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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3889/2020

ATA/274/2021 du 02.03.2021 ( FORMA ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3889/2020-FORMA ATA/274/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 2 mars 2021

1ère section

 

dans la cause

 

Madame A______

contre

UNIVERSITÉ DE GENÈVE



EN FAIT

1) Par décision du 11 septembre 2020 (relevé de notes), distribuée au guichet de l'office postal de B______ le 16 septembre suivant selon suivi du courrier recommandé, Madame A______ a été éliminée à l'issue de la session d'examens d'août-septembre 2020 du baccalauréat universitaire en relations internationales (ci-après : BARI), orientation droit, dispensé par le Global studies institute de l'Université de Genève (ci-après : GSI) en raison d'une moyenne inférieure à 4.00 (3.86).

2) Mme A______ a mentionné la date du 16 octobre 2020 et une adresse postale au chemin de C______ à B______ sur le formulaire d'opposition contre cette décision. Ledit formulaire a, selon le cachet postal figurant sur l'enveloppe l'ayant contenu, été expédié au GSI le 18 octobre 2020 en courrier A.

Ladite enveloppe ne comporte rien d'autre que l'adresse du GSI sur son recto et celle de Mme A______ sur son verso.

3) Par décision du 21 octobre 2020, GSI a déclaré irrecevable cette opposition pour cause de tardiveté.

4) Mme A______ a formé recours contre cette décision auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) par acte daté du 21 novembre 2020, expédié par courrier recommandé le lundi 23 novembre suivant.

Son relevé de notes, envoyé par courrier recommandé, ne lui avait été transmis en mains propres que le 21 septembre 2020, marquant le début du délai de trente jours pour former opposition. Selon le souhait de son père, elle devait en effet quitter le domicile familial du mercredi au vendredi, période qui parfois s'allongeait. Cela avait été le cas la semaine où son relevé de notes lui avait été envoyé. L'un de ses parents l'avait réceptionné mais n'avait pas jugé utile de l'en informer.

En outre, son opposition avait été postée le vendredi 16 octobre 2020 à 18h00 à la gare de D______. N'étant pas coutumière des procédures de recours, elle n'avait pas pensé à envoyer son opposition par recommandé. Elle n'avait donc pour elle que sa bonne foi et sa volonté de réussir ses études « à tout prix » et donc d'éviter un non-respect des délais. La présence de son frère aîné Monsieur E______, pouvait « attester de ce fait ».

5) Aux termes de sa réponse du 18 décembre 2020, GSI a conclu au rejet du recours.

Le délai - impératif - de trente jours pour former opposition à la décision du 21 octobre 2020 était arrivé à échéance le 16 octobre 2020, de sorte que l'opposition postée le 18 octobre 2020 était tardive au regard de l'art. 18 al. 1 du règlement relatif à la procédure d'opposition au sein de l'université du 16 mars 2009 - RIO-UNIGE.

Mme A______ ne contestait pas la réception de la décision d'élimination dans sa sphère d'influence le 16 septembre 2020. Le sceau postal entraînait la présomption de la remise à la poste du pli contenant l'opposition le 18 septembre 2020, soit au-delà du délai d'opposition venant à échéance le 16 octobre 2020. Or, il n'était nullement mentionné sur l'enveloppe ayant contenu l'opposition que le frère de Mme A______ attestait de sa remise avant l'échéance du délai, étant relevé que celui-là n'avait pas l'apparence de neutralité et d'objectivité requise pour un témoin. Elle n'avait donc pas renversé ladite présomption.

Ses allégations concernant la situation familiale, au demeurant non prouvées, ne constituaient pas un cas de force majeure qui justifierait la prolongation du délai en cause. Il en allait de même de son ignorance des usages en matière de procédure.

