’art. 52 LAVS, l'employeur qui, intentionnellement ou par négligence grave, n'observe pas des prescriptions et cause ainsi un dommage à l'assurance, est tenu à réparation (al. 1). Si l'employeur est une personne morale, les membres de l'administration et toutes les personnes qui s'occupent de la gestion ou de la liquidation répondent à titre subsidiaire du dommage. Lorsque plusieurs personnes sont responsables d'un même dommage, elles répondent solidairement de la totalité du dommage (al. 2). La caisse de compensation fait valoir sa créance en réparation du dommage par voie de décision (al. 4).
4. À titre liminaire, il convient d'examiner si la prétention de l'intimée est prescrite.
4.1 Selon l’art. 52 al. 3 LAVS, dans sa teneur jusqu'au 31 décembre 2019, le droit à réparation est prescrit deux ans après que la caisse de compensation compétente a eu connaissance du dommage et, dans tous les cas, cinq ans après la survenance du dommage. Ces délais peuvent être interrompus. L'employeur peut renoncer à invoquer la prescription. Si le droit pénal prévoit un délai de prescription plus long, celui-ci est applicable.
Le 1er janvier 2020 est entrée en vigueur la révision du droit de la prescription de la loi fédérale du 30 mars 1911 complétant le Code civil suisse (CO, Code des obligations - RS 220), entraînant la modification de l’art. 52 al. 3 LAVS (RO 2018 5343 ; FF 2014 221). Cet alinéa prévoit désormais que l’action en réparation du dommage se prescrit conformément aux dispositions du CO sur les actes illicites. Selon l’art. 60 CO, dans sa teneur en vigueur à compter du 1er janvier 2020, l’action en dommages-intérêts ou en paiement d’une somme d’argent à titre de réparation morale se prescrit par trois ans à compter du jour où la partie lésée a eu connaissance du dommage ainsi que de la personne tenue à réparation et, dans tous les cas, par dix ans à compter du jour où le fait dommageable s’est produit ou a cessé (al. 1). Si le fait dommageable résulte d’un acte punissable de la personne tenue à réparation, elle se prescrit au plus tôt à l’échéance du délai de prescription de l’action pénale, nonobstant les alinéas précédents. Si la prescription de l’action pénale ne court plus parce qu’un jugement de première instance a été rendu, l’action civile se prescrit au plus tôt par trois ans à compter de la notification du jugement (al. 2).
4.2 En renvoyant désormais aux dispositions du CO sur la prescription des actions introduites en cas d’acte illicite, le délai de prescription relatif se trouve augmenté de deux à trois ans et le délai de prescription absolu de cinq à dix ans. De plus, la prescription plus longue de l’action pénale visée à l’art. 60 al. 2 CO est applicable. Le délai de prescription ne commence plus à courir à la survenance du dommage, mais le jour où le fait dommageable s’est produit ou a cessé. Les autres aspects de la prescription, notamment les motifs d’empêchement ou de suspension et les actes interruptifs, sont régis par les art. 130 ss CO (Message du Conseil fédéral relatif à la modification du code des obligations [droit de la prescription] du 29 novembre 2013, FF 2014 221, p. 260).
4.3 L’art. 49 Titre final du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CC - RS 210) règle de manière générale les questions de droit transitoire en matière de prescription et a été réécrit lors de la révision du droit de la prescription (FF 2014 221, pp. 230 et 231). Depuis le 1er janvier 2020, cet article dispose notamment que lorsque le nouveau droit prévoit des délais de prescription plus longs que l’ancien droit, le nouveau droit s’applique dès lors que la prescription n’est pas échue en vertu de l’ancien droit (al. 1). L’entrée en vigueur du nouveau droit est sans effet sur le début des délais de prescription en cours, à moins que la loi n’en dispose autrement (al. 3). Au surplus, la prescription est régie par le nouveau droit dès son entrée en vigueur (al. 4).
