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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3716/2024

ATAS/387/2025 du 27.05.2025 ( AI ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3716/2024 ATAS/387/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 27 mai 2025

Chambre 10

 

En la cause

A______

 

 

recourant

 

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. A______ (ci-après : l'assuré), né le ______ 1966, a travaillé en dernier lieu pour l'entreprise B______ SA (ci-après : l'employeur), du
1er septembre 2017 au 31 mars 2022.

b. Le 30 juin 2022, l'office de l'assurance-invalidité (ci-après : OAI) a enregistré une demande de prestations de l'assuré, mentionnant qu'il était en incapacité totale de travail depuis le 16 décembre 2021.

c. L'OAI a procédé à l'instruction médicale du dossier, en mettant notamment en œuvre une expertise psychiatrique. Dans son rapport du 4avril 2024, l’expert a conclu que la capacité de travail de l'assuré avait été nulle entre décembre 2021 et mai 2023, mais était entière depuis le mois de juin 2023.

B. a. En date du 1er juillet 2024, l'OAI a informé l'assuré qu'il envisageait de lui octroyer une rente d'invalidité entière du 1er décembre 2022 au 31 août 2023.

b. Par courrier du 22 août 2024, l'assuré a contesté le projet de décision précité, sollicitant que la rente lui soit accordée du 19 décembre 2022 au 31 mars 2024. En substance, l'intéressé a soutenu que l'expert avait retenu de façon discrétionnaire la date du « 31 juin 2023 », alors que son psychiatre avait continué à attester d’arrêts de travail ultérieurement.

c. Par décision du 9 octobre 2024, l'OAI a alloué au recourant une rente d'invalidité entière du 1er décembre 2022 au 30 septembre 2023. Dans la motivation jointe à la décision, l'OAI a indiqué que la rente s'élevait à 100% d'une rente entière d'invalidité du 1er décembre 2022 au 31 août 2023. Il a reconnu que l'intéressé avait présenté une incapacité de travail durable à compter du 16 décembre 2021, de sorte qu'il avait droit à une rente entière à partir du 16 décembre 2022, soit à l'échéance du délai de carence. Par la suite, son état de santé s'était amélioré et il présentait une capacité de travail de 100% dans toutes activités à partir du 15 juin 2023. Ainsi, après une période d'amélioration de sa capacité de gain de trois mois, soit depuis le 1er septembre 2023, son droit à la rente s'éteignait. Les éléments évoqués à l'appui de sa contestation ne permettaient pas de modifier sa précédente appréciation.

C. a. Par acte du 8 novembre 2024, l'assuré a interjeté recours contre la décision précitée par-devant la chambre des assurances sociales de la Cour de justice. Il a conclu, sous suite de frais et dépens, principalement, à l'annulation de la décision litigieuse, à la prolongation de la période d'invalidité de trois mois, à la reconnaissance d'une invalidité totale jusqu'au 31 décembre 2023, et à la reconnaissance d'erreurs des données sources utilisées pour le calcul de sa rente. Subsidiairement, il a sollicité le renvoi de la cause à l'intimé pour contre-expertise sur les aspects médicaux et calculatoires. En substance, le recourant a reproché à l'intimé une violation de son droit d'être entendu, considérant que la décision litigieuse n'était pas suffisamment motivée. Il a également fait grief à l'intimé d'avoir rendu la décision litigieuse à l'issue d'une procédure incomplète d'administration des preuves, en occultant des éléments majeurs tels que ses incapacités de travail après le mois d'août 2023 et la reprise de son traitement médicamenteux. Il a contesté la valeur probante de l'expertise médicale, laquelle n'avait pas été diligentée dans un délai raisonnable permettant une évaluation plus précise de son état de santé au moment déterminant. Il a en outre contesté la base de calcul retenue par l'intimé pour déterminer son revenu annuel déterminant et relevé que le calcul relatif au nombre d'années de cotisations prises en compte pour l'échelle n'était pas détaillé. Il a en outre soulevé un vice de forme dans la décision du 9 octobre 2024, laquelle contenait une erreur sur la date de l'extinction de son droit à la rente, mentionnant le 31 août 2023, d'une part, et le
30 septembre 2023, d'autre part. Cette erreur était très significative et susceptible d'importantes conséquences.

Le recourant a notamment produit un rapport du 6 novembre 2024 de son psychiatre traitant.

b. Dans sa réponse du 5 décembre 2024, l'intimé a conclu à l'admission partielle du recours, en ce sens que la décision litigieuse était modifiée et octroyait au recourant une rente entière d'invalidité jusqu'au 31 décembre 2023. Il a précisé avoir soumis le rapport du 6 novembre 2024 à son service médical régional
(ci-après : SMR), lequel avait conclu que l'intéressé avait présenté une incapacité de travail totale du 23 août 2023 au 31 décembre 2023 et une capacité de travail entière dès le 1er janvier 2024, avis du 28 novembre 2024. Il n’y avait pas lieu d’allouer des dépens au recourant, qui n’était pas représenté par un mandataire professionnellement qualifié et n’avait ni allégué ni démontré avoir déployé des efforts dépassant la mesure de ce que tout un chacun consacrait à la gestion courante de ses affaires.

c. Par écriture du 7 janvier 2025, le recourant a relevé que la rente entière d'invalidité devait lui être octroyée jusqu'au 31 mars 2024, soit trois mois après le 31 décembre 2023, et être supprimée dès le 1er avril 2024, et non pas dès le
1er janvier 2024. Par ailleurs, l'intimé n'avait pas statué sur les irrégularités de calculs concernant le revenu annuel moyen déterminant. Il a sollicité l'octroi d'une indemnité de CHF 500.- pour les frais de procédure, y compris le travail personnel correspondant environ à 100 heures, sans compter l'examen des neuf cent pages produites par l'intimé. Il appartenait à la chambre de céans de déterminer si le mémoire produit, totalisant « 86 pages », dépassait ou non la mesure que tout un chacun consacrait à la gestion courante de ses affaires, étant précisé qu’il n’était pas juriste et que les certificats médicaux nécessaires à la procédure avaient été à sa charge.

d. En date du 10 février 2025, l'intimé a admis que la rente d'invalidité devait être versée jusqu'au 31 mars 2024. S'agissant du grief portant sur le calcul de la rente, il s'est référé aux déterminations de la Caisse AVS de la Fédération patronale vaudoise datée du 4 février 2025, produite en annexe, laquelle avait confirmé l'exactitude du calcul de la prestation en faveur du recourant et le bien-fondé de la décision du 9 octobre 2024. Pour le surplus, l'intimé a relevé que la décision du
9 octobre 2024 comportait effectivement une erreur dans la motivation, de sorte que cette dernière avait été corrigée, ce qui expliquait la raison pour laquelle le dossier comportait deux documents intitulés « motivation ». Il n'existait ainsi aucun vice de forme.

e. Dans ses observations du 24 février 2025, le recourant a pris acte de la détermination de l'intimé quant à la date à laquelle son droit à la rente prenait fin, soit le 31 mars 2024. Dans un souci de célérité procédurale, bien que la Caisse AVS de la Fédération patronale vaudoise n'avait pas répondu à la question des incohérences concernant ses revenus rapportés pour 2013, il acquiesçait aux données chiffrées communiquées par celle-ci. Par ailleurs, il a constaté que l'intimé n'avait pas confirmé sa demande tendant à l'absence d'allocations de dépens et n'avait pas commenté sa requête visant à l'octroi d'une indemnité de procédure de CHF 500.-. En définitive, ayant obtenu gain de cause et dans un souci d'économie de procédure, il était disposé à retirer son recours, pour autant qu'une nouvelle décision, conforme aux considérants susmentionnés, soit rendue par l'intimé dans un délai à fixer par la chambre des assurances sociales.

f. Le 20 mars 2025, l'intimé a relevé avoir fait droit aux conclusions du recourant s'agissant de son incapacité de travail et le prolongement de la rente. Il avait ainsi admis que la décision querellée devait être modifiée, en ce sens que l'intéressé avait droit à une rente entière d'invalidité jusqu'au 31 mars 2024, dite prestation étant supprimée à compter du 1er avril 2024. Dès lors qu'une procédure judiciaire était pendante, il n'était pas en mesure de rendre une nouvelle décision, comme requis par le recourant. Pour le surplus, il prenait acte du fait que l'intéressé approuvait les montants retenus par la Caisse AVS de la Fédération patronale vaudoise. Enfin, s'agissant d'une éventuelle allocation de dépens, il a considéré que le recourant, non représenté, n'avait pas fait valoir de frais engendrés par la procédure. Dans tous les cas, il ne pouvait être considéré que l'importance de l'affaire et sa complexité avait rendu nécessaire des frais ou un volume de travail excédant ce qu'un particulier pouvait ordinairement et raisonnablement prendre sur lui pour la défense de ses intérêts.

g. Le 21 mars 2025, copie de cette écriture a été transmise au recourant.

h. Sur ce, la cause a été gardée à juger.

 

 

 

 

EN DROIT

 

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à
l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales
du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur
l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 A teneur de l'art. 1 al. 1 LAI, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-invalidité, à moins que la loi n'y déroge expressément.

1.3 Le délai de recours est de 30 jours (art. 56 LPGA ; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

Interjeté dans la forme et délai prévu par la loi, le recours est recevable.

2.              

2.1 Dans la procédure juridictionnelle administrative, ne peuvent être examinés et jugés, en principe, que les rapports juridiques à propos desquels l’autorité administrative compétente s’est prononcée préalablement d’une manière qui la lie, sous la forme d’une décision. Dans cette mesure, la décision détermine l’objet de la contestation qui peut être déféré en justice par voie de recours. En revanche, dans la mesure où aucune décision n’a été rendue, la contestation n’a pas d’objet, et un jugement sur le fond ne peut pas être prononcé (ATF 131 V 164 consid. 2.1 ; 125 V 414 consid. 1a ; 119 Ib 36 consid. 1b et les références citées).

L'objet du litige dans la procédure administrative subséquente est le rapport juridique qui, dans le cadre de l'objet de la contestation déterminé par la décision, constitue, d'après les conclusions du recours, l'objet de la décision effectivement attaqué. D'après cette définition, l'objet de la contestation et l'objet du litige sont identiques lorsque la décision administrative est attaquée dans son ensemble. En revanche, lorsque le recours ne porte que sur une partie des rapports juridiques déterminés par la décision, les rapports juridiques non contestés sont certes compris dans l'objet de la contestation, mais non pas dans l'objet du litige
(ATF 131 V 164 ; 125 V 414 consid. 1b et 2 et les références citées).

Les questions qui, bien qu'elles soient visées par la décision administrative et fassent ainsi partie de l'objet de la contestation, ne sont plus litigieuses, d'après les conclusions du recours, et qui ne sont donc pas comprises dans l'objet du litige, ne sont examinées par le juge que s'il existe un rapport de connexité étroit entre les points non contestés et l'objet du litige (ATF 122 V 242 ; 122 V 34).

2.2 En l'espèce, l'intimé a fait droit aux conclusions du recourant s'agissant de la durée d’octroi de la rente entière d'invalidité, dès lors qu'il a admis que le versement de cette prestation devait se poursuivre jusqu'au 31 mars 2024 et être supprimé à compter du 1er avril 2024, comme requis par l’intéressé dans sa détermination du 7 janvier 2025.

Concernant la base de calcul de sa rente, le recourant a déclaré, dans son écriture du 24 février 2025, acquiescer aux données chiffrées communiquées par la Caisse AVS de la Fédération patronale vaudoise. Ce point n’est donc plus contesté.

Seule reste litigieuse sa demande tendant à l’octroi d’une « indemnité de procédure » de CHF 500.-, à laquelle l’intimé s’oppose.

3.             Selon l’art. 61 let. g LPGA, le recourant qui obtient gain de cause a droit au remboursement de ses frais et dépens dans la mesure fixée par le tribunal. Leur montant est déterminé sans égard à la valeur litigieuse d’après l’importance et la complexité du litige.

3.1 Le principe du droit aux dépens relève du droit fédéral (ATF 135 V 473
consid. 3.2). Or le Tribunal fédéral considère depuis longtemps que l'assuré qui agit dans sa propre cause sans l'assistance d'un avocat n'a droit à des dépens que si la complexité et l'importance de son affaire exige un investissement en temps et en argent qui dépasse le cadre de ce qu'un individu doit normalement assumer dans la gestion de ses affaires (ATF 133 III 439 consid. 4 ; 115 Ia 12 consid. 5 ; 110 V 72 consid. 7). Ce principe développé dans le contexte de l’ancienne loi fédérale d’organisation judiciaire, est applicable par analogie à l'art. 61
let. g LPGA et à l'art. 68 LTF (ATF 135 V 473 consid. 3.3 ; voir aussi
Ueli KIESER, ATSG-Kommentar, 2015, n. 198 ad art. 61 LPGA).

Les dépens comprennent une indemnité pour les frais de représentation par un avocat ou un autre mandataire qualifié. Ces frais comprennent les honoraires et débours du mandataire. Sont également compris dans les dépens les frais rendus nécessaires par une mesure d’instruction qui aurait en réalité due être ordonnée en procédure administrative par la partie intimée. Les autres frais d’une partie non représentée par un mandataire qualifié, de même que le temps qu’elle a consacré au procès, ne donnent qu’exceptionnellement droit à des dépens. Il faut que l’importance de la cause et sa complexité aient objectivement rendu nécessaires des frais ou un volume de travail excédant ce qu’un particulier peut ordinairement et raisonnablement prendre sur lui pour la défense de ses intérêts (Jean MéTRAL, in DUPONT/MOSER-SZELESS, Commentaire romand de la loi sur la partie générale des assurances sociales n. 103 ad art. 61 LPGA).

3.2 En l’occurrence, le recourant obtient certes partiellement gain de cause. Toutefois, il n’est pas représenté par un avocat, ni par un autre mandataire qualifié.

On ne saurait considérer que l’affaire présentait des difficultés particulières, étant rappelé que la question litigieuse principale portait sur la durée de l’incapacité de travail du recourant et la valeur probante de l’expertise médicale. En outre, la rédaction du recours de 24 pages (et non « 86 ») et des écritures complémentaires ne saurait justifier l’octroi de dépens. Il sera encore relevé, s’agissant du nombre de pièces composant le dossier de l’intimé, que la décision contestée repose essentiellement sur les conclusions du rapport d’expertise psychiatrique, document sur lequel le recourant s’était déjà déterminé avant l’introduction de la présente procédure. Partant, l’importance de la cause et sa complexité n’ont pas rendu nécessaires des frais ou un volume de travail excédant ce qu'un particulier doit normalement assumer dans la gestion de ses affaires.

Quant au rapport du 6 novembre 2024 du psychiatre traitant, il n’est pas fondamentalement différent de sa précédente appréciation du 7 novembre 2023, dans laquelle il avait déjà expliqué les raisons pour lesquelles il avait prolongé les arrêts de travail du recourant au-delà de l’été 2023. De surcroît, le psychiatre traitant a livré des informations contradictoires, mentionnant qu’il avait renouvelé les arrêts de travail jusqu’en janvier 2024 (rapport du 6 novembre 2024), alors que le dossier de l’intimé comprend des certificats d’incapacité de travail signés de sa part jusqu’au 23 avril 2024 (page 592). Dans ces conditions, on ne saurait retenir que ce rapport s'est révélé décisif pour la solution du litige. En conséquence, les frais de ce document, lesquels ne sont au demeurant pas chiffrés par le recourant, ne peuvent pas être mis à la charge de l’intimé.

Le recourant n’a donc pas droit à des dépens.

4.             Les considérants qui précèdent conduisent à l’admission partielle du recours. La décision du 9 octobre 2024 sera réformée en ce sens que le recourant a droit à une rente d’invalidité entière jusqu’au 31 mars 2024.

Au vu du sort du recours, il y a lieu de condamner l'intimé au paiement d'un émolument de CHF 200.- (art. 69 al. 1bis LAI).

 

 

 

 

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet partiellement.

3.        Réforme la décision du 9 octobre 2024 en ce sens que le recourant a droit à une rente d’invalidité entière jusqu’au 31 mars 2024.

4.        Met un émolument de CHF 200.- à la charge de l’intimé.

5.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

Melina CHODYNIECKI

 

La présidente

 

 

 

 

Joanna JODRY

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le