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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/603/2020

ATA/263/2021 du 02.03.2021 sur JTAPI/864/2020 ( LDTR ) , ADMIS

Recours TF déposé le 19.04.2021, rendu le 28.10.2021, REJETE, 1C_195/2021
Parties : DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC / FONDATION IMMOBILIÈRE PATRIMOINE
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/603/2020-LDTR ATA/263/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 2 mars 2021

 

dans la cause

 

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC

contre

FONDATION IMMOBILIÈRE PATRIMOINE
représentée par Me Lucien Lazzarotto, avocat

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 6 octobre 2020 (JTAPI/864/2020)


EN FAIT

1) La Fondation immobilière patrimoine (ci-après : la fondation) est propriétaire de la parcelle n° 4'331 de la commune de Genève-Cité sur laquelle est érigé un bâtiment d'habitation et activités d'une surface totale de 252 m2. Cette parcelle est sise 13, boulevard des Philosophes.

2) Messieurs Emmanuel et Guillaume MEGEVAND ont loué un appartement de quatre pièces dans cet immeuble le 10 février 2003 pour un loyer annuel CHF 19'200.-. Ils ont quitté cet appartement en 2017.

3) Cet appartement a ensuite été loué du 23 juin 2017 au 15 septembre 2019 par Madame Eva et Monsieur Jérôme GERBIER, pour un loyer annuel de CHF 33'600.-, plus charges.

4) Le 26 août 2019, la fondation, par l'intermédiaire de la Régie Naef Immobilier Genève SA (ci-après : la régie) a déposé auprès du département du territoire (ci-après : le département) une demande d'autorisation de construire en procédure accélérée portant sur la rénovation dudit appartement (APA 305'436).

Le coût des travaux était estimé à CHF 94'700.-.

5) Dans le cadre de l'instruction du dossier, le département a sollicité plusieurs préavis, notamment celui de l'office cantonal du logement et de la planification foncière (ci-après : OCLPF). Cet office a demandé à plusieurs reprises la production de pièces complémentaires, notamment en lien avec les travaux réalisés en 2017 et précédemment.

6) La fondation a indiqué au département, par courriers des 17 septembre et 9 octobre 2019, que les travaux en question, d'un coût total de CHF 27'654.-, factures à l'appui, effectués en été 2017, correspondaient à :

-  la pose d'un nouveau carrelage au sol de la salle de bains par-dessus l'existant ;

-  la pose d'une coque acrylique sur la baignoire et le remplacement du lavabo ;

-  la pose d'un nouveau carrelage par-dessus l'existant au sol des wc ;

- le remplacement du plan de travail et des appareils électroménagers de la cuisine ;

-  la remise en peinture des meubles de cuisine existants ;

-  un complément de faïences ;

-  la remise en peinture des murs et plafonds de l'appartement.

Le carreleur n'avait jamais facturé ses interventions, devisées à CHF 6'613.90 le 2 juin 2017.

Les WC avaient été remplacés en 2006 pour un montant de CHF 2'590.-.

7) Suite à une demande de pièces complémentaires de la part de l'OCLPF, la fondation a indiqué au département, par pli du 6 novembre 2019, la liste des travaux réalisés dans l'appartement depuis 2003, à savoir en février 2010 le remplacement de la hotte, en juin 2013 la réfection de la peinture des WC et de la salle de bains et en décembre 2014 le remplacement des vannes de radiateurs.

8) Le 10 janvier 2020, l'OCLPF a rendu un préavis favorable sous conditions. Le loyer de l'appartement ne devait pas excéder, après les travaux effectués sans autorisation de construire en juin 2017, son niveau à cette date, soit CHF 5'148.- la pièce par an. Ce loyer devait être appliqué avec effet rétroactif pour une durée de trois ans à partir des travaux, soit du 1er juillet 2017.

Le loyer ne devait par ailleurs pas excéder, après les travaux visés par l'autorisation de construire requise, son niveau actuel de CHF 20'592.- par an, soit CHF 5'148.- la pièce par an, pendant une durée de trois ans à partir de la remise en location après la fin des travaux.

L'OCLPF indiquait enfin que l'APA 305'436 régularisait les travaux effectués sans autorisation en juin 2017 et visés par la procédure administrative I/7118.

9) Le département a délivré à la régie l'autorisation de construire APA 305'436 le 17 janvier 2020, laquelle a été publiée dans la Feuille d'avis officielle de la République et canton de Genève du même jour.

Au chiffre 6 de l'autorisation, il est indiqué notamment que les conditions contenues dans les préavis du service des monuments et des sites du 6 septembre 2019, de la police du feu du 27 août 2019 et de l'OCLPF du 10 janvier 2020 devaient être strictement respectées et faisaient partie intégrante de l'autorisation.

10) Par acte du 17 février 2020, la fondation a recouru contre cette autorisation de construire auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI), concluant principalement à ce qu'elle soit autorisée à effectuer les travaux, à l'annulation du chiffre 6 de la décision, à ce que la période de contrôle du loyer soit limitée à trois ans dès la remise en location après la fin des travaux faisant l'objet de l'autorisation de construire, à ce qu'il soit dit que ce loyer sera bloqué durant cette période à CHF 33'600.- par an, soit CHF 8'400.- la pièce par an, et à l'annulation de la procédure administrative I/7118 pour autant qu'elle ait été effectivement enregistrée.

