Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public
ATAS/385/2025 du 27.05.2025 ( CHOMAG ) , REJETE
En droit
rÉpublique et | canton de genÈve | |
POUVOIR JUDICIAIRE
| ||
A/3831/2024 ATAS/385/2025 COUR DE JUSTICE Chambre des assurances sociales | ||
Arrêt du 27 mai 2025 Chambre 10 |
En la cause
A______
| recourante |
contre
CAISSE CANTONALE GENEVOISE DE CHÔMAGE
| intimée |
A. a. A______ (ci-après : l'assurée), née le ______ 1984, a travaillé en dernier lieu pour l'entreprise B______ SA (anciennement société C______ SA ; ci-après : l’entreprise).
b. Selon l'extrait du registre du commerce du canton de Genève, l’entreprise est active dans le domaine immobilier, en particulier dans les domaines de la rénovation, de la construction, de la promotion, du pilotage, de la planification, du courtage, de la gérance et des investissements. D______, époux de l’assurée, en a été administrateur avec signature individuelle jusqu'au6 novembre 2024, date à laquelle ses pouvoirs ont été radiés selon la publication du 11 novembre 2024 de la feuille officielle suisse du commerce (ci-après : FOSC).
c. Le 14 mars 2024, l'assurée s'est inscrite auprès de l'office régional de placement (ci-après : ORP) de l'office cantonal de l'emploi (ci-après : OCE), mentionnant être apte au placement à 100% dès le 2 mai 2024.
d. Le 13 mai 2024, la Caisse cantonale genevoise de chômage (ci-après : la caisse) a enregistré plusieurs documents, dont :
- la demande d’indemnité remplie par l’assurée, indiquant avoir travaillé pour l’employeur à plein temps du 1er septembre 2014 au 30 avril 2024, avoir été licenciée le 29 février 2024 pour des raisons économiques, et solliciter l'indemnité journalière à compter du 1er mai 2024 ;
- l'attestation de l'employeur, aux termes de laquelle les rapports de travail avaient duré du 1er janvier 2014 au 30 avril 2024, et le dernier salaire mensuel de l’intéressée, engagée en qualité d’assistante, s'était élevé à CHF 7'583.35 ;
- le contrat de travail de l'assurée, selon lequel cette dernière avait été engagée à partir du 1er septembre 2014 au poste de responsable administrative à plein temps pour un salaire mensuel de CHF 10'000.-, versé douze fois l'an ;
- le courrier de résiliation des rapports de travail du 29 février 2024 ;
- le certificat de travail établi le 30 avril 2024 mentionnant que l'intéressée avait été engagée en qualité d'assistante du 1er janvier 2014 au 30 avril 2024 ;
- les décomptes de salaire de l'assurée pour les mois de mars 2022 à avril 2024, faisant état d'un salaire mensuel brut de CHF 10'000.-.
e. À la demande de la caisse, l'assurée lui a notamment transmis ses relevés de compte bancaire justifiant le versement de ses salaires pour les années 2022 à 2024, ses déclarations fiscales 2022 et 2023, ainsi que son extrait de compte individuel attestant des revenus déclarés.
B. a. Par décision du 10 juillet 2024, la caisse a refusé d'indemniser l'assurée, au motif que le responsable de la société pour laquelle elle avait travaillé était son époux, qui occupait une fonction dirigeante avec signature individuelle. L’intéressée avait été licenciée pour des raisons économiques et il existait un risque qu'elle consacre une partie de son temps à l'entreprise familiale afin de la sauvegarder. Par conséquent, son temps de présence sur son lieu de travail et consécutivement sa perte de travail était incontrôlable. En tant que conjointe de son employeur, elle ne pouvait pas bénéficier d'indemnités en cas de réduction d'horaire de travail. Son licenciement entrainerait la perception d'indemnités de chômage tout en évitant le refus d'octroi de la réduction de l'horaire de travail. En finalité, seule une cessation définitive des activités de l'entreprise, une rupture totale de ses liens avec celle-ci, l'accomplissement de six mois minimum dans une tierce entreprise d'une activité salariée postérieure en qualité de simple employée pourrait lui faire bénéficier d'une indemnité de chômage.
