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Décisions | Chambre pénale de recours

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PM/687/2023

ACPR/936/2023 du 05.12.2023 sur JTPM/758/2023 ( TPM ) , REJETE

Descripteurs : LIBÉRATION CONDITIONNELLE;PRONOSTIC
Normes : CP.86

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

PM/687/2023 ACPR/936/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mardi 5 décembre 2023

 

Entre

A______, actuellement détenu, représenté par Me B______, avocat,

recourant,

contre le jugement rendu le 6 novembre 2023 par le Tribunal d'application des peines et des mesures,

et

LE TRIBUNAL D'APPLICATION DES PEINES ET DES MESURES, rue des Chaudronniers 9, 1204 Genève – case postale 3715, 1211 Genève 3,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy – case postale 3565, 1211 Genève 3,

LE SERVICE DE L'APPLICATION DES PEINES ET MESURES, route des Acacias 82, 1227 Carouge – case postale 1629, 1211 Genève 26,

intimés.


EN FAIT :

A. Par acte expédié le 17 novembre 2023, A______ recourt contre le jugement du 6 novembre 2023, notifié le lendemain, par lequel le Tribunal d'application des peines et des mesures (ci-après : TAPEM) a refusé sa demande de libération conditionnelle.

Il conclut, sous suite de frais et indemnité, à l'annulation dudit jugement et à sa libération immédiate. Préalablement, il sollicite la production des procédures PM/1______/2019 et PM/2______/2020.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a.a. A______, né le ______ 1967, ressortissant suisse, se trouve actuellement en exécution de peine, après avoir été condamné, par arrêt du Tribunal criminel du 1er juin 2012, confirmé par la Chambre pénale d'appel et de révision le 8 février 2013, à une peine privative de liberté de seize ans, dont à déduire 1'386 jours de détention préventive, pour assassinat.

a.b. Il a été incarcéré du 24 avril 2009 au 8 décembre 2014 à la prison de C______, puis aux Établissements de D______ (ci-après : D______) du 8 décembre 2014 au 17 février 2021, date de son transfert à l'Établissement pénitentiaire de E______ (ci-après : E______), où il a été incarcéré jusqu'au 21 mars 2023. Il est retourné ensuite à la prison de C______ puis à l'établissement de F______ (ci-après : F______) à la suite d'une décision de retour en milieu fermé prise par le Service de l'application des peines et mesures (ci-après : SAPEM). Le 26 octobre 2023, il a été transféré à l'Établissement de G______, en milieu ouvert, à la suite de l'arrêt rendu par la Chambre de céans le 29 septembre 2023 (ACPR/755/2023).

a.c. Les deux tiers de la peine ont été atteints le 22 décembre 2019, tandis que la fin de peine est fixée au 22 avril 2025.

b. Par jugements des 19 décembre 2019, 20 mai 2020 et 21 mai 2021 (confirmé par l'arrêt de la Chambre de céans du 16 août 2021 [ACPR/534/2021]), le TAPEM a refusé d'accorder la libération conditionnelle à A______.

c. L'évaluation criminologique du Service de probation et d'insertion (SPI) du 28 août 2018 avait retenu un faible risque de récidive spécifique. Le risque de récidive violente et le risque de récidive générale ont, quant à eux, été évalués comme moyens.

d. Dans son rapport du 29 mai 2020 relatif à l'octroi de congés, la Commission d'évaluation de la dangerosité (ci-après : CED) avait globalement retenu le bon comportement en détention de A______, mais relevé que les nombreuses années d'incarcération n'avaient pas eu d'effet sur lui, ce dernier refusant de se livrer à un travail d'introspection non seulement par rapport aux faits, mais également de manière plus générale, et refusant tout suivi psychothérapeutique. Retenant que le caractère "sans concession" de l'intéressé constituait un obstacle à toute progression dans la suite de l'exécution de sa peine, la CED avait néanmoins évalué qu'il ne présentait pas de danger pour la collectivité dans le cadre de congés.

e. Un bilan simplifié de phases du plan d'exécution de la sanction (ci-après : PES) avait été validé par le SAPEM le 12 mars 2020, lequel prévoyait la possibilité d'octroyer à A______, avant une éventuelle libération conditionnelle, un régime de congés, afin de lui permettre de reprendre progressivement contact avec la réalité extérieure, tester ses capacités à gérer ce retour en dehors du cadre pénitentiaire et préparer sa future réinsertion professionnelle.

f. Dans son préavis du 7 juin 2022, la CED a considéré que A______ n'avait pas rempli les objectifs fixés par le PES et n'avait pas préparé sa sortie de manière concrète, préférant reporter la responsabilité de sa réinsertion sur les institutions; il s'exposait ainsi à une précarité sociale, économique et professionnelle et il n'avait pas élaboré de projet thérapeutique alors qu'il le devait. En conclusion, l'intéressé présenterait un danger pour la collectivité en cas de libération conditionnelle.

g. Par jugement du 26 juillet 2022, le TAPEM a refusé la libération conditionnelle de A______, malgré le préavis favorable du 2 mai 2022 du SAPEM, qui considérait qu'un "maintien en détention n'apporterait aucune plus-value quant aux chances de réinsertion et ne serait pas mis à profit par [l'intéressé] pour espérer un meilleur travail d'amendement au vu de son opposition à l'encontre du système pénal".

Il était relevé en substance que le comportement de l'intéressé s'avérait fluctuant avec une propension à reporter les causes de ses comportements sur les institutions. Ses comportements (refus d'accomplir des démarches administratives, refus de soins, refus de participer à des activités hormis le travail, prétentions irréalistes avec attitudes inappropriées avec le personnel, emportement enflammé, diverses sanctions au sein de l'établissement, refus d'audiences notamment et absence de préparation à la sortie), auxquels s'ajoutaient un manque total d'amendement, une absence de projet réaliste et concret à la sortie et un risque de récidive générale évalué comme moyen, démontraient des difficultés d'adaptation aux règles, voire au vivre en société, et ne pouvaient que conduire à un pronostic défavorable en l'état malgré le comportement correct au travail. En dépit de trois sorties réussies, la situation de l'intéressé n'avait ainsi guère évolué depuis les dernières décisions judiciaires. Des sorties accompagnées, un comportement irréprochable et un projet de vie concret et attesté étaient ainsi attendus pour le réexamen.

h. Le 14 novembre 2022, un nouveau PES a été élaboré par E______, retraçant l'évolution de A______ pour la période allant du 8 avril au 8 octobre 2022, dont il ressort notamment les points pertinents suivants :

-       Comportement général : l'intéressé peinait à se conformer aux règles de l'établissement. Contrairement à son comportement au cellulaire, il était cependant perçu comme un peu plus calme et plus accessible sur son lieu de travail. Vis-à-vis du personnel pénitentiaire, il se montrait déterminé, souvent enflammé, et avait des exigences parfois irréalistes, ce qui rendait très difficile d'aborder sa situation de manière constructive et de planifier son quotidien. Cinq sanctions avaient été prononcées à son encontre, majoritairement pour des refus de travailler, dont trois en septembre 2022, mais également pour des menaces envers le personnel et d'autres personnes, ainsi que pour violation du règlement intérieur;

-       Santé : de manière générale, la santé (physique et mentale) apparaissait stable. Des troubles somatiques étaient cependant apparus en juillet 2022 ayant nécessité des examens et des contrôles accrus;

-       Codétenus : l'intéressé se serait acclimaté à la cohabitation avec ses codétenus, se retirant souvent seul dans sa cellule, mais entretenant quelques contacts avec certains codétenus francophones;

-       Travail : l'intéressé avait été affecté aux écuries. Selon son chef, il exécutait les tâches confiées de manière précise, autonome et ponctuelle, mettant toujours au premier plan le bien-être des animaux à soigner. Sa méthode de travail fiable et indépendante, ainsi qu'une éthique élevée de travail étaient également relevées. En raison de son tempérament, il ne s'entendait pas toujours avec ses collègues;

-       Gestion de la rémunération : l'intéressé gérait de manière adéquate ses deniers, gardant suffisamment de ressources sur son compte libre;

-       Relations avec l'extérieur : l'intéressé indiquait entretenir une très bonne relation avec sa mère, laquelle habitait H______ [FR]. Il avait également deux fils majeurs, I______ et J______, qu'il aurait élevés avec le soutien de leur grand-mère, en raison du décès prématuré de leur mère, et avec lesquels il entretiendrait de bonnes relations. Il avait auparavant une compagne, qui aurait rompu la relation en raison de son incarcération, mais restait néanmoins en contact avec lui. Une cousine et un ancien collègue de travail étaient également importants pour lui. Il avait également de nombreuses connaissances dans le milieu équestre. Jusqu'à présent, A______ avait reçu quatre visites de sa famille et de ses connaissances;

-       Allègements et progression : le PES rappelait les trois sorties relationnelles accordées à l'intéressé (à savoir le 29.10.2021 [5h], le 27.11.2021 [24h] et le 17.12.2021 [5h]). Il les avait passées chez son fils I______ et sa famille. En raison de la crise sanitaire du COVID, les sorties avaient été suspendues dès le 4 janvier 2022. Le congé relationnel de 36 heures accordé par le SAPEM pour le 15 janvier 2022 n'avait donc pas pu être exécuté. A______, invité à déposer une nouvelle demande de congé par la suite, avait fermement refusé, indiquant ne pas être responsable de la suspension des congés précités et précisant que les autorités l'ayant imposée devaient elles-mêmes solliciter de nouvelles demandes et les soumettre au SAPEM;

-       Projet de sortie : l'intéressé avait émis le projet de s'installer, après son incarcération, dans une caravane de son fils, à K______ [VD]. S'agissant de sa situation financière, il avait déclaré qu'il appartenait à l'autorité de placement de subvenir à ses besoins dans la mesure où elle avait "détruit sa vie".

i.a. Par décision du 21 février 2023, le SAPEM a autorisé deux sorties de 5 heures, lesquelles se sont déroulées, les 23 et 27 février 2023, de façon adéquate.

i.b. Par décision du 9 mars 2023, le SAPEM a octroyé à A______ une sortie de 5 heures pour le 14 mars 2023 et un congé de 36 heures pour les 18 et 19 mars 2023, subordonnés à certaines conditions, notamment "adopter un comportement conforme au cadre de l'établissement et ne pas faire l'objet de sanctions disciplinaires".

j.a. Le 14 mars 2023, un rapport a été établi par E______, faisant notamment état du déroulement du séjour de A______ dans le groupe de vie "Stock", à savoir dans une bâtisse en milieu ouvert, qu'il avait intégrée le 10 novembre 2022, mais également de graves incidents intervenus depuis lors. L'établissement a rappelé que le transfert s'inscrivait dans une volonté manifestée par les intervenants de motiver le prénommé à reprendre le régime progressif, notamment par le biais de congés relationnels et de sorties. Plusieurs tentatives avaient été réalisées, mais ne s'étaient pas concrétisées en raison du positionnement excessivement problématique de A______ et de ses forts accès de colère. Dans ce contexte, son référent social avait tenté de clarifier les choses, sans succès. S'étaient succédé plusieurs demandes déposées, puis retirées, l'intéressé estimant que le temps de traitement était trop long, que les délais de transmission au SAPEM n'étaient pas respectés ou que les conditions ne lui convenaient plus. Des problèmes financiers avaient également été relevés, A______ refusant catégoriquement de s'acquitter de frais médicaux, lesquels s'inscrivaient pourtant dans le cadre d'obligations réglementaires concordataires. Des demandes visant à retirer une somme de CHF 1'000.- du compte d'affectation pour s'acheter des habits en vue du congé du 18 au 19 mars 2023, admises à concurrence de CHF 500.- seulement, avaient également accentué les tensions existantes et marqué le début de comportements disproportionnés de la part de A______, celui-ci ayant notamment adressé, le 9 mars 2023, un courrier injurieux et menaçant à son référent et l'ayant agressé verbalement dans les espaces communs. L'attitude du précité avait dépassé toutes les limites acceptables.

j.b. Pour ces faits, A______ a fait l'objet le 14 mars 2023 d'une sanction pour menaces et insulte envers le personnel et a été mis en cellule de sécurité le jour même, pour une durée de huit jours. E______ a par ailleurs sollicité son transfert hors de l'établissement le plus rapidement possible, mais au plus tard au 24 mars 2023.

j.c. Par courrier du 14 mars 2023, le SAPEM a adressé une demande de détermination à A______, lui impartissant un délai de 3 jours, dès réception du courrier, afin qu'il fasse parvenir ses observations sur une éventuelle révocation de la décision de passage en milieu ouvert rendue le 21 mai 2019.

j.d. Le même jour, le SAPEM a reçu de l'intéressé un courrier daté du 9 mars 2023 ainsi qu'une copie du courrier adressé à son référent. Il y expliquait qu'il avait besoin d'argent pour acheter des habits en vue de sa sortie ; il ne souhaitait pas sortir "habillé comme des clochards en plus d'être traité comme un chien" et ajoutait : "il est si simple de pourrir la vie des détenus, pourquoi s'en priver…". Il renonçait par ailleurs aux demandes de congés formulées, au motif que "puisqu'il est considéré exagéré d'acheter un minimum d'habits convenables et encore plus exagéré de prévoir son avenir, je ne vois pas pour quelle raison je ferai des congés. Où dois-je comprendre que je dois être habillé avec des guenilles vieilles de plus de 14 ans ??? Et surtout considéré comme un chien à dormir sur un canapé, pourquoi pas par-terre ??? Je dois aussi prévoir manger dans une écuelle ? (Par contre, je pourrais finir par mordre très sérieusement…)".

j.e. Par courrier de son conseil du 16 mars 2023, A______ a admis avoir eu un comportement inadéquat mais estimait que la décision du référent était unilatérale, sans motivation légale ni factuelle. Il sollicitait son transfert dans l'Établissement de détention de L______ en raison de la proximité avec sa famille.

k.a. Par décision du 17 mars 2023, le SAPEM a révoqué la décision de passage en milieu ouvert du 21 mai 2019 et la décision d'octroi de la sortie et du congé rendue le 9 mars 2023 (cf. B.i.b. supra), estimant que les conditions du PES, notamment en lien avec le comportement de A______, n'étaient plus réunies et que le risque de récidive n'était plus suffisamment contenu.

L'intéressé a ainsi été transféré, en urgence, à la prison de C______ le 21 mars 2023, avant d'être transféré à F______, le 24 suivant.

k.b. Sur recours de A______, la Chambre de céans a, par arrêt du 11 juillet 2023 (ACPR/528/2023), annulé cette décision.

Elle a retenu en substance que, nonobstant les sanctions disciplinaires dont avait fait l'objet l'intéressé entre avril et septembre 2022, le SAPEM admettait qu'il se comportait bien en détention. Aucun incident critique n'avait été relevé. Si la fréquence des sanctions avait augmenté, cela ne signifiait pas encore qu'elles seraient suffisamment graves pour faire échec à la poursuite du régime progressif en milieu ouvert. Les injures et menaces proférées ou supposément proférées par le recourant les 9 et 13 mars 2023 ne constituaient pas une aggravation de son comportement telle que son maintien en milieu ouvert devrait être remis en question, ce d'autant que le SAPEM n'expliquait pas en quoi ces évènements feraient renaître un risque de récidive dans le cadre des congés.

l.a. Le 3 avril 2023, E______ a informé le SAPEM être disposé, à la demande de A______, à réintégrer celui-ci en son sein, sous réserve qu'il présente des excuses à son référent et qu'il adopte un comportement adéquat.

l.b. Le SAPEM a rencontré l'intéressé au sein de F______ le 20 avril 2023, suite à quoi le conseil du A______ a posé plusieurs questions et conditions en lien avec une éventuelle réintégration de son mandant au sein de E______. Les échanges intervenus ont permis audit établissement de rappeler qu'une réintégration de l'intéressé n'était pas un souhait de leur part, mais une offre faisant suite à la demande de ce dernier, et qu'il ne serait aucunement en mesure de répondre à de quelconques exigences que celui-ci formulerait. Un délai a initialement été fixé à A______ au 25 avril 2023 afin qu'il se positionne sur les conditions édictées par E______. Aucune réponse n'est parvenue au SAPEM et l'offre de l'établissement en question est devenue caduque.

m. Le 20 avril 2023, A______ a formulé une demande de libération conditionnelle, dans laquelle il rappelle être père de deux enfants majeurs et de nationalité suisse. S'agissant de son projet d'avenir, il ferait des recherches d'emploi lorsqu'il aurait la certitude de pouvoir être disponible pour l'employeur. Il avait appris le métier d'électricien. Son fils pourrait l'aider à sa libération et le loger. Il affirmait n'avoir aucun problème à résoudre et être innocent, ce que "tout le monde sait". Il formulait le souhait de trouver un emploi, de passer du temps avec ses petits-enfants, ses amis et sa famille, d'effectuer des rénovations sur la propriété de son amie en vue d'emménager avec elle et de remettre en état des voitures des années 80-90.

n. Le 16 mai 2023, la direction de F______ a établi un rapport mentionnant une sanction pour refus de travailler datée du 5 mai 2023, tout en indiquant que l'intéressé se révélait poli et discret. Cela étant, et en raison du récent transfert intervenu, elle n'était pas en mesure d'émettre de préavis.

o. Le 30 juin 2023, une sanction a été prononcée à l'encontre de A______, notamment pour violation des dispositions sécuritaires de l'établissement et mise en danger des codétenus et du personnel, ayant entraîné sa mise aux arrêts pour une durée de sept jours, ainsi que la suppression durant cette période de toutes les activités, y compris le sport, les visites, les loisirs et les repas en commun.

p. Selon l'extrait du casier judiciaire suisse de A______, dans sa teneur au 6 juillet 2023, il n'a pas d'autre antécédent, ni d'enquête pénale en cours.

q. Dans son préavis du 6 juillet 2023, le SAPEM a constaté que non seulement la situation de A______ n'avait pas évolué favorablement depuis le dernier refus de la libération conditionnelle, mais qu'elle s'était au contraire considérablement détériorée. Ses comportements colériques ainsi que ses attitudes excessivement revendicatives s'étaient répétés et multipliés auprès de l'ensemble des intervenants, rendant toute prise en charge difficile, voire impossible. L'évolution du régime progressif envisagé, visant notamment à évaluer ses capacités d'adaptation à l'extérieur et en cas de retour à une vie libre, avait, par sa faute, été complètement interrompu, A______ n'ayant démontré aucune volonté de se conformer aux règles, pourtant peu exigeantes, liées au dépôt des formulaires idoines. Parfois remplis, il avait cependant choisi de les déchirer dans la foulée, soit de refuser les tests ou les conditions posées par l'établissement ou par l'autorité d'exécution, adoptant par la même occasion des comportements que cette dernière qualifiait de détestables à l'encontre de ses interlocuteurs. Au-delà de la volonté perçue par les intervenants de saboter son évolution, son attitude lui donnait tout le loisir d'invectiver l'ensemble des autorités et de leur faire porter la responsabilité des conséquences liées à ses propres actes. Son incapacité à gérer toute frustration, son "tempérament littéralement explosif et les nombreux incidents rapportés au SAPEM, en particulier ces dernières semaines et derniers mois, [étaient] de nature à passablement inquiéter l'autorité d'exécution et nécessiter[aient] vraisemblablement des évaluations plus poussées dans les mois à venir et selon l'évaluation que connaîtr[aît] la situation de l'intéressé".

Le SAPEM a expliqué que, par courrier du 4 juin 2023, A______ l'avait interpellé, indiquant avoir été empêché de contacter son conseil lors d'une hospitalisation aux HUG intervenue peu avant. Le SAPEM ne disposant d'aucune information sur une éventuelle hospitalisation, des informations avaient été recueillies auprès du Service de médecine pénitentiaire (ci-après : SMP). Ce dernier lui aurait oralement confirmé que l'intéressé avait fait l'objet d'une hospitalisation de 2 jours fin mai 2023, au sein de l'Unité M______ (ci-après : M______) et qu'il y avait adopté un comportement "hautement problématique". En effet, selon le SMP, l'intéressé aurait menacé plusieurs infirmières de viol et aurait utilisé et assemblé du matériel médical pour constituer des outils. Son comportement inquiétant aurait d'ailleurs précipité son retour à la prison de C______ au sein de l'Unité N______ (ci-après : N______), les médecins de M______ estimant les risques trop élevés. Le précité avait ainsi séjourné au sein de N______ du 26 au 29 mai 2023, avant de réintégrer F______. Vu la nature des éléments rapportés, un rapport avait immédiatement été sollicité auprès de la direction de M______, lequel était en cours d'élaboration.

Une libération conditionnelle s'avérait ainsi largement prématurée, le pronostic pénal de A______ étant à ce stade considéré comme particulièrement défavorable.

r. Par requête du 11 juillet 2023, le Ministère public a conclu au refus de la libération conditionnelle de A______, se fondant notamment sur le préavis du SAPEM, retenant par ailleurs que les seules sorties non accompagnées réussies étaient celles de février 2023, que le prénommé sabotait les opportunités qui lui étaient offertes d'évoluer positivement, que son projet de sortie restait flou, sans point de chute ni emploi stable et qu'il n'avait entrepris aucune remise en question des actes commis, contestant toujours en être l'auteur, sa capacité d'introspection étant en outre inexistante.

s. Par pli du 17 juillet 2023, le SAPEM a adressé au TAPEM un préavis complémentaire, ainsi que deux annexes, soit l'arrêt de la Chambre de céans du 11 juillet 2023 annulant sa décision de révoquer le placement de l'intéressé en milieu ouvert et un courriel du responsable de M______ du 7 juillet 2023. Ledit courriel portait sur le séjour de A______ au sein de N______ du 26 au 29 mai 2023 auquel le SAPEM faisait référence dans son premier préavis. Il en ressort que le personnel sur place ne l'incriminait "pas avec certitude" s'agissant des outils que le prénommé aurait fabriqués. Celui-ci était attaché (pieds et poings) durant tout le séjour et la Brigade de sécurité et des audiences (ci-après : BSA) le surveillait. Le responsable de la BSA avait confirmé que l'intéressé avait été fouillé à son arrivée à F______ et qu'il n'avait rien sur lui ni dans sa cellule. Seule une pièce du sommier du lit manquait. Le courriel ne fait par ailleurs aucune allusion à de prétendues menaces de viol.

Ledit envoi n'a pas été communiqué à A______ par le TAPEM.

t. Par courrier du 31 juillet 2023, l'intéressé a conclu, par la voix de son conseil, à sa libération conditionnelle, assortie d'une obligation de résider chez son fils, I______, avant de trouver un logement indépendant et d'exercer une activité professionnelle dans les meilleurs délais. Il se référait à l'arrêt du 11 juillet 2023, postérieur aux préavis du SAPEM et du Ministère public, et en particulier à la proposition de E______ de le réintégrer en ses murs, ce qui relativisait la gravité de ses actes. S'agissant de son hospitalisation aux HUG fin mai 2023, il produisait la décision de placement à des fins d'assistance (ci-après : PAFA) du 27 mai 2023 dont il ressortait qu'il avait souffert d'une décompensation et montré une agressivité avec opposition aux soins. Il contestait avoir adopté un "comportement hautement problématique" à cette occasion. Il avait ensuite pris des médicaments et l'hospitalisation avait été courte.

u. Par jugement du 18 août 2023, le TAPEM a refusé la libération conditionnelle de A______.

v. Par arrêt du 29 septembre 2023 (ACPR/755/2023), la Chambre de céans, constatant une violation du droit d'être entendu de l'intéressé en raison de la non-transmission du préavis complémentaire du SAPEM du 17 juillet 2023 et de ses annexes, a annulé ledit jugement et renvoyé le dossier au TAPEM pour nouvelle décision.

w. Invité à se déterminer sur les pièces en question, le Ministère public, dans ses observations du 17 octobre 2023, a considéré qu'il y avait lieu de prendre en compte les indications orales que le SMP avait communiquées au SAPEM concernant le déroulement de l'hospitalisation de l'intéressé fin mai 2023. Ces indications, retranscrites par le SAPEM dans son préavis, gardaient toute leur validité face au courriel de M______ qu'il estimait "lacunaire". Pour le surplus, A______ était loin d'avoir adopté le comportement irréprochable qui était attendu de lui, ne se remettait pas en question et ne se serait pas excusé après l'incident ayant conduit à son expulsion de E______; ses projets de sortie n'étaient pas concrets. Partant, il persistait à préaviser négativement la libération conditionnelle du prénommé.

x. Invité à se déterminer sur le préavis complémentaire susmentionné ainsi que sur les observations du Ministère public, A______, dans ses observations du 25 octobre 2023, a mentionné que les accusations relatives au séjour à l'hôpital n'étaient en rien étayées et étaient même contredites, rien n'indiquant qu'il aurait proféré des menaces de viol; ses sorties non accompagnées s'étaient également toujours bien passées. Il produisait un échange de correspondance entre lui et le SAPEM, dans lequel il sollicitait des informations et documents concernant la suspicion de menaces de viol à l'encontre des infirmières. Le SAPEM répondait ne pas avoir de document y relatif et l'invitait à se renseigner auprès du Ministère public pour savoir si des plaintes pénales avaient été déposées. Enfin, aucun argument concret ne lui avait été donné pour motiver son transfert à l'Établissement de G______ – bien plus éloigné de H______ – plutôt qu'à celui de L______, telle décision n'aidant en rien sa sociabilisation.

C. Dans son jugement querellé, le TAPEM estime que le comportement de l'intéressé ne peut être qualifié de bon. Certes, il donnait satisfaction dans le cadre de son travail à l'écurie et entretenait des contacts corrects avec ses codétenus. Néanmoins, il avait fait l'objet de plusieurs sanctions, tant au sein de E______ que de F______. Selon le PES du 14 novembre 2022, il avait du mal à se conformer aux règles de l'établissement et, depuis le dernier examen de sa libération conditionnelle, il avait été sanctionné à plusieurs reprises, encore en septembre 2022, pour des refus de travailler. À cela s'ajoutait qu'en mars 2023, suite au refus de lui accorder le retrait d'argent qu'il sollicitait, il avait adopté une attitude agressive, grossière et menaçante, en particulier dans son courrier du 9 mars 2023. Il avait également adopté cette attitude dans son courrier du même jour au SAPEM. Un tel comportement n'était pas acceptable quand bien même il n'avait pas fait obstacle à son retour en milieu ouvert.

Il constatait une dégradation de la situation, avec des comportements agressifs de l'intéressé qui ne ressortaient pas de son dossier lors du dernier examen de sa libération conditionnelle (d'ailleurs préavisée favorablement à l'époque par le SAPEM). Si ses sorties non accompagnées (trois en automne 2021 et deux en février 2023) s'étaient bien passées, celles-ci n'avaient pas été nombreuses. En raison des événements de mars 2023 et du retour du condamné en milieu fermé à la suite de la décision du SAPEM, d'autres sorties n'avaient plus pu avoir lieu. Il n'était donc pas possible de tirer de conclusions générales sur la manière dont se comportait l'intéressé durant son temps libre à l'extérieur. Son récent placement en milieu ouvert à G______ lui donnerait l'occasion de faire ses preuves à cet égard.

S'agissant de son hospitalisation fin mai 2023, la décision de PAFA indiquait qu'il avait souffert d'une décompensation et montré une agressivité avec opposition aux soins. Le courriel de l'unité du 7 juillet 2023 ne l'incriminait en rien, au contraire. Le fait qu'il eût les pieds et poings liés durant son séjour, qui plus était surveillé par la BSA, tendait à démontrer qu'il n'avait pas pu fabriquer un quelconque matériel. Quant aux menaces qu'il aurait proférées, il n'en serait pas tenu compte puisque rien ne les corroborait et que le SAPEM, questionné par le conseil du condamné, n'avait apporté aucun élément concret à ce sujet, pas même le nom de la personne qui les aurait dénoncées au SAPEM, ni celui des prétendues victimes.

S'agissant du pronostic, la CED avait considéré l'an dernier que A______ n'avait pas rempli les objectifs fixés par le PES, n'avait pas préparé sa sortie de manière concrète et n'avait pas élaboré de projet thérapeutique alors qu'il aurait dû, en conclusion de quoi le prénommé présenterait un danger pour la collectivité en cas de libération conditionnelle. Les événements de mars 2023 à E______ démontraient que son comportement ne s'était pas amélioré depuis lors, bien au contraire. Il avait encore de la peine à gérer sa frustration et sa colère ainsi qu'à s'adapter aux règles et à vivre en société. Par ailleurs, il faisait toujours preuve d'un manque total d'amendement, comme le démontrait sa dernière demande de libération conditionnelle où il indiquait qu'il était innocent et que tout le monde le savait, et qu'il n'avait aucun problème à régler. En outre, même s'il avait semble-t-il le soutien de sa famille, en particulier sa mère, son fils et sa compagne, il ne présentait pas de projet de réinsertion réaliste, en ce sens qu'il ne recherchait pas d'emploi et n'avait pas de projets professionnels concrets pour sa sortie de prison. Le fait que son fils puisse le loger à sa sortie ne suffisait pas à constituer un réel projet de vie. Dans un précédent jugement, il avait été annoncé que des sorties non accompagnées, un comportement irréprochable et un projet de sortie concret et attesté étaient attendus de lui en vue du prochain examen de la libération conditionnelle. Force était de constater que ces éléments manquaient toujours. Il y avait lieu d'espérer que le concerné tirerait profit de son récent placement en milieu ouvert pour réaliser ces objectifs avant le prochain examen.

D. a. À l'appui de son recours, A______ reproche tout d'abord au Ministère public de faire fi du courriel de M______ du 7 juillet 2023 au motif qu'il serait lacunaire pour préférer s'appuyer sur les indications orales que le SMP avait communiquées au SAPEM. Ensuite, la décision querellée ne faisait pas référence au rapport des D______ du 25 août 2020 [qu'il produit], à teneur duquel il se comportait très bien, que ce soit à l'atelier ou au cellulaire, avec le personnel et les autres codétenus. Elle mentionnait par ailleurs son caractère compliqué et enflammé mais faisait abstraction des erreurs qu'il avait subies dans sa prise en charge tout au long de sa détention (refus de congé parce qu'il ne respectait pas les délais par exemple), lesquelles auraient frustré et agacé n'importe quelle personne raisonnable placée dans la même situation. Ensuite, on lui reprochait son manque d'introspection alors que le SAPEM admettait, dans son préavis favorable du 2 mai 2022, qu'une prolongation de sa détention n'apporterait aucune plus-value quant à ses chances de réinsertion. Dite prolongation ne faisait ainsi que péjorer sa situation et aggraver ses chances de se réinsérer socialement. Une libération conditionnelle, assortie éventuellement de règles de conduite et d'un patronage, favoriserait mieux sa resocialisation que l'exécution complète de sa peine. C'était à tort que les premiers juges avaient considéré qu'il ne présentait pas de projet de réinsertion réaliste et n'avait pas de projets professionnels concrets à sa sortie. Il avait expliqué à maintes reprises entretenir une relation amoureuse nouée lors de son passage à E______. Il était désormais trois fois grand-père. Il réitérait que son fils était disposé à l'engager au sein de son entreprise de constructions métalliques à K______ (cf. pièce 5, chargé) et prêt à le loger (cf. pièce 6, chargé). Ses précédentes sorties s'étaient toujours bien passées et, si le SAPEM n'avait pas révoqué à tort le passage en milieu ouvert, il aurait pu exercer les congés qui lui avaient été octroyés en mars 2023. Il donnait satisfaction dans son travail lorsqu'il était détenu à E______ et c'est ce qui ressortait également du rapport du 25 août 2020 des D______. Le TAPEM n'avait pas évalué sa dangerosité à l'heure actuelle ni défini si celle-ci risquait de diminuer, d'augmenter ou de rester la même dans le cas d'une exécution complète de la peine. Partant, le jugement entrepris violait l'art. 86 CP.

b. À réception du recours, la cause a été gardée à juger sans échange d'écritures, ni débats.

EN DROIT :

1.             1.1. La décision rendue en matière de libération conditionnelle (art. 86 CP) constitue une "autre décision ultérieure" indépendante au sens de l'art. 363 al. 3 CPP (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1136/2015 du 18 juillet 2016 consid. 4.3 et 6B_158/2013 du 25 avril 2013 consid. 2.1; Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, 2ème éd., Bâle 2019, n. 30 ad art. 363).

Le recours au sens de l'art. 393 CPP est la voie de droit ouverte contre les prononcés rendus par le TAPEM en matière de libération conditionnelle (art. 42 al. 1 let. b LaCP cum ATF 141 IV 187 consid. 1.1 et les références citées).

1.2. La procédure devant la Chambre de céans est régie par le CPP, applicable au titre de droit cantonal supplétif (art. 42 al. 2 LaCP).

1.3. En l'espèce, le recours est recevable, pour avoir été déposé selon les forme et délai prescrits (art. 385 al. 1, 390 al. 1 et 396 al. 1 CPP), par le condamné, qui a un intérêt juridiquement protégé à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée (art. 382 al. 1 CPP).

1.4. Les pièces nouvelles produites par le recourant sont recevables, la jurisprudence admettant leur production en deuxième instance (arrêt du Tribunal fédéral 1B_550/2022 du 17 novembre 2022 consid. 2.1).

2.             La Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement irrecevables ou mal fondés (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP). Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent.

3.             Le recourant se plaint d'une constatation inexacte des faits.

Cela étant, dans la mesure où la Chambre de céans jouit d'un plein pouvoir de cognition en droit et en fait (art. 393 al. 2 CPP; ATF 137 I 195 consid. 2.3.2; arrêt du Tribunal fédéral 1B_524/2012 du 15 novembre 2012 consid. 2.1.), les éventuelles constatations inexactes auront été corrigées dans l'état de fait établi ci-devant.

4.             Le recourant estime remplir les conditions d'une libération conditionnelle.

4.1. Aux termes de l'art. 86 al. 1 CP, l'autorité compétente libère conditionnellement le détenu qui a subi les deux tiers de sa peine, mais au moins trois mois de détention, si son comportement durant l'exécution de la peine ne s'y oppose pas et s'il n'y a pas lieu de craindre qu'il ne commette de nouveaux crimes ou de nouveaux délits. La libération conditionnelle constitue la dernière étape de l'exécution de la sanction pénale. Elle est la règle et son refus l'exception, dans la mesure où il n'est plus exigé qu'il soit à prévoir que le condamné se conduira bien en liberté (cf. art. 38 ch. 1 al. 1 aCP), mais seulement qu'il ne soit pas à craindre qu'il commette de nouveaux crimes ou délits. Autrement dit, il n'est plus nécessaire pour l'octroi de la libération conditionnelle qu'un pronostic favorable puisse être posé. Il suffit que le pronostic ne soit pas défavorable (ATF 133 IV 201 consid. 2.2). Le pronostic à émettre doit être posé sur la base d'une appréciation globale, prenant en considération les antécédents de l'intéressé, sa personnalité, son comportement en général et dans le cadre des délits qui sont à l'origine de sa condamnation, le degré de son éventuel amendement, ainsi que les conditions dans lesquelles il est à prévoir qu'il vivra (ATF 133 IV 201 consid. 2.3 et les références citées).

Un risque de récidive étant inhérent à toute libération, qu'elle soit conditionnelle ou définitive, pour déterminer si l'on peut courir ce risque, il faut, non seulement, prendre en considération le degré de probabilité qu'une nouvelle infraction soit commise, mais également l'importance du bien qui serait alors menacé
(ATF 125 IV 113 consid. 2a). Ainsi, le risque de récidive que l'on peut admettre est moindre si l'auteur s'en est pris à la vie ou à l'intégrité corporelle de ses victimes que s'il a commis, par exemple, des infractions contre le patrimoine (ATF 133 IV 201 consid. 2.3 p. 203 et les références citées). Il y a également lieu de rechercher si la libération conditionnelle, éventuellement assortie de règles de conduite et d'un patronage, ne favoriserait pas mieux la resocialisation de l'auteur que l'exécution complète de la peine (ATF 124 IV 193 consid. 4d/aa/bb p. 198 ss).

4.2. En l'espèce, la condition objective d'une libération conditionnelle est réalisée depuis le 22 décembre 2019.

Le recourant ne fait l'objet d'aucune enquête pénale en cours et est sans autre antécédent que la condamnation pour la peine à l’origine de son incarcération.

Son comportement au travail et vis-à-vis de ses codétenus est qualifié de bon, ce que confirmait déjà, au demeurant, le préavis des D______ du 25 août 2020 qu'il produit. Que le jugement entrepris ne fasse pas état de ce document, qui ne figure du reste pas au dossier soumis à la Chambre de céans, n'est ainsi pas déterminant.

Il est également admis que ses deux sorties non accompagnées des 23 et 27 février 2023 se sont bien passées (tout comme celles accordées en 2021).

Ce nonobstant, les préavis du SAPEM et du Ministère public sont défavorables.

Le recourant ne conteste pas ses emportements colériques, qui résultaient selon lui des contraintes administratives qu'on lui ferait subir et qu'il qualifie d'"erreurs" dans sa prise en charge.

Or, dans son arrêt du 16 août 2023, la Chambre de céans a rappelé que si l'on pouvait concevoir que certains aspects formels liés aux délais ou conditions prévues pour demander des congés pouvaient échapper quelque peu au recourant, le TAPEM avait à plusieurs reprises attiré son attention sur la nécessité d'observer certaines formes, ajoutant que le recourant, "qui se croit en droit de s'affranchir de certaines contraintes – formelles et organisationnelles –, demeure donc seul responsable de cette situation. Son refus systématique de se soumettre aux diverses règles inhérentes au système judiciaire et carcéral dénote d'un caractère vindicatif vis-à-vis de l'autorité et d'un manque d'introspection, le précité rejetant continuellement la faute sur des tiers" (consid. 3.4.).

À cela s'ajoute une recrudescence de comportements transgressifs en détention. Ainsi, entre le 8 avril et le 8 octobre 2022, le recourant a été sanctionné à cinq reprises, dont trois en septembre 2022, essentiellement pour refus de travailler mais également pour des menaces envers le personnel et violation du règlement intérieur. Le 14 mars 2023, il a été sanctionné une nouvelle fois pour menaces et insulte envers le personnel par E______, qui a demandé son transfert en urgence. F______ l'a encore sanctionné deux fois, le 5 mai 2023, pour un refus de travailler, et le 30 juin 2023, pour violation des dispositions sécuritaires de l'établissement et mise en danger des codétenus et du personnel.

Le recourant n'en dit mot dans son recours, se limitant à nier tout comportement problématique à l'occasion de son hospitalisation à M______ fin mai 2023. Or, le TAPEM a précisément relevé, à sa décharge, que le courriel du 7 juillet 2023 ne l'incriminait en rien s'agissant des outils qu'il aurait fabriqués. Quant aux menaces qu'il aurait proférées, il n'en était pas tenu compte puisque rien ne les corroborait. Partant, les griefs du recourant en lien avec la position contraire du Ministère public à cet égard sont irrelevants.

Force est ainsi de constater, à l'instar des premiers juges, que la situation de l'intéressé en détention n'a pas évolué favorablement depuis le dernier refus de la libération conditionnelle en juillet 2022 et s'est même grandement péjorée.

Le recourant estime que c'est sans sa faute s'il n'a pas pu faire plus de sorties ou avoir plus de congés après février 2023 et être ainsi davantage évalué durant son temps libre à l'extérieur, le SAPEM ayant à tort, le 17 mars 2023, révoqué sa décision de passage en milieu ouvert.

Tel n'est pas le cas. Si la Chambre de céans a certes, le 11 juillet 2023, annulé la révocation de la décision de passage en milieu ouvert du 21 mai 2019 et le placement du recourant en milieu fermé, elle a également constaté que le recourant ne remettait pas en cause, à bon droit, la révocation de la sortie du 14 mars 2023 et du congé accordé des 18 et 19 mars 2023, "dits allègements étant (…) incompatibles avec le prononcé de sanctions disciplinaires". (consid. 2.2.). Ainsi, c'est donc bien en raison des évènements survenus à E______ en mars 2023 – imputables au recourant seul et pour lesquels il a été sanctionné de huit jours de cellule de sécurité – que la sortie et le congé accordés ont été révoqués.

On ajoutera qu'une offre de réintégration du recourant à E______ avait été émise par l'établissement en avril 2023, moyennant certaines conditions, mais que le recourant n'y a pas donné suite, faisant ainsi échec à un rapide retour en milieu ouvert.

Le recourant considère qu'une prolongation de sa détention serait délétère et aggraverait ses chances de réinsertion. Il n'appartient cependant qu'à lui de se conformer aux objectifs fixés par le PES et attendus de lui. Or, selon les préavis, il a toujours de la peine à gérer ses frustrations et sa colère ainsi qu'à se conformer aux règles établies. Les objectifs du PES visant à évaluer ses capacités d'adaptation hors du cadre pénitentiaire ne sont pas remplis en l'état, deux seuls congés ayant pu être mis en œuvre depuis le dernier examen de sa libération conditionnelle.

Il dispose certes dorénavant de projets concrets à sa sortie, bénéficiant du soutien de sa famille, avec qui il a maintenu des liens durant toute sa détention et, en particulier, de son fils aîné, qui est disposé à lui offrir un emploi et un logement à sa sortie de prison.

Ces éléments, certes à saluer, ne sont toutefois pas suffisants pour conclure à l'absence de pronostic défavorable, eu égard à ce qui précède et au risque de récidive violente et générale évalué comme moyen, étant rappelé les faits très graves pour lesquels il a été condamné.

Enfin, dans la mesure où le recourant a montré jusqu'ici son incapacité à se soumettre aux règles, il serait illusoire d'envisager une libération conditionnelle assortie de règles de conduite ou d'un patronage.

Les conditions d'une mise en liberté conditionnelle ne sont ainsi, en l'état, pas réalisées.

5. L'apport des procédures sollicitées, qui contiennent une vidéo d'un membre de la famille de la victime, ne saurait modifier le raisonnement qui précède, la culpabilité du condamné n'étant pas l'objet de la présente procédure. Quant aux précédentes décisions rendues par le TAPEM, elles ne sont d'aucune utilité pour apprécier la situation actuelle, seule pertinente ici. La Chambre de céans l'avait du reste déjà rappelé au recourant dans son arrêt du 16 août 2021.

6. Justifié, le jugement querellé sera donc confirmé.

7. Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, fixés en totalité à CHF 900.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03), étant précisé que même lorsque qu'il obtient l'assistance judiciaire, le recourant débouté peut être condamné à prendre à sa charge les frais de la procédure dans la mesure de ses moyens (arrêt du Tribunal fédéral 6B_380/2013 du 16 janvier 2014, consid. 5).

8. La procédure étant ici close (art. 135 al. 2 CPP), des dépens seront alloués à l'avocat d'office.

8.1. À teneur de l'art. 135 al. 1 CPP, le défenseur d'office est indemnisé conformément au tarif des avocats de la Confédération ou du canton du for du procès. À Genève, le tarif des avocats est édicté à l'art. 16 RAJ ; il prévoit une indemnisation sur la base d'un tarif horaire de CHF 200.- pour un chef d'étude (art. 16 al. 1 let. c RAJ). Seules les heures nécessaires sont retenues ; elles sont appréciées en fonction notamment de la nature, de l'importance, et des difficultés de la cause, de la valeur litigieuse, de la qualité du travail fourni et du résultat obtenu (art. 16 al. 2 RAJ).

8.2. En l'occurrence, l'avocat d'office a chiffré son intervention pour la procédure de recours à CHF 1'283.15. Eu égard à l'activité déployée, soit un recours de 8 pages, dont environ 4 pages de développements topiques en droit, son indemnité sera arrêtée à CHF 861,60, correspondant à quatre heures d'activité, TVA à 7.7% comprise.

 

* * * * *


 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Met à la charge de A______ les frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 900.-.

Alloue à Me B______, à la charge de l'État, une indemnité de CHF 861,60, (TVA à 7.7% incluse) pour la procédure de recours.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant, soit pour lui son conseil, au Tribunal d'application des peines et des mesures, au Ministère public et au Service de l'application des peines et mesures.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Monsieur Christian COQUOZ et
Madame Corinne CHAPPUIS BUGNON, juges; Madame Oriana BRICENO LOPEZ, greffière.

 

La greffière :

Oriana BRICENO LOPEZ

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).

PM/687/2023

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

20.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

805.00

Total

CHF

900.00