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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/15911/2023

ACPR/922/2023 du 28.11.2023 sur OTMC/3286/2023 ( TMC ) , REFUS

Recours TF déposé le 20.12.2023, rendu le 06.02.2024, REJETE, 7B_1009/23, 7B_1009/2023
Descripteurs : DÉTENTION PROVISOIRE;SOUPÇON;RISQUE DE RÉCIDIVE;ÉGALITÉ DE TRAITEMENT;ATTEINTE À LA SANTÉ;PROPORTIONNALITÉ
Normes : CPP.221

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/15911/2023 ACPR/922/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mardi 28 novembre 2023

 

Entre

A______, actuellement détenu à la prison de B______, représenté par Me C______, avocat,

recourant,

contre l'ordonnance de refus de mise en liberté rendue le 2 novembre 2023 par le Tribunal des mesures de contrainte,

et

LE TRIBUNAL DES MESURES DE CONTRAINTE, rue des Chaudronniers 9, 1204 Genève,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A.           Par acte expédié le 13 novembre 2023, A______ recourt contre l'ordonnance du 2 novembre 2023, notifiée sur-le-champ, par laquelle le Tribunal des mesures de contrainte (ci-après : TMC) a refusé sa demande de mise en liberté.

Le recourant conclut, préalablement, à l'octroi de l'assistance juridique pour le recours et à l'audition du médecin chef de la clinique de psychiatrie, et, principalement, à l'annulation de l'ordonnance précitée, à sa mise en liberté immédiate avec des mesures de substitution (qu'il énumère), au constat de l'illicéité de sa détention dès le 2 novembre 2023 et au versement d'une indemnité de CHF 200.- par jour de détention.

B.            Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. A______, né en 1995, de nationalité française et domicilié en France, a été arrêté le 21 juillet 2023 lors de son entrée en Suisse, en provenance de D______ [France], avec E______ et F______, dans un fourgon sur lequel avaient été apposées, au moyen de scotch sur les plaques d'origine, des plaques déclarées volées en France en octobre 2021.

Il a été placé en détention provisoire par ordonnance du TMC du 24 juillet 2023, régulièrement prolongée depuis, la dernière fois au 22 décembre 2023.

b. A______ est prévenu de tentative de brigandage (art. 140 CP cum 22 CP), tentative de séquestration (art. 183 CP cum 22 CP), infraction à l'art. 33 LArm et contravention à l'art. 115 al. 1 let. a et al. 3 LEI.

Il est soupçonné d'avoir, à Genève, dans la nuit du 24 au 25 juin 2023, de concert avec E______ et F______, ainsi que des individus non identifiés à ce jour, tenté de pénétrer sans droit dans la villa sise chemin 1______ no. ______ à G______ [GE], dans le but de maitriser par la force ses occupants en les privant de leur liberté de mouvement, puis d'y dérober des objets et valeurs, étant précisé que seule la présence d'un chien à proximité de la villa les a empêchés de passer à l'acte.

Il lui est également reproché d'être entré en Suisse, le 21 juillet 2023, dans les circonstances sus-décrites (B.a. supra), sans être porteur d'un document d'identité valable et tenté (à nouveau) de commettre un brigandage aux dépens des habitants de la villa sise chemin 1______ no. ______, à G______.

Dans le fourgon utilisé ont été retrouvés des gants, un cache cou et masque facial, des serre-câbles, dont certains montés façon "menottes", un pied-de-biche, une massette, une caméra filaire, des rouleaux de scotch, un bidon de 5 litres d'eau de javel, ainsi que des armes interdites (un pistolet soft air et un spray de type CS).

c. A______ conteste les faits reprochés. À la police, le 22 juillet 2023, il a déclaré être venu en Suisse pour "profiter et découvrir" ce pays. Spécialiste de boxe anglaise et judoka, il partageait son quotidien sur son compte SNAPCHAT, qui était très populaire et suivi par les deux personnes avec lesquelles il se trouvait dans le fourgon, dont il ne connaissait que les pseudonymes sur les réseaux sociaux. Ses deux amis étaient venus le chercher avec le véhicule, envers lequel il n'avait aucune responsabilité. Il avait connu des ennuis avec la justice française pour des faits en lien avec les stupéfiants, dans le cadre desquels H______ avait abusé de sa confiance ; il n'avait plus eu de contact avec le précité depuis lors.