b. Le 16 septembre 2024, l'assurée s'est opposée à cette décision. Elle avait signé un contrat de travail avec l'employeur le 1er septembre 2014, alors que l’entreprise était florissante. Elle avait occupé le poste de responsable administrative moyennant le versement d'un salaire mensuel de CHF 10'000.- brut, versé douze fois l'an. Pendant près de dix ans, elle avait offert ses services à son employeur et perçu un salaire soumis aux diverses cotisations sociales. Elle s'était retrouvée sans emploi à partir du mois de mai 2024 et n'entretenait donc plus aucune relation avec l’entreprise, laquelle avait connu des difficultés financières en 2022 et avait dû licencier plus d'une quarantaine d'employés, et ce jusqu'en mai 2024. Depuis le deuxième trimestre de l'année 2024, la société luttait contre les innombrables comminations de faillite, de sorte que ses difficultés financières étaient réelles et se répercutaient fortement sur la situation financière de son époux. Ce dernier n'avait en effet pas reçu son salaire plein depuis de nombreux mois, comme attesté par le journal des salaires produits. Elle avait été la dernière collaboratrice licenciée, ce qui démontrait qu'il s'agissait de l'ultime mesure économique possible pour l’entreprise. Elle avait cessé ses activités au mois d'avril 2024 et n'entretenait plus aucun lien avec la société depuis lors. À cet égard, elle produisait douze attestations de moralité afin de démontrer qu'elle n'avait plus de lien avec l'entreprise. La suspecter de travailler en cachette pour la société et l'accuser de tenter de percevoir des indemnités chômage illicites, du simple fait que son époux était l'un des deux administrateurs de l’entreprise, remettait en question son honneur. Le refus d'octroi de l’indemnité de chômage la conduisait vers la précarité financière, étant rappelé que son mari n'était pas en mesure d’apporter un soutien financier pour les raisons exposées. Elle contestait tout risque d’abus de droit, relevant que son époux n'était pas le seul administrateur de la société, pour laquelle elle avait travaillé pendant près de dix ans et dont le sort était désormais imprévisible. Les montants retenus sur son salaire étaient bien plus importants en dix ans d'exercice que les quelques mois d'indemnités de chômage auxquelles elle avait droit. Elle avait toujours occupé une simple position de salariée et perçu à ce titre un salaire lui permettant de couvrir ses charges mensuelles, ainsi que celles de ses enfants avec lesquels elle faisait ménage commun.
c. Par décision sur opposition du 11 octobre 2024, la caisse a rejeté l'opposition. Après avoir relevé que l'attestation de l'employeur mentionnait une entrée en fonction le 1er janvier 2014 alors que le contrat de travail faisait état d'une entrée en fonction au 1er septembre 2024, elle a constaté que du 2 mai 2022 au
30 avril 2024 l’assurée avait travaillé pour le compte d’une société dans laquelle son époux jouissait d’une position assimilable à celle d’un employeur en raison de sa qualité d'administrateur. Il était manifeste qu’au 2 mai 2024 l'intéressée n'avait pas accompli une période minimale de cotisation de six mois après son départ de l'entreprise de son conjoint, tout comme il était manifeste qu'elle n'avait pas cotisé durant douze mois hors de l'entreprise conjugale. Par conséquent, elle n'avait pas droit au paiement de l'indemnité de chômage à compter du 2 mai 2024. Dès lors que l’entreprise continuait ses activités, il convenait d'admettre que l’époux de l’assurée conservait à tout moment la faculté de réengager sa femme dans la société. Cela était suffisant pour que le droit à l'indemnité de chômage doive être nié à l'intéressée, en raison d'un risque de contournement de la loi. Son mari disposait effectivement d'un pouvoir de décision déterminant, qui excluait tout droit pour l'intéressée aux indemnités de chômage, dès lors que, bien que licenciée, elle conservait des liens avec l’entreprise en raison de sa situation maritale. Pour le surplus, il était relevé, à titre informatif, que la faillite de la société pourrait mettre fin à la position assimilable à celle d'un employeur du conjoint de l'opposante, à condition qu'il ne soit pas nommé liquidateur.
C. a. Par courrier du 12 novembre 2024 adressé à la caisse, l'assurée a contesté la décision précitée. En substance, elle a exposé que son époux n'exerçait plus de fonction d'administrateur au sein de l'entreprise et qu'elle n'avait donc plus aucun lien formel ou indirect avec la gestion de la société. Elle sollicitait le versement des prestations de chômage, y compris le versement rétroactif dû à partir du 1er mai 2024, étant rappelé son statut de personne sans emploi depuis lors.
Elle a notamment produit un extrait du registre du commerce de l’entreprise.
b. Le 18 novembre 2024, la caisse a transmis à la chambre des assurances sociales de la Cour de justice le courrier de l'intéressée. Elle a précisé qu'au vu des nouveaux éléments remis par cette dernière, le dossier serait réexaminé à compter du 12 novembre 2024, dès lors que son époux avait été radié au registre du commerce le 11 novembre 2024.
c. Dans sa réponse du 30 janvier 2025, l'intimée a conclu au rejet du recours et à la confirmation de la décision sur opposition du 11 octobre 2024. Elle a rappelé que la recourante était l'épouse d'un des administrateurs de l'entreprise, société dans laquelle elle avait travaillé jusqu'au 30 avril 2024. Or, elle faisait valoir son droit aux indemnités suite à sa perte d'emploi au sein de ladite entreprise, ce qui excluait d'emblée son droit aux indemnités de chômage à cette époque. Cela dit, suite au recours de l'intéressée accompagné d'un nouvel extrait du registre du commerce de l'entreprise, un droit aux indemnités chômage avait été ouvert en sa faveur le 6 novembre 2024, date de la radiation de son époux en tant qu'administrateur audit registre. Aucun versement rétroactif ne pouvait avoir lieu, au vu du statut de son conjoint qui disposait alors d'un pouvoir décisionnel déterminant et conservait ainsi la faculté de la réengager. Elle a encore précisé que le dossier de la recourante ne contenait pas les formulaires « Indications de la personne assurée » relatifs aux mois de juin à août 2024, documents qui devaient être remis dans un délai de trois mois suivant la période à laquelle ils se rapportaient, sous peine de péremption. L'attention de la recourante avait été explicitement attirée sur ce point. Aussi, dans l'hypothèse ou un droit à des indemnités de chômage était reconnu, le droit aux indemnités des périodes de contrôle des mois de juin à août 2024 serait, en l'état du dossier, périmé.
d. La recourante ne s'est pas manifestée dans le délai octroyé pour répliquer et pour consulter son dossier.
e. Sur ce, la cause a été gardée à juger.
1.
1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du
6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur
l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité, du 25 juin 1982 (loi sur l’assurance-chômage, LACI - RS 837.0).
Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.
1.2 Interjeté dans les forme et délai prévus par la loi auprès d'une autorité incompétente qui l'a transmis à la chambre de céans, le recours est recevable
(art. 56 LPGA ; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du
12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).
2. Le litige porte sur le droit de la recourante à l’indemnité de chômage pour la période du 1er mai au 5 novembre 2024, étant rappelé que l’intimée a informé la chambre de céans, dans son écriture de réponse du 30 janvier 2025, qu’un droit avait été ouvert en faveur de la recourante le 6 novembre 2024, date de la radiation au registre du commerce de son époux en tant qu’administrateur.
3. En vertu de l'art. 8 al. 1 LACI, l'assuré a droit à l'indemnité de chômage s'il est sans emploi ou partiellement sans emploi (let. a), s'il a subi une perte de travail à prendre en considération (let. b), s'il est domicilié en Suisse (let. c), s'il a achevé sa scolarité obligatoire et qu’il n’a pas encore atteint l’âge de référence fixé à
l’art. 21 al. 1 de la loi fédérale sur l’assurance-vieillesse et survivants du
20 décembre 1946 (LAVS - RS 831.10) (let. d), s'il remplit les conditions relatives à la période de cotisation ou en est libéré (let. e), s'il est apte au placement (let. f) et s'il satisfait aux exigences du contrôle (let. g). Ces conditions sont cumulatives (ATF 124 V 218 consid. 2).
Selon l'art. 31 al. 3 LACI, n'ont pas droit à l'indemnité en cas de réduction de l'horaire de travail : les travailleurs dont la réduction de l’horaire de travail ne peut être déterminée ou dont l’horaire de travail n’est pas suffisamment contrôlable (let. a) ; le conjoint de l’employeur, occupé dans l’entreprise de celui-ci (let. b) ; les personnes qui fixent les décisions que prend l'employeur - ou peuvent les influencer considérablement - en qualité d'associé, de membre d'un organe dirigeant de l'entreprise ou encore de détenteur d'une participation financière de l'entreprise ; il en va de même des conjoints de ces personnes, qui sont occupés dans l’entreprise (let. c).
3.1 Le Tribunal fédéral a jugé que les exclusions de l'art. 31 al. 3 LACI s'appliquent par analogie à l'octroi de l'indemnité de chômage. Un travailleur qui jouit d'une situation professionnelle comparable à celle d'un employeur n'a pas droit à l'indemnité de chômage lorsque, bien que licencié formellement par une entreprise, il continue de fixer les décisions de l'employeur ou à influencer celles-ci de manière déterminante. Le Tribunal fédéral a identifié un risque de contournement de la clause d'exclusion de l'art. 31 al. 3 let. c LACI lorsque dans un contexte économique difficile, ces personnes procèdent à leur propre licenciement et revendiquent l'indemnité de chômage tout en conservant leurs liens avec l'entreprise. Dans une telle configuration, en effet, il est toujours possible pour elles de se faire réengager dans l'entreprise ultérieurement et d'en reprendre les activités dans le cadre de son but social. Ce n'est pas l'abus avéré comme tel que la loi et la jurisprudence entendent sanctionner, mais le risque d'abus que représente le versement d'indemnités à un travailleur jouissant d'une situation comparable à celle d'un employeur ; il suffit qu'une continuité des activités soit possible pour que le droit doive être nié en raison d'un risque de contournement de la loi (ATF 123 V 234 consid. 7b/bb ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_108/2021 du 9 juillet 2021 consid. 3 ; 8C_384/2020 du 22 décembre 2020 consid. 3.1).
La situation est en revanche différente quand le salarié, se trouvant dans une position assimilable à celle de l'employeur, quitte définitivement l'entreprise en raison de la fermeture de celle-ci ; en pareil cas, on ne saurait parler d'un comportement visant à éluder la loi. Il en va de même lorsque l'entreprise continue d'exister mais que le salarié, par suite de la résiliation de son contrat, rompt définitivement tout lien avec la société. Dans un cas comme dans l'autre, l'intéressé peut en principe prétendre à des indemnités de chômage
(ATF 123 V 234 consid. 7b/bb ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_448/2018 du
30 septembre 2019 consid. 3).
Le fait de subordonner, pour un travailleur jouissant d'une position analogue à celle d'un employeur, le versement des indemnités de chômage à la rupture de tout lien avec la société qui l'employait, peut certes paraître rigoureux selon les circonstances du cas d'espèce. Il ne faut néanmoins pas perdre de vue les motifs qui ont présidé à cette exigence. Il s’est agi avant tout de permettre le contrôle de la perte de travail du demandeur d’emploi. Il y a lieu de garder à l'esprit que l'assurance-chômage n'a pas pour vocation à indemniser la perte ou les fluctuations de gain liées à une activité indépendante mais uniquement la perte de travail, déterminable et contrôlable, du travailleur ayant un simple statut de salarié qui, à la différence de celui occupant une position décisionnelle, n'a pas le pouvoir d'influencer la perte de travail qu'il subit et pour laquelle il demande l'indemnité de chômage (arrêts du Tribunal fédéral 8C_163/2016 du 17 octobre 2016
consid 4.2 et 8C_295 2014 du 7 avril 2015 consid. 4 ; C 156/06 du
7 décembre 2006 consid. 2).
Il n'y a pas de place, dans ce contexte, pour un examen au cas par cas d'un éventuel abus de droit de la part d'un assuré. Lorsque l'administration statue pour la première fois sur le droit à l'indemnité d'un chômeur, elle émet un pronostic quant à la réalisation des conditions prévues par l'art. 8 LACI. Aussi longtemps qu'une personne occupant une fonction dirigeante maintien des liens avec sa société, non seulement la perte de travail qu'elle subit est incontrôlable mais la possibilité subsiste qu'elle décide d'en poursuivre le but social. Dans un tel cas de figure, il est donc impossible de déterminer si les conditions légales sont réunies sauf à procéder à un examen a posteriori de l'ensemble de la situation de l'intéressé, ce qui est contraire au principe selon lequel cet examen a lieu au moment où il est statué sur les droits de l'assuré. Au demeurant, ce n'est pas l'abus avéré comme tel que la loi et la jurisprudence entendent sanctionner ici, mais le risque d'abus que représente le versement d'indemnités à un travailleur jouissant d'une situation comparable à celle d'un employeur (arrêts du Tribunal fédéral C 163/04 du 29 août 2005 et C 92/02 du 14 avril 2003).
3.2 La jurisprudence étend l'exclusion du conjoint du droit à l'indemnité en cas de réduction de l'horaire de travail (art. 31 al. 3 let. b LACI) au droit à l'indemnité de chômage (ATF 145 V 200). Ainsi, le droit à l'indemnité de chômage est nié au chômeur qui a été employé par l'entreprise de son conjoint dans la mesure où ce dernier reste lié à ladite entreprise. D'après la jurisprudence, il existe dans ce cas une possibilité d'un réengagement dans l'entreprise - même si elle est seulement hypothétique et qu'elle découle d'une pure situation de fait - qui justifie la négation du droit à l'indemnité de chômage. Cela n'est plus le cas, si le conjoint dirigeant quitte définitivement l'entreprise en raison de la fermeture de cette dernière ou rompt définitivement tout lien avec l'entreprise qui continue d'exister (ATF 123 V 234 consid. 7b/bb ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_163/2016 du
17 octobre 2016 consid 4.2 et 8C_231/2012 du 16 août 2012 ; Boris RUBIN, Commentaire de la loi sur l'assurance-chômage, 2014, n. 24 ss ad art. 10).
Il est admis que les assurés occupant une position assimilable à celle d'un employeur et leur conjoint ont droit à l'indemnité de chômage s'ils se retrouvent au chômage après avoir été salariés d'une entreprise tierce (dans laquelle ils n'ont pas eu le statut de dirigeant), à la condition toutefois qu'ils l'aient été durant au moins six mois (arrêt du Tribunal fédéral C 171/03 du 31 mars 2004
consid. 2.3.2). Lorsqu'une telle durée d'emploi comme salarié sans position dirigeante dans une entreprise tierce a été atteinte, il faut admettre que le rapport de travail ouvrant le droit au chômage n'a pas constitué un masque à une réduction de l'horaire de travail (Boris RUBIN, op. cit., n. 35 ad art. 10).
3.3 Selon la Directive LACI relative au marché du travail et à l’assurance‑chômage édictée par le Secrétariat d’État à l’économie (Bulletin LACI), la personne travaillant dans une entreprise dans laquelle son conjoint occupe une position assimilable à celle d'un employeur n’a pas droit à l’indemnité de chômage (Bulletin LACI B21).
La personne qui, durant son délai-cadre d'indemnisation, prend une activité dans l'entreprise de son conjoint, a droit à l’indemnité de chômage dans ce délai-cadre aussitôt qu'elle cesse cette activité. En revanche, dans un délai-cadre consécutif, elle n'a droit à l’indemnité de chômage que si elle a exercé une activité salariée durant au moins six mois après avoir quitté l'entreprise de son conjoint ou qu'elle a acquis une période de cotisation minimale de douze mois hors de l'entreprise du conjoint (Bulletin LACI B22).
Un assuré occupant une position assimilable à celle d’un employeur n’a pas droit non plus à l’indemnité de chômage s’il n’a travaillé que brièvement comme salarié dans une tierce entreprise. Si l’assuré continue à occuper une position assimilable à celle d’un employeur dans l’entreprise A et demande l’indemnité pour la perte d’une activité salariée dans l’entreprise B, il n’a droit à l’indemnité de chômage que si cette dernière activité était soumise à cotisation et qu’il l’a exercée au moins pendant six mois et qu'il justifie de la période de cotisation minimale de douze mois (Bulletin LACI B30).
La personne qui a quitté l’entreprise que sa ou son conjoint continue à diriger n’a droit à l’indemnité de chômage que si elle a exercé une activité soumise à cotisation pendant six mois au moins après son départ de l’entreprise conjugale ou acquis une période minimale de cotisation de douze mois hors de celle-ci (Bulletin LACI B31).
3.4 Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d'être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c'est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu'un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible ; la vraisemblance prépondérante suppose que, d'un point de vue objectif, des motifs importants plaident pour l'exactitude d'une allégation, sans que d'autres possibilités ne revêtent une importance significative ou n'entrent raisonnablement en considération
(ATF 139 V 176 consid. 5.3 et les références). Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 324 consid. 3.2 et 3.3 ; 126 V 360 consid. 5b ; 125 V 195 consid. 2 et les références). Aussi n'existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l'administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l'assuré (ATF 126 V 322 consid. 5a).
4. En l’espèce, il n’est pas contesté que la recourante a travaillé en dernier lieu pour B______ SA, entreprise dont son mari a été administrateur avec signature individuelle du 5 novembre 2013 au 5 novembre 2024.
Ainsi, bien que licenciée au 30 avril 2024, la recourante a conservé des liens avec l’entreprise en raison de sa situation maritale. Son époux disposait d’un pouvoir de décision déterminant au sein de la société, qui poursuivait ses activités, et avait la faculté de réengager sa femme dans l’entreprise, ce qui suffit pour que le droit à l’indemnité de chômage de l’intéressée doive être nié en raison d'un risque de contournement de la loi.
Par conséquent, la recourante, en sa qualité de conjointe ayant travaillé pour le compte d’une société dans laquelle son époux jouissait d’une position assimilable à celle d’un employeur en raison de sa qualité d'administrateur, tombait sous le coup de la jurisprudence du Tribunal fédéral et des causes d’exclusion du droit à l’indemnité de chômage.
Enfin, il ressort des pièces produites dans le cadre de la présente procédure que la recourante n’a pas exercé une activité soumise à cotisation hors de l’entreprise dans laquelle son mari a occupé une position assimilable à un employeur.
5. Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté et la décision du 11 octobre 2024 confirmée en tant qu’elle nie le droit de la recourante à l’indemnité de chômage pour la période du 1er mai au 5 novembre 2024.
Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA a contrario).
PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :
Statuant
À la forme :
1. Déclare le recours recevable.
Au fond :
2. Le rejette.
3. Confirme la décision du 11 octobre 2024 en tant qu’elle nie le droit de la recourante à l’indemnité de chômage pour la période du 1er mai au 5 novembre 2024.
4. Dit que la procédure est gratuite.
5. Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.
La greffière
Melina CHODYNIECKI |
| La présidente
Joanna JODRY |
Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d'État à l'économie par le greffe le