Le nouveau droit s’applique dès lors qu’il prévoit un délai plus long que l’ancien droit, mais uniquement à la condition que la prescription ne soit pas déjà acquise. En d’autres termes, les délais de prescription en cours sont allongés par le nouveau droit. A contrario, une créance déjà prescrite demeure prescrite (FF 2014 221 p. 231). Par ailleurs, même si la prétention bénéficie d’un nouveau délai plus long de prescription, cela n’influence pas le point de départ de la prescription, c’est-à-dire que le délai ne recommence pas à courir au moment de l’entrée en vigueur du nouveau droit (FF 2014 221 p. 254). Pour les questions de droit de la prescription autres que celles du début et de la longueur du délai, par exemple les (nouveaux) motifs de suspension et d’interruption, la renonciation à la prescription ou le droit transitoire, seul le nouveau droit est applicable dès son entrée en vigueur pour la période suivant celle-ci et non rétroactivement. Ainsi, les déclarations de renonciation à la prescription valablement faites sous l’ancien droit restent valables sous l’empire du nouveau droit (FF 2014 221, p. 254).
4.4 Les délais prévus par les art. 52 al. 3 LAVS, dans son ancienne teneur, et 60 al. 1 CO sont des délais de prescription, de sorte qu'ils ne sont pas sauvegardés une fois pour toutes avec la décision relative aux dommages-intérêts ; le droit à la réparation du dommage au sens de l'art. 52 al. 1 LAVS peut donc aussi se prescrire durant la procédure d'opposition (ATF 135 V 74 consid. 4.2).
S’agissant des actes interruptifs de prescription, selon la jurisprudence rendue à propos de l’art. 52 al. 3 LAVS, dans son ancienne teneur, les délais de prescription sont interrompus par les actes énumérés à l’art. 135 CO (applicable par analogie) ainsi que par tous les actes de procédure relatif au droit invoqué et susceptible de faire progresser l'instance (ATF 141 V 487 consid. 2.3 p. 48 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_641/2020 du 30 mars 2021 consid. 5.3 et la référence ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_400/2020 du 19 octobre 2020 consid. 3.2.1 et la référence). Ainsi, tant la décision que l’opposition interrompent les délais de prescription (ATF 135 V 74 consid. 4.2.2).
4.5 S'agissant de la prescription absolue, selon la jurisprudence rendue à propos de l'ancien droit, le dommage survient dès que l'on doit admettre que les cotisations dues ne peuvent plus être recouvrées, pour des motifs juridiques ou de fait (ATF 129 V 193 consid. 2.2 ; ATF 126 V 443 consid. 3a). Ainsi, un dommage se produit en cas de faillite, en raison de l'impossibilité pour la caisse de récupérer les cotisations dans la procédure ordinaire de recouvrement. Le dommage subi par la caisse est réputé être survenu le jour de la faillite ; le jour de la survenance du dommage marque celui de la naissance de la créance en réparation et la date à partir de laquelle court le délai absolu (ATF 129 V 193 consid. 2.2 et la référence).
S'agissant de la prescription relative, le nouveau droit n'a pas modifié son point de départ ; il faut entendre par moment de la « connaissance du dommage », en règle générale, le moment où la caisse de compensation aurait dû se rendre compte, en faisant preuve de l'attention raisonnablement exigible, que les circonstances effectives ne permettaient plus d'exiger le paiement des cotisations, mais pouvaient entraîner l'obligation de réparer le dommage (ATF 129 V 193 consid. 2.1). En cas de faillite, le moment de la connaissance du dommage correspond en règle générale à celui du dépôt de l'état de collocation, ou celui de la publication de la suspension de la liquidation de la faillite faute d'actifs (ATF 129 V 193 consid. 2.3 ; cf. également 141 V 487 consid. 2.2 et les références).
4.6 En l'occurrence, la faillite de la société a été prononcée le 30 septembre 2021. Dès lors qu’au 1er janvier 2020, la créance de la caisse n’était pas prescrite, c’est le délai de prescription de trois ans qui s’applique.
Le délai pour prononcer une décision de réparation du dommage courait donc en tout cas jusqu’au 30 septembre 2024. La décision en réparation du dommage du 22 avril 2024 est donc intervenue en temps utile.
Par conséquent, le droit à réparation du dommage n'est pas prescrit.
5. Il convient à présent d'examiner si les conditions de la responsabilité de l'art. 52 LAVS sont réalisées et en premier lieu de déterminer si le recourant peut être considéré comme étant « l'employeur » tenu de verser les cotisations à l'intimée.
5.1 À teneur de l'art. 52 al. 2 LAVS, si l'employeur est une personne morale, les membres de l'administration et toutes les personnes qui s'occupent de la gestion ou de la liquidation répondent à titre subsidiaire du dommage. Lorsque plusieurs personnes sont responsables d'un même dommage, elles répondent solidairement de la totalité du dommage.
S’agissant de la notion d'« employeur », la jurisprudence considère que, si l'employeur est une personne morale, la responsabilité peut s'étendre, à titre subsidiaire, aux organes qui ont agi en son nom, notamment quand la personne morale n’existe plus au moment où la responsabilité est engagée (ATF 123 V 12 consid. 5b ; 122 V 65 consid. 4a). Le caractère subsidiaire de la responsabilité des organes d'une personne morale signifie que la caisse de compensation ne peut agir contre ces derniers que si le débiteur des cotisations (la personne morale) est devenu insolvable (ATF 123 V 12 consid. 5b).
L’art. 52 LAVS ne permet ainsi pas de déclarer l'organe d'une personne morale directement débiteur de cotisations d'assurances sociales. En revanche, il le rend responsable du dommage qu'il a causé aux différentes assurances sociales fédérales, intentionnellement ou par négligence grave, en ne veillant pas au paiement des cotisations sociales contrairement à ses obligations (arrêt du Tribunal fédéral H 96/05 du 5 décembre 2005 consid. 4.1).
La notion d'organe selon l'art. 52 LAVS est en principe identique à celle qui se dégage de l'art. 754 al. 1 CO.
En matière de responsabilité des organes d'une société anonyme, l'art. 52 LAVS vise en première ligne les organes statutaires ou légaux de celle-ci, soit les administrateurs, l'organe de révision ou les liquidateurs (ATF 128 III 29 consid. 3a ; Thomas NUSSBAUMER, Les caisses de compensation en tant que parties à une procédure de réparation d'un dommage selon l'art. 52 LAVS, in RCC 1991 p. 403).
S’agissant plus particulièrement du cas d'une Sàrl, les gérants qui ont été formellement désignés en cette qualité, ainsi que les personnes qui exercent cette fonction en fait, sont soumis à des obligations de contrôle et de surveillance étendues, dont le non-respect peut engager leur responsabilité (art. 827 CO en corrélation avec l'art. 754 CO). Ils répondent selon les mêmes principes que les organes d'une société anonyme pour le dommage causé à une caisse de compensation ensuite du non-paiement de cotisations d'assurances sociales (ATF 126 V 237 consid. 4 ; arrêts du Tribunal fédéral H 252/01 du 14 mai 2002 consid. 3b et d, in VSI 2002 p. 176 ; 9C_344/2011 du 3 février 2012 consid. 3.2).
La responsabilité d'un administrateur dure en règle générale jusqu'au moment où il quitte effectivement le conseil d'administration et non pas jusqu'à la date où son nom est radié du registre du commerce. Cette règle vaut pour tous les cas où les démissionnaires n'exercent plus d'influence sur la marche des affaires et ne reçoivent plus de rémunération pour leur mandat d'administrateur (ATF 126 V 61 consid. 4a). En d'autres termes, un organe engage sa responsabilité pour les cotisations sociales qui sont venues à échéance entre le moment de son entrée en fonction et celui de sa sortie effective de la société, ainsi que pour les cotisations qui étaient déjà échues lors de son entrée en fonction, soit pendant la durée où il a exercé une influence sur la marche des affaires. Demeurent réservés les cas où le dommage résulte d'actes qui ne déploient leurs effets qu'après le départ du conseil d'administration (arrêt du Tribunal fédéral H 263/02 du 6 février 2003 consid. 3.2).
5.2 En l'espèce, le recourant était inscrit au registre du commerce en qualité d'administrateur de la société avec signature individuelle dès sa fondation en tant que Sàrl, le 27 mai 2015, ce qui n'est pas contesté, et a conservé cette qualité lorsque la société est devenue une SA puis jusqu'à ce qu'elle tombe en faillite. Il disposait ainsi de la qualité d'organe formel de la société lorsque les cotisations non payées pour les années 2017 à 2021 sont arrivées à échéance.
Il peut par conséquent être recherché à ce titre par l'intimée pour le non-paiement des cotisations litigieuses.
6. Il convient ensuite d'examiner si le recourant a commis une faute ou une négligence grave au sens de l'art. 52 al. 1 LAVS.
6.1 L'obligation légale de réparer le dommage ne doit être reconnue que dans les cas où le dommage est dû à une violation intentionnelle ou par négligence grave, par l'employeur, des prescriptions régissant l'assurance-vieillesse et survivants (RCC 1978 p. 259 ; RCC 1972 p. 687). Il faut donc un manquement d'une certaine gravité. Pour savoir si tel est le cas, il convient de tenir compte de toutes les circonstances du cas concret (ATF 121 V 243 consid. 4b).
La caisse de compensation qui constate qu'elle a subi un dommage par suite de la non-observation de prescriptions peut admettre que l'employeur a violé celles-ci intentionnellement ou du moins par négligence grave, dans la mesure où il n'existe pas d'indice faisant croire à la légitimité de son comportement ou à l'absence d'une faute (RCC 1983 p. 101).
Selon la jurisprudence constante, se rend coupable d'une négligence grave l'employeur qui manque de l'attention qu'un homme raisonnable aurait observée dans la même situation et dans les mêmes circonstances. La mesure de la diligence requise s'apprécie d'après le devoir de diligence que l'on peut et doit en général attendre, en matière de gestion, d'un employeur de la même catégorie que celle de l'intéressé. En présence d'une société anonyme, il y a en principe lieu de poser des exigences sévères en ce qui concerne l'attention qu'elle doit accorder au respect des prescriptions. Une différenciation semblable s'impose également lorsqu'il s'agit d'apprécier la responsabilité subsidiaire des organes de l'employeur (ATF 108 V 189). Les faits reprochés à une entreprise ne sont pas nécessairement imputables à chacun des organes de celle-ci. Il convient bien plutôt d'examiner si et dans quelle mesure ces faits peuvent être attribués à un organe déterminé, compte tenu de la situation juridique et de fait de ce dernier au sein de l'entreprise. Savoir si un organe a commis une faute dépend des responsabilités et des compétences qui lui ont été confiées par l'entreprise (ATF 108 V 199 consid. 3a ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_926/2009 du 27 avril 2010 consid. 4.3.2). La négligence grave mentionnée à l'art. 52 LAVS est admise très largement par la jurisprudence (ATF 132 III 523 consid. 4.6).
L’art. 716a al. 1 CO énumère les attributions intransmissibles et inaliénables des membres d’un conseil d’administration. En font partie l’exercice de la haute surveillance sur les personnes chargées de la gestion, pour s’assurer notamment qu’elles observent la loi, les statuts, les règlements et les instructions données (ch. 5). Dans le cadre de l’exercice de cette haute surveillance, l’administrateur répond de la cura in custodiendo. C’est ainsi qu’il a non seulement le devoir d’assister aux séances du conseil d’administration, mais également l’obligation de se faire renseigner périodiquement sur la marche des affaires. Il est tenu de prendre les mesures appropriées lorsqu’il a connaissance ou aurait dû avoir connaissance d’irrégularités commises dans la gestion de la société. Ce devoir de surveillance incombe à tous les membres du conseil d’administration, nonobstant le mode de répartition interne des tâches au sein du conseil d’administration (ATF 114 V 219 consid. 4a ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_926/2009 du 27 avril 2010 consid. 4.3.3 et les références).
La négligence grave est également donnée lorsque l'administrateur n'assume pas son mandat dans les faits. Ce faisant, il n'exerce pas la haute surveillance sur les personnes chargées de la gestion, attribution incessible et inaliénable du conseil d'administration conformément à l'art. 716a CO. Une personne qui se déclare prête à assumer ou à conserver un mandat d'administrateur tout en sachant qu'elle ne pourra pas le remplir consciencieusement viole son obligation de diligence (ATF 122 III 195 consid. 3b). Sa négligence peut être qualifiée de grave sous l'angle de l'art. 52 LAVS (ATF 112 V 1 consid. 5b). Un administrateur, dont la situation est à cet égard proche de celle de l’homme de paille, ne peut s'exonérer de ses responsabilités légales en invoquant son rôle passif au sein de la société (arrêt du Tribunal fédéral 9C_289/2009 du 19 mai 2010 consid. 6.2). La faute de l'homme de paille réside précisément dans le fait qu'il s'accommode de ne pouvoir exercer ses fonctions (ATF 122 III 195 consid. 3b ; arrêt du Tribunal fédéral H 126/04 du 8 septembre 2005 consid. 4).
