Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public
ATAS/464/2025 du 19.06.2025 ( LPP ) , PARTAGE LPP
En droit
rÉpublique et | canton de genÈve | |
POUVOIR JUDICIAIRE
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A/1188/2025 ATAS/464/2025 COUR DE JUSTICE Chambre des assurances sociales | ||
Arrêt du 19 juin 2025 Chambre 3 |
En la cause
A______ B______
| demandeurs |
contre
CAISSE DE PREVOYANCE DE LA CONSTRUCTION FONDATION INSTITUTION SUPPLÉTIVE LPP SWISSLIFE SA
| défenderesses |
A. a. Une demande de divorce a été déposée le 26 mai 2023 auprès du Tribunal de première instance.
b. Par jugement du 10 février 2025, la 9ème chambre du Tribunal de première instance a prononcé le divorce de A______ (ci-après : la demanderesse), née A______ le ______ 1985 et domiciliée rue C______ à Genève, et B______ (ci-après : le demandeur), né le ______ 1976 et domicilié avenue D______ à Genève, lesquels s’étaient mariés en date du 8 mai 2009.
c. Au chiffre 12 du jugement précité, le Tribunal de première instance a ordonné le partage par moitié des avoirs de prévoyance professionnelle acquis par chacun des époux durant le mariage.
d. Le jugement de divorce, devenu définitif le 22 mars 2025, a été transmis d'office à la Cour de céans le 4 avril 2025 pour exécution du partage.
B. a. La Cour de céans a demandé aux parties de lui indiquer le(s) nom(s) de leur(s) institution(s) de prévoyance, puis auxdites institutions de lui communiquer les montants des avoirs LPP acquis par les intéressés durant le mariage, soit entre le 8 mai 2009 et le 26 mai 2023.
b. L’instruction menée par la Cour de céans a permis d’établir les faits pertinents suivants :
S'agissant du demandeur, il est apparu, après consultation du rassemblement de ses comptes individuels :
- qu’au moment du mariage et jusqu’en octobre 2015, il a travaillé pour E______ et a été affilié à la META SAMMELSTIFTUNG (ci-après META), auprès de laquelle il avait accumulé, au moment du mariage, un avoir de CHF 7'442.10, ce qui représentait, au moment du dépôt de la demande en divorce, compte tenu des intérêts courus durant le mariage, un montant de CHF 9'027.17 ; qu'un avoir de CHF 23’000.- a été retiré le 11 novembre 2013 au titre de l'encouragement à la propriété (cf. décompte du 14 avril 2025) ; que le solde (CHF 9'559.90 au 7 août 2017) a été transféré à la FONDATION INSTITUTION SUPPLÉTIVE LPP (ci-après : FIS) ;
- que le demandeur avait déjà accumulé un avoir auprès de la FIS avant le mariage ; qu’au moment de ce dernier, cet avoir s’élevait à CHF 477.36, ce qui représentait, au moment du dépôt de la demande en divorce, compte tenu des intérêts courus durant le mariage, un montant de CHF 579.02 (cf. décompte de la FIS du 10 mai 2025) ; que le montant de l’avoir total accumulé au moment du dépôt de la demande en divorce s’élevait à CHF 10'344.13 ;
- qu’en 2012, 2015, 2016, 2017 et 2018, le demandeur a également été employé par F______ et affilié à la caisse de pension TELLCO, laquelle a transmis son avoir à la FIS (cf. décompte de la FIS du 10 mai 2025) ;
- qu’il a également été affilié à la CAISSE DE PENSION PRO, auprès de laquelle il a accumulé un avoir de CHF 9’846.75 qui a été transféré à la CAISSE DE PREVOYANCE DE LA CONSTRUCTION en février 2018 (cf. courrier de la CPC du 10 avril 2025) ;
- que depuis janvier 2018, le demandeur travaille pour G______ et est affilié à la CPC, auprès de laquelle il a accumulé un avoir qui s’élevait, en date du dépôt de la demande de divorce, à CHF 44'525.90 (cf. courrier de la CPC du 10 avril 2025) ;
Quant à la demanderesse, il s'est avéré, après consultation du rassemblement de ses comptes individuels :
- qu’elle n’a commencé à travailler qu’en décembre 2018, pour H______, à Genève ;
- que depuis juillet 2020, elle est employée par I______ et affiliée à SWISSLIFE, auprès de laquelle elle a accumulé un avoir qui s’élevait, en date du dépôt de la demande de divorce, à CHF 1'476.75 (cf. courrier de SWISSLIFE du 14 avril 2025) ;
c. Les documents recueillis au cours de l’instruction ont été transmis aux parties le 20 mai 2025, auxquelles il a été indiqué qu’à défaut d’observations de leur part dans le délai imparti, un arrêt serait rendu sur cette base.
d. En l'absence d'objections dans le délai fixé, la cause a été gardée à juger.
1.
1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. b de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations relatives à la prévoyance professionnelle opposant institutions de prévoyance, employeurs et ayants droit, y compris en cas de divorce, ainsi qu’aux prétentions en responsabilité (art. 331 à 331e du Code des obligations du 30 mars 1911 [CO - RS 220] ; art. 52, 56a al. 1, et art. 73 de la loi fédérale sur la prévoyance professionnelle, vieillesse, survivants et invalidité du 25 juin 1982 [LPP - RS 831.40] ; art. 142 du Code civil du 16 décembre 1907 [CC - RS 210]).
1.2 Le 1er janvier 2017, est entrée en vigueur la modification des art. 122ss CC concernant le partage des prestations de sortie des ex-époux, ainsi que des art. 280ss du Code de procédure civile du 19 décembre 2008 (CPC - RS 272) et 22ss de la loi fédérale sur le libre passage dans la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité du 17 décembre 1993 (loi sur le libre passage, LFLP - RS 831.42).
Le jugement de divorce ayant été rendu après l'entrée en vigueur, le 1er janvier 2017, des nouvelles dispositions relatives au partage de la prévoyance professionnelle en cas de divorce, la Cour de céans applique les dispositions légales dans leur nouvelle teneur (art. 7d Tit. fin. CC).
2.
2.1 L'art. 25a LFLP règle la procédure en cas de divorce. Si une décision concernant le partage de la prévoyance professionnelle en application de l’art. 280 ou 281 CPC s’avère impossible à prendre durant la procédure de divorce, le juge du lieu du divorce compétent au sens de l'art. 73 al. 1 de la loi fédérale sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité, du 25 juin 1982 (LPP - RS 831.40), soit à Genève, la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice, exécute d’office, après que l’affaire lui a été transmise (art. 281 al. 3 CPC), le partage sur la base de la clé de répartition déterminée par le juge du divorce.
2.2 Selon l'art. 22 LFLP (dans sa teneur en vigueur depuis le 1er janvier 2017), en cas de divorce, les prestations de sortie et les parts de rente sont partagées conformément aux art. 122 à 124e du CC et 280 et 281 du CPC; les art. 3 à 5 LFLP s'appliquent par analogie au montant à transférer. À teneur de l’art. 22a al. 1 LFLP, pour chaque conjoint, la prestation de sortie à partager correspond à la différence entre la prestation de sortie, augmentée des avoirs de libre passage existant éventuellement au jour de l'introduction de la procédure de divorce, et la prestation de sortie augmentée des avoirs de libre passage existant éventuellement au moment de la conclusion du mariage. Pour ce calcul, on ajoute à la prestation de sortie et à l'avoir de libre passage existant au moment de la conclusion du mariage les intérêts dus au jour de l'introduction de la procédure de divorce. Les paiements en espèces et les versements en capital effectués durant le mariage ne sont pas pris en compte (art. 22a al. 1 LFLP).
2.3 En cas de divorce ou de dissolution judiciaire du partenariat enregistré avant la survenance d'un cas de prévoyance, le versement anticipé reçu de l'institution de prévoyance et investi dans un bien immobilier pendant le mariage est considéré comme une prestation de libre passage et doit être partagé conformément aux art. 123 CC, 280 et 281 CPC et 22 à 22b LFLP (art. 30c al. 6 LPP, dans sa teneur en vigueur depuis le 1er janvier 2017).
Pour déterminer le montant de la prestation de sortie à partager au moment du divorce, il y a donc lieu d'ajouter le montant du versement anticipé, qui conserve sa valeur nominale jusqu'au divorce. Toutefois, seuls sont pris en considération les montants qui font l'objet, au moment du divorce, d'une obligation de remboursement au sens de l'art. 30d LPP (ATF 135 V 324 consid. 5.1; ATF 132 V 347 consid. 3.3.; voir aussi ATF 128 V 230 consid. 3b et 3c et les références).
2.4 Par ailleurs, selon les art. 8a de l'ordonnance fédérale sur le libre passage dans la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité du 3 octobre 1994 (ordonnance sur le libre passage, OLP - RS 831.425) et 12 de l'ordonnance fédérale sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité, du 18 avril 1984 (OPP 2 - RS 831.441.1), le taux d'intérêt applicable aux prestations de sortie et de libre passage acquises au moment de la conclusion du mariage et aux versements uniques effectués jusqu’au moment du divorce est de 4% jusqu'au 31 décembre 2002, 3.25% en 2003, 2.25% en 2004, 2.5% de 2005 à 2007, 2.75% en 2008, 2% de 2009 à 2011, 1.5% de 2012 à 2013, 1.75% de 2014 à 2015, 1.25% en 2016, 1% de 2017 à 2023 et 1.25% dès le 1er janvier 2024.
Si le règlement de l'institution de prévoyance prévoit un taux d'intérêt supérieur pour l'avoir de vieillesse, ce taux est alors applicable (arrêt du Tribunal fédéral 9C_149/2017 du 10 octobre 2017 consid. 5.1).
2.5 Que la prestation de prévoyance due au conjoint créancier constitue un avoir de prévoyance auprès d'une institution de prévoyance ou un avoir de libre passage auprès d'une institution de libre passage, le principe du calcul continu des intérêts déduit de l'art. 2 al. 3 LFLP doit s'appliquer sans distinction, le taux prévu par l'art. 12 OPP 2 étant déterminant, à défaut de taux réglementaire plus élevé (arrêt du Tribunal fédéral 9C_149/2017 du 10 octobre 2017 consid. 5.2.4).
3.
3.1 En l’espèce, le juge de première instance a ordonné le partage par moitié des prestations de sortie acquises durant le mariage par les demandeurs. Les dates pertinentes sont, d’une part, le 8 mai 2009, date du mariage, d’autre part le 26 mai 2023, date du dépôt de la demande en divorce.
3.2 Selon les documents produits, la prestation acquise pendant le mariage par le demandeur est de CHF 68’263.85 (CHF 44'525.90 + CHF 10'344.13 - CHF 9'027.17 – CHF 579.02 + CHF 23’000.- [retrait anticipé]), tandis que celle acquise par la demanderesse est de CHF 1'476.75, les intérêts ayant déjà été calculés par les institutions de prévoyance défenderesses. Ainsi le demandeur doit à son ex-épouse le montant de CHF 34'131.90 (CHF 68'263.85 : 2) et celle-ci doit à celui-là le montant de CHF 738.40 (CHF 1'476.75 : 2), de sorte que c’est le demandeur qui doit à la demanderesse le montant de CHF 33'393.50 (CHF 34'131.90 – CHF 738.40).
3.3 Conformément à la jurisprudence, depuis le jour déterminant pour le partage jusqu'au moment du transfert de la prestation de sortie ou de la demeure, le conjoint divorcé bénéficiaire de cette prestation a droit à des intérêts compensatoires sur le montant de celle-ci. Ces intérêts sont calculés au taux minimum légal selon l'art. 12 OPP 2 ou selon le taux réglementaire, si celui-ci est supérieur (ATF 129 V 255 consid. 3).
3.4 Aucun émolument ne sera perçu, la procédure étant gratuite (art. 73 al. 2 LPP et 89H al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA-GE - E 5 10).
***
PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :
1. Invite la CPC à transférer, du compte de B______, AVS n°1______, la somme de CHF 33'393.50 à SWISSLIFE en faveur de A______, AVS n°2______, ainsi que des intérêts compensatoires au sens des considérants, dès le 26 mai 2023 jusqu'au moment du transfert.
2. L’y condamne en tant que de besoin.
3. Dit que la procédure est gratuite.
4. Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.
La greffière
Diana ZIERI |
| La présidente
Karine STECK |
Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le