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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/722/2024

ATA/1313/2024 du 12.11.2024 ( PROC ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/722/2024-PROC ATA/1313/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 12 novembre 2024

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Romain JORDAN, avocat

contre

DIRECTION DE LA POLICE DU COMMERCE ET DE LUTTE CONTRE LE TRAVAIL AU NOIR intimée

_________



EN FAIT

A. a. Par décision du 1er juin 2023, le service de police du commerce et de lutte contre le travail au noir, devenu depuis la direction de la police du commerce et de lutte contre le travail au noir (ci‑après : la direction), a révoqué la carte professionnelle de chauffeur de taxi d'A______, ordonné le dépôt de sa carte professionnelle de chauffeur de taxi et des plaques d’immatriculation GE 1______.

Les dispositions du nouveau droit étaient applicables. L’art. 6 al. 2 let. b du règlement d’exécution de la loi sur les taxis et les voitures de transport avec chauffeur du 21 juin 2017 (RTVTC - H 1 31 01) mentionnait expressément une décision administrative prononcée pour des infractions à la loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958 (LCR - RS 741.01) ayant entraîné un retrait de permis selon l’art. 16b LCR.

b. Par arrêt ATA/78/2024 du 23 janvier 2024, la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) a partiellement admis le recours formé par A______ contre la décision du PCTN du 1er juin 2023. Elle a retenu que la révocation de l’AUADP et le refus de la renouveler n’étaient pas fondés. La décision devait être annulée et le service concerné invité à compléter son instruction avant de rendre une nouvelle décision. Une indemnité de procédure de CHF 1'000.- était allouée au recourant, étant précisé que cette cause était la première d'une série jugée par la chambre administrative, dans lesquelles la plupart des recourants était défendue par le même avocat.

c. Le mémoire de recours comptait 13 pages et la réplique 5 pages. 7 pièces étaient produites.

B. a. Par acte expédié le 28 février 2024 à la chambre administrative, A______ a formé réclamation, souhaitant que l’indemnité de procédure soit portée à CHF 4'324.40, soit la moitié de ses frais et qu’une indemnité de procédure de CHF 339.10 lui soit allouée pour la procédure de réclamation.

Il avait obtenu gain de cause et avait droit à l’allocation d’une indemnité de procédure. Le montant devait être fixé en prenant en considération : l’importance de la cause ; le fait qu'elle ait nécessité un examen approfondi des travaux préparatoires de la nouvelle loi sur les taxis et les voitures de transport avec chauffeur du 13 octobre 2016 (LTVTC - H 1 31) ; la production d’un mémoire de recours détaillé comportant cinq griefs différents ; une réplique circonstanciée ; le fait que l’intimée avait acquiescé à sa conclusion principale ; le nombre d’heures d’activité proportionnée conformément à l’état de fait produit ; l’erreur commise par l’État impliquant qu’il ne subît aucun préjudice, conformément à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'Homme (ci-après : CourEDH). Une indemnité équivalant à la moitié de ses frais devait ainsi lui être allouée.

Il a présenté le relevé d’activité de son conseil du 2 juin au 8 novembre 2023, sur lequel il sera revenu ci-après, dans la partie « En droit ».

b. Le 25 avril 2024, la direction a répondu à la réclamation sans prendre de conclusions formelles. Elle ne s'opposait pas à l'octroi d'une indemnité de procédure, mais contestait le montant articulé.

Le travail était identique à celui effectué dans cinq causes parallèles, dans lesquelles une indemnité de CHF 500.- avait été allouée.

c. Le juge délégué a fixé aux parties un délai au 17 mai 2024 pour formuler toutes requêtes ou observations complémentaires, après quoi la cause serait gardée à juger.

d. Le 14 mai 2024, la direction a indiqué ne pas avoir d'observations complémentaires à formuler.

e. Le 17 mai 2024, A______ a persisté dans ses conclusions. L'activité effective de son avocat avait conduit à une facture d'honoraires de CHF 6'970.-. Il avait conclu à une part réduite de ses frais effectifs, dès lors que son recours n'avait été que partiellement admis. Les faits de chacune des causes mentionnées par la direction dans sa réponse étaient différents, de sorte que le travail nécessaire à cet examen n'était pas réduit par l'existence de causes parallèles.

EN DROIT

1.             Formée en temps utile devant la juridiction compétente, la réclamation est recevable (art. 132 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a et 87 al. 4 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2.             Le réclamant se plaint du montant insuffisant de l’indemnité de procédure au regard des frais qu’il a dû exposer.

2.1 La chambre de céans statue sur les frais de procédure, indemnités et émoluments dans les limites établies par règlement du Conseil d’État et conformément au principe de la proportionnalité (art. 87 al. 1 et 3 LPA ; ATA/1076/2024 du 10 septembre 2024 consid. 2.1 ; ATA/779/2022 du 9 août 2022 consid. 2a).

2.2 Elle peut, sur requête, allouer à la partie ayant eu entièrement ou partiellement gain de cause une indemnité pour les frais indispensables causés par le recours (art. 87 al. 2 LPA).

2.3 L’art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), intitulé « indemnité », prévoit que la juridiction peut allouer à une partie pour les frais indispensables occasionnés par la procédure, y compris les honoraires d’un avocat, une indemnité de CHF 200.- à CHF 10'000.-.

2.4 La juridiction saisie dispose d’un large pouvoir d’appréciation quant à la quotité de l’indemnité allouée et, de jurisprudence constante, celle-ci ne constitue qu’une participation aux honoraires d’avocat (ATA/1076/2024 précité consid. 2.3 et les arrêts cités ; ATA/1191/2022 du 29 novembre 2022 consid. 2b), ce qui résulte aussi, implicitement, de l’art. 6 RFPA, dès lors que ce dernier plafonne l’indemnité à CHF 10'000.-.

2.5 Pour déterminer le montant de l’indemnité, il convient de prendre en compte les différents actes d’instruction, le nombre d’écritures et d’audiences. Le montant retenu doit intégrer l’importance et la pertinence des écritures produites et de manière générale la complexité de l’affaire (ATA/1076/2024 précité consid. 2.4 ; ATA/1272/2022 du 19 décembre 2022 consid. 2c).

2.6 En l’espèce, le réclamant conclut à l’allocation d’une indemnité de CHF 4'324.40 correspondant à une partie des frais exposés pour la procédure de recours (selon l'acte de recours, la moitié ; selon la réplique, 62% d'entre eux) et l’entier des frais pour la procédure de réclamation en CHF 339.10.

L’avocat du recourant a fait valoir 20h10 d’activité en 2023 et 1h20 en 2024. L’analyse de la décision, la rédaction et l’envoi du recours entre le 9 juin 2023 et le 3 juillet 2023 totalisent 7h30. La rédaction de la réplique les 26 et 27 septembre 2023 représente 1h30.

Le recours comportait 13 pages, dont une de garde, une de conclusions, une reprenant le dispositif de la décision attaquée, deux pages de faits et 8 de droit dont seules 3 traitaient d’un grief qui n’a pas été rejeté. La réplique comprenait 5 pages dont moins de 2 consacrées au grief pertinent. 7 pièces étaient produites. Aucune audience n’a été tenue.

En outre, la problématique était identique à d’autres dossiers traités par le même mandataire. La cause du recourant a donné lieu à l'arrêt de principe sur la problématique, tandis que cinq causes semblables jugées postérieurement ont débouché sur le même résultat.

Les griefs soulevés par le recourant étaient dans une très large mesure similaires à ceux des autres causes jugées après coup. Le traitement de plusieurs dossiers similaires fonde, notamment au vu du gain de temps induit, l’allocation d’une indemnité de procédure moindre dès le second dossier (arrêts du Tribunal fédéral du 21 février 2019 8D_2/2018 consid. 8 ; 4A_91/2010 du 29 juin 2010). C'est ainsi pour cette raison qu'une indemnité plus élevée (CHF 1'000.-) a été allouée dans le présent dossier.

De surcroît, le recours n’a été admis que très partiellement. Il a soulevé les griefs de violation du droit d’être entendu, de violation des principes de la bonne foi, de non-rétroactivité des lois, de l'interdiction de la double poursuite (ne bis in idem), ainsi qu’une violation de la LIPAD qui ont tous été écartés. Seul a été admis son grief relatif à l'excès du pouvoir d'appréciation et de la proportionnalité sous l’angle de l’atteinte à sa liberté économique.

L’indemnité de CHF 1'000.- qui lui a été allouée par l’arrêt querellé, et qui représente 14% environ des frais d’avocat allégués, de CHF 6'970.-, n’apparaît pas, dans ces circonstances, contraire aux principes évoqués plus haut. Elle doit par conséquent être confirmée.

À l’appui de sa réclamation, l’intéressé invoque enfin la jurisprudence de la CourEDH rappelant le principe selon lequel le risque de toute erreur commise par l’autorité publique doit être supporté par l’État lui-même (ACEDH Zustovic c. Croatie du 22 avril 2021, req. n° 27903/15).

Cette argumentation tombe à faux, la vocation de l’indemnité de procédure n’étant pas de compenser ou d’indemniser les atteintes que le recourant aurait subies, selon lui, de l’autorité publique (ATA/149/2023 du 14 février 2023 consid. 4 ; ATA/306/2021 du 9 mars 2021 consid. 4).

Mal fondée, la réclamation sera rejetée.

3.             Conformément à la pratique courante de la chambre de céans, aucun émolument ne sera prélevé dans le cadre de la présente procédure de réclamation (art. 87 al. 1 LPA). Vu son issue, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable la réclamation formée le 28 février 2024 par A______ contre l’arrêt de la chambre administrative de la Cour de justice du 23 janvier 2024 ;

 

au fond :

la rejette ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ni alloué d’indemnité de procédure pour la présente réclamation ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Romain JORDAN, avocat du réclamant, ainsi qu’à la direction de la police du commerce et de lutte contre le travail au noir.

Siégeant : Michèle PERNET, présidente, Florence KRAUSKOPF, Jean-Marc VERNIORY, Patrick CHENAUX, Claudio MASCOTTO, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. SCHEFFRE

 

 

la présidente siégeant :

 

 

M. PERNET

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :