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Décisions | Chambre civile

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C/23454/2010

ACJC/612/2021 du 04.05.2021 sur JTPI/9942/2018 ( OO ) , CONFIRME

Recours TF déposé le 17.06.2021, rendu le 14.03.2022, CONFIRME, 4A_333/2021
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/23454/2010 ACJC/612/2021

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 4 MAI 2021

 

Entre

Hoirie de feu A______, soit pour elle :

Monsieur B______, domicilié ______ [GE],

Monsieur C______, domicilié ______, Etats-Unis d'Amérique,

Monsieur D______, domicilié ______ (GE),

appelants d'un jugement rendu par la 15ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 26 juin 2018, comparant par Me Laurent NEPHTALI, avocat, rue du Mont-de-Sion 8, 1206 Genève, en l'étude duquel ils font élection de domicile,

et

E______, [compagnie d'assurances] sise ______ (ZH), intimée, comparant par Me Daniel KINZER, avocat, CMS von Erlach Poncet SA, rue Bovy-Lysberg 2, case postale 5824, 1211 Genève 11, en l'étude duquel elle fait élection de domicile.


EN FAIT

A.           Par jugement JTPI/9942/2018 du 26 juin 2018, reçu le lendemain par A______, le Tribunal de première instance a débouté ce dernier des fins de sa demande en paiement (ch. 1 du dispositif), l'a condamné en tous les dépens de l'instance lesquels comprendraient une indemnité de procédure de 40'000 fr. valant participation aux honoraires d'avocat de E______ [recte : E______] (ch. 2) et débouté les parties de toutes autres conclusions.

B.            a. Par acte déposé au greffe de la Cour de justice le 28 août 2018, l'hoirie de feu A______, décédé le ______ 2018 à F______ (Espagne), soit pour elle, B______, C______ et D______ (ci-après : l'Hoirie), appelle de ce jugement dont elle sollicite, principalement, l'annulation, avec suite de frais judiciaires et dépens. Cela fait, elle conclut à ce que la cause soit renvoyée à l'autorité précédente pour nouvelle décision dans le sens des considérants.

Subsidiairement, elle conclut à ce que la Cour dise que la thèse du vol perpétré par des inconnus, à l'insu de feu A______, est d'une vraisemblance supérieure à celle de E______ selon laquelle le vol aurait été commandité par son assuré et, partant, dise que feu A______ a suffisamment justifié ses prétentions au sens des art. 39 LCA et 8 CC et condamne E______ à payer à l'Hoirie la somme de 889'600 fr., plus intérêts moratoires à 5% l'an dès le 12 avril 2007.

Elle produit des nouvelles pièces, à savoir un courrier de la Justice de paix du 27 août 2018 et des photographies non datées.

b. Dans sa réponse du 23 novembre 2018, E______ conclut à l'irrecevabilité de l'appel et à son rejet avec suite de dépens.

Elle conclut également à l'irrecevabilité des pièces nouvelles produites par l'Hoirie.

c. Par arrêt ACJC/1734/2018 du 10 décembre 2018, la Cour, sur requête de l'Hoirie, a ordonné la suspension de la procédure jusqu'à ce que les héritiers de feu A______ et la composition de l'Hoirie soient connus, dit qu'elle serait reprise à la requête de la partie la plus diligente et dit qu'il serait statué sur les frais avec la décision finale.

d. Par arrêt ACJC/1420/2020 du 8 octobre 2020, la Cour, sur requête des parties, a notamment ordonnée la reprise de la procédure.

e. Dans sa réplique du 30 octobre 2020, l'Hoirie a persisté dans ses conclusions.

Elle a encore produit des pièces qui n'avaient pas été soumises au Tribunal, à savoir un échange de courriels entre G______ et feu A______ des 30 et 31 octobre 2014, une facture de l'hôtel H______ du 28 mai 2008, deux fax adressés par ce dernier à feu A______ les 3 et 30 mai 2008, un tableau non daté intitulé "total du passif produit à Maître I______" et deux SMS d'un tiers à l'un des membres de l'hoirie des 18 et 21 août, sans que l'année ne soit mentionnée.

Elle a également produit des pièces qui avaient déjà été soumises au Tribunal et qu'elle considérait illisibles, soit des documents ressortant du dossier pénal français.

f. E______ a dupliqué, persistant dans ses conclusions. Elle a également conclu à l'irrecevabilité de toutes les pièces produites par l'Hoirie en appel, y compris celle annexées à la réplique.

Elle produit une nouvelle pièce, soit un courrier de Me I______ à Me Daniel KINZER du 23 janvier 2019.

g. Les parties ont été informées par pli du greffe de la Cour du 21 janvier 2021 de ce que la cause était gardée à juger.

h. Par courrier du 22 janvier 2021, l'Hoirie a transmis à la Cour une copie certifiée conforme du certificat d'héritiers de la succession de feu A______ duquel il ressort que les seuls héritiers de ce dernier sont B______, C______ et D______. Ce certificat a été transmis à E______ par pli du greffe de la Cour du 27 janvier 2021.

C.           Les faits pertinents suivants résultent du dossier :

a. Feu A______ (ci-après : A______ ou l'assuré), né en 1932, est l'inventeur de la première ______ "J______", dont la commercialisation lui a permis de réaliser des revenus importants. Il était domicilié depuis 1972 dans sa propriété dite K______ sise au chemin 1______ [no.] ______ à L______ [GE].

b. E______ (ci-après : E______ ou l'assureur) est une compagnie d'assurance dont le siège est à Zurich.

c. A compter des années 1950, feu A______ a entrepris de constituer une importante collection d'art, en particulier d'art africain.

d. Sa collection a fait l'objet de plusieurs inventaires et estimations, certains documentés au moyen de photographies.

G______, expert français reconnu en art africain, a notamment estimé, le 9 juillet 1993, la valeur de 137 sculptures appartenant à feu A______.

Une oeuvre de M______, intitulée "N______" et détenue par feu A______, a été estimée 120'000 euros le 28 janvier 2004 par la société O______.

e. Les objets d'art étaient abrités dans la propriété de feu A______. Les pièces majeures de la collection étaient exposées dans la maison principale, qui était sous alarme, et dans le jardin. Une remise, d'une dimension de 4 à 5 mètres de largeur et d'environ 8 mètres de longueur, attenante au garage, dépourvue de système d'alarme et dont l'intérieur était bordé sur trois côtés d'étagères, tandis qu'une autre étagère d'environ 1 mètre 50 sur 2 mètres était située au centre de la pièce, accueillait également une partie de la collection.

D______, fils de feu A______, a déclaré au Tribunal que les deux niveaux des étagères étaient occupés par des statues d'art africain. Ces statues portaient sous leur socle une étiquette avec un numéro correspondant à la numération de la liste établie par G______. Certains objets avaient perdu leur "pastille".

Des bureaux se trouvent au-dessus du garage, desservis par des escaliers au fond de celui-ci.

La propriété est bordée d'un mur en béton mesurant 1 mètre 65 de haut. Depuis le chemin à l'extérieur de la propriété est visible la lucarne fermée par une grille située en haut de la remise. Un grand portail d'1 mètre 80 de hauteur donne accès à la propriété; il s'ouvre à l'aide d'une clé qui commande la serrure ou, depuis l'intérieur, en levant manuellement le battant du moteur, ou encore par une commande électrique depuis la maison principale. L'interrupteur se trouvant sur l'un des piliers du portail à l'intérieur de la propriété ne permet pas d'actionner l'ouverture.

f. Selon feu A______, les photographies des objets entreposés dans la remise étaient toutes conservées au même endroit, pour pouvoir les consulter lorsqu'il allait y choisir un objet. Il ne disposait pas de double des photos de sa collection.

D______ a déclaré au Tribunal qu'une grande partie des statues avaient été photographiées dans les années 1970 et que les clichés étaient conservés dans des classeurs rangés dans un carton entreposé dans les bureaux de son père. Son père souhaitait dresser un catalogue complet de sa collection avec des photos numérisées. Père et fils s'étaient donné pour tâche de vérifier à l'aide d'une liste, d'une part, la qualité des photos, d'autre part, d'identifier les objets qui n'étaient pas encore photographiés. Chaque photo avait été marquée pour la mettre en lien avec la liste de G______. Ils se rendaient dans la remise environ une fois par semaine en moyenne afin d'effectuer ce travail. Ils étaient arrivés quasiment au bout de cette tâche.

La police d'assurance

g. Le 28 juin 2005, feu A______ et E______ ont conclu une police d'assurance n° 2______ "Art privé" prenant effet rétroactivement au 1er juin 2005 en vue d'assurer la collection d'art pour une durée de cinq ans.

Cette police d'assurance portait sur des objets d'art comme des tableaux, des sculptures, des antiquités, des tapis, des pièces de monnaies, des médailles, des montres, des bijoux, ainsi que tout autre objet de collection.

Les objets d'art assurés étaient énumérés individuellement sur une liste annexée à la police d'assurance qui en précisait la valeur. Ladite liste avait été établie notamment sur la base des estimations précitées réalisées notamment par G______ et [la société] O______.

Une somme d'assurance en "valeur agréée" sur la base des valeurs ressortant des expertises annexées au contrat était prévue pour chaque objet pris individuellement. En cas de sinistre, les objets étaient remboursés à la valeur convenue conformément à la liste des objets assurés, qui faisait partie intégrante de la police d'assurance.

La police d'assurance couvrait notamment le vol, jusqu'à un maximum de 5'000'000 fr. par évènement.

Les objets d'art étaient assurés aussi bien à l'intérieur qu'à l'extérieur des bâtiments pour autant qu'ils se trouvent sur le terrain appartenant à feu A______.

Aucune installation supplémentaire aux moyens de sécurité électronique déjà existants dans la propriété de feu A______ n'avait été sollicitée pour la conclusion du contrat d'assurance.

L'assureur n'avait pas exigé d'inventaire photographique détaillé des objets assurés, en sus des clichés faisant partie des inventaires annexés à la police d'assurance.

Les conditions générales relatives à l'assurance "Art privé" prévoyaient en cas de litige des fors alternatifs au siège de la société à Zurich, au domicile suisse ou dans la principauté du Liechtenstein du preneur d'assurance ou de l'ayant droit ou encore à l'emplacement des choses assurées dans la mesure où elles étaient situées dans l'un de ces deux pays.

La disparition d'une partie de la collection

h. Les 2 et 3 avril 2007, une entreprise de jardinage a procédé à l'élagage des marronniers dans la propriété de feu A______, et laissé des copeaux de bois en tas sous les arbres, malgré la demande expresse du propriétaire de les entreposer dans des sacs, dès lors que cette tâche n'avait pas été prévue dans le contrat.

Le jardinier de la propriété a rangé lesdits copeaux de bois dans une vingtaine de sacs et les a placés devant la porte de la remise, à la demande de feu A______, qui lui avait indiqué que "de toute façon personne n'entrerait dans ce local durant [ses] vacances". Le jardinier ne disposait d'aucune clé de la propriété jusqu'en juin 2007.

Feu A______ a déclaré à la police judiciaire qu'il ne se souvenait pas d'avoir donné des consignes particulières à ce sujet. Il était formel à propos du fait qu'avant de partir en vacances, les sacs remplis de copeaux de bois n'étaient pas devant la porte de la remise et ne l'obstruaient pas.

i. Le 5 avril 2007, feu A______ s'est rendu à F______ (Espagne), avec son fils D______, qui vivait à cette époque avec lui, pour des vacances qui devaient durer jusqu'au 21 avril 2007.

j. La demeure de feu A______ est restée inoccupée durant cette période, le majordome de la maison, P______, qui logeait habituellement dans la propriété de feu A______, étant en congé du 4 au 16 avril 2007.

P______ a déclaré au Tribunal qu'avant chaque voyage, il était chargé de rassembler les petites oeuvres d'art exposées dans la maison, qui avaient une plus grande valeur, pour les ranger dans la chambre forte située au sous-sol de la maison principale. Cette dernière, qui mesurait environ 2 mètres 20 de hauteur, 2 mètres de largeur et 2 mètres 50 de profondeur, n'était pas assez grande pour contenir celles entreposées dans la remise.

k. Entre le 10 et le 11 avril 2007, des ouvriers ont effectué une préparation du chemin 1______ en vue de travaux relatifs à la pose d'un nouveau revêtement. Le 12 avril 2007, le chemin 1______ est resté fermé et inaccessible au trafic de 8h00 à 16h00 en raison des travaux sur le revêtement.

l. Le 11 avril 2007, Q______, secrétaire de feu A______, a été contactée par ce dernier afin de vérifier s'il avait reçu des courriels importants. Feu A______ a d'abord confirmé cette version devant la police judiciaire genevoise puis déclaré au Tribunal que la raison du contact était la recherche d'une facture.

Le même jour, R______, personne de confiance à qui feu A______ avait confié les clés de sa propriété, s'est rendue sur place dans l'après-midi, à la demande du précité, afin d'ouvrir les portes du bureau de la villa à Q______ qui ne disposait que d'une seule des deux clés y donnant accès. En arrivant, elle a constaté que la porte basculante du garage était grande ouverte, ce dont elle a avisé téléphoniquement feu A______ qui lui a alors demandé de faire le tour de la propriété, ce qu'elle a fait. Selon elle, tout était normal. En particulier, l'alarme de la villa était branchée, les voitures étaient dans le garage, le portail ainsi que la porte donnant accès au chemin étaient fermés. En revanche, elle n'avait pas pu accéder à la remise attenante au garage car celle-ci était obstruée par des sacs contenant des débris de bois de marronniers. Elle en a avisé feu A______ qui lui a indiqué qu'il prendrait ses dispositions.

D______, entendu à titre de renseignement, a déclaré au Tribunal qu'avant de partir en vacances à Majorque, il s'était chargé personnellement de fermer la maison et avait pris soin de fermer le garage et de retirer les clés de contact des voitures de collection et le coupe-circuit.

m. Le 12 avril 2007, S______, dont les bureaux en ville étaient voisins de ceux de feu A______, a été contacté téléphoniquement par ce dernier, qui lui a demandé de se rendre à son domicile avec sa secrétaire. Empêché, S______ a demandé à son fils, T______, d'aller chez feu A______.

Q______, alors qu'elle se trouvait sur place avec T______, a été recontactée par téléphone par feu A______. Celui-ci lui a demandé de vérifier la remise. Elle a alors constaté que la porte de celle-ci avait été fracturée, qu'un des deux cylindres manquait et que le second avait été endommagé. Les étagères dans la remise étaient vides de même qu'un carton sur lequel était inscrit "photos". Informé téléphoniquement, feu A______ lui a dit que c'était là que se trouvait sa collection d'art africain.

n. Il a également déclaré que lors de l'installation de l'alarme de la maison, vingt ans avant les faits litigieux, il avait fait le choix, par souci d'économies, de ne pas en installer dans le garage et la remise, ce que ses assureurs successifs savaient.

Le Tribunal a constaté sur place, le 26 mai 2014, que le garage disposait de deux portes. Celle de droite s'ouvrait uniquement électriquement et non manuellement. Une sonnerie se déclenchait lorsque l'ouverture du battant droit de la porte du garage était actionnée. La sonnerie retentissait dans la maison à l'intérieur de la cuisine et s'entendait également à l'extérieur de la maison. Elle s'interrompait lorsque la fermeture était actionnée et que la porte se fermait. Selon feu A______, cette sonnerie n'était pas reliée à une centrale d'alarme.

o. La société de sécurité U______ SA, qui avait pour mission d'effectuer une ronde extérieure par nuit du 4 au 14 avril 2007 entre 23h00 et 6h00, n'a constaté aucune anomalie lors du passage de ses agents. Elle n'a, en particulier, pas constaté, lors de la patrouille du 11 avril 2007 vers 2h00 du matin, qu'une porte du garage était ouverte. Les lieux de passages selon le relevé versé à la procédure étaient "boitier clés portail", "vitre annexe villa", "cabane bord du lac" et "vitre villa principale".

p. Une caméra surplombe le portail à l'intérieur de la propriété à une hauteur de 3 mètres 50.

Il ressort des déclarations de P______ au Tribunal que la maison était équipée d'un enregistreur vidéo qui se mettait en marche seulement en cas de mouvement devant la caméra. L'image n'était pas très claire, particulièrement la nuit. Les mouvements sur l'image défilaient très rapidement ne permettant pas de distinguer les détails même à la lumière du jour. Lorsque P______ était présent, la cassette était changée tous les jours. A défaut, l'enregistrement recommençait. Lorsqu'il s'absentait, les cassettes avaient une durée d'une semaine d'enregistrement puisque seuls étaient enregistrés les mouvements intervenus.

D______ a déclaré à ce propos au Tribunal que personne n'avait été chargé de changer la cassette d'enregistrement du système de vidéo-surveillance qui couvrait 24 heures. Il s'agissait d'un appareil VHS qui prenait une image toutes les 3 secondes. Pour la nuit, l'image était noire. En principe, soit P______ soit lui-même se chargeait de changer la cassette. Le système était désuet, ce qu'ils avaient pu constater lorsqu'ils avaient eu un problème sur le parking devant le garage et qu'ils n'avaient rien pu identifier. A son retour de vacances, le 15 avril 2007, D______ avait lui-même retiré la cassette qui se trouvait alors dans le magnétoscope, l'avait visionnée et avait constaté qu'aucune image n'était intéressante.

S______ a, à la demande de feu A______, contacté la société qui avait installé le système de vidéo-surveillance. Des renseignements obtenus est ressorti que le système avait une autonomie très faible de trois heures, guère plus en "mode lent".

L'inspecteur V______ a déclaré au Tribunal avoir eu accès à l'écran qui retransmettait les images enregistrées, sans pouvoir indiquer si le fait que les images étaient écrasées au fur et à mesure lui avait été indiqué par un de ses interlocuteurs au cours de l'enquête ou s'il l'avait lui-même constaté.

q. Suite à la dénonciation de ces faits le 12 avril 2007, le Ministère public a ouvert une procédure pénale n° P/3______/2007 contre inconnu pour vol.

Dans sa plainte du 22 avril 2007, feu A______ a indiqué que, sauf erreur ou omission, 139 [recte : 123] pièces avaient été subtilisées, soit 121 des objets figurant dans l'inventaire réalisé par G______, ainsi que deux autres pièces de grande valeur, soit le "N______" de M______ et une sculpture sur bois représentant un cavalier Dogon. La valeur totale des objets dérobés s'élevait à 2'450'000 fr. selon les trois listes d'expertises jointes en copie à la plainte.

Selon le rapport de police du 23 juillet 2007, aucune image provenant de la caméra de surveillance n'a pu être fournie dès lors que l'enregistrement était écrasé régulièrement.

Par ordonnance du 15 février 2008, le Ministère public a classé la procédure en raison de l'absence d'éléments permettant d'orienter l'enquête que ce soit pour identifier les auteurs du cambriolage ou les objets volés et leurs valeurs.

Feu A______ a recouru à la Chambre d'accusation contre ce classement. Celle-ci a rayé la cause du rôle suite au déclassement de la procédure pénale par le Ministère public le 29 février 2008 en raison de faits nouveaux apportés par les autorités françaises, à savoir la découverte à W______ [France] de certaines des pièces déclarées volées.

La découverte d'une partie des pièces volées

r. Après le vol et en parallèle à l'instruction pénale, feu A______ a pris contact avec le photographe qui avait réalisé les derniers clichés; ce dernier n'en avait aucun des objets se trouvant dans la remise.

Q______ avait assisté feu A______ dans la recherche de documents et de photos liées à la collection, mais cela s'était avéré difficile car les photos avaient également été subtilisées.

D______ a déclaré au Tribunal que, depuis l'âge de 15 ans, il assistait son père professionnellement dont il était devenu la mémoire depuis son AVC à la fin du mois de juin 2007. Il avait souvent accompagné son père auprès de l'ancien conseil de celui-ci. Ce dernier avait eu l'idée d'aller voir G______ afin que l'expert puisse lui venir en aide pour déterminer les objets apparaissant sur certaines photos détenues par la police et montrant les statuettes entreposées dans le dépôt avec ceux qu'il avait eu l'occasion d'expertiser.

s. Le 27 février 2008, feu A______ s'est rendu dans le cabinet de G______ à W______.

Des objets, ainsi que plus d'une dizaine, voire d'une vingtaine, de cartons, avaient été déposés dans les locaux de G______ par un dénommé X______ en vue d'expertise et vente. Feu A______ a reconnu, parmi les objets précités, une sculpture africaine du Mali figurant un cavalier Dogon, emballée dans du papier bulle, ainsi que deux autres masques africains plats qui lui avaient été volés.

L'enquête de police a permis de saisir 40 objets auprès du cabinet de l'expert précité et 49 objets déposés à la maison de vente aux enchères Y______ à Z______ (France) qui provenaient de la collection de feu A______.

Les révélations sur le déroulement de la disparition des oeuvres

t. Appréhendé le 6 mars 2008 par la police française, X______ a été mis en examen du chef de recel de vols commis à titre habituel en état de récidive.

Au cours de la procédure, il a donné plusieurs versions des faits en lien avec la prise de possession desdits objets, tant dans le cadre de la procédure pénale française que sur commissions rogatoires décernées par les autorités suisses les 3 et 14 mars 2008, 6 mars 2009 et 3 février 2010.

u.a Dans le cadre de la procédure française, lors de son arrestation, X______ a déclaré que c'était un Suisse qui lui avait donné ces pièces d'art africain à la frontière franco-suisse mais sur le territoire français, fin avril 2007. Il les avait achetées quinze mille euros en espèces après avoir demandé si les objets "étaient clairs" et obtenu une réponse positive. Il ne connaissait ni le nom ni le prénom du vendeur suisse. Il a déclaré consentir à ce que les objets d'art africain placés sous scellés et déposés à la salle des ventes de Z______ et chez G______ soient restitués à leur légitime propriétaire.

u.b Lors de son audition du 7 mars 2008 par commission rogatoire, X______ a déclaré qu'il avait été en contact avec un Français fin avril 2007 qui l'avait mis en relation avec le propriétaire de ces pièces qui souhaitait vendre une centaine d'objets africains car il avait besoin d'argent. Trois rendez-vous avaient eu lieu dans une maison à proximité de AA______ (France). Il ignorait que les objets avaient une origine frauduleuse. Il avait essayé de les vendre auprès de particuliers dès juin 2007 mais sans succès, raison pour laquelle il s'était adressé à des maisons de vente. Un article de presse en lien avec un vol de 139 objets d'art africain lui a été présenté mentionnant que l'assureur offrait une récompense à toute personne susceptible de fournir des indications utiles. Il s'est dit surpris de ce que les assurances aient offert des récompenses - ce qui n'était pas le cas en France - et a affirmé ne pas être au courant de ces faits ni ne connaître une personne nommée A______.

v. Par courrier du 12 mars 2008 adressé à la juge d'instruction française, X______ a écrit qu'il avait "le réel désir de faire éclater la vérité dans ce dossier, en [...] révélant tout ce [qu'il savait] à ce sujet".

Par courrier du 16 avril 2008 adressé à la juge d'instruction française, X______ a indiqué qu'il était "désireux de faire toute la lumière, de dire toute la vérité sur la vente d'art africain".

w. Lors de ses interrogatoires des 29 avril et 9 septembre 2008 devant la juge d'instruction française, X______ a déclaré que la personne qui lui avait vendu la centaine de pièces d'art africain pour 15'000 euros était AB______, un ami qu'il connaissait depuis 20 ans. Ce dernier lui avait demandé d'aller chercher les objets à AA______. Il y était allé en train, avait vu AB______ et avait rapporté les objets, seul, dans un fourgon appartenant à ce dernier. Il s'interrogeait de savoir s'il y avait réellement eu un vol dans ce dossier car il ne s'imaginait pas que AB______ aurait pu le trahir en lui vendant des pièces volées. Il ne connaissait pas l'origine frauduleuse de ces pièces et comptait sur AB______ pour qu'il l'explique à la juge d'instruction. Tant AB______ que les experts à qui il avait remis les pièces lui avaient affirmé que celles-ci n'avaient pas une très grande valeur. Il s'opposait à la restitution des objets car il souhaitait que ceux-ci soient d'abord expertisés.

x. AB______ a été assassiné le ______ 2008 à son domicile.

y. Par correspondances des 11,12 et 17 septembre 2008, feu A______ a indiqué à la juge d'instruction française qu'il faisait l'objet d'appels téléphoniques d'une personne se présentant comme l'avocat de X______ et lui indiquant être en possession d'une clé lui ayant permis d'ouvrir la petite porte située à côté du portail de sa propriété. Cette personne lui indiquait que X______ modifierait sa version des faits si la plainte déposée à son encontre n'était pas retirée.

z. Le 20 septembre 2008, X______ a adressé un courrier à la police genevoise dans lequel il sollicitait les coordonnées de la compagnie d'assurance de feu A______, en faisant référence à l'article de presse qui lui avait été soumis lors de sa garde à vue, précisant qu'à l'époque, il n'y attachait aucune importance mais qu'"aujourd'hui, la situation [était] tout à fait différente".

aa. Lors de son interrogatoire du 30 septembre 2008, X______ a déclaré que, pour la première fois de sa vie, il violait la loi du silence en disant toute la vérité. Il était allé avec feu AB______ à trois reprises en Suisse, la première fois en octobre ou novembre 2006, la deuxième en janvier ou février 2007 et la troisième début mars 2007. Lors de la première venue en Suisse, feu AB______ lui avait dit qu'un proche de Suisse voulait les faire venir pour organiser une escroquerie à l'assurance. Feu A______ les attendait dans sa [voiture de la marque] AC______, trois portes, de couleur foncée. C'est ainsi qu'il avait fait sa connaissance. C'était un homme âgé de plus de 70 ans, mesurant 1 mètre 70 environ, bedonnant avec des cheveux blancs, légèrement dégarni, portant des lunettes. Il conduisait très mal, voire dangereusement. Il disait se sentir fragile depuis le décès de son épouse quelques années auparavant. Il s'était présenté comme l'inventeur de la ______, ajoutant que sa situation financière était beaucoup moins prospère qu'auparavant, qu'il s'était fait escroquer de nombreuses fois et copier, raison pour laquelle il envisageait cette escroquerie à l'assurance. Dans l'entrepôt de feu A______, il y avait des caisses en bois à l'intérieur desquelles se trouvaient les machines ayant permis la fabrication de la ______ que le propriétaire des lieux appelait des "moules". Ils avaient compté une centaine de pièces d'art. X______ avait expliqué à feu A______ qu'il ne toucherait jamais aucune somme des assureurs car il n'y avait pas de système d'alarme sur son entrepôt mais uniquement à son domicile. Ce dernier, conforté par le fait qu'il avait fait venir un expert de la compagnie d'assurance quelques mois avant décembre 2006, n'était pas du même avis. Feu A______ leur avait également indiqué que les enregistrements de la caméra n'étaient pas conservés car au bout de quelques heures la même bande continuait à enregistrer, effaçant l'enregistrement précédant. Feu A______ avait remis à feu AB______ une petite clé plate destinée à ouvrir le petit portail situé à côté de l'entrée des voitures, là où un bouton électrique de couleur noire permettait d'ouvrir et fermer le portail. A propos des oeuvres, il leur avait dit : "les pièces vous les détruirez ou vous les vendrez mais vous attendrez au moins 8 mois le temps que je touche l'argent de l'assurance" et avait assuré que si jamais ses pièces lui étaient montrées, il ne les reconnaîtrait pas. Le faux cambriolage aurait dû avoir lieu entre le 25 et le 31 décembre 2006 parce que feu A______ serait en vacances et son majordome de retour dans son pays (le Pakistan ou l'Inde). Finalement, le majordome n'avait pas pu partir. Le faux cambriolage avait donc eu lieu le lundi de Pâques [9 avril 2007] mais X______ n'y avait pas participé car il ne voulait pas prendre de risque. En revanche, ce dernier avait dit à feu AB______ que s'il récupérait les pièces, il voulait bien les acheter. Le forfait avait eu lieu entre 7h00 et 7h15. La société de sécurité U______ SA qui assurait la sécurité de la propriété de feu A______ en son absence devait passer à la villa entre 6h30 et 7h00 au plus tard, raison pour laquelle ce dernier avait demandé à feu AB______ de ne pas intervenir avant 7h00 au plus tôt. Feu A______ leur avait précisé que sa secrétaire venait récupérer le courrier et qu'elle faisait le tour de la propriété pour voir si tout allait bien, de sorte que le précité avait demandé à feu AB______ que le travail soit effectué proprement "pour que personne ne se rende compte de rien au moins dans les premières heures".

Après le cambriolage, X______ avait vu feu AB______ à W______. Ce dernier lui avait rapporté que le cambriolage avait bien eu lieu et qu'il avait appelé feu A______, avec un portable qui n'était pas à son nom, entre 7h00 et 7h30 pour lui dire qu'il avait trouvé les garages grands ouverts et lui demander si la maison était bien vide. Il avait vu dans le garage une [voiture de la marque] AD______ jaune paille, une AE______ rouge des années 60, une AF______ ancienne et une AG______ break. X______ a encore précisé qu'il n'avait jamais été en possession de 137 pièces mais d'une centaine et qu'il lui serait possible de récupérer la clé du petit portail dès lors que feu AB______ lui avait dit l'avoir conservée.

bb. Par courrier du 30 septembre 2008, X______ a informé la juge d'instruction de son intention de prendre contact avec la compagnie "E______" [sic], compagnie d'assurance de feu A______.

cc. Le 31 octobre 2008, la juge d'instruction chargée de l'enquête a reçu un courrier envoyé par un tiers non identifié ayant pour objet "clef de serrure ayant servi à perpétrer le vol simulé le lundi de Pâques 2007 entre 7h15 et 9h30" dans laquelle se trouvait une clé désignée comme étant une "copie de la clef de la petite porte de portail de A______ à son domicile Suisse".

dd. Entendu par la juge d'instruction française le 19 janvier 2009, feu A______ a déclaré qu'il s'était fait dérober en juin 2008 sur le quai de la gare de Genève une sacoche qui contenait notamment les clés de la propriété, de sorte qu'il avait fait changer les serrures de son domicile. Néanmoins, il disposait encore de l'ancienne clé de la serrure qui servait, depuis 1972, à ouvrir (uniquement) le portillon de sa propriété. Depuis cette époque, cette clé avait été confiée à différents ouvriers et jardiniers pour des travaux divers. La juge d'instruction a constaté que cette clé, qui lui avait été présentée, se superposait parfaitement à celle acheminée par courrier. La magistrate a ainsi protocolé "il est donc tout à fait probable que X______ ou son ami était en possession d'une clé d'accès au jardin de M. A______". Informé des déclarations de X______ du 30 septembre 2008, feu A______ a déclaré n'avoir jamais vu cet homme ni feu AB______. Certains renseignements dont disposait X______ étaient exacts. En particulier, il était effectivement propriétaire d'un modèle de voiture AC______ de couleur foncée et des voitures de collection décrites. Les moules de la ______ J______ étaient bien entreposés dans la remise. Cela était écrit sur les caisses. Son employé de maison était effectivement de nationalité indienne. En revanche, les rondes de U______ SA n'étaient pas effectuées à heure fixe. Il ignorait si le grand portail du jardin s'ouvrait à l'aide d'un bouton intérieur, lui-même activant l'ouverture avec une télécommande.

Lors du transport sur place, le Tribunal a constaté que dans le garage se trouvaient une AD______ jaune, une décapotable "AE______ rouge", une AG______ cabriolet et une AE______ rouge foncé. Devant le garage était stationnée une AC______ bleue qui portait des éraflures et des enfoncements dans la carrosserie. Feu A______ a indiqué posséder ce dernier véhicule depuis une dizaine d'années. Le Tribunal a également constaté que, contre le mur opposé à la porte d'entrée de la remise, étaient empilées des caisses en bois qui ne comportaient pas d'inscription. Feu A______ a confirmé qu'elles contenaient les moules du premier J______.

ee. Entendu une nouvelle fois par la juge d'instruction le 3 mars 2009, X______ a confirmé que feu AB______ lui avait indiqué que le faux cambriolage avait eu lieu le lundi de Pâques, soit le 9 avril 2007.

ff. Par courrier du 24 avril 2009, X______ s'est adressé à E______, à l'attention de AH______ - à l'époque inspecteur de sinistre - pour faire le récit de l'organisation du faux cambriolage commandité à feu AB______ par feu A______. En substance, les faits relatés correspondent aux faits dévoilés à la juge d'instruction le 30 septembre 2008, à l'exception de sa participation aux rendez-vous au domicile de feu A______ auxquels il a nouvellement affirmé ne pas avoir été présent. Dès lors que les objets n'avaient pas été volés, il considérait qu'il ne devrait être poursuivi que pour complicité d'escroquerie.

A cet égard, AH______, désormais chef du service anti-fraude d'une caisse d'assurance maladie, a déclaré au Tribunal avoir été informé en février 2009 par les inspecteurs genevois que X______ avait souhaité, lors de son audition à W______, disposer des coordonnées de l'assureur pour négocier une récompense. AH______ avait alors contacté l'avocat du précité à W______ pour lui faire part de l'intérêt de l'assureur pour toute information sur les évènements. Ce n'était que deux mois plus tard que X______ l'avait joint par téléphone indiquant qu'il voulait dire toute la vérité et "ne pas tomber seul". AH______ lui avait alors expliqué qu'il était hors délai pour prétendre à la récompense et que des aveux écrits étaient nécessaires. L'intéressé s'était exécuté en lui adressant le courrier du 24 avril 2009 dont il lui avait personnellement confirmé la teneur lors d'une rencontre à Genève.

gg. Le 9 décembre 2010, X______ a déclaré à la police genevoise qu'il maintenait que le cambriolage avait été commandité par feu A______ et que c'était feu AB______ qui lui avait indiqué tous les détails de l'opération. Lui-même avait refusé de participer car il ne voulait pas prendre de risques, seule la vente des objets l'intéressait. Feu AB______ lui avait également dit qu'il s'était rendu à deux ou trois reprises en Suisse à la résidence du propriétaire des objets d'arts africains pour mettre au point le pseudo-cambriolage. Feu AB______ avait organisé ce dernier avec l'aide de trois comparses. Il lui avait indiqué que feu A______ avait laissé les clichés de sa collection avec les objets afin de supprimer toutes traces. Quant au vol d'une poubelle signée d'un grand maître, feu AB______ avait, à la demande de feu A______, jeté ladite poubelle après avoir passé la frontière. S'agissant de la clé du petit portail envoyée anonymement à la juge d'instruction française, X______ a indiqué que feu AB______ lui avait parlé de cette clé et que ce dernier l'avait remise à un tiers par sécurité. X______, alors en détention, s'était arrangé pour faire contacter un proche de feu AB______ qui savait où se trouvait cette clé et la faire expédier au cabinet de la juge pour démontrer l'implication du propriétaire. X______ a enfin déclaré que les objets d'art africain avaient été stockés dans un véhicule utilitaire garé dans la région de AA______. Ce n'était qu'un ou deux mois plus tard qu'il en avait pris possession après les avoir inventoriés, ce qui lui permettait d'être formel quant au fait qu'il n'y avait pas plus de cent pièces.

hh. Une confrontation entre X______ et feu A______ n'a pas pu avoir lieu en raison de l'état de santé de ce dernier.

Valeur de la collection

ii. Lors de son audition par la police française du 16 septembre 2008, G______ a versé à la procédure une estimation faite par Y______ à Z______ s'agissant des objets qui avaient été déposés auprès de cette maison de vente. Il a indiqué que les objets avaient été estimés dans la fourchette basse à 91'200 euros. Il n'avait pas fait d'estimation des pièces qui avaient été déposées chez lui mais pensait que leur valeur était à peu près la même que celle de Z______. Ce genre d'objets avait été très déprécié sur le marché depuis 1996 et son estimation d'origine n'avait plus aucune valeur marchande, même si l'assureur n'avait pas modifié le prix de la valeur agréée. Il y avait eu une augmentation considérable du prix des objets de grande qualité mais une dépréciation tout aussi importante des objets de qualité courante, ce qui était le cas des objets de feu A______. Le prix de l'assurance était totalement surévalué et feu A______ aurait été déçu de la valeur de ses objets s'il entendait les vendre.

Devant le Tribunal, feu A______ a déclaré le 28 octobre 2014 à ce propos qu'il ne pouvait pas se déterminer sur l'affirmation de G______ selon laquelle les objets de qualité courante avaient connu une forte dépréciation. Il ne se souvenait pas avoir eu une discussion à ce propos avec lui ni avec d'autres personnes. Il ne suivait pas le cours de la valeur de ses objets.

Jugement de condamnation français et Ordonnance de classement suisse

jj. Selon le jugement du 7 décembre 2010 rendu par le Tribunal de Grande Instance de W______, X______ a été reconnu coupable du recel de 98 objets d'art africain qu'il savait provenir d'un crime ou d'un délit commis au préjudice de feu A______ en Suisse dans le courant du mois d'avril 2007. Il a été condamné à une peine d'emprisonnement de quatre ans assorti d'un sursis pour une durée d'un an à l'exécution de cette peine. Feu A______ s'est vu allouer la somme de 1 euro symbolique à titre de dommages-intérêts. Les 98 objets lui ont été restitués par la suite.

X______ n'a pas fait appel de cette décision. Il a exécuté la totalité de sa peine en détention et a été libéré le 5 août 2013.

kk. S'agissant de la procédure pénale en Suisse, suite à l'avis du Ministère public genevois du 7 novembre 2014 de prochaine clôture de l'instruction qui l'informait du classement à venir de la procédure, feu A______ a rappelé que 42 objets volés représentant une valeur de 895'000 fr. n'avaient toujours pas été trouvés.

Par ordonnance du 25 janvier 2015, le Ministère public a classé la procédure compte tenu des empêchements de procéder résultant du décès de feu AB______ et de la condamnation intervenue à l'encontre de X______, soulignant qu'aucun élément n'avait permis d'orienter la procédure s'agissant de l'existence d'éventuels autres auteurs ou complices.

Annonce de l'évènement à E______ et refus de couvrir le sinistre

ll. En parallèle à l'instruction pénale, le 13 avril 2007, feu A______, par le biais de sa secrétaire, a informé E______ de la survenance d'un cambriolage commis par effraction à son domicile la veille et de la disparition d'une centaine de statuettes d'art africain. Le formulaire de déclaration de sinistre a été rempli le 16 juin 2007 et une copie de la plainte pénale du 22 avril 2007 adressée à l'assureur.

mm. Feu A______ a, par la suite, régulièrement écrit à E______ pour lui demander quand il serait dédommagé pour le sinistre (courriers des 12 juin, 31 juillet et 7 août 2007).

nn. Par courrier du 10 septembre 2007, E______ a requis des informations complémentaires de la part de l'assuré sous la forme d'un questionnaire à remplir. Elle a également recherché elle-même des informations par le biais de ses inspecteurs des sinistres et de tiers experts.

L'ancien inspecteur des sinistres, AH______, a déclaré au Tribunal à cet égard que les circonstances apparaissaient douteuses dès lors que personne n'était présent dans la propriété au moment des faits et qu'il n'y avait aucune trace extérieure apparente. De plus, cet évènement, par son ampleur, était exceptionnel et supposait une organisation certaine, notamment en raison du volume d'objets annoncés comme volés, sans compter que les vols d'oeuvres d'art étaient très rares.

AI______, historien de l'art, expert en matière d'art pour E______ depuis 2004, a déclaré au Tribunal que les circonstances du sinistre n'étaient pas usuelles s'agissant d'un cambriolage. Ainsi, environ 130 objets avaient été prétendument cambriolés d'une valeur totale de 2 millions de francs. Les objets étaient relativement volumineux, difficiles à manipuler, à porter, à vendre et à négocier notamment lorsque la source d'acquisition est le vol. Il y avait des objets moins encombrants et d'une plus grande valeur dans la maison principale et les cambrioleurs ne s'en étaient pas pris à celle-ci. Par ailleurs, l'infraction avait manifestement nécessité beaucoup de temps. Or, aucun cambrioleur ne souhaitait s'éterniser sur le lieu de son délit sauf s'il savait qu'il n'allait pas être dérangé. En outre, le carton vide sur lequel était inscrit "photos" était la manifestation à l'attention de l'assureur du fait que les documents relatifs aux objets dérobés étaient partis. Dans une situation de stress dans laquelle devait se trouver les cambrioleurs, il ne faisait pas sens de dérober uniquement le contenu du carton, sans le carton lui-même. Enfin, un autre point troublant était le fait qu'avant le sinistre, des sacs poubelles étaient entreposés devant la remise et que ces sacs s'étaient retrouvés au même endroit après l'infraction ce qui laissait supposer que les cambrioleurs les avaient remis à leur place pour dissimuler leur forfait alors que cet endroit n'était pas visible de l'extérieur de la propriété.

AJ______, expert en ethnologie pour l'Afrique et le Pacifique, a déclaré au Tribunal et à la police judiciaire qu'il connaissait feu A______ depuis une quinzaine d'années et avait eu l'occasion d'admirer une partie de la collection de celui-ci. Il avait eu à connaître des faits litigieux par la police et par E______ qui lui avaient demandé d'estimer, sur photos, la valeur des objets déclarés volés, étant précisé qu'il ne savait pas, à ce moment, à qui appartenaient ces pièces. A son sens, les objets volés à feu A______ avaient été payés beaucoup trop chers au contraire des autres pièces qui étaient d'une valeur avérée. Selon son expérience, le vol de collections entières d'ethnologie était très rare et les oeuvres pouvaient ressortir dans des marchés aux puces. Il s'agissait plus souvent de vols ou de destructions maquillés, notamment par des personnes qui avaient commencé une collection avec des objets de piètre qualité ou qui avaient acquis des objets auprès de marchands pour un prix surfait.

oo. Dès septembre 2007, feu A______ a compris que E______ le suspectait d'être à l'origine du sinistre, selon lui pour éviter de s'acquitter de ses obligations. Il a refusé, à plusieurs reprises, de répondre au questionnaire de E______ avant de se soumettre à l'exercice par courrier du 29 janvier 2008.

pp. Au cours de l'année 2008, feu A______ a réclamé l'indemnisation due, reprochant à l'assureur de demeurer inactif par courriers des 11 avril, 27 mai et 20 juin 2008.

qq. Parallèlement, feu A______ a avisé E______ le 17 mars 2008 de l'existence de la procédure pénale diligentée en France contre X______.

rr. Par courrier des 15 et 16 avril 2008, E______ a sollicité de la police et de la juge d'instruction française l'accès à la procédure pénale au motif que les circonstances n'étaient pas claires.

ss. Le 21 mai 2008, feu A______ a notamment indiqué à la juge d'instruction française qu'il n'accordait pas à E______ la confiance nécessaire pour l'autoriser à interférer, de quelque manière que ce soit dans la procédure. Il transmettrait, par l'intermédiaire de son conseil, toutes informations utiles à son assureur.

tt. Le 10 juin 2008, l'assureur a réfuté le reproche d'inactivité, rappelant à feu A______ qu'il était important dans ce genre de sinistre que l'assuré et l'assureur forment un "groupe d'intérêts" et l'a invité à lui donner un accès direct aux actes de la procédure pénale en cours en France.

uu. Le 23 décembre 2008, feu A______, évoquant le fait que l'oeuvre de l'artiste M______ ne figurait pas parmi les pièces retrouvées à W______, a invité E______ à indemniser son mandant pour le vol de cette oeuvre, sous réserve des autres prétentions qui étaient maintenues, tant que les autres objets retrouvés n'auraient pas pu être identifiés. Il reprochait à l'assureur son silence obstiné.

vv. Par courrier du 12 janvier 2009, l'assureur a réfuté une nouvelle fois toute accusation d'inactivité, observant que c'était au contraire feu A______ qui avait refusé que l'assureur puisse participer activement à la procédure française et qui lui avait interdit la consultation des objets retrouvés.

ww. Dans le cadre d'un échange de courriers des 15 janvier et 10 février 2009, le principe d'une rencontre au domicile de feu A______ a été décidé, à la condition formulée par E______, que la rencontre ait lieu au plus tard à fin mars 2009 et que, préalablement, l'autorisation lui soit donnée d'accéder au dossier pénal en France afin de pouvoir examiner les objets retrouvés.

xx. Le 16 février 2009, l'ancien conseil de feu A______ a acquiescé à la requête de E______ et indiqué solliciter de l'autorité française l'autorisation de transmettre dans son intégralité le dossier à l'assureur. Pour le surplus, il a relevé que la juge d'instruction française s'opposait toujours à donner accès aux objets retrouvés à son client, dès lors que la personne mise en examen entendait que la saisie soit maintenue.

yy. Le 12 mars 2009, ce même conseil, après avoir questionné son confrère français, a informé E______ qu'il ne pouvait pas lui faire remettre une copie du dossier.

Le même jour, l'assureur a avisé feu A______ que la juge d'instruction française avait accepté qu'il examine sur place les objets retrouvés, pour autant qu'il obtienne l'autorisation à cet effet de son assuré.

zz. Par courrier du 3 avril 2009, l'assureur a indiqué à l'ancien conseil de feu A______ qu'il constatait une absence de volonté sérieuse de l'assuré de collaborer à l'avancement de l'instruction du dossier, de sorte qu'il se voyait dans l'obligation de refuser le versement d'une indemnité.

aaa. Par courrier du 8 avril 2009, l'ancien conseil de feu A______ a notamment informé E______ que compte tenu de la position adoptée par celle-ci dans le courrier du 3 avril 2009, il lui faisait notifier une poursuite, "notamment afin d'éviter toute question de prescription".

bbb. Le 14 avril 2009, une réquisition de poursuite de feu A______, pour le montant de 1'000'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 12 avril 2009, datée du 8 avril 2009, est parvenue à l'Office des poursuites du canton de Genève à l'encontre de E______.

Il ressort de deux mémos, datés du 8 avril 2009, que l'ancien conseil de feu A______ a, d'une part, sollicité de l'office précité qu'il lui retourne l'un des deux exemplaires de réquisition de poursuite tamponné au moyen de l'enveloppe timbrée annexée et, d'autre part, transmis à feu A______ la copie de la réquisition de poursuite et du courrier adressé à E______ le même jour.

Le Tribunal a entendu deux témoins sur la question de l'envoi de la réquisition de poursuite datée du 8 avril 2009, tamponnée le 14 avril 2009 par l'Office des poursuites de Genève. Tant AK______, secrétaire de l'ancien avocat de feu A______, que AL______, gendarme, apprenti dudit avocat au moment des faits, ont déclaré avoir accompli des tâches en lien avec le dossier litigieux sans pouvoir préciser lesquelles.

La première a déclaré au Tribunal que son employeur avait une exigence stricte, qu'elle avait elle-même toujours respectée, s'agissant de l'envoi du courrier, à savoir que celui signé par son employeur devait être expédié le jour même. Dans le cas où un courrier ne pouvait être expédié le jour même, même par hypothèse le lendemain, le courrier était modifié avec la nouvelle date, de sorte que la date indiquée sur un courrier correspondait toujours à la date d'expédition effective. Lorsqu'il n'y avait que des plis simples, ils étaient déposés dans la boîte aux lettres située en bas de l'immeuble avant la levée de 17h00-17h30. S'il y avait des envois recommandés, ils étaient déposés à la Poste avec les plis simples du même jour. Il lui semblait que les réquisitions de poursuites adressées à l'Office des poursuites étaient postées en pli simple, toujours en courrier A.

Le second a indiqué que les courriers signés étaient toujours expédiés le jour-même. Pour le cas où un pli ne pouvait être expédié le jour-même, le courrier était refait le lendemain avec l'indication de la nouvelle date, ainsi la date que portait le courrier correspondait toujours à sa date d'expédition. Quand il y avait des plis recommandés, il se chargeait d'apporter les plis à la Poste. Les rares fois où il n'y avait pas de plis recommandés, il glissait les plis simples dans la boîte aux lettres proche de l'étude. Il devait être fait en sorte de déposer ces courriers avant l'heure de la dernière levée en fin d'après-midi. S'il constatait que l'heure de levée était passée, il se rendait toujours à la Poste les déposer. Il n'avait jamais pris la décision de glisser les plis dans la boîte aux lettres dans une telle hypothèse.

ccc. Le 14 mai 2009, E______ s'est vu notifier un commandement de payer dressé par l'Office des poursuites du canton de Zurich le 13 mai 2009; elle y a formé opposition le 19 mai 2009.

ddd. Par courrier du 25 mai 2009, E______ a maintenu son refus d'indemniser l'assuré et déclaré, au surplus, que la créance de ce dernier était prescrite depuis le 13 avril 2009.

eee. Le 19 mai 2009, E______ a dénoncé les faits au Ministère public et sollicité l'ouverture d'une instruction pénale pour faux dans les titres, escroquerie et tentative d'escroquerie. Une procédure a été ouverte sous n° P/4______/2009. Celle-ci, instruite de manière non-contradictoire, a été suspendue à plusieurs reprises dans l'attente de l'issue de la procédure n° P/3______/2007 pour finalement être classée par ordonnance du 26 janvier 2015.

D. a. Par demande déposée en conciliation le 12 octobre 2010, déclarée non conciliée le 15 décembre 2010, puis introduite au Tribunal le 11 janvier 2011, feu A______ a assigné E______ en paiement d'un montant de 150'240 fr., plus intérêts moratoires, soit la contrevaleur de la somme de 120'000 USD à laquelle l'oeuvre "N______" de M______ avait été estimée au moment de la conclusion du contrat.

b. E______ ayant soulevé l'exception de prescription, le Tribunal a, par jugement JTPI/13515/2011 du 15 septembre 2011, débouté l'assureur de ses conclusions relevant, d'office, que ce dernier avait commis un abus de droit en soulevant cette exception: compte tenu des circonstances dans lesquelles s'étaient déroulées les relations entre l'assureur et feu A______, ce dernier pouvait croire que E______ l'indemniserait dès réception des renseignements requis; partant, il ne devait pas s'attendre à un refus de l'assureur et donc n'avait pas à prendre des mesures pour interrompre la prescription.

c. Par arrêt ACJC/668/2012 du 11 mai 2012, la Cour de justice a annulé ce jugement considérant que les conditions de l'abus de droit ne pouvaient être examinées d'office et qu'en tout état de cause leur réalisation faisait en l'espèce défaut. Partant, la cause était retournée au Tribunal dès lors que la résolution de la question de la prescription dépendait de deux éléments de faits contestés par les parties, à savoir la détermination de la date du sinistre et celle de l'envoi de la réquisition de poursuite.

d. Suite à cet arrêt, l'instruction de la cause a été reprise. D'accord entre les parties qui se sont déclarées en faveur du prononcé d'un seul jugement, l'instruction a porté à la fois sur l'exception de prescription et sur le fond.

e. Feu A______ a déposé le 15 février 2013 des "conclusions motivées et en amplification de la demande" afin de tenir compte, en sus du "N______", des pièces volées à son domicile qui n'avaient pas été retrouvées à l'issue de la procédure pénale dirigée contre X______.

Il a ainsi fourni la liste définitive de 41 objets, représentant une valeur totale de 712'000 fr. dont il demandait l'indemnisation en sus du "N______". Cette liste avait été établie par G______ qui avait eu accès aux pièces saisies par les autorités françaises et pu les comparer avec les objets d'art portés sur la liste qu'il avait lui-même établie en 1993. De cette analyse comparative, il ressortait que les 41 objets listés ne figuraient pas parmi les objets saisis; par ailleurs 16 objets saisis ne figuraient pas dans la liste initiale. S'agissant du "N______", feu A______ a précisé que sa contrevaleur correspondait à 183'000 fr. et non 150'240 fr. comme indiqué dans sa demande qui se fondait, par erreur, sur une valeur en dollars américains alors que l'expertise de [la société] O______ articulait un montant en euros.

Au vu de ces éléments, feu A______ a amplifié sa demande d'un montant complémentaire de 745'360 fr., portant ainsi ses conclusions en paiement à 895'000 fr., plus intérêts moratoires à 5% l'an dès le 12 avril 2007.

f. Dans sa réponse, E______ a conclu au déboutement de feu A______ de toutes ses conclusions et persisté à exciper de la prescription des prétentions réclamées.

g. Le Tribunal a entendu les parties et des témoins, organisé un transport sur place et ordonné l'apport des procédures pénales suisses. La procédure pénale française a été versée au dossier par feu A______. Les éléments essentiels à la compréhension du litige ont été intégrés ci-dessus. Pour le surplus, il en ressort encore les éléments pertinents suivants:

g.a P______ a d'emblée indiqué avoir discuté des faits de la cause avec feu A______ et son fils avant son audition. Il a également confirmé que, du temps où il conduisait encore des véhicules, feu A______ n'était pas un bon conducteur.

g.b D______ a déclaré connaître la procédure pour avoir eu des contacts avec les conseils successifs de son père et avoir pris connaissance de la demande en paiement et du mémoire réponse.

h. Les parties ont déposé leurs conclusions après enquêtes le 6 décembre 2017, qu'elles ont plaidées à l'audience du 12 décembre 2017.

Feu A______ a persisté dans ses conclusions amplifiées. E______ a également persisté dans ses conclusions, y compris s'agissant de la prescription.

i. Le Tribunal a gardé la cause à juger à l'issue de l'audience de plaidoiries finales du 12 décembre 2017.

E. Dans le jugement entrepris, le Tribunal a considéré que les oeuvres avaient été enlevées entre le 5 et le 12 avril 2007 sans préciser la date exacte. La thèse de feu A______ selon laquelle le vol aurait été perpétré à son insu avait été sérieusement ébranlée par les éléments recueillis suite à l'arrestation de X______ en France. Les déclarations de ce dernier apparaissaient propres à remettre en cause la réalité d'un vol commis au préjudice de feu A______ au vu de l'exactitude et du nombre important de détails factuels donnés par l'intéressé. La thèse de E______ selon laquelle le vol avait été commandité par feu A______, avait été confirmée par X______ alors qu'il n'avait aucun bénéfice à maintenir de telles révélations. Cette thèse apparaissait ainsi tout aussi plausible que celle d'un vol perpétré à l'insu de feu A______, de sorte que ce dernier avait échoué à apporter la preuve du sinistre qui lui incombait et devait être débouté de ses prétentions. Compte tenu de l'issue du litige, le Tribunal a laissé la question de la prescription ouverte.

EN DROIT

1. Aux termes de l'art. 405 al. 1 CPC, entré en vigueur le 1er janvier 2011, les recours sont régis par le droit en vigueur au moment de la communication de la décision entreprise.

En l'espèce, le jugement attaqué a été communiqué aux parties après le 1er janvier 2011, de sorte que le nouveau droit de procédure est applicable en seconde instance.

En revanche, la demande en paiement ayant été introduite avant l'entrée en vigueur des nouvelles règles de procédure civile, la première instance demeure régie par l'ancien droit de procédure genevois (art. 404 al. 1 CPC), à savoir essentiellement la aLPC. De même, l'examen, par la Cour, de l'application faite par le premier juge de ce droit, se fera à l'aune de cette dernière législation (ATF 138 III 512 consid. 2.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_111/2016 du 24 juin 2016 consid. 3.2; Tappy, Le droit transitoire applicable lors de l'introduction de la nouvelle procédure unifiée, in JdT 2010 III 11, p. 38-39; Willisegger, Commentaire bâlois du CPC, 3ème éd. 2017, n. 15 ad art. 405 CPC).

1.1 L'appel a été interjeté auprès de l'autorité compétente (art. 120 al. 1 let. a LOJ), dans le délai utile de 30 jours (art. 311 al. 1 CPC) à l'encontre d'une décision finale (art. 236 et 308 al. 1 let. a CPC) rendue dans le cadre d'une affaire patrimoniale dont la valeur litigieuse est supérieure à 10'000 fr. (art. 91 ss et 308 al. 2 CPC) et selon la forme prescrite par la loi (art. 130, 131 CPC), de sorte qu'il est recevable sur ces points.

1.2 L'intimée conteste la qualité pour recourir de l'Hoirie.

1.2.1 En l'absence d'aliénation de l'objet du litige, la substitution de partie est subordonnée au consentement de la partie adverse; les dispositions spéciales prévoyant la succession d'un tiers aux droits ou obligations des parties sont réservées (art. 83 al. 4 CPC). Cette hypothèse recoupe tous les cas de succession à titre universel qui, par définition, ont pour conséquence un changement de légitimation survenant par le seul effet de la loi et sans que la volonté des parties ne joue de rôle. Dans la mesure où le droit matériel seul induit un tel changement de légitimation, le juge n'a pas d'autre choix que de prendre acte de la substitution de partie qui en découle. Ces hypothèses recoupent les cas de succession à titre universel, à l'instar de l'ouverture de la succession d'un plaideur (art. 560 al. 1 CC; arrêt du Tribunal fédéral 4A_215/2009 du 6 août 2009 consid. 3.1; Jeandin, Commentaire romand, Code de procédure civile, 2ème éd., 2019, n. 28 et 29 ad art. 83 CPC).

En cas de succession légale, la déclaration expresse d'une partie n'est pas nécessaire pour que la désignation des parties soit adaptée. Il suffit que le tribunal ait connaissance de la succession et accorde aux parties le droit d'être entendues (arrêt du Tribunal fédéral 5A_256/2016 du 9 juin 2017 consid. 3.2 non publié in ATF 143 III 297).

1.2.2 En l'espèce, au décès de feu A______, ses héritiers se sont substitués à lui automatiquement en qualité de parties à la procédure, sans que la Cour ou les parties n'aient à effectuer une démarche en vue de cette substitution, intervenue ex lege. Contrairement à ce que prétend l'intimée, l'Hoirie est composée de tous les héritiers du défunt tel que cela ressort du certificat d'héritiers produit en appel, soit ses fils, B______, C______ et D______. L'appel ayant été formé par tous les membres de l'Hoirie, il est également recevable sous cet angle.

Par souci de clarté, B______, C______ et D______ seront désignés ci-après "les appelants" et feu A______ sera désigné ci-après le "demandeur".

1.3 La Cour revoit la cause avec un pouvoir de cognition complet (art. 55 al. 1, 58 al. 1 et 310 CPC).

1.4
1.4.1
Conformément à la jurisprudence, une rectification de la désignation des parties est admissible si tout risque de confusion peut être exclu (ATF 136 III 545 consid. 3.4.1 in JdT 2012 II 439; arrêt du Tribunal fédéral 4A_116/2015 du 9 novembre 2015 consid. 3.5.1 à 3.5.3 in ATF 141 III 539). Tel est le cas lorsqu'il n'existe dans l'esprit du juge et des parties aucun doute raisonnable sur l'identité de la partie, notamment lorsque l'identité résulte de l'objet du litige. Cela présuppose que la requête de conciliation, respectivement la demande, aient été effectivement communiquées à la partie qui a la qualité pour défendre, et non à un tiers, en d'autres termes qu'elle en ait eu connaissance, à défaut de quoi il n'est évidemment pas possible de lui imputer qu'elle aurait compris ou dû comprendre, selon les règles de la bonne foi, que l'action a été ouverte contre elle (ATF 142 III 782 consid. 3.2.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_242/2016 du 5 octobre 2016 consid. 3.4 in ATF 142 III 623).

Cette rectification peut intervenir d'office (arrêt du Tribunal fédéral 4A_43/2017 du 7 mars 2017 consid. 1.1).

1.4.2 En l'espèce, tant la requête de conciliation du 12 octobre 2010 que la demande en paiement du 11 janvier 2011 sont dirigées contre E______, conformément à l'inscription de cette société auprès du Registre du commerce. C'est aussi sous E______ que l'intimée s'est présentée dans ses écritures et les avis du greffe, ordonnances, jugement et arrêts transmis aux parties en première et deuxième instances ont également été adressés à E______.

Le fait que, dans le jugement attaqué, l'intimée soit désignée en tant que "E______" semble ainsi procéder d'une erreur de plume.

Il convient, par conséquent, de rectifier d'office la qualité de l'intimée en E______.

2. Les parties ont produit de nouvelles pièces et allégué des faits nouveaux en appel.

2.1 Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et moyens de preuve ne sont pris en compte qu'aux conditions suivantes : ils sont invoqués ou produits sans retard (lit. a) et ils ne pouvaient être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de la diligence requise (lit. b).

Selon la pratique, il faut distinguer les vrais nova des pseudo nova. Les vrais nova sont des faits et moyens de preuve qui ne sont survenus qu'après la fin des débats principaux de première instance. En appel, ils sont en principe toujours admissibles, pourvu qu'ils soient invoqués sans retard dès leur découverte. Les pseudo nova sont des faits et moyens de preuve qui étaient déjà survenus lorsque les débats principaux de première instance ont été clôturés. Leur admissibilité est largement limitée en appel, dès lors qu'ils sont irrecevables lorsqu'en faisant preuve de la diligence requise, ils auraient déjà pu être invoqués dans la procédure de première instance (arrêts du Tribunal fédéral 5A_621/2012 du 20 mars 2013 consid. 5.1; 4A_662/2012 du 7 février 2013 consid. 3.3).

2.2 En l'espèce, les photographies non datées produites par les appelants à l'appui de leur appel sont irrecevables, de même que les faits qui s'y rapportent, puisqu'il n'est pas établi qu'elles n'auraient pas pu être transmises au premier juge. Il en va de même des pièces qu'ils ont produit à l'appui de leur réplique et des faits y relatifs. En effet, celles-ci sont soit non datées, soit antérieures au jugement querellé et les appelants n'expliquent pas en quoi ces pièces n'auraient pas pu être transmises au premier juge. S'agissant des pièces ressortant du dossier pénal français, le Tribunal ayant ordonné l'apport de l'intégralité de ce dossier à la présente procédure, les pièces produites une seconde fois en appel sont recevables ainsi que les faits qu'elles visent.

Il en va de même des autres pièces produites en appel par les parties et des faits qui s'y rapportent puisqu'ils sont postérieurs au jugement entrepris et ont été invoqués sans retard.

Enfin, s'agissant du certificat d'héritier produit par les appelants après que la cause a été gardée à juger par la Cour, dans la mesure où la Cour examine d'office la question de la qualité pour recourir, cette pièce est recevable, étant souligné que le droit d'être entendu de l'intimée a été respecté puisque ledit certificat lui a été transmis le 27 janvier 2021 et qu'elle n'a pas fait usage de son droit inconditionnel à la réplique.

3. L'intimée soulève l'exception de prescription de la prétention des appelants. Les parties s'opposent sur la date de survenance du sinistre ainsi que sur la validité de l'interruption de la prescription opérée par l'ancien conseil du demandeur.

3.1 Selon l'art. 46 al. 1 LCA, les créances qui dérivent du contrat d'assurance se prescrivent par deux ans à dater du fait d'où naît l'obligation.

La prescription de l'art. 46 al. 1 LCA en matière d'assurance vol commence à courir dès la survenance du sinistre (ATF 126 III 278 consid. 7).

3.1.1 Faute de disposition particulière de la LCA en matière d'interruption de prescription, les règles générales du droit des obligations s'appliquent (Brulhart, Droit des assurances privées, 2ème éd., 2017, n. 1128; Carré, Loi fédérale sur le contrat d'assurance, 2000, p. 326).

3.1.2 A teneur de l'art. 77 al. 1 ch. 3 CO, lorsqu'une obligation doit être exécutée ou quelque autre acte juridique accompli à l'expiration d'un certain délai depuis la conclusion du contrat, la dette est échue le jour qui, dans le dernier mois, correspond par son quantième au jour de la conclusion du contrat si le délai est fixé par mois ou par un laps de temps comprenant plusieurs mois (année, semestre, trimestre); s'il n'y a pas, dans le dernier mois, de jour correspondant l'obligation s'exécute le dernier jour dudit mois.

Aux termes de l'art. 132 al. 1 CO, dans le calcul des délais, le jour à partir duquel court la prescription n'est pas compté et celle-ci n'est acquise que lorsque le dernier jour du délai s'est écoulé sans avoir été utilisé.

Selon l'art. 135 CO, la prescription est interrompue lorsque le débiteur reconnaît la dette, notamment en payant des intérêts ou des acomptes, en constituant un gage ou en fournissant une caution (ch. 1) ou lorsque le créancier fait valoir ses droits par des poursuites, par une requête de conciliation, par une action ou une exception devant un tribunal ou un tribunal arbitral ou par une intervention dans une faillite (ch. 2).

La réquisition de poursuite interrompt la prescription dès sa remise à la poste (ATF 104 III 20 consid. 2). Cela vaut même si le commandement de payer n'est jamais notifié au débiteur, parce que la poursuite a été ultérieurement retirée, mais non si la réquisition a été rejetée en raison, par exemple, d'une mauvaise désignation du débiteur, ou que le commandement de payer n'est pas notifié parce que le créancier n'a pas fait l'avance de frais. En revanche, la réquisition adressée à un office incompétent à raison du lieu interrompt la prescription, pour autant que le commandement de payer soit finalement notifié au débiteur et qu'il ne soit pas annulé sur plainte (Stoffel/Chabloz, Voies d'exécution, Poursuite pour dettes, exécution de jugements et faillite en droit suisse, 3ème éd., 2016, n. 100, p. 90; Pichonnaz, Commentaire romand, Code des obligations I, 2012, n. 12 ad art. 135).

3.1.3 A teneur de l'art. 46 al. 1 LP, le for de la poursuite est au domicile du débiteur. Les personnes morales et sociétés inscrites au Registre du commerce sont poursuivies à leur siège social (art. 46 al. 2 LP).

Les règles sur le for de la poursuite sont de droit impératif. Hormis l'élection de for prévue par l'art. 50 al. 2 LP, c'est-à-dire le débiteur qui a élu domicile en Suisse pour l'exécution d'une obligation, il n'y a pas de prorogation de for en matière de poursuite (Gilliéron, Poursuite pour dettes, faillite et concordat, 5ème éd., 2012, n. 423, p. 101).

Les actes de poursuite adressés par un créancier, un débiteur ou un tiers à un Office incompétent en raison du lieu, sont automatiquement transmis par celui-ci à l'Office compétent, et l'acte est censé avoir eu lieu dans le délai légal, si l'Office incompétent a été saisi en temps utiles (art. 32 al. 2 LP; Stoffel/Chabloz, op. cit., n. 38 p. 78 et n. 100, p. 90; Marchand, Précis de droit des poursuites, 2ème éd., 2013, p. 12 et 13).

3.1.4 Selon l'art. 8 CC, chaque partie doit, si la loi ne prescrit le contraire, prouver les faits qu'elle allègue pour en déduire son droit.

Le pli recommandé permet de ménager un moyen de preuve incontestable; la loi n'en impose pas l'usage, mais celui qui y renonce s'expose au risque de voir la date de l'expédition, voire l'expédition elle-même, remise en question (arrêt du Tribunal fédéral 2C_404/2011 du 21 novembre 2011 consid. 2.3).

L'observation de certaines formes pour l'envoi d'une réquisition de poursuite, par exemple l'envoi sous "pli signature", ne constitue pas une condition de sauvegarde du délai. Mais ces formes ont une valeur de preuve qui peut être déterminante en pratique. Le récépissé permet de prouver la date et l'heure de l'envoi, mais la preuve peut aussi être apportée par témoin (ATF 124 V 372 consid. 3b; 109 Ia 183 consid. 3a in JdT 1984 I 317; Stoffel/Chabloz, op. cit., n. 39 p. 78 et note de bas de page n° 32).

En ce qui concerne la date de la remise à la poste, le sceau postal fait foi. Une présomption d'exactitude est attachée à ce sceau. Si l'expéditeur affirme que l'envoi a été remis la veille déjà de la date indiquée par le cachet postal, il doit le prouver; la vraisemblance prépondérante ne suffit pas. L'expéditeur doit être admis à apporter la preuve qu'il a déposé l'acte dans une boîte postale avant la date indiquée par le sceau, notamment par l'audition de témoins. Une telle preuve ne résulte pas de simples allégations de parties, ni de l'apposition de la date par l'expéditeur lui-même au moyen d'une machine à affranchir. La preuve stricte de la remise à la poste dans les délais ne peut pas non plus être considérée comme rapportée par la référence au cours ordinaire des choses quant à la prise en charge des envois par la poste dans les locaux de l'expéditeur, sans indication concrète sur l'envoi en cause (ATF 142 V 389 consid. 3.3 et 3.4; arrêt du Tribunal fédéral 2C_404/2011 du 21 novembre 2011 consid. 2.3).

3.1.5 Sous réserve des cas exceptionnels dans lesquels la loi admet l'ouverture de l'action après l'expiration du délai, parce que de justes motifs rendent le retard excusable, il n'y a pas de restitution des délais de prescription et de péremption (Hohl, Commentaire romand, Code des obligations I, 2012, n. 19-20 ad art. 77 CO).

3.2 En l'espèce, il y a tout d'abord lieu de déterminer la date du fait d'où naît l'obligation, à savoir la survenance du vol - que celui-ci ait été commandité ou non - avant de pouvoir déterminer le dies ad quem du délai de deux ans pour faire valoir la prétention des appelants et d'examiner enfin si ledit délai a valablement été interrompu par l'envoi de la réquisition de poursuite datée du 8 avril 2009 mais timbrée par l'Office des poursuites de Genève le 14 avril 2009.

3.2.1 Selon le Tribunal, la disparition des oeuvres d'art a eu lieu entre le 5 et le 12 avril 2007. Il n'est toutefois plus contesté que l'enlèvement des oeuvres n'a pas pu avoir lieu après le 11 avril 2007.

Les appelants considèrent que le vol est intervenu le 11 avril 2007. Ils se fondent sur le fait que, vers 2h00 du matin, lors de la ronde extérieure de la propriété par la société de sécurité, celle-ci n'a rien remarqué d'anormal, en particulier qu'une porte de garage serait ouverte, ce que R______ a pourtant constaté ce jour-là dans l'après-midi. Dans la mesure où X______ a indiqué que la porte du garage était ouverte lors du vol, les appelants en ont conclu que le vol est intervenu entre le passage de la société de sécurité et celui de R______ le même jour.

L'intimée soutient que la date du sinistre ne peut être établie avec certitude à moins de croire les affirmations de X______, lequel place l'évènement le lundi de Pâques 2007, soit le 9 avril 2007. Cette date serait rendue hautement vraisemblable du fait qu'aucune trace des "voleurs" n'a été relevée malgré la pose d'un nouveau revêtement au chemin 1______ les 10 et 11 avril 2007. Il ne serait pas non plus exclu que l'évènement litigieux se soit déroulé les 6, 7 ou 8 avril 2007.

Il y a lieu de relever tout d'abord que l'un des appelants, D______, entendu par le Tribunal à titre de renseignement, a déclaré s'être chargé personnellement de fermer le garage avant de partir en vacances le 5 avril 2007. Cela étant, il a également reconnu avoir pris connaissance de la demande en paiement et du mémoire réponse de l'intimée, ce qui affaiblit ses propos, étant encore relevé qu'il a été entendu à titre de renseignement par le Tribunal et qu'il est devenu partie à la procédure depuis le décès de son père. En outre, contrairement à ce qu'a pu constater le Tribunal sur place, au moment des faits litigieux, la porte du garage n'était pas munie d'une alarme, ce de l'aveu même du demandeur à la police judiciaire genevoise, de sorte que l'attention de la société de sécurité n'a pas pu être attirée par une sonnerie d'alarme. A cet égard également, les rondes de surveillance étaient effectuées à l'extérieur de la propriété et la zone du garage ne ressort pas clairement du relevé de passage versé à la procédure, qui ne mentionne que "boitier clés portail", "vitre annexe villa" - dont on ignore à quoi cela correspond - "cabane bord du lac" et "vitre villa principale". Il n'a pas été établi que les clés des portails de la propriété avaient été remises à l'entreprise de sécurité, de sorte qu'il n'est pas clair si l'entreprise de sécurité pouvait accéder à l'intérieur de la propriété ou non. De surcroît, le Tribunal a constaté sur place que n'était visible depuis le chemin 1______ que la lucarne fermée par une grille, située en haut de la remise attenante au garage. Il n'a, en d'autres termes, pas constaté que la porte du garage était visible depuis l'extérieur de la propriété, étant relevé que le portail mesure plus de 1 mètre 80 de hauteur et que le mur en béton bordant la propriété s'élève à 1 mètre 65.

Au vu de ce qui précède, il ne peut pas être exclu que la porte du garage soit restée ouverte dès le départ en vacances du propriétaire des lieux et de son fils et que la société de sécurité ne l'ait pas vu, de sorte que l'évènement litigieux ne s'est pas forcément déroulé le 11 avril 2007 comme le prétendent les appelants.

S'agissant de la pose du nouveau revêtement du chemin 1______, celui-ci est intervenu le 12 avril 2007 et non les 10 et 11 avril 2007 comme le soutient l'intimée. Durant les deux jours précités, seuls des travaux de préparation étaient effectués, n'ayant au demeurant pas nécessité la fermeture du chemin susmentionné à la circulation. Ces éléments ne permettent ainsi pas non plus de dater plus précisément l'évènement litigieux.

En ce qui concerne les déclarations de X______ des 30 septembre 2008 et 3 mars 2009, il y a lieu de relever à titre liminaire que nonobstant le fait que celui-ci ne se trouvait pas sur les lieux au moment de l'évènement litigieux, il a pris part à la préparation de celui-ci et a été, de ce fait, mis au courant par l'auteur présumé des faits, soit feu AB______, de la date de l'enlèvement des oeuvres, soit le 9 avril 2007 entre 7h00 et 7h15. Il a par la suite confirmé cette date à plusieurs reprises.

Au vu de ce qui précède, il y a lieu de retenir que l'évènement litigieux a eu lieu le 9 avril 2007, de sorte que le dies a quo du délai de deux ans de prescription de la créance des appelants envers l'intimée a commencé à courir le mardi 10 avril 2007 à 00h01 et s'est achevé le jeudi 9 avril 2009 à minuit, sauf à avoir été valablement interrompu, ce qui sera examiné ci-dessous (cf. infra consid. 3.2.2).

Cela étant, même à retenir, à l'instar de ce qu'a fait le Tribunal, que la disparition des oeuvres est intervenue à une date indéterminée mais située entre le 5 et le 11 avril 2007, la créance des appelants est prescrite comme il le sera exposé ci-après.

3.2.2 Les appelants soutiennent avoir adressé le 8 avril 2009 à l'Office des poursuites de Genève la réquisition de poursuite datée du même jour, laquelle porte le timbre humide de cet Office du 14 avril 2009.

A titre liminaire, il y a lieu de relever que le fait que la réquisition de poursuite a été envoyée à l'Office des poursuites de Genève, soit un office incompétent à raison du lieu - le siège de l'intimée se trouvant à Zurich et l'élection de for dans le contrat d'assurance n'étant pas valable pour l'exécution d'une obligation -, ne permet pas encore de constater que cette réquisition ne permettrait pas d'interrompre la prescription. En effet, bien qu'aucune des parties ne l'allègue, il apparaît que l'Office des poursuites de Genève a d'office, selon toute vraisemblance, transmis la réquisition de poursuite à l'office compétent, soit celui de Zurich, puisque le commandement de payer finalement notifié à l'intimée le 14 mai 2009 a été établi par ce dernier et que les appelants n'allèguent pas que le précédent conseil du demandeur aurait envoyé une réquisition de poursuite à l'Office des poursuites de Zurich. Par ailleurs, le commandement de payer zurichois n'a pas été annulé. Ainsi, la réquisition de poursuite datée du 8 avril 2009, reçue par l'Office des poursuites de Genève le 14 avril 2009, est susceptible d'avoir valablement interrompu la prescription, à la condition qu'elle ait bien été envoyée le 8 avril 2009.

A cet égard, bien que figurent au dossier deux mémos datés du 8 avril 2009 ainsi qu'un courrier du même jour de l'ancien conseil du demandeur à l'intimée - tous mentionnant l'envoi d'une réquisition de poursuite à l'Office des poursuites le 8 avril 2009 - ceux-ci ne démontrent pas encore que ladite réquisition aurait effectivement été remise à la poste ce jour-là. Les témoins entendus par le Tribunal n'ont à ce propos pas été en mesure de se prononcer précisément sur l'envoi de cette réquisition de poursuite mais ont uniquement fait état de manière générale des processus suivis par l'étude de l'ancien conseil du demandeur et sur l'envoi, en général, en courrier A des réquisitions de poursuites. Le fait que les deux témoins aient déclaré que les courriers signés étaient systématiquement envoyés le jour indiqué sur ceux-ci n'est pas non plus suffisant pour parvenir à la démonstration que la réquisition litigieuse aurait effectivement été expédiée le 8 avril 2009. En effet, au vu de la jurisprudence précitée, la preuve stricte de la remise à la poste doit être apportée, ce d'autant plus lorsqu'il s'agit d'un envoi effectué par un avocat qui avait conscience du risque de prescription de la créance de son client puisqu'il le mentionnait lui-même dans son courrier à l'attention de l'intimée du 8 avril 2009 suite au refus de celle-ci d'indemniser le demandeur. Ce dernier - et partant son ancien conseil - avait connaissance depuis son audition par la juge d'instruction française le 19 janvier 2009 des aveux de X______ du 30 septembre 2008 et donc de la date de l'évènement litigieux qui serait probablement retenue par les autorités. L'ancien conseil du demandeur avait ainsi aisément pu déduire la date à laquelle la prescription interviendrait, à savoir le 9 avril 2009 à minuit, et devait s'assurer, en vertu de son devoir de diligence, de pouvoir démontrer la date d'envoi de sa réquisition de poursuite interruptive de prescription. Tel n'a pas été le cas, de sorte que le seul élément permettant de démontrer l'envoi - et la réception - de celle-ci à l'Office des poursuites de Genève est le timbre sur ladite réquisition portant la date du 14 avril 2009.

Compte tenu des éléments qui précèdent, la preuve stricte de l'envoi de la réquisition de poursuite à l'Office des poursuites de Genève le 8 avril 2009 n'ayant pas été apportée, la prescription de la créance des appelants à l'encontre de l'intimée, intervenue le 9 avril 2009 à minuit, n'a pas été valablement interrompue.

Même à supposer que l'enlèvement des oeuvres soit intervenu à une date indéterminée entre le 5 et le 11 avril 2009, la réquisition de poursuite timbrée par l'Office des poursuites de Genève le 14 avril 2009 est en tout état tardive.

Par conséquent, l'exception de prescription soulevée par l'intimée est fondée, ce qui entraîne le déboutement des appelants de leurs conclusions.

A titre superfétatoire, comme il sera exposé ci-après, il apparaît que le résultat est le même sur le fond, comme l'a retenu le Tribunal.

4. Les appelants reprochent au premier juge d'avoir retenu que la survenance du sinistre n'était pas démontrée. La vraisemblance de la thèse du vol serait supérieure à celle du cambriolage commandité, invoquée par l'intimée.

4.1 Aux termes de l'art. 8 CC, chaque partie doit, si la loi ne prescrit pas le contraire, prouver les faits qu'elle allègue pour en déduire son droit.

4.1.1 Dans le domaine du contrat d'assurance, la preuve du sinistre incombe à l'ayant droit (ATF 130 III 321 consid. 3.1).

En matière d'assurance, cette preuve étant de nature difficile à apporter, l'exigence de preuve est réduite et il suffit que l'ayant droit établisse une vraisemblance prépondérante (ATF 133 III 81 consid. 4.2.2; 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3). Il y a vraisemblance prépondérante lorsqu'il est possible que les faits pertinents se soient déroulés différemment, mais que les autres possibilités ou hypothèses envisageables n'entrent pas raisonnablement en considération (ATF 130 III 321 consid. 3.; arrêts du Tribunal fédéral 4A_194/2016 du 8 août 2016 consid. 3.1; 4A_193/2008 du 8 juillet 2008 consid. 2.1.2; 4D_73/2007 du 12 mars 2008 consid. 2.2).

L'art. 8 CC donne à l'assureur le droit à la contre preuve. Il peut chercher à démontrer des circonstances qui suscitent des doutes sérieux sur la réalité des faits qui font l'objet de la preuve principale, de manière à faire échouer celle-ci; pour que la contre preuve aboutisse, il suffit que la preuve principale soit ébranlée et que les faits n'apparaissent par conséquent pas comme étant d'une vraisemblance prépondérante; si la contre preuve aboutit, les faits allégués par l'ayant droit ne peuvent pas être tenus pour établis, à savoir comme étant d'une vraisemblance prépondérante, et la preuve principale est mise en échec (ATF 133 III 81 consid. 4.2.2; 130 III 321 consid. 3.4; arrêts du Tribunal fédéral 4A_194/2016 du 8 août 2016 consid. 3.1; 4A_193/2008 du 8 juillet 2008 consid. 2.1.3; 4D_73/2007 du 12 mars 2008 consid. 2.2).

Le Tribunal fédéral a rejeté l'idée selon laquelle, si la contre preuve aboutit, l'ayant droit doit apporter la preuve stricte de la survenance du sinistre; en effet, le juge apprécie globalement, au moment de rendre son jugement, l'ensemble des résultats de la procédure probatoire; au surplus, il n'y aurait aucun sens à charger l'ayant droit d'une preuve stricte qu'il pourrait d'autant moins rapporter qu'il a déjà échoué à établir la vraisemblance prépondérante de ses allégations (ATF 130 III 321 consid. 3.4; arrêts du Tribunal fédéral 4A_194/2016 du 8 août 2016 consid. 3.1; 4A_193/2008 du 8 juillet 2008 consid. 2.1.4). Le juge doit procéder à une appréciation d'ensemble des éléments qui lui sont apportés et, cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (arrêts du Tribunal fédéral 4A_194/2016 du 8 août 2016 consid. 3.1; 9C_189/2015 du 11 septembre 2015 consid. 5.1; 2C_401/2014 du 14 janvier 2015 consid. 3.1).

4.1.2 Sous l'empire de la LPC, le témoignage qui consisterait à rapporter les constatations de fait qu'un autre tiers aurait faites et qu'il aurait transmises à la personne entendue en vue de les rapporter dans la procédure devrait être exclu. En revanche, on devrait pouvoir admettre qu'un témoin rapporte les propos qu'il a entendus tenir par un tiers à l'occasion des faits litigieux (Bertossa/Gaillard/
Guyet/Schmidt, Commentaire de la loi de procédure civile du canton de Genève, n. 5 ad art. 222 LPC).

Celui qui ne sait quelque chose que par ouï-dire n'est pas un témoin adéquat, mais ses déclarations peuvent constituer des indices ou servir, en tant qu'élément de fait auxiliaire, à apprécier d'autres déclarations (arrêts du Tribunal fédéral 5A_51/2014 du 14 juillet 2014 consid. 5.1, 5P_161/2005 du 6 février 2006 consid. 6.3 et 5P_352/2001 du 17 janvier 2002 consid. 6b). Même des déclarations indirectes peuvent en principe constituer des moyens de preuve et être l'objet de l'appréciation des preuves (arrêts du Tribunal fédéral 4A_259/2019 du 10 octobre 2019 consid. 1.3; 4A_189/2018 du 6 août 2018 consid. 3.2.4; 4A_338/2015 du 16 décembre 2015 consid. 5.3.3; 4P.10/2000 du 6 septembre 2000 consid. 1a/bb). Exclure a priori et en bloc le témoin par ouï-dire n'est pas soutenable, ce a fortiori dès lors que le testateur ne peut plus s'exprimer lui-même (arrêt du Tribunal fédéral 5P_148/2003 du 22 juillet 2003 consid. 2.1).

4.2 En l'espèce, les appelants considèrent que de nombreux éléments n'ont pas été pris en compte par le premier juge, lesquels permettraient de constater que la thèse du vol commis à l'insu du demandeur bénéficie d'une vraisemblance prépondérante par rapport à la thèse du vol commandité.

4.2.1 Tout d'abord, selon le Tribunal, la découverte le 31 octobre 2008 de la clé du petit portail de la propriété du demandeur était déterminante, celle-ci se trouvant dans la sphère de disposition de X______, vraisemblablement grâce à la complicité interne au foyer du demandeur, voire du demandeur lui-même puisque ladite clé n'avait jamais été mise en mains de tiers.

Il est en effet établi que personne d'autre, hormis le demandeur, n'a été mis en possession de la clé du petit portail avant les faits litigieux. Le fait que l'assistante du demandeur, R______, a disposé des clés de la propriété ne permet pas de faire le lien entre elle et X______, celle-là ayant en outre toute la confiance du demandeur. Il n'a par ailleurs pas été démontré que la mallette du demandeur, lorsqu'elle a prétendument été dérobée, contenait ladite clé. A ce propos, ce prétendu vol a eu lieu en juin 2008 alors que X______ était déjà incarcéré. La clé ayant été envoyée par un tiers anonyme, l'on peut concevoir que X______ l'ait fait envoyer par un complice, comme il l'a déclaré dans le cadre de l'instruction pénale. En revanche, il apparaît peu probable qu'il ait commandité le vol de la mallette depuis la prison. Il aurait en effet fallu que les voleurs engagés sachent que le demandeur s'absenterait à ce moment-là et qu'il se déplacerait avec la clé du petit portail sur lui, ce alors même qu'il utilise, selon ses propres dires, une télécommande pour ouvrir le grand portail. Un vol totalement indépendant de l'intervention de X______ est encore moins crédible puisqu'on ne voit pas pour quelles raisons les voleurs auraient ensuite envoyé la clé à la juge d'instruction française. Il apparaît ainsi vraisemblable que la clé était dans la sphère de possession de X______ avant le vol de la mallette, comme l'a retenu le premier juge.

C'est ainsi à juste titre que le Tribunal a retenu que la possession de cette clé par X______ avait été possible uniquement grâce à une complicité interne au foyer du demandeur.

4.2.2 Les appelants relèvent que la clé du petit portail n'était d'aucune utilité pour le vol et que l'apparition de cette clé ne servait qu'à exercer une pression sur le demandeur afin qu'il retire sa plainte.

De telles menaces ne permettent pas d'affaiblir la thèse du vol commandité. Au contraire, si le demandeur n'avait rien eu à se reprocher, il n'aurait eu aucune raison de craindre l'exécution de dite menace. Par ailleurs, il n'a pas été démontré que cette clé n'était effectivement d'aucune utilité pour la commission du vol de la collection. On ne peut en effet que difficilement concevoir qu'une centaine de statuettes africaines puissent être transportées sans un véhicule, ce qu'a confirmé le témoin AI______. Ce véhicule a dû, d'une manière ou d'une autre, se retrouver à l'intérieur de la propriété, ce qui implique l'usage d'une clé selon le cours ordinaire des choses. Les hypothèses avancées par les appelants s'agissant du modus operandi des voleurs (i.e. escalade du mur [de 1 mètre 65 de haut] pour ouvrir manuellement le grand portail depuis l'intérieur, ouverture du portail radio-télécommandé des années 70/80 au moyen d'un mode d'emploi qui serait disponible sur Internet, ouverture du grand portail [mesurant 1 mètre 80 de haut] en poussant depuis l'extérieur "en forçant à peine") ne convainquent pas et ne sont aucunement corroborées par le dossier.

Il apparaît dès lors plausible que les auteurs du méfait ont usé de la clé du petit portail pour entrer dans la propriété et, une fois à l'intérieur, ont ouvert le grand portail, lequel s'ouvre notamment en levant manuellement le battant du moteur.

4.2.3 Les appelants reprochent ensuite au Tribunal d'avoir retenu la thèse présentée par X______ alors qu'il ne s'agissait en réalité que d'ouï-dire dans l'optique d'obtenir une réduction de peine et/ou une récompense de la part de l'intimée.

4.2.3.1 Il est vrai que les déclarations de X______ ont considérablement varié durant l'instruction des procédures pénales et qu'en dernier lieu, celui-ci a déclaré n'avoir eu connaissance de toutes les informations dont il a fait état qu'au travers des déclarations de feu AB______. Il est également établi que très rapidement après son arrestation, X______ avait eu connaissance de l'offre de l'intimée de récompenser toute personne susceptible de fournir des éléments utiles à l'enquête. X______ avait également eu connaissance des soupçons de l'intimée, puisqu'ayant eu accès au dossier pénal, il avait pu prendre connaissance des courriers de l'intimée des 15 et 16 avril 2008 à la juge d'instruction française par lequel elle faisait part de ses doutes sur les circonstances du vol. Contrairement à ce que prétend l'intimée, il apparaît vraisemblable que X______ ait eu accès aux coordonnées de l'intimée pour solliciter la récompense que celle-ci promettait. En revanche, il ne ressort pas du dossier que X______ et l'intimée soient entrés en contact avant le mois de février 2009. Selon les déclarations de l'inspecteur des sinistres de l'intimée, les premiers contacts entre l'intimée et X______ n'ont eu lieu qu'en février 2009, soit après les aveux du second du 30 septembre 2008 à la juge d'instruction. Par ailleurs, il apparaît que l'intimée a sollicité l'accès au dossier pénal français encore au mois de mars 2009, indice supplémentaire permettant de constater que l'intimée ne disposait pas encore de la version des faits présentée par X______. De même rien au dossier ne permet de retenir que l'intimée lui aurait spécifiquement promis une récompense et encore moins que cette récompense lui aurait été remise uniquement s'il changeait sa version des faits. Au contraire, ce n'est que deux mois après les premiers contacts précités, soit aux environs du mois d'avril 2009, et après avoir été mis au courant du fait qu'il devait adresser des déclarations écrites auprès de l'intimée et qu'il était, en tout état, hors délai pour prétendre à une récompense, que X______ s'est exécuté en rédigeant le courrier du 24 avril 2009. Il n'avait ainsi aucun intérêt à procéder de la sorte puisque cela le rendait coupable de complicité, voire de co-activité, d'une fraude à l'assurance, faits qui ont d'ailleurs été dénoncés par l'intimée au Ministère public suite à la réception de ce courrier.

Les intérêts de X______, financier ou pénaux, allégués par les appelants ne sont ainsi pas démontrés.

4.2.3.2 Faute d'intérêts, ses déclarations, même si par hypothèse elles ne résultaient que des propos tenus par feu AB______, demeurent crédibles, ce d'autant plus, comme relevé par le premier juge, vu le nombre important de détails dont disposait X______ s'agissant du demandeur et de sa propriété. En effet, tout d'abord, le Tribunal a pu vérifier lui-même l'apparence physique du demandeur puisque ce dernier a été entendu à deux reprises dans le cadre de la présente procédure, étant souligné qu'aucune confrontation dans le cadre de l'enquête pénale n'a pu avoir lieu entre X______ et le demandeur en raison de l'état de santé de ce dernier. Par ailleurs, la configuration des lieux, la présence des photos de la collection dans la remise et des moules de ______ dans les caisses situées dans la remise et sur lesquelles il n'y a aucune inscription, la présence du majordome - et l'origine de celui-ci - durant les vacances de fin d'année, puis son absence pendant les vacances de Pâques, mais surtout la manière de conduire du demandeur et les marques, modèles et couleurs des voitures stationnées dans le garage, sont des éléments qui ne ressortent pas de la procédure pénale française avant les aveux de X______ du 30 septembre 2008. Le seul intervenant pouvant éventuellement fournir quelques-unes de ces informations aurait été l'intimée. Or, comme vu plus haut, il n'y a eu aucun contact entre X______ et l'intimée avant le mois de février 2009, de sorte que celui-là ne peut avoir eu connaissance de ces détails par l'intermédiaire de celle-ci. En outre, le fait que plusieurs personnes étaient au courant de l'absence à Pâques du propriétaire et du majordome et du fait qu'il n'y avait pas d'alarme dans la remise n'est, d'une part, pas démontré. D'autre part, cela n'explique pas comment X______ disposait d'autres informations tout aussi pertinentes et inconnues des personnes externes au foyer, telles les marques, modèles et couleurs des voitures se trouvant dans le garage ou encore le fait que les caisses en bois à l'intérieur de la remise comportaient des moules de ______, alors que, contrairement à ce que prétendent les appelants, aucune inscription sur celles-ci n'a été constatée par le Tribunal. Ainsi, X______ n'a pu avoir connaissance de tous ces détails que grâce à sa propre visite des lieux ou par l'intermédiaire de feu AB______ ou du demandeur lui-même.

4.2.3.3 La lecture du dossier révèle encore que les déclarations de X______, même si elles sont indirectes, correspondent aux éléments résultant des enquêtes menées.

En effet, X______ a relevé que le demandeur avait sollicité de feu AB______ que le "travail" soit bien fait afin que le vol ne soit pas immédiatement constaté. A cet égard, le jardinier, qui a déposé les sacs de bois de marronniers devant la porte de la remise après le départ en vacances du demandeur et de son fils, n'a pas déclaré avoir constaté que les serrures avaient été fracturées, respectivement enlevées, ce qui implique que le vol a nécessairement eu lieu après que les sacs avaient été déposés devant la porte de la remise. Dès lors que l'assistante du demandeur a dû enlever lesdits sacs pour accéder à la remise et constater le vol, il en découle que les voleurs ont non seulement dû enlever les sacs de devant la porte mais également pris le temps, après leur méfait, de les remettre en place.

X______ a également indiqué que le demandeur avait expliqué que les enregistrements vidéos, vu leur vétusté, ne permettraient pas de remonter aux auteurs et, dans le cadre de l'enquête menée, les enregistrements n'ont effectivement pas permis d'obtenir une quelconque information. Il ressort du dossier que seules les personnes internes au foyer du demandeur, voire le demandeur lui-même, avaient connaissance de ce fait. Le fils du demandeur, qui vivait à l'époque avec ce dernier, avait pu constater avec son père quelques temps avant les faits litigieux que le système était désuet.

Au vu de ce qui précède, nonobstant le fait que X______ ait, en dernier lieu, déclaré à la police genevoise qu'il détenait toutes les informations relatives à l'évènement litigieux des récits de feu AB______, ses déclarations demeurent convaincantes au vu de la concordance de ces informations avec les faits constatés dans le cadre de la présente procédure et des procédures pénales.

Il apparaît ainsi que le Tribunal était fondé à prendre en compte les déclarations de X______ dans le cadre de l'appréciation de l'ensemble des preuves, ce d'autant plus que feu AB______ n'a pas pu être entendu pour confirmer ou infirmer ces déclarations.

4.2.4 Les appelants relèvent encore que le demandeur n'avait aucune raison de commanditer son propre vol. Même s'il en avait eu une, il n'aurait pas retrouvé lui-même une partie des pièces volées, éléments qui n'avaient pas été pris en compte par le Tribunal.

Il ressort du dossier qu'au contraire, le demandeur pouvait avoir plusieurs motifs de procéder de la sorte. L'expert G______ et le témoin AJ______ ont confirmé dans le cadre des enquêtes menées par la police et le Tribunal que les oeuvres du demandeur avaient subi une grande dépréciation depuis plusieurs années. Les oeuvres ayant été assurées à une valeur agréée, correspondant au prix d'achat, le demandeur pouvait ainsi obtenir un montant plus important de la part de l'intimée en les déclarant volées que s'il les avait simplement vendues. Le majordome a déclaré que le demandeur avait pour habitude de mettre les objets de valeurs dans la chambre forte de la maison principale, laquelle était sous alarme, de sorte que les autres oeuvres étaient stockées dans la remise qui était dépourvue de système de sécurité. Le demandeur ne les rangeait ainsi pas forcément en fonction de la taille mais en fonction de leur valeur. Celui-ci savait ainsi distinguer les objets ayant une plus grande valeur de ceux qui en avaient une moindre, ce qui impliquait, contrairement à ce que le demandeur a soutenu et à ce que les appelants prétendent, que le demandeur suivait la valeur de sa collection et avait connaissance de la dépréciation de certaines de ses oeuvres. Corollairement, il avait également conscience du fait qu'il pouvait retirer un montant plus élevé en les déclarant volées qu'en les vendant. A cet égard, le demandeur n'a pas établi avoir vendu des pièces à un prix supérieur à celui indiqué dans l'estimation de G______. Par ailleurs, le demandeur n'a pas non plus démontré que sa situation financière était exempte de toutes difficultés. Le seul fait qu'il était propriétaire d'une maison à L______ ainsi que de véhicules de collection ne permet pas encore d'exclure l'hypothèse de difficultés financières, de manque de liquidités, etc.

Dès lors, il ne peut être exclu que le demandeur ait eu des raisons de commanditer son propre cambriolage, ce d'autant plus que celui-ci était uniquement ciblé sur les oeuvres d'art alors que des voitures de collection, stationnées dans le garage - qui était dépourvu d'alarme et dont la porte était grande ouverte - n'ont pas été dérobées.

S'agissant de l'implication du demandeur dans la découverte d'une partie de la collection, cela peut s'expliquer par le fait qu'en retrouvant une partie des oeuvres chez l'expert G______ le 28 février 2008, la plainte pénale suisse qui venait d'être classée le 15 février 2008 - faute de pouvoir établir notamment les objets volés et leurs valeurs - allait être ainsi déclassée. Par ailleurs, le demandeur pouvait avoir besoin de "retrouver" une partie de la collection afin de faciliter l'identification des oeuvres manquantes, ce qui lui permettrait non seulement de récupérer une partie des oeuvres mais aussi de rendre vraisemblable sa thèse du vol commis à son insu et de récupérer auprès de l'intimée la valeur des oeuvres non retrouvés. Dès lors, il n'est pas exclu que le demandeur ait eu tout intérêt à procéder de la sorte.

Même si le Tribunal n'a pas relevé ces éléments, il apparaît que ceux-ci ne sont pas de nature à renverser l'appréciation à laquelle il a procédé, à savoir que la thèse du vol commandité par le demandeur était tout aussi plausible que celle d'un vol perpétré à l'insu du demandeur.

4.2.5 A bien comprendre les appelants, ils relèvent encore que le comportement de X______ serait, contrairement à ce que prétend l'intimée, typique d'un vrai cambrioleur, ce qui renforcerait la thèse d'un cambriolage commis à l'insu du demandeur.

Or, il y a lieu de rappeler que X______ a déposé les oeuvres pour partie auprès d'une maison de vente aux enchères et pour partie auprès d'un expert à W______. D'une part, dans le cas d'un receleur ordinaire, il apparaît qu'il tenterait d'écouler en premier lieu les oeuvres auprès de particuliers et non d'experts ou de maison de ventes aux enchères, par nature plus susceptibles de se rendre compte de l'origine délictuelle des oeuvres. C'est également ce qu'il a indiqué avoir fait et ce qu'a relevé le témoin AJ______ lors de son audition par la police judiciaire genevoise. D'autre part, une pure coïncidence entre le fait que X______ se soit adressé, pour expertiser et vendre une partie des oeuvres à l'expert qui avait estimé les mêmes oeuvres quelques années plus tôt est difficilement concevable dans la mesure où ledit expert n'est pas le seul spécialiste dans le domaine de l'art africain comme le démontre l'existence des diverses expertises versées à la procédure par le demandeur lui-même.

En outre, le fait que X______ avait déjà été condamné par le passé pour recel ne permet d'accréditer aucune des deux thèses. En effet, d'une part, cela peut être interprété comme étant une récidive, sans pouvoir créer de lien avec le demandeur, mais cela peut également s'expliquer par le fait que le demandeur aurait pu vouloir avoir affaire à des "professionnels" pour minimiser les risques de poursuites pénales.

Le comportement de X______ ne permet ainsi pas de rendre davantage vraisemblable la thèse du vol commis à l'insu du demandeur.

4.2.6 Enfin, comme l'a soutenu l'intimée en première instance, il apparaît que le demandeur ne s'est pas montré des plus coopérant durant la procédure tant avec l'intimée qu'avec les autorités.

En effet, malgré les quelques démarches effectuées pour récupérer les photos auprès des anciens assureurs, le demandeur a d'abord refusé de répondre aux questions qui lui étaient posées avant de finalement s'y soumettre. Ensuite, il a clairement indiqué à la juge d'instruction qu'il s'opposait à ce que l'intimée participe à la procédure pénale française. Puis, il a indiqué à l'intimée que la juge d'instruction s'opposait à ce que le dossier pénal lui soit transmis, alors que l'intimée avait eu la confirmation de la juge d'instruction qu'elle pouvait se rendre à W______ pour consulter les objets retrouvés à la condition qu'elle obtienne l'accord du demandeur, accord que l'intimée n'a jamais obtenu. Une telle attitude du demandeur vis-à-vis de l'intimée n'est pas sans faire naître des doutes quant à la vraisemblance de la thèse du vol commis à son insu.

Par ailleurs, le demandeur a allégué qu'il n'avait pas de double des photographies desdits objets alors qu'au moment de l'évènement litigieux, d'une part, il stockait, selon les déclarations de son fils D______, les photographies dans son bureau - et non dans la remise - et, d'autre part, il avait presque terminé l'inventaire qu'il était en train de réaliser, lequel non seulement reprenait l'expertise de G______ pour la faire correspondre aux photos en sa possession mais avait impliqué la prise de nouvelles photos à cette occasion. Ces éléments contradictoires et une telle attitude du demandeur laissent à nouveau apparaître des doutes quant à l'absence d'implication du demandeur dans le cambriolage.

4.2.7 Il découle de l'ensemble des éléments qui précèdent que, comme l'a retenu le Tribunal, la thèse du vol commandité apparaît tout aussi vraisemblable que la thèse du vol commis à l'insu du demandeur.

Partant, les appelants n'étant pas parvenus à apporter une vraisemblance prépondérante de la survenu d'un sinistre couvert par l'intimée, c'est à juste titre que le Tribunal a débouté le demandeur de ses conclusions.

Le jugement querellé sera par conséquent confirmé.

5. Les frais judiciaires d'appel seront arrêtés à 24'000 fr. (art. 17, 13 et 35 RTFMC) et compensés avec l'avance de frais du même montant fournie par les appelants, laquelle reste acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

Eu égard à l'issue de la procédure, les frais judiciaires d'appel seront intégralement mis à la charge des appelants, qui succombent (art. 106 al. 1 CPC).

Ceux-ci seront en outre condamnés, pris solidairement entre eux, à verser à l'intimée, la somme de 20'000 fr., débours et TVA inclus (art. 85 et 90 RTFMC; art. 25 et 26 LaCC), à titre de dépens d'appel.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté par l'hoirie de feu A______, soit pour elle B______, C______ et D______, contre le jugement JTPI/9942/2018 rendu le 26 juin 2018 par le Tribunal de première instance dans la cause C/23454/2010-15.

Au fond :

Confirme le jugement précité.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 24'000 fr., les met à la charge de l'hoirie de feu A______, soit pour elle B______, C______ et D______, et les compense avec l'avance de frais de même montant versée par elle, qui reste acquise à l'Etat de Genève.

Condamne l'hoirie de feu A______, soit pour elle B______, C______ et D______, pris solidairement, à verser 20'000 fr. à E______ à titre de dépens d'appel.

Siégeant :

Madame Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI, présidente; Madame Sylvie DROIN, Monsieur Jean REYMOND, juges; Madame Camille LESTEVEN, greffière.

 

La présidente :

Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI

 

La greffière :

Camille LESTEVEN

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.