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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3022/2022

ATAS/444/2023 du 14.06.2023 ( PC ) , REJETE

En fait
En droit

 

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3022/2022 ATAS/444/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 14 juin 2023

Chambre 4

 

En la cause

A______

 

 

recourante

 

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES

intimé

 


EN FAIT

A. a. Madame A______ (ci-après : l’intéressée ou la recourante) et feu son époux (décédé le ______ 2019) ont demandé des prestations complémentaires de l’AVS/AI le 15 janvier 2019, en indiquant être propriétaires d’un appartement à B______ en France, lequel avait été acheté en 2003 et était occupé uniquement par leur famille. La valeur vénale de ce bien était de CHF 260'000.-.

b. Par décision du 17 mai 2019, le service des prestations complémentaires (ci-après : le SPC ou l’intimé) a informé l’intéressée et feu son époux que leur droit aux prestations complémentaires était refusé, car les dépenses reconnues étaient entièrement couvertes par le revenu déterminant. À teneur des plans de calcul annexés à la décision, le SPC avait pris en compte, dès le 1er décembre 2018, une fortune immobilière partagée de CHF 318'879.50, précisant que lorsque des immeubles ne servaient pas d’habitation au requérant ou à une personne comprise dans le calcul des prestations complémentaires, la valeur de ces biens correspondait à leur valeur vénale. Dès le 1er janvier 2019, le SPC avait pris en compte une fortune immobilière partagée à hauteur de CHF 305'935.-.

c. Par décision du 21 juin 2019, le SPC a informé l’intéressée avoir recalculé son droit aux prestations complémentaires dès le 1er juillet 2019, suite au décès de son époux le 15 juin 2019, et qu’elle n’avait pas droit aux prestations complémentaires dès le 1er juillet 2019, ses dépenses reconnues étant moins importantes que son revenu déterminant.

B. a. Le 3 février 2022, l’intéressée a formé une nouvelle demande de prestations au SPC.

b. Le 22 février 2022, le SPC a demandé des pièces à l’intéressée et des explications sur l’utilisation qui avait été faite du montant de la vente de son bien immobilier dès le versement à ce jour et des CHF 20'000.- qu’elle avait retiré de son compte au Crédit Suisse le 31 janvier 2020.

c. Le 9 mars 2022, l’intéressée a répondu, concernant le partage avec sa fille du prix de vente de l’appartement de EUR 240'000.-, qu’elle avait reçu EUR 170'000.-. Elle avait dû payer EUR 10'000.- de notaire, des charges d’agence, etc. et EUR 60'000.- à sa fille en guise de remboursement, car elle l’avait aidée financièrement pendant une période pour payer les déménagements, les taxes de succession, le curateur de son mari, les frais hospitaliers, l’EMS, les frais de ménage. Elle avait utilisé les CHF 20'000.- pour payer les meubles de son nouvel appartement, le dentiste, l’installation du lave-vaisselle, etc.

d. Par décision de prestations complémentaires du 1er juin 2022, le SPC a informé l’intéressée qu’elle n’avait pas de droit aux prestations complémentaires au motif que dès le 1er février 2022, sa fortune nette était supérieure au seuil prévu par la loi.

e. L’intéressée a formé opposition à la décision précitée, produisant des extraits du compte au Crédit Suisse de sa fille ainsi qu’un courrier de cette dernière attestant que les CHF 70'000.- qui lui avaient été donnés par sa mère étaient un remboursement des frais qu’elle avait payés pour ses parents.

f. Selon une note intitulée « diminution d’épargne » du 16 août 2022, concernant l’intéressée, le SPC avait retenu au 31 décembre 2019 à titre de fortune « AFC » : CHF 2'156.- et vente bien immobilier CHF 185'490.- (EUR 170'896.- fois 1.0854, frais déduits) soit un total au 31 décembre 2019 de CHF 187'646.-. Au 31 décembre 2020, la fortune s’élevait à CHF 58'820.-. Le SPC tenait compte des ressources annuelles de l’intéressée pour l’année 2020 et de ses charges annuelles.

Au 31 décembre 2019, le solde de la fortune s’élevait à CHF 187'646.- dont étaient déduits CHF 15'848.- de besoins annuels, CHF 33'509.- de dépenses justifiées, soit au total de CHF 49'357.- de dépenses. Il aurait dû rester un solde de fortune de CHF 138'289.-. Le montant de biens dessaisis à prendre en compte au 31 décembre 2020 s’élevait à CHF 79'469.-.