Les travaux effectués en 2017 n'avaient apporté aucune amélioration de confort et la qualité de l'appartement n'avait pas changé. Ils avaient consisté exclusivement à maintenir l'appartement dans un état conforme à l'habitation et à remédier au vieillissement des installations, conformément à l'obligation d'entretien en vertu du droit du bail. Toute application de la loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation (mesures de soutien en faveur des locataires et de l'emploi) du 25 janvier 1996 (LDTR - L 5 20) au cas d'espèce était donc exclue. Ces travaux devaient être qualifiés de travaux d'entretien ; leur coût par pièce s'élevait à CHF 6'786.30 et la fondation n'aurait pas eu la volonté de rénover l'appartement à deux reprises en deux ans et investir près de CHF 100'000.- de plus si elle avait déjà changé son standing en 2017.

Le coût des travaux litigieux n'avait pas été pris en compte pour la fixation du loyer en 2017, son adaptation étant fondée sur les loyers du quartier, passant mensuellement de CHF 1'716.- à CHF 2'800.-.

Comme seuls les travaux projetés dans l'APA 305'436 amélioraient le confort de l'appartement puisqu'entraînant un changement qualitatif global, une durée de contrôle du loyer de six ans dépassait ce qui était prévu par la loi.

Enfin, la décision portant sur l'ouverture de la procédure d'infraction I/7118 ne lui ayant jamais été notifiée, son droit d'être entendue avait été violé, ce qui devait conduire à l'annulation de cette procédure.

Elle a produit un chargé contenant notamment les pièces liées aux baux à loyer conclus en février 2003 et juin 2017. Il ressort en particulier de l'avis officiel de fixation du loyer du 23 juin 2017 que « le loyer proposé se situe dans les limites des loyers usuels du quartier (art. 269 a lettre a CO) ».

11) Le département a conclu, le 15 mai 2020, au rejet du recours.

La fondation ne démontrait pas que les travaux réalisés en 2017 avaient été rendus nécessaires pour supprimer des défauts graves ou de moyenne importance ayant empêché ou restreint l'usage prévu de l'appartement. La nature des travaux, leur chronologie et leur coût devaient être assimilés à des travaux de transformation/rénovation ayant permis une remise à neuf de l'appartement, le loyer ayant par ailleurs été doublé. Le coût de ces travaux, de CHF 33'759.10 (CHF 27'145.20 + CHF 6'613.90), soit CHF 8'439.- par pièce, correspondait à la fourchette inférieure généralement retenue pour qualifier les travaux de grande ampleur.

Le département était donc légitimé à les soumettre, de même que les travaux autorisés par l'APA 305'436, à une période de blocage des loyers de trois ans, laquelle était bien en-deçà de la limite de cinq ans prévue par l'art. 12 LDTR.

La procédure I/7118 était en cours et la fondation pourrait exercer son droit d'être entendue et le cas échéant recourir contre la décision future.

12) Dans sa réplique du 8 juin 2020, la fondation a relevé que selon les documents produits, le coût des travaux par pièce était de CHF 6'786.30 et non de CHF 8'439.-, les travaux effectués par le carreleur, d'un montant de CHF 3'362.-, ayant été comptabilisés même si impayés. Il y avait eu deux phases de travaux successives de nature différente, soit en 2017, d'entretien et, en 2019, de rénovation.

Le cumul des périodes de contrôle des loyers était illicite.

13) Le TAPI a, par jugement du 6 octobre 2020, admis le recours de la fondation et, dans ses considérants, mais pas son dispositif, renvoyé le dossier au département pour nouvelle décision. Le TAPI a mis un émolument de CHF 700.- à la charge de la fondation et condamné l'État de Genève à lui verser une indemnité de procédure de CHF 1'700.-.

Au vu des pièces du dossier, les travaux effectués en 2017 devaient être qualifiés de travaux courants d'entretien, fréquemment réalisés lors d'un changement de locataire, n'apportant ni amélioration du confort ni de la qualité de l'appartement. Certains travaux prévus dans le cadre de l'autorisation de construire litigieuse portaient sur des éléments ayant fait l'objet de travaux en 2017 - par exemple la réfection du sol de la salle de bains et des WC - ce qui démontrait qu'il n'y avait eu aucune volonté d'échelonner les travaux dans le temps.

Le coût des travaux, de CHF 6'835.24 la pièce, était inférieur au montant retenu par la jurisprudence pour qualifier les travaux de grande ampleur (arrêt du Tribunal fédéral 1C_323/2014 du 10 octobre 2014).

Si le montant mensuel du loyer, porté à CHF 2'800.- par mois (soit CHF 33'600.- annuellement) après les travaux réalisés en 2017 pouvait paraître élevé par rapport au loyer avant travaux de CHF 19'200.-, il fallait garder à l'esprit qu'il s'agissait d'un appartement situé dans le périmètre protégé de la Vieille-Ville dont la surface totale s'élevait à près de 90 m2 pour quatre pièces. Il était certes plus élevé que la moyenne des loyers mensuels dans un immeuble semblable, de CHF 2'038.- (soit CHF 24'456.- par an) selon les statistiques genevoises pour 2017, mais il ne pouvait être retenu que ce montant ait été justifié par les travaux réalisés, lesquels n'avaient aucunement changé l'affectation du logement. Par ailleurs, le montant du loyer avant les travaux de 2017 était déjà supérieur au loyer correspond aux besoins prépondérants de la population.

Le département ne pouvait donc pas tenir compte des travaux effectués en 2017 dans le cadre de l'autorisation de construire APA 305'436 pour le calcul du loyer et la durée de son contrôle.

14) Le département a formé recours devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) par acte posté le 18 novembre 2020 contre ce jugement notifié le 19 octobre 2020. Il a conclu à son annulation et à la confirmation de sa décision du 17 janvier 2020, « frais et dépens de la procédure » à charge de la fondation.

Le TAPI avait violé l'art. 3 LDTR et la jurisprudence en qualifiant de travaux d'entretien ceux effectués en 2017. Il avait ignoré le critère du cumul des travaux, plus précisément leur accumulation, la terminologie adoptée laissant entendre qu'il les avait considérés isolément, et les circonstances dans lesquelles ils avaient été réalisés, de même que leur incidence sur le loyer. Les travaux n'avaient pas été réalisés depuis de nombreuses années, notamment la peinture et le remplacement du carrelage, et la fondation n'avait pas démontré avoir procédé à des travaux d'entretien réguliers de l'appartement en cause.

L'incidence desdits travaux sur le standing de l'appartement était patente. Ils avaient porté sur toutes les pièces de l'appartement et de manière beaucoup plus importante dans la cuisine et les chambres. Ces travaux, pris dans leur ensemble, équivalaient à une transformation et correspondaient au cas de figure jugé par la chambre administrative dans un arrêt ATA/422/2020 du 30 avril 2020.

Le loyer avait fait l'objet d'une augmentation de 75 % des suites des travaux, que le TAPI avait au demeurant qualifiée d'élevée, ce qui démontrait un impact qualitatif et une amélioration du confort de l'appartement. S'il s'était agi de purs travaux d'entretien, la fondation n'aurait pas répercuté leur coût sur les locataires, ce qui n'était pas autorisé. Il s'agissait bien de travaux d'entretien différés dans le temps et donc de rénovation, vu leur incidence sur le loyer. Dans la mesure où le loyer augmenté était plus élevé que la moyenne des loyers dans un immeuble semblable, comme relevé à juste titre par le TAPI, cela discréditait la thèse d'une adaptation aux loyers du marché.

15) Aux termes de sa réponse du 22 décembre 2020, la fondation a conclu au retrait de l'effet suspensif au recours et, au fond, à son rejet.

Le chantier devait pouvoir débuter, seul l'aspect financier étant en jeu dans la procédure de recours.

Le département n'expliquait pas pourquoi son appréciation devrait prévaloir sur celle du TAPI ni pourquoi l'analyse pleinement convaincante de cette instance devrait être écartée au profit de la sienne, alors que la nature des travaux effectués en 2017 était une question juridique et non d'appréciation. Il ressortait des éléments du dossier que les travaux réalisés en 2017 visaient uniquement à satisfaire l'obligation d'entretien lui incombant en vertu de l'art. 256 de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse (CO, Code des obligations - RS 220), conformément à la table de longévité établie par la Fédération romande immobilière. La fondation avait démontré les travaux d'entretien effectués dans l'appartement depuis 1997 et elle ne voyait pas quelle preuve supplémentaire le département attendait de sa part. Le TAPI avait motivé de façon circonstanciée les spécificités de l'appartement en question, quant à sa surface et à sa situation, pour écarter l'argument selon lequel l'augmentation de loyer opérée en juin 2017 serait à elle seule un indice incontournable de rénovation.

Le raisonnement du département apparaissait artificiel et tendait en finalité à permettre un contrôle des loyers, quels que soient les travaux entrepris pour peu qu'ils portent sur plus d'un poste ou soient réalisés à l'occasion d'un changement de locataire. Cette approche ne respectait pas l'esprit de la loi.

Le département esquivait totalement dans sa décision la question de la légalité et de la proportionnalité du chiffre 6 de sa décision du 17 janvier 2020 s'agissant de la limitation de la durée du contrôle étatique découlant de l'art. 12 LDTR, alors qu'aboutir en définitive en l'espèce à un contrôle du loyer de plus de six ans était inconstitutionnel, puisque violant le principe de la garantie de la propriété. Un tel contrôle ne pouvant excéder trois ans, il s'agissait pour le département soit de retenir que l'intégralité des travaux avait été réalisée en 2017, soit en 2019, le département ne pouvant demander à la fondation de réduire les loyers encaissés depuis 2017 que dans le premier cas et devant la laisser libre de fixer le loyer après les travaux visés par l'autorisation litigieuse.

16) Le 21 janvier 2021, le département s'en est rapporté à justice quant à la demande de levée de l'effet suspensif, sous réserve d'un éventuel transport sur place que pourrait ordonner la chambre administrative.

17) Dans sa réplique du 8 février 2021, le département a relevé que les interventions réalisées dans l'appartement en cause avant 2017 avaient été, à teneur des pièces produites, ponctuelles et minimes et rendues nécessaires notamment en raison d'un sinistre et ne pouvaient partant être qualifiées de travaux d'entretien réguliers.

