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Décisions | Chambre civile

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C/28124/2018

ACJC/1436/2022 du 03.11.2022 sur OTPI/350/2022 ( SDF ) , MODIFIE

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/28124/2018 ACJC/1436/2022

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du JEUDI 3 NOVEMBRE 2022

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______[GE], appelant d'une ordonnance rendue par la 19ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 7 juin 2022, comparant par Me José CORET, avocat, avenue de la Gare 1, case postale 986, 1001 Lausanne, en l'Étude duquel il fait élection de domicile,

et

Madame B______, domiciliée ______[GE], intimée, comparant par Me Olivier PECLARD, avocat, Fontanet & Associés, Grand-Rue 25, case postale 3200, 1211 Genève 3, en l'Étude duquel elle fait élection de domicile.

 


EN FAIT

A. Par ordonnance OTPI/350/2022 du 7 juin 2022, le Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal), statuant sur mesures provisionnelles, a condamné A______ à verser en mains de B______, par mois et d'avance, 5'700 fr. avec effet à compter du 21 octobre 2021 (chiffre 1 du dispositif), dit que la décision sur les frais des mesures provisionnelles était renvoyée à la décision finale (ch. 2) et a débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 3).

B. a. Par acte expédié à la Cour de justice le 20 juin 2022, A______ forme appel contre cette ordonnance, qu'il a reçue le 8 juin 2022, concluant à son annulation et, cela fait, à ce que le domicile conjugal sis 1______ lui soit attribué, un délai de 30 jours devant être imparti à B______ pour quitter ledit domicile, sous la menace de la peine d'amende prévue à l'art. 292 CP et à ce qu'il soit dit que dès le 1er octobre 2021 il n'est plus tenu de contribuer à l'entretien de B______, le tout sous suite de frais et dépens.

Il a produit une pièce nouvelle, soit un procès-verbal de séquestre ordonné le
6 mai 2022 (pièce 100).

Le 1er juillet 2022, il a produit deux nouvelles pièces (101 et 102), soit la page 3 du procès-verbal de séquestre actualisée, selon courrier de l'Office cantonal des poursuites du 21 juin 2022, et un procès-verbal de séquestre daté également du 21 juin 2022.

b. Par réponse du 7 juillet 2022, B______ a conclu au déboutement de A______ de toutes ses conclusions. Elle a conclu préalablement à ce qu'il soit ordonné à ce dernier ou à tout tiers de produire tout document en lien avec l'achat d'une maison en Guinée par celui-ci et son déménagement dans ce pays, ainsi que tout document permettant d'apprécier sa situation financière.

Elle a produit une pièce nouvelle, soit un courrier adressé à son conseil le 7 juillet 2022 (pièce 57).

Le 15 juillet 2022, elle a produit une autre pièce nouvelle, soit la copie d'un message de A______ à leur fils O______.

c. Par courrier du 20 juillet 2022 à la Cour, A______ a contesté les allégués contenus dans le courrier précité.

d. Les parties ont été informées par courrier du greffe de la Cour du 15 août 2022 de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits suivants ressortent du dossier.

a. B______, née ______[nom de jeune fille] le ______ 1971 à C______ (Haïti), originaire de D______ et E______ (VD), F______ (BE) et G______ (GE), et A______, né le ______ 1946 à Genève, originaire de G______ (GE) et E______ (VD), se sont connus en 1997. Ils ont fait ménage commun dès 2000 et ont contracté mariage le ______ 2008 à H______ (GE).

Les époux ont choisi de se soumettre au régime de la séparation de biens par contrat de mariage du ______ 2008.

Un enfant est issu de cette union, O______, né le ______ 2002 à Genève, avant le mariage des parties.

B______ est également la mère de N______, né le ______ 1995 d'une précédente union.

A______ est également le père de deux enfants majeurs nés d'une union précédente : I______, née le ______ 1977 et J______, né le ______ 1984.

b. Le 23 janvier 2012, A______ a déposé une requête de mesures protectrices de l’union conjugale. Dans ce cadre, par jugement JTPI/6952/2013 du 16 mai 2013, le Tribunal a autorisé les époux à vivre séparés, a attribué à B______ la jouissance exclusive du domicile conjugal sis 1______[GE], a condamné A______ à verser en mains de B______, par mois et d'avance, allocations familiales non comprises, à titre de contribution à l'entretien de la famille, 20'000 fr., à compter de l'entrée en force du jugement, à charge pour B______ de s'acquitter des charges et des frais d'entretien liés à la villa conjugale sise 1______ à K______[GE].

Dans la mesure où B______ s'était vue confier la garde sur l'enfant commun du couple, la jouissance exclusive du domicile conjugal devait lui être attribuée, afin de maintenir l'enfant dans le cadre de vie qui avait été le sien pendant la vie commune. A______ avait pour sa part la possibilité d’emménager à bref délai dans l’appartement dont il était propriétaire au 2______ à K______[GE].

Au vu du train de vie des époux et des revenus de A______, le Tribunal a renoncé à appliquer la méthode du minimum vital et s'est fondé sur les dépenses effectives des parties. A cet égard, il a notamment retenu pour B______ des frais mensuels de véhicules (voiture et scooter) de 492 fr. au total, et des frais pour un appartement en Italie de 330 fr. par mois. Ces points n'ont pas fait l'objet de contestation.

Il a par ailleurs retenu qu'aucun revenu hypothétique ne pouvait être imputé à B______ au stade des mesures protectrices, celle-ci étant sans formation, ni expérience professionnelle à faire valoir et compte tenu de sa situation familiale (deux enfants mineurs à charge). Il convenait cependant que celle-ci entreprenne sans tarder les démarches nécessaires visant à compléter sa formation, afin de pouvoir se réinsérer dès que possible dans la vie active.

Le montant mensuel de la contribution d'entretien a été ramené à 15'000 fr, par arrêt de la Cour ACJC/1334/2013 du 8 novembre 2013, à compter du prononcé de l'arrêt, B______ devant s'acquitter des frais liés à la villa susmentionnée.

La Cour a jugé que l'intimée, âgée de 42 ans, sans formation et sans emploi depuis 1997, présentait un handicap certain sur le marché du travail. Même si aucun problème de santé n'avait été allégué, il n'en demeurait pas moins qu'il serait extrêmement difficile pour B______ de trouver concrètement un emploi, étant précisé qu'elle devait refaire des cours afin de se présenter à l'examen de L______ - auquel elle avait déjà échoué une première fois - et pouvoir ainsi espérer trouver un poste d'auxiliaire de santé.

La contribution a finalement été fixée à 16'350 fr. dès le 1er mai 2014 par arrêt du Tribunal fédéral du 27 mars 2014 (5A_951/2013).

Le Tribunal fédéral a retenu que B______ supportait des charges de 13'555 fr. pour elle-même et 2'796 fr. pour les enfants N______ et O______, soit 16'352 fr. au total.

A______ était administrateur et actionnaire de cinq sociétés. Il était propriétaire de plusieurs biens immobiliers, soit la villa conjugale, un immeuble dans lequel se trouvaient les locaux de deux de ses sociétés, un appartement en France dans lequel résidait sa première épouse, un autre appartement à K______ et une résidence secondaire à M______ (VD). Son revenu mensuel de 75'500 fr. était composé de son salaire, de sa rente AVS, du revenu locatif de ses immeubles et des dividendes de ses sociétés. Sa fortune était estimée à 13'617'172 fr. en 2011. Ses charges de 43'171 fr. par mois (comprenant les frais de son futur domicile à K______ dans lequel il devait déménager [2'984 fr.], ses charges mensuelles fixes [11'270 fr.], la contribution versée à son ex-épouse [16'000 fr.], les impôts [11'250 fr.] et les frais de vacances avec l'enfant commun [1'667 fr.]) lui laissaient un solde disponible de 32'328 fr.

Il incombait à l'époux de supporter les charges de l'épouse et des enfants mineurs vivant avec celle-ci, de sorte que la contribution a été fixée à 16'350 fr. par mois.

c. Par jugement du 10 juin 2016, confirmé par la Cour de Justice le 7 octobre 2016, le Tribunal a rejeté la requête de nouvelles mesures protectrices de l'union conjugale formée par A______. Le fait nouveau alors invoqué par A______ était l'accession à la majorité de N______ et son entrée à l'université.

d. Par acte déposé au greffe du Tribunal le 3 décembre 2018, A______ a formé une requête unilatérale non motivée en divorce. Il a notamment conclu, en dernier lieu, à ce que le Tribunal dise qu'aucune contribution d'entretien post-divorce n'était due en faveur de B______ et lui attribue le domicile conjugal, un délai de 30 jours devant être imparti à B______ pour quitter ledit domicile sous la menace de la peine d'amende prévue à l'article 292 CP.

B______ a notamment conclu en dernier lieu à ce que le Tribunal condamne A______ à lui verser, par mois et d'avance, 10'000 fr. à titre de contribution d'entretien dans l'hypothèse où le domicile conjugal lui serait attribué, et s'est ainsi opposée à l'attribution du domicile conjugal à A______.

Par courrier du 27 août 2021, O______ a indiqué au Tribunal ne plus vouloir être représenté par sa mère dans le divorce de ses parents et a confirmé s'être mis d'accord avec son père concernant sa pension.

e. Le 27 octobre 2021, A______ a formé une requête sur mesures provisionnelles et a conclu à ce que le Tribunal lui attribue le domicile conjugal, un délai de 30 jours étant fixé à B______ pour quitter ledit domicile conjugal sous la menace de la peine d'amende prévue à l'article 292 CP, et dise que dès le 1er octobre 2021, il n'était plus tenu de contribuer à l'entretien de B______.

Il a fait valoir que les charges mensuelles de l'intimée totalisaient 5'167 fr. 50, composées du minimum vital OP (1'200 fr.), de frais de domicile de 2'000 fr., de primes Lamal et LCA en 475 fr. 50, de frais de voiture et de scooter de 450 fr. et
42 fr., et d'impôts de 1'000 fr. Le revenu hypothétique à imputer à l'intimée devait lui permettre de couvrir ses charges.

Les 16 novembre et 1er décembre 2021, A______ a déposé des novas, expliquant d'une part que O______ vivait depuis le mois d'août 2021 chez lui, qu'ils avaient conclu une convention aux termes de laquelle il s'était engagé à lui verser une contribution de 1'324 fr. par mois aussi longtemps que les conditions de l'article 277 al. 2 CC seraient remplies, d'autre part qu'en raison de ses importantes dettes à l'égard de l'administration fiscale et des mesures d'assainissement prises pour éviter la faillite de la société P______ SA, il avait été contraint de vendre ses immeubles sis à la 3______[GE] dont il tirait précédemment d'importants revenus locatifs et qu'il en résultait que ses revenus avaient drastiquement baissé.

f. B______ a conclu sur mesures provisionnelles à ce que le Tribunal modifie le chiffre 3 du dispositif de l'arrêt du Tribunal fédéral du 27 mars 2014, en tant qu'il condamnait A______ à lui verser, par mois et d'avance, allocations familiales non comprises, 16'350 fr., cela fait, condamne celui-ci à lui verser, par mois et d'avance, 14'123 fr. 65 [recte 13'553 fr. 65] à titre de contribution à son entretien dès le 25 octobre 2021, correspondant à la contribution d'entretien telle que fixée par le Tribunal fédéral dans son arrêt du 27 mars 2014, sous déduction des montants arrêtés pour l'entretien des enfants N______ et O______.

Elle a soutenu que A______ n'alléguait pas l'intégralité des éléments composant sa fortune et ses revenus, de sorte qu'il se justifiait d'évaluer ses revenus mensuels réels à 50'000 fr.

g. Les parties ont été informées par courrier du Tribunal du 1er mars 2022 de ce que la cause était gardée à juger sur mesures provisionnelles.

h. Par ordonnances des 14 novembre 2019 (confirmée par la Cour), 6 décembre 2021 et 25 janvier 2022, le Tribunal a ordonné la production de pièces par A______ en particulier, à laquelle il n'a été donné que partiellement suite.

D. La situation financière des parties est la suivante.

a.

a.a Le Tribunal a retenu que A______ était actif dans diverses sociétés, soit P______ SA, Q______ SA, R______ SA, S______ SA, T______ SARL, et U______ SA. A teneur de sa déclaration fiscale 2020, il disposait de participations de 100'000 fr. dans la société R______ SA, 526'000 fr. dans la société U______ SA et 2'000'000 fr. dans la société P______ SA.

Le 15 octobre 2021, A______ avait vendu les deux immeubles dont il était propriétaire à la 3______ et qui lui procuraient un important revenu locatif. La vente des immeubles, après remboursement des dettes hypothécaires, des diverses dettes fiscales de 517'000 fr. ainsi que des dettes en faveur de B______ à hauteur de 240'000 fr., laissait apparaître un solde de 749'632 fr., auquel s'ajoutaient 200'000 fr. qui lui seraient versés une fois remplies ses obligations quant à la libération des locaux.

Par jugement du 17 novembre 2021, le Tribunal avait constaté le surendettement de la société P______ SA au 31 décembre 2020. La société avait été mise en faillite fin janvier 2022.

a.b L'appelant soutient que la faillite de P______ ne lui permet plus de maintenir son train de vie. Il ne perçoit plus de revenus de cette société et doit rembourser les prêts consentis par celle-ci. Sa fortune n'est composée que de la villa conjugale à K______, dans laquelle vit l'intimée, de l'appartement de K______ dans lequel il vit et du chalet de M______ qui ne génère aucun revenu. De plus, les immeubles de K______ font l'objet de séquestres. Ses seuls revenus sont sa rente de 2ème pilier de 1'755 fr. et celle de son AVS de 2'370 fr.

b.

b.a Le Tribunal a retenu que B______ avait cessé de travailler en 1997 à la suite de sa rencontre avec A______. Elle était propriétaire d'un appartement à W______ (Italie) estimé à 350'000 fr. Elle avait vendu un immeuble à V______ (VD), qui lui avait été donné, au prix de 512'550 fr. le 4 octobre 2010. Elle avait en outre perçu un héritage de sa mère de 440'917 fr. en 2017. Elle s'était fait rembourser sur son compte la valeur de rachat de l'assurance-vie contractée en faveur de son fils N______ auprès de la X______, soit un total de 52'830 fr.

Elle alléguait avoir accumulé des dettes et dépensé pratiquement l'intégralité de sa fortune pour son entretien, A______ ne s'acquittant pas de la contribution en sa faveur et restant lui devoir 168'622 fr. au titre d'arriérés de contributions d'entretien pour les années 2014 à 2019.

Le minimum vital élargi de l'intimée a été arrêté et arrondi à 5'680 fr. Il se compose de son montant de base OP (1'200 fr.), de son assurance-maladie (751 fr.), des frais médicaux non couverts (200 fr.), des frais de téléphone et internet limités à 100 fr., de la redevance radio/TV (24 fr. arrondis), des frais SIG (435 fr.), des frais d'assurance Y______ (186 fr.), de sa charge fiscale estimée à 600 fr., des charges afférentes à la maison (540 fr.), des frais de véhicules (1'198 fr.) et des frais courant d'entretien de son appartement à W______ (440 fr.).

b.b L'appelant reproche au Tribunal d'avoir retenu des frais de véhicules et les coûts d'entretien de l'appartement de W______. Le montant de la charge fiscale devrait être de 400 fr., si la contribution était limitée au montant de 4'042 fr. (soit diminuée des frais et coûts précités). Il soutient qu'un revenu hypothétique, d'un montant au moins équivalent à ses charges devrait être imputé à l'intimée, laquelle n'avait rien entrepris en ce sens malgré ce qui figurait en ce sens dans le jugement sur mesures protectrices.

c. Il ressort encore du dossier qu'en janvier 2022, des actes de défaut de biens pour un montant de 69'000 fr. avaient été délivrés à l'encontre B______.

L'intimée soutient que l'appelant est sur le point d'aller s'installer et vivre en Guinée, où il aurait acquis une maison.

La villa conjugale sise à K______, évaluée fiscalement à 3'100'000 fr., a été mise en vente au prix de 6'200'000 fr. L'appelant soutient qu'elle doit lui être attribuée, afin qu'il la vende, ce qui lui permettrait d'éponger ses dettes envers sa société faillie.

L'intimée fait valoir qu'au vu des poursuites dont elle fait l'objet et en l'absence de revenus, il lui serait impossible de trouver un logement si l'ancien domicile conjugal devait être attribué à l'appelant.

D. Dans la décision entreprise, le Tribunal a considéré qu'aucun élément ne justifiait qu'il soit statué sur mesures provisionnelles sur l'attribution du domicile conjugal.

S'agissant de la contribution due à l'intimée, il a d'abord retenu que la situation financière de A______ s'était modifiée de manière importante et durable du fait que la société P______ SA, qui lui rapportait un revenu important, avait fait faillite et que le précité avait vendu ses immeubles de rente. Il se justifiait dès lors d'entrer en matière s'agissant du montant de la contribution d'entretien.

Les pièces ne permettaient pas de déterminer clairement le revenu et la fortune exacts de A______, notamment les revenus que lui procuraient ses autres sociétés et il n'exposait pas ce qu'il était advenu de l'important bénéfice qu'il avait retiré de la vente de ses immeubles. Le précité disposait apparemment d'une fortune et de revenus lui permettant de maintenir son train de vie et de subvenir aux besoins de son fils. Il ne démontrait pas ne pas être en mesure de continuer à contribuer à l'entretien de B______, à tout le moins de couvrir les charges de cette dernière. En revanche, tout excédent supplémentaire de celle-ci devrait être financé au moyen de sa propre fortune. Elle ne saurait en effet exiger de A______ qu'il puise dans sa fortune, sans qu'elle-même entame sa propre fortune, notamment en vendant son propre appartement à W______.

Le Tribunal a ainsi condamné A______ à verser à B______, par mois et d'avance, allocations familiales non comprises, 5'700 fr. à compter du 27 octobre 2021, date du dépôt de la requête de mesures provisionnelles, dans la mesure où le précité avait vu ses revenus se modifier de manière importante à cette date, suite à la faillite de la société et la vente de ses immeubles.

EN DROIT

1. 1.1 L’appel est recevable contre les décisions de première instance sur les mesures provisionnelles (art. 308 al. 1 let. b CPC) dans les causes non patrimoniales ou dont la valeur litigieuse, au dernier état des conclusions de première instance, est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC).

L'appel, écrit et motivé, est introduit auprès de l'instance d'appel dans les 10 jours à compter de la notification de la décision motivée (art. 248 let. d, 271 let. a, 276 al. 1, 311 al. 1 et 314 al. 1 CPC).

Conformément à cette disposition, la Cour revoit uniquement les points du jugement que l'appelant estime entachés d'erreurs et qui ont fait l'objet d'une motivation suffisante - et, partant, recevable -, pour violation du droit (art. 310
let. a CPC) ou pour constatation inexacte des faits (art. 310 let. b CPC). Hormis les cas de vices manifestes, elle doit en principe se limiter à statuer sur les critiques formulées dans la motivation écrite contre la décision de première instance (ATF
142 III 413 consid. 2.2.4; arrêt du Tribunal fédéral 5A_111/2016 du 6 septembre 2016 consid. 5.3; ACJC/1494/2018 du 30 octobre 2018 consid. 2).

Pour satisfaire à cette exigence de motivation, il ne suffit pas à l'appelant de renvoyer aux moyens soulevés en première instance, ni de se livrer à des critiques toutes générales de la décision attaquée. Sa motivation doit être suffisamment explicite pour que l'instance d'appel puisse la comprendre aisément, ce qui suppose une désignation précise des passages de la décision qu'il attaque et des pièces du dossier sur lesquelles repose sa critique (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1).

1.2 Interjeté dans le délai et selon la forme prescrits par la loi dans un litige qui porte notamment sur la réglementation des relations personnelles, soit de nature non pécuniaire, l'appel est recevable, sous réserve de ce qui suit.

1.3 Les mesures provisionnelles sont soumises à la procédure sommaire au sens propre (art. 248 let. d, 271 et 276 al. 1 CPC). La cognition du juge est limitée à la simple vraisemblance des faits et à un examen sommaire du droit (arrêt du Tribunal fédéral 5A_937/2014 du 26 mai 2015 consid. 6.2.2). Les moyens de preuve sont limités à ceux qui sont immédiatement disponibles (arrêt du Tribunal fédéral 5A_476/2015 du 19 novembre 2015 consid. 3.2.2).

1.4 En tant qu'il concerne l'entretien de l'épouse, le litige est soumis à la maxime inquisitoire simple (art. 272 et 276 al. 1 CPC) et au principe de disposition
(art. 58 CPC; arrêt du Tribunal fédéral 5A_970/2017 du 7 juin 2018 consid. 3.1).

Les règles de la bonne foi (art. 2 CC et art. 52 CPC) obligent la partie adverse à coopérer à la procédure probatoire (ATF 119 II 305 consid. 1b/aa) et le tribunal tient compte du refus de collaborer lors de l'appréciation des preuves
(art. 164 CPC; arrêts du Tribunal fédéral 5A_730/2013 du 24 avril 2014
consid. 6.2 et 4A_257/2014 du 29 septembre 2014 consid. 3.5).

2. Les parties ont produit de nouvelles pièces.

2.1 Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuve nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard
(let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de la diligence requise (let. b).

2.2 Les pièces nouvelles produites par les parties sont recevables, car elles sont postérieures à la date à laquelle le Tribunal a gardé la cause à juger et ont été versées à la procédure sans retard.

3. L'appelant reproche au Tribunal de ne pas lui avoir attribué le domicile conjugal.

3.1 Si les époux ne parviennent pas à s'entendre au sujet de la jouissance de l'habitation conjugale, l'art. 176 al. 1 ch. 2 CC prévoit que le juge attribue provisoirement le logement conjugal à l'une des parties en faisant usage de son pouvoir d'appréciation. Il doit procéder à une pesée des intérêts en présence, de façon à prononcer la mesure la plus adéquate au vu des circonstances concrètes (arrêts du Tribunal fédéral 5A_829/2016 du 15 février 2017 consid. 3.1; 5A_298/2014 du 24 juillet 2014 consid. 3.3.2 et les références).

3.2 En l'espèce, l'intimée est demeurée dans le logement familial depuis la séparation des parties. Certes, O______ n'y vit plus. Cependant, cela ne suffit pas à justifier que ledit logement soit attribué sur mesures provisionnelles à l'appelant, lequel demeure dans un appartement dont il est également propriétaire et ce depuis près de dix ans. La difficulté que l'intimée aurait à trouver un nouveau logement compte tenu de sa situation financière justifie également de ne pas modifier, à ce stade et sans préjudice de la décision à rendre sur le fond, le jugement rendu sur mesures protectrices à cet égard. Enfin, comme il sera vu ci-après, l'appelant n'a pas rendu vraisemblable que sa situation financière imposerait la vente rapide du domicile conjugal et, partant, la libération immédiate de celui-ci par l'intimée.

L'ordonnance sera en conséquence confirmée sur ce point.

4. L'appelant reproche au Tribunal d'avoir considéré que sa situation financière lui permettait encore de contribuer à l'entretien de l'intimée, d'avoir pris en compte certaines charges de cette dernière, de ne pas avoir imputé un revenu hypothétique à la précitée et de ne pas avoir supprimé la contribution d'entretien due en faveur de celle-ci.

4.1.1 Lorsque la modification de la contribution d'entretien est requise et que le juge admet que les circonstances ayant prévalu lors du prononcé de mesures provisoires se sont modifiées durablement et de manière significative, il doit fixer à nouveau la contribution d'entretien, après avoir actualisé tous les éléments pris en compte pour le calcul dans le jugement précédent et litigieux devant lui (ATF 138 III 289 consid. 11.1.1). La survenance de faits nouveaux importants et durables n'entraîne toutefois pas automatiquement une modification du montant de la contribution d'entretien; celle-ci ne se justifie que lorsque la différence entre le montant de la contribution d'entretien nouvellement calculée sur la base de tels faits et celle initialement fixée est d'une ampleur suffisante (arrêt du Tribunal fédéral 5A_64/2018 précité consid. 3.1).

4.1.2 Le principe et le montant de la contribution d'entretien due selon l'article 176 al. 1 ch. 1 CC se déterminent en fonction des facultés économiques et des besoins respectifs des époux. Même lorsqu'on ne peut plus sérieusement compter sur une reprise de la vie commune, l'article 163 CC demeure la cause de l'obligation d'entretien réciproque des époux (ATF 138 III 97 consid. 2.2 et 137 III 385 consid. 3.1).

Dans trois arrêts publiés (ATF 147 III 265, in SJ 2021 I 316; ATF 147 III 293 et ATF 147 III 301), le Tribunal fédéral a posé, pour toute la Suisse, une méthode de calcul uniforme des contributions d'entretien du droit de la famille - soit la méthode du minimum vital avec répartition de l'excédent (dite en deux étapes).

Selon cette méthode, on examine les ressources et besoins des personnes intéressées, puis les ressources sont réparties entre les membres de la famille concernés de manière à couvrir, dans un certain ordre, le minimum vital du droit des poursuites ou, si les ressources sont suffisantes, le minimum vital élargi du droit de la famille, puis l'excédent éventuel (ATF 147 III 265 consid. 7).

Le juge jouit d'un large pouvoir d'appréciation et applique les règles du droit et de l'équité (art. 4 CC; ATF 140 III 337 consid. 4.2.2; 134 III 577 consid. 4; 128 III 411 consid. 3.2.2).

Les besoins sont calculés en prenant pour point de départ les lignes directrices pour le calcul du minimum vital du droit des poursuites selon l'art. 93 LP, en y dérogeant s'agissant du loyer (participation de l'enfant au logement du parent gardien). Lorsque les moyens financiers le permettent, l'entretien convenable doit être étendu au minimum vital du droit de la famille. Pour les parents, les postes suivants entrent généralement dans l'entretien convenable (minimum vital du droit de la famille) : les impôts, les forfaits de télécommunication, les assurances, les frais de formation continue indispensable, les frais de logement correspondant à la situation (plutôt que fondés sur le minimum d'existence), les frais d'exercice du droit de visite, un montant adapté pour l'amortissement des dettes, et, en cas de circonstances favorables, les primes d'assurance-maladie complémentaires, ainsi que les dépenses de prévoyance privée des travailleurs indépendants. Chez l'enfant, le minimum vital du droit de la famille comprend une part des impôts, une part au logement du parent gardien et les primes d'assurance complémentaire. En revanche, le fait de multiplier le montant de base ou de prendre en compte des postes supplémentaires comme les voyages ou les loisirs n'est pas admissible. Ces besoins doivent être financés au moyen de la répartition de l'excédent. Toutes les autres particularités devront également être appréciées au moment de la répartition de l'excédent (ATF 147 III 265 consid. 7.2).

Lorsqu'il reste des ressources après la couverture du minimum vital de droit de la famille, l'entretien convenable de l'enfant peut inclure une participation à cet excédent (ATF 147 III 265 consid. 7.2). L'excédent doit en principe être réparti entre les parents et les enfants mineurs par "grandes têtes" et "petites têtes", la part d'un enfant correspondant à la moitié de celle d'un parent (ATF 147 III 265 consid. 7.3).

4.1.3 Toutes les prestations d'entretien doivent en principe être calculées selon la méthode du minimum vital avec répartition de l'excédent, dite en deux étapes (ATF 147 III 265; 147 III 308), sauf s'il existe une situation exceptionnelle dans laquelle cela n'a tout simplement pas de sens, comme cela peut notamment être le cas en cas de circonstances financières exceptionnellement favorables (ATF 147 III 293 consid. 4.5).

En cas de situation particulièrement favorable, il convient de recourir à la méthode fondée sur les dépenses indispensables au maintien du train de vie durant la vie commune, laquelle demeure applicable dans des cas exceptionnels (ATF 147 III 293 consid. 4.1 et 4.5 en ce qui concerne l'entretien de l'épouse, 147 III 265 consid. 6.6 en matière d'entretien de l'enfant).

Cette méthode implique un calcul concret. Il incombe au créancier de la contribution d'entretien de démontrer les dépenses nécessaires à son train de vie (ATF 140 III 485 consid. 3.3; ATF 137 III 102 consid. 4.2.1.1; arrêts du Tribunal fédéral 5A_4/2019 du 13 août 2019 consid. 3.2 et 5A_172/2018 du 23 août 2018 consid. 4.2). Dite méthode n'exclut cependant pas toute prise en considération de montants forfaitaires, par exemple pour des postes de dépenses liés aux besoins du quotidien qu'il n'est souvent pas possible d'établir avec précision (arrêts du Tribunal fédéral 5A_462/2019 du 29 janvier 2020 consid. 5.4.2; 5A_137/2017 du 29 juin 2017 consid. 7.2; 5A_198/2012 du 24 août 2012 consid. 8.3.3).

4.1.4 Pour fixer la contribution d'entretien, le juge doit en principe tenir compte du revenu effectif des parties, tant le débiteur d'entretien que le créancier pouvant néanmoins se voir imputer un revenu hypothétique supérieur. Il s'agit ainsi d'inciter la personne à réaliser le revenu qu'elle est en mesure de se procurer et qu'on peut raisonnablement exiger d'elle afin de remplir ses obligations (ATF 143 III 233 consid. 3.2; arrêt du Tribunal fédéral 5A_645/2020 du 19 mai 2021 consid. 5.2.1).

4.1.5 Lorsque le juge entend tenir compte d'un revenu hypothétique, il doit examiner successivement deux conditions. Il doit d'abord déterminer si l'on peut raisonnablement exiger d'une personne qu'elle exerce une activité lucrative ou augmente celle-ci, eu égard, notamment, à sa formation, à son âge et à son état de santé. Le juge doit ensuite établir si la personne a la possibilité effective d'exercer l'activité ainsi déterminée et quel revenu elle peut en obtenir, compte tenu des circonstances subjectives susmentionnées, ainsi que du marché du travail (ATF 143 III 233 consid. 3.2; 137 III 102 consid. 4.2.2.2; arrêt du Tribunal fédéral 5A_645/2020 précité consid. 5.2.1). Pour déterminer si un revenu hypothétique peut être imputé, les circonstances concrètes de chaque cas sont déterminantes. Les critères dont il faut tenir compte sont notamment l'âge, l'état de santé, les connaissances linguistiques, la formation, l'expérience professionnelle et la situation du marché du travail (arrêts du Tribunal fédéral 5A_734/2020 du 13 juillet 2021 consid. 3.1).

4.2 En l'espèce, il n'est à juste titre pas contesté que les changements survenus dans la situation financière de l'appelant et dans celle du fils des parties justifient un réexamen de la contribution due à l'intimée.

Il apparaît que le Tribunal, contrairement à ce qu'il avait fait sur mesures protectrices de l'union conjugale, a appliqué la méthode du minimum vital, ce qui n'est pas critiqué, et cela quand bien même il évoque dans ses considérants la méthode fondée sur le maintien du train de vie.

Dès lors, comme le fait valoir justement l'appelant, c'est à tort que le premier juge a retenu, dans les charges de l'intimée, les frais de véhicules et ceux d'entretien de la villa de W______, ces postes ne faisant pas partie du minimum vital du droit de la famille. Cependant, l'appelant lui-même a admis dans les charges de l'intimée un montant de 492 fr. à titre de frais de voiture et scooter, de sorte que ce montant sera retenu. Compte tenu de la réduction des charges qui découle de ce qui précède, et de celle de la contribution qui sera en conséquence admise, la charge d'impôt sera ramenée à 500 fr.

En conséquence, les charges de l'intimée seront arrêtées à 4'450 fr. arrondis (montant de base OP : 1'200 fr., assurance-maladie : 751 fr., frais médicaux non couverts : 200 fr., frais de téléphone et internet : 100 fr., redevance radio/TV : 24 fr., frais SIG: 435 fr., frais d'assurance Y______ : 186 fr., charge fiscale estimée à 500 fr., charges afférents à la maison: 540 fr., et frais de véhicules : 492 fr.).

A ce stade et sur mesures provisionnelles, sans préjudice de la décision à rendre sur le fond, il ne se justifie pas d'imputer un revenu hypothétique à l'intimée. Tout d'abord, compte tenu de son âge actuel (51 ans), du fait qu'elle n'a jamais exercé une activité lucrative et qu'elle est sans formation, l'intimée, comme l'avait retenu la Cour dans son arrêt du 8 novembre 2013, présente un handicap certain sur le marché du travail, qui rendra concrètement son engagement difficile. En tout état, un délai de plusieurs mois devrait lui être accordé pour ce faire, de sorte que la procédure de divorce touchera à sa fin. C'est ainsi au juge du fond qu'il incombera de trancher ce point.

Il n'est pas contesté que l'intimée devra financer les autres charges que celles retenues au moyen de sa fortune. A cet égard, il sera relevé qu'elle a pu en reconstituer partiellement la substance en percevant au moins 240'000 fr. à titre d'arriérés de pensions.

Concernant les revenus de l'appelant, c'est à bon droit que le Tribunal a considéré que la situation financière du précité était opaque, mais qu'il était vraisemblable que celui-ci disposait encore d'une fortune et de revenus lui permettant de maintenir son train de vie, de subvenir aux besoins de son fils et de continuer à contribuer à l'entretien de B______, à tout le moins de couvrir les charges de cette dernière.

L'appelant n'expose pas en quoi cette motivation serait erronée, ni quelles pièces démontreraient le contraire. Il n'explique pas non plus quels sont les revenus que lui procurent les autres sociétés dont il est actionnaire ou administrateur, ni ce qu'il est advenu du solde de l'important bénéfice qu'il a retiré de la vente de ses immeubles. Partant, ses griefs, pour autant qu'ils soient suffisamment motivés et recevables – ce qui est douteux, sont infondés.

Au vu de ce qui précède, l'ordonnance entreprise sera modifiée en ce sens que la contribution d'entretien due par l'appelant à l'intimée dès le 21 octobre 2021 (ce point n'étant pas contesté) sera ramenée à 4'450 fr. par mois.

Compte tenu des considérations qui précèdent, il n'y a pas lieu d'ordonner les mesures d'instruction sollicitées par l'intimée.

5. L'appelant, qui succombe pour l'essentiel, et au vu du déséquilibre entre les situations financières des parties, sera condamné aux frais judiciaires d'appel, arrêtés à 800 fr., et compensés avec l'avance fournie, acquise à l'Etat de Genève.

Chaque partie supportera ses propres dépens compte tenu de la nature familiale du litige.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 20 juin 2022 par A______ contre l'ordonnance OTPI/350/2022 rendue le 7 juin 2022 par le Tribunal de première instance dans la cause C/28124/2018.

Au fond :

L'admet partiellement.

Annule le chiffre 1 du dispositif de l'ordonnance entreprise.

Cela fait et statuant à nouveau sur ce point :

Condamne A______ à verser en mains de B______, par mois et d'avance, 4'450 fr. dès le 21 octobre 2021.

Confirme l'ordonnance pour le surplus.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 800 fr., les met à la charge de A______, et dit qu'ils sont compensés avec l'avance fournie, acquise à l'Etat de Genève.

Dit que chaque partie supportera ses propres dépens.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Madame Pauline ERARD, Madame Paola CAMPOMAGNANI, juges; Madame Jessica ATHMOUNI, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.