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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/5873/2021

ACPR/798/2023 du 13.10.2023 sur OMP/9815/2023 ( MP ) , REJETE

Descripteurs : ASSISTANCE JUDICIAIRE;DÉNUEMENT
Normes : CPP.132

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/5873/2021 ACPR/798/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du vendredi 13 octobre 2023

 

Entre

A______, domicilié ______, représenté par Me B______, avocat,

recourant,

contre l'ordonnance de refus de nomination d'avocat d'office rendue le 26 mai 2023 par le Ministère public,

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a. Par acte déposé le 6 juin 2023, A______ recourt contre l'ordonnance du 26 mai précédent, communiquée par pli simple, par laquelle le Ministère public a refusé d'ordonner la défense d'office en sa faveur.

Le recourant conclut, avec suite de frais, préalablement, à l'apport de la procédure P/5873/2021 et à l'octroi de l'effet suspensif, et, au fond, à l'annulation de ladite ordonnance et à ce que la défense d'office lui soit accordée, dès le 8 novembre 2022.

b. Par ordonnance du 7 juin 2023 (OCPR/35/2023), la Direction de la procédure de la Chambre de céans a rejeté la demande d'effet suspensif.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. Le 12 mars 2021, C______ SA a déposé plainte contre A______ pour abus de confiance (art. 138 CP).

Elle lui reproche, en sa qualité d'administrateur de D______ SA, de s'être approprié, sans droit, une partie, voire la totalité, de l'or consigné auprès d'elle – conformément au contrat de consignation (Bullion Sale Agreement) conclu en 2016 –, en l'utilisant à son profit ou à celui d'un tiers, et de lui avoir ainsi causé un dommage.

Le prénommé a contesté les faits reprochés.

b. Le 8 novembre 2022, A______ a sollicité l'octroi de l'assistance judiciaire et la nomination d'office de Me B______.

c. Le 17 suivant, il a adressé sa demande d'assistance judiciaire, ainsi que les pièces relatives à sa situation financière, au Ministère public qui, le 21 suivant, l'a transmise au Service de l'assistance juridique en vue de l'établissement de celle-ci.

d. Selon le rapport établi, le 18 janvier 2023, par ledit Service – transmis à la Chambre de céans le 4 juillet 2023 – la situation financière de A______ lui permettait d'assumer par ses propres moyens les éventuels frais de justice et les honoraires d'un avocat, son disponible mensuel étant supérieur au minimum vital en vigueur à Genève majoré de 25 %.

Bien que A______ allègue ne disposer actuellement d'aucun revenu, il avait expliqué être "resté en très bons termes avec son ex-épouse et que cette dernière l'aid[ait] financièrement en cas de nécessité". En outre, un bordereau fiscal rectificatif faisait état d'une fortune mobilière de CHF 885'105.-, montant incompatible avec la notion d'indigence.

C. Dans l'ordonnance querellée, le Ministère public retient que, selon ledit rapport, A______ disposait des moyens nécessaires et que l'assistance d'un défenseur n'était pas justifiée pour la sauvegarde de ses intérêts.

D. a. Dans son recours, A______ reproche au Ministère public d'avoir retenu qu'il disposait des moyens nécessaires, sans en apporter la preuve ni la démonstration. Le Ministère public devait fournir le rapport de l'assistance juridique sur lequel il se fondait.

Par ailleurs, étant prévenu d'abus de confiance, infraction passible d'une peine privative de liberté de 5 ans au plus ou d'une peine pécuniaire, l'affaire ne pouvait pas être jugé de "peu de gravité", au sens de l'art. 132 al. 3 CPP.

b. Dans ses observations, le Ministère public se rapporte à son ordonnance, ainsi qu'au rapport de l'assistance judiciaire du 18 janvier 2023.

c. Dans ses écritures, A______ persiste dans son recours et conteste le rapport de l'assistance judiciaire.

À l'appui de ses dires, il produit une copie de sa déclaration fiscale 2022, datée du jour du dépôt de ses dernières observations, à teneur de laquelle il déclare n'avoir aucune fortune mobilière.

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP) – les formalités de notification (art. 85 al. 2 CPP) n'ayant pas été observées –, concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émaner du prévenu qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             La demande d'apport de la présente procédure est sans pertinence dans la mesure où elle est déjà à disposition de la Chambre de céans, de sorte qu'elle sera rejetée.

3.             Les faits et moyens de preuve nouveaux sont recevables devant l'instance de recours (arrêt du Tribunal fédéral 1B_550/2020 du 19 novembre 2022 consid. 2.1), de sorte que la pièce nouvelle produite par le recourant sera admise.

4.             4.1. L'art. 132 al. 1 let. b CPP soumet le droit à l'assistance d'un défenseur à deux conditions cumulatives (arrêt du Tribunal fédéral 1B_667/2011 du 7 février 2012 consid. 1.2) : le prévenu doit être indigent et la sauvegarde de ses intérêts doit justifier une telle assistance, cette seconde condition devant s'interpréter à l'aune des critères mentionnés à l'art. 132 al. 2 et 3 CPP.

4.2. La condition de l'indigence est réalisée si la personne concernée ne peut assumer les frais du procès sans entamer les moyens nécessaires à son entretien et à celui de sa famille (ATF 144 III 531 consid. 4.1; 135 I 221 consid. 5.1).

Pour déterminer l'indigence, il convient de prendre en considération l'ensemble de la situation financière du requérant au moment où la demande est présentée, celui-ci devant indiquer de manière complète et établir autant que possible ses revenus, sa situation de fortune et ses charges. Il y a lieu de mettre en balance, d'une part, la totalité des ressources effectives du requérant et, d'autre part, l'ensemble de ses engagements financiers. Concernant ces derniers, seules les charges réellement acquittées sont susceptibles d'entrer dans le calcul du minimum vital. Des dettes anciennes, sur lesquelles le débiteur ne verse plus rien, ne priment pas l'obligation du justiciable de payer les services qu'il requiert de l'État (ATF 135 I 221 consid. 5.1 p. 223).

4.3. S'il s'avère qu'il existe un disponible, celui-ci ne permet pas systématiquement d'exclure l'indigence ; encore faut-il qu'il permette de rembourser les frais du procès et les honoraires d'avocat sur une certaine période, l'intéressé devant ainsi être en mesure de réunir en quelques mois le montant nécessaire au paiement d'une provision d'avocat (Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, 2ème éd., Bâle 2019, n. 59a ad art. 132 CPP).

4.4. Selon le Tribunal fédéral, une majoration de 25 % du montant de base selon les normes d'insaisissabilité de l'Office des poursuites du requérant et de sa famille est admise dans le calcul du minimum vital en matière d'assistance juridique (ATF
124 I 1 consid. 2c; arrêts du Tribunal fédéral 1C_232/2019 du 18 juillet 2019 consid. 2.1; 2C_420/2017 du 22 mai 2017 consid. 3.1; 5A_328/2016 du 30 janvier 2017 consid. 4.2 ; 4A_432/2016 du 21 décembre 2016, consid. 6).

4.5. En l'espèce, c'est à juste titre que le Ministère public a considéré que le recourant n'était pas indigent.

En effet, il ressort du rapport de l'assistance juridique que, selon le bordereau fiscal rectifié produit par le recourant à l'appui de sa demande, ce dernier possédait une fortune mobilière de CHF 885'105.-, soit un montant disponible mensuel supérieur au minimum vital majoré de 25 %.

Or, bien que le recourant conteste ces éléments, en particulier, posséder, actuellement, une telle fortune, il n'explique pas le sort advenu à celle-ci. Ainsi, aucun élément probant ne permet de retenir, à ce stade, quelle aurait disparu. La seule déclaration unilatérale – dès lors que l'on ignore si l'administration fiscale l'admettra – du recourant, datée, qui plus est, du jour du dépôt de ses dernières observations, n'est pas un élément de nature à modifier ce qui précède. Si l'administration fiscale devait admettre la nouvelle situation de fortune alléguée, il appartiendrait, le cas échéant, au recourant de se tourner vers le Ministère public qui pourrait, dès lors, réexaminer sa situation financière.

Partant, la première condition, cumulative, de l'art. 132 al. 1 let. b CPP, n'étant pas remplie, point n'est besoin d'examiner si l'assistance d'un défenseur serait justifiée pour sauvegarder ses intérêts.

5.             Justifiée, l'ordonnance querellée sera donc confirmée.

6.             Le présent arrêt est rendu sans frais (art. 20 RAJ).

* * * * *


 


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Laisse les frais de la procédure de recours à la charge de l'État.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant, soit pour lui son conseil, et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Monsieur Christian COQUOZ et Madame Alix FRANCOTTE CONUS, juges; Madame Oriana BRICENO LOPEZ, greffière.

 

La greffière :

Oriana BRICENO LOPEZ

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).