La thèse de la fondation selon laquelle les rénovations intervenues en 2017 et en 2019 devraient être considérées comme un tout ne s'appuyait sur aucune jurisprudence. Il s'agissait de deux interventions distinctes ne présentant aucune connexité ni continuité entre elles. C'était même le contraire, puisqu'une partie des travaux entrepris en 2017 serait refaite dans le cadre des travaux autorisés le 17 janvier 2020.

18) Les parties ont été informées, le 11 février 2020, que la cause était gardée à juger sur la question de l'effet suspensif et sur le fond.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le recourant soutient que tant les travaux intervenus dans l'appartement litigieux de quatre pièces au 13, boulevard des Philosophes en 2017, que ceux à venir, autorisés selon décision du 17 janvier 2020, devraient être soumis à autorisation et en conséquence le loyer contrôlé, à compter de juin 2017, soit pendant six ans au total, conformément à la LDTR.

L'intimée considère en revanche, que seuls les travaux à venir sont soumis à autorisation et partant au contrôle de loyer pendant trois ans, ceux intervenus en 2017 n'étant que de l'entretien, comme l'a relevé le TAPI.

Sur le fond, le litige porte donc sur la qualification des travaux effectués en 2017.

3) a. Selon son art. 1 al. 1, la LDTR a pour but de préserver l'habitat et les conditions de vie existants ainsi que le caractère actuel de l'habitat dans les zones visées à son art. 2. À cet effet, et tout en assurant la protection des locataires et des propriétaires d'appartements, elle prévoit notamment à l'art. 1 al. 2 des restrictions à la démolition, à la transformation et au changement d'affectation des maisons d'habitation (let. a) et l'encouragement à des travaux d'entretien et de rénovation raisonnables et proportionnés des maisons d'habitation (let. b).

b. Selon l'art. 9 al. 1 LDTR, une autorisation est nécessaire pour toute transformation ou rénovation. L'autorisation est accordée notamment lorsque la réalisation d'opérations d'aménagement ou d'assainissement d'intérêt public le commande (let. b) ou pour les travaux de rénovation (let. e), c'est-à-dire la remise en état, même partielle, de tout ou partie d'une maison d'habitation, en améliorant le confort existant sans modifier la distribution des logements (art. 3 al. 1 let. d LDTR).

c. Par transformation, la LDTR entend tous les travaux qui ont pour objet notamment de modifier l'architecture, le volume, l'implantation, la destination, la distribution intérieure de tout ou partie d'une maison d'habitation, la création d'installations nouvelles d'une certaine importance, telles que chauffage, distribution d'eau chaude, ascenseur, salles de bains et cuisines, la rénovation, c'est-à-dire la remise en état, même partielle, de tout ou partie d'une maison d'habitation, en améliorant le confort existant sans modifier la distribution des logements, sous réserve de l'al. 2 ci-dessous (art. 3 al. 1 let. a, c et d). Selon l'art. 3 al. 2 LDTR, par travaux d'entretien, non assujettis à la LDTR, il faut entendre les travaux courants d'entretien faisant partie des frais d'exploitation ordinaires d'une maison d'habitation. Les travaux raisonnables d'entretien régulier ne sont pas considérés comme travaux de transformation, pour autant qu'ils n'engendrent pas une amélioration du confort existant.

d. La distinction entre travaux d'entretien et travaux de transformation peut être délicate à opérer (arrêt du Tribunal fédéral 1C_323/2014 du 10 octobre 2014 consid. 7.1.2). Le raisonnement, admis de manière constante par la chambre administrative, se décline en deux temps : 1) examiner d'abord, si, de par leur nature, les travaux en cause relèvent de l'entretien ou, au contraire, consistent en des travaux de rénovation, la jurisprudence de la chambre administrative précisant, sur ce point, que des travaux d'entretien sont susceptibles d'aboutir à une rénovation ou à une transformation soumise à la LDTR lorsque, n'ayant pas été exécutés périodiquement ou par rotation tout au long de l'existence de l'immeuble, ou encore parce qu'ils n'ont pas été exécutés du tout pendant de nombreuses années, leur accumulation, même en tenant compte d'une exécution rationnelle commandant un regroupement, leur confère une incidence propre à engendrer un changement de standing de l'immeuble (travaux différés) ; et 2) s'attacher ensuite à l'ampleur et, partant, au coût desdits travaux et à leur répercussion sur le montant du loyer dès lors qu'il pourrait en résulter un changement d'affectation qualitatif des logements (ATA/422/2020 du 30 avril 2020 consid. 6 ; ATA/641/2013 du 1er octobre 2013 consid. 8 ; ATA/645/2012 du 25 septembre 2012 consid. 9 et les références citées).

Selon la jurisprudence de l'ancien Tribunal administratif, reprise par la chambre de céans, lorsque les travaux sont déjà soumis à la LDTR uniquement en raison de leur coût important, le fait que ceux-ci n'aient pas eu d'incidence majeure sur les loyers n'est plus déterminant. Dans une telle hypothèse, c'est bien le montant payé par le propriétaire qui importe et non la manière dont il le répercute sur ses locataires. En revanche, lorsque le coût des travaux n'est pas susceptible d'entraîner à lui seul une soumission des travaux à la LDTR, c'est la combinaison de ce montant et de son impact sur les loyers qui est jugée déterminante (ATA/642/2013 du 1er octobre 2013 consid. 6e et les arrêts cités).

e. Selon le Tribunal fédéral, l'art. 3 al. 2 LDTR est compatible avec le droit fédéral dans la mesure où cette disposition complète l'art. 3 al. 1 let. d LDTR en décrivant certains types de travaux qui ne seraient pas soumis à autorisation. Les travaux d'entretien non assujettis à la LDTR sont ceux que le bailleur est tenu d'effectuer au regard de son obligation d'entretien de la chose louée prescrite par le droit du bail. Il s'agit des travaux réguliers et raisonnables qui n'ont pas été différés dans le temps et qui tendent à remédier à l'usure normale de la chose et à maintenir l'ouvrage dans son état en réparant les atteintes dues au temps ou à l'usage. Encore faut-il qu'ils n'engendrent pas un accroissement du confort existant et que leur coût total soit raisonnable (arrêt du Tribunal fédéral 1C_624/2013 du 13 février 2014 consid. 2.5 et les références citées).

4) a. L'installation de nouveaux sanitaires, l'agencement d'une cuisine, la mise en conformité de l'installation électrique, la pose de nouveaux revêtements de sols et de parois, ainsi que des travaux de peinture et de serrurerie relèvent en principe de l'entretien au regard de leur nature (ATA/40/2010 du 26 janvier 2010 et les références). C'est lorsqu'ils sont effectués séparément, et selon les circonstances, que chacun de ces travaux peuvent être qualifiés de travaux d'entretien. Cela ne signifie pas qu'une rénovation comprenant l'ensemble des travaux devra nécessairement elle aussi être considérée comme étant limitée à des travaux d'entretien (arrêt du Tribunal fédéral 1C_405/2015 du 6 avril 2016 consid. 4.3).

b. Il convient toutefois de tenir compte également des circonstances dans lesquelles les travaux sont accomplis, et notamment de leur accumulation en raison d'un défaut d'entretien courant des bâtiments concernés (ATA/646/2010 précité et les références). Ainsi, le propriétaire d'un appartement a tout intérêt à entretenir régulièrement son immeuble et, pour le prouver en cas de litige, à conserver les factures desdits travaux (Emmanuelle GAIDE et Valérie DEFAGO GAUDIN, La LDTR : démolition, transformation, changement d'affectation et aliénation. Immeubles de logement et appartements, 2014, p. 195 s.). Des travaux isolés, effectués depuis longtemps, ne démontrent pas la régularité de l'entretien. Par exemple, la seule réfection des peintures effectuée plus de vingt ans avant les travaux litigieux ne suffit pas pour considérer que l'appartement est régulièrement entretenu (ATA/370/2005 du 24 mai 2005 consid. 3b.).

c. Même s'il s'agit de travaux d'entretien différés dans le temps, il faut tenir compte, selon la pratique cantonale, des critères de l'ampleur des travaux et de la répercussion des coûts sur les loyers. Dans les cas où les travaux ont déjà été effectués et les loyers modifiés à l'issue des travaux, il n'est pas arbitraire de tenir compte de la manière dont le bailleur a effectivement répercuté les frais engagés sur le locataire. Lorsqu'une importante hausse de loyer suit les travaux, le bailleur peut difficilement prétendre n'avoir effectué que des travaux d'entretien courant, qu'il n'est en principe pas autorisé à faire supporter au locataire (art. 259a al. 1 let. a, 259b let. b et 269a let. b CO). En définitive, il n'est en principe pas arbitraire de retenir que ces différents critères, cumulés, démontrent que les travaux litigieux vont au-delà de travaux d'entretien courant n'apportant aucune amélioration du confort (arrêt du Tribunal fédéral 1C_405/2015 précité consid. 4.3).

d. Le Tribunal fédéral a considéré que, pour des travaux d'une certaine ampleur, dont il peut être présumé, de façon réfragable, qu'ils procurent un accroissement du confort, et à la suite desquels le loyer a presque été doublé, il n'est pas arbitraire de considérer qu'ils dépassent les simples travaux d'entretien, la recourante n'ayant de plus apporté aucun élément permettant de justifier différemment la hausse des loyers, en particulier par une adaptation à la situation sur le marché locatif. De même, elle n'avait pas démontré que les travaux litigieux se limitaient à l'entretien imposé par le droit fédéral. Ces derniers ayant une incidence sérieuse sur la catégorie du logement en cause, il était dénué d'arbitraire de les soumettre au champ d'application de la LDTR (arrêt du Tribunal fédéral 1C_405/2015 précité consid. 4.3).

e. La chambre administrative a confirmé que des travaux ayant pour but la remise à neuf d'un appartement à l'occasion d'un changement de locataire par le rafraîchissement des peintures (plafonds, murs, boiseries et radiateurs de toutes les pièces), la réfection de l'ensemble des installations sanitaires (remplacement de la baignoire, du mélangeur de lavabo, de l'évier, de la robinetterie et des divers accessoires), l'installation d'un nouvel agencement de cuisine, le remplacement du carrelage et des faïences, l'installation d'un nouveau système électrique, le ponçage et la vitrification différés des parquets et la pose de vannes thermostatiques, devaient être assimilés à des travaux de rénovation, constat confirmé par le coût des travaux, soit CHF 26'240.- pour un trois pièces, et de leur impact sur le loyer, qui avait augmenté de 54 % suite à ces derniers (ATA/440/2015 du 12 mai 2015 consid. 10).

f. De même, elle a retenu que les travaux comprenant la réfection complète des peintures, papiers peints et parquets, avec la pose de radiateurs, l'installation d'un agencement de cuisine et de nouveaux sanitaires et la mise en conformité des installations électriques devaient faire l'objet d'une autorisation au sens de la LDTR (ATA/645/2012 précité consid. 11 ; cf. également ATA/328/2013 du 28 mai 2013 consid. 7, confirmé par l'arrêt du Tribunal fédéral 1C_624/2013 précité). Les travaux ne constituaient pas du pur entretien quand bien même ils s'élevaient à CHF 8'750.-/la pièce/l'an, ce qui se situait dans la fourchette inférieure généralement retenue pour qualifier les travaux de grande ampleur (ATA/334/2014 du 13 mai 2014, confirmé par l'arrêt du Tribunal fédéral 1C_323/2014 du 10 octobre 2014).

g. Elle a, en revanche, considéré que n'étaient pas soumis à la LDTR des travaux d'entretien différés ou non dans le temps, dont le coût par pièce était inférieur à CHF 10'000.- (ATA/642/2013 précité ; ATA/40/2010 précité ; ATA/96/2007 du 6 mars 2007 ; Emmanuelle GAIDE et Valérie DEFAGO GAUDIN, op. cit., p. 193 s.). Elle a toutefois précisé, en rapport avec l'argument du coût des travaux par pièce, qu'il ne lui appartenait pas de dicter au département de ne pas requérir de demande d'autorisation de construire pour des travaux de moins de CHF 10'000.- par pièce (ATA/694/2016 du 23 août 2016 consid. 6d ; ATA/574/2014 du 29 juillet 2014 ; ATA/334/2014 précité consid. 14).

h. La chambre de céans a, dans un arrêt récent, eu à se poser la question de la soumission à la LDTR de travaux effectués avant l'arrivée de nouveaux locataires au début de l'année 2014 dans un appartement au plateau de Champel, de cinq pièces, au loyer annuel ayant été augmenté de CHF 37'440.- à CHF 48'000.-, à savoir : des travaux de parquets d'un montant de CHF 4'590.95 (réparation à plusieurs endroits - usure, ponçage et vitrification, ponçage fin, une couche de fond et deux couches de vernis, chambre et salon, poncés et imprégnés des seuils en bois, réparation suite dégât d'eau, reprise du parquet), de travaux de peinture d'un montant de CHFF 20'235.- réalisés dans le hall (plafond, murs, plinthes), dans la chambre de droite 1 (plafond, corniches, murs, boiseries, plinthes de 30 cm, cadres et portes deux faces, cadres et fenêtre, 2 x armoires, radiateur et tuyaux) salon (plafond, corniches, murs, boiseries, cadres et portes deux faces, cadres et fenêtre, radiateur et tuyaux, plinthes de 30 cm), chambre 2 (plafond, boiseries, cadres et portes deux faces, cadres et fenêtre, radiateur et tuyaux, plinthes de 30 cm, armoire deux portes intérieure et extérieure complet), chambre 3 (plafond, corniches, murs, boiseries cadres et portes deux faces, cadres et fenêtre, radiateur et tuyaux, plinthes de 30 cm,) cuisine (plafond et murs, boiseries, cadres et portes deux faces, cadres et fenêtre, 2 x armoires, radiateur et tuyaux), reprise de la peinture de deux volets, peinture de la barrière garde-corps, de travaux sanitaires se chiffrant à CHF 1'357.20 concernant, dans la cuisine, la pose et le raccordement de la batterie d'évier, de la bonde et du siphon ainsi que du bouchonnage de la conduite du lave-vaisselle et, dans la salle de bains, la pose d'un meuble lavabo avec raccordement du siphon et de la robinetterie, et enfin, dans la cuisine, l'évacuation de la cuisine existante, fourniture et pose d'un nouvel agencement, selon plans fournis, plan de travail en granit, pose d'appareils électroménagers, soit cuisinière, four encastré et vitrocéramique, hotte intégrée, évier pour le montant de CHF 11'968.- auquel s'ajoutaient CHF 3'030.-, concernant des travaux de carrelage dans la cuisine, soit un total de CHF 39'981.15. Elle a dans le cas particulier relevé que le rapport de visite du 11 octobre 2017, rédigé par le département, n'établissait pas que des améliorations auraient été apportées au confort de l'appartement. L'OCLPF, instance de préavis spécialisée, avait de son côté considéré que les travaux en question relevaient de l'entretien et que leur coût (CHF 8'259.- la pièce) n'aurait aucune incidence sur les loyers, ce qui correspondait aux montants considérés par la jurisprudence comme une indication de leur nature de travaux relevant de l'entretien courant. Le nouvel agencement de la cuisine avait sans doute apporté une amélioration dans le sens d'une remise au goût du jour, renforcée par le changement du carrelage et des faïences entre-meubles nécessité selon le formulaire du département par « le plan de travail [...] fixé derrière la faïence ». Toutefois, les photographies du dossier révélaient que l'ancienne cuisine était d'un standard équivalent au moment de son installation.

Il restait néanmoins qu'une partie des travaux, représentant un montant global de CHF 24'943.80, aurait été initiée suite à un dégât d'eau en août 2013. Il n'était toutefois pas possible, sur la base des seuls devis et factures versés à la procédure, de retenir que l'intégralité des travaux concernés était bien en lien de causalité avec ledit sinistre. Autrement dit, si une assurance avait couvert l'intégralité ou la majeure partie des travaux en cause, il pourrait en être déduit qu'ils étaient bien la conséquence du sinistre, ce qui n'était en l'état nullement démontré. Dans le cas contraire, l'appréciation pourrait être différente et les travaux en cause qualifiés, en tout ou partie, de travaux différés (ATA/1348/2020 du 22 décembre 2020).

i. Le département peut recourir au critère du coût par pièce des travaux, mais doit le relativiser. En réalité, pour déterminer la qualification de travaux entrepris dans des logements situés dans des bâtiments visés à l'art. 2 LDTR et, partant, la nécessité de demander une autorisation de les effectuer au département, il convient de prendre en compte la situation dans son ensemble et d'appliquer à celle-ci les différents critères abordés précédemment : la nature des travaux, leur ampleur dans leur ensemble, le moment auquel ils interviennent, leur répercussion sur le loyer précédent ou futur et sa conformité aux besoins prépondérants de la population, sans que les travaux entrepris ne conduisent à un changement d'affectation qualitatif du logement, ainsi que leur rapport avec la valeur de l'immeuble de manière proportionnelle, tout en évaluant dans quelle mesure les travaux effectués permettent raisonnablement et de manière ordinaire de conserver la chose en bon état (ATA/694/2016 précité consid. 6d).

5) L'approche de la chambre de céans, rappelée plus haut, pour déterminer s'il s'agit en l'espèce de travaux de rénovation soumis à autorisation (art. 3 al. 1 LDTR) ou de travaux d'entretien non assujettis à la LDTR (art. 3 al. 2 LDTR), implique en particulier d'identifier leur nature, leur ampleur, leur coût et leur impact éventuel sur le loyer.

Les locataires ayant occupé l'appartement précédemment aux travaux entrepris en juin 2017 s'acquittaient du même loyer annuel depuis leur entrée dans les locaux en février 2003, soit CHF 19'200.-. Le loyer a donc été augmenté de 75 % pour être fixé à CHF 33'600.- lors de la prise à bail par de nouveaux locataires en juin 2017 et ce, jusqu'au 15 septembre 2019. La bailleresse, aux termes de l'avis de fixation initial, l'a motivé par les loyers usuels du quartier.

Avant l'emménagement des locataires en été 2017, selon factures et devis produits, des travaux de pose de carrelage, en complément de carreaux/faïences abîmés entre-meubles, de même que la pose d'un nouveau sol sur un carrelage existant dans les WC et à la salle de bains, la pose d'une coque acrylique sur une baignoire et la peinture des murs et plafonds de toutes les pièces permettant un rafraîchissement de l'appartement ont été effectués, travaux qui ne correspondent pas dans leur intégralité à des travaux couramment réalisés lors d'un changement de locataire, en particulier la pose des carrelages. Cela vaut également pour les travaux réalisés en sus dans la cuisine, s'agissant de la peinture des armoires et du plan de travail, et le remplacement de l'électroménager. Ledit remplacement a sans doute apporté une amélioration dans le sens d'une remise au goût du jour, quand bien même les photographies du dossier révèlent que l'ancienne cuisine était d'un standard équivalent avant ces interventions.

Le coût global de ces travaux s'est élevé, selon les pièces produites et ce qui n'est pas remis en cause par les parties, à CHF 27'340.95, soit CHF 6'835.25 la pièce, ce qui est inférieur au montant retenu par la jurisprudence pour qualifier les travaux de grande ampleur (arrêt du Tribunal fédéral 1C_323/2014 du 10 octobre 2014) et au cas récemment tranché par la chambre de céans dans l'ATA/1348/2020 susmentionné.

Néanmoins, le montant mensuel du loyer a été porté à CHF 2'800.- (soit CHF 33'600.-) après les travaux réalisés en 2017, ce qui est élevé par rapport au loyer avant travaux de CHF 19'200.-. Quand bien même l'appartement en question est situé dans le périmètre protégé de la Vieille-Ville et d'une vaste surface totale, soit près de 90 m2, sensiblement supérieure à la surface moyenne pour un quatre pièces, un tel loyer est plus élevé que la moyenne des loyers dans un immeuble semblable, arrêté à CHF 2'038.- (soit CHF 24'456.- par an) selon les statistiques genevoises pour 2017. Son augmentation de 75 % ne peut ainsi se justifier par la seule référence aux loyers du quartier, lesquels dépendent au demeurant notamment de l'état et du confort de l'objet, ni par le fait qu'il ait été inchangé depuis quatorze ans, ou encore qu'il fût préalablement aux travaux de 2017 supérieur au loyer correspond aux besoins prépondérants de la population.

Quand bien même certains travaux prévus dans le cadre de l'autorisation de construire litigieuse portent sur des éléments ayant fait l'objet de travaux en 2017 - par exemple la réfection du sol de la salle de bains et des WC - ceci ne démontre nullement qu'il n'y aurait pas eu de volonté d'échelonner les travaux de rénovation dans le temps et que les travaux de 2017 doivent être qualifiés de pur entretien.

L'intimée ne remet pas en cause le fait qu'elle n'a pas entrepris de travaux d'entretien entre l'entrée des locataires en 2003 et leur sortie en juin 2017, soit pendant quatorze ans, autres qu'en février 2010 le remplacement de la hotte, en juin 2013 la réfection de la peinture des WC et de la salle de bains et en décembre 2014 le remplacement des vannes de radiateurs, ce qui correspond à des travaux d'entretien. Pour cette raison encore, les travaux effectués en 2017 doivent être qualifiés de différés et étaient soumis à autorisation LDTR.

6) Compte tenu de cette conclusion, reste à savoir si la succession de deux périodes de contrôle du loyer de trois ans, soit six ans au total, telle que découlant de l'autorisation querellée du 17 janvier 2020, est conforme à la LDTR et au principe de la garantie de la propriété.

a. Lorsqu'il accorde une autorisation en cas de démolition ou de transformation d'un immeuble soumis à la LDTR, le département fixe, comme condition de l'autorisation, le montant maximum des loyers des logements après travaux (art. 10 1ère phr. LDTR). Les exceptions (art. 10 al. 2 LDTR), le mode de calcul (art. 11 LDTR), la durée du contrôle (art. 12 LDTR) notamment sont définis par la loi et le règlement d'application de la loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation du 29 avril 1996 (RDTR - L 5 20.01).

b. Selon l'art. 12 LDTR, les loyers et les prix de vente maximaux ainsi fixés sont soumis au contrôle de l'État, pendant une période de cinq à dix ans pour les constructions nouvelles et pendant une période de trois ans pour les immeubles transformés ou rénovés, durée qui peut être portée à cinq ans en cas de transformation lourde.

c. En l'espèce, l'intimée aura en fin de compte procédé à trois ans d'intervalle à deux rénovations de l'appartement litigieux soumises à la LDTR et partant au contrôle étatique des loyers. Ce choix de ne pas avoir d'emblée entrepris l'ensemble des travaux, étant relevé qu'elle admet elle-même qu'une partie des travaux menés en 2017 sera mise à néant en 2021 - réfection du carrelage de la salle de bains et des WC - ne saurait justifier que le département renonce au contrôle des loyers dans la période succédant à ces deux phases distinctes de rénovation. Le département n'a ainsi pas abusé de son pouvoir d'appréciation en considérant que les travaux de 2017 justifiaient un tel contrôle pour trois ans, ce qui sera le cas pour la même durée pour les travaux à venir devisés à CHF 94'700.-.

Force est de constater que l'atteinte à la garantie de la propriété de l'intimée se fonde sur une base légale, répond à un intérêt public prépondérant et s'avère proportionnée. Le Tribunal fédéral a déjà eu l'occasion de considérer que l'intérêt public poursuivi par la LDTR, qui tend à préserver l'habitat et les conditions de vie existants, en restreignant notamment le changement d'affectation des maisons d'habitation (art. 1 al. 1 et 2 let. a LDTR), procède d'un intérêt public important (ATF 128 I 206 consid. 5.2.4 ; 113 Ia 126 consid. 7a ; 111 Ia 23 consid. 3a et les arrêts cités). Par ailleurs, la réglementation mise en place par la LDTR est en soi conforme au droit fédéral et à la garantie de la propriété, y compris dans la mesure où elle prévoit un contrôle des loyers après transformations (ATF 116 Ia 401 consid. 9 p. 414 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_617/2012 du 3 mai 2013 consid. 2.3).

7) Compte tenu de tous ces éléments, c'est à tort que le TAPI a annulé la décision d'autorisation de construire du 17 janvier 2020 en tant, à son chiffre 6, qu'elle entérinait le préavis de l'OCLPF du 10 janvier 2020 limitant le loyer annuel à CHF 5'148.- la pièce, du 1er juillet 2017 pour une durée de trois ans, puis pour une même durée à compter de la remise en location de l'appartement des suites des travaux autorisés.

La conclusion tendant à la levée partielle de l'effet suspensif, sur la question de la réalisation des travaux, est sans objet vu le présent prononcé.

Fondé, le recours du département sera admis.

8) Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 1'500.- sera mis à la charge de l'intimée (art. 87 al. 1 LPA) et il ne sera pas alloué d'indemnité (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 18 novembre 2020 par le département du territoire-oac contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 6 octobre 2020 ;

au fond :

l'admet ;

annule le jugement du Tribunal administratif de première instance du 6 octobre 2020 ;

restaure la décision d'autorisation de construire APA 305'436 du 17 janvier 2020, comprenant au chiffre 6 que les conditions contenues dans les préavis du service des monuments et des sites du 6 septembre 2019, de la police du feu du 27 août 2019 et de l'OCLPF du 10 janvier 2020 doivent être strictement respectées et font partie intégrante de l'autorisation ;

met un émolument de CHF 1'500.- à la charge de la Fondation immobilière patrimoine ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt au département du territoire-OAC, à Me Lucien Lazzarotto, avocat de la Fondation immobilière patrimoine, ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mme Krauskopf, M. Verniory, Mme Lauber, M. Mascotto, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

F. Cichocki

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot-Zen Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :