Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public
ATAS/374/2023 du 24.05.2023 ( CHOMAG ) , ADMIS
En droit
rÉpublique et | 1.1 canton de genÈve![endif]>![if> | |
POUVOIR JUDICIAIRE
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A/8/2023 ATAS/374/2023 COUR DE JUSTICE Chambre des assurances sociales | ||
Arrêt du 24 mai 2023 Chambre 4 |
En la cause
A______
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recourant |
contre
CAISSE CANTONALE GENEVOISE DE CHÔMAGE
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intimée |
A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré ou le recourant), né le ______ 1971, est divorcé et père de deux enfants.![endif]>![if>
b. Il a travaillé du 25 avril 2002 au 31 juillet 2022 pour l’entreprise B______ AG (ci-après l’employeur), qui l’a licencié en respectant le délai de congé, en raison de plusieurs avertissements concernant des arrivées tardives et un comportement inadéquat. Dans sa lettre de congé du 14 mars 2022, l’employeur demandait à l’assuré de planifier avec son supérieur direct les tâches qui lui restaient à accomplir tout en tenant compte du fait que son solde de vacances devait être pris avant son dernier jour de travail. Ce congé n’a pas été contesté par l’assuré.![endif]>![if>
c. Il s’est inscrit auprès de l’office cantonal de l’emploi le 3 mai 2022 pour une date de placement au 1er juillet 2022, et a sollicité le versement des indemnités de chômage auprès de la caisse cantonale genevoise de chômage (ci-après : la caisse ou l’intimée) dès le 1er août 2022.![endif]>![if>
d. L’employeur de l’assuré a indiqué, dans une attestation du 3 août 2022, avoir résilié le rapport de travail, car la collaboration n’était plus possible, en raison d’une rupture du lien de confiance, en se référant à la lettre de congé.![endif]>![if>
e. Le 31 août 2022, il a précisé à la caisse que le motif du licenciement de l’assuré était un comportement inadéquat avec un client.![endif]>![if>
f. L’assuré a indiqué à la caisse le 24 septembre 2022 qu’il n’avait pas été licencié pour un comportement inadéquat et qu’il avait fait l’objet d’avertissements écrits, mais pas d’avertissements oraux. Il avait eu un accord tacite avec son responsable lui permettant d’arriver plus tard pour pouvoir déposer ses enfants à l’école, accord qui avait été remis en cause en 2013. Le problème avait été résolu, car il avait changé d’organisation pour ses enfants. Il n’avait pas commis d’erreur dans sa fonction, mais son employeur lui reprochait d’avoir adressé un mail maladroit à un partenaire (C______). Il s’agissait toutefois d’un prétexte pour le licencier, suite à une diminution de contrats. Il avait agi involontairement et pensait qu’il serait soutenu et pas licencié après 25 ans de travail. Il n’avait pas contesté son licenciement.![endif]>![if>
L’assuré a transmis à la caisse :
- une lettre d’avertissement qui lui avait été adressée par son ex-employeur le 7 février 2013, lui rappelant qu’il avait déjà fait l’objet d’observations verbales concernant ses retards et son comportement. Malheureusement, il n’en avait pas tenu compte puisque le 6 février, il avait abandonné son poste sans justification valable. Il lui était également rappelé que l’inobservation des horaires constituait un manquement à ses obligations contractuelles et que cela nuisait au bon fonctionnement de l’entreprise. L’employeur espérait que cet avertissement écrit lui ferait prendre conscience de l’impérieuse nécessité de changer d’attitude.![endif]>![if>
- une lettre d’avertissement du 31 août 2017, rappelant à l’assuré qu’il avait fait l’objet d’observations à de nombreuses reprises ainsi que d’un avertissement. L’employeur avait espéré que ces écrits suffiraient à faire cesser cette attitude qui portait atteinte au bon fonctionnement du service. Malheureusement, l’assuré n’en avait pas tenu compte. Il lui était également rappelé que la consommation d’alcool était strictement interdite pendant les heures de travail. L’employeur espérait vivement que ce nouvel et dernier avertissement écrit lui ferait prendre conscience de l’impérieuse nécessité de changer d’attitude.![endif]>![if>
g. Le 4 octobre 2022, l’employeur a indiqué à la caisse que l’assuré avait été licencié pour un comportement inadéquat avec un client, auquel il avait adressé un mail de façon maladroite, selon les termes de l’assuré. Le motif d’arrivées tardives n’aurait pas généré un licenciement. La collaboration avec le client en cause n’avait pas été rompue, mais elle l’aurait été si l’employeur avait gardé l’assuré. Celui-ci s’était excusé auprès du client. Il était exact que le soir où l’assuré avait rédigé le mail, il avait passé une mauvaise journée liée à des raisons privées compréhensibles et qu’il n’avait pas pour habitude d’adopter ce genre de comportement dans l’exercice de ses fonctions. Les rapports de travail avaient été rompus en raison d’un manque de confiance et du comportement de l’assuré qui avait fait l’objet d’avertissements oraux. C’était son comportement qui faisait défaut. Son travail était fait de manière convenable et satisfaisante.![endif]>![if>
h. Le 14 octobre 2022, l’employeur a précisé que le licenciement avait été décidé en raison du mail maladroit de l’assuré et de son comportement en général, pour lequel il avait fait l’objet d’avertissements oraux. Il s’agissait d’actes répétés, mais pas similaires, ayant engendré des avertissements. S’il n’avait pas licencié l’assuré, il aurait perdu le client ayant fait l’objet du mail maladroit. Il n’acceptait pas ce comportement de la part de ses collaborateurs. Il s’agissait toujours d’un motif de licenciement.![endif]>![if>
i. Par décision du 19 octobre 2022, la caisse a prononcé contre l’assuré une suspension de 18 jours du droit à l’indemnité, au motif que son licenciement avait été décidé suite à plusieurs avertissements oraux et écrits lui reprochant des arrivées tardives et un comportement inadéquat. L’assuré n’avait pas contesté les motifs invoqués par son employeur, ni recouru contre son licenciement auprès du tribunal des prud’hommes. S’il n’avait pas eu un comportement inapproprié envers son employeur, ce dernier ne l’aurait pas licencié et il n’aurait pas émargé à l’assurance-chômage. En tenant compte de l’ensemble des circonstances, son comportement devait être sanctionné par une suspension de son droit à l’indemnité de 18 jours, correspondant à une faute moyenne. ![endif]>![if>
j. L’assuré a formé opposition à cette décision expliquant que les avertissements reçus étaient injustifiés et que la décision de le licencier n’avait aucun rapport avec ceux-ci. ![endif]>![if>
La direction de Zurich avait pris la décision de licencier suite à un mail qu’il avait envoyé à un client, dans lequel il se plaignait du fonctionnement de sa plateforme Web pour l’obtention d’une certification de sa part. Son employeur avait en réalité trouvé un prétexte pour le licencier et le remplacer par un technicien plus jeune et moins cher.
k. Par décision sur opposition du 2 décembre 2022, la caisse a confirmé la suspension du droit à l’indemnité de 18 jours.![endif]>![if>
B. a. Le 8 janvier 2023, l’assuré a formé recours contre la décision précitée auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après CJCAS), concluant à l’annulation de la sanction prononcée.![endif]>![if>
b. Le 31 janvier 2023, l’intimée a conclu au rejet du recours.![endif]>![if>
c. Le recourant a été entendu lors d’une audience du 29 mars 2023.![endif]>![if>
d. Le 30 mars 2023, la CJCAS a demandé à l’employeur du recourant de lui préciser les dates auxquelles l’assuré avait fait l’objet d’avertissements oraux et les faits qui lui étaient reprochés ainsi que de lui transmettre une copie du courriel reproché au recourant et toute pièce pouvant attester de la volonté du client concerné de résilier son contrat si le recourant n’était pas licencié, selon ce que l’employeur avait indiqué dans un courriel du 14 octobre 2022.![endif]>![if>
e. L’employeur a refusé de transmettre à la CJCAS les documents demandés, arguant du fait qu’il risquait d’enfreindre la loi sur la protection des données.![endif]>![if>
1. Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité, du 25 juin 1982 (loi sur l’assurance-chômage, LACI - RS 837.0).![endif]>![if>
Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.
2. Interjeté en temps utile, le recours est recevable (art. 60 LPGA).![endif]>![if>
3. Le litige porte sur le bien-fondé de la suspension du droit du recourant à l'indemnité de chômage pendant 18 jours pour chômage fautif.![endif]>![if>
4. ![endif]>![if>
4.1 Selon l’art. 30 al. 1 let. a LACI, il convient de sanctionner par une suspension du droit à l’indemnité de chômage celui qui est sans travail par sa propre faute. Tel est notamment le cas de l’assuré qui, par son comportement, en particulier par la violation de ses obligations contractuelles de travail, a donné à son employeur un motif de résiliation du contrat de travail (art. 44 al. 1 let. a de l’ordonnance du 31 août 1983 sur l’assurance-chômage obligatoire et l’indemnité en cas d’insolvabilité [OACI]). La suspension du droit à l’indemnité prononcée en raison du chômage dû à une faute de l’assuré ne suppose pas une résiliation des rapports de travail pour justes motifs au sens des art. 337 et 346 al. 2 du Code des obligations (loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse [CO - RS 220]). Il suffit que le comportement général de l’assuré ait donné lieu au congédiement de celui-ci, même sans qu’il y ait des reproches d’ordre professionnel à lui faire. Tel peut être le cas aussi lorsque l’employé présente un caractère, dans un sens large, qui rend les rapports de travail intenables (ATF 112 V 244 consid. 1 ; arrêt du Tribunal fédéral C 362/00 du 12 janvier 2001 consid. 4).![endif]>![if>
Il n'y a chômage fautif que si la résiliation est consécutive à un dol ou à un dol éventuel de la part de l'assuré. Il y a dol lorsque l'assuré adopte intentionnellement un comportement en vue d'être licencié. Il y a dol éventuel lorsque l'assuré sait que son comportement peut avoir pour conséquence son licenciement et qu'il accepte de courir ce risque (Circulaire du Secrétariat d'État à l'économie (SECO) relative à l'indemnité de chômage, janvier 2015, D18).
Une suspension du droit à l’indemnité ne peut être infligée à l’assuré que si le comportement qui lui est reproché est clairement établi. Lorsqu’un différend oppose l’assuré à son employeur, les seules affirmations de celui-ci ne suffisent pas à établir une faute contestée par l’assuré et non confirmée par d’autres preuves ou indices aptes à convaincre l’administration ou le juge (ATF 112 V 245 consid. 1; arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 362/00 du 12 janvier 2001 consid. 4). Aucune suspension pour chômage fautif ne sera prononcée lorsque le comportement de l'assuré est excusable (Circulaire du SECO, §D22).
Il doit y avoir un lien de causalité juridiquement pertinent entre le motif de licenciement, c'est-à-dire le comportement fautif de l'assuré, et le chômage (Circulaire du SECO, D15).
L'art. 44 al. 1 let. a de l'ordonnance sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité (OACI - RS 837.02) dispose qu'est notamment réputé sans travail par sa propre faute l’assuré. Est notamment réputé sans travail par sa propre faute l’assuré qui par son comportement, en particulier par la violation de ses obligations contractuelles de travail, a donné à son employeur un motif de résiliation du contrat de travail.
4.2 Une preuve absolue n'est pas requise en matière d'assurances sociales. L'administration et le juge fondent leur décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute le cas échéant d'être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c'est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu'un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 ; 126 V 353 consid. 5b ; 125 V 193 consid. 2 et les références).![endif]>![if>
5. En l’espèce, la CJCAS constate que ne figurent au dossier que deux avertissements écrits au recourant, qui datent de 2013 et 2017, soit plusieurs années avant son licenciement et dans lesquels l’employeur se plaignait de comportements inadéquats et d’arrivées tardives. Ces avertissements ne permettent pas de considérer que le licenciement survenu en 2022, soit cinq ans et neuf ans plus tard, était fautif.![endif]>![if>
L’employeur n’a pas donné d’information sur les dates et motifs des avertissements oraux qui auraient été faits au recourant, de sorte qu’il n’y a pas lieu d’en tenir compte.
Quant au dernier manquement reproché au recourant juste avant son licenciement, l’employeur n’a pas produit le message reproché au recourant, ni de pièces attestant de la réaction du client concerné. Il n’est dès lors pas possible d’apprécier la gravité exacte du comportement reproché. Elle apparaît toutefois relative, puisque le recourant a, selon les pièces du dossier, agi sous le coup d’une émotion et qu’il s’est spontanément excusé auprès du client concerné. Un tel manquement sur 25 ans de rapport de travail n’apparaît pas assez grave pour que le licenciement apparaisse fautif. Par ailleurs, comme l’a relevé le recourant, le lien de confiance avec lui n’était apparemment pas rompu, puisque son employeur l’a fait travailler normalement pendant son délai de congé, ce qui est établi par le contenu de la lettre de licenciement et la fiche de salaire pour le mois de juillet 2022 produite par le recourant, dont il ressort qu’il a touché une indemnité pour une permanence faite ce mois-là. Le recourant n’a enfin pas agi dans le but de se faire licencier.
Dans ces circonstances, il n’est pas établi au degré de la vraisemblance prépondérante que le recourant se trouve au chômage de manière fautive, de sorte que les conditions d’une suspension de l’indemnité de chômage, au sens de l’art. 30 al. 1 let. a LACI, ne sont pas remplies.
6. Le recours sera en conséquence admis et la décision sur opposition annulée. ![endif]>![if>
Il ne sera pas alloué d’indemnité de procédure au recourant, qui n'est pas assisté d'un conseil et qui n’a pas fait valoir de frais engendrés par la procédure (art. 61 let. g LPGA).
7. La procédure est gratuite.![endif]>![if>
PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :
Statuant
À la forme :
1. Déclare le recours recevable.![endif]>![if>
Au fond :
2. L’admet.![endif]>![if>
3. Annule la décision sur opposition du 2 décembre 2022.![endif]>![if>
4. Dit que la procédure est gratuite.![endif]>![if>
5. Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.![endif]>![if>
La greffière
Isabelle CASTILLO |
| La présidente
Catherine TAPPONNIER |
Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d'État à l'économie par le greffe le