6) Mme A______ n'a pas fait usage de son droit à la réplique et la cause a été gardée à juger le 21 décembre 2020, ce dont les parties ont été informées.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 43 al. 1 et 2 de la loi sur l'université du 13 juin 2008 - LU - C 1 30 ; art. 36 al. 1 et 37 RIO-UNIGE ; art. 62 al. 1 let. a et 63 al. 1 let. b de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10)

2) Est querellée la décision de la direction du GSI du 21 octobre 2020 qui retient que l'opposition de la recourante, expédiée par voie postale le 18 octobre 2020, à la décision d'élimination du 11 septembre 2020, était tardive et donc irrecevable.

a. Selon l'art. 43 LU, la LPA s'applique à l'université (al. 1). L'université met en place une procédure d'opposition interne à l'égard de toute décision au sens de l'art. 4 LPA, avant le recours à la chambre administrative de la Cour de justice (al. 2).

b. L'art. 18 RIO-UNIGE prévoit que l'opposition doit être formée dans les 30 jours qui suivent la notification de la décision litigieuse, auprès de l'autorité qui l'a rendue (al. 1). Le délai commence à courir le lendemain de la notification de la décision, si celle-ci est communiquée par écrit aux parties (al. 2). À défaut du respect des délais précités, l'opposition sera déclarée irrecevable (al. 5).

c. La notification doit permettre au destinataire de prendre connaissance de la décision et, le cas échéant, de faire usage des voies de droit ouvertes à son encontre. Une décision est notifiée, non pas au moment où l'intéressé en prend connaissance, mais le jour où elle est dûment communiquée (ATF 113 Ib 296 consid. 2a ; arrêt du Tribunal fédéral 2P.259/2006 du 18 avril 2007 consid. 3.1 et les références citées ; ATA/890/2015 du 1er septembre 2015 consid. 2b).

d. L'autorité qui entend se prémunir contre le risque d'échec de la preuve de la notification doit communiquer ses actes judiciaires sous pli recommandé avec accusé de réception (ATF 129 I 8 consid. 2.2).

3) a. Les délais de réclamation et de recours fixés par la loi sont des dispositions impératives de droit public. Ils ne sont, en principe, pas susceptibles d'être prolongés (art. 16 al. 1 LPA), restitués ou suspendus, si ce n'est par le législateur lui-même. Celui qui n'agit pas dans le délai prescrit est forclos et la décision en cause acquiert force obligatoire (ATA/1068/2015 du 6 octobre 2015 consid. 5a ; ATA/918/2015 du 8 septembre 2015 consid. 3a). Le Tribunal fédéral a eu l'occasion de préciser que le strict respect des délais légaux se justifie pour des raisons d'égalité de traitement et n'est pas constitutif de formalisme excessif (ATF 125 V 65 consid. 1 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_507/2011 du 7 février 2012 consid. 2.3 ; 2D_18/2009 du 22 juin 2009 consid. 4.2).

b. S'agissant d'un acte soumis à réception, telle une décision ou une communication de procédure, la notification est réputée faite au moment où l'envoi entre dans la sphère de pouvoir de son destinataire (Pierre MOOR/ Étienne POLTIER, Droit administratif, vol. 2, 3ème éd., 2011, p. 302-303 n. 2.2.8.3). Il suffit que celui-ci puisse en prendre connaissance (ATF 118 II 42 consid. 3b p. 44 ; 115 Ia 12 consid. 3b p. 17 ; arrêts du Tribunal fédéral 2P.259/2006 du 18 avril 2007 consid. 3.1 ; 2A.54/2000 du 23 juin 2000 consid. 2a et les références citées).

c. Lorsqu'une personne à qui une décision devait être notifiée ne l'a pas reçue, sans sa faute, le délai de recours court du jour où cette personne a eu connaissance de la décision (art. 62 al. 5 LPA). Toutefois, celui qui, pendant une procédure, omet de prendre les dispositions nécessaires pour que les envois postaux lui soient transmis, ne peut se prévaloir de son absence lors de la tentative de notification d'une communication officielle à son adresse habituelle, s'il devait s'attendre, avec une certaine vraisemblance, à recevoir une telle communication (ATF 130 III 396 consid. 1.2.3 et les références citées ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_10/2015 du 2 mars 2015 consid. 4.2 ; 2C_1029/2014 du 17 novembre 2014 consid. 2).

d. Les cas de force majeure restent réservés (art. 16 al. 1 2ème phr. LPA). Tombent sous cette notion les événements extraordinaires et imprévisibles qui surviennent en dehors de la sphère d'activité de l'intéressé et qui s'imposent à lui de l'extérieur de façon irrésistible (ATA/642/2015 du 16 juin 2015 consid. 4 ; ATA/105/2014 du 18 février 2014 consid. 5).

4) a. Selon l'art. 17 LPA, les délais commencent à courir le lendemain de leur communication ou de l'événement qui les déclenche (al. 1). Les écrits doivent parvenir à l'autorité ou être remis à son adresse à un bureau de poste suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse au plus tard le dernier jour du délai avant minuit (al. 4).

b. La date du dépôt d'un acte de procédure est présumée coïncider avec celle du sceau postal (ATF 142 V 389 consid. 2.2 ; 124 V 372 consid. 3b). La partie qui prétend avoir déposé son acte la veille de la date attestée par le sceau postal a cependant le droit de renverser cette présomption par tous moyens de preuve appropriés (ATF 142 V 389 consid. 2.2 ; 124 V 372 consid. 3b). La présomption ne saurait être renversée au moyen d'une preuve offerte après l'expiration du délai de recours (arrêt du Tribunal fédéral 6B_157/2020 du 7 février 2020 consid. 2.4 paru in SJ 2020 I 232). Ainsi, indiquer à l'autorité judiciaire, pour la première fois après l'expiration du délai de recours, que le pli litigieux aurait été déposé en présence de témoins n'est pas admissible (arrêt du Tribunal fédéral 6B_157/2020 précité consid. 2.4).

Est notamment admissible, à titre de preuve, l'attestation de la date de l'envoi par un ou plusieurs témoins mentionnés sur l'enveloppe concernée (ATF 142 V 389 consid. 2.2 et les références citées). La présence de signatures sur l'enveloppe n'est pas, en soi, un moyen de preuve du dépôt en temps utile, la preuve résidant dans le témoignage du ou des signataires; il incombe dès lors à l'intéressé d'offrir cette preuve dans un délai adapté aux circonstances, en indiquant l'identité et l'adresse du ou des témoins (arrêts 5A_972/2018 du 5 février 2019 consid. 4.1; 8C_696/2018 précité consid. 3.3).

5) En l'espèce le relevé entraînant l'élimination du cursus de la recourante a été adressé par courrier recommandé du 11 septembre 2020 et retiré au guichet postal à B______ le 16 septembre 2020. Il est alors entré dans la sphère d'influence de la recourante. Quand bien même un tiers, soit l'un de ses parents selon ses allégations, l'aurait relevé pour son compte, il n'aura pu le faire que moyennant présentation d'une procuration de sa part dans la mesure où elle est majeure. Aussi, que la recourante ait ou non été présente au domicile familial le jour de ce retrait ou seulement dans les jours suivants, c'est bien le 16 septembre 2020 qui est la date pertinente de réception à retenir pour la computation du délai d'opposition. La recourante ne soutient au demeurant pas que ses parents lui auraient caché la réception dudit pli et, dans la mesure où elle venait de passer les examens de la session en cause, elle devait s'attendre à recevoir son relevé de notes et prendre des dispositions pour en avoir connaissance à temps.

Le délai légal de trente jours pour faire opposition, non prolongeable, a ainsi commencé à courir le jeudi 17 septembre 2020 et a expiré le vendredi 16 octobre 2020.

L'enveloppe, affranchie en courrier A, ayant contenu son opposition porte le sceau postal du 18 octobre 2020, ce qu'elle ne remet pas en cause. Si l'on s'en tient à cette date qui fonde une présomption de la date d'envoi, la recourante était effectivement hors délai. Elle soutient toutefois avoir posté son pli le 16 octobre 2020 à 18h00 à la gare de D______, en présence de son frère. L'enveloppe ayant contenu son opposition ne porte nulle mention d'une telle présence. La recourante ne l'évoque de plus pour la première fois que dans ses écritures devant la chambre de céans. Conformément à la jurisprudence rappelée ci-dessus, cette manière de faire n'est pas admissible et ne renverse pas la présomption découlant de la date figurant sur le sceau postal.

C'est donc à juste titre que l'intimée a déclaré irrecevable, car tardive, l'opposition de la recourante.

Mal fondé, le recours sera rejeté.

6) Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge de la recourante (art. 87 al. 1 LPA et 11 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03) et il ne sera pas alloué d'indemnité (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 23 novembre 2020 par Madame A______ contre la décision de l'Université de Genève du 21 octobre 2020 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge de Madame A______ ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 Ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, s'il porte sur le résultat d'examens ou d'autres évaluations des capacités, en matière de scolarité obligatoire, de formation ultérieure ou d'exercice d'une profession (art. 83 let. t LTF) ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Madame A______ ainsi qu'à l'Université de Genève.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mme Lauber, M. Mascotto, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

F. Cichocki

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :