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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2765/2021

ATA/827/2022 du 23.08.2022 ( FPUBL ) , REJETE

Descripteurs : RAPPORTS DE SERVICE DE DROIT PUBLIC;FONCTION;MODIFICATION(EN GÉNÉRAL);CLASSE DE TRAITEMENT;CAHIER DES CHARGES
Normes : Cst.29.al2; Cst.5.al2; Cst.8.al1; Cst.9; LOCAS.6; LTrait.4.al2; RPAC.6.al1
Résumé : En procédant à la réévaluation de l’ensemble de ses fonctions, dont celle des recourantes, l’établissement de droit public en cause n’a commis aucun abus de la très grande liberté d’appréciation dont il dispose pour organiser les rapports avec son personnel. Rejet des recours.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2765/2021-FPUBL ATA/827/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 23 août 2022

 

dans la cause

 

Madame A______
Madame B______
Madame C______
Madame D______
Madame E______
Madame F______

représentées par Me Sarah Braunschmidt Scheidegger, avocate

contre

OFFICE CANTONAL DES ASSURANCES SOCIALES
représenté par Mes François Bellanger et Bénédicte Dayen, avocats


EN FAIT

1) Mesdames A______, B______, C______, D______, E______ et F______ (ci-après : les infirmières) sont au bénéfice d’un diplôme en soins infirmiers ainsi que de diverses spécialisations dans le domaine de la santé. Elles ont été engagées à l’office cantonal des assurances sociales (ci-après : OCAS), établissement de droit public autonome doté de la personnalité juridique ayant son siège à Genève (art. 1 al. 2 de la loi relative à l’OCAS du 20 septembre 2002 - LOCAS - J 4 18) en qualité d’infirmières spécialisées, d’infirmières enquêtrices ou d’infirmières évaluatrices, postes colloqués en classe 16 de l’échelle des traitements de l’État de Genève.

2) En 2010, le Conseil d’État a initié le projet Système Compétence Rémunération Évaluation (ci-après : SCORE) visant à la réforme du système de rémunération au sein de l’État.

3) En marge de ce projet, l’OCAS a entamé une réflexion à l’interne, consultant également la commission du personnel, en vue de la réévaluation de ses fonctions.

4) Durant l’année 2018, la direction générale de l’OCAS (ci-après : la direction) a présenté à la commission du personnel et au conseil d’administration de l’OCAS un nouveau positionnement des postes et un nouveau modèle d’organisation en lien avec le projet SCORE.

Il ressortait du document « Power Point » présenté à ces occasions que le projet SCORE était une opportunité pour l’OCAS de simplifier l’organisation des fonctions, d’augmenter leur cohérence et de favoriser la maîtrise dudit projet afin que la collocation des fonctions reflète son organisation interne, différente de celle de l’État. Au lieu d’adresser toutes les fonctions de l’OCAS à l’office du personnel de l’État (ci-après : OPE) « en vrac », il avait été jugé préférable de mener une analyse consistant à mettre en valeur et à favoriser leur compréhension. Il s’agissait en particulier de s’assurer que lors de la collocation effectuée par l’OPE, les compétences réelles de l’OCAS soient valorisées le plus justement possible. À cette fin, l’OCAS avait mis à disposition de l’OPE des cahiers des charges reflétant le plus précisément possible les responsabilités et les tâches de chaque fonction, en tenant compte des dernières évolutions de chaque métier.

Le travail de refonte des descriptifs de fonction avait été mené par les hiérarchies de chaque domaine, sous la supervision du service des ressources humaines (ci-après : RH) de l’OCAS. L’ensemble des métiers avait été réparti sur onze niveaux, correspondant à onze classes de salaire. À chaque niveau correspondait une ou plusieurs fonctions génériques et, à chacune de celles-ci, un ou plusieurs cahiers des charges. Le projet n’engendrait aucune péjoration des conditions salariales : pour les collaborateurs dont le positionnement était sous-évalué par rapport à l’actuel, aucune perte de salaire n’intervenait mais un blocage des annuités ; à l’inverse, pour ceux dont le positionnement était surévalué par rapport à l’actuel, une augmentation progressive aurait lieu sur six ans afin d’atteindre le niveau requis par la nouvelle fonction.

Grâce à ce nouveau concept, les objectifs du projet SCORE étaient suivis et atteints, au vu de la diminution du nombre de fonctions. Le « saucissonnage » des activités était en outre évité et la compréhension des métiers et des fonctions en lien avec leurs exigences et responsabilités associées étaient favorisées, au regard de leur définition. Par ailleurs, ledit concept favorisait une meilleure polyvalence, la flexibilité et la mobilité du personnel.

5) Lors de séances s’étant tenues les 6, 7 et 8 février 2019, la direction a présenté le concept de positionnement des postes et de modèle d’organisation de l’OCAS aux collaborateurs, reprenant en substance les mêmes éléments que dans ses précédentes présentations, en les actualisant.

Selon la présentation « Power Point » y relative, avec le nouveau concept, l’OCAS compterait onze classes salariales pour trente-sept fonctions génériques et nonante-huit cahiers des charges. Les appellations de certains métiers devaient être modifiées, comme la fonction d’« infirmière », qui devait être dénommée « enquêtrice à domicile ». Le niveau « H » comportait des spécialistes, dont des enquêteurs économiques et des enquêteurs à domicile, chacun de ces postes bénéficiant d’un cahier des charges.

Chaque niveau contenait des métiers pour lesquels les exigences étaient identiques, ce qui aboutissait au même niveau de rémunération. Ce dernier avait été estimé avec le référentiel actuel et chacun de ces niveaux avait été positionné dans une des classes du système actuel. Les différentes fonctions avaient été valorisées en choisissant le « meilleur » des positionnements. Par exemple, pour le niveau « H », les classes actuelles 15, 16 ou 17 avaient été positionnées en classe 16.

6) À la suite de cette séance, la direction a transmis aux collaborateurs les descriptifs de fonction et les cahiers des charges.

7) Selon le cahier des charges de la fonction d’« enquêteur à domicile », colloquée dans la fonction générique de « spécialiste AS », au niveau « H », la mission du poste consistait à réaliser, dans le cadre d’un processus complexe, une activité impliquant un fort pouvoir d’appréciation et une marge de manœuvre importante. Les activités s’inscrivaient dans la durée, impliquaient un suivi constant et faisaient appel à un fort pouvoir décisionnel en matière d’orientation du dossier. Il s’agissait de consolider et apprécier les différentes informations, dans le respect du cadre légal, en vue de la prise de décision déterminant le droit aux prestations d’assurance. Le titulaire du poste contribuait à la bonne image de l’institution par une gestion rigoureuse et un service à la clientèle tant interne qu’externe approprié, efficient et bienveillant. Il était responsable de la conformité et de la qualité de son travail en appliquant les concepts de contrôle et de gestion des risques mis en place à l’OCAS, en effectuant les contrôles nécessaires.

L’activité consistait à assurer la réalisation des évaluations et entretiens au domicile des assurés, en institutions spécialisées et établissements médico-sociaux (ci-après : EMS) lors de demandes de prestations d’assurés mineurs, adultes et retraités, d’assurer l’analyse et la détermination du droit aux prestations spécifiques des assurés mineurs, adultes et retraités dans le domaine des rentes, des allocations pour impotence, de la contribution d’assistance, des moyens auxiliaires et des soins pédiatriques à domicile ainsi que d’assurer un rôle de spécialiste en apportant un éclairage de professionnel de la santé à un dossier en matière d’assurance invalidité (ci-après : AI), vieillesse et survivants (ci-après : AVS) et mineurs.

Une formation dispensée par une Haute école spécialisée (ci-après : HES) ou une expérience jugée équivalente était requise ainsi qu’une spécialisation dans le domaine de la santé (santé communautaire, pédiatrique, psychiatrique, etc.), de même qu’une expérience professionnelle d’une durée de cinq ans dans le domaine de la santé.

8) Le 8 avril 2019, par courriers séparés, les infirmières ont fait part à la direction de leurs remarques au sujet du cahier des charges d’« évaluateur AI » qu’elle leur avait transmis.

Il ressortait de la séance d’information du mois de février 2019 que leur groupe professionnel avait été colloqué dans une fonction sans formation spécifique, de niveau « H », ce qui ne correspondait pas à leur cahier des charges. Elles avaient ainsi été engagées dans leur fonction avec une spécialisation correspondant actuellement à la classe 16 de l’échelle des traitements, au même titre que toute infirmière spécialisée de l’État. Elles souhaitaient par conséquent conserver un statut identique à celui des infirmières spécialisées selon le projet SCORE et s’opposaient à la collocation de leur fonction au niveau « H ».

9) Le 17 avril 2019, la direction a rejeté la demande de réévaluation des infirmières et maintenu le positionnement de leur poste au niveau « H ».

Conformément aux explications fournies lors de la présentation de février 2019, la logique interne de positionnement des postes avait été respectée, en distribuant toutes les fonctions de l’institution dans onze niveaux d’exigences répartis entre les lettres « A » à « K », « A » étant la plus haute fonction, sans lien avec la grille emplois-référence du projet SCORE. Le cahier des charges de leur fonction correspondait à une formation de spécialiste, placée au niveau « H », qui tenait compte de leur niveau de formation HES, de leurs qualifications et responsabilités ainsi que d’un haut niveau d’exigences. Il correspondait du reste à leur positionnement actuel, à savoir la classe 16 de l’échelle des traitements, qui était la même que celle des infirmières spécialisées à l’État.

10) En mai 2019, les infirmières ont sollicité de la direction un entretien oral afin de faire valoir leur point de vue.

11) Le 21 juin 2019, les infirmières ont été reçues par la direction et leur hiérarchie au sujet de leur cahier des charges et leur positionnement dans le nouveau modèle des fonctions afin de faire valoir leurs observations.

12) En septembre 2019, la direction a rencontré les représentants de l’OPE, différents échanges étant intervenus avec ceux-ci en octobre 2019 au sujet de la collocation des fonctions au sein de l’OCAS au regard de ses spécificités.

13) Le 18 octobre 2019, la direction a informé les collaborateurs que, dans le cadre du projet SCORE, elle avait rencontré les représentants de l’OPE le 16 septembre 2019 pour une séance de collocation des fonctions. L’OPE était basée sur les descriptifs de fonction, les cahiers des charges et le modèle d’organisation de l’OCAS. Après examen, le résultat obtenu n’était toutefois pas satisfaisant, dès lors qu’il s’écartait du modèle organisationnel élaboré. Le dialogue serait toutefois poursuivi avec l’OPE.

14) En février 2020, le projet SCORE a été abandonné.

15) En juin 2020, la direction a indiqué au conseil d’administration que le processus de réévaluation des fonctions de l’OCAS devait être poursuivi, ce que ledit conseil a validé en décembre 2020.

16) Le 25 janvier 2021, la direction a présenté au conseil d’administration le modèle d’organisation des fonctions de l’OCAS et l’estimation des coûts pour sa mise en œuvre, dont l’entrée en vigueur était prévue le 1er juillet 2021, reprenant en substance les mêmes éléments que dans ses précédentes présentations, en les actualisant.

Selon la présentation « Power Point » y relative, les besoins de réorganisation de l’OCAS persistaient, malgré l’abandon du projet SCORE.

Quatre grandes catégories de fonctions étaient prévues, à savoir les experts, les spécialistes, les gestionnaires et les collaborateurs administratifs. La fonction d’expert consistait en une activité d’expertise à forte valeur ajoutée. La formation personnelle de la personne, à savoir une formation supérieure, était nécessaire pour réaliser l’activité. L’expert était garant de l’application de la loi ou de la mission prévue par celle-ci. Étaient mentionnées les fonctions de « juriste », de « psychologue conseiller en réadaptation » et de « conseiller en réadaptation ». La fonction de spécialiste consistait en une activité spécialisée et pointue, sans requérir une filière de formation spécifique. L’activité comportait un fort pouvoir d’appréciation et une marge de manœuvre importante. Pour les activités de gestion, elle s’inscrivait dans la durée, impliquait un suivi constant et faisait appel à un fort pouvoir décisionnel en matière d’orientation du dossier. Les capacités d’analyse, de synthèse et d’argumentation étaient indispensables pour permettre l’appréciation et la consolidation des différentes informations en vue de la prise de décision. Étaient citées les fonctions d’« enquêteur économique et à domicile », de « conseiller réviseur » et de « case manager ».

Les principaux collaborateurs concernés par les changements étaient ceux occupant des fonctions de gestionnaires ou de collaborateurs administratifs et, parmi les changements, seuls quatre cahiers des charges étaient défavorisés dans leurs nouvelles fonctions, ce qui représentait huit personnes, lesquelles conservaient néanmoins leurs droits acquis. L’impact financier correspondait, au moment du basculement vers le nouveau système, à une augmentation de moins de 1 % de la masse salariale. Il était en outre limité grâce au système de bascule horizontale consistant à prendre dans la nouvelle classe de fonction le salaire directement égal ou supérieur.

Cette présentation a été publiée sur le site intranet de l’OCAS.

17) Le même jour, le conseil d’administration a accepté de mettre en œuvre le nouveau modèle de fonctions de l’OCAS à compter du 1er juillet 2021 tel que proposé par la direction.

18) Le 30 mars 2021, le conseil d’administration a adopté le règlement sur la procédure de mise en œuvre du nouveau modèle de classification des fonctions à l’OCAS (ci-après : le règlement de classification), dont l’entrée en vigueur a été fixée au 1er juillet 2021.

19) Le 30 mars 2021 également, l’OCAS a établi le cahier des charges des infirmières comportant les mêmes éléments que celui précédemment remis, sauf s’agissant de la dénomination spécifique du poste, devenue « infirmier évaluateur AI ».

20) Le 15 avril 2021, la direction a présenté aux cadres de l’OCAS le modèle d’organisation des fonctions et les étapes pour sa mise en œuvre, reprenant en substance les mêmes éléments que dans ses précédentes présentations, en les actualisant.

21) Le 19 avril 2021, la direction a informé les collaborateurs sur le site intranet de l’OCAS du nouveau modèle d’organisation des fonctions, dont la mise en œuvre était prévue au 1er juillet 2021. Le règlement de classification ainsi que le tableau répertoriant le positionnement de toutes les fonctions dans le nouveau modèle et les cahiers des charges pouvaient également être consultés.

22) Par décisions séparées du 20 avril 2021, le conseil d’administration a classé la fonction occupée par les infirmières dans celle d’« infirmier évaluateur AI », colloquée en classe 16 de l’échelle des traitements à compter du 1er juillet 2021.

23) Le 6 mai 2021, les RH ont mis à disposition des collaborateurs les descriptifs de fonction ainsi que les cahiers des charges des postes occupés à l’OCAS.

24) Les 15, 17 et 18 mai 2021, les infirmières ont formé des oppositions séparées contre les décisions du conseil d’administration du 20 avril 2021 les concernant.

Leur mission, le niveau d’exigence, de responsabilité et de prérequis nécessaires à leur poste ne correspondaient pas aux différents cahiers des charges rattachés à la classe « H ». En effet, la fonction d’« infirmier évaluateur AI » nécessitait une expertise qui ne pouvait être assimilée à une fonction de spécialiste interchangeable. Des connaissances métiers spécifiques ainsi qu’une expérience professionnelle en soins infirmiers étaient indispensables à l’évaluation de prestations telles que les soins pédiatriques, les contributions d’assistance et les allocations impotences mineures. Elles permettaient également une prise de position déterminante sur la décision de l’octroi d’une rente AI. En outre, le titulaire du poste se rendait seul au domicile des assurés, ce qui requérait des capacités d’adaptation élevées afin de conduire quotidiennement des entretiens dans des situations sociales sensibles pouvant s’avérer imprévisibles, dans un climat tendu, parfois dans des lieux insalubres. Par ailleurs, pour qu’un rapport d’enquête ait une valeur probante, il était essentiel qu’il soit élaboré par une personne qualifiée ayant connaissance des empêchements et des handicaps résultant des diagnostics médicaux. Pour ce motif déjà, un diplôme en soins infirmiers avait été requis lors de leur engagement. Par conséquent, le cahier des charges de la fonction en cause était une activité d’expertise à forte valeur ajoutée nécessitant une filière de formation spécifique et correspondait à un niveau d’exigence, de responsabilité et de prérequis équivalents à une classification de niveau « G ».

25) Le 8 juin 2021, la commission des RH du conseil d’administration a procédé à l’audition des infirmières. Aucun procès-verbal n’a été dressé à cette occasion.

26) Par décisions séparées du 22 juin 2021, l’OCAS a rejeté les oppositions des infirmières.

Dans le cadre du nouveau modèle de positionnement des fonctions, une distinction avait été faite entre les fonctions d’expert et de spécialiste. L’expert avait une activité d’expertise à forte valeur ajoutée, sa formation personnelle, supérieure, étant nécessaire pour la réaliser ; il était en outre garant de l’application de la loi ou de la mission prévue dans celle-ci. Le spécialiste avait une activité spécialisée et pointue, qui ne nécessitait pas une filière de formation spécifique, mais comportait un fort pouvoir d’appréciation, une marge de manœuvre importante et une capacité d’analyse, de synthèse et d’argumentation indispensable pour apprécier et consolider les différentes informations en vue de la prise d’une décision.

Le cahier des charges de la fonction d’« infirmier évaluateur » était positionné au niveau « H », lequel équivalait à une fonction de spécialiste et correspondait à la classe 16 de l’échelle des traitements, soit une classe identique à celle occupée par les intéressées dans le modèle en vigueur. Ce positionnement ne résultait ni d’un malentendu, ni d’une mauvaise compréhension des activités des intéressées. Si un diplôme en soins infirmiers était un atout dans la réalisation de certaines activités inhérentes à la fonction, lesdites activités en constituaient une infime partie et la possession d’un tel diplôme n’était pas indispensable pour accomplir la majorité des autres tâches incombant aux titulaires du poste. Ainsi, une autre formation ou une expérience professionnelle dans des activités liées au domaine de la santé était suffisante pour réaliser des activités d’évaluation, qui n’étaient pas en tant que telles des activités de soins. Pour ce motif, le cahier des charges exigeait une formation de niveau HES. Par ailleurs, s’agissant de la valeur probante des rapports d’évaluations, des connaissances avérées des éléments pertinents étaient certes nécessaires, mais une formation en soins infirmiers n’était pas pour autant requise. Il n’appartenait en outre pas aux infirmières, dans le cadre des évaluations qu’elles effectuaient, d’établir des décisions formelles, tâches dévolues aux gestionnaires ou aux case managers, lesquels appréciaient les éléments d’évaluation pour les intégrer dans l’évaluation globale. En outre, les convocations devant les autorités judiciaires étaient rares et les juristes y déféraient pour défendre la position de l’OCAS. Enfin, s’agissant des diverses situations que les infirmières devaient gérer au domicile des assurés, elles ne nécessitaient pas une formation certifiée d’infirmière, étant précisé que le positionnement du poste à un niveau de spécialiste tenait déjà compte des exigences de la fonction et des compétences nécessaires pour la réaliser.

Par conséquent, les éléments qu’elles apportaient n’étaient pas de nature à remettre en cause le positionnement de leur fonction dans le nouveau modèle, les exigences et responsabilités de la fonction ayant été correctement évaluées.

27) a. Par actes séparés, expédiés le 24 août 2021, les infirmières ont recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre ces décisions, concluant principalement à leur annulation et à ce qu’il soit constaté que la collocation dans la fonction d’« infirmier évaluateur » au niveau « H » était contraire aux principes de proportionnalité, d’égalité de traitement et d’interdiction de l’arbitraire, subsidiairement au constat que ladite fonction devait être colloquée au niveau « G » et à la condamnation de l’OCAS au versement du traitement rétroactif en découlant.

Elles sollicitaient la production de l’ensemble des documents ayant conduit à la nouvelle classification des fonctions, notamment les descriptifs des fonctions et les cahiers des charges de tous les postes occupés à l’OCAS, de tous les autres documents ayant servi à l’élaboration des niveaux de responsabilités et les documents établissant les critères pertinents pour chaque niveau.

La décision litigieuse violait les principes d’égalité de traitement, de proportionnalité et d’interdiction de l’arbitraire. L’enquête ménagère et le rapport d’impotence qu’elles réalisaient dans le cadre de leur fonction étaient déterminants pour l’issue d’une demande d’AI. Il leur revenait également d’en confirmer la teneur devant les autorités judiciaires, de même que la nécessité des soins pédiatriques ou les contributions d’assistance. Elles avaient en outre de très fréquents contacts avec les assurés pour examiner leurs demandes de prestations, ce qui nécessitait de grandes qualités humaines. De plus, c’était sur la base de leurs rapports et de leurs conclusions, tout comme pour le conseiller en réadaptation, que se fondait l’administration pour rendre une décision. Il n’était ainsi pas compréhensible que leur fonction soit colloquée au même niveau que celle de « case manager » et à des niveaux inférieurs à celles de « coach d’allemand » et de « conseillers en réadaptation », alors qu’elles disposaient de connaissances médicales et d’un diplôme en soins infirmiers.

b. Elles ont notamment produit les cahiers des charges des fonctions de « conseiller en réadaptation » et de « psychologue conseiller en réadaptation », colloquées au niveau « F », dont les activités principales consistaient à gérer le processus de réadaptation de chaque assuré adulte, jeune ou mineur dont il avait la charge, en assurant l’octroi et le suivi des mesures, tout en s’assurant du versement des prestations accessoires, à traduire l’exigibilité médicale en déterminant la capacité de travail exploitable, évaluer le taux d’invalidité pour la part lucrative et déterminer l’octroi ou le refus de prestations de réadaptation, ainsi qu’à entretenir et développer le travail en réseau dans le but d’activer le processus et de favoriser l’insertion de l’assuré sur le marché de l’emploi. Un master en sciences sociales et en psychologie ou une formation et/ou une expérience jugée équivalente était requis, de même que cinq ans d’expérience dans un domaine spécifique.

28) Par décision du 4 novembre 2021, la chambre administrative a ordonné la jonction de l’ensemble des causes sous le n° A/2765/2021.

29) Le 29 novembre 2021, l’OCAS a conclu au rejet des recours.

a. L’on pouvait s’interroger au sujet de la recevabilité des recours, en l’absence de perte financière subie par les infirmières par rapport à leur situation antérieure, puisque le niveau « H » correspondait à la classe 16 de l’échelle des traitements, dans laquelle leur poste était colloqué jusqu’au 30 juin 2021. En tout état de cause, les potentielles augmentations salariales découlant d’une collocation dans un niveau supérieur étaient extrêmement faibles.

Il n’y avait pas lieu de produire la totalité du dossier relatif à l’évaluation de la fonction en cause, ni des projets et brouillons concernant les modèles de positionnement et les notes de discussions informelles avec l’OPE, pas plus que les nonante-huit cahiers des charges correspondant à autant de métiers.

Les infirmières n’avaient pas démontré en quoi leur fonction était identique à celles de « conseiller en réadaptation », de « psychologue conseiller en réadaptation » et de « coach d’allemand », classées au niveau « F », et différente de celle de « case manager ». La fonction litigieuse ne nécessitait pas la titularité d’un diplôme en soins infirmiers. La mention d’« infirmier » dans la dénomination du poste s’expliquait simplement par le fait que les intéressées avaient craint, dans le cadre du projet SCORE, de perdre leur classification en position 16 de l’échelle des traitements, raison pour laquelle elle avait été conservée. Un tel diplôme n’était en outre pas indispensable pour effectuer la majorité des activités de la fonction, des tâches médicales ne leur étant attribuées que de manière exceptionnelle. Dès lors, une autre formation dans le domaine de la santé ou une expérience en la matière suffisait, étant précisé que l’activité des intéressées ne se situait pas dans le domaine des soins. Celle-ci ne nécessitait pas non plus des connaissances médicales accrues ni l’établissement de diagnostics médicaux équivalents à ceux des médecins. Elle ne requérait pas un fort pouvoir d’appréciation ni une marge de manœuvre importante ou une capacité d’analyse, de synthèse ou d’argumentation significatives, mais consistait à appréhender et comprendre les handicaps qui ressortaient des diagnostics médicaux préalablement établis. De plus, les prises de position dans le cadre des évaluations appartenaient au gestionnaire et au case manager et la défense de la position du service devant les autorités judiciaires revenait aux juristes, même si les infirmières pouvaient être entendues, ce qui ne leur conférait pas pour autant un rôle d’expert. Le « coach d’allemand » et le « conseiller en réadaptation » ne se trouvaient pas dans une situation similaire à la leur, ce qui justifiait un traitement différent au regard des formations différentes exigées et de leurs tâches et responsabilités, plus complexes. En particulier, la fonction de « coach d’allemand », en classe 18 de l’échelle des traitements, soit la même que les enseignants de niveau secondaire, titulaires d’un diplôme universitaire en lettres mais non d’un diplôme pédagogique, à l’État, ne faisait pas l’objet d’un cahier des charges, car elle était temporaire et unique et n’était pas représentative des activités de l’OCAS. S’agissant du « case manager », il avait le même niveau de responsabilité que les infirmières, raison pour laquelle sa fonction était classifiée de la même manière, étant précisé que même si des connaissances médicales n’étaient pas exigées pour ce poste, il lui appartenait d’établir des décisions formelles au nom de l’office et d’apprécier la détermination des infirmières évaluatrices et d’en intégrer les éléments nécessaires dans l’évaluation globale qu’il effectuait.

Le principe de la proportionnalité avait également été respecté, dès lors que le nouveau modèle de positionnement avait été validé par l’OPE et qu’il était proche du modèle du projet SCORE. Il n’en était résulté aucune perte de salaire pour les collaborateurs, l’impact du nouveau modèle ayant été minimisé et les droits acquis conservés. Une analyse détaillée des cahiers des charges avait en outre été effectuée pour établir le modèle de positionnement des fonctions. À cela s’ajoutait que le basculement vers la nouvelle classification s’était effectué de manière horizontale, c’est-à-dire que le salaire de la personne dans sa classe et fonction actuelles avait été positionné sur l’échelle des traitements dans la nouvelle classe de fonction et sur l’annuité dont le traitement était immédiatement supérieur au traitement précédent. Il n’en était résulté aucune perte financière pour les intéressées et, même à supposer que leur recours soit admis, elles n’obtiendraient que de faibles augmentations de salaire, se situant mensuellement entre CHF 17.10 et CHF 138.10.

Pour les mêmes motifs, les décisions entreprises n’étaient pas non plus arbitraires.

b. Il a produit un chargé de pièces comportant notamment :

- un document récapitulatif du modèle de positionnement des fonctions établi par la direction et définissant le contexte, les principes du nouveau modèle, la méthodologie utilisée, les classifications et les terminologies, les impacts financiers et le système de bascule ainsi qu’un résumé des étapes de mise en œuvre. Était annexé le positionnement des fonctions selon le nouveau modèle.

Le nouveau modèle avait été élaboré en vue de satisfaire à plusieurs grands principes, soit la simplification et la réduction des échelons hiérarchiques, la définition des niveaux d’exigences, de responsabilités et de formations, le rassemblement des fonctions similaires autour de fonctions génériques, la description de ces fonctions génériques en termes d’exigences, de responsabilités et de formations ainsi que la mise en valeur des fonctions de l’OCAS grâce à une meilleure description de ses activités. Il ne s’était pas agi de procéder à une revalorisation ou à une réévaluation salariale des fonctions, mais à une analyse du positionnement des fonctions déjà existantes et d’un ajustement de ce positionnement s’il s’avérait nécessaire. L’enjeu principal visait à garantir la pertinence du positionnement des fonctions ainsi que leur cohérence les unes par rapport aux autres. Avaient été pris en compte la finalité attendue par le poste, le degré d’expertise, la notion de responsabilité, le rôle stratégique et indispensable du poste ainsi que de son autonomie, de même que des prérequis en matière de formation et d’expérience.

La méthode employée avait consisté, dans une première étape, en l’analyse, la création de fonctions génériques, les rassemblements et le toilettage des cahiers des charges. La deuxième étape avait vu la création de onze niveaux de positionnements salariaux. La troisième étape avait ensuite consisté en l’analyse des classifications salariales et le choix de la classification définitive. L’OCAS avait recouru, pour chacune de ces étapes, à la méthode comparative, en faisant un tableau des exigences, des compétences et des formations existantes pour ses différents métiers, ce qui avait conduit à leur rassemblement par similitude d’exigences puis autour de fonctions génériques et enfin par niveaux. En effectuant des parallélismes entre activités existantes, en recherchant des similitudes en termes d’exigences, en s’assurant des niveaux de formation requis pour tenir le poste, il avait pu être fait abstraction de critères subjectifs ou de pondération en lien avec d’autres qualificatifs pris isolément, comme l’effort, l’autonomie ou la communication. En particulier, la recherche de similitudes avait permis de « mettre ensemble ce qui allait ensemble » en termes d’exigences, sans chercher à mener une analyse sur les positionnements salariaux. De plus, en choisissant pour chacun des niveaux la classe salariale la plus haute du groupe, les fonctions avaient été globalement valorisées, dans une perspective et dans une logique d’intérêt collectif ;

- le cahier des charges de la fonction de « case manager », colloquée au niveau « H », dont les activités principales consistaient, dans le cadre d’un processus complexe s’inscrivant dans la durée, à assurer sa mission de manière autonome et proactive, à assurer jusqu’à l’établissement de la décision finale de manière autonome la gestion intégrale de ses dossiers au sein de son processus ou de son portefeuille de dossiers selon les objectifs quantitatifs et qualitatifs fixés par la hiérarchie, à effectuer la gestion du contentieux, à assurer l’accueil et l’information des assurés et affiliés au guichet, au téléphone ou par courriel et dispenser un service de qualité permettant de promouvoir l’image de l’OCAS et ainsi garantir la couverture financière de la caisse et la promotion de la réinsertion des assurés, ainsi qu’à participer à la présentation et aux échanges relatifs à la mission de l’assurance à l’interne et auprès des divers intervenants tels que les partenaires de la collaboration interinstitutionnelle. Une formation HES ou une formation et/ou une expérience jugée équivalente était requise, un brevet ou un titre spécifique dans le secteur d’activité étant un atout, de même qu’une expérience de cinq ans dans un domaine spécifique ;

- un tableau « Excel » contenant un comparatif des responsabilités des différents cahiers des charges et fonctions en son sein.

30) Le 4 mars 2022, les infirmières ont persisté dans leur recours, concluant au surplus à des mesures d’instruction supplémentaires.

Elles requéraient leur audition et celle des membres de la commission du personnel pour restituer la teneur des échanges avec la direction ainsi que le personnel de l’OPE qui avait examiné les cahiers des charges et formulé des remarques afin de recueillir son avis sur la classification opérée par l’OCAS. Devaient aussi être produits le récapitulatif des classes dans lesquelles était colloquée chaque fonction avant et avec le nouveau système, l’ensemble des courriers et courriels échangés avec l’OPE, de même que le procès-verbal de la séance du 16 septembre 2019 avec l’OPE et les cahiers des charges des fonctions colloquées aux niveaux « F », « G » et « H » afin d’apprécier concrètement les tâches effectuées par les fonctions proches en termes de classification.

Avant la publication des cahiers des charges, le personnel n’avait pas été consulté pour la refonte des descriptifs et des tâches, pas plus que pour l’établissement d’un nouveau modèle de positionnement des fonctions, étant précisé que le fait de pouvoir s’opposer à un projet entièrement fini ne remplaçait pas un droit de participation dès le début de son élaboration.

À l’origine, leur poste requérait un diplôme en soins infirmiers, qui était une formation indispensable pour mener à bien leurs activités et gérer la conduite d’entretiens complexes. Elles se rendaient ainsi au domicile des assurés pour effectuer des entretiens, qui pouvaient être des lieux de vie très sales, les personnes concernées pouvant également avoir de graves pathologies, tant physiques que psychiques. Pour les assurés, le fait d’être confronté à une infirmière était un élément rassurant, leur permettant de s’ouvrir plus facilement que face à un gestionnaire. Il en allait de même avec d’autres membres du corps médical, leur formation facilitant ce type d’échanges. Elles effectuaient aussi régulièrement des présentations à des directions d’EMS ou des infirmières cheffes, allant même jusqu’à gérer l’évaluation médicale des cas simples et de lister elles-mêmes les limitations fonctionnelles liées à certaines affections à la place des médecins. Elles donnaient en outre tous les éléments nécessaires au « case manager » afin qu’il fixe le statut de l’assuré. À cela s’ajoutait qu’elles étaient en mesure de déceler l’existence de problèmes médicaux non diagnostiqués, l’aggravation ou l’amélioration d’une pathologie, de même que de potentielles fraudes.

Même si le case manager et le gestionnaire établissaient au final les décisions au nom de l’OCAS, ils se fondaient entièrement sur leurs rapports pour motiver leurs positions. Il en allait de même du juriste, puisque même s’il pouvait soutenir la position de l’OCAS devant les autorités judiciaires, le dossier était défendu par l’infirmière lors de son audition par les juridictions concernées.

Par ailleurs, l’OCAS n’avait fourni aucun exemple concret des exigences et responsabilités des fonctions de « coach d’allemand », « conseiller en réadaptation » et « case manager », se limitant à soutenir que leurs activités n’étaient pas similaires. L’OCAS ne pouvait pas non plus se référer au projet SCORE, puisqu’il avait établi un système autonome, qui lui était propre, la fonction d’« infirmier évaluateur » n’existant au demeurant pas au sein de l’État.

Elles avaient ainsi démontré que leur fonction nécessitait une formation spécifique et que le niveau d’exigence et de responsabilité justifiait de classer leur poste au niveau « expert ».

31) a. Dans sa duplique du 14 avril 2022, l’OCAS a également persisté dans ses précédentes écritures.

Un diplôme en soins infirmiers n’était pas requis pour l’exercice de la fonction d’« infirmier évaluateur », le terme d’infirmier ayant été maintenu dans l’intitulé du poste pour que les infirmières restent colloquées en classe 16 de l’échelle des traitements dans le cadre du projet SCORE, à l’instar des infirmières spécialisées, ce qui démontrait que leur demande avait été prise en compte et qu’il avait été veillé à ce que les collaborateurs ne subissent pas de péjoration de leurs conditions salariales.

L’ensemble des tâches énumérées par les infirmières résultaient de leur cahier des charges et avaient été prises en considération, étant précisé que des connaissances médicales n’étaient requises que de manière très anecdotique. Dans d’autres cantons, comme Vaud, une formation en soins infirmiers n’était pas non plus requise, seule une spécialisation dans le domaine de la santé étant exigée. Le seul fait de disposer d’une telle formation ne permettait pas au collaborateur concerné d’être qualifié d’expert ni ne lui permettait d’opérer une comparaison avec une fonction nécessitant d’être au bénéfice d’un diplôme universitaire. En particulier, l’activité des infirmières n’était, en termes de complexité et de responsabilités, pas identique à celle des juristes, des conseillers en réadaptation ou encore des psychologues conseillers en réadaptation et avait pour seul but d’appréhender et de comprendre les handicaps ressortant des diagnostics médicaux. Si le travail des intéressées était certes nécessaire pour établir les faits, leur appréciation était ensuite effectuée, d’un point de vue juridique, par les case managers ou les gestionnaires puis intégrée dans l’évaluation globale à la base des décisions formelles rendues. De plus, étant donné qu’il était attendu de chaque collaborateur qu’il effectue un travail de qualité, l’argument des infirmières selon lequel les juristes ne pouvaient pas défendre correctement l’office en cas de rapport lacunaire n’était pas pertinent et ne permettait pas pour autant de les qualifier d’expertes. Il n’existait pas non plus d’inégalité de traitement par rapport aux fonctions de « conseiller en réadaptation » et de « psychologue conseiller en réadaptation », dont les titulaires effectuaient des tâches particulièrement complexes en suivant les assurés dont ils avaient la charge tout au long du processus de réadaptation, alors que les infirmières intervenaient ponctuellement, sur mandat, sans assurer de suivi régulier.

b. Il a produit des échanges avec l’OPE ainsi que trente-cinq cahiers des charges pour les fonctions de niveaux « F », « G » et « H », dont celui d’« enquêteur spécialisé AI ». Ce poste, colloqué au niveau « G », avait pour activités principales d’effectuer des enquêtes administratives et de terrain afin de constituer un dossier « LFA », d’assurer le contact et le suivi des mandats d’observations externes, de procéder aux auditions et confrontations de personnes et de participer à l’élaboration de la stratégie de la gestion des cas « LFA » ; était requise une formation de niveau HES ou une formation/expérience équivalente ainsi que cinq ans d’expérience professionnelle, de préférence dans le domaine de l’investigation.

32) a. Le 2 juin 2022, les infirmières ont persisté dans leur recours, y compris les actes d’instruction sollicités, souhaitant être entendues afin d’exposer leurs motivations.

Une nouvelle recrue avait récemment été engagée dans la fonction d’« infirmier évaluateur » sans être au bénéfice d’un diplôme en soins infirmiers, si bien que seules des tâches simples lui étaient confiées et qu’elles devaient, au regard de leur formation, accomplir l’ensemble des activités complexes du poste alors qu’elles n’étaient pas colloquées dans une classe supérieure. Il était dès lors manifeste que leur cahier des charges ne pouvait être réalisé que par des personnes au bénéfice d’une formation en soins infirmiers et que la fonction impliquait une formation de spécialiste et devait être colloquée comme telle.

La réévaluation des fonctions avait eu lieu sans la participation du personnel, seuls les cadres ayant été inclus aux discussions. En particulier, les collaborateurs n’avaient été informés du projet qu’une fois celui-ci terminé, par le biais d’une communication interne, étant précisé que le télétravail instauré en raison de la pandémie n’avait pas favorisé les échanges à ce sujet.

Leur activité était très proche de celle de l’« enquêteur spécialisé AI », fonction pourtant colloquée au niveau « G » les différences étant peu nombreuses et limitées aux connaissances propres au métier. À cela s’ajoutait qu’elles ne disposaient pas de moins d’autonomie dans l’exécution de leurs tâches que les fonctions classées au niveau « G ».

b. Elles ont notamment produit le cahier des charges du poste d’« infirmière de santé publique » établi en 2001, dont les missions étaient de collaborer à l’instruction des demandes de prestations AI/AVS, en procédant à des enquêtes ménagères, de statut, d’impotence, de soins à domicile et de contributions pour mineurs impotents ainsi que d’apporter un complément et un éclairage de professionnels de la santé à un dossier AVS/AI. Un diplôme d’infirmière en soins généraux reconnu ou une autre formation équivalente était requis.

33) Sur quoi, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées.


 

EN DROIT

1) Interjetés en temps utiles devant la juridiction compétente, les recours sont recevables de ce point de vue (art. 132 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Selon l’art. 60 al. 1 let. b LPA, a qualité pour recourir toute personne qui est touchée directement par une décision et a un intérêt digne de protection à ce qu’elle soit annulée ou modifiée.

Tel est le cas en l’espèce, dès lors que les recourantes contestent la collocation au niveau « H » de leur fonction d’« infirmier évaluateur AI », estimant qu’elle devrait être colloquée au niveau « G » de l’échelle des traitements, ce qui entraînerait une augmentation, même minime, de leur salaire (ATA/12/2022 du 11 janvier 2022 consid. 2). Les recours sont donc recevables sous cet angle également, étant précisé que, selon la jurisprudence, l’acte par lequel une administration se prononce sur des prétentions salariales d’un employé en relation avec la classification d’une fonction répond à la notion de décision (ATA/1271/2021 du 23 novembre 2021 consid. 1 et les références citées).

3) Les recourantes sollicitent préalablement plusieurs mesures d’instruction.

a. Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit, pour l’intéressé, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves, à condition qu’elles soient pertinentes et de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 145 I 73 consid. 7.2.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_762/2021 du 1er mars 2022 consid. 4.1). Il ne comprend en principe pas le droit d’être entendu oralement (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_420/2021 du 7 octobre 2021 consid. 4.1) ni celui d’obtenir l’audition de témoins (ATF 130 II 425 consid. 2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_922/2018 du 13 mai 2019 consid. 5.2.1). Le droit d’être entendu n’empêche pas l’autorité de mettre un terme à l’instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de se forger une conviction et que, procédant de manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, elle a la certitude qu’elles ne pourraient pas l’amener à modifier son opinion (ATF 145 I 167 consid. 4.1).

b. En l’espèce, malgré la production de différentes pièces en lien avec le processus de positionnement des fonctions, les recourantes sollicitent que soit remis le dossier de l’intimé dans son intégralité, en particulier le récapitulatif des classes dans lesquelles ont été colloquées chaque fonction avant et avec le nouveau système, les échanges avec l’OPE, de même que les cahiers des charges des fonctions colloquées aux niveaux « F », « G » et « H ».

Dès lors que lesdits cahiers des charges ont été produits, leur demande à ce sujet devient sans objet. À cela s’ajoute que, s’agissant des autres fonctions de l’OCAS, celui-ci a versé au dossier un tableau « Excel » contenant un comparatif des responsabilités des différents cahiers des charges et fonctions en son sein et qui reprend le contenu de l’ensemble des cahiers des charges, étant précisé que lors du processus de positionnement des fonctions, l’ensemble des cahiers des charges a été mis à disposition des collaborateurs sur l’intranet de l’OCAS. Les documents versés au dossier sont dès lors suffisants pour trancher le litige, sans qu’il ne soit nécessaire de donner suite à la requête des recourantes. Le dossier contient en outre plusieurs récapitulatifs des classes de fonctions avant et après l’introduction du nouveau système, si bien qu’il n’y a pas non plus lieu de faire droit à leur requête de ce point de vue.

Il en va de même de leur demande visant à la production des échanges entre l’OCAS et l’OPE et du procès-verbal de la séance avec l’OPE du 16 septembre 2019, dès lors qu’il ressort du dossier qu’à la suite desdits échanges, l’autorité intimée n’était pas satisfaite de la collocation proposée par l’OPE, qui ne prenait pas en compte ses spécificités et qu’après l’abandon du projet SCORE, le processus a été poursuivi par l’OCAS, sans égard audit projet. L’on ne voit dès lors pas en quoi de tels échanges seraient pertinents pour l’issue du litige, étant précisé qu’en matière d’évaluation des fonctions, seules les pièces susceptibles d’affecter la situation juridique du membre du personnel doivent lui être accessibles, au regard du très large pouvoir d’appréciation dont l’employeur dispose (ATA/1025/2021 du 5 octobre 2021 consid. 6c).

À cela s’ajoute que l’autorité intimée a, tout au long du processus, tant oralement que par écrit, tenu ses collaborateurs informés des principes du nouveau modèle de positionnement des fonctions et de la méthode utilisée, si bien que les recourantes ont disposé de tous les éléments nécessaires à la compréhension de la manière par laquelle leur fonction a été positionnée. Pour les mêmes motifs, l’audition du personnel de l’OPE ne sera pas ordonnée, pas plus que celle du personnel de l’OCAS.

S’agissant de leur audition, outre le fait qu’elles ne disposent d’aucun droit à être entendues oralement, les recourantes ont déjà pu s’exprimer lors d’une séance devant la commission RH du conseil d’administration, ce qu’elles ne contestent pas. Elles ont aussi été en mesure de s’exprimer par écrit à plusieurs reprises pour faire valoir leur point de vue, tant durant la procédure non contentieuse et ce depuis 2019, que judiciaire.

Le dossier contenant tous les éléments nécessaires pour trancher le litige, il ne sera pas fait droit aux réquisitions de preuves des recourantes.

4) Le litige a trait au nouveau modèle d’organisation de l’autorité intimée et du positionnement de la fonction d’« infirmier évaluateur AI » occupée par les recourantes.

5) a. Selon l’art. 61 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès ou l’abus du pouvoir d’appréciation (al. 1 let. a), ainsi que pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (al. 1 let. b). Les juridictions administratives n’ont toutefois pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (al. 2), non réalisée en l’espèce.

Il n’en résulte toutefois pas que l’autorité est libre d’agir comme bon lui semble (ATA/1300/2021 du 30 novembre 2021 consid. 6). Il y a abus du pouvoir d’appréciation lorsque l’autorité, tout en restant dans les limites du pouvoir d’appréciation qui est le sien, se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou viole des principes généraux de droit tels que l’interdiction de l’arbitraire et de l’inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_37/2020 du 7 septembre 2020 consid. 5.1).

b. L’évaluation de fonctions contient, par la force des choses, une grande part d’appréciation, dont la concrétisation dépend de la façon dont une certaine tâche est perçue par la société, respectivement par l’employeur (ATF 125 II 385 consid. 5b et les références citées ; ATA/1027/2021 du 5 octobre 2021 consid. 8). Le point de savoir si différentes activités doivent être considérées comme étant de même valeur dépend d’estimations qui peuvent conduire à des résultats différents. Dans ce domaine, le pouvoir d’examen du juge est donc limité. Il doit ainsi en principe uniquement s’attacher à contrôler le respect des principes constitutionnels et à sanctionner, le cas échéant, l’abus du pouvoir d’appréciation (ATF 129 I 161 consid. 3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_245/2007 du 30 octobre 2007 consid. 2 ; ATA/1027/2021 précité consid. 8 et les références citées).

Il appartient au recourant de démontrer, motivation précise à l’appui, que les conditions restrictives précitées sont réunies, étant rappelé que des critiques de nature appellatoire sont dans ce cadre inadmissibles (ATA/423/2021 du 20 avril 2021 consid. 5e et les références citées).

6) Les recourantes reprochent à l’autorité intimée d’avoir contrevenu aux principes d’égalité de traitement, de proportionnalité et d’interdiction de l’arbitraire en procédant au positionnement de la fonction d’« infirmier évaluateur ».

a. Une décision ou un arrêté viole le principe de l’égalité de traitement consacré à l’art. 8 al. 1 Cst. lorsqu’il établit des distinctions juridiques qui ne se justifient par aucun motif raisonnable au regard de la situation de fait à réglementer ou qu’il omet de faire des distinctions qui s’imposent au vu des circonstances. Il faut que le traitement différent ou semblable injustifié se rapporte à une situation de fait importante (ATF 142 I 195 consid. 6.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_178/2022 du 16 mars 2022 consid. 5.1).

b. Une décision est arbitraire au sens de l’art. 9 Cst. lorsqu’elle est manifestement insoutenable, qu’elle se trouve en contradiction claire avec la situation de fait, qu’elle viole gravement une norme ou un principe juridique indiscuté ou encore lorsqu’elle heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l’équité. L’arbitraire ne résulte pas du seul fait qu’une autre solution pourrait entrer en considération ou même qu’elle serait préférable (ATF 144 I 170 consid. 7.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_397/2021 du 7 février 2022 consid. 2.1.2).

c. Garanti par l’art. 5 al. 2 Cst., le principe de la proportionnalité exige qu’une mesure restrictive soit apte à produire les résultats escomptés (règle de l’aptitude) et que ceux-ci ne puissent être atteints par une mesure moins incisive (règle de la nécessité). En outre, il interdit toute limitation allant au-delà du but visé et exige un rapport raisonnable entre celui-ci et les intérêts publics ou privés compromis (principe de la proportionnalité au sens étroit impliquant une pesée des intérêts ; ATA/176/2022 du 17 février 2022 consid. 6b).

7) a. L’art. 6 LOCAS prévoit que le conseil d’administration, à savoir l’un des trois organes de l’OCAS (art. 3 let. a LOCAS) au sein duquel siègent notamment deux membres élus par le personnel (art. 4 al. 1 let. e LOCAS), est investi des pouvoirs les plus étendus pour la gestion de l’OCAS et établit notamment le statut du personnel et fixe les traitements après consultation des organisations représentatives du personnel, la loi générale relative au personnel de l’administration cantonale, du pouvoir judiciaire et des établissements publics médicaux du 4 décembre 1997 (LPAC - B 5 05) étant applicable.

b. Selon le règlement de classification, toutes les fonctions sont réparties en onze classes de traitement, identifiées par les lettres « A » à « K » (art. 2 du règlement de classification). Une fonction inclut différentes activités qui correspondent chacune à un cahier des charges. Chaque fonction est définie dans un descriptif de fonction qui correspond à un niveau d’exigence, de responsabilité et de prérequis nécessaires communes aux différents cahiers des charges qui lui sont rattachés. La direction adopte le cahier des charges sur proposition des RH et après consultation des personnes intéressées (art. 3 du règlement de classification). Au surplus, l’art. 2 de la loi concernant le traitement et les diverses prestations alloués aux membres du personnel de l’État, du pouvoir judiciaire et des établissements hospitaliers du 21 décembre 1973 (LTrait - B 5 15) est applicable par analogie aux fonctions (art. 4 du règlement de classification).

S’agissant de la procédure de mise en œuvre, l’art. 5 du règlement de classification prévoit que pour l’ensemble du personnel de l’OCAS, les fonctions existant avant l’entrée en vigueur du nouveau modèle sont positionnées dans la nouvelle classification avec effet au 1er juillet 2021, la méthode de conversion utilisée étant celle de la bascule horizontale, soit le positionnement sur l’échelle de traitement dans la nouvelle classe de fonction et sur l’annuité dont le traitement est immédiatement supérieur au traitement avant la bascule (al. 1). Si un collaborateur se retrouvait dans une classe de traitement inférieure, le niveau de traitement antérieur au changement serait conservé, l’intéressé pouvant bénéficier d’éventuelles augmentations de traitement dès que la rémunération correspondant à sa nouvelle classe de traitement serait égale ou supérieure à celle résultant de l’ancienne classification (al. 2). Le positionnement de la fonction et de la classe de traitement associée est notifiée au collaborateur par une décision du conseil d’administration (al. 3). Si un collaborateur n’accepte pas le positionnement de la fonction et/ou la classe de traitement attribuée, il peut adresser une opposition formelle au conseil d’administration dans un délai de trente jours suivant la notification de la décision (al. 4). La commission RH du conseil d’administration est chargée par ce dernier de traiter l’opposition et de recevoir le collaborateur afin d’entendre sa motivation et examiner sa demande (al. 5). Le conseil d’administration adopte une décision sur opposition concernant le positionnement de la fonction et/ou la classe de traitement du collaborateur concerné, cette décision étant sujette à recours auprès de la chambre administrative (al. 6).

Le règlement de classification renvoie à l’application, par analogie, de la grille salariale associée aux classes de fonction de l’État selon la LTrait. L’art. 4 al. 2 LTrait prévoit en particulier que le classement des fonctions doit tenir compte du rang hiérarchique et des caractéristiques de chaque fonction en considération notamment de l’étendue qualitative et quantitative des attributions dévolues et des obligations à assumer, des connaissances professionnelles et aptitudes requises, de l’autonomie et des responsabilités, des exigences, inconvénients, difficultés et dangers que comporte l’exercice de la fonction.

Par ailleurs, aux termes de l’art. 6 al. 1 du règlement d’application de la LPAC du 24 février 1999 (RPAC - B 5 05.01), applicable à l’OCAS en vertu de l’art. 1 al. 1 let. f LPAC, les fonctions sont définies et décrites dans un cahier des charges qui fixe notamment les tâches, compétences et horaires, du titulaire de la fonction.

8) a. En l’espèce, les recourantes ne soutiennent pas que le nouveau positionnement des fonctions de l’OCAS se serait accompagné d’une modification de leur cahier des charges, ce qui ne ressort du reste pas du dossier, ni que le cahier des charges du 30 mars 2021 ne décrirait pas correctement leurs tâches actuelles, étant précisé que, comme l’a indiqué l’autorité intimée, l’objectif du nouveau modèle de classification des fonctions n’était pas de procéder à leur revalorisation ou à leur réévaluation salariale, mais à une analyse de leur positionnement, dans un souci de cohérence. Dans ce cadre, les recourantes ont conservé leur précédente classe salariale, à savoir la classe 16 de l’échelle des traitements, correspondant au niveau « H » de l’OCAS, ce qui n’est pas non plus contesté.

b. Les recourantes sont d’avis que leur fonction aurait dû être intégrée dans la catégorie « experts », à l’instar de celle de « psychologue conseiller en réadaptation » et de « conseiller en réadaptation », et non dans celle de « spécialistes », comme pour la fonction de « case manager », étant donné que la titularité d’un diplôme en soins infirmiers, à savoir une formation spécifique, serait nécessaire pour accomplir les missions du poste.

Outre le fait que, ce faisant, les recourantes se limitent à substituer leur appréciation à celle de l’autorité intimée, elles n’apportent aucun élément concret permettant d’affirmer qu’un tel diplôme spécifique serait nécessaire à l’accomplissement de leurs tâches, l’OCAS ayant indiqué que leur fonction ne nécessitait pas de prodiguer des soins. Dans ce contexte, l’autorité intimée a estimé qu’une formation dispensée par une HES ou une expérience jugée équivalente était requise ainsi qu’une spécialisation dans le domaine de la santé, notamment en santé communautaire, en pédiatrie ou en psychiatrie. Rien n’indique dès lors que le titulaire de la fonction ne devrait pas être au bénéfice d’une formation dans le domaine de la santé lui permettant d’accomplir les tâches dévolues à l’infirmier évaluateur, soit, comme l’ont indiqué les recourantes, pour comprendre un diagnostic médical, savoir quelles limitations fonctionnelles en découlent ou encore avoir des connaissances d’anatomie et de physiologie.

Dans ces circonstances, l’on ne voit pas non plus comment les rapports établis par le titulaire du poste qui ne serait pas au bénéfice d’un diplôme en soins infirmiers mais d’une spécialisation dans le domaine de la santé ne seraient pas corrects. Les recourantes n’apportent aucun élément permettant de l’affirmer, se limitant à indiquer qu’une nouvelle recrue, non pourvue d’un tel diplôme, ne se verrait confier que des dossiers simples. Elles perdent toutefois de vue que leur expérience dans leur fonction justifie qu’elles traitent des dossiers plus complexes que la personne nouvellement engagée, rien ne permettant d’affirmer qu’une telle situation serait de nature à perdurer. Les recourantes n’amènent pas non plus d’élément supplémentaire selon lequel elles seraient amenées à représenter l’OCAS devant les instances judiciaires, l’autorité intimée ayant expliqué qu’une telle tâche était dévolue aux juristes.

De ce point de vue déjà, l’on ne décèle aucun abus de la très grande liberté d’appréciation dont l’autorité intimée dispose en matière d’évaluation des fonctions en requérant du titulaire du poste qu’il soit au bénéfice d’une formation de niveau HES complétée par une spécialisation dans le domaine de la santé et non pas spécifiquement d’un diplôme en soins infirmiers, si bien que la qualification de spécialiste dudit poste et non d’expert, ne prête pas le flanc à la critique.

c. Les recourantes prétendent que leur situation serait comparable aux fonctions de « conseiller en réadaptation » et de « psychologue conseiller en réadaptation ». Il ressort toutefois du cahier des charges desdites fonctions que des exigences spécifiques au niveau de la formation sont requises, à savoir la titularité d’un master, de niveau universitaire, respectivement en sciences sociales et en psychologie. À cela s’ajoute que, selon leur cahier des charges, les tâches dévolues à ces fonctions diffèrent également de celles de l’« infirmier évaluateur AI », les recourantes n’apportant aucun élément permettant d’affirmer que tel ne serait pas le cas. Par ailleurs, le fait que certains titulaires de ces fonctions, comme le soutiennent les recourantes, n’auraient pas de formation spécifique n’y change rien et ne permet pas encore d’affirmer que l’autorité intimée aurait commis une inégalité de traitement en les plaçant dans la catégorie « experts », contrairement à la fonction des recourantes, qualifiée de « spécialiste ».

Il en va de même de la fonction d’« enquêteur spécialisé AI », qui bien que requérant de son titulaire également une formation de niveau HES, participe à la définition de la stratégie de l’OCAS et implique des responsabilités supérieures à celles de recourantes, comme l’indique le cahier des charges de ladite fonction.

S’agissant enfin de la fonction de « coach d’allemand », les explications fournies par l’autorité intimée ne prêtent pas non plus le flanc à la critique lorsqu’elle indique s’être basée sur la classification au sein de l’État pour les maîtres d’enseignement général dans l’enseignement secondaire au bénéfice d’une formation universitaire pour colloquer ladite fonction au niveau « F » de l’OCAS, correspondant à la classe 18 de l’échelle des traitements.

Les recourantes allèguent que leur situation serait différente de celle de la fonction de « case manager », pourtant colloquée au même niveau que la leur, ce qui justifierait une collocation à un niveau supérieur les concernant. Si les activités relatives à ces deux fonctions sont certes différentes, l’autorité intimée a néanmoins considéré que, selon la méthode comparative qu’elle a employée, un rapprochement entre ces fonctions se justifiait au niveau des exigences, des compétences et des formations, étant précisé que, dans les deux cas, une formation de niveau HES est exigée.

Ce faisant, l’autorité intimée n’apparaît pas avoir abusé de la grande liberté d’appréciation dont elle bénéficiait dans ce cadre, la chambre de céans n’ayant pas à s’immiscer dans des décisions relavant de la gestion du personnel, comme en l’espèce l’affectation d’une fonction dans un niveau salarial, ce d’autant moins que les recourantes se limitent à opposer leur appréciation à celle de l’autorité.

d. À cela s’ajoute que la procédure prévue par le règlement de classification a été suivie, puisque les recourantes ont été en mesure de former opposition contre les décisions du 20 avril 2021 du conseil d’administration les concernant et faire valoir leurs critiques dans ce cadre. Elles ont également été entendues par la commission des RH du conseil d’administration, puis ont recouru auprès de la chambre de céans à la suite du rejet de leurs oppositions.

Les recourantes prétendent toutefois qu’elles n’auraient pas été en mesure de participer au processus de repositionnement des fonctions au sein de l’OCAS. Outre le fait que ledit processus a été mené par la direction de l’autorité intimée, qui a sollicité le concours des hiérarchies de chaque domaine pour effectuer le travail de refonte des descriptifs des fonctions, les intéressées perdent de vue qu’à la suite des séances de février 2019 présentant aux collaborateurs le nouveau concept de positionnement des postes, un cahier des charges leur a été communiqué, au sujet duquel elles ont écrit à la direction, lui faisant part de leurs remarques à ce sujet. Elles ont également été entendues par la direction à ce sujet lors d’une séance s’étant tenue le 21 juin 2019, comme l’a expliqué l’autorité intimée. Bien que la direction ait rejeté leur demande de réévaluation et maintenu le positionnement de leur poste au niveau « H », la dénomination de leur fonction a néanmoins été modifiée pour y inclure le terme d’infirmier afin qu’elles conservent un statut identique à celui des infirmières spécialisées à l’État, conformément à leur demande, poste colloqué en classe 16 de l’échelle des traitements.

Par ailleurs, il ressort des explications de l’autorité intimée, dont il n’y a pas lieu de douter, que la commission du personnel a été associée aux discussions initiales, une présentation du nouveau modèle de positionnement des postes et d’organisation lui ayant été faite durant l’année 2018. À cela s’ajoute que la direction a régulièrement présenté l’avancée du projet au conseil d’administration, au sein duquel siègent notamment deux membres élus par le personnel.

e. Au demeurant, rien n’indique que l’autorité intimée aurait violé le principe de proportionnalité, les recourantes n’ayant subi aucun préjudice du fait du repositionnement des fonctions, puisque leur niveau salarial a été maintenu en classe 16 de l’échelle des traitements, conformément à la méthode appliquée.

f. Il résulte de l’ensemble de ces éléments que l’autorité intimée n’a violé aucun des principes susmentionnés en procédant à un repositionnement de ses fonctions et en établissant le cahier des charges des recourantes, au regard de son large pouvoir d’appréciation en la matière. Il s’ensuit que les recours seront rejetés.

9) Vu l’issue des recours, un émolument de CHF 1'500.- sera mis à la charge solidaire des recourantes, qui succombent (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne leur sera allouée, pas plus qu’à l’autorité intimée, qui dispose de son propre service juridique (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

 

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevables les recours interjetés le 24 août 2021 par Mesdames A______, B______, C______, D______, E______ et F______ contre la décision de l’office cantonal des assurances sociales du 22 juin 2021 ;

au fond :

les rejette ;

met un émolument de CHF 1'500.- à la charge solidaire de Mesdames A______, B______, C______, D______, E______ et F______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s’il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n’est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Sarah Braunschmidt Scheidegger, avocate des recourantes, ainsi qu’à Mes François Bellanger et Bénédicte Dayen, avocats de l’office cantonal des assurances sociales.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mme Krauskopf, M. Verniory, Mme McGregor, M. Mascotto, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :