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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3632/2023

ATA/356/2024 du 12.03.2024 ( MARPU ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3632/2023-MARPU ATA/356/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 12 mars 2024

 

dans la cause

 

A______ recourante
représentée par Me Guy BRAUN, avocat

contre

DIRECTION GÉNÉRALE DES FINANCES

et

 

C______ intimées
représentée par Me François MEMBREZ, avocat



EN FAIT

A. a. A______ (ci‑après : A______) est une société anonyme ayant son siège à Zoug, dont le but consiste en la prise et la gestion de participations dans des entreprises en Suisse et à l'étranger, la construction et l'exploitation de panneaux d'affichage et d'autres objets publicitaires, la prise de concessions de publicité et l'utilisation de celles-ci ainsi que l'activité dans tout le domaine des organisations de publicité et de vente et toutes les affaires qui s'y rapportent.

b. B______(ci-après: B______) était une société anonyme ayant son siège à Genève dont le but consistait en la commercialisation et l'exploitation de produits d'information, de publicité et de divertissement sur tout support lié aux médias numériques et aux nouvelles technologies de l'information ainsi que les opérations et participations s'y rapportant.

c. Le 15 septembre 2023, A______ et B______ ont conclu un contrat de fusion, par lequel la première a absorbé la seconde en reprenant l'ensemble de ses actifs et passifs.

Le 29 septembre 2023, cette fusion a été inscrite au registre du commerce de Zoug.

Le 4 octobre 2023, B______ a été radiée du registre de commerce de Genève.

d. C______ (ci-après : C______) est une société anonyme ayant son siège à Zurich dont le but consiste en l'exploitation de tous genres de publicité et en tous lieux.

B. a. Le 7 août 2023, la direction générale des finances, des ressources humaines et des affaires extérieures (ci-après : DGFE), agissant par la Centrale commune d’achats (ci‑après : CCA), a publié sur la plate-forme simap.ch un appel d'offres public portant sur la gestion et le collage de l'affichage politique comprenant la répartition des affiches politiques par lieu d'affichage, la réception, le traitement (identification, comptage, contrôle qualité, stockage), la distribution, le collage et l'entretien des affiches politiques pour les votations et les élections fédérales, cantonales et communales dans le canton de Genève.

Le dossier d'appel d'offres précisait au point 2.6 qu'afin de compléter l'évaluation des offres, chaque soumissionnaire devait effectuer une répartition des affiches dans deux types de situations : l'une ayant trait aux votations fédérales et communales en ville de Genève et l'autre à l'élection du Grand Conseil.

Le cahier des charges (annexe 1) contenait des informations sur la base desquelles chaque soumissionnaire devait réaliser la répartition et établir des tableaux illustrant la répartition ainsi effectuée, si nécessaire accompagnés d'explications.

Selon la rubrique Votation A du cahier des charges concernant l'affichage sur emplacements temporaires en grappes, les affiches des prises de position devaient être présentes, dans un premier temps, dans chacun des 85 lieux d'affichage temporaires, en fonction de la liste récapitulative des prises de position fournie par le service des votations et des élections, selon l'ordre suivant :

i)                   Affiche "Chancellerie" dans chacun des 85 lieux d'affichage temporaires – Affichage de 28 jours ;

ii)                 Affiche de chaque parti politique siégeant au Grand Conseil (pour les votations fédérales et cantonales) et au Conseil municipal pour les votations communales, dans chacun des 85 lieux d'affichage temporaires, dans l'ordre du nombre de leurs sièges respectifs dans chacun de ces conseils. Lorsque deux partis devaient avoir le même nombre de sièges, l'ordre alphabétique devait s'appliquer – Affichage de 28 jours ;

iii)               Affiche de chaque comité d'initiative et référendaire, par lieu d'affichage – Affichage de 28 jours.

Dans une seconde étape, le solde des emplacements temporaires disponibles devait être réparti équitablement entre les autres partis politiques, associations ou groupements, chacun ne pouvant disposer que d'une seule affiche par emplacement - Affichage 2 x 14 jours. Après quatorze jours, une nouvelle répartition serait effectuée afin d'avoir des emplacements différents pour les deux périodes de quatorze jours.

Selon la rubrique Votation B du cahier des charges portant sur l'affichage modulé sur emplacements fixes, ceux-ci se trouvant sur tout le canton seraient répartis équitablement entre les prises de position de tous les partis politiques confondus, associations et groupements. Chaque parti politique, association et groupement devait obtenir le même nombre d'emplacements - Affichage 28 jours.

Selon le chiffre 2.6.3 du dossier d'appel d'offres, la répartition et le calcul du nombre d'affiches seraient évalués et feraient partie intégrante de l'évaluation de l'offre.

Le cahier des charges comprenait un descriptif et les spécificités du service demandé précisant des sous-critères ou éléments d'appréciation, lesquels étaient précédés de trois colonnes intitulées « Impératifs et éliminatoires », « Apprécier et évaluer » et « Pour information ». Chaque sous-critère ou élément d'appréciation était précédé par une croix en fonction des colonnes.

Sous la rubrique intitulée « Conditions de participation » du dossier d'appel d'offres, les soumissionnaires devaient produire au moment du dépôt de l'offre, sous peine d'élimination, des pièces attestant du paiement des assurances sociales, de la signature d'une convention collective de travail, respectivement un engagement à respecter les usages concernant la couverture du personnel en matière de retraite, de perte de gain en cas de maladie, d'assurance-accident et d'allocations familiales, le paiement de l'impôt à la source si le personnel y était soumis, le respect du principe d'égalité des droits entre femmes et hommes et, le cas échéant, prouvant le statut d'indépendant. Devait s'y ajouter, à titre de « condition particulière de participation », une déclaration d'absence de lien avec des personnes ou entreprises présentant un lien avec la Fédération de Russie.

Au titre de « Critères et Preuves d'aptitude » du dossier d'appel d'offres, chaque soumissionnaire devait présenter des garanties de pérennité et de solvabilité de son entreprise en fournissant un extrait récent du registre du commerce, un extrait récent de l'office des poursuites et un bilan ou un chiffre d'affaires des trois dernières années. Il devait également s'engager à respecter les principes du développement durable en signant une déclaration annexée au dossier d'appel d'offres.

b. L'appel d'offres prévoyait trois critères d'évaluation des offres avec leurs pondérations respectives: le critère 1 « Qualité et fiabilité de l’exécution des prestations » (54%), le critère 2 « Prix » (40%) et le critère 3 « Qualité de l’entreprise, soit la contribution à la composante sociale du développement durable et la contribution à la composante environnementale du développement durable » (6%).

c. Dans la rubrique « Coûts de la prestation » du cahier des charges (chiffre 11), le critère du prix était divisé en trois sous-critères ou éléments d'appréciation :

- prix forfaitaire de la prestation d'une affiche F4 pour une période de 14 jours (k1) ;

- prix forfaitaire de la prestation d'une affiche F4 pour une période 28 jours de 28 jours (k2) ;

- prix forfaitaire supplémentaire pour le collage d'une affiche F14 pour une tournée exceptionnelle et supplémentaire en cas de non livraison dans les délais (k3).

d. Le 29 septembre 2023 et dans le délai de soumission, B______ a présenté une offre dont les documents se rapportaient exclusivement à elle, la seule référence à A______ se trouvant dans la lettre d'accompagnement de la soumission qui indiquait que B______ allait prochainement se développer et se renforcer en fusionnant avec le deuxième acteur helvétique du marché d'affichage. Serait ainsi créé un nouvel acteur helvétique de référence de média affichage qui porterait la raison sociale A______.

e. L'offre soumise par B______ contenait en page 47 et suivantes une simulation de répartition d'affiches selon deux situations (exercice A et B), telle que requise par le dossier d'appel d'offres.

f. Par décision du 23 octobre 2023, publiée sur le site simap.ch le 27 octobre 2023, le marché a été adjugé à C______.

g. Le 31 octobre 2023, s'est tenu un entretien avec A______ au cours duquel la CCA a indiqué qu'elle avait utilisé pour l'évaluation du prix une formule au cube et a remis à A______ un tableau complet d'évaluation faisant ressortir l'usage des coefficients de pondération :

-          sous le critère 1 « Qualité et fiabilité de l'exécution des prestations », les éléments d'appréciation I1, I2 et I3 du sous-critère « Personnel et moyens dédiés à la prestation » avaient un coefficient de dix contre deux pour l'onglet « Total de tous les véhicules » ou un pour les autres éléments d'appréciation ;

-          sous le critère 2 « Coûts de la prestation », le sous-critère ou l'élément d'appréciation k2 avait un coefficient de dix contre deux pour k1 et un pour k3 ;

-          le critère 3 « Qualité de l'entreprise » comportait un coefficient identique pour les éléments d'appréciation.

C. a. Par acte expédié le 6 novembre 2023 auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : chambre administrative), A______ a recouru contre la décision d'adjudication. Préalablement, elle a sollicité l'octroi de l'effet suspensif et la production par C______ de son offre. Elle a conclu à l'annulation de la décision d'adjudication et, principalement, à l'attribution du marché en sa faveur, subsidiairement, au renvoi de la cause à l'autorité intimée pour nouvelle évaluation des offres tenant compte d'une « équipondération » des coefficients de pondération prévus dans le tableau d'évaluation établi par l'autorité adjudicatrice et nouvelle décision, plus subsidiairement, à l'organisation d'un nouvel appel d'offres assorti de l'ensemble des paramètres de notation (coefficients de pondération, barème de notes, etc.).

L'autorité intimée n'avait pas annoncé l'existence de coefficients de pondération différenciés, dont l'utilisation avait renversé l'équilibre naturel « équipondéré » des critères posés dans le cahier des charges. Elle ne disposait ainsi pas d'une information essentielle pour construire son offre de prix.

Le recours à ces coefficients différenciés faussait totalement la pondération générale annoncée et favorisait certains facteurs en chargeant le format « 28 jours » d'une pondération cinq fois supérieure au format « 14 jours » (coefficient de dix contre coefficient de deux). Contrairement au bon sens, le format favorisé représentait un volume d'affichage moins important et une dépense moindre pour l'État.

b. Le 22 novembre 2023, l'autorité intimée a fait parvenir une copie de l'offre de l'adjudicataire C______ à la chambre de céans qui l'a transmise à la recourante.

c. Par décision du 2 janvier 2024, la chambre de céans a refusé d'octroyer l'effet suspensif au recours.

d. C______ a conclu à l'irrecevabilité, respectivement au rejet du recours.

En raison de son absorption par A______ et sa radiation subséquente du registre du commerce, B______ ne disposait plus de la personnalité juridique, de sorte que ses actes ne pouvaient plus valablement déployer d'effets. L'offre ne devait pas non plus être considérée comme ayant été déposée par A______ dans la mesure où l'un des signataires n'était pas habilité, à teneur du registre du commerce, à agir en son nom et pour son compte. A______ ne disposait pas de la qualité pour recourir.

Toutes les attestations produites et tendant à démontrer que les conditions de participation et les critères d'aptitude étaient satisfaits concernaient B______ et non la recourante. Par conséquent, l'offre était incomplète.

Il n'était pas exigé de l'autorité adjudicatrice qu'elle communique à l'avance les sous-critères qu'elle utiliserait à l'appui de son évaluation des critères d'adjudication. La prise en compte de sous-critères avec un coefficient de dix contre un pour d'autres n'avait aucune incidence sur l'évaluation des offres des deux soumissionnaires qui avaient par ailleurs obtenu les mêmes notes pour tous les sous-critères en question. La recourante plaidait pour l'utilisation de la méthode de notation linéaire alors qu'elle avait appliqué elle-même la méthode de notation au cube qu'elle critiquait pour démontrer que le marché aurait dû lui être attribué. Le recours à la méthode de notation était admis tant par la jurisprudence que le Guide romand pour les marchés publics. Aucune norme n'imposait à l'autorité adjudicatrice de faire connaître à l'avance la méthode de notation.

e. L'autorité intimée a conclu à l'irrecevabilité, respectivement au rejet du recours.

Les violations du principe de transparence relatives aux critères d'adjudication invoquées par la recourante ne relevaient pas de griefs pouvant être soulevés dans le cadre du recours contre la décision d'adjudication, mais de ceux visant l'appel d'offres pour lequel le délai de recours de dix jours était échu. Le recours était également irrecevable pour défaut de la qualité pour recourir de la recourante.

Incomplète, l'offre déposée devait être éliminée d'office dans la mesure où aucune des attestations exigées et produites au titre de conditions de participation ne concernait A______, ni au moment de son dépôt ni ultérieurement.

Les critères d'adjudication avaient été annoncés avec leur pondération respective dans le dossier d'appel d'offres et dans l'annonce publiée dans simap.ch. Les sous-critères relevant de la qualité et du prix ressortaient clairement du cahier des charges, soit de l'onglet cahier des charges où les éléments pris en considération étaient ceux comportant une croix dans la colonne « Apprécier et évaluer ». Il n'y avait pas de violation du principe de transparence.

Les exercices de simulation de la répartition et du calcul du nombre d'affiches étaient destinés uniquement à vérifier la bonne compréhension du marché. Aucun lien entre ces exercices et le critère du prix n'avait été fait.

Les coefficients de pondération étaient en lien avec l'importance qui était accordée à chaque sous-critère ou élément d'appréciation pour la bonne réalisation de la prestation. L'absence de leur communication n'avait eu aucune conséquence sur l'évaluation du marché et la recourante n'avait pas démontré avec quel prix elle aurait pu déposer une offre différente. Selon la jurisprudence constante, le fait de ne pas annoncer à l'avance la méthode d'évaluation du prix n'était pas arbitraire.

f. Dans sa réplique, la recourante a relevé qu'elle ne critiquait pas l'existence de sous-critères, mais leur pondération qui avait été faite après coup sur la base de coefficients non annoncés et avait faussé a posteriori la notation du marché et son attribution. Les deux premiers sous-critères du prix avaient eu une importance prépondérante du fait de leur pondération spécifique reposant sur des coefficients non « équipondérés » aux écarts significatifs de l'ordre de un à cinq. La favorisation « outrancière » de deux sur trois sous-critères du prix par l'utilisation de coefficients différenciés avait créé un déséquilibre intrinsèque du poids du critère principal qui avait faussé la pondération globale dudit critère tel qu'annoncé et publié dans la procédure d'appel d'offres. Elle avait démontré qu'elle aurait remporté l'appel d'offres si l'évaluation des offres avait reposé sur une « équipondération » des coefficients et ce, même en conservant la formule de notation au cube utilisée par l'autorité adjudicatrice.

g. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             Le recours a été interjeté en temps utile devant la juridiction compétente (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 15 al. 1bis let. d de l’accord intercantonal sur les marchés publics du 25 novembre 1994 - AIMP - L 6 05 ; art. 3 al. 1 de la loi autorisant le Conseil d’État à adhérer à l’accord intercantonal sur les marchés publics du 12 juin 1997 - L-AIMP - L 6 05.0 ; art. 55 let. c et 56 al. 1 du règlement sur la passation des marchés publics du 17 décembre 2007 - RMP - L 6 05.01).

2.             Il convient, en premier lieu, d'examiner la question de la qualité pour recourir de la recourante.

2.1 La qualité pour recourir dans le domaine des marchés publics, qui ne contient pas de règles spécifiques en la matière (ATF 141 II 14 consid. 2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_585/2021 du 29 novembre 2022 consid. 1.3.2), se définit en fonction des critères de l'art. 60 al. 1 let. a et b de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10 ; ATA/871/2023 du 22 août 2023 consid. 1.3).

2.2 La LPA ne règle pas expressément la question de la substitution de partie, soit celle du remplacement d'une partie par une autre en cours d'instance à la suite d’un transfert des droits ou obligations en cause. Conformément à la jurisprudence de la chambre de céans, la substitution de partie est en principe possible en procédure administrative. La succession à titre universel, qui peut résulter d'une succession pour cause de mort, d'une faillite ou d'une fusion d'entreprises, provoque en vertu du droit fédéral un changement de plein droit de parties sans l'accord des autres parties à la procédure, sous réserve des procédures portant sur les droits strictement personnels et intransmissibles, qui deviennent sans objet (ATA/974/2022 du 27 septembre 2022 consid. 3a ; ATA/634/2014 du 19 août 2014 consid. 2 ; Stéphane GRODECKI/Romain JORDAN, Code annoté de procédure administrative genevoise, 2017, n. 148 ad art. 8 LPA).

2.3 La fusion déploie ses effets dès son inscription au registre du commerce. Dès ce moment, l'ensemble des actifs et passifs de la société transférante sont transférés de par la loi à la société reprenante (art. 22 al. 1 de la loi fédérale sur la fusion, la scission, la transformation et le transfert de patrimoine du 3 octobre 2003 - LFus - RS 221.301). Sous l'angle procédural, la fusion a pour conséquence la substitution de par le droit fédéral (ATA/634/2014 du 19 août 2014 consid. 2).

La société transférante est radiée du registre du commerce par l’inscription de la fusion (art. 21 al. 3 Lfus).

2.4 En l'espèce, B______ a été radiée du registre du commerce par suite de fusion, avec effet dès le 29 septembre 2023. À cette date, elle a cessé d'exister, conformément aux dispositions et principes rappelés ci-dessus, et A______ lui a succédé ipso jure dans l'ensemble de ses droits et obligations. Dans la mesure où l'inscription de la fusion et le dépôt de l'offre de B______ ont eu lieu le même jour, la chambre de céans retiendra, afin d'éviter tout formalisme excessif, que lesdits droits et obligations comprenant notamment le droit de partie à la procédure d'appel d'offres ont passé le 29 septembre 2023 de B______ à A______. Ainsi, A______ a succédé à la précitée et repris sa position dans la procédure devant l'autorité précédente.

A______ disposant de la qualité pour recourir, le recours sera déclaré recevable.

3.             Se pose la question de la recevabilité de l'offre déposée par la recourante.

3.1 À teneur de l’art. 42 RMP, l'offre est écartée d'office notamment lorsque le soumissionnaire a rendu une offre tardive, incomplète ou non conforme aux exigences ou au cahier des charge (al. 1 let. a) ; les offres écartées ne sont pas évaluées ; l'autorité adjudicatrice rend une décision d'exclusion motivée, notifiée par courrier à l'intéressé, avec mention des voies de recours (al. 3).

3.2 L’attribution des marchés publics suppose la réalisation de conditions qui peuvent se classer dans différentes catégories (ATF 140 I 285 consid. 5.1).

En premier lieu figurent les exigences qui subordonnent l'accès à la procédure. Les entreprises soumissionnaires qui ne les remplissent pas voient leur offre exclue d'emblée. Font partie de cette catégorie, les critères d'aptitude ou de qualification (« Eignungskriterien ») qui servent à s'assurer que le soumissionnaire a les capacités suffisantes pour réaliser le marché (art. 13 let. d AIMP). La loi pose aussi des principes qui doivent être respectés par toutes les entreprises qui soumissionnent, sous peine d'exclusion (conditions légales). Tel est le cas notamment du respect des dispositions relatives à la protection des travailleurs et aux conditions de travail ou du respect de l'égalité de traitement entre femmes et hommes (art. 11 let. e et f AIMP), indépendamment du lien entre ces exigences et l'aptitude de l'entreprise à réaliser le marché (Peter GALLI/André MOSER/Elisabeth LANG/Marc STEINER, Praxis des öffentlichen Beschaffungsrechts, 3e éd., 2013, n. 582 p. 250 s.).

En second lieu, interviennent les exigences relatives à l'évaluation des offres. Il s'agit des critères d'adjudication ou d'attribution. Ces critères se rapportent en principe directement à la prestation requise et indiquent au soumissionnaire comment l'offre économiquement la plus avantageuse sera évaluée et choisie (ATF 129 I 313 consid. 8.1 p. 324). La non-réalisation d'un critère d'adjudication n'est pas éliminatoire, mais peut être compensée par la pondération avec d'autres critères d'adjudication (ATF 139 II 489 consid. 2.2.1 et 2.2.4 p. 494).

3.3 Le droit des marchés publics est formaliste, ce que la chambre administrative a rappelé à plusieurs reprises (ATA/243/2020 du 3 mars 2020 consid. 4d ; ATA/970/2019 du 4 juin 2019 et les références citées), notamment lorsqu’elle a confirmé des décisions d’exclusion d’offres fondées sur la non-production des attestations requises dans l’appel d’offres au titre de condition de participation à la procédure de soumission (ATA/188/2021 du 23 février 2021 consid. 5 ; ATA/1208/2020 du 1er décembre 2020 consid. 5).

3.4 L’autorité adjudicatrice doit procéder à l’examen de la recevabilité des offres et à leur évaluation dans le respect de ce formalisme, qui permet de protéger notamment le principe d’intangibilité des offres remises et le respect du principe d’égalité de traitement entre soumissionnaires garanti par l’art. 16 al. 2 RMP (ATA/243/2020 précité consid. 4d ; ATA/794/2018 du 7 août 2018 et les références citées). Le respect de ce formalisme est nécessaire pour concrétiser l’obligation d’assurer l’égalité de traitement entre soumissionnaires dans la phase d’examen de la recevabilité des offres et de leur évaluation. La conformité au droit de cette approche formaliste a été confirmée par le Tribunal fédéral (arrêts du Tribunal fédéral 2C_418/2014 du 20 août 2014 consid. 4 ; 2C_197 et 2C_198/2010 du 30 avril 2010 consid. 6).

3.5 La chambre de céans a déjà eu l'occasion de rappeler que le transfert d’activité puis la fusion par absorption résultent d'un choix entrepreneurial et ressortissent à la vie économique ordinaire des entreprises. Les effets de la fusion ne peuvent pas être retenus pour une période antérieure à son inscription au registre du commerce. Il en va ainsi dans la mesure où les deux sociétés étaient jusqu’à cette opération des entités juridiques distinctes ayant chacune une existence propre (ATA/543/2023 du 23 mai 2023 consid. 4).

3.6 En droit des marchés publics, il a été admis, pour ce qui est de la signature de l'offre par une personne ne disposant pas du pouvoir de représentation, qu'un tel manquement n'est pas nécessairement sanctionné d'une exclusion. L'autorité impartit un délai pour déposer une procuration en faveur de la personne qui a signé sans droit (arrêt TA TI 52.2017.105 du 26 septembre 2017, in DC 2018 I p. 49 n. 33).

3.7 À teneur de l'art. 936b al. 1 de la loi fédérale complétant le code civil suisse du 30 mars 1911 (Livre cinquième : Droit des obligations - CO - RS 220), dès lors qu'un fait a été inscrit au registre du commerce, nul ne peut se prévaloir de ne pas en avoir eu connaissance.

3.8 Selon la jurisprudence, les faits qui sont inscrits dans le registre du commerce, et qui ont été publiés conformément à la loi, sont réputés de notoriété publique. Les dispositions sur les effets de publicité de l’inscription ont été appliquées dans les relations de droit public entre les sujets de l’inscription et les autorités administratives, ce qui revient à dire que ces dernières peuvent également constituer des tiers auxquels les effets d'une inscription sont opposables (ATF 122 V 270 consid. 5b/aa ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_719/2009 du 10 février 2010 consid. 4 ; 8C_293/2008 du 30 juillet 2009 consid. 4.1 et 4.6 ; voir dans ce sens le Message concernant la modification du code des obligations [droit du registre du commerce] du 15 avril 2015, selon lequel les effets de la publicité sont opposables tant aux particuliers qu’aux autorités [FF 2015 3270]).

3.9 En l'espèce, les parties intimées font valoir que l'offre de la recourante n'était pas recevable, au motif qu'elle ne remplissait ni les conditions de participation ni les critères d'aptitude, les attestations produites à cet égard concernant B______ et non la recourante.

Un tel raisonnement ne saurait être suivi, car cela reviendrait à admettre que les effets de la fusion peuvent être pris en compte avant son inscription, contrairement aux dispositions légales et principes rappelés plus haut. Aussi, jusqu'à ce que l'inscription de la fusion par absorption soit effective le 29 septembre 2023, il appartenait uniquement à la société transférante de produire les documents attestant qu'elle satisfaisait aux critères d'aptitude et de qualification, à défaut d'indications contraires figurant dans le dossier d'appel d'offres. Il y a même lieu d'admettre que la recourante pouvait se prévaloir des attestations afférentes à B______.

Contrairement à ce que soutient l'adjudicataire, les personnes autorisées à représenter B______ pouvaient valablement signer l'offre jusqu'à ce que l'inscription de la fusion devienne effective. Même à supposer que l'un des signataires de l'offre de la recourante n'était plus autorisé à signer à son nom et pour son compte, l'autorité intimée aurait dû l'interpeller en lui accordant un délai pour régulariser la situation. Faute pour celle-ci d'avoir procédé de la sorte, la chambre de céans retiendra, afin d'éviter tout formalisme excessif, que l'offre de la recourante a été valablement signée.

Eu égard à l'opposabilité de l'inscription au registre du commerce aux tiers, l'autorité intimée invoque en vain n'avoir pas été informée de la fusion. En tant qu'elle devait procéder à l'examen de la recevabilité des offres, elle avait une incombance de consulter le registre du commerce, étant relevé qu'il avait été fait mention dans l'offre de la recourante d'une procédure de fusion en cours avec indication de la raison sociale que porterait la nouvelle société à l'issue du processus. Quoiqu'en pensent les parties intimées, cette information aurait pu éveiller la curiosité de l'autorité intimée et la conduire à procéder des vérifications suivies, en cas de vice formel, d'une invitation adressée à la recourante en vue de sa correction, conformément au principe de l'interdiction du formalisme excessif.

Au vu de ce qui précède et que l'offre de la recourante a été évaluée, à savoir qu'elle n'a pas fait l'objet d'une décision d'exclusion de la part de l'autorité adjudicatrice, il sera retenu qu'elle réalisait toutes les conditions de participation et d'aptitude telles que fixées par l'appel d'offres.

L'objection d'irrecevabilité des parties intimées sera par conséquent écartée et l'offre de la recourante déclarée recevable.

4.             Le recours porte sur la conformité au droit de la décision d'adjudication en lien avec divers griefs soulevés par la recourante. La chambre de céans limitera toutefois son examen à deux points susceptibles de vider le litige, à savoir ceux relatifs à la violation du principe de transparence et à l'interdiction de l'arbitraire.

4.1 La recourante fait valoir le grief de violation des principes de non-discrimination et de la transparence.

4.1.1 L’AIMP a pour objectif l’ouverture des marchés publics (art. 1 al. 1 AIMP). Il poursuit plusieurs objectifs, soit assurer une concurrence efficace entre les soumissionnaires (art. 1 al. 3 let. a AIMP), garantir l’égalité de traitement entre ceux-ci et assurer l’impartialité de l’adjudication (art. 1 al. 3 let. b AIMP), assurer la transparence des procédures de passation des marchés (art. 1 al. 3 let. c AIMP) et permettre l’utilisation parcimonieuse des deniers publics (art. 1 al. 3 let. d AIMP). Ces principes doivent être respectés, notamment dans la phase de passation des marchés (art. 11 AIMP, notamment let. a et b AIMP).

4.1.2 Les offres sont évaluées en fonction des critères d’aptitude et des critères d’adjudication (art. 12 RMP).

4.1.3 L’autorité adjudicatrice choisit des critères objectifs, vérifiables et pertinents par rapport au marché. Elle doit les énoncer clairement et par ordre d’importance au moment de l’appel d’offres (art. 24 RMP).

Les documents mis à disposition des candidats doivent contenir, notamment, les critères d'adjudication, avec leur pondération (art. 27 let. f RMP).

4.1.4 Le principe de transparence n'exige pas, en principe, la communication préalable de sous-critères ou de catégories qui tendent uniquement à concrétiser le critère publié, à moins que ceux-ci ne sortent de ce qui est communément observé pour définir le critère principal auquel ils se rapportent ou que l'adjudicateur ne leur accorde une importance prépondérante et leur confère un rôle équivalent à celui d'un critère publié. De la même manière, une simple grille d'évaluation ou d'autres aides destinées à noter les différents critères et éléments d’appréciation utilisés (telles une échelle de notes, une matrice de calcul, etc.) ne doivent pas nécessairement être portées par avance à la connaissance des soumissionnaires, sous réserve d'abus ou d'excès du pouvoir d'appréciation. Le point de savoir si, dans un cas d'espèce, les critères utilisés sont inhérents au critère publié ou relèvent d'une grille d'évaluation, en sorte que le principe de la transparence n'en exige pas la communication par avance, résulte de l'ensemble des circonstances qui entourent le marché public en cause, parmi lesquelles il faut mentionner la documentation relative à l'appel d'offres, en particulier le cahier des charges et les conditions du marché (ATF 130 I 241 consid. 5.1 ; ATA/695/2015 du 30 juin 2015 consid. 3c ; ATA/368/2015 du 21 avril 2015 consid. 4c ; ATA/972/2014 du 9 décembre 2014 consid. 11b).

4.1.5 Le soumissionnaire qui entend contester la définition, la pondération ou le manque de précision des critères d'adjudication doit le faire, pour des raisons de bonne foi, dans le cadre de l'appel d'offres et non au moment de la décision d'adjudication, sans quoi il est forclos. Cette règle est conforme à l'exigence de célérité à laquelle obéit la procédure relative à la passation des marchés publics, en ce sens qu'il est préférable de corriger immédiatement une irrégularité contenue dans l'appel d'offres et les documents y relatifs plutôt que de procéder à 'adjudication du marché et de s'exposer au risque, si le vice est ensuite constaté par un juge, de devoir reprendre la procédure à son début. La forclusion tirée du principe de la bonne foi ne peut toutefois être opposée à une partie que pour les irrégularités qu'elle a effectivement constatées ou, à tout le moins, qu'elle aurait dû constater en faisant preuve de l'attention commandée par les circonstances. Or, l'on ne saurait exiger des soumissionnaires qu'ils procèdent à un examen juridique approfondi de l'appel d'offres et des documents de l'appel d'offres, vu leurs connaissances généralement limitées en la matière et le délai relativement court qui leur est imparti pour déposer leurs offres. Il convient, au contraire, de ne pas se montrer trop strict à cet égard et de réserver les effets de la forclusion aux seules irrégularités qui sont particulièrement évidentes ou manifestes. Cette solution offre par ailleurs l'avantage de garantir une certaine effectivité à la protection juridique dont doivent bénéficier les soumissionnaires, l'expérience enseignant que, par crainte de compromettre leurs chances d'obtenir un marché, très rares sont ceux qui, en pratique, contestent l'appel d'offres ou les documents de l'appel d'offre avant l'adjudication (ATF 130 I 241 consid. 4.2 ; ATA/319/2022 du 29 mars 2022 consid. 6a ; ATA/448/2020 du 7 mai 2020 consid. 7 ; ATA/307/2019 du 26 mars 2019 consid. 6b).

4.1.6 Selon l’art. 43 RMP, l'évaluation des offres est faite selon les critères prédéfinis conformément à l'art. 24 RMP et énumérés dans l'avis d'appel d’offres et/ou les documents d'appel d’offres (al. 1). Le résultat de l'évaluation des offres fait l'objet d'un tableau comparatif (al. 2). Le marché est adjugé au soumissionnaire ayant déposé l'offre économiquement la plus avantageuse, c'est-à-dire celle qui présente le meilleur rapport qualité/prix. Outre le prix, les critères suivants peuvent notamment être pris en considération : la qualité, les délais, l'adéquation aux besoins, le service après-vente, l'esthétique, l'organisation, le respect de l'environnement (al. 3).

4.1.7 Le pouvoir adjudicateur dispose d'une grande liberté d'appréciation dans le choix et l'évaluation des critères d'aptitude et d'adjudication, celui-là étant libre de spécifier ses besoins en tenant compte de la solution qu'il désire (ATF 137 II 313 consid. 3.4 in JdT 2012 I p. 28ss). Si l'autorité judiciaire substitue son pouvoir d'appréciation à celui de l'adjudicateur, elle juge en opportunité, ce qui lui est interdit, tant par l'art. 16 al. 2 AIMP que par l'art. 61 al. 2 LPA. L'autorité judiciaire ne peut intervenir qu'en cas d'abus ou d'excès du pouvoir d'appréciation de l'adjudicateur, ce qui, en pratique, peut s'assimiler à un contrôle restreint à l'arbitraire. En revanche, l'autorité judiciaire n'a pas à faire preuve de la même retenue lors du contrôle des règles de procédure en matière de marchés publics (ATF 141 II 353 consid. 3 et les références citées).

4.1.8 Une décision est arbitraire au sens de l’art. 9 Cst. lorsqu’elle est manifestement insoutenable, qu’elle se trouve en contradiction claire avec la situation de fait, qu’elle viole gravement une norme ou un principe juridique indiscuté ou encore lorsqu’elle heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l’équité. L’arbitraire ne résulte pas du seul fait qu’une autre solution pourrait entrer en considération ou même qu’elle serait préférable (ATF 142 V 512 consid. 4.2 ; 141 I 49 consid. 3.4 ; arrêts du Tribunal fédéral 2D_26/2019 du 3 septembre 2019 consid. 4.2 ; 2C_596/2018 du 13 mai 2019). De plus, il ne suffit pas que les motifs de la décision attaquée soient insoutenables, encore faut-il que cette dernière soit arbitraire dans son résultat (ATF 144 I 170 consid. 7.3 ; arrêts du Tribunal fédéral C_985/2019 et 2C_45/2020 du 26 mai 2020 consid. 6.3).

4.2 En l'espèce, l’autorité intimée a énuméré par avance et dans l'ordre d'importance tous les critères d'adjudication qui seraient pris en considération lors de l'évaluation des soumissions, en spécifiant clairement l'importance qu’elle entendait accorder à chacun d'eux, conformément aux art. 1 al. 3 let. c AIMP et 24 RMP. Selon l'appel d'offres, le marché devait être adjugé au regard des critères suivants, énoncés dans l'ordre d'importance décroissant avec leur pondération respective : le critère 1 intitulé « Qualité et fiabilité de l'exécution des prestations » (54%), le critère 2 « Prix » (40%) et le critère 3 « Qualité de l'entreprise, soit la contribution à la composante sociale du développement durable et la contribution à la composante environnementale du développement durable » (6%).

Les sous-critères et/ou éléments d'appréciation étaient indiqués dans le cahier des charges. Chacun des critères faisait l’objet de sous-rubriques pour lesquelles le pouvoir adjudicateur précisait ce qu’il souhaitait obtenir comme renseignements. Ainsi, le critère du prix mentionnait les éléments d'appréciation pris en considération dans l'évaluation, à savoir ceux précédés d'une croix dans la colonne « Apprécier et évaluer ».

4.2.1 Toutefois, la pondération de chaque sous-critère du prix n'était annoncée ni dans l'appel d’offres ni dans le cahier des charges. Dans le cadre de l'évaluation des offres, celles-ci ont été notées par l'autorité intimée sur la base de différents coefficients attribués aux sous-critères ou éléments d'appréciation. S'agissant plus spécifiquement de l'évaluation du critère du prix, la répartition des coefficients de pondération différents a été opérée de la manière suivante : la sous‑rubrique k2 s'est vu appliquer un coefficient de dix contre deux pour la sous‑rubrique k1 ou un pour la sous-rubrique k3. Contrairement à ce que soutient l'autorité intimée, la violation alléguée du principe de transparence relève donc dans le présent cas du défaut d'annonce préalable des coefficients de pondération.

Il résulte des éléments précédents que la sous-rubrique k2 a bénéficié d'un poids prépondérant par rapport à k1 et k3, dans la mesure où elle correspondait à un indice de pondération de 30,77% sur les 40% attribués au critère du prix, soit plus de cinq fois la pondération du critère principal 3 « Qualité de l'entreprise ». Dit pourcentage de pondération valait également pour l'évaluation générale de l'offre.

Compte tenu de ces différences substantielles de pondération caractérisées par le rôle prépondérant réservé à k2, la recourante ne pouvait raisonnablement partir de l'idée que l'autorité intimée se servirait d'une telle grille d'évaluation pour apprécier le critère du prix. Il y a lieu d'admettre qu'il s'agissait de l'emploi d'une grille d'évaluation qui sort de l'ordinaire, de sorte que le principe de transparence exigeait leur publication préalable dans les documents d'appel d'offres. Faute d'avoir procédé de la sorte et de ne pas avoir non plus justifié dans la procédure ce choix, l'autorité intimée a mésusé de son pouvoir d'appréciation. Il peut être retenu que si cette manière d’évaluer son offre avait été communiquée, la recourante en aurait tenu compte dans l’offre soumise. C'est du moins ce qu'elle laisse supposer lorsqu'elle affirme avoir construit les prix forfaitaires des affiches sans prendre en compte la possibilité qu'ils seraient évalués selon des pourcentages de pondération différents.

Au vu de ce qui précède et contrairement aux allégations de l'autorité intimée et de l'adjudicataire, il était nécessaire, au regard des effets du défaut de transparence sur le résultat de la procédure, d'annoncer à l'avance les coefficients de pondération des sous-critères ou éléments d'appréciation du prix.

Dès lors que la recourante ne pouvait déceler ce vice formel, soit le défaut de publication préalable de la pondération des sous-rubriques du prix, sur la base des documents d'appel d'offres, le grief de violation du principe de transparence pouvait encore être soulevé avec la décision d'adjudication.

Partant, le recours sera admis sur ce point.

4.2.2 En outre, la différence inusuelle de pondération pour le sous-critère k2 par rapport à k1 et k3 ne trouve pas d’explication suffisante. La motivation de l'autorité intimée est à cet égard confuse, voire inexistante. S’il est envisageable que la prestation à fournir pour la pose d’affiches pendant une période de 28 jours n’est pas identique à celle d’une pose pendant une période de 14 jours, les explications incomplètes de l'autorité intimée ne permettent ni de comprendre ni de justifier objectivement la pondération de k2 cinq fois supérieure à celle de k1. La chambre de céans n'est donc pas en mesure d'apprécier le bien-fondé des pourcentages de pondération appliqués aux sous-rubriques du critère du prix par l'autorité intimée lors de l'évaluation des offres.

Compte tenu du poids élevé de k2, soit 30,77%, dans l'évaluation du critère du prix dont la pondération était elle-même fixée à 40% de l'évaluation totale, il apparaît qu’en l’absence d’un tel pourcentage élevé de pondération, le résultat aurait été différent, comme l'a démontré la recourante.

Dès lors que les motifs fondant la pondération différenciée des éléments du prix n’apparaissent pas trouver de justification suffisante, il convient également de retenir le caractère arbitraire de la décision d'adjudication.

En conséquence, le recours sera également admis sur ce point.

Pour les motifs exposés ci-dessus, le recours sera partiellement admis et la décision d'adjudication entreprise annulée, ce qui rend superflu l'examen des autres griefs soulevés par la recourante.

5.             Le contrat d’exécution de la décision d’adjudication n’ayant pas été conclu, se pose la question des conséquences de l’annulation de la décision d’adjudication.

5.1 À teneur de l'art. 18 al. 1 AIMP, si le contrat n’est pas encore conclu, l’autorité de recours peut, soit statuer au fond, soit renvoyer la cause au pouvoir adjudicateur dont elle annule la décision, au besoin avec des instructions impératives.

5.2 Dans ce contexte, l'instance de recours cantonale doit toutefois continuer à respecter la marge d'appréciation de l'autorité adjudicatrice. En effet, un contrôle de l'opportunité d'une décision d'adjudication n'est pas prévu. À la lumière de l'art. 16 al. 1 let. a et al. 2 AIMP, l'autorité de recours ne doit faire usage qu'avec retenue de sa compétence de rendre un jugement réformatoire au sens de l'art. 18 al. 1 AIMP et renvoyer en principe l'affaire à l'autorité adjudicatrice. En procédant elle-même à l'adjudication, elle empiéterait sinon trop fortement sur le pouvoir d'appréciation de l'autorité adjudicatrice. En d'autres termes, compte tenu de la grande marge d'appréciation dont disposent les autorités adjudicatrices, l'annulation de la décision d'adjudication entraîne donc en règle générale un renvoi à l'autorité adjudicatrice avec une décision contraignante de l'instance cantonale de recours (ATF 146 II 276, consid. 6.2.1 ; Peter GALLI/André MOSER/Elisabeth LANG/Marc STEINER, op. cit., p. 1396 ; Etienne POLTIER, Droit des marchés publics, 2023, p. 416 n. 881)

La compétence de l'instance de recours de rendre un jugement réformatoire doit être appliquée exclusivement dans des constellations qui ont été suffisamment clarifiées. Une telle constellation existe notamment lorsque seuls deux soumissionnaires participent à la procédure d'adjudication ou que le marché peut être attribué sans autre au soumissionnaire le mieux placé suivant, car aucun autre soumissionnaire n'entre en ligne de compte pour l'adjudication. En revanche, la clarté requise fait par exemple défaut lorsqu'il est douteux que la recourante de la procédure de recours de première instance ait présenté l'offre la plus avantageuse économiquement. Dans le cas contraire, l'affaire doit être renvoyée à l'autorité adjudicatrice - éventuellement avec une injonction contraignante - pour réévaluation de ces offres sur la base du critère d'examen corrigé par l'instance de recours cantonale (art. 18 al. 1 AIMP). L'autorité adjudicatrice doit procéder à une nouvelle évaluation avec un plein pouvoir d'appréciation. Ce faisant, elle doit réintégrer les autres soumissionnaires dans la procédure d'adjudication, pour autant qu'aucun obstacle procédural ne s'y oppose tel que l'exclusion de la procédure entrée en force pour cause de non-respect des critères de qualification (ATF 146 II 276, consid. 6.3.4).

5.3 En espèce, la recourante a conclu à l'attribution du marché en sa faveur, subsidiairement, au renvoi de la cause à l'autorité intimée pour nouvelle évaluation des offres tenant compte d'une « équipondération » des coefficients de pondération prévus dans le tableau d'évaluation établi par l'autorité adjudicatrice et nouvelle décision, plus subsidiairement, à l'organisation d'un nouvel appel d'offres assorti de l'ensemble des paramètres de notation (coefficients de pondération, barème de notes, etc.).

Quand bien même deux soumissionnaires ont participé à la procédure d'appel d'offres, il n'apparaît pas, à l'aune du dossier, que la recourante ait présenté l'offre la plus avantageuse économiquement. À cela s'ajoute que la chambre de céans n'a pas pu apprécier le bien-fondé des critères de pondération de la notation du prix litigieux. Cela étant, les conditions requises ne sont réunies ni pour l'attribution du marché à la recourante, ni pour ordonner uniquement une nouvelle réévaluation des offres.

Dans ces circonstances, la chambre de céans renverra la cause à l'autorité intimée pour nouvelle décision.

6.             Vu l’issue du litige, l’émolument de CHF 500.- sera mis à la charge de l’adjudicataire dans la mesure où elle a pris des conclusions sur le présent recours (art. 87 al. 1 LPA ; ATA/824/2016 du 04 octobre 2016 consid. 4 ; ATA/824/2016 du 4 octobre 2016 consid. 4). Une indemnité de procédure de CHF 1'500.- sera allouée à la recourante, à la charge par moitié de l'autorité intimée et de l'adjudicataire (art. 87 al. 2 LPA).

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 6 novembre 2023 par A______ contre la décision de la direction générale des finances, des ressources humaines et des affaires extérieures, soit pour elle, la Centrale commune d’achats du 23 octobre 2023 ;

au fond :

l'admet partiellement et annule la décision précitée ;

renvoie la cause à la direction générale des finances, des ressources humaines et des affaires extérieures pour nouvelle décision ;

met un émolument de CHF 500.- à la charge de C______;

alloue à A______ une indemnité de procédure de CHF 750.-, à la charge de la direction générale des finances, des ressources humaines et des affaires extérieures ;

alloue à A______ une indemnité de procédure de CHF 750.-, à la charge de la C______;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public :

si la valeur estimée du mandat à attribuer n'est pas inférieure aux seuils déterminants de la loi fédérale du 16 décembre 1994 sur les marchés publics ou de l'accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse et la Communauté européenne sur certains aspects relatifs aux marchés publics ;

s'il soulève une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Guy BRAUN, avocat de la recourante, à Me François MEMBREZ, avocat de la C______, à la direction générale des finances ainsi qu’à la Commission de la concurrence.

Siégeant : Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, présidente, Florence KRAUSKOPF, Valérie LAUBER, Eleanor McGREGOR, Claudio MASCOTTO, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. SCHEFFRE

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. PAYOT ZEN-RUFFINEN

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

Genève, le la greffière :