Commet également une faute grave celui qui ne démissionne pas de ses fonctions alors qu'il se trouvait, en raison de l'attitude du tiers, dans l'incapacité de prendre les mesures qui s'imposaient s'agissant du paiement des cotisations ou qui se trouvait dans l'incapacité d'exercer son devoir de surveillance (voir par exemple : arrêts du Tribunal fédéral 9C_344/2011 du 3 février 2012 consid. 4.3 ; 9C_289/2009 du 19 mai 2010 consid. 6.2).
Il y a négligence grave d’un organe lorsqu’une société continue de verser des salaires sur lesquels ses ressources financières ne permettent pas de prélever les cotisations paritaires, et fait supporter le risque inhérent au financement d'une entreprise à l'assurance sociale (arrêt du Tribunal fédéral 9C_701/2018 du 27 novembre 2018 consid. 6.2). Si les ressources financières d’une entreprise ne lui permettent pas de payer les cotisations paritaires dans leur intégralité, ses organes ne doivent verser que les salaires pour lesquels les créances de cotisations peuvent être couvertes (arrêt du Tribunal fédéral 9C_338/2007 du 21 avril 2008 consid. 3.2). Les administrateurs d'une société qui se trouve dans une situation financière désastreuse et qui parent au plus pressé, en réglant les dettes les plus urgentes à l'exception des cotisations sociales, dont l'existence et l'importance leur sont connues, sans qu'ils ne puissent guère espérer, au regard de la gravité de la situation, que la société puisse s'acquitter des cotisations en souffrance dans un délai raisonnable, commettent une négligence grave au sens de l'art. 52 LAVS (ATF 132 III 523 consid. 4.6).
La jurisprudence exige de l'organe factuellement exclu de la gestion de la société qu'il se soucie sérieusement de remplir ses obligations contractuelles, parmi lesquelles figure le paiement des cotisations sociales. Dans les cas où l'organe risque d'engager sa responsabilité, il doit démissionner (Marco REICHMUTH, Die Haftung des Arbeitgebers und seiner Organe nach Art. 52 AHVG, 2008, n. 563 ; arrêts du Tribunal fédéral 9C_446/2014 du 2 septembre 2014 consid. 4.2 et 9C_ 289/2009 du 19 mai 2010 consid. 6.2).
Dans un arrêt récent, le Tribunal fédéral a réitéré la portée de l'art. 52 LAVS et la jurisprudence y relative dans le cadre de l'examen de la responsabilité d'un gérant d'une Sàrl dans le préjudice subi par la caisse de compensation en raison de cotisations paritaires restées impayées par la Sàrl. Le Tribunal fédéral a rappelé qu'en sa qualité de gérant, il incombait au recourant de veiller personnellement à ce que les cotisations paritaires afférentes aux salaires versés fussent effectivement payées à la caisse de compensation, nonobstant le mode de répartition interne des tâches au sein de la société. Un gérant d'une Sàrl ne peut se libérer de cette responsabilité en se bornant à soutenir qu'il faisait confiance à un associé chargé de régler les cotisations sociales à la caisse de compensation, car cela constitue déjà en soi un cas de négligence grave. En reconnaissant qu'il faisait confiance à l'associé gérant, à qui était confiée la tâche de régler les paiements et les cotisations sociales, le recourant admet implicitement qu'il n'a pas exercé à satisfaction son devoir de surveillance (cura in custodiendo) et fait preuve de passivité, au lieu d'intervenir directement, ce qui relève d'une négligence qui doit, sous l'angle de l'art. 52 LAVS, être qualifiée de grave. Le Tribunal fédéral a également retenu que cette passivité est de surcroît en relation de causalité naturelle et adéquate avec le dommage subi par la caisse de compensation. En effet, si le recourant avait correctement exécuté sa charge de gérant, notamment en exigeant de consulter tous les documents comptables pertinents (pièces bancaires, correspondance avec l'AVS, etc.), il aurait pu veiller à ce que les cotisations sociales fussent régulièrement versées et ceci l'aurait amené à constater que les retards dans les paiements des cotisations s'accumulaient et à prendre les mesures idoines (arrêt du Tribunal fédéral 9C_463/2023 du 22 mai 2024 consid. 3.21).
6.2 La responsabilité de l'employeur au sens de l'art. 52 LAVS suppose enfin un rapport de causalité (naturelle et) adéquate entre la violation intentionnelle ou par négligence grave des prescriptions et la survenance du dommage. La causalité est adéquate si, d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, le fait considéré était propre à entraîner un effet du genre de celui qui s'est produit, la survenance de ce résultat paraissant de façon générale favorisée par une telle circonstance (ATF 129 V 177 consid. 3.2).
Le lien de causalité adéquate entre le comportement fautif – soit la rétention des cotisations alors même que les salaires sont versés – et le dommage survenu ne peut pas être contesté avec succès lorsque les salaires versés sont tels que les créances de cotisations qui en découlent directement ex lege ne sont plus couvertes (SVR 1995 AHV n° 70 p. 214 consid. 5 ; arrêts du Tribunal fédéral H 167/05 du 21 juin 2006 consid. 8 et H 74/05 du 8 novembre 2005 consid. 4).
6.3 En l'espèce, l'intimée a retenu qu'en sa qualité d'organe de la société, il incombait au recourant de veiller personnellement au paiement des cotisations et contributions paritaires courantes et arriérées et qu'en ne mettant en œuvre aucune mesure auprès d'elle pour tenter de s'acquitter des cotisations sociales impayées, il avait commis une négligence grave.
Le recourant invoque des circonstances extérieures et imprévisibles ayant conduit à la faillite de son entreprise, soit la fermeture des chantiers en raison du Covid‑19, puis la reprise des chantiers laborieuse en raison des mesures sanitaires strictes, un décalage de trésorerie critique, le départ de deux collaborateurs ayant ensuite créé leur propre entreprise concurrente et détourné clients et collaborateurs, ainsi que le sabotage d'un projet par un ancien employé ayant engendré une grosse perte.
Ce faisant, le recourant expose des circonstances qui ont à son sens conduit à la situation financière critique de l'entreprise et à terme à sa faillite, mais qui, d'une part, sont postérieures aux premiers défauts de paiement des cotisations, qui ont commencé pour l'année 2017 et se sont poursuivis en 2018 et 2019, et qui, d'autre part, ne changent rien au fait, qu'en tant qu'organe de la société, il devait s'assurer du paiement des cotisations sociales et que, même en cas de graves difficultés financières, il ne pouvait faire supporter le risque inhérent au financement d'une entreprise aux assurances sociales. Contrairement à ce qu'il affirme, il n'a pas pris toutes les mesures raisonnables pour assurer le paiement des charges sociales, les organes d'une société incapable de verser les cotisations paritaires dans leur intégralité, soit en l'occurrence le recourant, ne devant verser que les salaires pour lesquels les créances de cotisations peuvent être couvertes.
Si le recourant affirme s'être soucié du paiement des cotisations et soutient que des arrangements de paiement avaient été mis en place en 2019, 2020, 2021 et même 2022, le fait d'avoir tenu des tableaux de suivi des débiteurs et planifié les projets de la société ne démontre pas qu'il a respecté ses obligations et les plans de paiement invoqués concernant la part pénale, étant relevé que l'intimée a indiqué, pièce à l'appui, que seul un plan de paiement pour les paiements des cotisations arriérées avait été accordé pour 2019 par décision du 26 août 2020 et qu'il n'avait ensuite pas été respecté, conformément au relevé de compte des cotisations paritaires du 12 février 2021 et à l'extrait de compte du 25 janvier 2022.
Au regard de ce qui précède, c'est à juste titre que l'intimée a retenu que le recourant avait commis une négligence devant, sous l'angle de l'art. 52 LAVS, être qualifiée de grave, les manquements du recourant relatifs au défaut de paiement des cotisations paritaires étant par ailleurs en rapport de causalité naturelle et adéquate avec le dommage subi par l’intimée.
7. Il reste à examiner le montant du dommage subi par l'intimée.
7.1 Le montant du dommage correspond à celui pour lequel la caisse de compensation subit une perte. Appartiennent à ce montant les cotisations paritaires (cotisations patronales et d’employés ou ouvriers) dues par l’employeur selon la LAVS, la loi fédérale sur l'assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20 ; dont l'art. 66 LAI renvoie à l'art. 52 LAVS), la loi fédérale sur les allocations pour perte de gain du 25 septembre 1952 (LAPG - RS 834.1 ; dont l'art. 21 al. 2 renvoie à l'art. 52 LAVS), la loi fédérale sur les allocations familiales dans l'agriculture du 20 juin 1952 (LFA - RS 836.1 ; dont l'art. 25 al. 3 renvoie à l'art. 52 LAVS), la loi fédérale sur les allocations familiales et les aides financières allouées aux organisations familiales du 24 mars 2006 (LAFam - RS 836.2 ; dont l'art. 25 let. c renvoie à l'art. 52 LAVS), la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité du 25 juin 1982 (LACI - RS 837.0 ; dont l'art. 6 renvoie à la LAVS ; ATAS/386/2020 du 14 mai 2020 consid. 9b), ainsi que les cotisations dues en vertu de la loi instituant une assurance en cas de maternité et d'adoption du 21 avril 2005 (LAMat - J 5 07 ; dont l'art. 11A renvoie à l'art. 52 LAVS).
7.2 Le dommage comprend également les intérêts moratoires dus en vertu de l'art. 26 al. 1 LPGA en lien avec l'art. 41bis RAVS, les contributions aux frais d'administration des caisses de compensation (art. 69 al. 1 LAVS), les frais de sommation (art. 34a al. 2 RAVS) et les frais de poursuite (ATF 121 III 382 consid. 3/bb ; Mélanie FRETZ, La responsabilité selon l'art. 52 LAVS : une comparaison avec les art. 78 LPGA et 52 LPP, REAS 2009 p. 240).
7.3 Selon la jurisprudence, les créances de cotisations restées impayées ne font plus l'objet d'un examen quant à leur étendue dans le cadre du procès en responsabilité au sens de l'art. 52 LAVS, pour autant qu'elles reposent sur une décision de cotisations arriérées qui n'a pas été attaquée et est dès lors entrée en force. La possibilité pour la société de recourir contre la décision (sur opposition) de cotisations arriérées garantit de manière suffisante que les organes de l'employeur devenu insolvable ne soient pas confrontés à des créances en réparation injustifiées. Sont réservés les cas dans lesquels la décision de cotisations arriérées a été signifiée à la personne morale après que l'organe recherché est sorti de la société ou qu'il ressort des circonstances des indices suffisants que les cotisations fixées par la décision de cotisations arriérées reposent sur une erreur manifeste (arrêt du Tribunal fédéral 9C_381/2018 du 6 décembre 2018 consid. 4.1 et les références).
7.4 S'agissant des cotisations dues en vertu de la LAMat, par arrêt du 30 janvier 2020, la chambre de céans a jugé qu’il n’existait pas de base légale suffisante pour rechercher les employeurs ou leurs organes pour le dommage résultant du défaut de paiement des cotisations précitées (ATAS/79/2020 du 30 janvier 2020 consid. 14). L'art. 11A LAMat est entré en vigueur le 1er février 2023.
D’après les principes généraux en matière de droit transitoire, on applique, en cas de changement de règles de droit et sauf réglementation transitoire contraire, les dispositions en vigueur lors de la réalisation de l’état de fait qui doit être apprécié juridiquement et qui a des conséquences juridiques (ATF 140 V 41 consid. 6.3.1 et les références).
Selon la règle de base de droit intertemporel, une règle de droit ne produit un effet que sur les états de fait qui se sont déroulés durant sa période de validité. La règle de base de droit intertemporel permet de déterminer le champ d’application temporel d’une loi et d’attribuer un fait à une loi en fonction du moment de la survenance du fait en question. Ainsi, les faits survenus dès l’entrée en vigueur de la loi, soit durant la période de validité de cette dernière, doivent être saisis par la nouvelle loi, alors que les faits survenus avant ou après la période de validité d’une loi ne peuvent en principe pas être saisis par la loi en question (Milena PIREK, L'application du droit dans le temps et la non-rétroactivité, in Les grands principes du droit administratif, 2022, p. 137).
De cette règle de base de droit intertemporel découlent les deux principes généraux de droit intertemporel auxquels l’ordre juridique suisse est soumis, à savoir le principe de non-rétroactivité des lois et le principe de l’effet immédiat de la loi. Ces principes permettent à l’autorité d’application du droit de déterminer, en l’absence de dispositions légales expresses, le champ d’application temporel d’une loi et donc la loi applicable (Milena PIREK, op cit., p. 137-138).
Parce que la période de validité temporelle d’une loi est délimitée par sa date d’entrée en vigueur et celle de son abrogation, une loi ne peut en principe concerner des faits antérieurs à son entrée en vigueur. C’est ce que prescrit le principe de non-rétroactivité des lois (Milena PIREK, op cit., p. 138).
7.5 En l'espèce, le montant du dommage, de CHF 442'434.15, n'est pas contesté par le recourant.
Cependant, dans la mesure où la demande en réparation du dommage a été rendue par l'intimée le 22 avril 2024, soit postérieurement à l'entrée en vigueur de l'art. 11A LAMat, se pose la question de l'application de cette disposition dans le cas d'espèce.
La demande en réparation du dommage susvisée avait pour objet le paiement des cotisations salariales impayées des années 2017 à 2021, y compris des montants relevant de la LAMat, de sorte que l'état de fait ayant fondé cette demande s'est réalisé avant l'entrée en vigueur de l'art. 11A LAMat.
Par conséquent, conformément à la jurisprudence fédérale et en l'absence de disposition particulière de droit transitoire, l'art. 11A LAMat ne s'applique pas dans le cas d'espèce. Il en découle que l'intimée ne pouvait pas réclamer à la recourante le montant correspondant aux cotisations dues en vertu de la LAMat, ainsi que les intérêts moratoires et les frais y relatifs.
8. Dans ces circonstances, le recours sera très partiellement admis, la décision attaquée sera annulée en tant qu'elle inclut dans le dommage à réparer les cotisations impayées fondées sur la LAMat, les intérêts moratoires et les frais y relatifs et la cause sera renvoyée à l'intimée afin qu'elle procède à un nouveau calcul du dommage excluant les cotisations impayées fondées sur la LAMat, les intérêts moratoires et les frais afférents à ces montants.
9. 9.1 Le recourant obtenant très partiellement gain de cause et ayant agi en personne – son conseil n'ayant été constitué qu'une fois l'instruction de la procédure terminée –, il ne se justifie pas de lui octroyer des dépens (art. 61 let. g LPGA et art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en matière administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03).
9.2 Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. a LPGA, dans sa teneur jusqu’au 31 décembre 2020, applicable selon l’art. 83 LPGA).
PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :
Statuant
À la forme :
1. Déclare le recours recevable.
Au fond :
2. L'admet partiellement.
3. Annule la décision sur opposition du 30 mai 2024 en tant qu'elle inclut dans le dommage à réparer les cotisations impayées fondées sur la LAMat, les intérêts moratoires et les frais y relatifs.
4. La confirme pour le surplus.
5. Renvoie la cause à l'intimée pour nouveau calcul du dommage excluant les cotisations impayées fondées sur la LAMat, les intérêts moratoires et les frais y relatifs.
6. Dit que la procédure est gratuite.
7. Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110). Selon l’art. 85 LTF, s’agissant de contestations pécuniaires, le recours est irrecevable si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 30'000.- (al. 1 let. a). Même lorsque la valeur litigieuse n’atteint pas le montant déterminant, le recours est recevable si la contestation soulève une question juridique de principe (al. 2). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.
La greffière
Nathalie KOMAISKI |
| La présidente
Justine BALZLI |
Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le