Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public
ATAS/389/2025 du 16.05.2025 ( CHOMAG ) , ADMIS
En droit
rÉpublique et | canton de genÈve | |
POUVOIR JUDICIAIRE
| ||
A/3792/2024 ATAS/389/2025 COUR DE JUSTICE Chambre des assurances sociales | ||
Arrêt du 16 mai 2025 Chambre 9 |
En la cause
A______
| recourant |
contre
OFFICE CANTONAL DE L'EMPLOI
| intimé |
A. a. A______ (ci-après : l'assuré), né le ______ 1992, ressortissant du Kosovo et détenteur d'un permis C, a fait sa scolarité au Kosovo où il a obtenu un baccalauréat. Il ne possédait pas d'autre diplôme. Après son arrivée en Suisse, il a travaillé en tant que réassortisseur, agent d'entretien, magasinier, ouvrier de production et de conditionnement, opérateur en industrie et aide-peintre. Il a exercé en dernier lieu la profession de peintre en bâtiment pour la société B______ SA à un taux de 100%, avant de subir un accident qui lui a valu un arrêt de travail. Selon un test « FIDE » du 6 juillet 2021, le niveau de français de l'assuré était B1 pour parler et comprendre ainsi que pour lire et écrire.
b. Le 30 octobre 2023, l'assuré s’est inscrit auprès de l'office régional de placement (ci-après : ORP) en vue de retrouver un emploi à plein temps. Il a sollicité l'indemnité de chômage depuis le 27 octobre 2023.
c. Un délai-cadre d'indemnisation a été ouvert en sa faveur par la caisse cantonale genevoise de chômage (ci-après : CCGC) du 27 octobre 2023 au 26 octobre 2025.
d. Le 16 novembre 2023, un contrat d'objectifs d'emploi a été établi par l'ORP, prévoyant un minimum de dix recherches d'emploi par mois. Les activités recherchées concernaient des postes de logisticien, aide-peintre et employé de nettoyage.
e. À la suite d'un dépôt de demande de prestations d'assurance-invalidité auprès de l'office de l'assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : OAI), le recourant a reçu un projet de décision du 13 mars 2024, lui refusant une rente d'invalidité et des mesures professionnelles. Il ressortait de l'instruction médicale que l'incapacité de travail de l'assuré était de 100% dans son activité habituelle dès le 2 février 2023. En revanche, il présentait une capacité de travail complète dans une activité adaptée à son état de santé dès le 1er septembre 2023.
f. Du 11 mars au 19 juin 2024, l'assuré a suivi la mesure « Ygeia – coaching emploi limitation de santé » auprès de la Fondation Intégration pour tous (ci-après : fondation IPT), dans le but de déterminer son employabilité, d'élaborer un projet professionnel adapté aux éventuelles restrictions médicales et de favoriser son placement sur le marché du travail.
Selon le rapport de fin de mesure du 21 juin 2024 de la fondation IPT, l'assuré avait occupé le poste de chauffeur accompagnateur du 21 mai au 14 juin 2024 à temps plein. Il était « provisoirement éloigné du marché de l'emploi », avec des « cibles professionnelles réalistes et réalisables avec octroi de mesure(s) sur une durée de six mois maximum ». Selon les renseignements médicaux pris dans le cadre du bilan socioprofessionnel, l'assuré ne devait pas : avoir de station debout prolongée ; marcher sur un terrain irrégulier ; monter et descendre des escaliers ; effectuer un travail sur une échelle ou un escabeau.
g. Du 17 juin et 30 août 2024, l'assuré a suivi un stage de requalification auprès de l'association Réalise, dans le but de développer de nouvelles compétences en lien avec ses restrictions.
Selon l'accord d'objectifs du 17 juillet 2024 relatif au stage précité, l'assuré suivait une formation dans le secteur « entretiens extérieurs ». Les objectifs à l'entrée étaient les suivants : acquérir des compétences professionnelles en voirie ; avoir une expérience valorisée par une lettre de recommandation ; actualiser le curriculum vitae ; évaluer la capacité physique pour un métier de voirie (limite de port de charge). Le projet professionnel cible était « employé de voirie ».
