Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public
ATAS/708/2024 du 18.09.2024 ( LAMAL ) , IRRECEVABLE
rÉpublique et | 1.1canton de genÈve | |
POUVOIR JUDICIAIRE
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A/2402/2023 ATAS/708/2024 COUR DE JUSTICE Chambre des assurances sociales | ||
Arrêt du 18 septembre 2024 Chambre 8 |
En la cause
A______
| recourant |
contre
HELSANA ASSURANCES SA
| intimée |
A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’intéressé ou le recourant), né le ______ 1977 et Madame B______, née le ______1972, sont parents de C______, née le ______ 2009.
b. Le couple n’a jamais été marié.
c. Depuis une date indéterminée, la mineure C______ est assurée au titre de l’assurance obligatoire de soins auprès d’HELSANA ASSURANCES SA (ci-après : HELSANA, l’assurance ou l’intimée).
Cette affiliation résulte d’un « contrat de famille » incluant également B______, passé au nom de l’intéressé.
d. Les polices d’assurance, régulièrement actualisées, ont été adressées à A______.
e. Sur les factures de primes de sa fille et de sa compagne, A______ était désigné comme « titulaire du compte ». Les factures de primes lui étaient directement adressées, de même que les rappels, entre juillet 2015 et juillet 2017 notamment.
B. a. Malgré plusieurs rappels et sommations, les primes d’assurance relatives au mois de juillet 2015 à juillet 2017 n’ont pas été payées.
b. Le 22 octobre 2018, HELSANA a adressé une réquisition de poursuite à l’encontre de A______ pour les primes impayées de sa fille C______ et d’B______ entre juillet 2015 et juillet 2017, portant sur un montant de CHF 13'763.10, intérêts et frais non compris.
c. A______ a formé opposition au commandement de payer qui lui a été notifié le 21 décembre 2018.
d. Par décision du 4 février 2019, HELSANA a prononcé la mainlevée de l’opposition de l’intéressé, tout en confirmant la dette de CHF 17'227.25, frais et intérêts compris. Aucune opposition n’a été formée contre cette décision.
e. En date du 29 mai 2019, HELSANA a sollicité la continuation de la poursuite à l’encontre de A______.
f. Par procès-verbal daté du 6 août 2019, l’office des poursuites de Genève a informé de l’impossibilité de procéder à la saisie vu l’absence de domicile en Suisse du débiteur, qui avait déménagé en France.
g. Par un courrier daté du 8 juin 2022, intitulé « dernier rappel et décision selon l’art. 49 LPGA », adressé au domicile français de l’intéressé, HELSANA a constaté que, malgré plusieurs rappels, aucun paiement n’avait été effectué, si bien que, fort de l’art. 49 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1), elle décidait que l’intéressé était tenu au paiement d’un montant total de CHF 19'649.45, correspondant aux primes d’B______ et de C______ entre juillet 2015 et juillet 2017, ainsi qu’aux intérêts et frais de rappel et contentieux. La décision était susceptible d’opposition dans un délai de 30 jours.
h. Par courrier daté du 11 juin 2022, l’intéressé a manifesté son désaccord avec le fait d’être tenu pour débiteur des primes de sa fille et de son ancienne compagne.
Était jointe à sa contestation la première page d’un rapport d’évaluation sociale du service d’évaluation et d’accompagnement de la séparation parentale (ci-après : SEASP) à l’attention du Tribunal de protection du l’adulte et de l’enfant
(ci-après : TPAE) qui mentionnait notamment que C______ était issue d’une union hors mariage ; que les parents s’étaient séparés en 2015 et qu’elle vivait avec sa mère depuis lors ; que le TPAE a approuvé le 18 mai 2018 une convention signée par les parents instaurant l’autorité parentale conjointe sur leur fille et l’attribution de la bonification pour tâches éducatives à la mère.
i. Par courrier du 29 juin 2022, HELSANA a accusé réception de l’opposition de A______ et l’a remercié de son courrier par lequel il avait fait parvenir des informations importantes au sujet d’B______ et de C______. HELSANA sollicitait la production de copies du certificat de naissance d’B______ et du passeport de C______.
j. Par courrier du 4 juillet 2022, l’intéressé a indiqué ne pas avoir les documents demandés en sa possession.
Il transmettait une décision du TPAE datée du 16 juillet 2022 instaurant une curatelle aux fins de gérer l’assurance-maladie et les frais médicaux de la mineure C______, avec effet rétroactif au 1er juillet 2015 ; l’autorité parentale d’B______ était limitée en conséquence et une curatrice du service de protection des mineurs (ci-après : SPMI) était désignée.
k. Par courrier du 22 août 2022, HELSANA s’est adressée au SPMI. Elle l’informait que A______ contestait être responsable des primes de sa fille et avait formé opposition à sa décision formelle du 8 juin 2022. Il était fait référence à la décision du TPAE du 16 juin 2022 introduisant une curatelle avec effet rétroactif au 1er juillet 2015. HELSANA interrogeait le SPMI sur sa possibilité de régler les primes arriérées. Elle demandait également si B______ et A______ avaient été mariés et sur quelle période.
l. Par courrier du 7 novembre 2022, ce dernier a relancé HELSANA et demandé des nouvelles du contentieux concernant les primes de sa fille. Il mentionnait un courrier du TPAE l’informant que la mère de sa fille aurait réglé les primes concernées.
m. Par courrier du 11 novembre 2022, HELSANA lui a répondu que le courrier du TPAE évoqué n’avait pas été joint, que l’opposition était toujours en suspens, que les arriérés visés par sa décision formelle du 8 juin 2022 n’avaient pas été réglés et qu’elle avait pris contact avec le SPMI pour obtenir certains renseignements qu’il n’avait pas pu fournir.
n. Par courrier du 5 janvier 2023, le SPMI a répondu que les parents de C______ n’avaient jamais été mariés et qu’ils étaient tous deux détenteurs de l’autorité parentale. Pour le reste, il indiquait rester dans l’attente d’une détermination du TPAE suite à sa décision du 16 juin 2022 ; en l’état, il n’était pas possible de prendre en charge le rétroactif.
o. Par courrier du 12 janvier 2023, HELSANA s’est adressée à A______, en se référant à son courrier du 5 décembre 2022. Concernant le contentieux existant pour les primes de sa fille et d’B______, il était suspendu en raison de son opposition. Les documents transmis étaient incomplets. Un courrier du TPAE du 31 octobre 2022 était mentionné. Il était rappelé que l’intéressé avait été « chef de famille » jusqu’à la fin février 2019 et que les primes d’B______ et de C______ lui avait été facturées entre juillet 2015 et juillet 2017 à ce titre. Suite à la confirmation par le SPMI que l’intéressé et B______ n’avaient jamais été mariés, elle admettait qu’il n’existait aucune base légale pour recouvrir ses primes auprès de l’intéressé et qu’il n’était pas responsable du règlement des primes de CHF 11'210.32 visées dans la décision formelle du 8 juin 2022. Concernant les primes de C______, elle se référait aux art. 276 et 277 du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CC - RS 210) et au devoir d’entretien des parents envers leurs enfants mineurs, raison pour laquelle elle s’estimait fondée à lui réclamer ces primes. Elle lui faisait parvenir une nouvelle facture de CHF 2'552.78 correspondant aux primes de C______, visées dans sa décision du 8 juin 2022.
p. Par courrier du 30 janvier 2023, A______ a pris acte du courrier d’HELSANA du 12 janvier 2023. Concernant les primes de sa fille, il a rappelé qu’il versait une pension à sa mère pour couvrir ses frais, cette dernière étant seule responsable du règlement des primes.
q. Par courrier du 22 février 2023, HELSANA a fait parvenir à l’intéressé une liste des actes de défauts de biens à son nom, dont certains des soldes avaient été actualisés, puisqu’il n’avait jamais été marié à B______. Subsistaient les primes de C______, dont la procédure de recouvrement avait été bloquée par l’opposition. Faute de paiement d’ici le 30 mars 2023, une décision sur opposition serait rendue.
r. Par courrier du 28 février 2023, A______ a transmis des échanges de messages intervenus avec la mère de sa fille et a invité HELSANA à adresser la facture de primes de sa fille directement à cette dernière.
s. Par courrier du 6 mars 2023, HELSANA a persisté à considérer que A______ était débiteur des primes de sa fille sur la base des art 276 et 277 CC et que l’assurance était fondée à diriger une procédure de recouvrement contre lui seul, quelles que soient les conventions conclues entre les deux parents.
C. a. Par décision sur opposition du 25 mai 2023, HELSANA a admis partiellement l’opposition. Elle refusait d’entrer en matière sur la créance de CHF 2’552.78 concernant les primes de la mineure Laura, invoquant l’autorité de la chose décidée. Elle ramenait toutefois les frais à CHF 400.- et les intérêts moratoires à CHF 876.75. En revanche, elle réformait sa décision formelle du 8 juin 2022 et admettait l’opposition concernant les primes de l’adulte B______.
La décision a été reçue par le recourant le 1er juin 2023.
b. Par courrier du 28 juin 2023 adressé directement au service des oppositions d’HELSANA, le recourant a manifesté son désaccord avec la décision sur opposition du 25 mai 2023. Il a persisté à soutenir ne pas être débiteur des primes d’assurance de sa fille, dans la mesure où il s’était déjà acquitté d’une pension auprès de la mère pour ces dépenses. Il demandait également que les actes de défauts de biens concernant en majorité les primes de la mère de sa fille soient retirés.
c. Par courrier du 4 juillet 2023, HELSANA a rappelé que l’intéressé était considéré responsable du contrat de couverture de sa fille jusqu’au 1er mars 2019, date à laquelle les parents avaient fait parvenir le formulaire de changement de responsable. Elle questionnait l’intéressé pour savoir si par son dernier courrier, il manifestait son souhait de former recours contre la décision sur opposition du 25 mai 2023 et lui demandait confirmation d’ici le 20 juillet 2023 pour transmission à l’autorité compétente.
d. Par courrier du 11 juillet 2023, l’intéressé a confirmé son souhait de recourir contre la décision du 25 mai 2023.
e. Par courrier du 31 juillet 2023, HELSANA a confirmé à l’intéressé qu’il n’était plus le « chef de famille » des assurées B______ et C______. Les primes courantes ne lui étaient plus facturées.
D. a. Après avoir obtenu confirmation du recourant de sa volonté de former recours contre la décision sur opposition du 25 mai 2023, HELSANA a transmis à la Cour de céans le courrier du recourant du 28 juin 2023, comme objet de sa compétence, en date du 18 juillet 2023.
b. Sur interpellation de la Cour de céans, le recourant a fait parvenir, en date du 27 juillet 2023, un nouvel exemplaire de son courrier de recours, muni de sa signature originale, conformément aux exigences de l’art. 89B al.1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA-GE - E 5 10).
c. Par mémoire du 28 août 2023, HELSANA a répondu au recours, en concluant à son rejet.
Elle fondait sa créance sur l’obligation d’entretien des parents envers leurs enfants à teneur des art. 276 et 277 CC. Elle soutenait que la décision formelle du
4 février 2019 n’aurait pas dû faire l’objet d’une nouvelle décision en raison de la force de chose décidée du devoir de payer du recourant et qu’elle aurait simplement dû être reconsidérée par rapport aux arriérés de primes de la mère à défaut de mariage entre les parents. Elle se disait ainsi en droit de réclamer les primes de l’enfant mineur auprès de ses parents. La procédure de facturation, de rappel et de sommation prévue par la LAMal avait été respectée, si bien que la décision du 8 juin 2022 était justifiée pour la créance de CHF 2'552.78 de la mineure C______, ainsi que les intérêts moratoires de 5% dès le 1er juillet 2015. Elle confirmait le bien fondé des frais de rappel de CHF 400.- et des intérêts moratoires à 5% jusqu’au 25 mai 2023, soit CHF 876.75. Au sujet de la décision du 8 juin 2022, elle expliquait qu’une nouvelle décision « ne peut avoir été rendue, car la première décision aurait simplement dû être reconsidérée afin d’écarter les montants relatifs aux arriérés de la mère » et que la décision du
4 février 2019 était entrée en force concernant les primes de l’enfant. Même à considérer que cette décision ait été annulée par la seconde, il n’en demeurait pas moins que le recourant était débiteur des primes de sa fille pour la période litigieuse.
d. En date du 14 septembre 2023, le recourant a déposé des pièces complémentaires auprès de la Cour de céans, soit des pièces concernant des procédures de recouvrement menées à son encontre, sur mandat de l’intimée, par la société INTRUM en France, ainsi que diverses correspondances de l’intimée et du recourant, déjà présentes au dossier.
e. Par courrier du 19 septembre 2023, l’intimée a déclaré ne pas avoir de remarques à formuler si ce n’est que les procédures engagées en France concernaient des primes antérieures à celles visées par la procédure.
f. Par courrier du 25 septembre 2023, le recourant a persisté dans son argumentaire : il s’était déjà acquitté d’une pension pour couvrir les frais de sa fille, y compris pour son assurance-maladie et n’avait pas les moyens de s’en acquitter à double.
g. Par courrier du 2 octobre 2023, l’intimée a confirmé ne pas avoir de remarque à formuler, tout en rappelant que selon la modification de la LAMal entrée en vigueur le 1er janvier 2024, la mineure ne serait pas débitrice des arriérés de primes accumulés pendant sa minorité.
h. Sur quoi, la cause a été gardée à juger.
EN DROIT
1.
1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 4 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 LPGA relatives à la loi fédérale sur l'assurance-maladie, du 18 mars 1994 (LAMal - RS 832.10).
Sa compétence ratione materiae pour juger du cas d’espèce est établie, dès lors que l’objet du litige concerne le paiement de primes dues en vertu d’un contrat d’assurance selon la LAMal.
1.2 En vertu de l’art. 58 al. 2 LPGA, si l’assuré ou une autre partie sont domiciliés à l’étranger, le tribunal de assurances compétent est celui du canton de leur dernier domicile en Suisse ou celui du canton de domicile de leur dernier employeur suisse ; si aucun de ces domiciles ne peut être déterminé, le tribunal des assurances compétent est celui du canton où l’organe d’exécution a son siège.
En l’espèce, le recourant est désormais domicilié en France. En dernier lieu, le recourant vivait sur le canton de Genève.
La compétence ratione loci de la chambre de céans est dès lors également établie.
2. À teneur de l'art. 1 al. 1 LAMal, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-maladie, à moins que la loi n'y déroge expressément.
3.
3.1 Aux termes de l'art. 64a LAMal, lorsque l'assuré n'a pas payé des primes ou des participations aux coûts échues, l'assureur lui envoie une sommation, précédée d'au moins un rappel écrit ; il lui impartit un délai de 30 jours et l'informe des conséquences d'un retard de paiement (al. 1). Si, malgré la sommation, l'assuré ne paie pas dans le délai imparti les primes, les participations aux coûts et les intérêts moratoires dus, l'assureur doit engager des poursuites. […] (al. 2). Selon
l'art. 105b de l’ordonnance sur l'assurance-maladie du 27 juin 1995 (OAMal - RS 832.102), l’assureur envoie la sommation en cas de non-paiement des primes et des participations aux coûts dans les trois mois qui suivent leur exigibilité. Il l’adresse séparément de toute sommation portant sur d’autres retards de paiement éventuels (al. 1). Lorsque l’assuré a causé par sa faute des dépenses qui auraient pu être évitées par un paiement effectué à temps, l’assureur peut percevoir des frais administratifs d’un montant approprié, si une telle mesure est prévue par les conditions générales sur les droits et les obligations de l’assuré (al.2).
Les délais prévus dans les dispositions qui précèdent sont des prescriptions d'ordre, dont l'inobservation n'entraîne pas la péremption du droit aux arriérés ou de la procédure de poursuite. L'assureur n'est pas tenu non plus de procéder à une nouvelle sommation s'il entend faire valoir ses droits par la voie de la poursuite. A l'instar de l'ancien art. 90 al. 4, l'art. 105b al. 1 OAMal vise en effet à empêcher que les assureurs ne tardent trop avant d'entreprendre les démarches nécessaires au recouvrement des primes dues (arrêt du Tribunal fédéral 9C_397/2008 du 29 septembre 2008 ; Gebhard EUGSTER, Krankenversicherung, in : Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR], Soziale Sicherheit, 2ème éd., Bâle 2007, p. 747, n. 1028).
3.2 Selon la jurisprudence, à certaines conditions, les assureurs maladie sont en droit de lever par une décision formelle l’opposition à un commandement de payer portant sur une créance découlant de la LAMal. Les assureurs peuvent donc introduire une poursuite pour leurs créances pécuniaires, même sans titre de mainlevée entré en force, rendre après coup, en cas d'opposition, une décision formelle portant condamnation à payer les arriérés de primes ou participations aux coûts et, après l'entrée en force de cette dernière, requérir la continuation de la poursuite. Si le dispositif de la décision administrative se réfère avec précision à la poursuite en cours et lève expressément l'opposition à celle-ci, ils pourront requérir la continuation de la poursuite sans passer par la procédure de mainlevée de l'art. 80 LP.
Dans sa décision, l'autorité administrative prononcera non seulement une décision au fond selon le droit des assurances sociales sur l'obligation pécuniaire de l'assuré, mais elle statuera simultanément sur l'annulation de l'opposition comme autorité de mainlevée. Il en va de même des tribunaux en cas de recours (ATF 119 V 329 consid. 2b ; RKUV 2004 Nr. KV 274 S. 129 E. 4.2.1, K 107/02 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_903/2009 du 11 décembre 2009 consid. 2.1).
4. En vertu de l'art. 53 al. 2 LPGA, l'assureur peut revenir sur les décisions ou les décisions sur opposition formellement passées en force lorsqu'elles sont manifestement erronées et que leur rectification revêt une importance notable.
La reconsidération a pour objet la correction d’une décision qui était déjà erronée, dans la constatation des faits ou dans l’application du droit, au moment où elle a été prise (ATAS/1244/2020 du 10 décembre 2020 consid. 7b ; ATAS/154/2019 du 25 février 2019 consid. 3b ; ATAS/1163/2014 du 12 novembre 2014 consid. 5c ; Ueli KIESER, ATSG-Kommentar, 4ème éd. 2020, n. 20 ad art. 17).
Selon la jurisprudence, l'administration n'est pas tenue de reconsidérer les décisions qui remplissent les conditions fixées ; elle en a simplement la faculté et ni l'assuré ni le juge ne peuvent l'y contraindre. Le corollaire en est que les décisions portant sur un refus d'entrer en matière sur une demande de reconsidération ne peuvent pas faire l'objet d'un contrôle en justice (ATF 133 V 50 consid. 4.1 p. 52 ; 119 V 475 consid. 1b/cc p. 479 ; 117 V 8 consid. 2a p. 12 s. ; arrêt 9C_447/2007 du 10 juillet 2008 consid. 1 ; Ueli KIESER, ATSG-Kommentar, 2ème éd. 2009, n. 44 ad art. 53). Un assureur social refuse d'entrer en matière sur une demande de reconsidération lorsqu'il se borne à procéder à un examen sommaire de la requête et répète les motifs invoqués dans la décision initiale (ATF 117 V 8 consid. 2b/aa p. 14 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_866/2009 du 27 avril 2010 consid. 2.2).
Cependant, lorsque l'administration entre en matière sur une demande de reconsidération et examine si les conditions requises sont remplies, avant de statuer au fond par une nouvelle décision de refus, celle-ci est susceptible d'être attaquée en justice. Le contrôle juridictionnel dans la procédure de recours subséquente se limite alors au point de savoir si les conditions d'une reconsidération (inexactitude manifeste de la décision initiale et importance notable de la rectification) sont réunies (ATF 119 V 475 consid. 1b/cc ; ATF 117 V 8 consid. 2a ; ATF 116 V 62 consid. 3a ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_609/2010 du 22 mars 2011 consid. 2.1 et 2.2). Dans le cas où l’assureur social considère que les conditions de la reconsidération sont données et rend une décision qui s’écart de son prononcé initial, cette nouvelle décision est soumise aux voies de droit ordinaires et le juge peut, sur recours, la contrôler de manière étendue (Margit MOSER-SZELESS, in Loi sur la partie générale des assurances sociales, 2018,
n. 92 ad art. 53 LPGA)
5. L'art. 52 al. 1 LPGA prévoit que les décisions peuvent être attaquées dans les trente jours par voie d'opposition auprès de l'assureur qui les a rendues, à l'exception des décisions d'ordonnancement de la procédure. Les décisions sur opposition et celles contre lesquelles la voie de l'opposition n'est pas ouverte sont sujettes à recours (art. 56 al. 1 LPGA). La procédure d'opposition est obligatoire et constitue une condition formelle de validité de la procédure de recours de droit administratif subséquente (arrêt du Tribunal fédéral 9C_777/2013 du 13 février 2014 consid. 5.2.1 et les références).
L'opposition est un moyen de droit permettant au destinataire d'une décision d'en obtenir le réexamen par l'autorité administrative, avant qu'un juge ne soit éventuellement saisi. La procédure d'opposition porte sur les rapports juridiques qui, d'une part, font l'objet de la décision initiale de l'autorité et à propos desquels, d'autre part, l'opposant manifeste son désaccord, implicitement ou explicitement. L'autorité valablement saisie d'une opposition devra se prononcer une seconde fois sur tous les aspects du rapport juridique ayant fait l'objet de sa décision initiale, quand bien même la motivation de la nouvelle décision portera principalement sur les points critiqués par l'opposant. La décision sur opposition remplace la décision initiale et devient, en cas de recours à un juge, l'objet de la contestation de la procédure judiciaire (arrêt du Tribunal fédéral 9C_777/2013 précité consid. 5.2.1 et les références).
L'opposition est une demande adressée à l'auteur d'une décision, dont elle vise l'annulation ou la modification ou tend à faire constater la nullité, après un examen complet en fait, en droit et en opportunité. Elle constitue une sorte de procédure de reconsidération qui confère à l'autorité ayant statué la possibilité de réexaminer sa décision avant que le juge soit éventuellement saisi (ATF 125 V 188 consid. 1b ; Valérie DÉFAGO GAUDIN, in Loi sur la partie générale des assurances sociales, 2018, n. 2 ad art. 52 LPGA). L'opposition est à la fois un véritable moyen de droit que les parties doivent utiliser avant de saisir le juge et une procédure tendant à ce que l'autorité qui a déjà statué rende une nouvelle décision qui se substituera à la première. Elle n'a pas d'effet dévolutif puisque l'autorité qui a statué en premier lieu n'est pas dessaisie (ATF 132 V 368
consid. 6.1 ; DÉFAGO GAUDIN, op. cit., ibidem).
La décision sur opposition est de nature réformatoire. L'assureur ne peut pas rendre une décision de nature cassatoire, même partiellement, et (se) renvoyer le dossier pour instruction complémentaire, puisque l'opposition n'a pas d'effet dévolutif. Dans ce cas, l'instruction complémentaire doit intervenir dans le cadre de la procédure d'opposition et l'assureur doit réformer la décision initiale par une décision sur opposition mettant fin à l'instance (ATF 131 V 407 consid. 2 ; DÉFAGO GAUDIN, op. cit., n. 29 ad art. 52 LPGA).
L’opposition vaut de manière générale en droit des assurances sociales, lorsque la LPGA trouve application (art. 2 LPGA ; DÉFAGO GAUDIN, op. cit., n. 5 ad
art. 52 LPGA).
Des exceptions sont néanmoins prévues dans la LPGA.
La jurisprudence a notamment exclu la voie de l’opposition pour les décisions par lesquelles un assureur n’entre pas en matière sur une demande de reconsidération (art. 53 al. 2 LPGA ; ATF 133 V 50 consid. 4.2 ; DÉFAGO GAUDIN, op. cit., n. 14 ad art. 52 LPGA). En revanche, lorsque l’assureur entre en matière sur la demande de reconsidération, avant de statuer au fond par une nouvelle décision (matérielle) de refus ou sur reconsidération, cette décision est d’abord attaquable par la voie de l’opposition, avant de pouvoir faire l’objet d’un recours (MOSER-SZELESS, op. cit., ibidem)
6. En l’espèce, il convient tout d’abord de qualifier le courrier du 25 mai 2023 de l’intimée, objet de la présente procédure de recours.
Il ressort du dossier que l’intimée dispose d’une décision rendue le 4 février 2019 passée en force de chose décidée, à la suite de la poursuite engagée contre le recourant. En effet, suite à l’opposition formée au commandement de payer dans le cadre de la poursuite 18 344525 Z, l’intimée a rendu, après coup, une décision formelle portant condamnation du recourant à payer les arriérés de primes de sa fille et de son ex-compagne, frais et intérêts compris, pour la période de juillet 2015 à juillet 2017, et levant l’opposition à la poursuite. Aucune opposition n’ayant été déposée à l’encontre de cette décision du 4 février 2019, celle-ci est passée en force de chose décidée. Sur cette base, l’intimée était fondée à requérir la continuation de la poursuite.
Dans ce contexte, il convient d’examiner la portée du courrier de l’intimée du
8 juin 2022, intitulé « Dernier rappel et décision selon l’art. 49 LPGA ». Si cet intitulé instaure une certaine confusion, de même que l’indication d’une voie d’opposition contre celui-ci, force est de constater qu’il porte, sur le fond, strictement sur les mêmes arriérés de primes que ceux visés par la décision définitive du 4 février 2019. Indépendamment de son intitulé et de sa qualification par l’intimée, le courrier du 8 juin 2022 ne saurait constituer une décision annulant et remplaçant la précédente. Hormis le déménagement du recourant en France voisine à une date ultérieure, aucun motif de révision ou de reconsidération n’avait été porté à la connaissance de l’intimée à ce stade. Pour ces motifs, on ne saurait considérer que le courrier du 8 juin 2022 ait annulé et remplacé la décision définitive du 4 février 2019. Si tant est qu’il faille le qualifier, le courrier du 8 juin 2022 doit ainsi bien plus être interprété comme un énième rappel de la créance décidée, avant d’entamer une procédure de recouvrement à l’étranger.
Ce courrier a néanmoins entraîné une réaction du recourant, soit son courrier du 11 juin 2022, qu’il a accompagné de « preuves » nouvelles, fournissant des informations décisives sur sa relation de concubinage avec B______, mais également au sujet de son autorité parentale sur C______, qui n’aurait été instituée en sa faveur qu’en mai 2018, deux éléments susceptibles de mener à la conclusion que la décision initiale était entachée d’erreurs manifestes (voir notamment Gebhard EUGSTER, Krankenversicherung, in Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR], Soziale Sicherheit, 3ème éd., Bâle 2016, p. 798-799, n. 1312-1316 ; ATAS/718/2022 du 18 août 2022, c.9.1 et 11.1.1). Au vu des circonstances décrites ci-dessus, le courrier du 11 juin 2022 aurait dû être traité par l’intimée comme une demande de reconsidération. C’est d’ailleurs ce qu’admet entre les lignes l’intimée dans son écriture de réponse du 28 août 2023.
Ce courrier a manifestement fait l’objet d’une entrée en matière de la part de l’intimée – bien qu’elle n’en eût pas été obligée – qui ne s’est pas bornée à procéder à un examen sommaire et à confirmer sa décision initiale. Bien au contraire, l’intimée a repris l’instruction complète du dossier, pour finalement reconsidérer la décision concernant l’exigibilité des primes d’B______ qu’elle renonce à réclamer au recourant d’une part ; en se prévalant de l’autorité de chose décidée concernant les primes de C______ d’autre part, tout en recalculant les intérêts et les frais.
Aussi, on retiendra que la « décision sur opposition » du 25 mai 2023 doit être qualifiée de décision sur reconsidération, sujette à opposition avant d’être, dans un deuxième temps, sujette à recours devant la Cour de céans.
Le recours transmis à la Cour de céans comme objet de sa compétence, selon les voies de droit indiquée de manière erronée dans la décision entreprise, est ainsi prématuré.
7. Au vu de ce qui précède, la Cour de céans n’entrera pas en matière sur le recours du 28 juin 2023, faute d’une décision sur opposition. Cette écriture sera traitée comme une opposition à la décision sur reconsidération du 25 mai 2023 (déposée à son encontre dans les délais et les formes requises) et renvoyée à l’assurance comme objet de sa compétence. Dans ce cadre, il pourrait être opportun d’examiner la question de l’autorité parentale du recourant, qui ne semble avoir été instituée de manière conjointe qu’à compter du mois de mai 2018.
8. Partant, le recours doit être déclaré irrecevable, car prématuré, et la cause renvoyée à l’intimée pour traitement de l’opposition.
9. Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let.f bis LPGA a contrario).
PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :
Statuant
1. Déclare le recours du 28 juin 2023 irrecevable, car prématuré.
2. Transmet à l’intimée l’opposition du 28 juin 2023 comme objet de sa compétence.
3. Dit que la procédure est gratuite.
4. Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.
La greffière
Pascale HUGI |
| La présidente suppléante
Maëlle KOLLY |
Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral de la santé publique par le greffe le