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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1025/2024

ATAS/586/2024 du 25.07.2024 ( LAA ) , SANS OBJET

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1025/2024 ATAS/586/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 25 juillet 2024

Chambre 5

 

En la cause

A______

recourante

 

contre

HELVETIA ASSURANCES

intimée

 


EN FAIT

A.      a. Madame A______ (ci-après : l’assurée), née en ______ 1979, a été victime d’un accident en date du 12 mai 2017, alors qu’elle était employée par B______, établissement assuré, pour les accidents professionnels et non professionnels, auprès de HELVETIA ASSURANCES (ci-après : HELVETIA).

b. En date du 2 février 2018, HELVETIA a rendu une décision à laquelle l'assurée s’est opposée en date du 5 mars 2018.

B. Suite à une expertise bi-disciplinaire, HELVETIA a retiré sa décision du 2 février 2018 par courrier du 22 décembre 2023. Dans le même courrier, elle a exposé à l’assurée que, dès lors qu’elle avait bénéficié de prestations de l’Hospice général (ci‑après : l'hospice) ainsi que de la caisse de chômage, la prise en charge de ses indemnités journalières n’était prise en compte que jusqu’au 31 mai 2021, car l’assurance devait prendre contact avec l’hospice et la caisse de chômage afin d’examiner si d’éventuelles retenues devaient être opérées en leur faveur, avant le versement des indemnités journalières à l’assurée. Elle s’enquérait également du compte bancaire sur lequel le paiement devait être effectué et indiquait, au surplus, qu’une nouvelle décision serait notifiée à l’assurée en temps opportun, concernant un éventuel droit à d’autres prestations d’assurances.

C. a. Par courrier posté le 25 mars 2024, l’assurée a saisi la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans) d’un recours pour déni de justice. Se fondant sur le rapport d’expertise rendu en date du 20 mai 2021, l’assurée constatait qu’elle avait droit à des indemnités journalières du 1er février 2019 au 31 mai 2021 à tout le moins, et que lesdites indemnités n'avaient pas été versées par HELVETIA, pas plus que l’indemnité pour atteinte à l’intégrité physique (ci-après : IPAI) sur laquelle HELVETIA devait statuer. Elle joignait en annexe un courrier de son avocat du 4 décembre 2023, mettant en demeure HELVETIA de rendre une décision sujette à opposition d'ici au 31 décembre 2023, puis un courrier de son avocat du 23 janvier 2024, par lequel ce dernier demandait à l’assurance de rendre, dans les meilleurs délais, une décision formelle de prise en charge des indemnités journalières du 1er février 2019 jusqu’au 30 janvier 2024, communiquant le compte bancaire sur lequel lesdites indemnités journalières devaient être versées.

b. Par réponse du 17 mai 2024, l’intimée a rappelé qu’elle s’était déjà prononcée dans son courrier du 22 décembre 2023, par lequel elle retirait sa décision du 2 février 2018 et exposait devoir prendre contact avec la caisse de chômage et l’hospice. La caisse de chômage avait informé HELVETIA, par courrier du 2 février 2024, que le total des prestations qu'elle avait versées à l’assurée s’élevait à CHF 8'293.80 et par courrier du 7 mai 2024, l'hospice avait informé HELVETIA du montant global de l'aide financière qu’il avait accordée à l’assurée. Pour ces raisons, l’intimée n’avait pas été en mesure, à la date du recours pour déni de justice, de rendre une décision car les montants versés par l’hospice ne lui avaient pas encore été communiqués. En ce qui concernait l’IPAI, l’intimée a rappelé que dans son courrier du 22 décembre 2023, elle avait informé la recourante que ladite décision lui serait notifiée « en temps opportun ». Au surplus, l’intimée avait appris que l’office de l’assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : l’OAI) avait rendu une décision en date du 20 décembre 2023, accordant à l’assurée une indemnité journalière pour la période entre le 22 janvier et le 21 avril 2024. Vu les mesures en cours auprès de l’OAI, l’intimée alléguait ne pas pouvoir procéder à l’examen d’un éventuel droit à une rente LAA. Enfin, HELVETIA informait la chambre de céans que par décision du 16 mai 2024, elle avait pris formellement la décision d’allouer à la recourante un montant de CHF 109'704.77, qui représentait les indemnités journalières pour la période allant du 1er février 2019 au 31 mai 2021, après déduction des prétentions dues à la caisse de chômage et à l’hospice, étant précisé que les intérêts moratoires sur les indemnités journalières, par CHF 4'159.15, avaient également été versés à la recourante, de même qu’un montant de CHF 7'410.- au titre de l’IPAI. Enfin, il avait été décidé qu’aucune rente invalidité n’était allouée à la recourante.

c. Invitée à répliquer par courriers des 23 mai et 13 juin 2024, l’assurée n’a pas réagi.

d. Par courrier du 1er juillet 2024, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

e. Par courrier du 4 juillet 2024, HELVETIA a informé la chambre de céans que la recourante s’était opposée à la décision du 16 mai 2024.

f. Les autres faits et documents seront mentionnés, en tant que de besoin, dans la partie « en droit » du présent arrêt.

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 5 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-accidents du 20 mars 1981 (LAA - RS 832.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.        En vertu de la LPGA, un recours peut être formé lorsque l'assureur, malgré la demande de l'intéressé, ne rend pas de décision ou de décision sur opposition (art. 56 al. 2 LPGA).

Selon la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), lorsqu’une autorité mise en demeure refuse sans droit de statuer ou tarde à se prononcer, son silence est assimilé à une décision (art. 4 al. 4 LPA). Une partie peut recourir en tout temps pour déni de justice ou retard non justifié si l’autorité concernée ne donne pas suite rapidement à la mise en demeure prévue à l’art. 4 al. 4 (art. 62 al. 6 LPA).

En l’espèce, le recours pour déni de justice, interjeté par-devant l’autorité compétente (art. 58 al. 1 LPGA), est recevable.

3.         

3.1 Aux termes de l'art. 29 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable.

Le droit de recours de l'art. 56 al. 2 LPGA sert à mettre en œuvre l'interdiction du déni de justice formel prévue par l'art. 29 al. 1 Cst. Le retard injustifié à statuer, également prohibé par l'art. 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) - qui n'offre à cet égard pas une protection plus étendue que la disposition constitutionnelle (ATF 103 V 190 consid. 2b) -, est une forme particulière du déni de justice formel (ATF 119 Ia 237 consid. 2).

3.2 Il y a retard injustifié à statuer lorsque l'autorité administrative ou judiciaire compétente ne rend pas la décision qu'il lui incombe de prendre dans le délai prévu par la loi ou dans un délai que la nature de l'affaire ainsi que toutes les autres circonstances font apparaître comme raisonnable (ATF 131 V 407 consid. 1.1 et les références). Entre autres critères sont notamment déterminants le degré de complexité de l'affaire, l'enjeu que revêt le litige pour l'intéressé ainsi que le comportement de ce dernier et celui des autorités compétentes mais aussi la difficulté à élucider les questions de fait (expertises, par exemple ; arrêt du Tribunal fédéral C 53/01 du 30 avril 2001 consid. 2.2), mais non des circonstances sans rapport avec le litige, telle une surcharge de travail de l'autorité (ATF 130 I 312 consid. 5.2 ; 125 V 188 consid. 2a). À cet égard, il appartient au justiciable d'entreprendre certaines démarches pour inviter l'autorité à faire diligence, notamment en incitant celle-ci à accélérer la procédure ou en recourant pour retard injustifié. Si on ne peut reprocher à l'autorité quelques « temps morts », celle-ci ne saurait en revanche invoquer une organisation déficiente ou une surcharge structurelle pour justifier la lenteur de la procédure ; il appartient en effet à l'État d'organiser ses juridictions de manière à garantir aux citoyens une administration de la justice conforme aux règles (ATF 130 I 312 consid. 5.1 et 5.2 et les références). Dans le cadre d'une appréciation d'ensemble, il faut également tenir compte du fait qu'en matière d'assurances sociales, le législateur accorde une importance particulière à une liquidation rapide des procès (ATF 126 V 244 consid. 4a). Peu importe le motif qui est à l’origine du refus de statuer ou du retard injustifié ; ce qui est déterminant, c’est le fait que l’autorité n’ait pas agi ou qu’elle ait agi avec retard (ATF 124 V 133 ; 117 Ia 117 consid. 3a et 197 consid. 1c ; arrêts du Tribunal fédéral I 819/02 du 23 avril 2003 consid. 2.1 et C 53/01 du 30 avril 2001 consid. 2).

3.3 La sanction du dépassement du délai raisonnable ou adéquat consiste d'abord dans la constatation de la violation du principe de célérité, qui constitue une forme de réparation pour celui qui en est la victime. Cette constatation peut également jouer un rôle sur la répartition des frais et dépens, dans l’optique d’une réparation morale (ATF 130 I 312 consid. 5.3 et 129 V 411 consid. 1.3). Pour le surplus, l'autorité saisie d'un recours pour retard injustifié ne saurait se substituer à l'autorité précédente pour statuer au fond. Elle ne peut qu'inviter l'autorité concernée à statuer à bref délai (ATF 130 V 90). L’art. 69 al. 4 LPA prévoit que si la juridiction administrative admet le recours pour déni de justice ou retard injustifié, elle renvoie l’affaire à l’autorité inférieure en lui donnant des instructions impératives.

4.         

4.1 À titre d’exemple, un déni de justice a été admis par la chambre de céans ou antérieurement par le tribunal cantonal des assurances sociales dans un cas où :

- la décision de l'OAI était intervenue cinq mois après son arrêt, lequel rétablissait simplement la rente que l'OAI avait supprimée, car aucune instruction complémentaire n'était nécessaire de la part de l'administration, hormis l'envoi d'un formulaire de compensation (ATAS/859/2006 du 2 octobre 2006) ;

- aucune décision formelle n’avait été rendue neuf mois après la demande en ce sens de l’assuré, faute de mesures d’instruction durant six mois (ATAS/711/2015 du 23 septembre 2015) ;

- l’OAI, neuf mois après un jugement lui ordonnant de mettre en place une expertise, n’avait pas encore entrepris de démarches en ce sens (ATAS/430/2005 du 10 mai 2005) ;

- l’OAI avait attendu quatorze mois depuis l’opposition de l’assuré au projet pour mettre en œuvre une expertise multidisciplinaire à laquelle l’assuré avait conclu d’emblée (ATAS/484/2007 du 9 mai 2007) ;

- aucune décision n’avait été rendue dans un délai de plus de quinze mois depuis la date du rapport d’expertise alors que la demande de précision faite au SMR au sujet de la divergence entre celui-ci et l’expert quant à la capacité de travail du recourant aurait pu être formée plus de six mois auparavant et que le SMR n’avait répondu qu’au bout de huit mois (ATAS/788/2018 du 10 septembre 2018) ;

- l’OAI avait ordonné un complément d’expertise dix-sept mois après avoir obtenu les renseignements des médecins traitants (ATAS/860/2006 du 2 octobre 2006) ;

- une nouvelle décision avait été rendue dix-huit mois après que la cause ait été renvoyée à l’office à la suite de l’admission partielle du recours (ATAS/62/2007 du 24 janvier 2007) ;

- plus d’un an et demi s’était écoulé depuis le rapport d'expertise en possession de l'OAI sans qu’aucune décision n’intervienne et ce, malgré de nombreuses relances du conseil de l’assurée, même si une évaluation du degré d’invalidité avait eu lieu, de même qu’une enquête économique sur le ménage, car on ne voyait pas quelles difficultés particulières justifiaient encore le report d’une décision une fois l’instruction terminée (ATAS/223/2018 du 8 mars 2018) ;

- un recourant qui était sans nouvelle de l’OAI vingt et un mois après le dépôt d’une demande de révision (ATAS/860/2006 du 2 octobre 2006) ;

- l’OAI n’avait rendu aucune décision plus de cinq ans après le dépôt de la demande de prestations et avait notamment tardé à instruire le cas par le biais d’une expertise pluridisciplinaire et à demander l’intégration dans la plateforme SuisseMED@P, alors même qu’il connaissait la longueur des délais pour la mise en place d’une telle expertise, le recourant ayant par ailleurs régulièrement pris contact avec l’intimé pour demander des nouvelles de son dossier (ATAS/1116/2013 du 18 novembre 2013).

En revanche, elle a nié l’existence d’un déni de justice dans un cas où :

- la caisse cantonale de compensation n’avait pas rendu de décision un peu plus de quatre mois après l’opposition de l’assuré, soit dans un délai qui ne violait pas le principe de célérité, ce d’autant plus que le cas ne pouvait pas être qualifié de simple (ATAS/1035/2018 du 7 novembre 2018) ;

- la caisse-maladie n’avait pas rendu de décision neuf mois après l’arrêt de renvoi du Tribunal fédéral pour instruction complémentaire afin d’établir le tarif hospitalier du canton de Bâle, dès lors que l’instruction n’était pas terminée et qu’elle n’avait cessé d’interpeller l’Hôpital universitaire de Bâle à ce sujet (ATAS/1502/2012 du 19 décembre 2012) ;

- l’assurance-accidents n’avait pas versé de prestations à la suite d’une rechute annoncée quinze mois auparavant étant donné que les parties avaient échangé des courriers pendant treize mois dans le but d’aboutir à une solution transactionnelle (ATAS/264/2014 du 5 mars 2014).

4.2 De son côté, le Tribunal fédéral a nié l’existence d'un retard injustifié notamment dans les cas où :

- l’OAI n’avait pas rendu de nouvelle décision un peu moins de onze mois après un arrêt de renvoi pour nouveau calcul du montant de la rente. Il a admis que les prétentions en compensation du service social devaient faire l'objet d'une instruction complémentaire et que se posait également une problématique de chevauchement des indemnités journalières avec le droit à la rente (arrêt du Tribunal fédéral I 241/04 du 15 juin 2006) ;

- il s'était écoulé environ quinze mois entre le moment où l'assurée avait requis la prise en charge de son reclassement professionnel et la décision de la Caisse suisse de compensation. Pendant ce laps de temps, cette autorité avait procédé à une trentaine d'interventions, qui s'étaient échelonnées à un rythme soutenu d'une à plusieurs mesures par mois (envoi de questionnaires, production de pièces, consultation du dossier de l'assurance-accidents, soumission du cas au médecin-conseil, examen de divers problèmes : capacité résiduelle, comparaison des revenus, éventuel droit à une rente). La cause revêtait en outre une certaine complexité en raison de la nationalité et du domicile de l'assurée ainsi que de l'application d'une convention internationale de sécurité sociale (arrêt du Tribunal fédéral 5A.8/2000 du 6 novembre 2000). Le Tribunal fédéral avait rappelé que l'exigence de célérité ne pouvait l'emporter sur la nécessité d'une instruction complète (ATF 119 Ib 311 consid. 5b). Il avait considéré que, tout au plus, on aurait pu reprocher à la Caisse de compensation d'avoir mené ses investigations de façon peu systématique. Il était ainsi étonnant qu'il ait fallu cinq mois pour constituer un dossier complet à l'intention du médecin-conseil. Une étude préalable et approfondie du cas aurait permis d'éviter les démarches ultérieures en complément d'informations et production de radiographies et, partant, de gagner un certain temps. Ces atermoiements n'avaient cependant, à ce stade, pas retardé de façon intolérable la procédure, ce d'autant plus qu'ils étaient en partie imputables à l'assurée (arrêt du Tribunal fédéral 9C_448/2014 du 4 septembre 2014 consid. 4.2) ;

- il y avait eu un intervalle d'environ vingt mois entre le moment où l’OAI avait été en mesure de statuer, soit dans les semaines qui avaient suivi la réception de l'avis du SMR, jusqu'au dépôt du recours. Il a considéré que l’OAI avait activement mené son instruction, ainsi que cela ressortait des rapports médicaux régulièrement versés au dossier jusqu'au dépôt du recours pour déni de justice et que les investigations mises en œuvre n'apparaissaient pas superflues au point de constituer un déni de justice (arrêt du Tribunal fédéral 9C_448/2014 du 4 septembre 2014).

En revanche, il a admis un déni de justice dans un cas où :

- il s'était écoulé un délai de vingt-quatre mois entre la fin de l'échange d'écritures devant la juridiction cantonale et le dépôt du recours pour déni de justice devant le Tribunal fédéral dans un litige qui avait uniquement pour objet le taux d'invalidité du recourant et où celui-ci avait circonscrit son argumentation à deux questions ne présentant pas de difficultés particulières (arrêt du Tribunal fédéral 8C_613/2009 du 22 février 2010) ;

- un tribunal cantonal avait laissé s'écouler vingt-cinq mois entre la fin de l'échange d'écritures et le dépôt du recours pour déni de justice devant le Tribunal fédéral, respectivement plus de trois ans depuis le dépôt du recours cantonal, dans une affaire sans difficultés excessives en matière d'assurance-accidents (arrêt du Tribunal fédéral 8C_176/2011 du 20 avril 2011) ;

- une cause était pendante depuis trente-trois mois et en état d'être jugée depuis vingt-sept mois (ATF 125 V 373).

4.3 La chambre de céans a admis que l’introduction d’un mandat dans la plateforme SuisseMED@P dans un délai de quatre mois après la notification d'un arrêt de renvoi – en dehors de toute complexité de l'affaire – constitue un retard injustifié dès lors que plusieurs dénis de justice avaient déjà été constatés sur une période de trois ans (ATAS/942/2014 du 27 août 2014).

En revanche, elle a considéré que le délai de douze semaines entre la rédaction de l'avis du SMR et l'inscription effective de l'intéressé sur la plateforme informatique SuisseMED@P peut apparaître comme long mais n’est pas excessif (ATAS/93/2018 du 6 février 2018). Le Tribunal fédéral a confirmé que dans un tel cas, il n’y a pas de déni de justice (arrêt du Tribunal fédéral 9C_230/2018 du 4 juin 2018 consid. 3.3).

La chambre de céans a également nié l’existence d’un déni de justice dans un cas où aucune décision quant au centre d’expertises désigné n’était encore intervenue dix mois après que l’OAI ait informé l’assurée de la mise en œuvre d’une expertise médicale pluridisciplinaire car l’introduction du mandat dans le système SuisseMED@P avait été effectuée moins de dix jours après la communication à la recourante. Si un délai de près d’une année pour l’attribution d’un mandat par le biais de cette plateforme apparaissait excessif, ce retard n’était pas imputable à l’intimé (ATAS/237/2014 du 26 février 2014).

5.        Lorsqu’il existe un intérêt actuel au recours au moment où celui-ci est formé, mais qu’il tombe ultérieurement en cours de procédure, le recours pour déni de justice doit être déclaré sans objet et rayé du rôle (ATF 125 V 373 consid. 1).

Lorsqu’un procès devient sans objet, il s’impose de statuer néanmoins sur les frais afférents à la procédure engagée, par une décision sommairement motivée, en tenant compte de l’état de fait existant avant l’événement mettant fin au litige et de l’issue probable de celui-ci (cf. ATF 125 V 373 consid. 2a). Les frais et dépens sont supportés en premier lieu par la partie qui a provoqué la procédure devenue sans objet ou chez qui sont intervenues les causes qui ont conduit à ce que cette procédure devienne sans objet (arrêt du Tribunal fédéral 9C_773/2011 du 30 juillet 2012 consid. 4 et les références). En particulier, des dépens sont dus, en principe, si le grief d'un retard injustifié est avéré (arrêt du Tribunal fédéral 9C_448/2014 du 4 septembre 2014 consid. 3).

 

 

6.         

6.1 En l’occurrence, au vu de la décision rendue le 16 mai 2024 par l’intimée, le recours pour déni de justice est devenu sans objet, de sorte qu'il convient de rayer la cause du rôle.

Le litige porte ainsi uniquement sur le droit de la recourante, dûment représentée devant HELVETIA, à des dépens pour la procédure qu'elle a initiée, en déterminant si l’intimée a fait preuve d’un retard injustifié.

6.2 Dans la motivation de sa décision du 16 mai 2024, l’intimée s’est fondée sur l’expertise en chirurgie orthopédique et en psychiatrie, dont le rapport a été rendu en date du 25 mai 2021. Se fondant sur ladite expertise, l’intimée a considéré que l’état de santé de l’assurée pouvait être considéré comme stabilisé au 31 mai 2021.

On peine à comprendre les raisons pour lesquelles l’intimée a attendu le 22 décembre 2023 pour confirmer à l’assurée qu’elle retirait sa précédente décision du 2 février 2018 et confirmait la stabilisation médicale au 31 mai 2021. Au vu du rapport d’expertise, cette décision pouvait être prise probablement avant la fin de l’année 2021. Partant, le délai supplémentaire de deux ans avant que l’intimée se détermine partiellement, en retirant la précédente décision du 2 février 2018, ne trouve pas de justification.

Ce n’est qu’au début de l’année 2024 que l’intimée a demandé à l’hospice et à la caisse de chômage de lui transmettre les informations financières concernant les prestations qui avaient été versées par ces deux institutions pour la période allant du 31 janvier 2019 au 31 mai 2021. Si l’on peut admettre que l’intimée a dû relancer lesdites institutions afin d’obtenir les informations demandées, transmises respectivement en février puis en mai 2024, il n’existe en revanche aucun motif pouvant expliquer les raisons pour lesquelles ces renseignements n’ont pas été demandés à la suite du rapport d’expertise du 25 mai 2021. Si l’intimée avait agi de manière diligente, lesdites informations lui auraient été transmises, au plus tard, avant la fin de l’année 2021, ce qui lui aurait permis de prendre une décision sur les indemnités journalières à cette période.

S’agissant de l’IPAI, l’intimée s’est fondée sur le taux d’atteinte à l’intégrité retenu dans l’expertise, soit 5%, sans autre mesure d’instruction postérieure, de telle sorte qu’il lui était également possible de se déterminer sur ce point, avant la fin de l’année 2021.

Enfin, bien que cela ne soit pas mentionné dans le recours pour déni de justice, on peine également à comprendre les raisons pour lesquelles une décision sur la rente ne pouvait pas être rendue plus rapidement, dès lors que, selon la motivation de la décision du 16 mai 2024, l’intimée s’est fondée sur le rapport d’expertise du 20 mai 2021 ainsi que sur l’appréciation de son médecin-conseil pour refuser tout droit à la rente ; partant, une décision concernant la rente pouvait également être rendue avant la fin de l’année 2021.

7.         

7.1 Au vu de ce qui précède, la chambre de céans considère que le retard de l’intimée à rendre une décision est injustifié.

7.2 La recourante, qui n'est pas représentée devant la chambre de céans mais qui a démontré avoir déployé des efforts dépassant la mesure de ce que tout un chacun consacre à la gestion courante de ses affaires, en mandatant un avocat afin de relancer l’intimée, a droit à des dépens. Une indemnité de CHF 800.- lui sera accordée à titre de participation à ses frais et dépens, pour les deux lettres de relance rédigées par son conseil (art. 61 let. g LPGA ; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en matière administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]).

7.3 Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. a LPGA).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

A la forme :

1.        Déclare le recours pour déni de justice recevable.

Au fond :

2.        Prend acte de la décision de l’intimée du 16 mai 2024.

3.        Constate que le recours pour déni de justice est devenu sans objet.

4.        Dit que le retard de l’intimée pour rendre sa décision du 16 mai 2024 est injustifié.

5.        Condamne l’intimée à verser à la recourante la somme de CHF 800.- à titre de participation à ses frais et dépens.

6.        Dit que la procédure est gratuite.

7.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Véronique SERAIN

 

Le président

 

 

 

 

Philippe KNUPFER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral de la santé publique par le greffe le