Suivait une liste des dépenses justifiées pour l’année 2020 :

-      remboursement à sa fille (avances prouvées) : CHF 29'656.-

-      frais médicaux selon avis de taxation :CHF 3'841.-

-      frais bancaires : CHF 12.-

soit au total CHF 33'509.-.

g. Par décision sur opposition du 18 août 2022, le SPC a considéré que l’intéressée n’avait pas prouvé que ses dépenses avaient été effectuées moyennant contre-prestations adéquates de sa fille, de sorte qu’il se justifiait de tenir compte d’une diminution hypothétique.

L’intéressée avait déposé une demande de prestations complémentaires le 3 février 2022. L’intimé avait constaté qu’au 31 décembre 2021, sa fortune s’élevait à CHF 111'943.25, compte tenu d’une fortune dessaisie concernant l’année 2020 de CHF 90'801.-, amortie au 1er janvier 2022 à CHF 80'801.-, et des soldes de ses deux comptes auprès du Crédit Suisse au 31 décembre 2021 de respectivement CHF 31'129.81 et CHF 12.44. Après avoir examiné son opposition, le SPC avait repris le calcul de sa fortune dessaisie pour l’année 2020, tel que détaillé dans un tableau joint à la décision.

À teneur de l’acte notarié du 24 janvier 2020, reçu le 3 janvier 2022, et du décompte qui y était joint, l’intéressée avait effectivement perçu, tous frais déduits, sur le produit total de EUR 240'000.- de la vente de son bien immobilier à B______, EUR 170'896.31 (arrondis à EUR 170'896.-), le solde du prix de vente étant revenu à sa fille en proportion de sa part de propriété aliénée.

Force était ainsi de constater que sa fortune au 31 décembre 2019 (soit dès janvier 2020), y compris un montant d’épargne de CHF 2'156.-, s’élevait à CHF 187'646.- ([EUR 170'896.- x 1.0854] = CHF 185'490.- + CHF 2'156.-).

Les extraits du compte au Crédit Suisse de sa fille produits à l’appui de son opposition indiquaient que sur la somme de CHF 70'000.- que l’intéressée lui avait versé le 5 février 2020, sa fille lui avait vraisemblablement rétrocédé, via diverses dépenses faites en sa faveur, un montant total de CHF 29'656.-.

Par ailleurs, l’avis de taxation de l’année 2020 de l’intéressée faisait état de frais médicaux à déduire de CHF 3'841.- et de frais bancaires de CHF 12.-, portant le total des dépenses justifiées pour l’année 2020 à CHF 33'509.-.

Force était de constater qu’au 31 décembre 2020, la fortune de l’intéressée ne s’élevait plus qu’à CHF 58'820.- (cf. avis de taxation 2020) alors que, compte tenu de ses revenus, de ses besoins vitaux et des dépenses justifiées, elle aurait dû s’élever à CHF 138'289.-. Le montant de fortune dessaisi durant l’année 2020 s’élevait ainsi à CHF 79'469.- (CHF 138'289.- - CHF 58'820.-), soit un montant amorti à prendre en compte dans sa fortune dès le 1er janvier 2022 de CHF 69'469.-.

La fortune totale de l’intéressée, épargne comprise, au 31 décembre 2021 était de CHF 100'611.25 (CHF 69'469.- + CHF 12.44 + CHF 31'129.81), si bien que c’était à juste titre que le SPC avait rendu la décision du 1er juin 2022 niant son droit, en raison d’une fortune excédant le montant légal admis pour une personne seule, laquelle devait être confirmée.

Si entretemps, sa fortune avait subi une diminution suffisante pour que le seuil maximal de CHF 100'000.- admis pour une personne seule ne soit plus atteint, l’intéressée pouvait déposer une nouvelle demande de prestations complémentaires.

C. a. L’intéressée a formé recours contre la décision précitée auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice le 19 septembre 2022, contestant le dessaisissement retenu de CHF 79'469.- au 31 décembre 2021. Elle s’était servie d’une partie du produit de la vente de son bien immobilier pour rembourser l’avance financière que sa fille lui avait accordée pour couvrir son minimum vital et ses dépenses élémentaires entre le moment où feu son mari était entré en EMS et celui où elle avait touché sa part du produit de la vente de l’appartement. Ce faisant, elle n’avait pas enrichi sa fille, ni dépensé sans raison ses CHF 70'000.-.

b. Le 10 octobre 2022, l’intimé a conclu au rejet du recours, se référant à la motivation de sa décision sur opposition.

c. Le 15 novembre 2022, la recourante a produit des pièces attestant de paiement de factures datées de 2019, certaines en lien avec des montants équivalents payés par sa fille en sa faveur, selon ses relevés de compte.

d. Le 2 décembre 2022, l’intimé a conclu au rejet du recours.

Il a constaté que la recourante n’avait produit aucun élément nouveau susceptible de le conduire à une appréciation différente du cas.

Il rappelait en particulier, au vu des factures relatives à l’année 2019 produites par la recourante, que le bien dessaisi retenu dans la fortune de cette dernière concernait l’année 2020 et que le relevé détaillé de l’année 2019 du compte Crédit Suisse de la fille de la recourante avait déjà été produit en annexe à l’opposition du 23 juin 2022 et qu’il en avait tenu compte lors de l’examen de cette opposition.

C’était en effet en se fondant sur ce même relevé bancaire que l’intimé avait déduit la somme de CHF 29'656.- du bien dessaisi constaté sur l’année 2020, tel qu’expliqué plus en détail dans la décision sur opposition du 18 août 2022 qui faisait l’objet du recours. Le montant de CHF 29'656.- était au demeurant supérieur au total des factures jointes à l’écriture de la recourante du 15 novembre 2022, sans considérer le fait que certaines de celles-ci concernaient des frais hospitaliers qui avaient vraisemblablement été au moins partiellement remboursés par l’assurance-maladie. Les frais médicaux à la charge de la recourante en 2020, tels qu’indiqués dans l’avis de taxation correspondant, avaient également été déduits du bien dessaisi de l’année 2020. En conséquence, l’intimé concluait au rejet du recours.

b. Le 13 avril 2023, la chambre de céans a demandé à la recourante de se déterminer sur le fait qu’il ressortait de l’extrait de son compte privé au Crédit Suisse du 1er janvier 2021 qu’elle avait touché, le 30 janvier 2020, CHF 178’526.57, qui paraissaient correspondre à sa part de la vente de l’appartement mais que ce montant ne correspondait pas à celui de CHF 185'490.- pris en compte par l’intimé, sur la base de l’acte notarié du 24 janvier 2020, lequel indiquait à la recourante que le solde du prix de vente qui lui revenait après déduction des frais était de EUR 170'896.31.

c. Le 11 mai 2023, la recourante a informé la chambre de céans ne pas pouvoir répondre à sa question.

d. Le 1er juin 2023, l’intimé a indiqué qu’il ressortait clairement du décompte notarial établi le 24 janvier 2020 qu’un solde de EUR 170’896.31 devait être versé à la recourante, suite aux déductions opérées sur sa part de la vente du bien immobilier en cause, soit sur EUR 180'000.-. Rien au dossier ne permettait de laisser penser que le décompte notarial avait été corrigé par la suite. L’on ne pouvait exclure que les EUR 1’883.35 manquant à la somme initialement due par le notaire à la recourante aient pu être effectivement perçus par celle-ci à un autre moment. Il convenait en conséquence de maintenir le montant retenu à ce titre dans le calcul des biens dessaisis avant amortissements, soit CHF 185’490.-.

EN DROIT

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 3 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 6 octobre 2006 (LPC - RS 831.30). Elle statue aussi, en application de l'art. 134 al. 3 let. a LOJ, sur les contestations prévues à l'art. 43 de la loi cantonale sur les prestations complémentaires cantonales du 25 octobre 1968 (LPCC - J 4 25).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             Interjeté en temps utile, le recours est recevable (art. 60 LPGA).

3.             Le litige porte sur le bien-fondé de la prise en compte par l’intimé dans le calcul du droit aux prestations complémentaires de la recourante d’un montant de fortune dessaisi à hauteur de CHF 69'469.- dès le 1er janvier 2022.

4.             Dans le cadre de la réforme de la LPC, entrée en vigueur le 1er janvier 2021, de nombreuses dispositions ont été modifiées (FF 2016 7249 ; RO 2020 585).

Dans la mesure où le recours porte sur le droit aux prestations complémentaires dès le 1er février 2022, soit une période postérieure au 1er janvier 2021, le présent litige est soumis au nouveau droit.

5.              

5.1 Selon l’art. 9a al. 1 let. a LPC, les personnes seules dont la fortune nette est inférieure à CHF 10'000.- ont droit à des prestations complémentaires.

Selon l’art. 11a al. 2 LPC, les autres revenus, parts de fortune et droits légaux ou contractuels auxquels l’ayant droit a renoncé sans obligation légale et sans contre-prestation adéquate sont pris en compte dans les revenus déterminants comme s’il n’y avait pas renoncé.

Selon l’art. 11a al. 3 LPC, un dessaisissement de fortune est également pris en compte si, à partir de la naissance d’un droit à une rente de survivant de l’AVS ou à une rente de l’AI, plus de 10% de la fortune est dépensée par année sans qu’un motif important ne le justifie. Si la fortune est inférieure ou égale à CHF 100'000.-, la limite est de CHF 10'000.- par année. Le Conseil fédéral règle les modalités; il définit en particulier la notion de « motif important ».

L’al. 3 s’applique aux bénéficiaires d’une rente de vieillesse de l’AVS également pour les dix années qui précèdent la naissance du droit à la rente (art. 11a al. 4 LPC).

Les al. 3 et 4 de l’art. 11a LPC ne s’appliquent toutefois qu’à la fortune qui a été dépensée après le 1er janvier 2021 (cf. al. 3 des Dispositions transitoires de la modification du 22 mars 2019 – Réforme des PC).

Selon l’art. 17e OPC-AVS/AI, le montant de la fortune qui a fait l’objet d’un dessaisissement au sens de l’art. 11a al. 2 et 3 LPC et qui doit être pris en compte dans le calcul de la prestation complémentaire est réduit chaque année de CHF 10'000.- (al. 1). Le montant de la fortune au moment du dessaisissement doit être reporté tel quel au 1er janvier de l’année suivant celle du dessaisissement pour être ensuite réduit chaque année (al. 2). Est déterminant pour le calcul de la prestation complémentaire annuelle le montant réduit de la fortune au 1er janvier de l’année pour laquelle la prestation est servie (al. 3).

Si un dessaisissement de fortune a eu lieu au cours de la période considérée en raison de l’aliénation de parts de fortune, au sens de l’art. 17b let. a OPC-AVS/AI, le montant des parts de fortune dessaisies, réduit de CHF 10'000.- par année (cf. art. 17e al. 1 OPC-AVS/AI) doit être ajouté à la fortune effective pour la détermination de la consommation admise (DPC ch. 3533.10).

En cas de solde restant, doivent ensuite être déduites les diminutions de la fortune pour un autre motif important au sens de l’art. 17d al. 3 let. b ch. 1 à 5 OPC-AVS/AI et les éventuelles pertes de fortune involontaires au sens de l’art. 17d al.3 let. c OPC-AVS/AI (DPC ch. 3533.28).

Tout éventuel solde restant doit être considéré comme une part de fortune dessaisie dans le calcul de la prestation complémentaire, à prendre en compte à partir du 1er janvier de l’année suivant l’année civile durant laquelle la consommation excessive a eu lieu (DPC ch. 3533.29).

5.2 Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 353 consid. 5b et les références; ATF 125 V 193 consid. 2 et les références; cf. ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 135 V 39 consid. 6.1 et la référence).

5.3 Par ailleurs, la procédure est régie par le principe inquisitoire, selon lequel les faits pertinents de la cause doivent être constatés d'office par le juge. Mais ce principe n'est pas absolu. Sa portée est restreinte par le devoir des parties de collaborer à l'instruction de l'affaire. Celui-ci comprend en particulier l'obligation des parties d'apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d'elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués, faute de quoi elles risquent de devoir supporter les conséquences de l'absence de preuves (ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). En particulier, dans le régime des prestations complémentaires, l'assuré qui n'est pas en mesure de prouver que ses dépenses ont été effectuées moyennant contre-prestation adéquate ne peut pas se prévaloir d'une diminution correspondante de sa fortune, mais doit accepter que l'on s'enquière des motifs de cette diminution et, en l'absence de la preuve requise, que l'on tienne compte d'une fortune hypothétique (arrêt du Tribunal fédéral P 65/04 du 29 août 2005 consid. 5.3.2; VSI 1994 p. 227 consid. 4b). Mais avant de statuer en l'état du dossier, l'administration devra avertir la partie défaillante des conséquences de son attitude et lui impartir un délai raisonnable pour la modifier; de même devra-t-elle compléter elle-même l'instruction de la cause s'il lui est possible d'élucider les faits sans complications spéciales, malgré l'absence de collaboration d'une partie (cf. ATF 117 V 261 consid. 3b; ATF 108 V 229 consid. 2; arrêt du Tribunal fédéral P 59/02 du 28 août 2003 consid. 3.3 et les références).

6.             En l’espèce, l’intimé a constaté dans sa décision du 1er juin 2022 que la recourante n’avait pas droit aux prestations complémentaires dès le 1er février 2022, car sa fortune nette était supérieure au seuil prévu par la loi. L’intimé a fondé cette décision sur la prise en compte d’un bien dessaisi de CHF 90'801.- pour l’année 2022, en tenant compte du fait que la recourante avait utilisé une partie de sa fortune sans contreprestations valables.

Dans sa décision sur opposition du 18 août 2022, qui confirme la décision du 1er juin 2022, l’intimé a repris le calcul de la fortune dessaisie et expliqué que la recourante avait perçu EUR 170'896.- selon l’acte notarié du 24 janvier 2020, sur la vente de son bien immobilier sis en France, correspondant à CHF 185'490.- (x 1,0854) et que sa fortune totale au 31 décembre 2019 s’élevait à CHF 187'646.- en tenant compte en plus de son épargne à hauteur de CHF 2'156.-.

L’immeuble a été vendu en janvier 2020 et la recourante a reçu sur son compte privé au Crédit Suisse la somme de CHF 178'526.57 le 30 janvier 2020. Faute d’explication sur la différence entre le montant indiqué sur le décompte notarial établi le 24 janvier 2020 qui mentionnait que EUR 170'896.- (CHF 185'490.-) devaient être versé à la recourante suite à la vente de son bien immobilier et le montant qu’elle a effectivement reçu le 30 janvier 2020, il y a lieu de s’en tenir au montant figurant sur l’acte notarié, qui est davantage probant.

L’intimé a ensuite constaté qu’au 31 décembre 2021, la fortune de la recourante ne s’élevait plus qu’à CHF 58'820.- selon l’avis de taxation 2020, alors que compte tenu de ses revenus déterminants (CHF 10'026.-), de ses besoins vitaux et de ses dépenses justifiées (CHF 33'509.-), sa fortune aurait encore dû s’élever à CHF 138'289.-. Le montant dessaisi durant 2020 s’élevait ainsi à CHF 79'469.- (CHF 138'289.- – CHF 58'820.-), soit un montant amorti de CHF 69'469.- à prendre en compte dans sa fortune dès janvier 2022.

L’intimé a ensuite considéré sur la base des extraits du compte bancaire produits que la fille de la recourante avait vraisemblablement fait des dépenses en faveur de sa mère à hauteur de CHF 29'656.-. À ce montant, il a ajouté les frais médicaux et bancaires qui ressortaient de l’avis de taxation de la recourante pour l’année 2020, soit respectivement CHF 3'841.- et CHF 12.-, et considéré que le total de ces montants, soit CHF 33'509.-, pouvait être considéré comme des contreprestations justifiées d’une partie de la fortune dont la recourante s’était dessaisie.

L’intimé a ainsi correctement établi le montant de fortune dessaisi, en application du droit applicable. La recourante n’ayant pas été en mesure d’apporter la preuve de contreprestations valables pour la totalité du montant dessaisi, en particulier qu’elle aurait versé plus de CHF 29'656.- à sa fille à titre de remboursement d’avances faites par cette dernière en sa faveur, elle doit supporter le fardeau de la preuve.

Il en résulte que la décision querellée repose sur une évaluation correcte de la fortune de la recourante qui exclut son droit aux prestations complémentaire dès le 1er février 2022 et qu’elle doit être confirmée.

7.             Infondé, le recours sera rejeté.

La procédure est gratuite (art. 61 let. fbis a contrario LPGA).

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Isabelle CASTILLO

 

La présidente

 

 

 

 

Catherine TAPPONNIER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le