Le certificat de travail du 9 septembre 2024 de l'association Réalise mentionnait que les principales activités de l'assuré durant le stage étaient les suivantes : entretien des places de jeux dans les écoles et les parcs (balayage, nettoyage des poubelles, vérification des installations) ; taille de haies et de végétaux, entretien de massifs, tonte et débroussaillage ; nettoyage extérieur ; nettoyage de déchetteries ; gestion des déchets.
B. a. Le 28 août 2024, à 10h27, C______, chef de groupe au sein de l'ORP et conseiller en personnel de l'assuré, a transmis à ce dernier une demande de candidature du même jour de l'ORP lui indiquant qu'il devait postuler d'ici au 29 août 2024 au plus tard pour l'intitulé du poste « îlotier vert », à D______. Il était indiqué que l'assuré devait notamment respecter les instructions concernant la forme de la postulation, à savoir l'envoi par courriel de son dossier de candidature à l'adresse e-mail « oce.de.tsi@etat.ge.ch ». Le courrier stipulait par ailleurs que la loi prévoyait la prise de sanctions touchant l'indemnisation en cas de non-respect des instructions.
Était annexé à la demande de candidature un descriptif de l'emploi d'îlotier vert. Sous l'intitulé « critères impératifs », il était indiqué que le candidat devait être « au bénéfice d'une formation commerciale et/ou technique de niveau CFC, dans le domaine de la gestion des déchets », être « très à l'aise dans les relations à la clientèle », posséder « une bonne capacité rédactionnelle » et maîtriser « les outils bureautiques usuels (MSOffice) ». Quant au profil recherché, il était mentionné que « [c]ette fonction [requérait] d'être au bénéfice d'une formation commerciale et/ou technique de niveau CFC, idéalement complétée par une formation en gestion des déchets et/ou relation clientèle » et qu'il fallait disposer « d'une expérience d'environ trois ans dans l'organisation et l'animation de rencontres sectorielles en collaboration avec des actrices et acteurs économiques, sociaux et/ou environnementaux, ainsi que d'une expérience en lien avec le développement durable », être « capable de communiquer de manière non-violente et de convaincre tous types de publics », ainsi que de maîtriser « les outils bureautiques usuels (MSOffice) ».
b. Le 29 août 2024, à 18h54, en réponse au courriel susmentionné, l'assuré a informé C______ qu'il cherchait depuis la veille l'offre assignée sur le site de la ville de D______, mais qu'il ne la trouvait pas, pensant qu'elle avait dû être supprimée. Il ne parvenait pas à postuler sans le numéro de référence.
c. Le 30 août 2024, l'ORP a adressé un courrier à l'assuré ayant la même teneur que celui du 28 août 2024, avec un délai de postulation fixé au 29 août 2024 pour le même poste d'îlotier vert. Il était mentionné que la postulation devait se faire par envoie de courriel à l'adresse e-mail « oce.de.tsi@etat.ge.ch ».
d. Par courriel du 30 août 2024, à 9h58, C______ a répondu à l'assuré, en lui indiquant le numéro de référence du poste et qu'il devait envoyer son dossier directement au service de l'employeur de l'ORP comme indiqué dans l'annonce, soit à l'adresse e-mail « oce.de.tsi@etat.ge.ch ». Si l'assuré ne trouvait pas l'annonce sur le site de la ville de D______, c'était parce que celle-ci ne se trouvait pas encore sur le site. Il était rappelé que l'assuré devait postuler au 29 août 2024 selon la forme stipulée dans le descriptif d'emploi.
e. Le même jour, par retour de courriel, l'assuré a répondu : « désolé, je ne savais pas (…) depuis avant-hier [j'essayais] de voir sur le site de la ville de D______. Pardonnez-moi. Je vais envoyer aujourd'hui alors ».
f. Par courriel du même jour, il a envoyé son dossier de candidature à l'adresse e-mail susmentionnée.
g. À partir du mois d'août 2024, l'assuré a, dans le cadre de ses recherches d'emploi, élargi le champ des activités ciblées, postulant notamment à des postes dans le domaine de la voirie.
h. Par courrier du 4 septembre 2024, la direction juridique de l'office cantonal de l'emploi (ci-après : OCE) a invité l'assuré à faire valoir son droit d'être entendu en produisant des observations et les justificatifs dont il disposait, à la suite de l'absence de remise de son dossier de candidature pour le poste d'îlotier vert à la mairie de la ville de D______.
Ledit courrier a été envoyé à l'adresse donnée par l'assuré lors de son inscription auprès de l'ORP.
i. Le courrier du 4 septembre 2024 a été adressé en retour à l'OCE.
j. Par décision du 16 septembre 2024, l'OCE a prononcé une suspension d'une durée de 31 jours du droit de l'assuré aux indemnités de chômage dès le 30 août 2024, dès lors que l'assuré n'avait pas fait acte de candidature pour l'emploi d'îlotier vert auprès de la mairie de la ville de D______, lequel lui avait été assigné le 28 août 2024 avec un délai de postulation au 29 août 2024. Invité à s'exprimer à ce propos, l'assuré n'avait pas pu prendre connaissance de cette demande de renseignements puisque le courrier de la direction juridique, envoyé à l'adresse communiquée par l'assuré lors de son inscription à l'ORP, était revenu en retour, faute d'adresse valable. L'assuré s'étant privé d'un emploi convenable, il avait ainsi commis une faute grave.
k. Le 4 octobre 2024, l'assuré, aidé par son conseiller, s'est opposé à la décision précitée, demandant à l'OCE d'annuler leur décision. Lors de son entretien du 28 août 2024 avec son conseiller, ce dernier l'a assigné au poste d'îlotier à la mairie de D______ avec un délai court, soit au 29 août 2024. Malheureusement, il avait mal compris les instructions, pensant devoir directement postuler sur le site de la mairie de D______, raison pour laquelle il avait contacté son conseiller en lui indiquant qu'il ne trouvait pas l'annonce. Il se disait désolé du retard et trouvait « dommageable » de se voir infliger une sanction pour faute grave alors qu'il avait finalement postulé, avec un jour de retard en raison de l'incompréhension sur l'adresse d'envoi du dossier. Il était très motivé par ce poste puisqu'il correspondait à ce qu'il recherchait. Il demandait à l'OCE de faire preuve d'indulgence au vu de sa bonne foi. Par ailleurs, il se trouvait en vacances du 2 au 23 septembre 2024, raison pour laquelle il n'avait pas pu faire valoir son droit d'être entendu.
À l'appui de son opposition, l'assuré a joint une copie du courriel du 30 août 2024 envoyé à l'OCE contenant son dossier de candidature au poste d'îlotier vert à D______.
l. Par décision sur opposition du 16 octobre 2024, l'OCE a rejeté l'opposition précitée et confirmé la décision du 16 septembre 2024. L'obligation de l'assuré était de trouver un emploi afin de quitter le chômage. En postulant tardivement, soit une fois que le poste était fermé, l'assuré avait fait échouer une possibilité d'emploi convenable lui permettant de réduire le dommage causé à l'assurance-chômage. L'argument de l'assuré selon lequel il pensait devoir directement postuler sur le site internet de la mairie de la ville de D______ ne saurait justifier son manquement puisque toutes les informations requises pour postuler étaient clairement indiquées sur l'assignation de l'ORP.
C. a. Par acte du 14 novembre 2024, l'assuré a interjeté recours par-devant la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : chambre de céans) contre cette décision sur opposition, concluant à son annulation, subsidiairement à la diminution de la quotité de la sanction prononcée à son encontre et, plus subsidiairement, au renvoi de la cause à l'OCE pour nouvelle appréciation de la quotité de suspension des indemnités de chômage. En substance, l'emploi d'îlotier vert assigné par l'ORP n'était pas convenable au sens de la loi, dans la mesure où il ne disposait pas de la formation nécessaire ni d'expériences préalables en lien avec le poste, de sorte qu'il ne pouvait lui être reproché aucune faute grave. Lors de l'assignation de cet emploi le 28 août 2024, il n'avait pas pris conscience que cet emploi n'était pas adapté à son profil. Même si l'emploi assigné devait être jugé convenable, aucune faute grave ne saurait lui être imputée puisqu'il convenait de prendre en compte sa bonne foi et sa sincère volonté de respecter les règles ainsi que ses efforts pour retrouver un emploi et limiter le dommage causé à la caisse de chômage. L'intimé avait en outre omis de prendre en considération sa fiabilité envers la caisse de chômage et son attitude jusque-là irréprochable, ses difficultés à maitriser la langue française ainsi que la réussite de son stage chez Réalise.
b. Dans sa réponse du 13 décembre 2024, l'intimé a conclu au rejet du recours, le recourant n'apportant aucun élément nouveau permettant de revoir la décision précitée. Il a en outre précisé que le délai pour déposer la candidature au poste d'îlotier vert auprès de la ville de D______ arrivait à échéance le 29 août 2024 et que ladite offre avait été retirée dès le 30 août 2024, raison pour laquelle le recourant devait postuler avant le 30 août 2024 et qu'il avait été considéré qu'il avait laissé échapper une possibilité d'emploi convenable.
c. Le recourant a renoncé à répliquer.
1.
1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité, du 25 juin 1982 (loi sur l’assurance-chômage, LACI - RS 837.0).
Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.
1.2 La procédure devant la chambre de céans est régie par les dispositions de la LPGA, applicable par le renvoi de l'art. 1 al. 1 LACI, et de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).
Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable (art. 56 ss LPGA et 62 ss LPA).
2. Le litige porte sur le bien-fondé de la décision de suspension du recourant à l'indemnité de chômage, de 31 jours, prononcée en lien avec l'absence de postulation dans le délai au poste d'îlotier vert qui lui a été assigné le 28 août 2024.
3.
3.1 Conformément à l'art. 8 al. 1 LACI, l'assuré a droit à l'indemnité de chômage : s’il est sans emploi ou partiellement sans emploi (art. 10 ; let. a) ; s’il a subi une perte de travail à prendre en considération (art. 11 ; let. b) ; s’il est domicilié en Suisse (art. 12 ; let. c) ; s’il a achevé sa scolarité obligatoire et qu’il n’a pas encore atteint l’âge de référence fixé à l'art. 21 al. 1 loi fédérale sur l’assurance-vieillesse et survivants du 20 décembre 1946 (LAVS - RS 831.10 ; let. d) ; s’il remplit les conditions relatives à la période de cotisation ou en est libéré (art. 13 et 14 ; let. e) ; s’il est apte au placement (art. 15 ; let. f), et s’il satisfait aux exigences du contrôle (art. 17 ; let. g).
Selon l'art. 17 LACI, l'assuré qui fait valoir des prestations d’assurance doit, avec l’assistance de l’office du travail compétent, entreprendre tout ce qu’on peut raisonnablement exiger de lui pour éviter le chômage ou l’abréger. Il lui incombe, en particulier, de chercher du travail, au besoin en dehors de la profession qu’il exerçait précédemment. Il doit pouvoir apporter la preuve des efforts qu’il a fournis (al. 1). L'assuré est tenu d'accepter tout travail convenable qui lui est proposé (al. 3, 1ère phr.).
À teneur de l'art. 16 LACI, en règle générale, l'assuré doit accepter immédiatement tout travail en vue de diminuer le dommage (al. 1). N'est notamment pas réputé convenable et, par conséquent, est exclu de l'obligation d'être accepté, tout travail qui ne tient pas raisonnablement compte des aptitudes de l'assuré ou de l'activité qu'il a précédemment exercée (al. 2 let. b). L'art. 16 al. 3bis LACI précise que l'al. 2 let. b ne s'applique pas aux personnes de moins de 30 ans.
La référence aux capacités de travail au sens de l'art. 16 al. 2 let. b LACI vise avant tout à éviter un surmenage (Überforderung) de la personne assurée en ce qui concerne ses capacités physiques et mentales ainsi que ses aptitudes et connaissances professionnelles, alors qu'un sous-emploi (Unterbeanspruchung) ne constitue pas une situation inacceptable. L'exigence légale d'une prise en compte appropriée de l'activité exercée jusqu'alors vise à éviter que les qualifications professionnelles ne soient perdues ou diminuées. Elle vise également à ce que la personne assurée soit en mesure d'exécuter le travail proposé de manière appropriée, car l'employeur pourrait sinon se sentir trompé et résilier le contrat de travail. Le travail peut sous-exploiter le niveau de capacité et de compétence de la personne assurée, mais il ne doit pas la surcharger. Un niveau d'aptitude élevé élargit les possibilités de placement dans un travail raisonnablement exigible (arrêt du Tribunal fédéral 8C_364/2021 du 17 novembre 2021 consid. 2.2).
Ainsi, l'art. 16 al. 2 let. b LACI vise essentiellement à permettre aux assurés de refuser les postes qui exigent des aptitudes physiques, mentales et professionnelles supérieures à celles qu'ils possèdent. Cette disposition ne protège pas les assurés qui refuseraient des emplois qui exigent moins de qualifications que celles dont ils peuvent se prévaloir. Pour être réputé convenable, un travail doit tenir « raisonnablement » compte des aptitudes des assurés. Ce critère fait référence au principe de proportionnalité (Boris RUBIN, Commentaire de la loi sur l’assurance-chômage, 2014, n. 25 et 26 ad art. 16).
En vertu de l'art. 85 al. 1 let. c LACI, les autorités cantonales déterminent si les emplois proposés aux assurés sont convenables et, dans l'affirmative, les leur assignent et leur donnent des directives selon l'art. 17 al. 3 LACI.
Il appartient aux ORP d'assigner les emplois convenables aux assurés. C'est à eux également de déterminer, préalablement, si ces emplois sont convenables (Boris BUDIN, op. cit., n. 10 ad art. 85 LACI).
3.2 Conformément à l'art. 30 al. 1 LACI, le droit de l'assuré à l'indemnité est suspendu lorsqu'il est établi que celui-ci n'observe pas les prescriptions de contrôle du chômage ou les instructions de l'autorité compétente, notamment refuse un travail convenable, ne se présente pas à une mesure de marché du travail ou l'interrompt sans motif valable, ou encore compromet ou empêche, par son comportement, le déroulement de la mesure ou la réalisation de son but (let. d).
L'art. 30 al. 3 LACI prévoit que la durée de la suspension est proportionnelle à la gravité de la faute et ne peut excéder, par motif de suspension, 60 jours, et dans le cas de l'al. 1 let. g, 25 jours.
Selon l'art. 45 de l'ordonnance sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité du 31 août 1983 (ordonnance sur l’assurance-chômage, OACI - RS 837.02), le délai de suspension dans l’exercice du droit à l’indemnité prend effet à partir du premier jour qui suit l’acte ou la négligence qui fait l’objet de la décision (al. 1 let. b). La suspension dure de 1 à 15 jours en cas de faute légère (al. 3 let. a), de 16 à 30 jours en cas de faute de gravité moyenne (al. 3 let. b), et de 31 à 60 jours en cas de faute grave (al. 3 let. c). Il y a faute grave lorsque, sans motif valable, l'assuré abandonne un emploi réputé convenable sans être assuré d'obtenir un nouvel emploi, ou qu'il (al. 4 let. a) refuse un emploi réputé convenable (al. 4 let. b).
D'après la jurisprudence, l'art. 30 al. 1 let. d LACI trouve application non seulement lorsque l'assuré refuse expressément un travail convenable qui lui est assigné, mais également déjà lorsqu'il s'accommode du risque que l'emploi soit occupé par quelqu'un d'autre ou fait échouer la perspective de conclure un contrat de travail (ATF 122 V 34 consid. 3b ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_225/2023 du 6 mars 2024 consid. 3.1). Selon les circonstances, la réaction tardive de l'assuré à l'injonction de l'ORP de prendre contact avec un employeur potentiel peut être assimilé à un refus d'emploi et, partant, considéré comme une faute grave au sens de l'art. 45 al. 4 let. b OACI (arrêts du Tribunal fédéral 8C_225/2023 du 6 mars 2024 consid. 3.1 ; 8C_446/2020 du 28 janvier 2021 consid. 3.2).
Le but de la suspension du droit à l’indemnité, dans l’assurance-chômage, vise à faire participer l’assuré de façon équitable au dommage qu’il cause à cette assurance sociale, en raison d’une attitude contraire aux obligations qui lui incombent (ATF 124 V 199 consid. 6a ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_225/2023 du 6 mars 2024 consid. 3.2). Pour autant, la suspension du droit à l'indemnité de chômage n'est pas subordonnée à la survenance d'un dommage effectif. Une telle condition ne ressort nullement du texte légal et ne se laisse pas non plus déduire d'une interprétation de celui-ci. En effet, l'art. 30 al. 1 let. d LACI sanctionne des comportements dont les conséquences préjudiciables pour l'assurance-chômage sont, pour certains, difficiles à quantifier (arrêt du Tribunal fédéral 8C_225/2023 du 6 mars 2024 consid. 3.2).
En tant qu'autorité de surveillance, le SECO a adopté un barème (indicatif) à l'intention des organes d'exécution. Quand bien même de telles directives ne sauraient lier les tribunaux, elles constituent un instrument précieux pour ces organes d'exécution lors de la fixation de la sanction et contribuent à une application plus égalitaire dans les différents cantons. Cela ne dispense cependant pas les autorités décisionnelles d'apprécier le comportement de l'assuré compte tenu de toutes les circonstances - tant objectives que subjectives - du cas concret, notamment des circonstances personnelles, en particulier de celles qui ont trait au comportement de l'intéressé au regard de ses devoirs généraux d'assuré qui fait valoir son droit à des prestations. Elles pourront le cas échéant aller en dessous du minimum prévu par le barème indicatif. Le barème du SECO prévoit une suspension d'une durée de 31 à 45 jours en cas de premier refus d'un emploi convenable d'une durée indéterminée (Bulletin LACI IC, ch. D79/2.B/1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_225/2023 du 6 mars 2024 consid. 3.3).
3.3 Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d'être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c'est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu'un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible ; la vraisemblance prépondérante suppose que, d'un point de vue objectif, des motifs importants plaident pour l'exactitude d'une allégation, sans que d'autres possibilités ne revêtent une importance significative ou n'entrent raisonnablement en considération (ATF 139 V 176 consid. 5.3 et les références). Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 324 consid. 3.2 et 3.3 ; 126 V 360 consid. 5b ; 125 V 195 consid. 2 et les références).
4.
4.1 En l'espèce, dans sa décision litigieuse, l'intimé a prononcé une suspension de 31 jours dans l'exercice du droit à l'indemnité du recourant au motif qu'il s'était privé d'un emploi convenable, commettant ainsi une faute grave. L'intimé a considéré qu'en postulant tardivement à un emploi assigné le 28 août 2024 par l'ORP, soit une fois que le poste était fermé, le recourant a fait échouer une possibilité d'emploi convenable lui permettant de réduire le dommage causé à l'assurance-chômage.
Le recourant fait valoir, au stade du recours, que l'emploi d'îlotier vert assigné par l'ORP n'était pas convenable dans la mesure où il ne dispose ni d'une formation de type CFC ni de l'expérience préalable requises, de sorte qu'il n'aurait pas dû être sanctionné.
4.2 Il n'est pas contesté que le recourant a été assigné par l'ORP le 28 août 2024 au poste d'îlotier vert et qu'il a postulé à cet emploi avec un jour de retard.
Dans une jurisprudence récente, le Tribunal fédéral a jugé, dans le cas d'un assuré qui n'avait pas postulé dans le délai fixé par l'ORP à un emploi assigné, qu'il avait violé une injonction de cet office, contrevenant ainsi à ses obligations. Cette faute tombait dans le champ d'application de l'art. 30 al. 1 let. d LACI de sorte qu'une suspension dans l'exercice du droit aux indemnités journalière devait être prononcée (arrêt du Tribunal fédéral 8C_225/2023 du 6 mars 2024, consid. 4.3.2).
Se pose dès lors la question de savoir si, en ne postulant pas dans le délai imparti au poste assigné, le recourant a violé ses obligations au sens de l'art. 30 al. 1 let. d LACI, justifiant une suspension du droit aux indemnités journalières.
4.2.1 Il convient tout d'abord de déterminer si l'emploi assigné par l'ORP pouvait être considéré comme un emploi convenable au sens de l'art. 16 LACI.
4.2.1.1. À titre liminaire, la chambre de céans rappelle qu'il appartient aux ORP d'assigner les emplois convenables aux assurés et de déterminer, préalablement, si ces emplois sont convenables (cf. art. 85 al. 1 let. c et 85b al. 1 LACI). Dans ce cadre, les ORP disposent d'une certaine marge d'appréciation pour évaluer l'adéquation d'un poste au profil de l'assuré, le juge n'intervenant qu'avec retenue dans cette appréciation. Cette retenue trouve toutefois une certaine limite lorsque l'inadéquation entre le profil exigé et les compétences de l'assuré est manifeste, ce qui requiert un examen au cas par cas.
4.2.1.2. Dans le cas d'espèce, la chambre de céans constate ce qui suit.
S'agissant des qualifications requises, le descriptif du poste d'îlotier vert mentionne des critères dits impératifs pour accéder au poste, à savoir : être au bénéfice d'une formation commerciale et/ou technique de niveau CFC, dans le domaine de la gestion des déchets ; être à l'aise dans les relations à la clientèle ; avoir une bonne capacité rédactionnelle ; maîtriser les outils bureautiques usuels (MSOffice). Le profil recherché indique notamment que la fonction précitée requiert d'être au bénéfice d'une formation commerciale et/ou technique de niveau CFC, idéalement complétée par une formation en gestion des déchets et/ou relation clientèle.
S'agissant de l'activité en tant que telle, il ressort du descriptif du poste que l'îlotier vert aurait pour mission d'informer, de sensibiliser et d'inciter le public à la bonne gestion des déchets, d'avoir la charge du contrôle de la qualité des collectes sélectives, de l'identification des contrevenants récidivistes donnant lieu à des sanctions, d'avoir la responsabilité de détecter et de remonter les informations pertinentes sous forme de rapports, contribuant à l'élaboration et à la mise en place de mesures correctives et, enfin, de participer à des réunions publiques et à l'animation de stands.
Force est de constater que l'emploi décrit précédemment ne correspond manifestement pas aux compétences du recourant.
En premier lieu, le recourant ne possède pas de diplôme, si ce n'est le baccalauréat obtenu au Kosovo, qui n'équivaut de toute évidence pas à une formation commerciale et/ou technique de niveau CFC dans le domaine de la gestion des déchets. Il ressort toutefois du descriptif du poste susmentionné que le fait de bénéficier d'une formation commerciale ou technique de niveau CFC constitue une condition nécessaire pour accéder au poste, l'annonce précisant expressément qu'une telle formation est requise, et non qu'elle serait uniquement souhaitable. Par conséquent, le recourant ne possède manifestement pas la formation nécessaire lui permettant d'accéder au poste.
De plus, il ressort du dossier que le recourant ne justifie que d'un niveau B1 en français, ce qui s'avère insuffisant pour l'exercice des tâches inhérentes à l'activité d'îlotier vert, telle que la rédaction de rapports. Il ressort par ailleurs expressément de la description de l'activité assignée que la personne recrutée doit disposer de bonnes compétences rédactionnelles, ce qui n'est pas le cas du recourant.
À cela s'ajoute le fait que le recourant n'a jamais travaillé dans le secteur d'activité de la voirie de sorte qu'il ne jouit pas d'une expérience dans le domaine qui aurait pu être qualifiée d'utile à l'emploi.
À cet égard, le stage d'environ deux mois suivi auprès de l'association Réalise ne lui permet pas non plus de se prévaloir d'une expérience pratique dans le domaine relevant des fonctions d'îlotier vert, étant précisé que même une telle expérience, à teneur du descriptif du poste, ne saurait remplacer la formation de niveau CFC exigée. En effet, si le projet professionnel cible de ce stage était certes employé de voirie, il convient de relever que le recourant a occupé un poste d'entretien manuel consistant notamment à l'entretien des places de jeux dans les écoles et les parcs, la taille de haies et de végétaux, l'entretien des massifs, la tonte et le débroussaillage, le nettoyage de déchetteries et la gestion des déchets. Or, le poste d'îlotier vert s'apparente plutôt à un poste de gestion et de coordination, avec des activités telles que la charge du contrôle de la qualité des collectes sélectives, l'identification des contrevenants récidivistes, la contribution à l'élaboration et à la mise en place de mesures coercitives ainsi que la participation à des réunions publiques. Ainsi, les compétences acquises par le recourant lors de son stage ne répondent à l'évidence pas aux exigences liées au poste assigné.
C'est le lieu de préciser que le recourant ne disposait que d'un délai d'un jour pour postuler à l'emploi assigné, ce qui ne lui laissait manifestement pas suffisamment de temps pour examiner attentivement les exigences du poste et, le cas échéant, signaler à son conseiller qu'il ne s'estimait pas qualifié pour l'assumer.
Pour les raisons qui précèdent, il y a lieu de constater que l'emploi assigné au recourant le 28 août 2024 n'est pas adapté à ses compétences dès lors qu'il ne possède pas les aptitudes et les connaissances professionnelles requises lui permettant d'exécuter le travail proposé de manière appropriée.
Compte tenu de l'ensemble des circonstances particulières du cas d'espèce, et notamment de l'inadéquation flagrante entre le profil du recourant et les qualifications exigées par l'emploi assigné, il y a lieu de s'écarter de l'appréciation de l'ORP et de constater que l'emploi n'est pas convenable au sens de l'art. 16 al. 2 let. b LACI. Par conséquent, le recourant n'était pas tenu de postuler à cet emploi.
En conclusion, en postulant tardivement, le recourant n'a pas violé une injonction de l'office au sens de l'art. 30 al. 1 let d LACI et, contrairement à ce que retient l'intimé, son comportement ne saurait donc être assimilé à un refus d'emploi et, partant, considéré comme une faute grave (art. 30 al. 1 let. d LACI cum art. 45 al. 4 let. b OACI).
C'est donc à tort que l'intimé a sanctionné le recourant.
Pour cette raison déjà, le recours doit être admis et la décision litigieuse annulée.
4.2.2 Sur un autre plan, la chambre de céans constate que l'ORP n'a laissé qu'un seul jour au recourant pour postuler à l'emploi assigné.
En effet, le 28 août 2024, le conseiller a indiqué au recourant qu’il devait envoyer sa postulation d’ici au 29 août 2024.
Or, dans l'arrêt récent précité, le Tribunal fédéral a jugé qu'un délai de quatre jours imparti par l'ORP pour postuler à un emploi assigné était très bref (cf. arrêt du Tribunal fédéral 8C_225/2023 du 6 mars 2024 consid. 4.3.2). A fortiori, un délai d'un jour pour postuler doit être considéré comme insuffisant.
En effet, un tel délai ne permet raisonnablement pas à un assuré de réagir de manière adéquate, celui-ci étant bien trop court pour permettre une analyse sérieuse du poste, une éventuelle adaptation du dossier et/ou la rédaction d'un courrier ciblé.
De plus, un délai d'un jour laisse très peu de temps pour interpeller le conseiller en cas d'éventuelles difficultés rencontrées lors de la postulation, comme ce fut le cas du recourant. Ce dernier a contacté son conseiller le 29 août 2024, soit le lendemain de l’assignation et le dernier jour du délai pour lui demander de l’aide afin de postuler. Lorsque le conseiller a pris connaissance du courriel et y a répondu, le délai était déjà échu.
Ainsi, un délai aussi bref rend difficile pour l'assuré le respect de ses obligations en tant que chômeur.
Il y a également lieu de tenir compte du comportement du recourant. À la suite de l'assignation au poste du 28 août 2024, il a immédiatement réagi en contactant le conseiller le jour même. Lorsque le conseiller a répondu au recourant, le 30 août 2024, après l'expiration du délai, en lui expliquant la procédure à suivre pour postuler et sans lui indiquer que le poste était fermé, le recourant a immédiatement envoyé son dossier de candidature, soit le jour même, tout en s'excusant auprès de son conseiller. Ce comportement démontre son intérêt réel à vouloir rechercher un emploi et sortir du chômage. En outre, le recourant a toujours respecté ses obligations de chômeur, ce retard constituant sa première inadvertance.
Il y a lieu de relever que, dans ce cas précis, le fait que le recourant ait d'abord pensé à tort qu'il devait postuler sur le site internet de la mairie de la ville de D______ alors que les informations requises pour postuler étaient clairement indiquées sur l'assignation de l'ORP n'y change rien puisque cette inattention s'inscrit dans un délai extrêmement court pour réagir, de sorte qu'il ne peut être retenu un manquement de la part du recourant.
Par conséquent, il ne saurait être reproché au recourant un comportement négligent, de sorte qu'aucune faute susceptible de tomber dans le champ d'application de l'art. 30 al. 1 let. d LACI ne peut être retenue.
Eu égard aux éléments qui précèdent, la chambre de céans considère que, pour cette raison également, le recours doit être admis.
5. Partant, le recours sera admis et la décision sur opposition du 16 octobre 2024 annulée.
Bien qu'il obtienne gain de cause, le recourant, non représenté et n'ayant pas fait valoir de frais engendrés par la procédure, n'a pas droit à des dépens (art. 61 let. g LPGA a contrario).
Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis a contrario LPGA).
******
PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :
Statuant
À la forme :
1. Déclare le recours recevable.
Au fond :
2. L'admet.
3. Annule la décision de l'intimé du 16 octobre 2024.
4. Dit que la procédure est gratuite.
5. Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.
La greffière
Sylvie CARDINAUX |
| La présidente
Eleanor McGREGOR |
Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d'État à l'économie par le greffe le