Décisions | Sommaires
ACJC/1112/2025 du 21.08.2025 sur OSQ/9/2025 ( SQP ) , CONFIRME
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||
POUVOIR JUDICIAIRE C/15759/2024 ACJC/1112/2025 ARRÊT DE LA COUR DE JUSTICE Chambre civile DU JEUDI 21 AOÛT 2025 |
Entre
Madame A______, domiciliée ______ [GE], recourante contre un jugement rendu par le Tribunal de première instance de ce canton le 20 février 2025, représentée par Me Olivier WEHRLI, avocat, Poncet Turrettini, rue de Hesse 8, case postale,
1211 Genève 4,
et
Monsieur B______, domicilié ______, France, intimé, représenté par
Me Thierry ULMANN, avocat, Ulmann & Associés, route des Jeunes 4, 1227 Les Acacias.
A. Par jugement OSQ/9/2025 du 20 février 2025, reçu par A______ le lendemain, le Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal), statuant par voie de procédure sommaire, a admis l'opposition à séquestre formée par B______ à l'encontre de l'ordonnance de séquestre rendue le 9 juillet 2024 dans la cause n° C/15759/2024 (chiffre 2 du dispositif), révoqué le séquestre précité (ch. 3), mis les frais judiciaires – arrêtés à 800 fr. – à la charge de A______, les compensant avec les avances fournies par les parties, condamné celle-ci à verser à B______ 400 fr. à titre de frais (ch. 4) et 400 fr. à titre de dépens (ch. 5) et débouté les parties de toute autre conclusion (ch. 6).
B. a. Par acte déposé le 3 mars 2025 au greffe de la Cour de justice (ci-après : la Cour), A______ forme un recours contre ce jugement, dont elle sollicite l'annulation, avec suite de frais judiciaires et dépens des deux instances. Elle conclut à ce que la Cour rejette l'opposition au séquestre, ordonne le maintien du séquestre en mains de la C______ SARL, sise rue 1______ no. ______ à D______, des 100 parts sociales non émises d'une valeur nominale de 100 fr., propriété de B______, et du compte créancier de ce dernier dans les livres de la C______ SARL d'une valeur de 55'597 fr. 10 au 31 décembre 2022, ce à concurrence de 26'400 fr. avec intérêts à 5% dès le 8 juillet 2024, tout en la dispensant de fournir des sûretés.
Elle produit de nouvelles pièces.
b. Dans sa réponse du 24 mars 2025, B______ conclut à ce que la Cour confirme le jugement attaqué, avec suite de frais judiciaires et dépens.
c. A______ a transmis à la Cour des déterminations écrites les 4 et 30 avril, 30 mai et 27 juin 2025, persistant dans ses conclusions.
Elle a produit des nouvelles pièces.
d. B______ a également transmis des déterminations écrites à la Cour en date du 17 avril, 16 mai, 13 juin et 14 juillet 2025, persistant dans ses conclusions.
Il a conclu à l'irrecevabilité de la pièce n° 32 de sa partie adverse et a produit deux pièces nouvelles.
e. Les parties ont été informées le 22 juillet 2025, de ce que la cause était gardée à juger.
C. Les faits pertinents suivants résultent du dossier :
a. A______ et B______ se sont mariés le ______ 1996 à Genève.
b. Ils sont les parents de trois filles aujourd'hui majeures, à savoir E______, née le ______ 1998, et les jumelles G______ et F______, nées le ______ 2001.
c. Par jugement de divorce JTPI/4129/2017 du 22 mars 2017 (ci-après : le jugement de divorce), le Tribunal a prononcé le divorce sur requête commune des parties.
Il a notamment donné acte à B______ de son engagement à verser une contribution d'entretien en faveur de E______, de G______ et de F______, de 1'200 fr. par mois et par enfant, jusqu'à ce qu'elles aient atteint l'âge de 18 ans, voire au-delà en cas d'études sérieuses et régulières, et de celui de verser en faveur de A______ une contribution d'entretien de 7'500 fr. par mois jusqu'au 31 décembre 2026, puis de 6'000 fr. par mois jusqu'à ce qu'il ait atteint l'âge légal de la retraite.
Ce jugement prévoit également que, dans l'hypothèse où A______ retrouverait un emploi salarié, un montant correspondant à 50% de son salaire mensuel net (13ème salaire éventuel inclus) serait automatiquement déduit du montant de la contribution d'entretien.
d. B______, qui s'est remarié, vit actuellement en France.
e. Depuis le divorce, B______ s'est acquitté des sommes suivantes, sur le compte de A______, avec la mention "PENSION A______ + ENFANTS":
- Durant l'année 2018, il a versé 10'038 fr. 20 par mois de janvier à juin, 11'100 fr. en juillet et août, puis 9'941 fr. 30 jusqu'en décembre.
- Durant l'année 2019, il a versé 9'941 fr. 30 en janvier et février, 11'100 fr. en mars, puis 9'100 fr. par mois jusqu'à la fin de l'année.
- Il a ensuite continué à verser 9'100 fr. par mois jusqu'au 31 décembre 2022, sauf en juillet 2022 où il a versé 7'500 fr.
- Puis, il a versé la somme de 5'400 fr. par mois de janvier à mai 2023.
- Depuis le mois de juin 2023 et jusqu'en juillet 2024, il a versé à A______ la somme 7'500 fr.
f. Les virements effectués les 31 août et 29 septembre 2023 contiennent la mention "PENSION A______ + ENFANTS", tandis que les autres ordres contiennent la mention "PENSION".
g. Par courrier du 15 février 2023, A______ a indiqué à B______ que l'arriéré pour ses propres pensions s'élevait à 22'757 fr. 70.
h. Par courrier du 7 mai 2024, A______ a avisé B______ de ce qu'elle imputait, sur les sommes reçues depuis le mois de janvier 2023, le montant de 1'200 fr. pour F______ et de 1'200 fr. pour G______, le solde lui revenant. De la sorte, l'arriéré pour ses propres pensions s'élevait à 4'500 fr. par mois, respectivement 2'400 fr. par mois dès le mois de juin 2023.
i. Dans l'intervalle, par jugement JTPI/5888/2023 du 17 mai 2023, le Tribunal a débouté B______ de sa demande en modification du jugement de divorce tendant à ce que la contribution d'entretien en faveur de A______ soit diminuée à 3'000 fr. par mois, faute de faits nouveaux importants et durables.
Ce jugement n'a pas fait l'objet d'un appel.
j. Par ordonnance du 23 août 2023 rendue dans la cause n° C/2______/2023, le Tribunal a ordonné un séquestre pour une créance de 43'157 fr. 70 correspondant à des arriérés de contribution d'entretien en faveur de A______ et une autre de 6'000 fr. correspondant à des dépens.
A______ a ensuite requis, le 12 septembre 2023, la poursuite de B______ pour ces montants. Celui-ci a fait opposition au commandement de payer n° 3______ qui lui a été notifié le 27 janvier 2024.
Par jugement JTPI/9560/2024 du 13 août 2024 rendu dans la cause n° C/6______/2024, le Tribunal a prononcé la mainlevée définitive de l'opposition formée par B______ au commandement de payer précité, à concurrence de 6'000 fr. plus intérêts à 5% l'an dès le 28 janvier 2024 (concernant les dépens) et débouté les parties de toutes autres conclusions.
Le Tribunal a en particulier indiqué ne pas disposer des éléments pour prononcer la mainlevée définitive pour le poste du commandement de payer correspondant aux arriérés de contributions d'entretien en faveur de A______, soit pour pouvoir déterminer le reliquat effectivement dû au titre de la contribution à l'entretien de A______ au 31 juillet 2023.
A______ a déposé une demande en paiement le 2 décembre 2024, actuellement pendante sous le numéro de cause C/4______/2024.
k. Le 13 mars 2024, B______ a déposé au Tribunal trois actions en constatation de l'absence d'obligation alimentaire envers un enfant majeur à l'encontre de ses trois filles.
k.a Par transaction ACTPI/129/2024 du 24 mai 2024 (cause n° C/7______/2024) intervenue entre E______ et son père, le juge conciliateur a dit que E______ avait terminé ses études fin juin 2019, lui a donné acte de ce qu'elle renonçait à toute contribution à son entretien à compter du 1er septembre 2019, a modifié le jugement de divorce en supprimant avec effet au 1er septembre 2019 la contribution due par B______ pour l'entretien de sa fille et a enfin donné acte aux parties de ce qu'elles se donnaient quittance en lien avec toutes sommes dues selon le jugement de divorce précité.
k.b Par transaction ACTPI/128/2024 du même jour (cause n° C/8______/2024), B______ s'est engagé à contribuer à l'entretien de sa fille F______ à hauteur de 1'200 fr. par mois jusqu'à l'achèvement de ses études d'architecture auprès de [la haute école] H______. Le juge conciliateur a dit que F______ était seule titulaire de sa créance alimentaire la concernant depuis sa majorité et lui a donné acte de ce qu'il n'y avait pas d'arriéré de contribution d'entretien.
k.c La procédure opposant B______ à G______ (cause n° C/9______/2024) est toujours pendante. Il ressort du procès-verbal d'audience du 20 juin 2025 que G______ a entamé, sans les terminer, trois formations en trois ans, à savoir entre la rentrée 2021 et la rentrée 2023. Au moment de son audition, elle était étudiante en ______ en fin de 2ème année à l'université de Genève, formation qu'elle avait commencé à la rentrée 2021 et rapidement interrompu avant de se réinscrire pour la rentrée 2023.
l. Par requête du 8 juillet 2024 formée auprès du Tribunal, A______ a requis le séquestre, à l'encontre de B______, de 100 parts sociales d'une valeur nominale de 100 fr. de C______ SARL détenues par ce dernier, ainsi que du compte créancier de celui-ci dans les livres de la société précitée d'une valeur de 55'597 fr. 10, à concurrence de 26'400 fr. avec intérêts à 5% dès le 8 juillet 2024.
Elle a exposé que, depuis le mois d'août 2023 et jusqu'au mois de juin 2024, le montant de 7'500 fr. versé chaque mois par B______ avait été utilisé pour l'entretien de F______ et G______, toutes deux toujours en études, et le solde pour elle-même. Le montant impayé de sa contribution d'entretien s'élevait donc à 2'400 fr. par mois, soit 26'400 fr. au total (11 mois).
m. Le 9 juillet 2024, le Tribunal a ordonné le séquestre requis.
A______ a requis la poursuite de B______ en validation du séquestre ordonné le 9 juillet 2024, poursuite à laquelle le précité a fait opposition.
n. Par acte du 14 octobre 2024, complété le 22 octobre 2024, B______ a également formé opposition au séquestre, concluant à son annulation. Il a également conclu à ce que A______ soit condamnée à verser des sûretés à hauteur de 65'597 fr. 10.
B______ a exposé que ses trois filles, majeures, étaient titulaires de leurs contributions d'entretien prévues par le jugement de divorce. Le montant de 7'500 fr. versé entre les mois de juillet 2023 et août 2024 correspondait à l'entretien de A______ uniquement, de sorte que la créance alléguée n'existait pas.
o. Dans ses déterminations écrites du 18 décembre 2024, A______ a conclu au rejet de l'opposition et à ce qu'elle soit dispensée de fournir des sûretés.
Elle a exposé qu'B______ avait toujours versé les contributions d'entretien dues pour leurs filles en ses mains, ce dont les virements contenant la mention "PENSION A______ + ENFANTS" attestaient. Elle s'est également prévalue de ses courriers des 15 février 2023 et 7 mai 2024, et de ce que les transactions passées entre B______ et deux de ses filles prévoyaient que les parties se donnaient quittance en lien avec toutes sommes dues selon le jugement de divorce précité, respectivement qu'il n'y avait pas d'arriéré de contribution d'entretien.
Elle avait travaillé jusqu'en février 2019, puis connu une période de chômage entre mai 2019 et mai 2020. Elle avait ensuite touché des prestations cantonales en cas de maladie jusqu'en juin 2021. Elle ne touchait plus aucune allocation depuis juillet 2021 et recherchait un travail. Elle a produit des certificats médicaux pour la période de mai 2020 à juin 2021. Conformément au jugement de divorce, 50% de ses revenus nets, de son travail puis de son chômage, pouvaient être déduits de la contribution à son entretien entre mai 2019 et juin 2021. Il restait cependant un reliquat, dans la mesure où elle n'avait perçu que 5'500 fr. entre avril et août 2019, 6'700 fr. (soit 9'100 fr. – 2'400 fr., correspondant aux pensions de F______ et G______) entre septembre 2019 et décembre 2022, puis 3'000 fr. (soit 5'400 fr. – 2'400 fr.) entre janvier et mai 2023.
p. Le Tribunal a tenu une audience le 20 janvier 2025, lors de laquelle les parties ont plaidé, persistant dans leurs conclusions respectives, avant que le Tribunal ne garde la cause à juger.
q. Il ressort du dossier, pour le surplus, les faits pertinents suivants :
q.a A teneur de l'extrait du compte bancaire de B______ ouvert auprès de [la banque] I______ du 1er janvier au 31 décembre 2024, celui-ci a versé à sa fille F______, deux montants de 1'200 fr. chacun durant le mois de décembre 2024.
q.b Par jugement JTPI/5144/2025 du 29 avril 2025, le Tribunal a prononcé la mainlevée définitive de l'opposition formée au commandement de payer, poursuite n° 5______ dans la cause n° C/10______/2024 en validation de séquestre.
Le Tribunal a retenu que B______ n'avait pas apporté d'élément qui permettait de considérer que A______ bénéficierait de revenus propres qui devraient, le cas échéant, venir en déduction des pensions alimentaires visées par la poursuite qui faisait l'objet de la procédure. Il n'avait pas non plus démontré que les versements qu'il avait effectués en mains de A______ durant la période concernée ne comprenaient pas les pensions alimentaires de ses filles F______ et G______, comme cela avait été expressément indiqué dans les ordres bancaires jusqu'au 29 septembre 2023, soit au-delà de l'accession à la majorité des enfants et durant les premiers mois visés par la poursuite qui faisait l'objet de la procédure. Les ordres bancaires subséquents ne mentionnaient pas expressément que le montant versé, resté le même que précédemment, ne concernait subitement plus que A______. B______ n'avait pas démontré s'être acquitté de quelque montant que ce soit directement en main de ses filles majeures durant la période concernée et n'avait pas contesté ou contredit la teneur du courrier de A______ du 7 mai 2024 dans lequel il était exposé de quelle manière les montants qu'il versait étaient imputés. Il avait dès lors échoué à apporter la preuve stricte de sa libération.
Ce jugement fait l'objet d'un recours à la Cour, actuellement pendant. L'effet suspensif attaché à ce jugement a été ordonné par arrêt ACJC/652/2025 du 21 mai 2025.
1. 1.1 Le jugement entrepris étant une décision statuant sur opposition à séquestre, seule la voie du recours est ouverte (art. 278 al. 3 LP; art. 309 let. b ch. 6 et 319 let. a CPC).
Le recours, écrit et motivé, doit être introduit auprès de l'instance de recours dans les dix jours à compter de la notification de la décision motivée (art. 278 al. 1 LP et 321 al. 2 CPC).
Déposé dans le délai et selon les formes requis par la loi, le recours est recevable.
1.2 La cognition de la Cour est limitée à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC et 278 al. 3 LP).
1.3 La procédure sommaire étant applicable (art. 251 let. a CPC), il est statué sur la base de la simple vraisemblance des faits et après un examen sommaire du droit (ATF 138 III 232 consid. 4.1.1).
1.4 Les parties invoquent des faits nouveaux et produisent des pièces nouvelles devant la Cour.
1.4.1 Par exception au principe général de l'art. 326 al. 1 CPC, l'art. 278 al. 3 LP prévoit que, dans le cadre d'un recours contre une décision rendue sur opposition à séquestre, les parties peuvent alléguer des faits nouveaux et produire, à l'appui de ces faits, des moyens de preuve nouveaux (art. 326 al. 2 CPC).
Cette disposition vise tant les nova proprement dits que les pseudo nova, soit les faits et moyens de preuve qui existaient déjà avant la décision sur opposition (ATF 145 III 324 in JdT 2019 II 275 consid. 6.6.4), lesquels ne sont admissibles que pour autant que les conditions de l'art. 317 al. 1 CPC, applicable par analogie, soient réalisées (ATF 145 III 324 in JdT 2019 II 275 consid. 6.6.4). Les pseudo nova doivent ainsi être invoqués sans retard et la juridiction de recours ne peut les prendre en compte que s'ils ne pouvaient pas être invoqués devant la première instance malgré la diligence requise (art. 317 al. 1 CPC).
1.4.2 En l'espèce, la pièce n° 31 est datée du 20 janvier 2025, soit le jour où le Tribunal a gardé la cause à juger. La recourante a rendu vraisemblable qu'elle l'avait obtenue dans le cadre de la procédure n° C/10______/2024 lors de l'audience s'étant tenue le 3 février 2025, raison pour laquelle elle n'avait pas été en mesure de produire ce document précédemment. Par conséquent, cette pièce et les allégués qui s'y rapportent sont recevables.
La pièce n° 32, datée du 31 janvier 2025, n'a été versée à la procédure qu'à l'appui de la détermination de la recourante du 4 avril 2025 alors qu'elle aurait pu être produite avec le recours le 3 mars 2025. La recourante ne saurait être suivie dans ses explications de la raison pour laquelle elle aurait été empêchée de verser cette pièce au dossier en temps utile. En effet, la question de ses revenus propres a été abordée en première instance déjà. Ainsi, la pièce et les faits qui s'y rapportent sont irrecevables.
La pièce n° 33, datée du 29 avril 2025, soit après que la cause ait été gardée à juger par le Tribunal, a été produite en temps utile à la Cour. Elle est par conséquent recevable, de même que les faits qui s'y rapportent.
Les pièces nouvelles produites par l'intimé sont postérieures aux délibérations de première instance et ont été produite en temps utile, de sorte qu'elles sont recevables, de même que les faits qui s'y rapportent.
2. Le Tribunal a retenu que la créance alléguée pour fonder le séquestre n'était pas rendue vraisemblable. Même si l'intimé avait déjà réduit par le passé la contribution d'entretien en faveur de la recourante et qu'il s'était acquitté, en ses mains, des contributions d'entretien en faveur des enfants majeures, les pièces produites ne permettaient pas de déterminer si la somme de 7'500 fr. versée chaque mois par l'intimé correspondait à la contribution d'entretien de la recourante ou si, comme l'alléguait celle-ci, l'intimé avait continué à verser en ses mains les contributions à l'entretien de F______ et G______ en décidant de fixer la sienne à la somme de 5'100 fr. sans raison apparente. Il n'était pas possible de réconcilier les montants exposés, examen auquel il n'appartenait pas au juge du séquestre de procéder. Pour le surplus, la recourante n'avait produit aucune pièce concernant sa situation financière actuelle.
La recourante fait valoir qu'elle avait allégué et prouvé que l'intimé avait toujours payé en ses mains les contributions des filles et qu'elle avait précisément envoyé des courriers à son ex-époux afin de lui indiquer clairement le mode d'affectation des sommes versées, mode que l'intimé n'avait pas contesté. Celui-ci n'avait ni allégué ni prouvé s'être acquitté des contributions en mains des filles directement. Elle avait désormais prouvé que l'intimé n'avait rien versé à F______ entre les mois d'août 2023 et juin 2024 alors même qu'il avait indiqué en mai 2024 ne pas avoir d'arriéré. S'il n'avait pas d'arriéré à cette date-là, cela signifiait qu'il s'était acquitté, en ses mains, des contributions d'entretien pour ses filles et donc que, sur les 7'500 fr. versés par mois, la somme de 2'400 fr. correspondait aux contributions d'entretien en faveur des filles, de sorte qu'il manquait un montant équivalent sur sa propre contribution d'entretien. Ceci était corroboré par le fait que les libellés des versements des mois d'août et septembre 2023 indiquaient "PENSION A______ + ENFANTS". Sa créance était ainsi rendue vraisemblable.
2.1 Selon l'art. 271 al. 1 ch. 4 LP, le créancier d'une dette échue et non garantie par gage peut requérir le séquestre des biens du débiteur qui se trouvent en Suisse lorsque le débiteur n'habite pas en Suisse et qu'il n'y a pas d'autre cas de séquestre, pour autant que la créance ait un lien suffisant avec la Suisse ou qu'elle se fonde sur une reconnaissance de dette au sens de l'art. 82 al. 1 LP.
Le séquestre peut aussi être requis lorsque le créancier possède contre le débiteur un titre de mainlevée définitive (art. 272 al. 1 ch. 6 LP).
Selon l'art. 272 al. 1 LP, le séquestre est autorisé par le juge du for de la poursuite ou par le juge du lieu où se trouvent les biens, à condition que le créancier rende vraisemblable que sa créance existe (ch. 1), qu'on est en présence d'un cas de séquestre (ch. 2) et qu'il existe des biens appartenant au débiteur (ch. 3).
La procédure d'opposition au séquestre (art. 278 LP) est une procédure sommaire au sens propre; elle présente les trois caractéristiques de simple vraisemblance des faits, examen sommaire du droit et décision provisoire. Elle a en outre un objet et un but particulier : le séquestre, auquel le débiteur s'oppose, est une mesure conservatoire, soit la mise sous mains de justice de biens du débiteur, qui permet de garantir une créance pendant la durée de la procédure de validation du séquestre (art. 279 LP). En tant que procédure spécifique de la LP, la procédure d'opposition au séquestre est aussi une procédure sur pièces (Aktenprozess; procedura in base agli atti; art. 256 al. 1 CPC). C'est au cours de l'action civile en reconnaissance de dette (en validation du séquestre) qui suivra, soumise à une procédure avec un examen complet en fait et en droit, que les parties pourront faire valoir tous leurs moyens de preuve (ATF 138 III 636 consid. 4.3.2 et les références citées).
Le critère de la vraisemblance s'applique non seulement à l'existence de la créance en fait, mais aussi à son existence juridique. Ainsi, les faits à l'origine du séquestre doivent être rendus simplement vraisemblables. Tel est le cas lorsque, se fondant sur des éléments objectifs, le juge acquiert l'impression que les faits pertinents se sont produits, mais sans qu'il doive exclure pour autant la possibilité qu'ils se soient déroulés autrement. A cet effet, le créancier séquestrant doit alléguer les faits et produire un titre qui permette au juge du séquestre d'acquérir, au degré de la simple vraisemblance, la conviction que la prétention existe pour le montant énoncé et qu'elle est exigible. S'agissant de l'application du droit, le juge procède à un examen sommaire du bien-fondé juridique, c'est-à-dire un examen qui n'est ni définitif, ni complet, au terme duquel il rend une décision provisoire (arrêt du Tribunal fédéral 5A_560/2015 du 13 octobre 2015 consid. 3).
Compte tenu des effets rigoureux du séquestre, il n'est pas arbitraire d'user d'une appréciation sévère pour l'examen de la vraisemblance (Chaix, Jurisprudences genevoises en matière de séquestre, in SJ 2005 II 363; Gillieron, Commentaire de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, 2003, n. 27 ad art. 278 LP).
L'opposant doit tenter de démontrer que son point de vue est plus vraisemblable que celui du créancier séquestrant (arrêts du Tribunal fédéral 5A_328/2013 du 4 novembre 2013 consid. 4.3.2; 5A_925/2012 du 5 avril 2013 consid. 9.3).
2.1.1 L'imputation des versements sur des contributions d'entretien se règle selon les art. 85-87 CO (Weber, Berner Kommentar, 2005, n. 13 ad art. 85 OR, n. 6 ad art. 86 OR; Hegnauer, Berner Kommentar, 1997, n. 32 ad art. 289 ZGB).
A teneur de l'art. 86 CO, le débiteur qui a plusieurs dettes à payer au même créancier a le droit de déclarer, lors du paiement, laquelle il entend acquitter (al. 1). Faute de déclaration de sa part, le paiement est imputé sur la dette que le créancier désigne dans la quittance, si le débiteur ne s'y oppose immédiatement (al. 2).
2.1.2 Selon l'art. 289 al. 1 CC, les contributions d'entretien sont dues à l'enfant et sont versées durant sa minorité à son représentant légal ou au parent qui en assume la garde, sauf si le juge en décide autrement.
Cela signifie a contrario que celles qui sont éventuellement dues après la majorité de l'enfant, en application de l'art. 277 al. 2 CC, doivent lui être versées directement (Perrin, CR CC I, 2ème éd. 2023, n. 4 ad art. 289 CC).
Le créancier de l'entretien est donc l'enfant lui-même (arrêts du Tribunal fédéral 5D_103/2009 du 20 août 2009 consid. 1.3, 5C.314/2001 du 20 juin 2002 consid. 9 non publié aux ATF 128 III 305), même si, durant sa minorité, son représentant légal est en droit de les réclamer en son propre nom et à la place de l'intéressé ("Prozessstandschaft"; ATF 136 III 365 consid. 2.2). Il dispose encore de la faculté d'encaisser valablement les prestations versées pour l'enfant, après la majorité de celui-ci, pour autant toutefois que ce dernier approuve, même tacitement, ce mandat (Perrin, op. cit., n. 5 ad art. 289 CC).
2.1.3 A teneur de l'art. 277 al. 2 CC, si, à sa majorité, l'enfant n'a pas encore de formation appropriée, les père et mère doivent, dans la mesure où les circonstances permettent de l'exiger d'eux, subvenir à son entretien jusqu'à ce qu'il ait acquis une telle formation, pour autant qu'elle soit achevée dans les délais normaux.
La question de savoir si la formation suivie correspond à une formation appropriée au sens de l'art. 277 al. 2 CC ou si elle a été achevée dans des délais normaux constitue une problématique qui - sous réserve de situations manifestes - excède la cognition du juge de la mainlevée définitive, auquel il n'appartient pas de trancher des questions délicates de droit matériel ou pour la solution desquelles le pouvoir d'appréciation joue un rôle important (ATF 124 III 501 consid. 3a; arrêts du Tribunal fédéral 5A_719/2019 du 23 mars 2020 consid. 3.3.1; 5A_720/2019 du 23 mars 2020 consid. 3.3). Une telle question relève de la compétence du juge du fond (juge de la modification du jugement de divorce, respectivement de la modification de la contribution d'entretien fixée après la majorité (arrêt du Tribunal fédéral 5A_810/2023 du 1er février 2024 consid. 4.1.3.3). Ces principes sont applicables à la cognition du juge du séquestre (arrêt du Tribunal fédéral 5A_810/2023 du 1er février 2024 consid. 4.1.3.2).
L'obligation d'entretien de l'enfant majeur est subsidiaire à celle due à l'égard du conjoint (ATF 132 III 209 consid. 2.3; Piotet/Gauron-Carlin, CR CC I, 2ème éd. 2023, n. 7b ad art. 277 CC).
2.2 En l'espèce, la créance allégué pour fonder le séquestre consiste en des arriérés de contributions à l'entretien de la recourante pour la période d'août 2023 à juin 2024. La question de l'existence de la créance ne sera ainsi examinée que pour cette période.
S'agissant des mois d'août et septembre 2023, les détails de transactions versés au dossier indiquent des virements au débit du compte de l'intimé, en faveur de la recourante, avec un libellé "PENSION A______ + ENFANTS" pour le montant de 7'500 fr. chacun, puis, à partir d'octobre 2023, le libellé des virements est modifié en "PENSION". A teneur du jugement de divorce, la contribution d'entretien en faveur de la recourante s'élève à 7'500 fr. et celles des enfants à 1'200 fr. par enfant durant leur minorité, voire au-delà en cas d'études sérieuses et régulières, de sorte que le montant global représente 9'900 fr., voire 11'100 fr. en comptant également l'enfant aînée. Depuis l'accession à la majorité des enfants, l'intimé a continué à verser à la recourante un montant global, comprenant la contribution d'entretien en sa faveur et celle en faveur des enfants. Il y a ainsi lieu de déterminer si les 7'500 fr. par mois versés par l'intimé durant la période litigieuse comprennent, comme le soutient la recourante, les contributions d'entretien en faveur des enfants majeures ou si, comme le prétend l'intimé, ce montant ne couvre que la contribution d'entretien en faveur de la recourante, la mention "+ ENFANTS" dans les libellés des mois d'août et septembre 2023 étant une simple erreur.
Il y a tout d'abord lieu de relever que la recourante n'était plus, durant cette période, la créancière des contributions d'entretien en faveur des enfants majeures. Rien au dossier ne permet en effet de constater que les enfants auraient autorisé leur mère à continuer à percevoir, en leur nom, les contributions d'entretien éventuellement dues en leur faveur. Le fait que l'intimé avait continué à verser à la recourante les contributions d'entretien des enfants après leur accession à la majorité, ne permet pas de retenir un accord de leur part. En outre, contrairement à ce que prétend la recourante, le fait qu'elle ait écrit à l'intimé qu'elle affecterait deux montants de 1'200 fr. chacun à l'entretien des enfants sur les 7'500 fr. qu'il lui versait, sans que celui-ci s'y oppose, n'est pas déterminant. En effet, l'art. 86 al. 2 CO n'est pas applicable au cas d'espèce puisque l'intimé n'a pas "plusieurs dettes" à payer à la même créancière, compte tenu du fait que la recourante n'est pas créancière des contributions d'entretien en faveur des filles majeures.
Par ailleurs, l'intimé s'est justement opposé à la continuation du paiement des contributions d'entretien en faveur des enfants, et ce depuis le 13 mars 2024, date du dépôt des actions en suppression des contributions d'entretien en faveur des enfants majeures, ce que la recourante ne pouvait ignorer puisque les filles vivaient encore auprès d'elle.
La question de savoir si l'intimé était fondé à supprimer la contribution d'entretien pour les enfants majeures excède le pouvoir de cognition du juge du séquestre, auquel il n'appartient pas de trancher des questions délicates de droit matériel ou pour la solution desquelles le pouvoir d'appréciation joue un rôle important, sous réserve de situation manifeste.
A ce propos toutefois, il est manifeste que E______, alors âgée de 25 ans et ayant terminé ses études depuis 2019, ne pouvait prétendre à une contribution d'entretien. Il est également manifeste que F______, âgée de 22 ans et encore en formation, était, quant à elle, en droit de se voir verser des contributions à son entretien. Celle-ci ayant affirmé qu'au 24 mai 2024, il n'existait pas d'arriéré de contribution d'entretien en sa faveur, il ne saurait être retenu que l'intimé ne s'était pas acquitté des contributions dues. Il importe peu en revanche que l'extrait du compte bancaire de l'intimé n'affiche pour l'année 2024 que deux virements de 1'200 fr. chacun en faveur de F______, la contribution d'entretien ayant pu être réglée en ses mains par un autre moyen. Enfin, concernant G______, contrairement à ses sœurs, le maintien ou non de son droit à une contribution d'entretien est discutable, de sorte que cette question ne saurait être tranchée dans la présente procédure d'opposition à séquestre.
A cela s'ajoute que, de jurisprudence constante, l'obligation d'entretien de l'enfant majeur est subsidiaire à celle due à l'égard du conjoint. Ce principe s'applique, contrairement à ce que soutient la recourante, tant au moment de la fixation des contributions d'entretien qu'au moment du paiement des contributions d'entretien. Partant, même à considérer que l'intimé devait encore verser des contributions d'entretien en faveur des enfants majeures, cette subsidiarité implique que le montant versé sur le compte de la recourante l'était, en principe, en faveur de celle-ci et non en faveur des enfants majeures.
Par conséquent, la thèse de l'intimé, selon laquelle les virements mensuels de 7'500 fr. correspondaient à la contribution d'entretien en faveur de la recourante, nonobstant le libellé erroné des mois d'août et septembre 2023, est plus vraisemblable que celle de la recourante.
Celle-ci n'étant pas parvenue à rendre vraisemblable l'existence de sa créance, c'est à juste titre que le Tribunal a admis l'opposition au séquestre et révoqué l'ordonnance de séquestre du 9 juillet 2024. Le fait que le Tribunal a prononcé la mainlevée définitive dans le cadre de la procédure en validation de séquestre n'est pas déterminant, ce jugement faisant l'objet d'un recours par-devant la Cour et l'effet suspensif ayant été ordonné.
Le recours sera dès lors rejeté.
3. La recourante qui succombe sera condamnée aux frais du recours (art. 106 al. 1 CPC).
Les frais judiciaires du recours seront fixés à 600 fr. (art. 48 et 61 OELP) et compensés avec l'avance fournie par la recourante, qui restera acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).
Les dépens de recours dus à l'intimé seront arrêtés à 1'000 fr., débours compris (art. 84, 85, 88, 89 et 90 RTFMC), la TVA étant exclue au regard du domicile à l'étranger de l'intimé.
* * * * *
La Chambre civile :
A la forme :
Déclare recevable le recours interjeté le 3 mars 2025 par A______ contre le jugement OSQ/9/2025 rendu le 20 février 2025 par le Tribunal de première instance dans la cause C/15759/2024-12 SQP.
Au fond :
Le rejette.
Déboute les parties de toutes autres conclusions.
Sur les frais :
Arrête les frais judiciaires de recours à 600 fr., les met à la charge de A______ et les compense avec l'avance fournie de même montant, acquise à l'Etat de Genève.
Condamne A______ à verser 1'000 fr. à B______ à titre de dépens de recours.
Siégeant :
Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, présidente; Madame Nathalie RAPP, Madame Stéphanie MUSY, juges; Madame Laura SESSA, greffière.
La présidente : Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ |
| La greffière : Laura SESSA |
Indication des voies de recours :
Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.
Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.
Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF inférieure à 30'000 fr.