Décisions | Chambre pénale de recours
ACPR/648/2025 du 14.08.2025 sur ONMMP/2357/2025 ( MP ) , REJETE
république et | canton de Genève | |
POUVOIR JUDICIAIRE P/208/2025 ACPR/648/2025 COUR DE JUSTICE Chambre pénale de recours Arrêt du jeudi 14 août 2025 |
Entre
A______, représenté par Me Vadim NEGRESCU, avocat, DN AVOCATS SNC, rue de Rive 4, 1204 Genève,
recourant,
contre l'ordonnance de non-entrée en matière rendue le 19 mai 2025 par le Ministère public,
et
LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B,
1213 Petit-Lancy, case postale 3565, 1211 Genève 3,
intimé.
EN FAIT :
A. a. Par acte expédié le 2 juin 2025, A______ recourt contre l'ordonnance du 19 mai 2025, notifiée le surlendemain, par laquelle le Ministère public a refusé d'entrer en matière sur sa plainte.
Le recourant conclut, sous suite de frais et dépens, à l'annulation de l'ordonnance querellée et au renvoi de la cause au Ministère public pour qu'il ouvre une instruction, complète celle-ci "avec les éléments qui s'imposent" et rende une ordonnance pénale, alternativement porte l'accusation devant le Tribunal.
b. Le recourant a versé les sûretés en CHF 1'200.- qui lui étaient réclamées par la Direction de la procédure.
B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :
a. Le 5 octobre 2024, A______ s'est rendu, avec des amis, [au club] B______, où ils avaient réservé une table en zone VIP. L'accès à cette zone était autorisé sous présentation d'un bracelet aux agents de sécurité.
b. Alors que A______ revenait des toilettes se trouvant en dehors de la zone VIP, l'agent de sécurité lui a bloqué le passage et demandé de présenter son bracelet, ce qu'il a refusé. S'est ensuivie une altercation, nécessitant l'intervention de plusieurs membres du personnel, qui ont sorti A______.
c. Le 4 janvier 2025, A______ a déposé plainte pénale contre les agents de sécurité de B______ pour lésions corporelles simples et voies de fait.
Alors qu'il voulait retourner dans la zone VIP, l'agent de sécurité lui avait une nouvelle fois demandé de présenter son bracelet, bien qu'il le lui eût déjà montré à plusieurs reprises. Il avait dès lors refusé et l'employé du club avait haussé le ton et saisi son bras. Surpris, il s'était dégagé de l'emprise et s'était avancé dans la zone VIP, lui tournant le dos. D'autres agents de sécurité étaient alors intervenus. L'un d'entre eux lui avait violemment saisi le cou, pendant que ses collègues l'avaient pris par les bras et les pieds afin de le porter à l'extérieur du club. Son corps avait été maintenu immobile et il avait manqué d'air, sentant qu'il pouvait perdre connaissance. Il avait finalement été jeté brutalement sur le bitume, à l'extérieur du club et, lors de sa chute, sa tête avait violemment heurté le sol. Se trouvant en état de choc et constatant qu'il saignait à la tête, il avait appelé la police, ainsi qu'une ambulance. Son épouse avait assisté à l'intégralité de la scène.
À l'appui de sa plainte, il a produit un constat de lésions traumatiques du 6 octobre 2024 attestant de douleurs au niveau de la pomme d'Adam et lors de la rotation de la tête, d'une dermabrasion de l'arcade sourcilière gauche, d'un érythème sur le trapèze droit, de deux hématomes sur le bras droit, de dermabrasions sur l'épaule, le bras et l'avant-bras gauche, de douleurs à la palpation de l'articulation de la clavicule droite, de douleurs à la flexion de l'épaule gauche et de diverses plaies.
Il a également sollicité plusieurs actes d'enquête, soit son audition, celle de son épouse, ainsi que celle des agents de sécurité.
d. Entendus par la police, les agents de sécurité étant intervenus le soir des faits ont tous contesté les faits reprochés et confirmé que A______ avait été particulièrement agressif et fait preuve d'une grande violence. Il était très agité et alcoolisé et avait essayé de leur donner des coups de coude et de pied. Son évacuation avait été difficile et avait mobilisé plusieurs personnes. Ils étaient intervenus après avoir reçu un appel radio indiquant qu'une bagarre avait lieu en zone VIP. Ils estimaient avoir effectué leur travail avec professionnalisme.
d.a. C______ avait constaté, en arrivant, qu'un de ses collègues (D______) ceinturait A______. Ce dernier essayait de donner des coups de coude et de pied. L'un de ses collègues (E______) avait d'ailleurs reçu un coup de genou à la hauteur du plexus et était tombé au sol. Tout au long de l'altercation, A______ les avait insultés.
Il a produit une clé USB contenant deux vidéos. Sur l'une d'entre elles, filmée depuis l'arrière du bar (B______ 1), l'on aperçoit A______ plonger rapidement en direction d'un agent de sécurité (00:00:15), se tenant face à lui, le poing en avant, le projetant violemment contre le mur, avant d'être ceinturé par ce dernier, tout en se débattant et gesticulant avec force et donnant des coups de coude. La deuxième vidéo (B______ 2) montre les agents de sécurité sortant calmement A______ du club, l'un d'entre eux le tenant par le cou et un autre par le bras.
Il a également remis à la police le "débriefing accueil/sécurité" du soir des faits, duquel il ressort que A______ avait été sorti pour avoir refusé de présenter son bracelet d'accès VIP et avoir eu des "réactions ultra-violentes", causé des "bousculades musclées sur les clients" et avoir porté des coups sur l'agent en poste. Plusieurs agents avaient dû intervenir pour son extraction et la "mise en sécurité du public" car il refusait "toutes [leurs] demandes de coopérer". A______ était resté très agité et insultant jusqu'à sa sortie complète.
d.b. F______ avait observé ses collègues sortir A______. Ce dernier hurlait et se débattait, créant "un scandale". Lorsqu'il avait été relâché, A______ avait essayé de revenir à la charge et de donner des coups à ses collègues.
d.c. G______ avait vu E______ chuter, après avoir reçu un coup de genou de A______. Il était alors intervenu et l'avait pris par le bras afin d'éviter qu'il continuât à donner des coups. Il l'avait accompagné comme cela jusqu'à la sortie, E______ le tenant par le cou pour le maîtriser, sans l'étrangler.
d.d. D______ devait, le soir des faits, vérifier que les personnes entrant en zone VIP étaient munies d'un bracelet y autorisant l'accès. A______ avait tenté d'entrer sans présenter son bracelet. Il avait alors placé son bras devant son corps, mais ce dernier avait tenté de forcer le passage. Il avait voulu se placer face à lui pour l'obliger à présenter son bracelet, mais A______ l'avait poussé à la hauteur du torse et du visage et essayé de lui donner des coups. Il avait pu le ceinturer, sans lui faire mal, étant pratiquant de jujitsu, pour se mettre en sécurité et avait patienté quelques secondes dans cette position, le temps que ses collègues intervinssent. À la fin de son audition, il a déposé plainte contre A______.
d.e. E______ avait constaté, à son arrivée sur le lieu de l'altercation, que D______ tenait A______, lequel se débattait et essayait de lui donner des coups. Il avait voulu l'aider en saisissant les pieds de celui-ci, mais avait reçu un coup de pied violent au niveau du torse. Durant "l'extraction", A______ avait indiqué être désormais calme, de sorte qu'ils l'avaient relâché un court instant, mais il était redevenu très agressif et avait essayé de leur donner des coups de poing et de pied. C'est alors qu'il l'avait saisi par le cou et l'avait conduit à l'extérieur. Durant le conflit, il était tombé au sol. À la fin de son audition, il a déposé plainte contre A______.
e. Entendu par la police, A______ a confirmé sa plainte. Il estimait qu'il n'avait pas à présenter son bracelet pour retourner dans la zone VIP, puisqu'il avait déjà effectué plusieurs "va-et-vient" et qu'ils étaient peu nombreux dans cette zone (une quinzaine de personnes). Tout au long de l'intervention des membres de la sécurité, il avait été entravé, ayant gardé les yeux fermés, se sentant "comme dans un sac". Il n'avait pas compris ce qu'il s'était passé. Il avait tenté de se libérer, mais son intention n'était pas de faire mal. Une fois à l'extérieur, constatant ses lésions, il en avait déduit qu'il avait été malmené et traîné sur le sol et, n'étant pas d'accord avec ce qu'il avait subi, avait appelé l'ambulance et la police.
f. Entendue par la police, H______, épouse de A______, a confirmé avoir été présente le 4 octobre 2024 à B______. Se trouvant dans la zone VIP, elle avait entendu un bruit étrange et s'était retournée. Elle avait alors vu deux membres de la sécurité tenir son époux. Rapidement, deux ou trois autres collègues étaient venus et lui avaient saisi les jambes pour le sortir du club. Alors qu'ils se trouvaient à l'extérieur, A______ protestait. L'un des videurs l'avait mis sur le sol, un autre l'avait traîné et un troisième avait posé son coude sur sa gorge pour le maîtriser. Elle avait alors crié "laissez-le, il ne peut pas respirer".
g. Selon le rapport de police du 26 février 2025, à 2h20, A______ présentait de forts signes d'ébriété et une alcoolémie de 0.64 mg/l (anciennement 1.28‰).
h.a. Par ordonnance pénale du 19 mai 2025, A______ a été déclaré coupable d'injure, de dénonciation calomnieuse et de voies de fait.
h.b. Il y a formé opposition par courrier du 2 juin 2025.
C. Dans l'ordonnance querellée, le Ministère public retient que, contrairement aux déclarations de A______, D______ était entré calmement en contact avec lui, afin qu'il présentât son bracelet. Le conflit avait commencé lorsque le plaignant avait poussé violemment le mis en cause contre le mur et avait tenté de lui donner des coups de pied et de poing alors que D______ le ceinturait. Les gestes adoptés par les membres du personnel n'étaient dès lors que le résultat d'une légitime défense suite à une altercation physique que A______ avait initiée, faisant preuve d'une violence inouïe, alors qu'il présentait un taux d'alcool important.
D. a. Dans son recours, A______ reproche au Ministère public d'avoir fondé sa décision sur les images de vidéosurveillance, sans les visionner, celles-ci ayant été filmées à l'aide d'un téléphone portable, de sorte qu'il était quasiment impossible de voir ce qu'il se passait à l'intérieur du club. Il était également vraisemblable qu'elles eussent été manipulées. De plus, elles étaient de piètre qualité, incomplètes et partiales, puisque sélectionnées par le personnel du club.
Les faits avaient également été constatés de façon inexacte, puisqu'il n'avait pas donné de coups, ce qui ressortait de la vidéo. L'ordonnance faisait en outre l'impasse sur les très nombreuses contradictions des prévenus, ces derniers ayant manifestement accordé leurs versions qui étaient peu crédibles. Le rapport de police avait également été établi sur une base factuelle erronée et était partial. Il contestait enfin avoir insulté le personnel et avoir bu de l'alcool une fois arrivé au club et, outre la mention dans le rapport de police, aucun élément matériel au dossier ne permettait de retenir qu'il avait bien un taux d'alcoolémie de 0.64 mg/l.
Les séquences sélectionnées montraient qu'il était très calme en revenant dans la zone VIP. Il avait été tiré en arrière par un membre de la sécurité, avait perdu l'équilibre et chuté. Son bras avait été tordu dans son dos et il avait ensuite été ceinturé et maintenu contre le mur et il lui avait été impossible de se débattre. Il contestait avoir porté le premier coup, de sorte que les agissements du personnel du club, qui ne disposait pas des mêmes prérogatives que les forces de l'ordre, ne constituaient pas de la légitime défense et étaient disproportionnés. Il avait été effrayé par leur comportement et avait essayé de les repousser, sans donner de coup. Au vu de ce qui précédait, le Ministère public ne pouvait rendre une ordonnance de non-entrée en matière, la culpabilité des prévenus étant avérée, mais aurait dû condamner ces derniers pour les lésions qu'il avait subies.
Une audience de confrontation était nécessaire pour que les déclarations des mis en cause fussent "contrôlées avec précision" et d'autres actes d'instructions pourraient être sollicités dans la mesure où, à ce stade, son droit d'être entendu n'avait pas pu être exercé, vu le prononcé de l'ordonnance querellée.
b. À réception des sûretés, la cause a été gardée à juger sans échange d'écritures, ni débats.
EN DROIT :
1. 1.1. Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émaner de la partie plaignante qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. b CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).
2. La Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement irrecevables ou mal fondés (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP).
Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent.
3. Le recourant se plaint d'une constatation inexacte des faits.
Dès lors que la Chambre de céans jouit d'un plein pouvoir de cognition en droit et en fait (art. 393 al. 2 CPP; ATF 137 I 195 consid. 2.3.2; arrêt du Tribunal fédéral 1B_524/2012 du 15 novembre 2012 consid. 2.1), les éventuelles constatations incomplètes ou inexactes du Ministère public auront été corrigées dans l'état de fait établi ci-devant.
Partant, ce grief sera rejeté.
4. Le recourant se plaint d'une violation de son droit d'être entendu, dans la mesure où le Ministère public n'a pas effectué d'audition contradictoire et que le prononcé d'une ordonnance de non-entrée en matière l'aurait empêché, à ce stade, de solliciter des actes d'enquête supplémentaires.
4.1. Le droit d'être entendu, tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 Cst., comprend notamment pour le justiciable le droit de s'exprimer sur les éléments pertinents avant qu'une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, d'obtenir l'administration des preuves pertinentes et valablement offertes, de participer à l'administration des preuves essentielles et de se déterminer sur son résultat lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 142 II 218 consid. 2.3).
Diverses mesures d'investigation peuvent être mises en œuvre avant l'ouverture d'une instruction, telle que l'audition du suspect par la police sur délégation du ministère public (arrêt du Tribunal fédéral 6B_875/2018 du 15 novembre 2018 consid. 2.2.1). Durant cette phase préalable, le droit de participer à l'administration des preuves ne s'applique en principe pas. Avant de rendre une ordonnance de non-entrée en matière, le ministère public n'a pas à en informer les parties et il n'a pas à leur donner la possibilité d'exercer leur droit d'être entendu, lequel sera assuré, le cas échéant, dans le cadre de la procédure de recours, ou elles pourront faire valoir, auprès d'une autorité qui dispose d'un plein pouvoir d'examen (art. 391 al. 1 et 393 al. 2 CPP), tous leurs griefs, de nature formel et matériel (arrêt du Tribunal fédéral 6B_854/2018 du 23 octobre 2018 consid. 3.1).
4.2. En l'espèce, la procédure n'a pas dépassé la phase des simples investigations et aucune instruction n'a été ouverte, de sorte que le Ministère public était dispensé d'inviter les parties à se déterminer oralement ou par écrit avant de prononcer l'ordonnance querellée. La motivation de cette dernière, claire et suffisante, permettait en outre au recourant de contester la décision dans le cadre d'un recours en toute connaissance de cause, ce qu'il a au demeurant fait, et de solliciter des actes d'enquête supplémentaires. Or, ce dernier n'indique pas quels actes d'instruction le Ministère public aurait omis d'ordonner, ce dernier ayant délégué à la police l'audition de toutes les personnes intervenues le soir des faits et n'étant pas tenu, avant l'ouverture de l'instruction – qui n'a pas eu lieu ici –, de confronter les parties.
Par conséquent, aucune violation du droit d'être entendu du recourant ne peut être retenue et ce grief sera rejeté.
5. Le recourant reproche au Ministère public de ne pas être entré en matière sur sa plainte.
5.1. Selon l'art. 310 al. 1 CPP, le ministère public rend immédiatement une ordonnance de non-entrée en matière s'il ressort de la dénonciation ou du rapport de police que les éléments constitutifs de l'infraction ou les conditions à l'ouverture de l'action pénale ne sont manifestement pas réunis (let. a) ou qu'il existe des empêchements de procéder (let. b).
Conformément à cette disposition, la non-entrée en matière est justifiée lorsque la situation est claire sur le plan factuel et juridique. Tel est le cas lorsque les faits visés ne sont manifestement pas punissables, faute, de manière certaine, de réaliser les éléments constitutifs d'une infraction, ou encore lorsque les conditions à l'ouverture de l'action pénale font clairement défaut. Au stade de la non-entrée en matière, on ne peut admettre que les éléments constitutifs d'une infraction ne sont manifestement pas réalisés que lorsqu'il n'existe pas de soupçon suffisant conduisant à considérer un comportement punissable ou lorsqu'un éventuel soupçon initial s'est entièrement dissipé. En revanche, si le rapport de police, la dénonciation ou les propres constatations du ministère public amènent à retenir l'existence d'un soupçon suffisant, il incombe en principe à ce dernier d'ouvrir une instruction (art. 309 al. 1 let. a CPP). Cela implique que les indices de la commission d'une infraction soient importants et de nature concrète, ce qui n'est pas le cas de rumeurs ou de suppositions. Le soupçon initial doit reposer sur une base factuelle plausible, laissant apparaître la possibilité concrète qu'une infraction ait été commise (ATF 141 IV 87 consid. 1.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_196/2020 du 14 octobre 2020 consid. 3.1). Dans le doute, lorsque les conditions d'une non-entrée en matière ne sont pas réalisées avec une certitude absolue, l'instruction doit être ouverte (arrêt 6B_196/2020 précité ; ATF 143 IV 241 consid. 2.2.1 ; ATF 138 IV 86 consid. 4.1 ; ATF 137 IV 219 consid. 7).
5.2. Aux termes de l'art. 123 al. 1 CP est punissable quiconque, intentionnellement, fait subir à une personne une autre atteinte – que grave – à l'intégrité corporelle ou à la santé, telle que des blessures, meurtrissures, hématomes, écorchures ou des griffures, sauf si ces lésions n'ont pas d'autres conséquences qu'un trouble passager et sans importance du sentiment de bien-être (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1283/2018 du 14 février 2019 consid. 2.1).
L'art. 125 CP réprime, quiconque, par négligence, fait subir à une personne une atteinte à l’intégrité corporelle ou à la santé. Selon l'art. 12 al. 3 CP, agit par négligence quiconque, par une imprévoyance coupable, commet un crime ou un délit sans se rendre compte des conséquences de son acte ou sans en tenir compte. L’imprévoyance est coupable quand l’auteur n’a pas usé des précautions commandées par les circonstances et par sa situation personnelle.
Les voies de fait, réprimées par l'art. 126 CP, se définissent comme des atteintes physiques qui excèdent ce qui est socialement toléré et qui ne causent ni lésions corporelles, ni dommage à la santé; il s'agit généralement de contusions, de meurtrissures, d'écorchures ou de griffures (ATF 134 IV 189 consid. 1.2).
La distinction entre lésions corporelles et voies de fait peut s'avérer délicate, notamment lorsque l'atteinte s'est limitée à des meurtrissures, des écorchures, des griffures ou des contusions. Ainsi, une éraflure au nez avec contusion a été considérée comme une voie de fait; de même une meurtrissure au bras et une douleur à la mâchoire sans contusion (ATF 134 IV 189 consid. 1.3). Ont également été qualifiées de voies de fait : une gifle, un coup de poing ou de pied, de fortes bourrades avec les mains ou les coudes (arrêt du Tribunal fédéral 6B_525/2011 du 7 février 2012 consid. 4.1).
Les voies de fait ne peuvent pas être commises par négligence (A. MACALUSO / L. MOREILLON / N. QUELOZ (éds), Commentaire Romand, Code pénal II, 2017, Lausanne, n. 6 ad. art. 52).
5.3. En l'espèce, il est constant que, le jour des faits, une altercation est survenue entre A______ et les membres du personnel de sécurité de B______, après que le premier eut refusé de montrer son bracelet permettant l'accès à la zone VIP. Il est admis que ceux-là ont, dans un premier temps, ceinturé le recourant, puis l'ont tenu par le cou et les bras afin de le sortir de l'établissement. Le constat médical et les photographies produites par le recourant font état de diverses douleurs, de deux hématomes et de dermabrasions, lesquels paraissent devoir être qualifiés, au vu de l'absence de gravité et de la jurisprudence précitée, de voies de fait.
Reste à déterminer si c'est à dessein que les mis en cause ont provoqué ces atteintes, une telle infraction ne pouvant être commise par négligence.
Le recourant conteste la valeur probante des images de vidéosurveillance, celles-ci étant, selon lui, incomplètes, partiales et ayant potentiellement été manipulées par les membres du personnel du club, tout en se fondant sur ces dernières pour contester sa culpabilité. Or, aucun élément au dossier ne permet de retenir que tel aurait été le cas et le recourant ne le rend aucunement vraisemblable. Au contraire, leur contenu correspond aux faits décrits par les parties, de sorte que, bien que leur qualité ne soit pas optimale, il n'y a pas lieu de s'en écarter.
Contrairement à ce que soutient le recourant, les mis en causes ne se sont pas contredits durant leurs auditions, ces derniers ayant tous confirmé le même déroulement des faits et leur version étant corroborée par les images de vidéosurveillances qui, bien que de mauvaise qualité, permettent d'établir, en partie, le déroulement des faits. En effet, sur la première vidéo, l'on peut apercevoir que le recourant fait face à D______ et se propulse sur lui, les bras en avant, le faisant heurter le mur qui se trouve derrière lui. Ce n'est que postérieurement que D______ ceinture le recourant, qui se débat violemment avec ses quatre membres, obligeant d'autres agents de sécurité à intervenir pour aider leur collègue en difficulté. Ainsi, les faits, tels que relatés par le recourant – qui, dans sa plainte pénale, soutient s'être trouvé de dos lorsque plusieurs membres de la sécurité l'ont saisi et tiré par le cou –, ne trouve aucune assise dans le dossier, son épouse n'ayant au demeurant pas assisté au début de l'altercation, puisqu'elle se trouvait alors de dos. Les versions concordantes des membres du personnel apparaissent dès lors crédibles.
Les membres du personnel ont tous confirmé que le recourant était fortement alcoolisé et particulièrement agressif, ce qui ressort également du "débriefing accueil sécurité". Son extraction du club avait d'ailleurs nécessité l'intervention de nombreux agents de sécurité et il avait été nécessaire de l'immobiliser afin d'assurer la sécurité du personnel ainsi que celle des clients du club.
Le rapport de police – dont on ne perçoit pas en quoi il serait partial ou aurait été établi de manière erronée – confirme cette version, faisant notamment état de forts signes d'ébriété du recourant plusieurs heures après les faits et d'une alcoolémie de 0.64 mg/l (anciennement 1.28‰). Le recourant, qui ne conteste pas s'être soumis à un test d'alcoolémie, ne démontre pas, ni ne rend vraisemblable, que le résultat de celui-ci serait erroné, de sorte qu'il convient de s'y référer.
Ainsi, le caractère intentionnel des gestes incriminés doit être nié, aucun élément ne permettant de retenir que les mis en cause auraient souhaité blesser le recourant, mais uniquement le maîtriser, étant rappelé que les voies de fait par négligence ne se conçoivent pas, d'une part, et que les lésions ont au demeurant pu être causées par le comportement du recourant, qui s'est fortement débattu, d'autre part.
5.4. En tout état, voudrait-on considérer que les atteintes sus-évoquées devraient être qualifiées de lésions corporelles simples et, partant, pourraient également avoir été commises par négligence, qu'il conviendrait de retenir que les mis en cause n'auraient pas outrepassé ce qui pouvait être attendu d'eux au vu des circonstances. En effet, ces derniers ont agi conformément à leurs prérogatives, en leur qualité d'agents de sécurité, et se sont contentés de maîtriser et repousser le recourant, lequel avait refusé de présenter son bracelet, se débattait et avait adopté un comportement agressif à leur encontre, allant même jusqu'à tenter de les frapper avec ses bras et ses jambes, et ayant fait chuter l'un d'entre eux au sol avec un coup de pied dans le thorax. Ainsi, les atteintes du recourant ne sont que la conséquence de son comportement fautif et de gestes qui ne dépassent pas ce qui était nécessaire et pouvait être toléré par le recourant, au vu de son refus d'obtempérer et de sa résistance. On ne saurait effectivement considérer qu'en maîtrisant le recourant au moyen notamment d'une clef de bras, afin qu'il se calmât et pût être sorti en toute sécurité, les mis en cause auraient agi de manière coupable en omettant d'user des précautions commandées par les circonstances. Au contraire, leur réaction apparait mesurée au vu de l'ensemble des circonstances.
Au vu de ce qui précède, c'est à bon droit que le Ministère public a considéré qu'il se justifiait de ne pas entrer en matière sur la plainte du recourant. L'ordonnance querellée ne prête ainsi pas le flanc à la critique.
6. Aucun acte d'instruction ne paraît susceptible de modifier cette appréciation, vu les éléments concrets et objectifs sur lesquels le Ministère public a fondé sa décision, à savoir les déclarations précises et crédibles des mis en cause, corroborées par les images de vidéosurveillance. En effet, la confrontation des parties conduirait tout au plus à confirmer que leurs versions divergent, dans la mesure où, vraisemblablement, ni les mis en cause, ni le recourant ne les modifieraient.
7. Le recours sera ainsi rejeté et l'ordonnance querellée confirmée.
8. Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, fixés en totalité à CHF 1'200.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03). Ces frais seront compensés avec les sûretés versées.
9. Corrélativement, aucun dépens ne lui sera alloué.
* * * * *
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Rejette le recours.
Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 1'200.-.
Dit que ce montant sera prélevé sur les sûretés versées.
Notifie le présent arrêt à A______, soit pour lui son conseil, et au Ministère public.
Siégeant :
Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Madame Catherine GAVIN et Monsieur Vincent DELALOYE, juges; Monsieur Julien CASEYS, greffier.
Le greffier : Julien CASEYS |
| La présidente : Daniela CHIABUDINI |
Voie de recours :
Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF;
RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.
Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse
(art. 48 al. 1 LTF).
P/208/2025 | ÉTAT DE FRAIS |
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COUR DE JUSTICE
Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).
Débours (art. 2) | | |
- frais postaux | CHF | 10.00 |
Émoluments généraux (art. 4) | | |
- délivrance de copies (let. a) | CHF | 00.00 |
- délivrance de copies (let. b) | CHF | 00.00 |
- état de frais (let. h) | CHF | 75.00 |
Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13) | | |
- décision sur recours (let. c) | CHF | 1'115.00 |
Total | CHF | 1'200.00 |