Au Ministère public, le lendemain, il a exposé être venu à Genève pour la première fois le 21 juillet 2023, pour "faire la publicité de F______ et de E______" sur les réseaux sociaux. En sa qualité d'influenceur et de sportif MMA, les précités lui avaient demandé de se rendre à Genève en contrepartie de EUR 300.-, tous frais payés, pour le tournage d'une vidéo.

d. À teneur du rapport d'analyses ADN rendu par le Centre universitaire romand de médecine légale le 2 octobre 2023, des traces correspondant au profil ADN de A______ ont été retrouvées sur les scotchs se trouvant sous la fausse plaque d'immatriculation, à l'arrière du véhicule, et sur la partie retournée d'un rouleau d'adhésif.

e. Lors de l'arrestation des trois prévenus, A______ n'avait pas de téléphone, contrairement aux deux autres. Il ressort de l'analyse succincte du téléphone portable de F______ un échange de messages, dans la nuit du 24 au 25 juin 2023, entre ce dernier et le commanditaire des faits [que personne n'a à ce jour nommé], à teneur desquels F______ devait agir avec trois autres individus, dont un prénommé "H______", ce dernier étant chargé de fouiller les affaires pendant que les autres "tienne le mec ou les gens" (sic).

Or, il ressort des éléments au dossier que le 19 juin 2023, un repérage a eu lieu sur le territoire genevois, au chemin 1______ à G______, par à tout le moins trois individus, à bord d'un véhicule [de marque] I______ immatriculé en France, qui a été flashé alors qu'il allait quitter la Suisse par la douane de J______. Les images du radar ont permis d'identifier le conducteur au moment de ces faits comme étant H______.

f. Les prévenus ont été confrontés le 5 octobre 2023 par le Ministère public.

f.a. E______ a déclaré être venu en Suisse le 21 juillet 2023 avec A______ et F______ pour commettre des cambriolages. Il était débiteur de EUR 60'000.- vis-à-vis du commanditaire, qu'il n'arrivait pas à rembourser, raison pour laquelle il avait accepté le "plan". Au départ, il ignorait qui seraient ses comparses. Lorsqu'il était arrivé au rendez-vous, F______ était dans le fourgon, puis A______ les avait rejoints. Ensemble, ils n'avaient pas parlé du "plan", car chacun savait ce qu'il devait faire. Il a contesté avoir posé les plaques d'immatriculation volées sur celles d'origine du fourgon utilisé le 21 juillet 2023 ; il n'avait pas vu qui l'avait fait. Lors de leur arrêt à D______, lui et F______ s'étaient changés pour porter "des habits pour commettre un cambriolage, c'est-à-dire en mettant des vêtements noirs et en enfilant des gants" ; A______ ne s'était pas changé.

f.b. F______ a déclaré avoir participé à la première tentative de brigandage, dans la nuit du 24 au 25 juin 2023. A______ aurait aussi dû y participer, mais il n'était finalement pas présent. Par la suite, il avait rencontré A______ à K______, France, le 8 juillet 2023, à la demande du commanditaire, pour discuter du "plan" devant avoir lieu le 21 juillet 2023. Le commanditaire lui avait ensuite demandé de commettre un brigandage, à cette dernière date, avec ses deux comparses. Il avait accepté car il avait besoin d'argent, ayant EUR 15'000.- de dettes, mais ne voulait commettre qu'un cambriolage. Le commanditaire avait donné comme instruction qu'ils s'arrêtent à D______. Lors de cet arrêt, il avait apposé les plaques d'immatriculation, précédemment volées, sur le fourgon. Confronté au résultat de l'analyse ADN selon lequel le profil ADN de A______ a été retrouvé sur lesdites plaques, il est revenu sur ses déclarations, expliquant s'être accusé pour "ne pas accabler plus [s]es comparses". Il n'avait pas vu qui avait apposé les plaques sur le véhicule.

f.c. A______ a maintenu tout ignorer du "plan". Il ne connaissait pas le commanditaire et n'avait de dette envers quiconque. Il connaissait E______ via les réseaux sociaux et n'avait jamais rencontré F______ auparavant. La présence de son ADN s'expliquait par le fait que lorsqu'il était monté dans le véhicule, il avait dû "écarter des objets car c'était le bordel dans le camion" et avait "tripoté" beaucoup de choses.

g. S'agissant de sa situation personnelle, A______ est célibataire et sans enfant. Il vit chez sa mère. En raison d'un handicap mental survenu à la suite d'une chute lorsqu'il était enfant, il perçoit des allocations de EUR 950.- par mois.

À teneur du casier judiciaire français, A______ a été condamné à huit reprises en France depuis 2010, notamment :

- le 16 septembre 2010 par le Tribunal pour enfants pour violence commise en réunion et menaces;

- le 7 février 2014 par le Tribunal correctionnel pour vol en réunion;

- le 9 septembre 2014 par le Tribunal pour enfants pour usage et détention non autorisée de stupéfiants;

- le 8 juin 2017 par le Tribunal correctionnel pour rébellion;

- le 22 juin 2022 par le Tribunal correctionnel pour détention, acquisition et transport non autorisés de stupéfiants.

h. Par ordonnance du 9 novembre 2023, le TMC, par suite de l'ordonnance de mise en liberté rendue la veille par le Ministère public, a ordonné à E______ [condamné en 2012 par la Cour d'assise des mineurs pour viol en réunion et en 2020 par le Tribunal correctionnel pour détention frauduleuse de plusieurs faux documents administratifs et escroquerie] de fournir des sûretés de CHF 4'972.-; de déférer à toute convocation du pouvoir judiciaire; de rester atteignable auprès de son avocate; et lui a interdit tout contact avec F______, A______, H______ et toute autre personne non identifiée à ce jour et impliquée dans la procédure.

C.            Dans l'ordonnance querellée, le TMC a retenu que les charges demeuraient suffisantes contre A______, compte tenu des constatations policières, du matériel trouvé dans le fourgon, de l'analyse des données téléphoniques de F______, des traces ADN de A______, ainsi que des déclarations de F______ et de E______ lors de l'audience de confrontation du 5 octobre 2023.

Le risque de fuite était concret. Le risque de collusion, certes amoindri vis-à-vis de ses comparses détenus, demeurait très concret vis-à-vis des autres participants non-identifiés. Le risque de réitération était tangible, au vu des antécédents de l'intéressé, lesquels démontraient que ce dernier, en dépit du handicap qu'il invoquait, était durablement ancré dans la délinquance.

Les mesures de substitution proposées n'étaient pas aptes à atteindre le but de la détention au vu des risques retenus. Au surplus, le prévenu pouvait recevoir en prison les soins médicaux nécessaires liés à son état de santé, même s'il était évident que la prison n'était pas un lieu de soins idéal.

D.           a. Dans son recours, A______ conteste les charges, qui seraient selon lui insuffisantes. Il ne savait rien des plans de E______ et F______. Les précités avaient voulu se servir de son statut d'influenceur comme alibi pour justifier leur présence à Genève, dans l'hypothèse où une enquête serait ouverte. Dépourvu de matériel et de vêtements pour commettre un vol ou un brigandage, il "aurait très vraisemblablement été contraint de participer au « plan » […] au tout dernier moment pour ensuite laisser les empreintes digitales partout et être filmé par les caméras de vidéosurveillance".

D'ailleurs : E______ et F______ ne lui attribuaient aucun rôle dans la réalisation du plan ; F______ avait admis avoir été le seul à posséder le fourgon et le matériel contenu dans celui-ci ; il n'avait pas de téléphone sur lui, contrairement aux deux autres, qui étaient les seuls à connaître et communiquer avec le commanditaire ; il n'avait pas amené de sac, de vêtements de rechange ni de matériel, contrairement aux deux autres qui étaient équipés pour l'opération ; il était vêtu d'un T-shirt et d'un jogging bleu clair avec des bandes réfléchissantes, ce qui n'était pas approprié pour commettre un cambriolage ; il n'avait pas contracté de dette auprès du commanditaire, contrairement aux deux autres. Les actes d'instruction évoqués par le Ministère public ne le concernaient pas et relevaient d'une "fishing expedition".

Il conteste par ailleurs les risques retenus. Il avait à moult reprises réitéré sa volonté de collaborer, de sorte qu'on ne pouvait retenir une intention de se soustraire à la procédure, et la caution (CHF 5'000.-) proposée par sa mère était documentée et suffisante. Le risque de collusion était abstrait depuis l'audience de confrontation. Il n'avait pas d'antécédent de brigandage. En toute hypothèse, ces risques pourraient être palliés par les mesures de substitution proposées, soit : le versement de sûretés, l'obligation de donner suite à toute convocation des autorités pénales, l'obligation de résider chez sa mère et de se présenter au poste de police de sa commune de domicile français, ainsi que l'interdiction de contact avec les prévenus et autres suspects.

Il invoque en outre une violation du principe de l'égalité de traitement avec E______, qui avait été libéré avec les mesures de substitution que lui-même proposait, alors même qu'il (E______) était, selon lui, plus impliqué dans l'affaire.

Enfin, ses conditions de détention étaient incompatibles avec son état de santé. Il éprouvait de la souffrance psychique, notamment en raison du comportement d'un sous-chef à son égard. Il ne se sentait pas en sécurité, par suite d'une agression sexuelle dont il avait été victime. Or, le TMC avait refusé toute mesure d'instruction, se rendant coupable d'un déni de justice formel, qui devait entraîner l'annulation de la décision contestée.

b. Le Ministère public conclut au rejet du recours. La situation de E______ et celle de A______ étaient différentes. Le premier avait toujours été constant dans ses déclarations, à savoir qu'il était venu en Suisse le 21 juillet 2023 avec ses deux co-prévenus pour commettre des cambriolages, admettant ses contacts avec le commanditaire et décrivant précisément le déroulement des faits. L'instruction n'avait, en l'état, pas permis de confirmer l'implication de E______ dans les repérages du 19 juin 2023 ni de la tentative de brigandage du 25 juin 2023, à l'inverse de A______, dont les motivations de sa présence en Suisse avaient varié, dont l'ADN avait été retrouvé et qui était impliqué par F______.

Des actes d'instruction étaient toujours en cours, notamment le résultat de l'exécution de la demande d'entraide adressée aux autorités françaises le 10 août 2023, visant l'obtention et l'analyse des factures détaillées des raccordements téléphoniques des prévenus et des contacts enregistrés dans les téléphones saisis. Par ailleurs, deux nouvelles demandes d'entraide avaient été adressées à la France, notamment pour obtenir les fiches des hôtels du secteur de D______ concernant d'éventuels séjours en 2023 des trois prévenus.

c. Le TMC maintient les termes de son ordonnance, sans formuler d'observations.

d. Le recourant réplique en personne et par son avocat.

Il produit notamment des rapports de [la prison] B______ établissant qu'il a été conduit à l'hôpital, et un certificat médical du Service de médecine pénitentiaire, du 16 novembre 2023, dont il ressort qu'il est connu pour un trouble délirant persistant. Il avait fait l'objet d'une mesure judiciaire en France pour des troubles des conduites et du comportement. Il était suivi, avant son arrestation, par son psychiatre traitant. En prison, il était pris en charge par le psychiatre depuis le 31 août 2023, à un rythme hebdomadaire. Initialement, il avait présenté des symptômes psychotiques florides avec des idées délirantes de persécution, un discours décousu et très interprétatif. Le traitement antipsychotique adapté et le suivi intensif avaient permis de stabiliser son trouble psychiatrique. Il était investi dans son suivi mais, malgré la bonne évolution, la détention avait un effet délétère sur lui en lien avec le manque de stimuli, d'activités et d'occupations adaptées à sa pathologie psychiatrique.

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 222 et 393 al. 1 let. c CPP) et émaner du prévenu qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             Le recourant invoque un déni de justice de la part de l'autorité précédente, qui n'aurait pas instruit son grief d'illicéité de la détention.

2.1. Il y a déni de justice formel, prohibé par l’art. 29 al. 1 Cst féd., lorsque l’autorité se refuse à statuer ou ne le fait que partiellement (ATF 144 II 184 consid 3.1; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1205/2018 du 22 février 2019 consid. 2.1.1).

2.2. En l'espèce, le TMC a statué sur le grief susmentionné, qu'il a écarté en retenant que le recourant bénéficiait, en prison, des soins médicaux nécessaires liés à son état de santé. On ne saurait donc reprocher à l'autorité précédente un déni de justice.

3. Le recourant demande l'audition d'un médecin, mais le recours fait l'objet d'une procédure écrite (art. 397 al. 1 CPP), les débats ayant une nature potestative (art. 390 al. 5 CPP). Par ailleurs, l'art. 29 al. 2 Cst. ne confère pas le droit d'être entendu oralement (ATF 134 I 140 consid. 5.3 p. 148 et les références citées), de sorte que cette conclusion sera rejetée.

4.             Le recourant conteste l'existence de charges suffisantes contre lui.

4.1. Pour qu'une personne soit placée en détention provisoire ou pour des motifs de sûreté, il doit exister à son égard des charges suffisantes ou des indices sérieux de culpabilité, susceptibles de fonder de forts soupçons d'avoir commis une infraction (art. 221 al. 1 CPP). L'intensité de ces charges n'est pas la même aux divers stades de l'instruction pénale; si des soupçons, même encore peu précis, peuvent être suffisants dans les premiers temps de l'enquête, la perspective d'une condamnation doit apparaître avec une certaine vraisemblance après l'accomplissement des actes d'instruction envisageables. Au contraire du juge du fond, le juge de la détention n'a pas à procéder à une pesée complète des éléments à charge et à décharge ni à apprécier la crédibilité des personnes qui mettent en cause le prévenu. Il doit uniquement examiner s'il existe des indices sérieux de culpabilité justifiant une telle mesure (ATF 143 IV 330 consid. 2.1; 143 IV 316 consid. 3.1 et 3.2).

4.2. En l'espèce, le recourant a été arrêté alors qu'il se trouvait à bord du fourgon contenant le matériel devant servir à un brigandage. Ses deux comparses admettent avoir été instruits de commettre un brigandage, mais que leur intention était, ce soir-là, de commettre – à tout le moins – un cambriolage. Ils affirment que le recourant avait connaissance du "plan". F______ précise même que le recourant devait participer à la tentative du 25 juin 2023 et qu'il l'avait, à la demande du commanditaire, rencontré le 8 juillet 2023 à K______ en prévision de l'expédition du 21 juillet suivant. En outre, des traces correspondant au profil ADN du recourant ont été retrouvées sur les scotchs se trouvant sous la fausse plaque d'immatriculation, à l'arrière du véhicule, et sur la partie retournée d'un rouleau d'adhésif. De plus, une quatrième personne, H______, semble avoir été impliquée lors de repérages ayant eu lieu le 19 juin 2023, étant précisé que le recourant a été condamné avec ce dernier pour infraction contre les stupéfiants, en 2022.

Ces éléments suffisent pour retenir qu'il existe des indices sérieux de l'implication du recourant dans les faits qui lui sont reprochés. Ses explications sur sa présence en Suisse pour tourner une vidéo publicitaire et le fait qu'il n'aurait selon lui pas été habillé de manière appropriée pour commettre un brigandage ou un cambriolage le 21 juillet 2023 ne sont pas de nature à amoindrir ces charges. Les justifications du recourant, selon lesquelles ses co-prévenus tenteraient de l'impliquer pour se dédouaner, relèvent de la spéculation. Elles sont au demeurant contredites par le fait que F______ était prêt à s'auto-incriminer pour la pose des fausses plaques d'immatriculation sur le véhicule, avant d'apprendre que le profil ADN du recourant y avait été retrouvé, et ni F______ ni E______ n'ont désigné le recourant à cet égard.

Au surplus, les actes d'instruction en cours concernent aussi le recourant, en particulier ceux devant déterminer ses éventuels séjours dans la région en 2023.

5.             Le recourant conteste les risques de fuite et de réitération.

5.1. Conformément à l'art. 221 al. 1 let. a CPP, la détention provisoire peut être ordonnée s'il y a sérieusement lieu de craindre que le prévenu se soustraie à la procédure pénale ou à la sanction prévisible en prenant la fuite. Selon la jurisprudence, le risque de fuite doit s'analyser en fonction d'un ensemble de critères, tels que le caractère de l'intéressé, sa moralité, ses ressources, ses liens avec l'État qui le poursuit ainsi que ses contacts à l'étranger, qui font apparaître le risque de fuite non seulement possible, mais également probable.

5.2. Pour admettre un risque de récidive au sens de l'art. 221 al. 1 let. c CPP, les infractions redoutées, tout comme les antécédents, doivent être des crimes ou des délits graves, au premier chef les délits de violence (ATF 143 IV 9 consid. 2.3.1 et les références). Plus l'infraction et la mise en danger sont graves, moins les exigences sont élevées quant au risque de réitération. Il demeure qu'en principe le risque de récidive ne doit être admis qu'avec retenue comme motif de détention. Dès lors, un pronostic défavorable est nécessaire pour admettre l'existence d'un tel risque (ATF 143 IV 9 consid. 2.9). Pour établir le pronostic de récidive, les critères déterminants sont la fréquence et l'intensité des infractions poursuivies. Cette évaluation doit prendre en compte une éventuelle tendance à l'aggravation telle qu'une intensification de l'activité délictuelle, une escalade de la violence ou une augmentation de la fréquence des agissements. Les caractéristiques personnelles du prévenu doivent en outre être évaluées (ATF 146 IV 326 consid. 2.3.1; arrêt du Tribunal fédéral 1B_668/2021 du 4 janvier 2022 consid. 4.1).

5.3. En l'espèce, le risque de fuite est patent, le recourant, de nationalité française et domicilié en France, n'ayant aucune attache avec la Suisse, ce qu'il ne conteste au demeurant pas. Le recourant invoque sa volonté de collaborer, mais, dans la mesure où il conteste toute implication dans les faits reprochés, on ne voit pas en quoi il aurait collaboré à l'instruction au point de réduire tout risque de fuite.

Le risque de réitération est également concret, le recourant ayant été condamné à plusieurs reprises, depuis 2010 – alors qu'il était mineur – pour vol en réunion, pour des actes de violence (rébellion, menace) et, plus récemment, pour détention de stupéfiants. Le pronostic est dès lors défavorable, la notoriété alléguée du recourant sur les réseaux sociaux et les allocations perçues en raison de son handicap ne l'ayant pas empêché de prendre part aux faits pour lesquels il a été arrêté.

L'existence des risques susmentionnés dispense d'examiner si le risque de collusion demeure après la libération de l'un des co-prévenus.

6.             Le recourant propose des mesures de substitution.

6.1. Conformément au principe de la proportionnalité (art. 36 al. 3 Cst., concrétisé par l'art. 237 al. 1 CPP), le tribunal compétent ordonne une ou plusieurs mesures moins sévères en lieu et place de la détention si elles permettent d'atteindre le même but que la détention, par exemple la fourniture de sûretés (al. 2 let. a), l'assignation à résidence ou l'interdiction de se rendre dans un certain lieu ou un certain immeuble (al. 2 let. c) et l'obligation de se présenter régulièrement à un service administratif (al. 2 let. d).

6.2. En l'occurrence, les mesures proposées ne sont pas de nature à pallier le risque de réitération, et aucune autre mesure ne paraît apte à écarter un tel risque, au vu des antécédents du recourant, ce qui scelle le sort de ce grief.

7.             Le recourant invoque une violation du principe de l'égalité de traitement, par suite de la mise en liberté de son co-prévenu.

7.1. Une décision viole le principe de l'égalité consacré à l'art. 8 al. 1 Cst. lorsqu'elle établit des distinctions juridiques qui ne se justifient par aucun motif raisonnable au regard de la situation de fait à réglementer ou qu'elle omet de faire des distinctions qui s'imposent au vu des circonstances, c'est-à-dire lorsque ce qui est semblable n'est pas traité de manière identique et ce qui est dissemblable ne l'est pas de manière différente; il faut que le traitement différent ou semblable injustifié se rapporte à une situation de fait importante (ATF 144 I 113 consid. 5.1.1 p. 115; 142 V 316 consid. 6.1.1 p. 323). Un prévenu détenu ne peut pas se prévaloir d'une inégalité de traitement avec un autre prévenu libéré si la loi a été correctement appliquée à son cas (arrêt du Tribunal fédéral 1B_298/2013 du 26 septembre 2013 consid. 4 in fine et les références).

7.2. En l'espèce, il a été retenu ci-dessus qu'aucune mesure de substitution n'était apte à pallier le risque de réitération au vu des antécédents du recourant. La situation de son co-prévenu n'étant pas similaire sur ce point – nonobstant l'existence d'une condamnation récente pour escroquerie –, le recourant ne saurait se prévaloir d'une inégalité de traitement.

8. Le recourant soutient que son état de santé serait incompatible avec sa détention.

8.1. À teneur des art. 197 al. 1 et 212 al. 3 CPP, les autorités pénales doivent respecter le principe de la proportionnalité lorsqu'elles appliquent des mesures de contrainte, afin que la détention provisoire ne dure pas plus longtemps que la peine privative de liberté prévisible. La possibilité d'un sursis, voire d'un sursis partiel, n'a en principe pas à être prise en considération dans l'examen de la proportionnalité de la détention préventive (ATF 133 I 270 consid. 3.4.2 p. 281-282).

8.2. Le principe de la proportionnalité exige aussi que la détention préventive soit levée lorsqu'en raison de l'état de santé du détenu, elle pourrait entraîner des conséquences graves, dépourvues de rapport raisonnable avec son but
(ATF 116 Ia 420 consid. 3a p. 423). Les principes développés par la jurisprudence en relation avec l'art. 92 CP s'appliquent par analogie en matière de détention provisoire ou pour des motifs de sûreté (ATF 108 Ia 69 consid. 3 p. 73). À teneur de celle-ci, l'exécution de la peine (art. 92 CP) ne peut en principe être interrompue que si le condamné se trouve, pour une période indéterminée, ou à tout le moins d'une certaine durée, incapable de subir l'exécution de sa peine pour des motifs très sérieux de santé (ATF 136 IV 97 consid. 5.1 p. 101 et les références). Le motif médical invoqué est toujours grave si la poursuite de l'exécution met concrètement en danger la vie du condamné. Dans les autres cas, la gravité requise peut être atteinte si la poursuite de l'exécution, sans menacer directement la vie du condamné, fait néanmoins courir à celui-ci un risque sérieux pour sa santé (ATF 136 IV 97 consid. 5.1 p. 102). Tel n'est pas le cas d'un détenu présentant un trouble dépressif récurrent, un trouble grave de la personnalité, et des troubles cognitifs se manifestant principalement par une désorientation spatio-temporelle et par des troubles mnésiques prononcés, le bilan étiologique indiquant la présence d'une démence d'origine mixte vasculaire et de type Alzheimer (arrêt du Tribunal fédéral 1B_149/2011 du 4 mai 2011 consid. 5.2).

Même en cas de maladie grave, il ne se justifie pas d'interrompre la détention si des soins appropriés restent compatibles avec l'exécution de la peine et le but de celle-ci (ATF 136 IV 97 consid. 5.2.1 p. 103; 106 IV 321 consid. 7a p. 324).

8.3. In casu, le recourant expose que la maladie dont il souffre rendrait particulièrement difficile sa détention. Il ne démontre toutefois pas que celle-ci serait incompatible avec son état de santé, même si la prison a incontestablement un effet "délétère", étant relevé que tous soins utiles lui sont prodigués à teneur des attestations produites.

Partant, la détention provisoire n'est pas illicite, de sorte que la demande d'indemnité est rejetée.

Au surplus, la détention ordonnée à ce jour respecte le principe de la proportionnalité, au vu de la peine concrètement encourue si le recourant devait être reconnu coupable des infractions reprochées.

9.             Le recours s'avère ainsi infondé et doit être rejeté.

10.         Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, qui comprendront un émolument de CHF 900.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03). En effet, l'autorité de recours est tenue de dresser un état de frais pour la procédure de deuxième instance, sans égard à l'obtention de l'assistance judiciaire (arrêts du Tribunal fédéral 1B_372/2014 du 8 avril 2015 consid. 4.6 et 1B_203/2011 du 18 mai 2011 consid. 4).

11.         Le recourant plaide au bénéfice d'une défense d'office.

11.1. Selon la jurisprudence, le mandat de défense d'office conféré à l'avocat du prévenu pour la procédure principale ne s'étend pas aux procédures de recours contre les décisions prises par la direction de la procédure en matière de détention avant jugement, dans la mesure où l'exigence des chances de succès de telles démarches peut être opposée au détenu dans ce cadre, même si cette question ne peut être examinée qu'avec une certaine retenue. La désignation d'un conseil d'office pour la procédure pénale principale n'est pas un blanc-seing pour introduire des recours aux frais de l'État, notamment contre des décisions de détention provisoire (arrêt du Tribunal fédéral 1B_516/2020 du 3 novembre 2020 consid. 5.1).

11.2. En l'occurrence, malgré l'issue du recours, un premier contrôle des charges par l'autorité de recours pouvait se justifier à ce stade de l'instruction.

L'indemnité du défenseur d'office sera fixée à la fin de la procédure (art. 135 al. 2 CPP).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Rejette le recours.

Met à la charge de A______ les frais de la procédure de recours, qui comprennent un émolument de CHF 900.-.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant (soit, pour lui, son défenseur), au Ministère public et au Tribunal des mesures de contrainte.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Mesdames Corinne CHAPPUIS BUGNON et Françoise SAILLEN AGAD, juges; Madame Olivia SOBRINO, greffière.

 

La greffière :

Olivia SOBRINO

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.


 

P/15911/2023

ÉTAT DE FRAIS

 

ACPR/

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

 

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

 

- délivrance de copies (let. b)

CHF

 

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

 

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

900.00

 

-

CHF

 

 

Total

CHF

985.00