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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2552/2021

ATA/841/2021 du 24.08.2021 sur JTAPI/771/2021 ( MC ) , SANS OBJET

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2552/2021-MC ATA/841/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 24 août 2021

en section

 

dans la cause

 

M. A______
représenté par Me Karin Etter, avocate

contre

COMMISSAIRE DE POLICE

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 3 août 2021 (JTAPI/771/2021)


EN FAIT

1) M. A______, alias M. B______, est né le ______ 1977. Il est originaire d’C______ et de D______.

2) M. A______ s’est vu notifier une mesure d’interdiction d’entrée en Suisse le 21 janvier 2010 et valable jusqu’au 29 octobre 2020. Il a fait l’objet d’un premier renvoi vers l’C______ le 12 décembre 2011. Il est par la suite revenu en Suisse.

3) Par jugement du 18 mars 2018, le Tribunal de police de l’Est vaudois a prononcé à l’encontre de M. A______ une peine privative de liberté de six mois et une expulsion judiciaire pour une durée de cinq ans pour vols et séjour illégal.

Par jugement du 14 novembre 2019, confirmé par arrêt du 24 février 2020 de la chambre pénale d’appel et de révision de la Cour de justice (ci-après : la chambre pénale), puis par arrêt du Tribunal fédéral du 11 juin 2020, le Tribunal de police de Genève a condamné M. A______ à une peine privative de liberté de douze mois et a ordonné son expulsion de Suisse pour une durée de cinq ans, pour vols (art. 139 ch. 1 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937- CP - RS 311.0), menaces (art. 180 al. 1 CP), injures (art. 177 al. 1 CP), non-respect d’une interdiction de pénétrer dans une région déterminée (art. 119 al. 1 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 - LEI - RS 142.20), rupture de ban (art. 291 al. 1 CP), voies de fait (art. 126 al. 1 CP) et consommation de stupéfiants (art. 19a ch. 1 de la loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes du 3 octobre 1951 - LStup - RS 812.121).

Entre 2010 et 2020, M. A______ a été condamné à dix reprises pour entrée illégale, séjour illégal, activité lucrative sans autorisation, injure, menaces, voies de fait, contravention et délit contre la LStup, non-respect d’une assignation à résidence ou d’une interdiction territoriale, rupture de ban et vol.

4) Une réservation de vol, accomplie en juillet 2020 en vue du rapatriement de M. A______ vers la D______ pour le 11 août 2020, a dû être annulée, le laissez-passer ayant été égaré par l’ambassade de D______.

5) Le 3 août 2020, M. A______ s’est vu notifier par l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) une décision de non report de son expulsion judiciaire, après que la faculté de s’exprimer lui eut été donnée.

6) M. A______ a été libéré au terme de sa peine, le 14 août 2020, après que le Tribunal d’application des peines et mesures (ci-après : TAPEM) eût refusé de lui octroyer une libération conditionnelle.

7) Le 14 août 2020, M. A______ a été placé en détention administrative par le commissaire de police.

8) Entendu par le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI), il s’est opposé à son renvoi en D______ et en C______ et a indiqué souhaiter être renvoyé en F______, où vivait son fils de dix-huit ans. Il possédait bien la nationalité D______ mais n’avait aucune attache avec ce pays. En fait, il n’était pas D______ et n’avait aucun document d’identité D______. Ses documents d’identité C______ étaient en C______.

9) Par jugement du 17 août 2020 (JTAPI/668/2020), le TAPI a confirmé l’ordre de mise en détention administrative pour une durée de trois mois.

10) Les vols réservés successivement pour les 2, 9 et 23 septembre en vue du rapatriement de M. A______ ont été annulés par la compagnie aérienne.

11) Durant sa détention administrative, M. A______ a fait part à la représentation diplomatique D______ de son refus de rentrer en D______. Il n’était pas D______ mais seulement C______.

Les autorités D______ ont alors requis des autorités suisses qu’elles présentent une nouvelle demande d’identification, l’identification accomplie en 2012 étant trop ancienne.

12) Par arrêt du 4 septembre 2020 (ATA/851/2020), la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) a annulé le jugement du 17 août 2020 et ordonné la mise en liberté immédiate de M. A______.

L’exécution de son expulsion était impossible. Il ne démontrait pas que l’F______ était disposée à l’accueillir. Il n’était en outre pas établi que son renvoi vers la D______ ou vers l’C______ pourrait intervenir dans un délai raisonnable, aucun vol n’étant agendé, et la date pour la réservation d’un vol apparaissant incertaine et lointaine, dans un contexte de pandémie.

13) Par pli remis en mains propres à M. A______ le 4 septembre 2020, l’OCPM, se référant aux arrêts de la chambre pénale du 24 février 2020 et de la chambre administrative du 4 septembre 2020 ainsi qu’à la décision de non report d’expulsion judiciaire du 31 juillet 2020, a imparti à ce dernier un délai de vingt-quatre heures pour quitter le territoire suisse. Une carte d’annonce de sortie lui était également remise, et il était averti qu’il s’exposait à une condamnation pénale pour rupture de ban s’il ne quittait pas la Suisse dans le délai imparti.

14) Par jugement du 30 octobre 2020, le Tribunal de police a condamné M. A______, qui était alors détenu à la prison de E______ pour rupture de ban, à une peine privative de liberté de cinquante et un jours, sous déduction de cinquante et un jours de détention avant jugement, et ordonné sa libération immédiate.

15) Par courrier du 2 novembre 2020 adressé à l’OCPM, service de protection, asile et retour, M. A______ a demandé à être admis provisoirement sur le territoire cantonal, précisant qu’il s’engageait, tant qu’il demeurerait en Suisse durant l’organisation de son départ, à se présenter à l’OCPM pour attester sa présence.

Suite au courrier du 4 septembre 2020, il n’avait pas pu quitter le territoire suisse car les frontières de l’C______ étaient fermées. Il avait été arrêté par la police le 10 septembre 2020 et placé en détention jusqu’au 30 octobre 2020. Il devait être admis provisoirement sur le territoire cantonal sans attendre, car l’exécution de son renvoi était impossible et il était démuni d’autorisation de séjour qui lui permettrait de se rendre à l’étranger, ainsi que de documents d’identité valables pour retourner en C______. Une décision d’interdiction de quitter le territoire assigné devait lui être notifiée en application des art. 69 al. 3 et 74 al. 1 et 2 LEI. Il était disposé à être assigné à la commune de Vernier. Il souffrait de troubles somatiques et psychiatriques, notamment de fortes angoisses et d’idées délirantes de persécution.

16) Le 5 novembre 2020, l’OCPM a indiqué à M. A______ que le prononcé de mesures fondées sur l’art. 74 LEI relevait de la compétence du commissaire de police. En sa qualité de ressortissant D______, auquel un laissez-passer avait été délivré par les autorités D______ en 2012, il n’était pas empêché de rentrer dans son pays. Vu la décision notifiée le 4 septembre 2020, il aurait dû avoir quitté le territoire suisse au plus tard le lendemain. Il avait indiqué le 17 août 2020 qu’il souhaitait aller en F______ où vivait son fils.

17) Le 6 novembre 2020, M. A______ a réitéré sa requête, précisant qu’il était disposé à se rendre à toute convocation à l’OCPM en présence de son conseil.

18) Le 10 novembre 2020, M. A______ a recouru devant le TAPI contre le courrier du 5 novembre 2020 de l’OCPM, concluant à l’annulation de la décision attaquée et à ce que son assignation territoriale soit ordonnée. Sur mesures provisionnelles, il devait être autorisé à résider sur le territoire de la commune de G______ et il devait lui être ordonné de résider au H______ et à pouvoir bénéficier de l’aide d’urgence de l’Hospice général (ci-après : l’hospice).

La décision de refus d’entrer en matière du 5 novembre 2020 violait les art. 69 al. 3 LEI et 12 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 (LaLEtr - F 2 10). Il n’avait reçu, à sa sortie de prison en octobre 2020, aucune indication quant aux démarches à effectuer en lien avec son expulsion judiciaire. Avaient également été violés les art. 7 al. 1 let. a LaLEtr et 3 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA- E 5 10), car il n’appartenait pas à l’OCPM de refuser la demande d’assignation territoriale qu’il avait formée, mais de transmettre sa requête au commissaire de police.

19) Le 11 novembre 2020, la direction des affaires consulaires du Ministère D______ des affaires étrangères a indiqué à l’ambassade de Suisse à J______ que suite à sa note verbale n° 213/2020 afférente au dossier d’identification de dix personnes, après examen des fiches dactyloscopiques des dossiers transmis, les services compétents du Ministère de l’intérieur D______ avaient pu identifier trois ressortissants D______, dont « B______ ».

20) Par jugement du 13 novembre 2020 (JTAPI/987/2020), le TAPI a déclaré le recours de M. A______ irrecevable.

L’acte attaqué ne constituait pas une décision, car il n’acceptait ni ne refusait de donner une suite positive à la demande, mais se contentait de rappeler que le prononcé de mesures relevait de la compétence du commissaire de police. L’OCPM n’avait pas été mis en demeure de rendre une décision formelle à la suite du courrier du 5 novembre 2020, laquelle aurait pu aboutir au prononcé d’une décision ouvrant la voie à un recours, à défaut un recours pour déni de justice.

21) Le 17 novembre 2020, M. A______ a mis en demeure l’OCPM, soit pour celui-ci le service de protection, asile et retour, de rendre une décision formelle au plus tard le 18 novembre 2020 à 18h00 au sujet de sa demande du 2 novembre 2020.

22) Le 19 novembre 2020, le commissaire de police, auquel le courrier du 17 novembre 2020 avait été transmis, a indiqué à M. A______ qu’il n’entendait pas prendre de mesures de contrainte à son encontre au sens de l’art. 74 LEI, étant rappelé que le prononcé d’une telle mesure constituait, selon la loi, une faculté et non une obligation.

23) Le 20 novembre 2020, M. A______ a recouru contre cette décision auprès du TAPI, concluant à son annulation et à ce que son assignation territoriale soit ordonnée. À titre provisionnel, il devait être autorisé à résider sur le territoire de Vernier. Il devait lui être ordonné de résider au G______. Il devait être mis au bénéfice de l’aide d’urgence de l’hospice.

Il se trouvait dans une situation de détresse absolue l’exposant à tomber dans la délinquance et à subir une nouvelle condamnation pénale. Il était démuni de documents d’identité. Son renvoi ne pouvait être organisé. Il ne pouvait se rendre dans aucun pays. Depuis sa sortie de prison, il n’avait nulle part où dormir et ne pouvait s’alimenter, faute de bénéficier d’une aide d’urgence. Ses conditions de vie étaient intolérables et il incombait aux autorités de lui permettre de mener une existence conforme à la dignité humaine.

La décision attaquée était arbitraire et le commissaire de police avait excédé son pouvoir d’appréciation. À sa sortie de prison le 30 octobre 2020, il n’avait reçu aucune information de la part des autorités administratives quant aux démarches à entreprendre en lien avec son expulsion judiciaire. Il n’avait pas quitté la Suisse dans le délai imparti compte tenu du fait qu’il ne pouvait se rendre dans aucun autre pays. Le commissaire de police ne disposait d’aucune marge de manœuvre et aurait dû accéder à sa requête. Si une marge de manœuvre devait être reconnue, sa situation particulière justifiait son assignation à territoire.

24) Le 25 novembre 2020, le SEM, faisant suite au courrier des autorités D______ du 11 novembre 2020, a invité l’OCPM à réserver auprès de SwissREPAT une place pour M. A______ sur un vol à destination de la D______.

Les autorités D______ l’avaient reconnu et identifié et étaient disposées à délivrer un laissez-passer.

25) Par jugement du 27 novembre 2020 (JTAPI/1054/2020), le TAPI a déclaré le recours irrecevable.

La mesure prévue à l’art. 74 al. 1 LEI permettait à l’autorité cantonale compétente d’enjoindre un étranger de ne pas quitter le territoire qui lui était assigné ou de ne pas pénétrer dans une région déterminée lorsqu’il n’était pas titulaire d’une autorisation de courte durée, d’une autorisation de séjour ou d’une autorisation d’établissement et qu’il troublait ou menaçait la sécurité et l’ordre publics. La mesure visait notamment à lutter contre le trafic de stupéfiants et à éloigner les personnes en contact avec le milieu de la drogue ou les lieux où celui-ci se pratique. La mesure pouvait également être prononcée contre l’étranger frappé d’une décision de renvoi ou d’expulsion entrée en force lorsque des éléments concrets faisaient redouter qu’il ne quitterait pas la Suisse dans le délai prescrit ou qu’il n’avait pas respecté le délai qui lui était imparti pour quitter le territoire. La mesure pouvait encore se justifier lorsque l’exécution du renvoi ou de l’expulsion avait été reportée. La mesure n’était adaptée que si le départ était possible. En l’espèce, l’intéressé souhaitait être hébergé au H______ et bénéficier de l’aide d’urgence de l’hospice. Dès lors que la chambre administrative avait reconnu en septembre 2020 que l’exécution de son expulsion était impossible, les conditions d’une assignation territoriale n’apparaissaient pas remplies. En toute hypothèse, l’assignation territoriale ne lui assurerait ni l’hébergement dans un foyer ni l’octroi d’une aide d’urgence. Il n’établissait ainsi aucun avantage pratique à l’admission de son recours, et partant aucun intérêt digne de protection à l’annulation de la décision attaquée. Il aurait davantage de chances d’atteindre le but qu’il visait, soit de bénéficier d’un toit et d’une aide lui permettant de se nourrir, en sollicitant de l’OCPM la prise de mesures en vue de régler ses conditions de séjour jusqu’à l’exécution de son renvoi ou de son expulsion, en application de l’art. 12B LaLEtr, cette question ne faisant pas l’objet de la décision attaquée.

26) Le 5 décembre 2020, M. A______ a été arrêté par la police genevoise.

Il a reconnu être entré dans un commerce pour y voler des parfums, dans le but de les revendre pour se procurer de quoi se nourrir.

Il n’avait aucun lieu de résidence en Suisse ni aucun lien avec le pays. Sa mère et ses frères et sœurs vivaient en C______ et son fils vivait en F______. Il n’avait aucune source de revenus et vivait au jour le jour.

Aucun motif particulier ne s’opposait à son expulsion.

27) Par un même acte remis à la poste le 15 décembre 2020, M. A______ a recouru auprès de la chambre administrative contre les jugements du TAPI des 13 et 27 novembre 2020.

28) Par jugement du 2 février 2021, confirmée par arrêt de la CPAR du 19 juillet 2021, le Tribunal de police de Genève a condamné M. A______ à une peine privative de liberté de neuf mois pour rupture de ban et vol.

Son maintien en détention a été ordonné pour des motifs de sûreté pendant la procédure d’appel.

M. A______ a recouru au Tribunal fédéral et a demandé sa mise en liberté à la CPAR, laquelle lui a été accordée le 19 juillet 2021.

29) Par arrêt du 11 mai 2021 (ATA/506/2021), la chambre administrative a rejeté les recours de M. A______ contre les jugements du TAPI des 13 et 27 novembres 2020.

Il ne disposait en aucun cas d’un droit à ce qu’une assignation territoriale soit prononcée à son encontre. Faute de qualité pour recourir, c’était à bon droit que le TAPI avait déclaré ses recours irrecevables. Il était par ailleurs établi qu’il possédait la nationalité D______ en plus de la nationalité C______. Son renvoi vers la D______ demeurait possible.

30) Le 23 juillet 2021, les services de police ont procédé à la réservation d’un vol avec escorte policière à destination de la D______, en vue du rapatriement de M. A______.

Le vol a été confirmé pour le 18 août 2021, au départ de Genève. Le rapport médical relatif à M. A______ a été transmis à I______.

31) Le 29 juillet 2021, le SEM indiqué que si la D______ n’exigeait plus de quarantaine à l’arrivée sur son sol, tous les voyageurs devaient se soumettre à un test PCR, quand bien même ils étaient vaccinés contre le Covid-19.

Un vol spécial pourrait être organisé dans les huit semaines, pour autant que les candidats au rapatriement soient au moins trois à cinq. M. A______ était le deuxième candidat inscrit.

32) Le 3 août 2021, M. A______ a été remis en liberté au terme de sa peine.

33) Le même jour, le commissaire de police a émis un ordre de mise en détention administrative à son encontre pour une durée de quatre mois, en application de l’art. 76 al. 1 let. b ch. 1, renvoyant à l’art. 75 al. 1 let. b, c et h, ch. 3 et 4 LEI.

M. A______ a indiqué à cette occasion qu’il s’opposait à son renvoi vers la D______. Il n’était pas en bonne santé. Il était C______ et non D______.

Le commissaire de police a soumis l’ordre de mise en détention au TAPI.

34) Le 3 août 2021, M. A______ a déclaré au TAPI qu’il n’était pas d’accord de rentrer en D______. Il était C______ et non D______. Il possédait un acte de naissance et une carte d’identité qui le démontraient. Il avait remis ces documents à son avocate. Il s’étonnait qu’un laissez-passer n’ait pas encore été délivré par les autorités D______. En Suisse, il avait été victime de plusieurs agressions.

Le commissaire de police indiquait que les autorités D______ avaient confirmé la délivrance du laissez-passer, qui interviendrait dès qu’un vol aurait pu être réservé. Ce type de document avait une durée de validité limitée et n’était jamais délivré longtemps à l’avance. Il fallait en principe compter trois semaines depuis la réservation du vol pour l’obtenir. Les refoulements vers la D______ étaient toujours possibles. Le vol n’avait pas été annulé. Seul un test PCR était nécessaire pour pouvoir entrer sur le territoire D______. Un rapport médical avait été transmis à l’I______ dès lors que M. A______ avait des problèmes de santé. Toutes les démarches nécessaires avaient été entreprises. La durée de quatre mois permettrait, en cas d’opposition de M. A______ le 18 août 2021, d’organiser un vol de degré supérieur, et de tenir compte des aléas dus à la pandémie.

L’avocate de M. A______ a indiqué qu’elle ne possédait pas l’acte de naissance et la carte d’identité C______ de son client dans le dossier, selon les vérifications qu’elle avait accompli l’après-midi même. Il était cependant incontestable que celui-ci était C______, ce qui ressortait notamment des différentes procédures pénales. Les autorités D______ en Suisse n’étaient pas joignables depuis le début de la semaine du 29 juillet 2021, de sorte que l’obtention d’un laissez-passer semblait difficile sinon compromise. La détention administrative devait être levée immédiatement faute de certitude quant à l’exécutabilité du renvoi. Subsidiairement, une assignation à résidence devait être ordonnée. Plus subsidiairement encore, la durée de détention devait être ramenée à un mois.

35) Par jugement du 3 août 2021, le TAPI a confirmé l’ordre de mise en détention administrative pour une durée réduite à dix semaines, soit jusqu’au 11 novembre 2021 inclus.

Rien n'indiquait que l’expulsion de M. A______ était impossible pour des motifs d’ordre juridique ou matériel.

Se soumettre à un test PCR faisait partie des obligations de coopération. L’atteinte à l’intégrité corporelle et à la vie privée n’apparaissait pas grave s’agissant d’un simple prélèvement effectué dans le nez ou la gorge. En l’absence de base légale, le test ne pouvait être effectué contre la volonté de l’intéressé. En cas de refus de s’y soumettre, celui-ci pouvait toutefois être placé ou maintenu en détention administrative, dans le respect du principe de proportionnalité. M. A______ ne pouvait donc se prévaloir, pour se soustraire à la détention administrative, de l’impossibilité résultant de son refus de se soumettre à un test PCR. Un refus pourrait constituer un motif de détention pour insoumission au sens de l’art. 78 LEI.

36) Par acte remis à la poste le 13 août 2021, et reçu le 16 août 2021, M. A______ a recouru auprès de la chambre administrative contre ce jugement, concluant son annulation et à sa mise en liberté immédiate.

Il contestait avoir pour identité M. B______. Il s’agissait d’une autre personne. Ses documents d’identité C______ au nom de A______, le prouvaient. Son passeport contenait une empreinte et une photographie. Il s’agissait bien de lui.

Le changement d’identité soudain soutenu par les autorités D______ était plus que choquant. Il n’était pas possible d’avoir deux identités différentes dans deux États différents. Ce point devait nécessairement être investigué, et il saisissait le même jour l’ambassade D______ de ce problème, en la priant de lui expliquer concrètement et dans les plus brefs délais comment il avait pu être identifié sous une autre identité que la sienne alors qu’il parvenait à démontrer qu’il s’appelait A______ et avait la nationalité C______.

Il avait remis à son avocate une copie de son document d’identité C______, que celle-ci annexait au recours et au courrier à l’ambassade de D______.

Le laissez-passer des autorités D______ n’était toujours pas produit, l’ambassade ne répondait ni aux appels ni au courrier, ce qui laissait présager qu’elle n’entendait plus délivrer aucun document au vu de la situation très préoccupante dans le pays.

Il n’avait ni famille ni amis en D______. Il n’y avait jamais vécu mais s’y était rendu une seule fois, vingt ans auparavant, durant un mois pour des vacances durant sa jeunesse.

Il était déterminé à s’opposer à son renvoi.

L’exécution de son renvoi était impossible. Il établissait sans contestation possible qu’il était C______. Il était impossible qu’il eût, en C______ et en D______, deux identités différentes.

Il n’avait jamais vécu en D______, ou alors que très brièvement. Seule sa grand-mère paternelle il vivait.

Les autorités D______ considéraient soudainement qu’il était D______ et avait le nom de M. B______. C’était la première fois qu’il était question d’un autre nom. Il s’agissait d’une coïncidence singulière.

La situation en D______ était par ailleurs très critique et évoluait défavorablement de jour en jour. Son renvoi s’avérait ainsi également impossible au plan matériel, ce d’autant plus qu’aucun laissez-passer n’avait été produit.

37) Le 18 août 2021 le commissaire de police a indiqué qu’un laissez-passer avait été délivré le 5 août 2021 par les autorités D______ et que l’expulsion de M. A______ avait été exécutée le 17 août 2021. Le recours était devenu sans objet.

38) Le conseil de M. A______ n’a pas répliqué dans le délai imparti au 20 août 2021 à midi.

39) Le 20 août 2021, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Selon l'art. 10 al. 2 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 (LaLEtr - F 2 10), la chambre administrative doit statuer dans les dix jours qui suivent sa saisine. Ayant reçu le recours le 16 août 2021 et statuant ce jour, elle respecte ce délai.

À teneur dudit art. 10 LaLEtr, elle est compétente pour apprécier l'opportunité des décisions portées devant elle en cette matière (al. 2 2ème phr.) ; elle peut confirmer, réformer ou annuler la décision attaquée ; le cas échéant, elle ordonne la mise en liberté de l'étranger (al. 3 1ère phr.).

3) a. Aux termes de l'art. 60 al. 1 let. b LPA, ont qualité pour recourir toutes les personnes qui sont touchées directement par une décision et ont un intérêt digne de protection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée.

b. Selon la jurisprudence, le recourant doit avoir un intérêt pratique à l'admission du recours, soit que cette admission soit propre à lui procurer un avantage, de nature économique, matérielle ou idéale (ATF 138 II 162 consid. 2.1.2 ; ATA/1272/2017 du 12 septembre 2017 consid. 2b).

c. Un intérêt digne de protection suppose un intérêt actuel à obtenir l'annulation de la décision attaquée (ATF 138 II 42 consid. 1 ; 137 I 23 consid. 1.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1157/2014 du 3 septembre 2015 consid. 5.2). L'existence d'un intérêt actuel s'apprécie non seulement au moment du dépôt du recours, mais aussi lors du prononcé de la décision sur recours (ATF 137 I 296 consid. 4.2 ; 136 II 101 consid. 1.1) ; si l'intérêt s'éteint pendant la procédure, le recours, devenu sans objet, doit être simplement radié du rôle (ATF 125 V 373 consid. 1 ; ATA/1092/2020 du 3 novembre 2020) ou déclaré irrecevable (ATF 123 II 285 consid. 4 ; ATA/322/2016 du 19 avril 2016 ; ATA/308/2016 du 12 avril 2016).

d. Il est toutefois exceptionnellement renoncé à l'exigence d'un intérêt actuel lorsque cette condition de recours fait obstacle au contrôle de légalité d'un acte qui pourrait se reproduire en tout temps, dans des circonstances semblables, et qui, en raison de sa brève durée ou de ses effets limités dans le temps, échapperait ainsi toujours à la censure de l'autorité de recours (ATF 140 IV 74 consid. 1.3 ; 139 I 206 consid. 1.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1157/2014 du 3 septembre 2015 consid. 5.2) ou lorsqu'une décision n'est pas susceptible de se renouveler mais que les intérêts des recourants sont particulièrement touchés avec des effets qui vont perdurer (ATF 136 II 101 ; 135 I 79). Cela étant, l'obligation d'entrer en matière sur un recours, dans certaines circonstances, nonobstant l'absence d'un intérêt actuel, ne saurait avoir pour effet de créer une voie de recours non prévue par le droit cantonal (ATF 135 I 79 consid. 1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_133/2009 du 4 juin 2009 consid. 3).

4) En l’espèce, l’expulsion de M. A______ a été exécutée le 17 août 2021, ce qui a mis fin à sa détention en vue de son refoulement, et entraîné l’extinction de son intérêt à obtenir sa mise en liberté.

La cause, devenue sans objet, sera rayée du rôle.

5) Le recourant a conclu à l’octroi d’une indemnité de procédure. Il y a donc lieu d’examiner si en toute hypothèse son recours était fondé.

6) a. En l'espèce, les conditions de la mise en détention administrative étaient réalisées. M. A______ a fait l'objet de deux décisions d'expulsion judiciaires entrées en force, prononcées les 18 mars 2018 et 14 novembre 2019. Il a aussi été condamné à plusieurs reprises ces dernières années pour vol (2 février 2021 ; 14 novembre 2019 ; 10 décembre 2018 ; 24 novembre 2018 ; 27 août 2018 ; 18 mars 2018), soit autant de crimes.

b. Les autorités compétentes ont entrepris avec célérité les démarches nécessaires dès la sortie de prison du recourant. Elles ont obtenu l’identification du recourant par les autorités D______, réservé un vol à destination de J______ et accompli les démarches pour obtenir un nouveau laissez-passer.

La détention était apte à atteindre le but voulu par le législateur, s'avérait nécessaire compte tenu de l'attitude adoptée par le recourant et proportionnée au sens étroit, dès lors que conformément à la jurisprudence, si l'intérêt du recourant était grand à ne pas être renvoyé, l'intérêt public au respect des décisions de justice devait primer. La détention était en conséquence proportionnée.

Elle l'était également quant à sa durée, réduite en l’espèce à dix semaines, soit jusqu'au 11 novembre 2021, quand bien même un vol avait été réservé pour le 18 août 2021. Si le recourant n’avait pas embarqué le 17 août 2021, l’autorité aurait disposé du temps nécessaire pour organiser un nouveau vol.

7) Le recourant soutient qu’il est C______ et n’est pas D______, et ne pourrait partant être expulsé vers la D______. Son expulsion serait juridiquement impossible.

La chambre de céans a déjà tenu pour établi, dans son arrêt du 11 mai 2021 (ATA/506/2021 cité consid. 7b), que le recourant est de nationalité D______.

En l’espèce, le laissez-passer a été délivré le 5 août 2021.

8) Vu la nature du litige, aucun émolument ne sera perçu (art. 87 al. 1 LPA et art. 12 al. 1 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03). Aucune indemnité de procédure ne sera allouée au vu de l’absence de chances de succès du recours (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

dit que le recours interjeté le 13 août 2021 par M. A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 3 août 2021est devenu sans objet ;

raye la cause du rôle ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Karin Etter, avocate du recourant, au commissaire de police, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance, au Secrétariat d'État aux migrations, ainsi qu'au centre Frambois LMC, pour information.

Siégeant : M. Mascotto, président, Mmes Payot Zen-Ruffinen et Tombesi, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

le président siégeant :

 

 

C. Mascotto

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

la greffière :