Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public
ATA/1240/2025 du 04.11.2025 sur JTAPI/123/2025 ( ICCIFD ) , IRRECEVABLE
En droit
| RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||||
| POUVOIR JUDICIAIRE A/2509/2024-ICCIFD ATA/1240/2025 COUR DE JUSTICE Chambre administrative Arrêt du 4 novembre 2025 4ème section |
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dans la cause
A______ recourante
contre
ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE
ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS intimées
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Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 3 février 2025 (JTAPI/123/2025)
A. a. A______ a fait l'objet de décisions de taxation pour l’impôt fédéral direct (ci-après : IFD) et l'impôt cantonal et communal (ci-après : ICC) datées des 12 mai 2021 (année fiscale 2020), 27 juillet 2022 (année fiscale 2021), 21 juillet 2023 (année fiscale 2022) et 24 mai 2024 (année fiscale 2023).
b. Le 5 juin 2024, faisant valoir divers éléments, elle a prié l’administration fiscale cantonale (ci-après : AFC-GE) de vérifier ses taxations depuis juin 2020 et, le cas échéant, d’effectuer les corrections nécessaires.
c. L’AFC-GE a considéré que ce courrier constituait une réclamation.
d. Par décision du 16 juillet 2024, elle a déclaré la réclamation, en tant qu’elle concernait les années fiscales 2020 à 2022, irrecevable pour cause de tardiveté.
Concernant l’année fiscale 2023, l’AFC-GE est entrée en matière sur la réclamation et a notifié à la contribuable des taxations rectificatives.
B. a. Par acte du 29 juillet 2024, A______ a interjeté recours contre les décisions ayant trait aux années fiscales 2020 à 2022 auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI).
b. Par jugement du 3 février 2025, le TAPI a rejeté le recours.
La date de la notification des bordereaux des 12 mai 2021, 27 juillet 2022 et 21 juillet 2023 n'était pas connue, ceux-ci ayant été envoyés à la contribuable par pli simple. Cela étant, cette dernière n’indiquant dans aucune de ses écritures à quelle date elle avait reçu ces bordereaux, ni ne contestant qu’ils lui avaient été communiqués, il convenait de retenir qu’ils lui avaient été notifiés dans les quelques jours qui avaient suivi ces dates. Or, elle n’avait réclamé qu’en juin 2024, soit largement hors du délai légal de 30 jours, et elle ne faisait valoir aucun motif qui l’aurait concrètement empêchée d’agir en temps utile ou de désigner un tiers pour s’en charger à sa place.
De plus, les conditions d’entrée en matière sur une reconsidération ou une révision des taxations litigieuses n'étaient manifestement pas remplies, dès lors que la contribuable invoquait des motifs de fond qu’elle aurait déjà pu faire valoir au cours de la procédure ordinaire de réclamation.
Selon le suivi des envois de la Poste, ce jugement, envoyé par pli recommandé, a été distribué à A______ le vendredi 7 février 2025 à 10h28.
C. a. Par acte posté le 24 juin 2025, A______ a interjeté recours auprès du Tribunal fédéral contre le jugement précité, en demandant la « révision » de celui-ci. L'AFC-GE s'était trompée en lui appliquant un barème qui ne la concernait pas, erreur qu'il ne lui était pas possible de déceler.
b. Par courrier du 26 juin 2025, le Tribunal fédéral a transmis cet acte à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) pour raison de compétence. L'envoi a été reçu le lendemain par la chambre administrative.
c. Sur ce, la cause a été gardée à juger.
1. La chambre de céans examine d'office la recevabilité des recours qui lui sont soumis (art. 11 al. 2 LPA ; ATA/1013/2025 du 16 septembre 2025 consid. 1 ; ATA/460/2025 du 29 avril 2025 consid. 1).
2. Se pose la question de l'observation du délai de recours.
2.1 Le délai de recours est de 30 jours s’il s’agit d’une décision finale ou d’une décision en matière de compétence (art. 62 al. 1 let. a LPA).
2.2 Les écrits doivent parvenir à l’autorité ou être remis à son adresse à un bureau de poste suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse au plus tard le dernier jour du délai avant minuit (art. 17 al. 4 LPA). Lorsque le dernier jour du délai tombe un samedi, un dimanche ou sur un jour légalement férié, le délai expire le premier jour utile (art. 17 al. 3 LPA).
2.3 Les délais de recours fixés par la loi sont des dispositions impératives de droit public. Ils ne sont, en principe, pas susceptibles d’être prolongés (art. 16 al. 1 1re phr. LPA), restitués ou suspendus, si ce n’est par le législateur lui-même. Celui qui n’agit pas dans le délai prescrit est forclos et la décision en cause acquiert force obligatoire (SJ 2000 I 22 ; ATA/1240/2019 du 13 août 2019 consid. 4a). L'irrecevabilité qui sanctionne le non-respect d'un délai n'est pas constitutive d'un formalisme excessif prohibé par l'art. 29 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst - RS 101), une stricte application des règles relatives aux délais étant justifiée par des motifs d'égalité de traitement et par un intérêt public lié à une bonne administration de la justice et à la sécurité du droit (ATF 125 V 65 consid. 1 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_659/2021 du 24 février 2022 consid. 2.1 ; 6B_1079/2021 du 22 novembre 2021 consid. 2.1).
2.4 Aux termes de l'art. 16 LPA, les cas de force majeure sont réservés (al. 1) ; le délai imparti par l'autorité peut être prolongé pour des motifs fondés si la partie en fait la demande avant son expiration (al. 2) ; la restitution pour inobservation d'un délai imparti par l'autorité peut être accordée si le requérant ou son mandataire a été empêché sans sa faute d'agir dans le délai fixé ; la demande motivée doit être présentée dans les dix jours à compter de celui où l'empêchement a cessé (al. 3).
Tombent sous la notion de force majeure les événements extraordinaires et imprévisibles qui surviennent en dehors de la sphère d'activité de l'intéressé et qui s'imposent à lui de façon irrésistible (arrêt du Tribunal fédéral 2C_566/2024 du 10 avril 2025 consid. 4.2 ; ATA/807/2024 du 9 juillet 2024 consid. 4.4). Les conditions pour admettre un empêchement sont très strictes. Ce dernier doit être imprévisible et sa survenance ne doit pas être imputable à faute à l'administré (arrêt du Tribunal fédéral 2P.259/2006 du 18 avril 2007 consid. 3.2 et la jurisprudence citée ; ATA/807/2024 précité consid. 4.4).
2.5 Le recours adressé à une autorité incompétente est transmis d’office à la juridiction administrative compétente et le recourant en est averti ; l’acte est réputé déposé à la date à laquelle il a été adressé à la première autorité (art. 64 al. 2 LPA).
Le Tribunal fédéral est régi par la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) et n'est pas une juridiction administrative au sens de l'art. 6 LPA.
2.6 Selon l'art. 80 LPA, il y a lieu à révision lorsque, dans une affaire réglée par une décision définitive, il apparaît : a) qu’un crime ou un délit, établi par une procédure pénale ou d’une autre manière, a influencé la décision ; b) que des faits ou des moyens de preuve nouveaux et importants existent, que le recourant ne pouvait connaître ou invoquer dans la procédure précédente ; c) que, par inadvertance, la décision ne tient pas compte de faits invoqués et établis par pièce ; d) que la juridiction n’a pas statué sur certaines conclusions des parties de manière à commettre un déni de justice formel ; ou e) que la juridiction qui a statué n’était pas composée comme la loi l’ordonne ou que les dispositions sur la récusation ont été violées.
La demande de révision doit être adressée par écrit à la juridiction qui a rendu la décision dans les trois mois dès la découverte du motif de révision (art. 81 LPA).
2.7 En l'espèce, le jugement du TAPI du 3 février 2025, que la recourante dit expressément vouloir attaquer, lui a été notifié le vendredi 7 février 2025. Le délai légal de 30 jours venait ainsi à échéance le lundi 10 mars 2025, le dernier jour du délai, soit le 9 mars 2025, étant un dimanche. L'envoi de la recourante du 23 juin 2025 était donc très largement tardif.
Par ailleurs, celle-ci ne fait état d'aucune circonstance assimilable à un cas de force majeure.
L'acte envoyé au Tribunal fédéral ne peut pas non plus, malgré l'utilisation du mot « révision », être compris comme une demande en révision qu'il conviendrait de renvoyer au TAPI pour examen à ce titre. En effet, il ne mentionne aucun motif de révision au sens de l'art. 80 LPA.
Le recours sera dès lors déclaré irrecevable, sans autre acte d'instruction conformément à l'art. 72 LPA.
3. Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 200.- sera mis à la charge de la recourante (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).
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PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE
déclare irrecevable le recours interjeté le 24 juin 2025 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 3 février 2025 ;
met un émolument de CHF 200.- à la charge d'A______ ;
dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;
dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession des recourants, invoquées comme moyens de preuve, doivent être jointes à l'envoi ;
communique le présent arrêt à A______, à l'administration fiscale cantonale, à l'administration fédérale des contributions ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.
Siégeant : Jean-Marc VERNIORY, président, Florence KRAUSKOPF, Michèle PERNET, juges.
Au nom de la chambre administrative :
| le greffier-juriste :
J. RAMADOO
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| le président siégeant :
J.-M. VERNIORY |
Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.
| Genève, le
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| la greffière :
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