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Décisions | Sommaires

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C/16072/2024

ACJC/1270/2025 du 12.09.2025 sur JTPI/7820/2025 ( SML ) , CONFIRME

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/16072/2024 ACJC/1270/2025

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU VENDREDI 12 SEPTEMBRE 2025

 

Entre

Madame A______, domiciliée ______ [GE], recourante contre un jugement rendu par le Tribunal de première instance de ce canton le 18 juin 2025, représentée par Me Lassana DIOUM, avocat, PBM Avocats SA, boulevard Georges-Favon 26, case postale 48, 1211 Genève 8,

et

ETAT DE GENEVE, SOIT POUR LUI LA PERCEPTION DE L'AFC, sis Service du contentieux, rue du Stand 26, case postale 3937, 1211 Genève 3, intimé.

 


EN FAIT

A.           Par jugement JTPI/7820/2025 du 18 juin 2025, expédié pour notification aux parties le 25 juin 2025, le Tribunal de première instance a prononcé la mainlevée définitive de l'opposition formée au commandement de payer, poursuite n° 1______ (ch. 1), a arrêté les frais judiciaires à 300 fr., compensés avec l'avance opérée et mis à la charge de A______, condamnée à en rembourser l'ETAT DE GENEVE, soit pour lui l'Administration fiscale cantonale (ch. 2 et 3), dit qu'il n'était pas alloué de dépens (ch. 4) et débouté les parties de toute autre conclusion (ch. 5).

Il a en substance considéré que la décision de taxation d'office, contre laquelle il n'avait pas été formé de réclamation, représentait un titre de mainlevée définitive au sens de l'art. 80 LP, et que la demande de nullité qui avait été formée ne remettait pas en question le caractère exécutoire de la décision précitée.

B.            Par acte du 7 juillet 2025 à la Cour de justice, A______ a formé recours contre ce jugement. Elle a conclu à l'annulation de celui-ci, cela fait au rejet de la requête de mainlevée, subsidiairement au renvoi de la cause au Tribunal pour nouvelle décision, sous suite de frais judiciaires et de dépens.

La conclusion préalable en suspension de l'effet exécutoire attaché au jugement entrepris, que comportait le recours, a été rejetée par arrêt de la Cour du 28 juillet 2025.

L'ETAT DE GENEVE, soit pour lui l'Administration fiscale cantonale, a conclu au rejet du recours, sous suite de frais.

Par avis du 19 août 2025, les parties ont été informées de ce que la cause était gardée à juger.

C.           Il résulte de la procédure les faits pertinents suivants:

a. Le 1er décembre 2023, l'Administration fiscale cantonale a émis un bordereau de taxation d'office R2______ (notifié le 12 décembre 2023 avec délai de paiement au 12 janvier 2024) à l'endroit de A______, s'agissant de l'impôt fédéral direct 2022. Celui-ci porte sur un montant total des impôts de 7'733 fr. 55, soit 5'434 fr. 75 selon "dernier bordereau provisoire notifié le 17.03.2023" et
2'098 fr. 80 à titre de "supplément".

Le relevé du compte R2______ daté du 1er décembre 2023 fait état, au débit, des montants précités ainsi que d'intérêts moratoires par 141 fr. 90, pour un total de 7'675 fr. 45, la rubrique "crédit" étant à zéro.

b. Par courrier du 27 janvier 2024, l'Administration fiscale cantonale a rappelé à A______ que son compte présentait un solde débiteur, à la date précitée, de
7'719 fr. 85. Le relevé de compte joint à ce courrier reprend les montants visés dans le relevé du 1er décembre 2023, les intérêts moratoires étant portés à
176 fr. 30, auxquels s'ajoutaient 10 fr. à titre de frais de rappel de paiement.

c. Le 17 février 2024, l'Administration fiscale cantonale a fait parvenir à A______ une sommation de paiement pour un total de 7'779 fr. 75, soit 7'543 fr. 55 ("montant dû en capital et frais"), 40 fr. ("frais de sommation"), 196 fr. 20 ("montant des intérêts au 17.02.2024").

d. Le 9 avril 2024, elle a fait notifier par l'Office cantonal des poursuites à A______ un commandement de payer, poursuite n° 1______, portant sur
7'583 fr. 55 plus intérêts moratoires à 5% l'an dès le 21 mars 2024 (poste 1), et 230 fr. 20 (poste 2). La rubrique "titre et date de la créance ou cause de l'obligation" était libellée ainsi: "R2______/IFD/2022/1, Bordereau 3______ exp. le 12.12.2023" pour le poste 1 et "intérêts moratoires au 21.03.2024".

La poursuivie a formé opposition.

e. Le 8 juillet 2024, l'Administration fiscale cantonale a saisi le Tribunal d'une requête en mainlevée définitive de l'opposition susmentionnée, sous suite de dépens, dirigée contre A______.

A l'audience du Tribunal du 10 février 2025, l'Administration fiscale cantonale n'était ni présente ni représentée. A teneur du procès-verbal d'audience, A______ a conclu au déboutement de la précitée des fins de sa requête, motif pris de ce que la taxation était "manifestement abusive", et a produit "des pièces concernant la réclamation faite".

Le chargé de pièces déposé comporte, outre la décision de taxation d'office et le relevé de compte du 1er décembre 2023, un acte adressé le 6 février 2025 par A______ à l'Administration fiscale cantonale, intitulé "demande de nullité", assorti d'annexes. Il résulte de cet acte que A______ fait valoir un revenu et une fortune imposables moindres que ceux retenus par l'Administration fiscale cantonale.

Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1. En matière de mainlevée d'opposition, seule la voie du recours est ouverte
(art. 309 let. b ch. 3 et 319 let. a CPC).

La décision - rendue par voie de procédure sommaire (art. 251 let. a CPC) - doit être attaquée dans un délai de dix jours dès sa notification (art. 321 al. 2 CPC) par un recours écrit et motivé (art. 130 et 131 CPC), adressé à la Cour de justice.

Interjeté dans le délai et les formes prévus par la loi, le recours est en l'espèce recevable.

2. Dans le cadre d'un recours, l'autorité a un plein pouvoir d'examen en droit, mais un pouvoir limité à l'arbitraire en fait, n'examinant que les griefs formulés et motivés par le recourant (art. 320 CPC; HOHL, Procédure civile, Tome II,
2ème éd., 2010, n. 2307).

3. A bien la comprendre, la recourante reproche au Tribunal d'avoir omis de prendre en considération que la décision de taxation faisait l'objet d'une demande en constatation de nullité, et d'avoir ignoré que ladite décision serait "manifestement abusive" car contraire aux art. 130 et 132 LIFD.

3.1 Selon l'art. 80 LP, le créancier qui est au bénéfice d'un jugement exécutoire peut requérir du juge la mainlevée définitive de l'opposition. Sont assimilés à des jugements les décisions des autorités administratives suisses (art. 80 al. 2 ch. 2 LP).

Lorsque la poursuite est fondée sur un jugement exécutoire rendu par un tribunal ou une autorité administrative suisse, le juge ordonne la mainlevée définitive de l'opposition, à moins que l'opposant ne prouve par titre que la dette a été éteinte ou qu'il a obtenu un sursis, postérieurement au jugement, ou qu'il ne se prévale de la prescription (art. 81 al. 1 LP).

Le juge de la mainlevée définitive examine seulement la force probante du titre produit par le créancier, sa nature formelle, non la validité de la créance (arrêt du Tribunal fédéral 5A_427/2011 du 10 octobre 2011 consid. 2). Il ne statue que sur la base des pièces produites, en l'occurrence un jugement exécutoire ou un titre assimilé à un tel jugement; il n'a ni à revoir ni à interpréter le titre de mainlevée qui est produit (ATF 124 III 501 consid. 3a; 113 III 6 consid. 1b).

Est exécutoire au sens de l'art. 80 al. 1 LP le prononcé qui a non seulement force exécutoire, mais également force de chose jugée – qui se détermine exclusivement au regard du droit fédéral –, c'est-à-dire qui est devenu définitif, parce qu'il ne peut plus être attaqué par une voie de recours ordinaire qui, de par la loi, a un effet suspensif (ATF 131 III 404 consid. 3; 131 III 87 consid. 3.2).

Par "extinction de la dette", l'art. 81 al. 1 LP ne vise pas seulement le paiement, mais toute autre cause de droit civil, comme la remise de dette, la compensation ou l'accomplissement d'une condition résolutoire (ATF 124 III 501 consid. 3b). Le poursuivi ne peut se borner à rendre sa libération vraisemblable; il doit, au contraire, en apporter la preuve stricte (ATF 136 III 624 consid. 4.2.1 et les références citées).

3.2 Une décision nulle ne sortit aucun effet juridique (ATF 129 I 361 consid. 2.3). Dès lors, pour s'opposer à la continuation de la poursuite, le poursuivi peut invoquer la nullité de la décision présentée comme titre de mainlevée définitive (arrêt du Tribunal fédéral 5P.178/2003 du 2 juin 2003 consid. 3.1). En effet, cette nullité doit être constatée d'office, en tout temps et par toutes les autorités chargées d'appliquer le droit, y compris dans la procédure de mainlevée d'opposition. L'absence de l'usage d'une voie de droit ne fait pas obstacle à la recevabilité de ce moyen (ATF 133 II 366 consid. 3.1; 129 I 361 consid. 2 in initio; arrêt du Tribunal fédéral 5D_213/2017 du 30 avril 2018 consid. 2.2, publié in SJ 2019 I p. 85).

La nullité d'une décision ne peut être retenue qu'à titre exceptionnel, si le vice qui l'affecte est particulièrement grave, s'il est manifeste ou du moins facilement décelable et si, de surcroît, la sécurité du droit n'est pas sérieusement mise en danger par l'admission de la nullité. De pareils motifs résident dans l'incompétence qualifiée (fonctionnelle ou matérielle) de l'autorité ou la violation grossière de règles de procédure (ATF 138 II 501 consid. 3.1; 137 I 273
consid. 3.1; 133 précité consid. 3.2; arrêt du Tribunal fédéral 5D_213/2017 précité consid. 2.2); en particulier, l'incompétence ne peut être invoquée si la décision émane d'une autorité qui a un pouvoir général de décision dans le domaine concerné (ATF 99 Ia 423 consid. 3). Des vices de fond ne conduisent qu'exceptionnellement à la nullité (ATF 129 I 361 consid. 2). La nullité ne peut pas être reliée à un critère formel mais ne peut être admise que lorsque le bien juridique touché présente une valeur particulièrement élevée (arrêts du Tribunal fédéral 5A_567/2019 du 23 janvier 2020 consid. 7.2; 5A_356/2009 du
4 août 2009 consid. 4.2).

3.3 En l'espèce, contrairement à ce que soutient la recourante, le Tribunal a dûment mentionné l'existence de la procédure en constatation de nullité, mais a retenu que cette circonstance était sans portée, s'agissant d'une voie de droit extraordinaire.

Ce raisonnement ne prête pas le flanc à la critique, puisqu'il est conforme à la jurisprudence rappelée ci-dessus. Il est exclu que le juge de la mainlevée revoie ou interprète le titre produit, comme semble le souhaiter la recourante.

Celle-ci, à l'appui de ses arguments de nullité de la décision constitutive du titre de mainlevée, ne fait pas valoir d'absence de compétence fonctionnelle ou matérielle de l'intimé, ni de violations de vice de forme. Elle se plaint, en effet, en substance de la prise en compte par l'intimé de montants de revenus et de fortune supérieurs à la réalité. Pareils motifs, qui touchent à de supposés vices de fond, ne sauraient conduire à retenir une nullité de la décision de taxation, laquelle n'est admise qu'à titre exceptionnel.

L'intimé dispose ainsi d'un titre exécutoire au sens de l'art. 80 LP. Pour le surplus, la recourante ne soutient pas qu'elle aurait démontré l'existence de l'une ou l'autre des circonstances prévues par l'art. 81 LP.

Dès lors, le recours, infondé, sera rejeté.

4. La recourante, qui succombe, supportera les frais de son recours (art. 106 al. 1 CPC), arrêtés à 650 fr. (art. 48, 61 OELP), comprenant l'émolument lié à la décision sur effet suspensif. Ces frais seront compensés avec l'avance opérée
(art. 111 al. 1 CPC), acquise à l'Etat de Genève.

Il n'y a pas lieu à allocation de dépens, l'intimé n'étant pas représenté (art. 95 al. 3 CPC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable le recours formé le 7 juillet 2025 par A______ contre le jugement JTPI/7820/2025 rendu le 18 juin 2025 par le Tribunal de première instance dans la cause C/16072/2024–11 SML.

Au fond :

Rejette ce recours.

Déboute les parties de toute autre conclusion.

Sur les frais :

Arrête les frais du recours à 650 fr., compensés avec l'avance opérée, acquise à l'Etat de Genève.

Les met à la charge de A______.

Dit qu'il n'est pas alloué de dépens de recours.

Siégeant :

Madame Pauline ERARD, présidente; Madame Sylvie DROIN, Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, juges; Madame Mélanie DE RESENDE PEREIRA, greffière.

La présidente :

Pauline ERARD

 

La greffière :

Mélanie DE RESENDE PEREIRA

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 113 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours constitutionnel subsidiaire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF inférieure à 30'000 fr.